Asymétrie d’information entre producteurs et consommateurs et agriculture durable
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Systèmes alimentaires / Food Systems
2021, n° 6. varia - Auteurs : Lafont (Anne-Laurence), Maurel (Carole)
- Pages : 95 à 118
- Revue : Systèmes alimentaires
Asymétrie d’information entre producteurs et consommateurs
et agriculture durable
Anne-Laurence Lafont
Carole Maurel
Université de Montpellier
Introduction
Depuis quelques années, de nombreux acteurs souhaitent promouvoir une agriculture plus durable. Toutefois, définir et identifier une agriculture durable (AD) est plus complexe qu’il n’y parait (CESE, 2016). Plusieurs définitions de l’AD coexistent, de celle de l’American Society of Agronomy (1989) à celle de l’OCDE fondée sur le Rapport Brundtland (2003), entre autres, chacune insistant sur son caractère économiquement viable couplé à la non-dégradation de l’environnement sur le long terme. Le réseau d’AD rajoute qu’elle est un « horizon vers lequel tendre plutôt qu’un état », et « ne se réduit pas à un label ou à un cahier des charges1 ». Il apparaît également réducteur d’analyser l’AD à travers des circuits courts (CC) ou certains modes de commercialisation (paniers ou marchés) qui seraient par essence plus durables, en opposition aux circuits dits longs (CL), sans pour autant le garantir. En effet, dans les faits, un produit commercialisé en CC cache une diversité de pratiques (Gauche et Chiffoleau, 2016). Un mode de commercialisation 96tel que le marché de plein vent peut relever d’un CC comme d’un CL (exemple du revendeur) et s’éloigner des principes d’une AD. Il en va de même pour le mode de production : une production en agriculture biologique, dont le label AB a été créé par les pouvoirs publics en opposition à l’agriculture conventionnelle (Fouilleux et Loconto, 2017), peut également être pratiquée de façon intensive, être vendue très loin de son lieu de production, ou encore ne pas contenir de dimension éthique l’éloignant de l’esprit d’une AD. Le rapport Agriculture Innovation 2025 souligne la nécessité d’analyser les enjeux actuels de l’AD davantage dans une approche filière, au-delà d’un mode de production ou d’un mode de commercialisation, ce à quoi ce travail cherche à contribuer. Dès lors, l’approche filière nous offre un cadre intégrateur en analysant différentes conditions pour qu’une agriculture soit durable du producteur au consommateur, tout en tenant compte d’une diversité de situations.
La littérature a déjà démontré l’existence d’une forte asymétrie d’information en matière de qualité (notamment les attributs éthiques et environnementaux) tout au long de la supply chain agroalimentaire (Starbird et Amanor-Boadu, 2007). L’approche filière de l’AD, moins duale que les approches systèmes alternatifs vs systèmes conventionnels ou que les approches mode de commercialisation vs production, permet de mettre en lumière la complexité de situations propices à une forte asymétrie d’information. Cela génère un problème de sélection adverse (Akerlof, 1970) limitant le développement de l’AD. En effet, cette asymétrie d’information peut induire le consommateur en erreur et le flou plus ou moins volontairement entretenu par certains acteurs peut freiner le développement d’achats favorisant l’AD. Ces situations de sélection adverse ne profitent ni aux producteurs et distributeurs engagés dans une démarche « durable », ni aux consommateurs soucieux de pratiquer une consommation socialement responsable. Elles favorisent au contraire les comportements opportunistes de la part de certains producteurs ou distributeurs.
Afin de pallier cette situation, les acteurs désireux de promouvoir leurs pratiques en faveur d’une AD, tout comme l’État, ont développé un ensemble de labels et autres certifications visant à promouvoir un signal de qualité sur ces produits (Chameroy, 2013) pour assurer la protection des consommateurs (Fouilleux et Loconto, 2017). Dans les faits, les labels sont potentiellement intéressants, mais présentent quelques 97limites : leur grand nombre, la diversité des pratiques qu’ils recouvrent, allant de la quasi-publicité à une information certifiée par une tierce partie elle-même accréditée par l’État. Enfin, les labels ont par essence une vision assez technique et duale peu adaptée à rendre compte de la multitude de situations d’une AD analysée dans un cadre filière.
Dans ce contexte, ce travail cherche à explorer les situations d’asymétrie d’information entre les acteurs de la filière qui favoriseraient des pratiques opportunistes vis-à-vis des consommateurs et proposer des solutions pour les réduire. Pour répondre à cette question, nous définirons l’AD dans un cadre intégrateur de la filière puis nous mettrons en lumière les sources d’asymétrie d’information possibles et le risque d’opportunisme associé pour chacun des acteurs de cette filière. Dans un deuxième temps, nous présenterons notre étude empirique exploratoire, ses résultats et quelques recommandations.
1. Définition de l’AD
dans le cadre de l’approche filière
1.1. Ancrage de l’AD dans les systèmes alternatifs
et l’agriculture biologique
L’AD trouve son ancrage dans les systèmes alternatifs que Deverre et Lamine (2010) définissent comme de « nouveaux liens entre production et consommation, ou entre producteurs et consommateurs, en rupture avec le système dominant ». Les AMAP ou les marchés paysans en constituent des exemples emblématiques. Le Velly (2017) adopte une définition plus large, y incluant non seulement les CC, mais également le commerce équitable ou encore l’AB. Cependant, il met également en évidence les limites qui consistent à opposer radicalement les systèmes alternatifs et les conventionnels : pour lui, ils sont parfois difficiles à distinguer nettement, tant leurs frontières sont mouvantes et les motivations revendiquées semblables.
Dans cet esprit, nous pouvons observer une tendance à la promotion des CC davantage associés à une approche alternative et durable de l’agriculture. Or, ces circuits présentent une grande diversité de pratiques 98qui semble encore peu prise en compte (Gauche et Chiffoleau, 2016) et ne garantit pas que la production soit respectueuse de l’environnement et de l’agriculteur (Ademe, 2017).
De même, l’AB, née en opposition à l’agriculture conventionnelle (Fouilleux et Loconto, 2017) est a priori un prototype d’agriculture alternative et durable, car respectueux de l’environnement et créé à l’origine dans un esprit de relations alternatives entre consommateurs et producteurs. Selon Desclaux et al. (2009), l’AB doit pourtant être considérée comme plurielle : la demande croissante rend nécessaire l’industrialisation, accroît le rôle de coopératives et grossistes, alors que les CC y restent minoritaires.
Adopter une approche filière de l’AD permettrait ainsi de dépasser une dimension duale et d’éviter les écueils liés aux oppositions tranchées.
1.2. Proposition d’un cadre d’analyse de l’AD orienté filière
Plusieurs définitions de l’AD coexistent, chacune insistant sur son caractère économiquement viable couplé à la préservation de l’environnement. En France, le réseau d’AD considère que l’AD invite à promouvoir et pratiquer une agriculture économiquement viable, saine pour l’environnement et socialement équitable. Le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation a construit un ensemble d’indicateurs de durabilité des exploitations agricoles (IDEA) ; cette méthode repose sur le respect de trois principes équipondérés : la durabilité agroécologique (principes agronomiques de l’agriculture intégrée ou agroécologie), la durabilité socio-territoriale (éthique de l’agriculteur et développement humain) et la durabilité économique (notions reliées à la fonction entrepreneuriale de l’exploitation).
Cette définition de l’AD et cette grille sont surtout focalisées sur les pratiques et les besoins des agriculteurs. Elles souffrent cependant de quelques insuffisances au regard d’une AD qui se doit d’être durable du point de vue des pratiques des agriculteurs, mais également tout au long de la filière. Par ailleurs, elle fait principalement reposer la dimension « équité » sur les épaules de l’agriculteur. Or, des leviers politiques territoriaux et/ou de filières semblent pouvoir également jouer un rôle déterminant.
C’est pourquoi nous proposons de l’étendre à l’ensemble de la filière, afin de définir une vision élargie de l’AD en identifiant les acteurs, mais aussi les modes de production et de commercialisation et les pratiques 99susceptibles de promouvoir ou au contraire limiter son essor. Notre cadre d’analyse est représenté dans le schéma suivant (figure 1) :
Fig. 1 – Définition de l’agriculture durable dans une approche filière.
Source : Auteurs.
Adopter cette approche filière nous conduit à considérer la durabilité de l’agriculture de la manière suivante : plus seulement du point de vue des producteurs et des labels standardisant leurs pratiques, mais également du point de vue des autres acteurs et de leurs pratiques.
L’objectif est que l’information quant aux pratiques en faveur d’une AD circule au mieux tout au long de la chaîne de valeur. L’originalité de cette lecture de l’AD réside dans la mise en lumière de son aspect multidimensionnel et complexe. Alors que certaines pratiques de l’AD relèvent de l’agriculteur, d’autres sont liées au transport, aux pratiques des distributeurs notamment vis-à-vis des producteurs avec, en bout de chaîne, un consommateur plus ou moins conscient de cette complexité.
2. Opportunisme, sélection adverse
et filière agricole
2.1. Asymétrie d’information et sélection adverse
L’approche filière de l’AD met en lumière une multiplicité d’acteurs et de comportements, engendrant un problème d’asymétrie d’information et un classique problème de sélection adverse, tout ceci en soulignant 100les imperfections des marchés (Akerlof, 1970). Comment garantir aux producteurs et/ou aux intermédiaires que leurs efforts en termes de durabilité soient bien signalés aux consommateurs ? Comment garantir au consommateur qu’il n’est pas victime de sélection adverse ? Réduire l’asymétrie d’information et renforcer la confiance semblent indispensables au développement de l’AD.
Si la confiance sous-tendue par la qualité de l’information au sujet du producteur peut être établie de façon assez directe dans des CC (Maidana Eletti, 2020), celle-ci est « intermédiée » dans le cadre d’achat en CL largement majoritaires. Dans cette optique, de nombreux labels se sont développés. Ces derniers présentent une source intéressante d’information, mais souffrent de plusieurs limites : leur très grand nombre, l’existence de labels différents censés labelliser la même chose ainsi qu’un manque d’harmonisation en termes de procédure et d’exigence. Ces labellisations recouvrent des pratiques très différentes, allant de labels auto-proclamés très proches de la publicité, à des labels avec cahier des charges certifiés par une tierce partie, elle-même accréditée par l’État. Cela peut induire une certaine confusion et réduire la confiance des consommateurs ; les études actuelles montrent qu’ils y sont peu sensibles (Binninger et al., 2014). Par ailleurs, les labels les « plus durables » ne sont pas forcément les plus connus. Le label AB est de loin le plus connu des consommateurs2, bien que moins exigeant que certains labels privés (bio cohérence, par exemple) sur certains aspects tels que l’émancipation des paysans. Cela renvoie également au rôle important joué par l’État dans la promotion d’un label (Fouilleux et Loconto, 2017). Enfin, le label renvoie aux limites d’une vision trop duale de l’AD.
2.2. Sources d’opportunisme chez les producteurs
Alors que le terme agriculteur semble davantage rattaché au modèle conventionnel, les systèmes agroalimentaires alternatifs se voient associés au modèle paysan (Pérez-Vitoria, 2010) pendant que des acteurs issus du monde conventionnel s’y intéressent de plus en plus, entretenant la confusion et posant la question de leur « conventionnalisation » (Chiffoleau, 2017). Le producteur, par ses choix techniques, mais aussi les valeurs qu’il véhicule, est le premier promoteur d’une AD ; encore faut-il identifier les comportements d’autres acteurs brouillant les pistes.
101Dès lors, l’opportunisme est présent : le producteur et/ou le revendeur passager clandestin peuvent entretenir une certaine confusion et profiter de l’engouement des consommateurs pour une agriculture plus durable. C’est la raison pour laquelle les marchés de plein air connaissent un grand succès alors que de nombreux produits qui y sont vendus proviennent de Rungis (Séronie, 2016). Ainsi, il y apparait une certaine tension entre producteurs et revendeurs. Une autre tension apparaît entre producteurs ne vendant que leurs produits, bio ou pas, et ceux qui y associent l’achat-revente, sans forcément le préciser aux consommateurs (Delfosse et Navarro, 2012).
2.3. Sources d’opportunisme chez les distributeurs
Les distributeurs occupent un rôle important au sein de la filière et peuvent donc, par leurs pratiques, contribuer ou non au développement de l’AD. En effet, l’essentiel des achats alimentaires passe par un mode de commercialisation intermédié et nécessitent un distributeur. La grande distribution (GD) classique réalise 64,4 % des ventes de produits alimentaires (Lavorata, 2019) ; ce constat est également vrai pour le bio avec 49 % des produits bio achetés en grande surface contre 34 % en magasin bio et 12 % en vente directe (Agence Bio, 20193).
Globalement, les distributeurs ont un rapport de force vis-à-vis des producteurs qui leur est favorable et détiennent beaucoup d’informations sur les pratiques des producteurs et/ou transformateurs. Dès lors, il existe une importante source d’opportunisme associée. Certains peuvent être tentés de passer pour des distributeurs promouvant l’AD alors qu’ils ne le font pas et ce d’autant plus facilement si le consommateur n’est pas en mesure de discriminer les pratiques. Inversement, ceux qui souhaitent vraiment développer des pratiques dans l’esprit de l’AD doivent trouver les moyens de les valoriser.
2.4. Sélection adverse pour le consommateur
Le consommateur est également un acteur important de la filière et de l’AD. L’un des principaux baromètres établis par GreenFlex montre qu’en 2017, 71,5 % des Français sont concernés par une consommation 102responsable. Plusieurs études ont tenté de créer des typologies de consommateurs en fonction de leur responsabilité et de ses déterminants (Lecompte et Valette-Florence, 2006 ; GreenFlex, 2017). Ces typologies ont pour point commun d’avoir été établies sur des discours et/ou des intentions. Or, dans les faits, les intentions semblent assez différentes des actes. En effet, les achats en faveur d’une AD demeurent très minoritaires. Les CC n’alimentent par exemple que 10 % de la consommation4.
Valor (2008) a fait émerger trois types d’obstacles à l’achat responsable : obstacles liés à la motivation, d’ordre cognitif et associés à des coûts de concrétisation. En effet, pour réaliser un achat responsable, il faut d’abord en avoir la motivation. Si cette motivation est présente, Valor (2008) examine alors les obstacles cognitifs (notamment le manque d’information disponible sur l’AD et les difficultés cognitives dans le traitement de l’information). Enfin, si les consommateurs ont franchi ces deux types d’obstacles, il en demeure un dernier concernant les coûts : le temps nécessaire pour obtenir l’information et le temps lié à l’acte d’achat lui-même. Une enquête du CRIOC (in Prigent-Simonin et Herault-Fournier, 2012) souligne le rôle fondamental de la proximité géographique dans le choix d’un magasin alimentaire. Un autre élément important est la quantité de l’offre, qui explique en partie le succès de la GD et de la conventionnalisation de l’AB.
Nous avons transposé ces différents critères aux consommateurs de produits agricoles afin d’analyser leurs comportements et en dégager un début de typologie. En effet, s’intéresser aux conditions de développement d’une AD nécessite de partir de critères d’achat concrets et plus spécifiquement des contraintes et préférences des consommateurs, que ce soit en termes de proximité, de diversité et du temps nécessaire pour obtenir l’information. Puis, il convient d’identifier leur niveau d’importance pour des catégories de consommateurs au regard de l’AD. La prise en compte de ces différents critères nous permet de qualifier le consommateur autour d’un continuum du plus militant à l’indifférent (tableau 1).
103Tab. 1 – Continuum des pratiques des consommateurs au regard de l’AD.
Critères |
du militant… |
… à l’indifférent |
Prix |
Pas important |
Important |
Facilité d’achat (proximité, diversité de l’offre, horaires…) |
Pas important |
Importante |
Motivation liée à l’AD |
Très importante |
Pas importante |
Recherche Information |
Importante |
Peu importante |
Source : Auteurs.
Ce continuum laisse la place à plusieurs situations intermédiaires de consommateurs assez motivés par l’AD sans être militants, faiblement informés, ne souhaitant pas y consacrer beaucoup de temps, et qui ne vont donc pas forcément pouvoir facilement concrétiser en acte d’achat. Dans cette typologie, l’information joue donc un rôle essentiel. Or, certains travaux mettent en avant un contexte généralisé de faible connaissance voire de scepticisme vis-à-vis des pratiques des distributeurs et des différents labels (Lavorata, 2019). D’autre part, comme vu précédemment, si les labels constituent une source d’information intéressante et efficace, en tant qu’aide-mémoire utile au moment de l’achat, ils recouvrent des réalités très disparates.
3. Rappel des objectifs
et méthodologie de recherche
3.1. Objectifs de l’étude empirique
Si l’AD trouve son ancrage dans les systèmes alternatifs et est parfois associée aux CC et aux modes de production AB, la complexité des situations et les différentes sources d’opportunisme identifiées nous conduisent à adopter une approche filière de l’AD. Qu’est-ce qui peut garantir à un consommateur que son achat favorise une AD tout en 104tenant compte de ses préférences ou contraintes ? Ces questions centrales pour le consommateur le sont également pour les producteurs et distributeurs désireux de développer l’esprit de l’AD au-delà d’un cercle restreint de consommateurs militants et localisés à proximité.
Notre étude exploratoire vise à approfondir ces questions. Son objectif est double :
(a) compréhension du degré de connaissance des pratiques des différents acteurs et mise en évidence de différents niveaux d’opportunisme et d’asymétrie d’information au sein d’une filière (4.) ;
(b) identification de pistes pour réduire les asymétries d’information et promouvoir l’AD (5.).
3.2. Méthodologie
3.2.1. Recherche documentaire
Afin d’analyser l’information communiquée par chaque catégorie de producteurs et distributeurs, nous avons d’abord analysé des sites internet et documentations (analyse lexicale et de contenu) des différents acteurs de la commercialisation de produits agricoles, tels que la GD, les paniers, les magasins bio, les marchés paysans, les ruches, afin d’identifier des différences de pratiques au sein de chaque catégorie. Lorsque des critères de transparence et de respect des producteurs et de l’environnement étaient mis en avant, cette analyse de site a été approfondie par des entretiens auprès des distributeurs et producteurs « fournisseurs » de ces intermédiaires.
3.2.2. Entretiens
Une série de 42 entretiens en face à face a également été menée, d’une durée moyenne 45 minutes, intégralement enregistrés et retranscrits. Après une première lecture, nous avons codé indépendamment les entretiens pour réaliser une analyse de contenu thématique (Bardin, 1993) sur Sphynx. L’étude a été menée dans deux départements du sud-est de la France. Le tableau 2, en annexe, présente les modes de sélection de chaque catégorie d’acteurs et les thématiques abordées lors des entretiens.
1054. Résultats : Degré de connaissance des pratiques
des différents acteurs et asymétrie d’information
4.1. Les producteurs
–Les producteurs entre eux : les producteurs « promoteurs d’une AD » identifient très bien « les soi-disant producteurs du bord de route ou des marchés de plein air qui ne sont en fait principalement que des revendeurs qui dupent les consommateurs » (Yann). Ils aimeraient pouvoir mieux se différencier, pas forcément pour vendre plus, mais par respect vis-à-vis du consommateur et de leur travail. Les petits producteurs certifiés bio qui fournissent des magasins spécialisés souhaitent également pouvoir mieux se différencier non seulement des producteurs conventionnels, mais également des producteurs bio de grande taille (une centaine d’hectares et plus) qui ont tous des pratiques de l’agriculture conventionnelle selon eux. Inversement, les gros producteurs certifiés bio estiment qu’ils contribuent au développement de l’AD, car, justement, ils répondent à une demande croissante.
–Les producteurs vis-à-vis des distributeurs : les petits producteurs certifiés bio identifient bien les distributeurs « vertueux ». Tout d’abord, beaucoup rejettent l’état d’esprit du système de la GD qui ne fait selon eux aucun cas de leur situation particulière : « ils ne connaissent pas nos contraintes et ne savent pas ce qu’est la terre… si je n’ai pas assez d’œufs parce qu’il a fait trop chaud, ils n’en ont que faire » (Flo). Notons cependant que certains agriculteurs durables demeurent contraints d’y recourir partiellement pour écouler leur production, mais ne souhaitent pas communiquer sur le sujet. Le primeur d’un magasin bio nous a expliqué qu’un de ses producteurs locaux a demandé au proche Leclerc de retirer son nom des producteurs en rayon, car il estimait que la GD traditionnelle était par nature en contradiction avec ses valeurs tout en reconnaissant qu’elle le traitait bien.
Les producteurs font également de nettes différences entre les magasins bio. Alors que tous les producteurs apprécient la nature des relations avec Biocoop, La Vie Claire et Chêne Vert, ils sont plus réservés sur Bio et Sens 106qui ne respecte pas leurs contraintes et se conduit de façon comparable à la GD classique. Pour ces producteurs, ce distributeur profite d’un certain engouement pour le bio et pourrait très bien se porter sur n’importe quel marché en croissance… Les ruches sont un peu décriées principalement à cause de l’aspect business de la plateforme (la ruche mère).
4.2. Les distributeurs
Certains réseaux spécialisés type Biocoop et La Vie Claire construisent leur modèle autour des valeurs de l’AD. Ces magasins connaissent très bien les différences de pratiques des uns et des autres. Si ces deux enseignes ont des stratégies différentes quant à l’intégration de la production de produits transformés, l’état d’esprit vis-à-vis du respect du producteur reste globalement le même (engagement sur la durée et sur un volume, fonds national de soutien, aide ponctuelle, organisation de leur pouvoir en les aidant à se regrouper) et un certain engagement à se fournir le plus localement possible est mis en avant. Ces réseaux sont agacés par l’apparition de comportements opportunistes de la part de la GD autour du bio, mais également d’autres magasins spécialisés bio (type Bio et Sens) qui n’ont pas les mêmes valeurs et qui se comportent « totalement dans l’état d’esprit des grandes surfaces classiques ». Ces dernières reconnaissent volontiers que la préoccupation majeure de la centrale d’achat pour la GD est la nécessité d’avoir du volume pour satisfaire la demande. Cependant, elles estiment contribuer au développement d’une AD via la vente accrue de produits bio dont la majorité est désormais vendue en grande surface. Par ailleurs, la GD met en place vis-à-vis des producteurs des contrats d’approvisionnement avec des agriculteurs locaux et prévient la dépendance de ses fournisseurs en les obligeant à une diversification de débouchés.
4.3. Les consommateurs
Alors que notre recherche documentaire et nos entretiens auprès des producteurs et distributeurs semblent montrer des différences de pratiques et de l’opportunisme de la part de certains, les consommateurs les identifient-ils ou sont-ils victimes d’asymétrie d’information ?
Nos résultats confirment que d’une manière générale les consommateurs sont « victimes » d’une asymétrie d’information. Plus il se qualifie de 107responsable, plus le consommateur semble informé, mais globalement, sauf à être un pur militant, il fait de nombreuses confusions.
Ainsi, de nombreux consommateurs croient consommer responsable en achetant des produits bio sans différencier ni les pratiques des distributeurs vis-à-vis des producteurs ni leur volonté de privilégier une provenance la plus locale possible (à la fois pour la dimension carbone et la dimension socio-économique du territoire). Ils ne font pas de différence entre le bio de la GD et le bio des magasins spécialisés, et encore moins entre les différents magasins spécialisés. Les consommateurs interrogés ne semblent donc pas percevoir l’éventuelle différence d’éthique mise en lumière par nos recherches documentaires et nos entretiens.
Par ailleurs, peu d’entre eux différencient un producteur-revendeur d’un simple négociant. Cette asymétrie d’information semble donc bien pouvoir être à l’origine d’un phénomène de sélection adverse. Un consommateur soucieux de privilégier une consommation locale et respectueuse va au marché ou chez le primeuriste local sans pouvoir discriminer ni valoriser les différentes pratiques.
Afin de détailler nos propos, sur la base du continuum proposé en tableau 1, enrichi par nos entretiens et notre recherche documentaire, et en appui de la partie théorique, nous proposons une typologie affinée de ces consommateurs (tableau 3, en annexe). Elle est fondée sur leur tendance à orienter leurs achats en fonction du caractère écologique de la production (centré production écologique), et/ou du respect du producteur et de sa pérennité (centré producteur). Au regard des autres typologies, celle-ci apporte un éclairage sur le niveau de la connaissance du consommateur (bien-être du producteur, pratiques de production et mode de commercialisation) et l’importance éventuelle accordée à l’information.
–Les militants : centrés production écologique et producteur. Ils ont un assez bon degré de connaissance des pratiques des producteurs. Ils sont constitués en un réseau de consommation responsable le plus souvent en achat direct, et sont prêts à y consacrer du temps ; le manque de liberté (AMAP) n’est pas vu comme une contrainte. Parmi eux, certains préfèrent consommer local et faire confiance, ou connaissent (notamment dans des régions productrices) le producteur, même s’il n’est pas labellisé en agriculture biologique.
108–Les écolos : centrés production écologique, plutôt local et moins centré producteur. Ils ont pris le temps de faire une démarche essentiellement pour leurs fruits et légumes frais (en passant soit par des paniers type locavore, soit par des paniers bio auprès des producteurs, soit par des magasins spécialisés). Le bio, c’est autant pour la santé humaine que la santé de la planète. L’intérêt pour l’agriculteur ne fait pas partie des critères principaux d’achat, mais les consommateurs y sont quand même sensibles, car pour eux, il est important que les agriculteurs « vivent correctement de leur travail » sans pour autant avoir envie d’avoir une relation directe. Par ailleurs, ils ne font pas tous de différence entre le bio de la GD et des magasins spécialisés et encore moins entre les pratiques des différents magasins bio spécialisés. Ils ont envie de favoriser une AD, mais souffrent d’un manque de connaissance et d’une forte asymétrie d’information. Le label AB est souvent cité comme étant une sorte de juge de paix, dans le sens où il est considéré comme crédible.
–Les indifférents : peu centrés production écologique et peu centrés producteur. Lorsqu’ils consomment du bio, c’est principalement pour la dimension santé et moins pour l’aspect environnement. Leur consommation en bio se fait alors principalement en GD. Lorsqu’on les interroge sur le sort des agriculteurs, ils disent y être sensibles, mais globalement n’envisagent pas réellement qu’ils puissent vraiment faire quelque chose à titre individuel.
5. Discussion :
comment réduire cette asymétrie d’information ?
5.1. Partir du consommateur
Compte tenu de ces situations d’opportunisme et d’asymétrie d’information, cette étude confirme qu’un point important est la mise à disposition d’une information pertinente et compréhensible avant tout pour le consommateur. Plutôt que de favoriser une information qui part des initiatives des acteurs en amont de la filière et qui demeure floue 109pour le consommateur, il faut partir du consommateur : ses habitudes, ses critères d’achat et ses contraintes, que ce soit en termes de temps pour réaliser ses achats que pour acquérir de l’information. Pour cela, il nous semble nécessaire de :
–tenir compte des coûts de transaction du consommateur et envisager tous les circuits et modes de commercialisation pour aller au-delà du consommateur militant et/ou de la vente directe. Cela va dans le sens d’un rôle avéré des CL et de la GD dans l’AD ;
–l’informer clairement sur le lieu de vente et le produit. Pour que cette information lui soit facilement accessible, elle doit se situer dans le cadre de ses achats tout en tenant compte de sa versatilité et de son inconsistance, car variant et articulant différentes motivations de consommation (Dubuisson-Quellier, 2018). Cela laisse envisager la coexistence possible sur un même lieu de produits très orientés AD avec d’autres qui le sont moins.
5.2. Vers l’agriculteur, en établissant
une note visible sur le lieu de vente
La clarté de l’information peut passer par une note facilement compréhensible. En effet, les labels, même s’ils permettent de reconnaître le respect ou non d’un cahier des charges, présentent une approche dualiste, ne laissant pas de place à divers degrés de compatibilité avec une vision de l’agriculture. Au contraire, la note le permet et semble donc bien adaptée même si, pour être établie, elle peut s’appuyer entre autres sur le respect de certaines normes ou labels. Pour notre part, nous distinguons deux situations possibles.
–En GD : À partir du moment où l’on considère que des produits compatibles avec une AD peuvent également être commercialisés par les CL et/ou en GD, une note pourrait être établie. Elle permettrait non seulement d’informer des pratiques AD des producteurs, mais également d’informer le consommateur sur les pratiques des distributeurs vis-à-vis de leurs producteurs et, plus généralement, d’analyser leur critère de choix d’un fournisseur (local, social, environnemental). Elle permettrait de réduire fortement l’asymétrie d’information dont souffre le consommateur, puisque 110–celui-ci disposerait d’information non seulement sur les pratiques de production, mais également sur les caractéristiques des autres acteurs de la filière.
–En CC type marchés : Pour la vente qui ne passe pas par un magasin, il pourrait être intéressant de favoriser l’émergence d’une note de producteurs locaux responsables autour de critères AB, mais également des critères de proximité, pour se distinguer des simples revendeurs ou producteurs ne respectant pas ces critères. Le consommateur pourrait, là encore, faire ses choix d’achat en ayant été informé au préalable sur les caractéristiques des autres acteurs. Cette note va plus loin que le rapport CESE 2016, qui ne préconise qu’une identification permettant de valoriser les producteurs locaux vs distributeurs, mais sans mettre en valeur les pratiques de production respectueuses de l’environnement. Elle va également plus loin que l’initiative « Ici.c.local » qui est un principe d’étiquetage. En effet, cette note privilégierait non seulement une production locale, mais également respectueuse de l’environnement.
5.3. et reposant sur une vision élargie de la méthode IDEA
La construction de la note se ferait dans le cadre d’une approche filière que nous avons définie et pourrait, par exemple, reprendre des éléments de la grille IDEA tout en l’adaptant. En effet, la dimension environnementale de la note reposerait non seulement sur les modes de production, mais également sur la distance parcourue et le mode de transport. Nous pensons également que la dimension « équité » ne doit pas reposer sur les seuls agriculteurs, mais également sur les territoires et l’ensemble de la filière et notamment la façon dont les distributeurs agissent vis-à-vis des producteurs. Cette équité pourrait notamment reposer sur des labels Nord-Sud ou Nord-Nord tels qu’Agri-éthique France pour les CL.
5.4. promue par les pouvoirs publics
Afin de limiter le scepticisme des consommateurs soulevé par la littérature, cette note serait construite et certifiée par les pouvoir publics. Cette indépendance pourrait limiter les allégations des acteurs intermédiaires à l’instar de ce qui a été fait pour l’établissement d’une note énergétique 111sur l’électro-ménager. Les pouvoirs publics pourraient s’engager dans une campagne de sensibilisation et d’information. Cette note reposerait sur des critères transparents et consultables par les consommateurs et/ou leurs représentants. La liste des critères et la façon d’agréger ensuite les différentes dimensions de la durabilité soulèvent des problèmes méthodologiques qui demeurent importants, mais il n’en reste pas moins qu’un système de notation, par sa souplesse, offre une grande adaptabilité à la multitude des situations rencontrées.
Conclusion
Cette étude avait pour double objectif de comprendre le niveau d’asymétrie d’information et d’opportunisme des acteurs de la filière agricole au regard de l’AD.
Les apports de cette étude sont de plusieurs ordres. Tout d’abord, le recours à l’approche filière a permis de considérer les points de vue de (presque) tous les maillons de la filière agricole des producteurs aux consommateurs. Par ailleurs, en mobilisant la théorie de l’agence, nous avons pu montrer que les acteurs en amont avaient du mal à signaler une offre proche de l’AD auprès des consommateurs. De plus, nous avons établi une typologie des consommateurs qui s’appuie non pas sur les intentions et déclarations, mais davantage sur les pratiques concrètes et contraintes des consommateurs avec un focus sur le rôle de l’information. Nous avons ainsi pu montrer que seuls les consommateurs militants semblaient être correctement informés alors que les « écolos » qui seraient susceptibles de promouvoir une AD ne l’étaient pas suffisamment. Dès lors, promouvoir une information qui leur soit destinée et qui soit exhaustive du point de vue de l’AD permettrait son développement. Ainsi, nous proposons une solution qui va au-delà du recours aux labels et nécessite le soutien des pouvoirs publics. Cette condition nous semble être le préalable à la mise en place d’une démarche de promotion et de développement de grande envergure de l’AD. Il ne s’agit pas d’ajouter un énième label, mais, au contraire, de permettre de faire émerger une note AD qui serait aussi connue que le label AB tout en étant plus 112exhaustive, car englobant une démarche d’un bout à l’autre de la filière avec l’ensemble des acteurs et des critères retenus.
Cette étude présente cependant plusieurs limites. La première tient à son caractère exploratoire qui mériterait d’être confirmé par une étude quantitative auprès des consommateurs. Néanmoins, l’approche qualitative nous a été utile pour comprendre en profondeur la nature des relations et des informations entre les différents acteurs de la filière. Une deuxième limite tient au fait que nous ne traitons pas le point de vue du transformateur (ex. : cantines ou restaurants), interface entre producteur et consommateur final.
Enfin, une perspective intéressante serait d’élargir l’AD à l’alimentation durable, combinant cette note de durabilité de l’AD avec une note de type Nutri-score tout en soulignant les limites méthodologiques liées au poids à donner à chacune des dimensions.
113Références bibliographiques
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115ANNEXE 1
Mode de sélection et thématiques abordées
lors des entretiens
Mode de sélection |
Thématiques abordées |
|
Producteurs (10) |
Sélectionnés selon leur mode de production et si fournisseurs des distributeurs que nous avons rencontrés. Nous avons identifié des producteurs proches de notre définition de l’AD (petite taille, vente directe ou magasin bio en direct) ainsi que des producteurs AB plus conventionnels (grande taille, GD* centrale de magasin bio). |
Lien avec l’AD ? Pratiques ? Ce qu’ils recherchent en produisant ? Modes de commercialisation utilisés ? Pourquoi ? Identifient-ils des différences de pratiques de la part des distributeurs ? Constatent-ils des sources et pratiques d’opportunisme ? |
Distributeurs (8) |
Cibles : GD, magasins bio spécialisés, AMAP, paniers et ruches. Nous avons analysé 3 réseaux de magasins 100 % spécialisés dans le bio (Biocoop, la Vie Claire, Bio et Sens) et un indépendant (Le Chêne vert). |
Quelles différences de pratiques au regard de l’AD (critères de choix de producteurs, relations avec les producteurs, place du local) ? Présence de discours marketing profitant de l’engouement du sain qui ne se traduisent pas en réelles pratiques favorisant l’AD ; Les consommateurs sont-ils dupes ou pas ? |
116
Consommateurs (24) |
Sélectionnés en situation d’achat : récupération de paniers bio et locaux, achat de leurs fruits et légumes chez le maraicher du village, dans un magasin spécialisé ou encore en grande surface. Les individus de notre échantillon sont variés tant en termes de sexe (11 hommes et 13 femmes), d’âge (de 22 à 65 ans), de situation maritale et familiale, de niveau d’études (équivalent niveau bac au doctorat) ou d’occupation ou revenus. |
Que savent-ils de l’AD ? Du bio ? Label ou pas label ? Où achètent-ils ? Quels circuits utilisent-ils ? Pourquoi ? Quels sont leurs critères d’achat ? |
*GD : grande distribution
Source : Auteurs.
117Annexe 2
Continuum affiné des consommateurs
au regard de l’agriculture durable
Importance dans leurs critères d’achat |
Militant |
Écolo |
Indifférent |
|
Prix |
Importance accordée au prix |
Pas important |
Moyennement important |
Important |
Facilité d’achat |
Importance accordée à la facilité d’achat |
Important |
Important |
Important |
Motivations liées à l’AD |
Importance accordée au bien-être du producteur |
Très important |
Important |
Important |
Importance accordée à une production respectueuse de l’environnement |
Important |
Important |
Peu Important |
|
Importance du label pour choisir (type AB) |
Pas important |
Moyennement important |
Moyennement important |
|
Recherche information |
Connaissance du bien-être du producteur |
Très important |
Important |
Peu important |
Connaissance des différences de pratiques de production (distinction bio supermarché peu centrée sur le bien-être du producteur et le local et bio local et/ou paysan) |
Très important |
Important |
Peu important |
|
Connaissance des différences à l’intérieur d’un même mode de commercialisation |
Important |
Moyennement important |
Peu important |
|
118
Modes de commercialisation privilégiés |
AMAP, paniers type locavore, vente à la ferme, magasin de producteurs, magasins spécialisés |
Paniers type locavore, paniers bio auprès des producteurs, magasins spécialisés, GD, marché primeur |
GD marché primeur |
Source : Auteurs.
1 http://www.agriculture-durable.org/lagriculture-durable/quest-ce-que-cest (consulté le 13/07/2021).
2 https://www.lsa-conso.fr/les-labelsfont-ils-vendre,292761 (consulté le 13/07/2021).
3 https://www.agencebio.org/wp-content/uploads/2019/06/DP-AGENCE_BIO-4JUIN2019.pdf (consulté le 13/07/2021).
4 https://www.terre-net.fr/actualite-agricole/economie-social/article/donner-toute-leur-place-aux-circuits-courts-202-142730.html (consulté le 13/07/2021).
- Thème CLIL : 3306 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Économie de la mondialisation et du développement
- ISBN : 978-2-406-12705-5
- EAN : 9782406127055
- ISSN : 2555-0411
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-12705-5.p.0095
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 05/01/2022
- Périodicité : Annuelle
- Langue : Français
- Mots-clés : agriculture durable, mode de commercialisation, consommateur socialement responsable, asymétrie d’information, opportunisme.