Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Stratégies d’élargissement du lectorat dans la fiction narrative. xve et xvie siècles
- Pages : 461 à 467
- Collection : Rencontres, n° 476
- Série : Colloques, congrès et conférences sur la Renaissance européenne, n° 110
Résumés
Pascale Mounier, « Introduction »
Des procédures d’élargissement du lectorat sont mises en œuvre dès les premiers temps de l’imprimé. Le passage en revue des fictions narratives en langue française selon leur degré d’invention montre qu’il existe des spécificités mais révèle aussi des points de convergence dans les démarches des acteurs de l’écriture et de l’édition. Trois ensembles de stratégies semblent en l’occurrence se dégager dans la programmation d’un public anonyme et possiblement infini en nombre.
Ana Pairet, « “L’art et ingénieuse pratique de l’impression”. Le discours préfaciel dans les éditions illustrées d’Olivier de Castille et Artus d’Algarbe »
Le péritexte des éditions illustrées d’Olivier de Castille et Artus aux xve et xvie siècles témoigne de la volonté d’élargir le lectorat des romans chevaleresques. L’ouverture discursive et l’épilogue du roman fournissent des renseignements précieux sur les stratégies de destination du livre illustré à la période des incunables.
Véronique Duché, « “Aux Dames de la court”. Le lecteur (la lectrice ?) des fictions sentimentales en France au xvie siècle »
Le corpus français des fictions sentimentales traduites de l’espagnol au cours de la première moitié du xvie siècle offre un matériau propice à l’étude de la réception. Le paratexte de ces courts romans met en valeur la dimension féminine du lectorat et sollicite une lectrice que convoitent les libraires tout comme les moralistes et les adeptes du bon goût en matière de rhétorique. Ces novelas ont pourtant de quoi satisfaire un public élargi, bourgeois comme courtisans, dames comme chevaliers.
462Nora Viet, « La nouvelle française entre cour et ville (1558-1559). Stratégies de la destination dans les Histoires des Amans fortunez de Marguerite de Navarre et les Nouvelles Récréations et joyeux devis de Bonaventure des Périers »
L’article examine un corpus de recueils narratifs imprimés entre 1558 et 1559, pour tenter de comprendre comment les discours péritextuels sur la destination du livre structurent l’offre éditoriale en ces années. Deux tendances se dessinent, analysées à partir de deux recueils exemplaires : les Histoires des Amans fortunez de Marguerite de Navarre, offertes à un public de cour, et les Nouvelles Récréations et joyeux devis de Bonaventure des Périers, destinées à un lectorat plus large.
Francesco Montorsi, « Le manuscrit français trouvé à Constantinople. Dom Flores ou comment défendre le roman de chevalerie à l’ombre de Jacques Amyot »
Dernier ouvrage de Herberay des Essarts, Dom Flores (1552) se présente comme le remaniement d’un manuscrit en ancien français bien qu’il constitue l’adaptation d’un libro de caballerías. Cette étude s’attache à élucider la préface, qui réinvestit en le détournant le motif du manuscrit trouvé. Peu connu, ce prologue contient une réponse implicite aux critiques de Jacques Amyot ainsi qu’une défense originelle d’un genre médiéval, ici légitimé par le recours au concept de patrimoine national.
Bernd Renner, « “Celui qui veult tout, preigne tout”. Stratégies d’élaboration du lectorat idéal dans la satire renaissante »
Cette étude propose un survol de quelques paratextes importants de textes satiriques influents de la première modernité pour examiner le rapport entre auteur et lecteurs dans un contexte d’échange marqué par dialogisme et polémique. Notre parcours s’étendra du corpus multilingue de la Nef des fous à la Satyre Menippée, en passant notamment par Rabelais, Des Périers, Marcourt, Henri Estienne, Bèze, la Mappe-monde nouvelle papistique et Aubigné.
Fanny Maillet, « Du roman au titre de librairie. étude des procédés péritextuels des éditeurs du Clamadès pour faciliter l’accès à l’œuvre »
Le roman d’Adenet le Roi a fait l’objet, au xve siècle, de deux mises en prose, dont une seulement, le Livre de Clamadés, a bénéficié d’une diffusion 463imprimée. À la faveur d’un inventaire mis à jour des éditions du Clamadés, nous proposons d’analyser les procédés péritextuels jouant, délibérément ou non, en faveur de la diffusion de l’œuvre et de son message, depuis les incunables lyonnais jusqu’aux imprimés de la galaxie Trepperel dans le premier tiers du xvie siècle.
Maria Colombo Timelli, « Une diffusion renouvelée ? Quelques remarques sur le passage à l’imprimé d’un corpus “médiéval” »
Le passage à l’imprimé de certains « romans » médiévaux a nécessairement élargi le lectorat. Un corpus de dix « mises en prose » imprimées aux xve et xvie siècles fournit quelques indices, implicites (page de titre, bois gravés, organisation en chapitres, table) ou explicites (allusions aux lecteurs, déclarations préliminaires), qui prouvent la volonté et/ou la conscience d’un tel changement. La prise en compte de la tradition manuscrite permet de vérifier où se situe le moment de fracture.
Sergio Cappello, « Les stratégies éditoriales de Michel Le Noir (1486-1520), éditeur de romans »
Le recensement de la production de Michel Le Noir (1486-1520) et l’étude de ses pratiques éditoriales permettent de définir les stratégies éditoriales de ce libraire imprimeur qui se revèle être l’un des plus actifs de sa génération dans le domaine de l’édition de romans, tant médievaux que « nouveaux ». Les stratégies de destination large mises en place pour leur diffusion auprès d’un public étendu ont recours tant au métadiscours qu’aux contenus, textuels et matériels, des volumes publiés.
Gaëlle Burg, « De la chronique au roman. La transmission du Florimont au xvie siècle (Jean Longis, Paris, 1528 et Nicolas Mulot, Rouen, s. d.) »
Le texte du Florimont imprimé, dont aucun manuscrit ne subsiste, est l’œuvre d’un petit seigneur champenois ayant réactualisé une version médiévale du roman. L’article s’intéresse aux modalités de récupération et d’adaptation du texte par l’instance éditoriale dans la perspective d’une diffusion large. L’analyse du système de repérage textuel et de la réception générique de l’œuvre mettra en lumière l’émergence progressive d’une pratique plus moderne et démocratisée de la lecture.
464Helwi Blom, « De “nouveaux lecteurs” pour les “vieux romans” ? Nicolas Bonfons, Benoît Rigaud et l’édition des romans de chevalerie à la fin du xvie siècle »
Vers la fin du xvie siècle, deux éditeurs dominaient la production française de romans de chevalerie : Benoît Rigaud à Lyon et Nicolas Bonfons à Paris. Une étude comparative de leurs éditions (titres proposés, mise en livre, éléments péritextuels, aspects matériels) permet d’analyser les stratégies éditoriales développées par ces deux hommes et d’interroger de façon critique les idées reçues sur le développement du marché du livre bon marché et sur le déclin du genre « chevaleresque » à l’époque.
Ellen Delvallée, « Nouveaux lecteurs et nouvelles lectures des Épîtres de l’Amant vert de Jean Lemaire de Belges »
Alors que la première Épître de l’Amant vert, destinée à Marguerite d’Autriche, est chargée d’allusions personnelles, Lemaire manifeste dans la seconde une plus grande ambition littéraire, ce qui correspond à la prise en compte d’un public plus large, notamment celui de la cour de France, qu’il rejoindra bientôt. Lorsque ces deux épîtres sont publiées, à la suite des Illustrations, elles acquièrent à la fois un nouveau public, amateur d’histoire, et des échos personnels et politiques inédits.
Christine de Buzon, « Destination large des premiers Amadis français. Des difficultés surmontées »
La destination exceptionnellement large des premiers livres d’Amadis en France a pu se soutenir par les différentes stratégies de Nicolas de Herberay des Essarts et des libraires-imprimeurs. Elles ont permis de surmonter différentes difficultés. à l’œuvre de Montalvo, Herberay a opposé un Amadis remarquable par une certaine fluidité de la langue, une précision des aides à la lecture dont un Trésor, une modernisation du vocabulaire de cette histoire d’armes et d’amours protégée par la féerie.
Magali Jeannin, « Le Sixiesme Livre d’Amadis de Gaule et la réception programmée du “nouveau” récit chevaleresque »
Cette contribution s’intéresse aux indices paratextuels, péritextuels et textuels programmant la réception contemporaine et a posteriori du Sixiesme 465Livre d’Amadis de Gaule (1545), traduit par Herberay des Essarts. Herberay s’attache à répondre aux attentes de son lectorat et programme la réception de l’œuvre selon deux orientations : un retour aux fondamentaux du genre d’une part, et un renouvellement d’autre part, en adéquation avec le contexte politique, esthétique, et linguistique.
Hélène Rabaey, « Les presses lyonnaises à la conquête d’un lectorat large. Les traductions de J. Louveau et G. de La Bouthière de L’Âne d’or d’Apulée »
Nous étudions les deux traductions françaises de L’Âne d’or d’Apulée parues à Lyon en 1553 afin de définir à partir des paratextes, de la mise en page et des stratégies de traduction les projets éditoriaux menés par Jean Temporal et Jean de Tournes et Guillaume Gazeau en collaboration avec leurs traducteurs. L’édition de Temporal nous semble particulièrement emblématique d’une volonté de réunir, dans un même ouvrage, une multiplicité de lectures afin d’élargir au maximum le spectre de son lectorat.
Philippe Rabaté, « La première traduction du Lazarillo de Tormes. Entre célébration des facéties espagnoles et stratégie d’adaptation au lectorat français »
Cette contribution étudie la stratégie d’adaptation en langue française du Lazarillo de Tormes, récit anonyme castillan de 1554. Après en avoir rappelé la nature énigmatique, l’article étudie différents types d’écart entre le texte original et sa première traduction française, publiée en 1560 à Lyon. Si celle-ci fait preuve d’un souci de fidélité, elle simplifie néanmoins certains épisodes polémiques de l’œuvre espagnole afin d’en favoriser une réception comique.
Anne Boutet, « Le modèle boccacien, des Cent nouvelles nouvelles dites bourguignonnes au Grand parangon des nouvelles nouvelles. Du “déjà vu” au “déjà lu” ? »
La présente analyse propose une lecture des modalités de reprise du Décaméron, dans trois récits tirés des Cent nouvelles nouvelles bourguignonnes, des Cent nouvelles nouvelles de Philippe de Vigneulles et du Grand parangon des nouvelles nouvelles de Nicolas de Troyes. Cette lecture offre un aperçu de stratégies auctoriales d’élargissement du lectorat, le « déjà vu » (reconnaître des intrigues, des personnages, des procédés comiques) se confrontant au « déjà lu » (relire des nouvelles de Boccace).
466Thibault Catel, « Des discours offerts aux “simples et peu savants” et à la noblesse. Les stratégies de destination attrape-tout des histoires tragiques de Belleforest »
Ce travail s’intéresse aux stratégies de diffusion mises en place par Belleforest dans les sept tomes d’histoires tragiques qu’il signe de son nom (1559-1582). L’étude de l’adaptation par Belleforest des nouvelles de Bandello puis d’historiographes permet de mettre en lumière l’ambiguïté d’une stratégie qui repose à la fois sur la restriction et l’élargissement du lectorat et qui s’explique en partie par la nouveauté d’un genre en quête de légitimité et à la visée parénétique.
Pascale Mounier, « Dispositifs de lisibilité minimale dans Alector de Barthélemy Aneau »
Alector, Histoire fabuleuse possède tous les traits du roman humaniste. Certaines de ses composantes restent cependant compréhensibles et source de plaisir pour tout un chacun. Quelles sont ces procédures de lisibilité minimale ? Énoncées dans le paratexte ou mobilisées dans le récit lui-même, trois d’entre elles consistent respectivement dans l’affichage de la possibilité d’une lecture imparfaite de l’œuvre, dans le caractère merveilleux des aventures et dans l’énoncé de propos sentencieux.
Grégoire Holtz, « Le récit du voyageur malheureux. Esquisse pour une poétique d’un genre européen à la Renaissance »
Cet article étudie un genre qui se situe au croisement des récits de voyages « historiques » et des fictions mettant en scène les tribulations de leurs personnages. Ce sous-genre présente des caractéristiques communes qui dépassent les frontières : ces récits de voyageurs malheureux partagent une énonciation qui alterne entre les appels à la pitié et la raillerie, ainsi qu’un métadiscours qui, dans le sillage d’Ulysse, conforte l’ethos du voyageur comme conteur de ses mésaventures.
Nancy Oddo, « Vulgariser la dévotion à la Renaissance. Le Voyage du Chevalier errant (1557) de Jean de Cartheny »
Dans la seconde moitié du xvie siècle, à Anvers, l’édition répétée et soignée d’un récit écrit par un carme, Jean de Cartheny, semble viser un public large 467en combinant plusieurs éléments : mise en livre facilitant la lecture, solide appareil paratextuel, et poétique particulière concourent à la diffusion large d’un ouvrage de vulgarisation catholique dans une zone de troubles religieux. Mais le détail du texte révèle une idéologie moins virulente et un public plus choisi qu’il n’y paraît.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-10634-0
- EAN : 9782406106340
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10634-0.p.0461
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 22/03/2021
- Langue : Français