![Samain (Albert) - Œuvres en prose - Note sur l'établissement du texte](https://classiques-garnier.com/images/Vignette/ChcMS02b.png)
Note sur l'établissement du texte
- Publication type: Book chapter
- Book: Œuvres en prose
- Pages: 21 to 23
- Collection: Nineteenth-Century Library, n° 76
NOTE SUR L’ÉTABLISSEMENT DU TEXTE
Cinq contes de Samain ont été prépubliés de son vivant dans des revues, ce qui permet de les classer chronologiquement, et c’est ainsi qu’on les trouvera ici. « Le Bout de l’oreille » et « La Jarretière » ont paru dans Le Bonhomme flamand de Lille les 2 octobre et 6 novembre 1881 ; « Xanthis ou la Vitrine sentimentale », « Divine Bontemps » et « Hyalis, le petit faune aux yeux bleus », dans La Revue hebdomadaire des 17 décembre 1882, 11 mai 1895 et 20 juin 1896. Ces trois derniers contes furent réunis en volume et publiés par Jules Mouquet (1878-1949) en 1902, au Mercure de France, avec un quatrième conte inédit, complet, mais auquel « l’auteur n’avait pas donné sa forme définitive » : « Rovère et Angisèle ». Ce sont ces quatre récits que le public connaissait jusqu’à présent sous le titre de Contes, qui n’est pas de Samain mais que nous reprenons.
Ne possédant pas d’autres sources, « Le Bout de l’oreille » et « La Jarretière » ont été retranscrits à partir des prépublications ; « Xanthis », « Divine Bontemps » et « Hyalis », à partir de l’édition originale de Jules Mouquet, laquelle se fondait sur les pré-originales, que nous avons pris le soin de relire et de comparer avec la version qu’en propose Mouquet. Quand des différences, heureusement fort rares, apparaissaient, nous avons tranché en faveur du bon sens et des usages imposés par la langue, notamment en ce qui concerne la ponctuation, très changeante chez Samain et à laquelle son cousin avait probablement déjà lui-même apporté des modifications, si bien que la vérité absolue en la matière reste impossible à déterminer. Nous avons par ailleurs pris soin de respecter les sauts de lignes, les lignes ou demi-lignes de points ainsi que les tirets qui, chez Samain, sont très fréquents et participent pleinement de son écriture en prose, volontiers surponctuée, flirtant sans cesse avec l’ellipse, l’indicible et le silence chers à Rodenbach et à Mallarmé. Les sauts de page ont en revanche été remplacés par des séparateurs (astérisques).
« Rovère et Angisèle » a lui aussi été repris de l’édition originale et relu sur manuscrit, dans la mesure où la Bibliothèque municipale de 22Lille (désormais BmL) en conserve deux états, dont le plus abouti semble très nettement celui coté « B 233 ». Une lettre à Samain du 20 mai 1895 du journaliste artésien René Le Cholleux (1856-1930), conservée sous la cote « B 229 », permet par ailleurs de le dater, puisqu’elle servit de brouillon au poète, en manque de papier, pour la rédaction de son texte. Mais nous ne savons pas précisément à quel moment il y mit la touche finale, ni s’il la mit jamais. Ce texte étant demeuré inédit du vivant de l’auteur, nous sommes en droit de nous demander si Samain en fut vraiment satisfait, et il en va de même pour tous les autres contes de notre édition.
« La Petite Princesse Gélide », dont le titre fut peut-être tiré d’un hexamètre de l’Églogue X des Bucoliques – Hic gelidi fontes, hic mollia prata, Lycori1… – fut composé en juillet 1892 et est donc contemporain de « Xanthis ». Nous en avons la certitude grâce à une lettre du 19 juillet 1892 de Samain à Raymond Bonheur, qui permet également de situer à la même époque l’écriture du conte « Angôn et Glaïs2 », dont les noms de personnages semblent cette fois-ci directement extraits de l’Anthologie grecque et auquel manquent les dernières lignes :
Je me décide à vous jeter ces pages à la poste. C’est la mise en prose du conte de La Petite Princesse Gélide. J’aurais voulu la recopier à nouveau, mais je n’en ai pas eu le temps, ayant eu une succession de sorties qui me prenaient mes soirées, seuls moments où je puisse travailler. Je ne sais ce que cela vaut ; en tous les cas, je n’ai nullement vu le moyen d’y insérer cette ironie à la Laforgue dont vous me parliez, qui ne peut avoir son prix qu’à la condition d’être absolument naturelle. Peut-être en mettrai-je dans le conte du chèvre-pieds et de la petite naïade que je compte essayer de mettre sur pied ces jours-ci.
Mais Samain n’en fut vraisemblablement jamais totalement satisfait puisqu’il poursuit ainsi :
Je ne vais moralement ou intellectuellement que d’une aile, ayant toujours ce dégoût qui me rend vraiment honteux de prendre une plume. J’ai beau me mettre en colère contre moi-même, cela ne me fait pas avancer plus vite3.
23« La Petite Princesse Gélide » fut prépublié dans le numéro spécial Noël de L’Illustration, le 6 décembre 1941, et ce conte fut donc opportunément joint à celui d’« Angôn et Glaïs » en 1947 par Jules Mouquet – ce fut là sa dernière contribution à l’œuvre de Samain – aux éditions de l’Ancre d’Or. C’est cette ultime édition, aujourd’hui épuisée, qui nous a servi de référence pour la transcription de ces textes dont nous n’avons pas retrouvé les autographes. L’édition pré-originale, illustrée des compositions de Lucien-Victor Guirand de Scévola, n’offre que très peu de variantes, imputables à des erreurs de typographes.
« Jean Caudry » fut quant à lui prépublié en août 1903 par Léon Bocquet et Alphonse-Marius Gossez dans leur revue lilloise du Beffroi. Ce texte est considéré par ces derniers comme « inachevé » et de « premier jet ». Nous nous sommes fondé sur cette édition pré-originale pour établir le texte de la nôtre, et nous en avons comblé quelques lacunes grâce à la consultation d’un brouillon, conservé à la BmL, sous la cote « C 194-I-12 ».
Notre édition, la plus complète à ce jour, s’achève sur deux contes totalement inédits et qui sont tous deux de première facture, le premier (« Le Carnaval de Jean »), vraisemblablement d’octobre 1895, étant nettement plus travaillé et abouti que le second (« [Stella] »), conte de Noël datant de 1881, sans titre et à l’état de brouillon, avec ratures, surcharges, biffures, renvois, rajouts, l’ensemble d’une écriture fine, rapide et souvent pâlie. Nous nous sommes malgré tout efforcé de sauver cette ébauche de l’oubli.
Cette édition critique, partiellement originale, n’aurait pu voir le jour sans les lumières et le concours de Bertrand Vibert, qui, avec l’aide de Marc Béghin, a fourni la présentation générale des contes. On lui doit les notices introductives et les annotations des onze récits en prose de Samain. L’établissement du texte des contes, la note le concernant ainsi que la réalisation de l’Appendice sont de Christophe Carrère.
1 Vers 42 : « Ici, ma Lycoris, sont de fraîches fontaines, de molles prairies… »
2 L’« angôn » est une « lance franque ». Ce terme est par ailleurs proche du grec « agônia » qui a donné le verbe « agoniser ». « Glaïs » semble quant à lui un prénom issu du latin « gladius » signifiant « glaive ». (Voir infra, p. 129, n. 1.)
3 BmL, fonds Jules Mouquet, ms. B 259, f. 16. Oblitération postale : Paris, Hôtel de Ville, 20 juillet 1892.
- CLIL theme: 3440 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques -- XIXe siècle
- ISBN: 978-2-406-09994-9
- EAN: 9782406099949
- ISSN: 2258-8825
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-09994-9.p.0021
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 09-09-2020
- Language: French