Résumés des contributions
- Publication type: Article from a collective work
- Collective work: Morales du poème à l’âge classique
- Pages: 371 to 376
- Collection: Encounters, n° 408
- Series: The classical century, n° 13
RÉSUMÉS DES CONTRIBUTIONS
Alain Génetiot, « Quand la morale se fait poème »
Le présent colloque met en évidence l’extension de la réflexion morale aux genres poétiques du xviie siècle. Au-delà de la seule moralité didactique, la poésie est le lieu d’une réflexion anthropologique sur les valeurs qui interroge la condition humaine, la vie en société et le rapport à la spiritualité. Loin de détourner la poésie de sa vocation lyrique, l’éthique en poésie s’avère inséparable de l’ethos rhétorique à travers lequel le poète s’exprime et par où alternativement il se dissimule et s’avoue.
Pascal Debailly, « Le droit à la satire chez les poètes »
Un poète en écrivant une satire, revendique le droit de l’écrire et de la publier. Mais quelle est la nature de ce droit ? Quelle est sa base axiologique ? Comment rendre soluble dans l’espace public un jugement moral purement privé ? Le droit à la satire met ainsi en jeu une tension toujours à l’œuvre entre d’un côté des sujets ou des citoyens, qui veulent se faire entendre, et de l’autre les pouvoirs en place dont l’autorité se confond avec celle des lois et des normes. L’article examine ces problèmes à partir d’œuvres de l’Âge classique.
Patrick Dandrey, « Théophile poète “engagé” ? »
Au lieu d’opposer les deux parties de la vie de Théophile, avant et après le procès, on postule l’unité de ce parcours en montrant qu’une même tension parcourt toute son œuvre, entre la servitude des engagements imposés au sujet social par la hiérarchie d’ancien régime puis par l’orthodoxie religieuse d’une part, et de l’autre l’aspiration jamais démentie à la liberté de s’engager pour les seules causes qui transforment le sujet social, client des grands ou cible des dévots, en sujet individuel, en conscience autonome et libre. Le procès et la prison parachèvent sans la renier cette bipolarité tendue et féconde.
372Stéphane Macé, « “La Justice & Louis gouverneront le monde”. L’allégorie morale dans la poésie encomiastique du premier xviie siècle »
Le vaste corpus des poèmes encomiastiques contemporains du siège de La Rochelle (1628) offre des modèles variés de construction de l’allégorie morale et politique. L’étude proposée ici en étudie plusieurs modes de fonctionnement, d’abord grâce aux scènes de « lit de justice » réunissant Louis XIII, Richelieu et une personnification de la ville rebelle. À partir d’une réflexion sur les jeux onomastiques et le nom propre, l’analyse envisage ensuite le traitement particulier de l’allégorie de la justice, aisément confondue avec la figure du roi.
Philippe Chométy, « Pouvoir et savoir. L’arrière-plan politique de la poésie scientifique au xviie siècle »
Parce qu’elle est le lieu privilégié d’un rapport étroit entre poésie, savoir et politique, la poésie scientifique a contribué à l’extension de l’idéal du protecteur (prince mécène) à celui de roi-philosophe. En célébrant, par un discours de type encomiastique, la figure de l’homme de pouvoir sage et savant, alliant action et contemplation, les poètes scientifiques ont tenté de concilier la morale héroïque du prince guerrier avec celle, plus tempérée, de l’amour éclairé des arts et des sciences.
Volker Schröder, « “Le grand nom de Louïs mélé dans mes ouvrages”. La place du roi dans les Poésies de Mme Deshoulières »
Le présent essai retrace le développement de la production encomiastique de Mme Deshoulières et analyse la place qu’elle accorde à l’éloge du roi dans le recueil de ses poésies. Ces textes souvent dédaignés et rarement étudiés constituent pourtant une étape essentielle dans la construction progressive de sa figure d’auteur. S’ils nous apprennent peu sur Louis XIV, ils en disent long sur la condition d’une femme de lettres du xviie siècle et ses virtuoses et audacieuses conquêtes poétiques.
Carine Luccioni-Sauvage, « Les rencontres d’Esculape et Phébus dans la Satyre ménippée de Courval »
Dans un style emphatique aux accents souvent tragiques et épiques, Thomas Sonnet de Courval (1577-1628) poursuit la voie ouverte par la Satire VI de 373Juvénal. La Satyre ménippée et la Thiméthélie dressent un tableau des mœurs conjugales conforme aux préjugés misogynes du temps. En versifiant les traités de morale et de médecine, ces satires compilent les lieux communs et sont révélatrices d’un imaginaire culturel où l’anthropologie participe d’une mythologie du mariage et de la femme.
Alessandra Preda, « La lyre du magistrat. La deuxième édition des Poèmes de Claude Expilly (1624) »
Si la première édition (1596) témoigne de la formation italianisante du poète et de son esprit pénitent, la deuxième présente les vers amoureux de sa jeunesse. Illustration de la veine poétique du magistrat, elle devient en même temps une sorte de défense dont un jeu subtil de corrections et d’ajouts exalte l’engagement moral qui passe aussi par la parole des autres, le réseau complexe de dédicaces, capable de conjuguer la fermeté de son esprit à la rigueur de sa forme, renouvelée.
Francine Wild, « Les morales du poème héroïque, d’après Clovis de Desmarets de Saint-Sorlin »
Clovis, poème héroïque très représentatif, met en scène un univers soumis aux valeurs aristocratiques d’honneur et de générosité. Les héroïnes sont actives, guerrières – sauf Clotilde – et passionnées. Les passions sont vives, elles peuvent mener à la tentation et parfois au crime, et à l’endurcissement. L’orgueil, passion majeure parce qu’elle est naturelle chez les héros, peut mener à la damnation, pour ceux qui choisissent de s’idolâtrer eux-mêmes, ou à la conversion, aidée par la grâce.
Jean Leclerc, « Quand les burlesques empruntent aux libertins. Présence d’une morale libertine dans les épopées burlesques »
Cet article analyse la présence d’une morale libertine dans quatre œuvres burlesques à partir d’une remarque de Furetière associant la littérature burlesque au courant libertin : deux travestissements du 4e livre de l’Énéide par Scarron et Furetière, Le Voyage de Mercure de ce dernier et Le Jugement de Pâris de Dassoucy. Il s’agit plus spécifiquement d’étudier quels arguments trouvent leur place dans les poèmes burlesques et quelles manières utilisent les poètes pour faire entendre ces voix libertines.
374Constance Griffejoen-Cavatorta, « Nouveaux libertins ? “Fripons” et “friponnes” dans les Poésies de l’abbé de Chaulieu »
Les poésies amoureuses de Chaulieu accordent une place très importante à la friponnerie. L’originalité de cette éthique se perçoit dans la relation ludique avec les modèles antiques, dans les liens harmonieux et égalitaires qui l’unissent à la femme aimée, et dans une esthétique de la volupté non dénuée d’ambiguïté morale. Étroitement liées au libertinage, les audaces de la friponnerie, prémices galantes et délicates de la rouerie, éclairent subtilement le crépuscule du grand siècle.
Camille Venner, « Les “Epistres morales” d’Antoine Godeau à ses amis. Édification et invitation à la vie dévote »
Dans ses Epistres morales, Godeau développe un discours spirituel qui vise l’édification des destinataires et livre une réflexion sur la manière de bien vivre chrétiennement, et dans le monde. Comment le poète s’approprie-t-il le genre de l’épître en vers pour proposer un discours moral qui concilie valeurs spirituelles et mondaines ? Travaillant la dimension spéculaire de ses épîtres, il souligne comment la relation amicale entretenue par le poème favorise l’accès à l’honnêteté chrétienne.
Richard Maber, « “Les Hommes inspirés ont droit d’aller par tout”. Esthétique de la “poésie morale” chez Pierre Le Moyne »
La poésie fortement distinctive de Pierre Le Moyne s’inspire d’un complexe de convictions religieuses, morales et esthétiques, qu’il expose dans ses écrits théoriques et qu’il illustre dans ses vers et dans ses devises. Les intentions didactiques et moralisantes, omniprésentes dans tout son œuvre, sont inextricablement liées à son idéal d’un « feu poétique » divin, qui s’exprime par moyen de la « hardiesse » du poète, de la richesse des images, et par la vigueur imaginative de son inspiration.
Anne Mantero, « Amitié et solitude aux champs. Sagesse et retraite dans le discours poétique chrétien »
La poésie chrétienne a côtoyé la poésie rustique profane où elle a trouvé une matière propice à une conversion de la Muse. Le présent article considère 375les diverses espèces de Solitudes sacrées, occasions de méditations théologiques et morales. Si parfois la retraite prend la forme d’une séparation érémitique, elle coïncide, plus souvent, avec la sociabilité chrétienne aux champs, à travers la forme dialoguée de l’églogue ou le sous-genre de la lettre en vers.
Véronique Ferrer, « La “difficulté d’être” des poètes réformés à l’âge classique »
L’article se propose d’examiner en surplomb la production poétique réformée à l’âge classique en la replaçant dans son contexte social, religieux et littéraire. Sans minimiser les tentatives originales et isolées de poètes convaincus de leur mission morale et de leur vocation divine, il interrogera les motivations du désengagement de la poésie, qui va de pair avec un désenchantement à peine avoué.
Jole Morgante, « Modalités du comique dans les Contes et nouvelles en vers de La Fontaine »
Le caractère licencieux des Contes pose des problèmes esthétiques et moraux Cependant, l’emploi du vers contribue au déplacement énonciatif qui, par des procédés narratifs et rhétoriques, vise à dégonfler le comique de la source pour le rendre acceptable en esquivant la représentation directe de la réalité. De telles stratégies signalent le véritable intérêt des récits : le refus du dogmatisme et des idées reçues mais, surtout, la mise en question du contrôle d’autrui par la répression sexuelle.
Charles-Olivier Stiker-Métral, « Figurations du fabuliste dans les Fables de La Fontaine »
La promotion inédite du sujet lyrique au sein de la matière ésopique en fait le responsable non seulement du récit plaisant relatant les situations léguées par la tradition, mais aussi de l’interprétation de celui-ci dans la moralité. Le genre antique et renaissant, volontiers gnomique, s’épanouit en une démarche pleinement herméneutique. Véritable essai du jugement, qui engage la prudence du fabuliste, la fable devient aussi un authentique exercice spirituel où s’éprouvent des modèles de vie.
376Rainer Zaiser, « Variété des sujets et des morales dans les Poésies diverses et épigrammes de Boileau »
Les brèves formes lyriques que Boileau a créées sur plusieurs décennies et rassemblées à la fin de sa vie dans les Poésies diverses et épigrammes soulèvent, certes, des questions morales, mais les positions prises sont aussi variées que les sujets qu’ils traitent. Loin d’être un poète moralisateur voulant instruire ses lecteurs dans une morale précise, Boileau se révèle un moraliste qui observe les conduites et les mentalités des hommes de son époque, quelque contradictoires qu’elles puissent être.
Emmanuel Bury, « Boileau moraliste ? »
Cet article analyse en quoi la poésie de Boileau peut entrer dans le cadre de la catégorie des « moralistes » classiques, et comment son art de poète reprend et infléchit quelques traits majeurs de l’écriture de la morale, telle qu’elle a été pratiquée par ses contemporains. On voit comment les lieux communs moraux, notamment ceux issus de la tradition cynique, sont réactivés par la forme poétique, qui permet d’exprimer l’intention morale de manière épigrammatique ou avec la force du sublime.
- CLIL theme: 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN: 978-2-406-07318-5
- EAN: 9782406073185
- ISSN: 2261-1851
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-07318-5.p.0371
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 08-09-2019
- Language: French