Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Les Groupes d’intérêt en France
- Pages : 667 à 675
- Collection : Rencontres, n° 551
- Série : Science politique, n° 9
Résumés
Guillaume Courty et Marc Milet, « Introduction. Un ouvrage collectif sur les groupes d’intérêt en France ? Enjeux, états des lieux et perspectives de la recherche en science politique »
Cet ouvrage collectif sur les groupes d’intérêt est un événement puisqu’il s’avère être le premier en langue française à mobiliser la communauté des politistes spécialisés sur ces terrains depuis soixante ans. Ces propos introductifs se veulent aussi un manifeste. Est précisée la spécificité d’une approche française de l’analyse des groupes autour de l’idée selon laquelle leur étude vaut fondamentalement comme un outil de compréhension du politique qui s’appuie sur une approche et des méthodes spécifiques.
Guillaume Courty et Marc Milet, « La République contre le Lobbying ? Les équivoques de la fabrique d’un contre-modèle français »
Une conception théorique dominante postule que la France aurait été « immunisée » contre l’introduction des groupes d’intérêt dans la vie publique du fait de l’adoption pendant la Révolution française de textes qui étaient la consécration de principes philosophiques des Lumières. Ce chapitre ouvre le débat sur la mise en forme de cette vulgate et de son contre-référent nord -américain et sur le rôle que cette opposition a joué dans la consécration d’une conception de la politique professionnalisée et garante de l’intérêt général.
Samuel Hayat, « La représentation des intérêts en République. Perspective socio-historique »
Ce chapitre revient sur le rôle central joué par le monde du travail dans le processus de mise en représentation des intérêts privés, notamment parce qu’y émerge une classe que ses défenseurs définissent par la généralisation de son intérêt propre : le prolétariat. Il présente comment, après l’échec de l’insurrection de juin 1848, des moyens de représentation des intérêts ouvriers 668sont inventés et stabilisés, qui engagent toujours d’une manière ou d’une autre l’État et étudie leur impact sur les formes de structuration des intérêts privés au cours des xixe et xxe siècles.
Patrick Hassenteufel, « Retours sur l’évolution des relations État – Groupes d’intérêt en France. Un type pluraliste, (néo)corporatiste ou étatiste ? »
Ce chapitre discute la singularité des rapports entre l’État et les groupes d’intérêt en France dans la longue durée, appréhendée à travers la notion d’étatisme. Sont mises en avant l’importance historique des dimensions corporatistes de la représentation des intérêts et les évolutions contemporaines, à savoir la fragmentation organisationnelle de la représentation des intérêts et son gouvernement à distance par l’État. Cette affirmation d’un État régulateur, dans un contexte de territorialisation et de supranationalisation de l’action publique, n’est toutefois pas propre à la France.
Philippe Ryfman, « Focus 1. Un nouveau paradigme pour les ONG : le plaidoyer ? »
La notion de plaidoyer issue à l’origine d’une appellation québécoise pour qualifier la spécificité des activités des organisations non gouvernementales interroge la relation des dites ONG à l’espace politique et l’effectivité de la différenciation par rapport aux actions classiques de lobbying.
Guillaume Courty et Marc Milet, « L’encadrement institutionnel des représentants d’intérêt »
En 2016 la loi Sapin II oblige les représentants d’intérêt à s’enregistrer quand ils interagissent avec les décideurs. Amenée à s’étendre aux collectivités territoriales et pressentie pour intégrer le domaine des marchés publics, elle applique l’impératif de transparence à de très nombreuses institutions au lieu d’être cantonné au seul Parlement. Ce chapitre a pour objectif d’inscrire cette loi dans le système républicain français et de souligner à quel point elle marque autant une rupture qu’une consécration de dispositifs jusque-là éparpillés concernant la représentation des intérêts.
669Simon Baeckelandt et Julien Talpin, « Démocratie participative et groupes d’intérêt »
Ce chapitre a pour objectif de questionner la confrontation des groupes d’intérêt à l’impératif participatif. La théorie délibérative, soubassement théorique du tournant participatif de l’action publique, émerge dans les années 1980 et s’est en partie construite contre les théories pluralistes et néo-corporatistes. De hostiles à enthousiastes, de béats à critiques, la réception et l’usage de ces espaces par les groupes d’intérêts apparaît pour le moins contrastée en fonction des acteurs et des contextes.
Carole Bachelot, « Les groupes d’intérêt et les partis politiques en France. Du “mythe de l’indépendance” à l’analyse des interactions »
Alors que les relations entre partis politiques et groupes d’intérêt se sont récemment développées dans la littérature internationale, elles constituent un des angles morts de la recherche française. Ces distinctions (liées à des spécialisations disciplinaires, ainsi qu’aux spécificités de l’histoire partisane et syndicale française) sont loin de refléter la densité des interactions et la diversité des formes qu’elles peuvent prendre. Ce chapitre plaide ainsi pour la (ré)-ouverture d’un programme de recherche portant sur la réévaluation de ce que les groupes d’intérêt font aux partis – et inversement.
Stéphane Cadiou et Julie Pollard, « Les groupes d’intérêt dans la gouvernance territoriale »
Ce chapitre éclaire les mécanismes de gouvernance territoriale tout en esquissant, en retour, de nouvelles pistes de recherche pour l’étude de la représentation des intérêts. Sont évoqués les vecteurs de territorialisation des intérêts avant de cerner les caractéristiques et répertoires d’action des groupes d’intérêt mobilisés dans les espaces locaux. La question des groupes d’intérêt est replacée dans le contexte d’enchevêtrement des niveaux et des secteurs d’action publique. Ce chapitre revient ainsi sur de possibles singularités des groupes d’intérêt dans les territoires infranationaux.
670Hélène Michel, « L’européanisation des groupes d’intérêt français. Conditions et effets du “passage à l’Europe” »
Ce chapitre propose un état des recherches qui ont étudié dans une perspective historique et sociologique l’européanisation des groupes d’intérêt français. Sont mis en évidence les logiques qui rendent possible le « passage à l’Europe » de groupes d’intérêt français, les formes de cette européanité et les effets de ce changement d’échelle. Il montre alors le rôle des configurations nationales, des institutions européennes et nationales, ainsi que des représentants dans la production sociale de la dimension européenne d’un groupe d’intérêt. Il donne dès lors à voir de multiples transformations induites.
Christophe Traisnel, « Focus 2. Les francophonies : entre cause linguistique internationale et enjeux politiques locaux »
Les groupements de promotion de la francophonie, entendus comme « groupe d’aspiration francophone », méritent d’être envisagés en tant que causes linguistiques différemment imaginées qui font intervenir deux dimensions, une dimension globale (la promotion et la défense de « La » Francophonie) et des causes plus localisées. Le contexte de mobilisation (sectoriel, territorial) détermine ainsi fondamentalement des dynamiques propres.
Marieke Louis et Yohann Morival, « Les groupes d’intérêt patronaux français et la scène internationale (xxe-xxie siècles) »
Ce chapitre analyse le rapport des groupes patronaux à la scène internationale. L’étude remontant du début du xxe siècle permet d’identifier les investissements dont les enjeux internationaux font l’objet, aussi bien dans le choix des espaces investis, des modes de prise en charge et des répertoires d’action. Loin d’une vision linéaire de l’internationalisation, ce chapitre éclaire la progressive structuration de l’international par le biais des cartels, des organisations régionales et internationales et des sommets, jusqu’à l’émergence de la figure du patron-diplomate.
Guillaume Courty, « Les consultants en affaires publiques/lobbying »
L’analyse des groupes d’intérêt a très rapidement diagnostiqué une modification importante de la représentation des intérêts : elle n’est plus l’apanage 671de personnels dédiés à cette activité dans des organisations mais correspond à une prestation de consultants. On aurait pour autant tort de considérer que ce marché du conseil ne concerne que la représentation des intérêts. L’avènement des consultants dépasse en effet les affaires publiques/lobbying et montre une autre facette de la consécration du néolibéralisme dans et autour de l’État français.
François-Xavier Dudouet, « Focus 3. Les réseaux d’affaires en France »
Ce focus s’intéresse à l’évolution des réseaux d’affaires en France depuis les années 1970, époque où apparaissent les premières analyses de réseaux du capitalisme français, en prenant soin de relier cette évolution à celle de l’État et de sa place dans l’économie française. La relation entre ces réseaux et les pouvoirs publics doit être moins envisagée sous le mode de l’altérité, de la pression entre deux corps, que sous celui d’une perméabilité profonde entre deux espaces interdépendants.
Catherine Comet, « Focus 4. Les grands patrons et les thinktanks »
Les thinktanks et les groupes de discussion politique sont des organisations dont l’objectif est de produire des expertises pour influencer l’agenda médiatique et politique. En étudiant la circulation des élites économiques françaises dans les think tanks, il apparaît que ce sont essentiellement des membres de la fraction des dirigeants ayant des liens étroits avec l’État ou la sphère publique qui s’y impliquent le plus.
Michel Offerlé, « Les organisations patronales »
Les organisations patronales sont à la fois semblables et très différentes selon les pays et selon les intérêts. Pour comprendre ce qu’organisation patronale veut dire, nous aurons à réfléchir sur leur définition et leur désignation, avant de restituer comment et pourquoi elles se sont constituées comme l’un des principaux groupes d’intérêt. Leur répertoire d’action a considérablement changé dans les démocraties occidentales et le recours à l’expertise en constitue le socle. La question de leur influence est une des questions récurrentes et centrales qu’il faut analyser.
672Caroline Frau et Marc Milet, « Focus 5. Les mobilisations anti-fiscalistes »
Les mobilisations anti-fiscales, envisagées ici au travers des « organisations » qui les ont portées, comprennent des groupes qui revendiquent la représentation de l’ensemble des contribuables et ceux organisés autour d’autres intérêts mais qui se mobilisent contre certaines formes de fiscalité. Ces actions, loin de signifier des actions strictement contestataires, fondent bien plutôt des formes expressives des rapports des administrés à l’État.
Sarah Abdelnour, « Focus 6. Revendications et représentations de nouveaux indépendants : les auto-entrepreneurs »
Le régime des auto-entrepreneurs adopté en 2008 a atteint assez rapidement le million de bénéficiaires constituant une nouvelle génération de petits-indépendants. Ce dispositif inventé pour soutenir la croissance est défendu à la fois par ses promoteurs issus du monde politique ou des groupes d’intérêt patronaux, tandis que les mobilisations des auto-entrepreneurs sont en revanche parfois hostiles au dispositif, largement utilisé pour contourner le salariat et les droits qui lui sont associés.
Marion Guenot et Agathe Piquet, « Protéger l’État, promouvoir la police, défendre les policiers. Les tensions structurantes du syndicalisme dans un domaine régalien »
Ce chapitre analyse les particularités d’un syndicalisme peu exploré, le syndicalisme policier. En remontant à la formation de l’État moderne, cette contribution met en lumière les tensions structurantes rencontrées par les organisations syndicales des policiers : comment manifester leur mécontentement et exprimer des revendications à l’État tout en le protégeant ? Ce chapitre permet de comprendre l’émergence tardive des syndicats de police, l’état actuel du syndicalisme policier, marqué par un très fort éclatement, ainsi que les instruments diversifiés mobilisés.
Ismail Ferhat, « Focus 7. Les enseignants sont-ils (toujours) un groupe d’intérêt ? »
Longtemps incarné par la Fédération de l’éducation nationale, le syndicalisme des enseignants est passé d’une forme de cogestion sociale-démocrate à une remise en cause de l’omnipotence des organisations du fait de la multiplication 673des organisations, de la montée en puissance de certaines (parents d’élèves) et de la légère décrue des adhérents.
Pierre-Yves Baudot, « Les associations en charge de la question sociale peuvent-elles faire pression ? »
Les associations ont contribué à définir les frontières du social, la mesure des problèmes et les modalités de l’intervention publique. Cette construction du secteur se retrouve dans les modalités d’institution de la concertation, en équilibre instable entre captation de la régulation par les associations et mise sous tutelle étatique. Les récentes transformations dans leur financement par le recours à l’appel à projet et le développement de la philanthropie, conduisent à la reconfiguration des relations avec l’État et à l’évolution des formats d’expression des revendications.
Céline Béraud et Philippe Portier, « Focus 8. La manif pour tous et le monde catholique »
La France est l’un des pays les plus sécularisés en Europe. L’ampleur de la mobilisation contre le mariage pour tous et sa durée ont beaucoup surpris les médias mais aussi le monde académique et nourri de nombreuses recherches. Ces mobilisations se sont focalisées sur l’union matrimoniale et la parentalité en s’inscrivant dans un mouvement plus globalisé de campagne anti-genre.
Christophe Traïni, « Groupes et mobilisations autour de la “nature”. Expertise, controverses, conflits d’usage et dispositifs de sensibilisation »
Ce chapitre rend compte des modalités à partir desquelles certains groupes sociaux s’emploient à ériger le devenir des espaces naturels en enjeu politique prioritaire. Dans cette optique, il relève certaines évolutions sociodémographiques et institutionnelles qui permettent de comprendre pourquoi et comment, au sein d’arènes distinctes et complémentaires, de multiples intérêts et points de vue divergents n’ont eu de cesse que de s’affronter afin de tenter de peser sur la définition des politiques environnementales.
674Anne Bellon, « État contre Internet ? L’intervention des groupes d’intérêt numériques dans la fabrique des politiques publiques »
Ce chapitre retrace l’institutionnalisation d’échanges entre groupes d’intérêt numériques et administrations. Des mouvements de défense du numérique aux grandes plateformes internationales, il analyse la construction d’une régulation de l’internet. La saillance accrue des problématiques liées au numérique – piratage, vie privée, désordre informationnel – ainsi que la dépendance forte des institutions aux ressources et expertises des internautes et des entreprises du web éclairent les rapprochements entre acteurs publics et privés autour d’une réglementation.
Marc Milet, « Agir par le droit, agir sur le droit. Les ambivalences des rapports au juridique des groupes d’intérêt »
Ce chapitre présente les rapports au droit induits par l’activité des groupes d’intérêt. Le premier temps montre dans quelle mesure la diffusion des différentes traditions d’analyse (sociologie du droit, science politique nord-américaine) fait l’objet de multiples réappropriations. Sont ensuite différenciés les registres d’action, ce qui permet de dépasser l’approche strictement contentieuse qui domine immanquablement. Les conditions du recours au droit permettent enfin de considérer dans quelle mesure l’action juridique s’inscrit dans des configurations multiples et contraignantes.
Xavier Crettiez, « Les groupes d’intérêt et la violence politique »
Ce chapitre analyse un répertoire d’action parfois mobilisé par les groupes d’intérêt : la violence physique. Un premier temps offre un cadrage théorique de la violence appliquée aux groupes d’intérêt à travers les cadres analytiques disponibles. À partir de ce regard, une base de données dresse un état des lieux de la violence mise en œuvre en France par trois types de groupes d’intérêt : le syndicalisme ; les groupes environnementaux ou religieux ; les groupes régionalistes à travers une réflexion sur le terrorisme comme répertoire d’action de groupes de pression.
675Alexandre Hobeika, « Focus 9. La FNSEA : de la cogestion de la politique agricole à la manifestation de rue »
La Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles donne l’image d’un groupe d’intérêt imposant mais elle fait aussi l’objet d’instrumentalisations et de concurrences. Sous la Ve République, sa place dominante parmi les syndicats d’agriculteurs lui a permis de développer un répertoire d’action original, qui articule au quotidien lobbying, négociations, et mobilisations de rue.
Élise Roullaud, « Focus 10. Un répertoire d’action spécifique à la “gauche paysanne” ? Le cas de la Confédération paysanne »
La Confédération paysanne s’est opposée aux réformes de la politique agricole commune (PAC) sur une vingtaine d’années. Elle a développé un répertoire d’action de la « gauche paysanne » autour de l’usage de la violence comme enjeu de distinction entre syndicats. Pour l’analyser il convient d’ouvrir aux rapports qu’ils entretiennent avec les pouvoirs publics ainsi qu’aux relations établies entre syndicats concurrents dans la lutte pour la représentation des intérêts agricoles.
Guillaume Courty et Julie Gervais, « Les groupes en campagne et le moment électoral »
La mobilisation électorale des groupes d’intérêt est largement ignorée de la littérature académique européenne. Ce chapitre explore les différents types d’intervention des groupes, en revenant sur l’histoire des mobilisations électorales. Exposant les biais analytiques des travaux sur l’influence, il propose de réintégrer les agents politiques et leur entourage dans l’étude de cette relation et de se pencher, enfin, sur les pratiques concrètes du jeu d’influence, qui relèvent d’une forme de division du travail de production des enjeux électoraux.
- Thème CLIL : 3284 -- SCIENCES POLITIQUES -- Histoire des idées politiques
- ISBN : 978-2-406-13297-4
- EAN : 9782406132974
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-13297-4.p.0667
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 25/01/2023
- Langue : Français