Glossaire
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : Théâtre français. Tome I
- Pages : 741 à 744
- Collection : Bibliothèque du théâtre français, n° 84
GLOSSAIRE1
La parlure paysanne chez Dufresny
« Parlure » plutôt que véritable dialecte, car elle n’a pas de réelle cohérence sur le plan strictement linguistique, non plus que sociolinguistique : quelle que soit leur origine prétendue (Bretagne, Lyonnais, Brie, Poitou…), les paysans de théâtre « patoisent » tous de la même manière, Il s’agit parfois seulement de graphies phonétiques (fame pour « femme », tou pour « tout », bau pour « beau »), plus généralement de la transcription d’une prononciation déformée (cian pour « céans », sarimonie pour « cérémoie »), et assez souvent de morphologie et de syntaxe « populaire », c’est-à-dire fautives, mais qui restent compréhensibles pour le public parisien. C’est pourquoi Dufresny, a l’instar de tous ses confrères, se garde bien d’employer un vocabulaire véritablement dialectal (à supposer qu’il le connût) qui aurait rendu le discours des paysans certes plus authentique, mais inintelligible pour la grande majorité des spectateurs.
–« qu » à la place de « t » ou « d » : Gueu : Dieu ; mequié : métier ; quin : tiens ; souquinriais : soutiendrais
–« i » à la place de « u » (ou de « ui ») : himeur : humeur ; pis : puis ; je sis : je suis ;
–« a » à la place de « e » : a, al ou alle : elle ; aparcevoir ; apercevoir ; bian, bain : bien ; pardu : perdu et parte : perte ; sarvice : service ; vianra : viendra
–utilisation du pluriel de la première personne verbale, au lieu du singulier : « je ne sommes pas d’accord. »
–désinence en « -ais » à la place de « -iez » ou « -ez » pour la 2e personne pluriel du conditionnel présent ou du futur : « vous n’y verais goutte »
–désinence en « -it » à la place de « -a » pour la 3e personne singulier du passé simple : « notre étourdie de servante les brouillit »
–autres déformations : ça : cela ; drès : dès ; esti : est-il ; leux : leurs ; o : ou ; ous : vous ; pu, pus : plus ; queux ; quel(le)s ; ste : cette ; sti : celui ; tantia : tant et si bien ; tretous, très tous : en tout, tout(s) ensemble ; venont : viennent ; v’la, vla : voilà.
742Mots fréquents dont le sens
a sensiblement changé depuis le xviiie siècle
Accordé(e) : Fiancé(e).
Aimable : Digne d’affection, attirant(e).
Appartenir : « Avoir de la dépendance, de la connexité, de la liaison. » (Furetière.) On dit des domestiques qu’ils appartiennent à leurs maîtres.
Appas : Attraits physiques chez une femme.
Bailler : Donner.
Balancer : Hésiter.
Barguigner : Marchander, discuter, argumenter ; hésiter.
Bouter : Mettre, apporter.
Branle : Mouvement.
Caresse : « Témoignage extérieur d’affection accompagné de quelque signe de joie. Agréables caresses.. […]. caresses trompeuses. faire des caresses. […] » (Acad.) À l’époque, ni le nom ni le verbe « caresser » n’impliquent de contact physique.
Çà : « Interjection pour exciter et encourager à faire quelque chose. […] On dit aussi, Cà tout seul, en répondant ou consentant à ce que l’on est exhorté de faire. » (Acad.)
Col : Cou.
Colifichet : Chose de peu d’importance ; babiole.
Composer : Faire un compromis, négocier.
Congé : Terme du service d’un(e) domestique, qui percevait alors ses gages.
Coquin : Terme d’injure, beaucoup plus fort qu’en français moderne. « Bélître, maraut, gueux, fainéant, fripon. […]. voilà un beau coquin pour prétendre à une si haute charge.[…] On le dit encore par injure, d’un homme infame et lâche, qui fait des bassesses et des perfidies, et autres actions indignes d’un homme de cœur et d’honneur. Il ne vaut rien, c’est un coquin qui mériterait d’être etc. un méchant coquin. ah ! le coquin, il a trahi son ami. (Acad.) »
Couche (n. f.) : Lit.
Courtisane : Prostituée.
Da : « Particule qui ne se met jamais qu’après une affirmation ou une négation. Oui-da. si-da. nenni-da. vous le ferez da. Anciennement il s’écrivait. Dea. Il est du style familier et bas. » (Acad.)
Damoiselle (ou demoiselle) : Mot désignant « toutes les filles qui ne sont point mariées, pourvu qu’elles ne soient point de la lie du peuple, ou nées d’artisans. » (Furetière.)
Dessein : Projet, plan.
Devant [ de ] : Dans une acception temporelle, synonyme d’« avant [de] ».
Dissimuler : Feindre, mentir.
Endéver : Enrager, (se) mettre en rage (en particulier dans l’expression « faire endéver »).
Entendre : Comprendre.
Établissement, s ’ établir : Statut social obtenu par le mariage.
Faquin : « Terme de mépris et d’injure qui se dit d’un homme de néant, d’un homme qui fait des actions indignes d’un honnête homme. »
743(Acad.) À l’origine, travailleur de force, homme de peine (de l’italien facchino, portefaix).
Fat : Imbu de lui-même, prétentieux ridicule.
Fatuité : Vanité, haute opinion de soi.
Feux : Amour passionné.
Fi : « Espèce d’interjection, dont on se sert pour marquer du mépris, du dégoût, de quelque personne ou de quelque chose. » (Acad.)
Fourber : Tromper, trahir.
Gages : Salaire d’un(e) domestique, qui souvent ne le percevait qu’en quittant le service, en recevant son congé.
Galant, Galante : Selon Furetière, on qualifie de galant un « homme honnête », « un homme qui a l’air de la Cour » ou encore un homme « habile, adroit, dangereux » et qui « entend bien ses affaires » ; mais « au féminin, quand on dit, c’est une galante, on entend toujours une courtisane. »
Grisette : Jeune femme de petite vertu.
Grosse (ou grosse d’enfant) : Enceinte.
Gueux : « Qui demande l’aumône. […] Se dit aussi hyperboliquement de ceux qui n’ont pas assez de biens de fortune pour soutenir leur naissance et leur qualité, et aussi de tout ce qui marque quelque indigence. » (Furetière.) Gueuserie : état de celui qui est gueux, misère.
Hasarder : Risquer.
Honnête : « Vertueux, conforme à l’honneur et à la vertu. […] Convenable à la raison, bienséant à la condition, à la profession, et à l’âge des personnes. » Le sens est donc plus large qu’en français moderne.
Hymen, Hyménée : Mariage.
Inclination : Attirance, affection ; par euphémisme, désir.
Jaser : Bavarder.
Jouer [quelqu’un] : Tromper, se moquer de quelqu’un.
Laisser de : Cesser de, le plus souvent à la forme négative : « ne pas laisser de », c’est-à-dire faire quelque chose continuellement, voire de manière insistante.
Lansquenet : Jeu de cartes apporté en France par les mercenaires allemands (Landsknecht) ; par métonymie, signifie « maison de jeu », « tripot ».
Mander : Faire venir, convoquer.
Maraud (ou maraut) : « Terme d’injure et de mépris. Coquin, fripon. » (Acad.)
Monsieur, Madame, Mademoiselle : Ces titres avaient un sens fort et servaient de marque de respect utilisées seulement envers des personnes jouissant d’un statut social élevé, nobles ou bourgeois.
Notaire : Officier chargé d’établir et d’entériner les actes légaux, notamment les contrats de mariage, ce qui explique sa fréquence dans le personnel des comédies.
Opiner : Donner un avis, indiquer un sentiment.
Original : « On appelle proverbialement et ironiquement un original, un homme qui est ridicule et singulier en ses manières, qui fait rire par la nouveauté de ses actions. » (Furetière.)
Ouais : Plus qu’une simple variante de « oui », le terme indique la méfiance, l’incrédulité.
Ouf : Interjection (suivie ou non d’un 744point d’exclamation). « Particule indéclinable qui se dit absolument, quand on souffre quelque douleur. » (Furetière.)
Parchemin : Document légal, minute, contrat.
Partisan : « Celui qui fait un traité, un parti avec le Roi pour des affaires de finances. » (Acad.)
Petit Maître : Jeune homme vaniteux et arrogant, menant une vie dissipée.
Philosophe : Intellectuel, généralement libre-penseur, voire athée et libertin.
Plaideur, plaideuse : Personne engagée dans un procès, qui mène une action en justice.
Prévenir : Précéder ; préparer.
Prévention : Préjugé, idée reçue.
Procureur : « Officier établi pour agir en justice au nom de ceux qui plaident en quelque jurisdiction. » (Acad.) En droit moderne, c’est un « avoué ».
Repos : Tranquillité d’esprit.
Rêver : Réfléchir, méditer.
Se connaître : Avoir conscience de son rang social ; savoir se tenir à sa place.
Serrer : Ranger soigneusement, mettre de côté ou cacher.
Serviteur : Terme qu’un homme utilise pour prendre congé.
Soufflet : Gifle ou autre coup porté avec la main.
Suborneur : Séducteur ou ravisseur. Dans le droit, tout homme épousant une femme sans l’accord des parents de celle-ci était coupable d’un « rapt de séduction », théoriquement punissable de mort.
Tabellion : Officier de justice équivalant au notaire, en milieu rural particulièrement.
Transport : Effusion, mouvement d’humeur.
1 Établi par Guy Spielmann.
- Thème CLIL : 3622 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Théâtre
- ISBN : 978-2-406-12176-3
- EAN : 9782406121763
- ISSN : 2261-575X
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-12176-3.p.0741
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 26/01/2022
- Langue : Français