Préface
- Type de publication : Article de revue
- Revue : La Revue des lettres modernes
2021 – 2. La Littérature de voyage aujourd’hui. Héritages et reconfigurations - Auteur : Moussa (Sarga)
- Pages : 13 à 22
- Revue : La Revue des lettres modernes
- Série : Voyages contemporains, n° 3
PrÉface
Pourquoi avoir choisi, dans notre titre, l’expression « littérature de voyage » plutôt que celle de « récit de voyage » ? Peut-être parce que cette dernière, qui est pourtant bien installée dans le paysage éditorial de langue française, paraît justement trop figée au regard de l’évolution des pratiques d’écriture, qui sont elles-mêmes, parfois, liées à la porosité des genres et des registres d’écriture, une porosité que notre modernité n’a fait qu’accroître. Le récit dit viatique ne se laisse plus réduire à sa dimension factuelle, même si celle-ci est prévalente dans son histoire. Du reste, le Voyage en Orient (1851) de Nerval, l’un des plus lus jusqu’à aujourd’hui, n’est-il pas travaillé par la fiction, que ce soit à travers des « contes » qui scandent chacune des grandes parties du récit, ou même dans le journal de voyage proprement dit (le narrateur invente l’épisode de Cérigo et s’attribue l’achat d’une esclave acquise, dans la réalité, par son compagnon de voyage) ? Ce faisant, Nerval renouait avec une pratique ancienne, qui remonte aux historiens et géographes de l’antiquité, lesquels n’avaient pas les moyens (ni l’ambition) de faire de manière rigoureuse le départ entre le « vrai » et le « faux » – d’où le proverbe « A beau mentir qui vient de loin1 ».
On a souvent dit que le Voyage en Orient, paradigmatique du genre viatique au xixe siècle, se serait étiolé avec le Première guerre mondiale, c’est-à-dire au moment de l’écroulement de l’empire ottoman2. En réalité, loin d’avoir disparu, il s’est renouvelé, notamment avec la figure du grand reporter, que ce soit à travers des aires géographiques nouvelles ou dans 14ses visées politiques et esthétiques3. Le récit de voyage n’est pas non plus mort à la suite de la Seconde guerre mondiale, malgré la première partie (« La fin des voyages ») de Tristes Tropiques (1955), preuve en soit le caractère volontairement paradoxal de sa première phrase : « Je hais les voyages et les explorateurs. Et voici que je m’apprête à raconter mes expéditions4. » Anthropologue, Lévi-Strauss voulait aussi faire œuvre d’écrivain5. Du même coup, il posait, avec plus d’acuité que d’autres, le problème de l’énonciation viatique : certes, le narrateur raconte une expérience individuelle, et il emploie en général, dès le début de son récit, un « je » qui revendique son unicité ; mais il sait aussi qu’il est tributaire de la « bibliothèque » des voyageurs6, et que son désir de se dégager d’une parole antérieure est lui-même une forme de déni.
Le récit viatique s’est donc transformé en se diversifiant. C’est précisément de cela que veut rendre compte l’expression « littérature de voyage » pour indiquer l’ouverture du récit de voyage traditionnel vers des formes nouvelles liées à d’autres « genres » (le grand reportage, le carnet de route…), dont certains comportent une dimension orale (la poésie de voyage, l’enquête ethnographique). Les supports se sont aussi multipliés, faisant toute leur place à l’image – on peut penser à des récits de voyage photographiques de Raymond Depardon, à certains films de Chris Marker, ou encore à telle BD, comme les Carnets d’Orient de Jacques Ferrandez, publiés à partir des années 1980 et qui commencent par une chronique historique fictive de la conquête de l’Algérie remplie d’allusions intertextuelles à des écrivains voyageurs du xixe siècle comme Flaubert et Fromentin ; d’autres sens que la vue peuvent aussi être mis en valeur, comme on le voit avec l’apparition, grâce aux nouvelles technologies, des carnets de voyage sonores (carnets d’ethnomusicologues, carnets de voyage musical, etc.). Autrement dit, il faut penser la littérature de voyage à la fois en termes de transculturalité et de transmédialité. Elle constitue donc un champ ouvert sur son dehors (sur l’histoire, sur la 15géographie, ou encore sur l’anthropologie culturelle) et sur des médias différents (qui incluent l’image) – pour autant, bien sûr, que le voyage en soit une composante essentielle et que les productions de cette littérature de voyage renvoient à une expérience de l’ailleurs7.
Mais voyons brièvement, pour commencer, en quoi le voyage lui-même a évolué, depuis plus d’un siècle, avant de revenir sur sa mise en récit.
Pour ne prendre que l’exemple du Voyage en Orient (considérons-le comme un « sous-genre » à l’intérieur du genre viatique), il est évident que les parcours changent avec le temps : l’idée du Grand Tour méditerranéen, tel qu’il était pratiqué par nombre d’écrivains au xixe siècle, n’est plus à l’ordre du jour au xxe siècle. Pourtant, le poids de l’Histoire, laquelle peut être très ancienne, reste parfois important chez certains écrivains voyageurs encore proches de nous – pensons à Nicolas Bouvier, nourri d’Hérodote, lorsqu’il part sur les routes de l’Orient au début des années 19508. Les modes de déplacement se modifient également, et avec eux le rythme du voyage : la voiture, le train, l’avion, tous ces nouveaux moyens de communication accélèrent le voyage, modifient la perception du monde, et mettent l’accent sur la destination finale plutôt que sur l’espace parcouru. Certains en avaient déjà pris acte, dès l’entre-deux guerres, pour faire l’éloge de la vitesse – pensons à Paul Morand. Mais d’autres, au contraire, réfléchissent aux avantages de la lenteur9, associée à une forme de sagesse. C’est à peu près ce que Sylvain Tesson explique, dans La Panthère des neiges (2019), où il raconte une expédition au Tibet avec le photographe Vincent Munier, les deux compagnons attendant des heures, aux aguets, de jour comme de nuit, par un froid glacial, que tel animal sauvage apparaisse dans le champ 16de l’objectif : apprentissage, donc, du regard, mais aussi de la patience, à l’opposé du temps de la satisfaction immédiate des besoins pressants que génère notre société « connectée », où tout doit se transmettre et se savoir « en temps réel ».
Les transformations des moyens de communication ont donc eu des répercussions sur la nature même des voyages, à commencer par la mutation du déplacement individuel vers le tourisme de masse, qui lui-même fait maintenant l’objet d’une mise à distance. On observe en effet des phénomènes de résistance, qui se manifestent souvent par un retour à la marche comme mode de déplacement privilégié, permettant les rencontres et l’immersion dans un milieu étranger (ainsi Clara Arnaud parcourant en 2016 le Caucase avec un cheval, mais qu’elle n’utilise le plus souvent que pour porter ses affaires10, ou Philippe Valéry refaisant à pied la route de la soie depuis Marseille, au début des années 200011, ou encore Bernard Ollivier, qui va également à pied jusqu’en Chine et relate son expérience dans Longue marche, qui paraît en quatre volumes de 2000 à 2016). Il y a, à l’évidence, une recherche de l’effort physique, du dépassement de ses propres limites, qui transparaît dans de telles entreprises, à travers lesquelles l’homme ou la femme se retrouve souvent face à soi-même, sans toutes les facilités que procurent les grandes infrastructures touristiques qui ne cessent de se développer. Le voyage moderne a au fond, parfois, quelque chose d’un refus et d’un défi : pensons à Travelling (2019), le récit de Christian Garcin et Tanguy Viel, sous-titré, « un tour du monde sans avion » – il y a là, outre le clin d’œil vernien, une force de la négation, qui doit nous interroger sur les messages que véhicule, au-delà du récit d’une expérience personnelle de déplacement, la littérature viatique : refuser l’avion, ou limiter son usage, comme vont probablement le faire un certain nombre de gens dans les années à venir, c’est aussi manifester, directement ou indirectement, un choix écologique, une manière de dire non à une forme de pollution qui met de plus en plus notre planète en danger.
Le voyage, en tant que phénomène sociologique, est en pleine expansion, même si certains voyagistes célèbres ont fait faillite, comme la vénérable compagnie Thomas Cook, tout récemment. (Dans La Mort 17de Philae, en 1908, on trouvait le portrait satirique des « cooks » et des « cookesses », autrement dit des touristes britanniques supposés aveugles et insensibles à l’Orient qu’ils parcouraient – c’est dire que cette agence de voyage, à travers l’humour sarcastique de Loti, est déjà entrée dans la littérature française depuis plus d’un siècle12.) Par ailleurs, le tourisme s’est mondialisé : ce n’est donc plus un phénomène essentiellement européen, ni même occidental : les Africains voyagent aussi, et peut-être même depuis plus longtemps qu’on ne croit – les récits d’un certain nombre de lettrés égyptiens, tel Zaki Pacha, venus en Europe à la fin du xixe siècle, à l’époque de la Nahda, la « renaissance » arabe, sont aujourd’hui traduits en français13. Quant à la littérature dite francophone – et pas seulement maghrébine–, qui a souvent permis, à travers une mise en cause des clichés exotiques14, un décentrement du point de vue eurocentrique, elle doit aussi être prise en compte dans ce renouvellement des études viatiques15. Enfin, comment ne pas évoquer les migrations importantes auxquelles nous assistons ces dernières années, qu’elles soient du Sud vers le Nord ou à l’intérieur même du Sud (ce qu’on oublie trop souvent), migrations qui renvoient à une autre typologie, celle des déplacements forcés, ou faits en désespoir de cause, pour fuir la guerre, la persécution ou la pauvreté : il n’est plus possible d’ignorer ces phénomènes, y compris dans les recherches en littérature, qu’il faut dès lors mettre en relation avec des domaines interdisciplinaires comme les migration studies ou les 18memory studies, de façon à mieux comprendre des phénomènes collectifs comme la question des identités multiples, fracturées ou recomposées, à la suite de tel ou tel traumatisme historique – pensons simplement à l’exode de millions de Syriens hors de leur pays, depuis quelques années.
Venons-en donc aux récits, après avoir évoqué le voyage. On peut faire remonter, avec Friedrich Wolfzettel, le début du récit de voyage sous sa forme moderne, fondée sur la curiosité pour la découverte d’un ailleurs, à la fin du Moyen Âge, avec Marco Polo16. Mais il faut attendre le début du xixe siècle pour qu’on puisse parler, avec Roland Le Huenen, de son « entrée en littérature17 », avec des récits publiés par des auteurs déjà réputés pour leur œuvre littéraire, et dont le voyage était lui-même conçu comme celui d’un homme ou d’une femme de lettres. On s’accorde à voir en Chateaubriand, avec son Itinéraire de Paris à Jérusalem (1811), un point de départ marquant tout à la fois le début des Voyages en Orient d’écrivains et plus largement une orientation autobiographique donnée au genre viatique18. C’est cet arrière-plan qu’il faut garder à l’esprit lorsqu’on parle de la littérature de voyage du xxe ou même du xxie siècle. En effet, il existe toute une rhétorique du voyageur (celle, par exemple, de la « transparence » et de la « sincérité », que Philippe Antoine a mise en évidence, chez la génération des Lamartine, Dumas ou Nerval19), qu’on retrouve assez longtemps dans la littérature de voyage, mais qui est peut-être remise en cause, depuis une soixantaine d’années, c’est-à-dire depuis « l’ère du soupçon20 ». En sommes-nous sortis ? On peut en tout cas noter que la littérature de voyage témoigne parfois, de manière compensatoire, d’un besoin de plénitude, d’immersion, voire de fusion du sujet voyageur avec le monde qu’il parcourt, comme pour échapper à ce que l’on pourrait appeler la malédiction des médiations (esthétiques, idéologiques, culturelles…) entre le moi et son objet. Car alors même que le genre viatique repose sur l’idée d’une perception et 19d’une compréhension immédiates, on sait aujourd’hui que tout voyageur – comme la figure de l’ethnologue moderne étudiée par James Clifford – véhicule avec soi des présupposés culturels, pour ne pas dire, parfois, des clichés ethnocentriques, qui déterminent tout à la fois sa vision, sa compréhension des peuples étrangers21.
Le récit de voyage est en crise au moins depuis Tristes Tropiques de Lévi-Strauss, contemporain de l’essai de Nathalie Sarraute qu’on vient d’évoquer. C’est pourquoi l’adverbe « aujourd’hui », dans le titre de ce volume, ne renvoie pas seulement aux premières années de notre siècle, mais plus largement à une période qui va à peu près des années 50 à nos jours22. Cela dit, la crise du Voyage a peut-être elle-même une origine plus ancienne. Adrien Pasquali, qui a publié l’un des tout premiers ouvrages théoriques sur le récit de voyage, écrit très justement : « […] à chaque époque, à chaque transformation textuelle, l’appellation générique conserve la mémoire de toutes ses réalisations antérieures23. » C’est pourquoi il faut essayer de penser les évolutions génériques plutôt que les ruptures radicales, les résonances plutôt que les cloisonnements – sachant que rien ne se répète jamais à l’identique : même la survivance des topoï est à chaque fois une réactualisation, donc une reconfiguration dans un contexte nouveau. Prenons ici un seul exemple, celui de la mauvaise conscience du voyageur.
L’auteur de l’Itinéraire écrivait, à l’aube du xixe siècle : « On a tant de relations de Constantinople, que ce serait folie à moi de prétendre encore en parler24. » Bien sûr, Chateaubriand ne voulait pas rester dans la capitale ottomane, qui était pour lui la « capitale des peuples barbares25 » – bonne raison pour ne la considérer que comme une étape rapide sur le chemin de la Terre sainte. Mais le voyageur érudit énonçait aussi un paradoxe qui deviendra insistant quelques décennies plus tard, et qui résonne jusque dans notre modernité, à savoir qu’il 20est tout à la fois nécessaire et difficile d’être original, du moins si l’on est conscient de tout ce qui nous précède – pensons au Dictionnaire des idées reçues, dont le titre, sous sa forme définitive, apparaît précisément dans une lettre envoyée par Flaubert à son ami Bouilhet, de Damas, en septembre 185026. De la difficulté d’échapper aux lieux communs alors même qu’on est en train d’accomplir un parcours ritualisé : c’est sans doute cette conscience du déjà-vu et du déjà-dit, qui poussa le futur auteur de Madame Bovary à ne pas publier ses notes de voyage – tout en les recopiant soigneusement et en les conservant pour la postérité, dans un geste éminemment ambigu.
La mauvaise conscience du voyageur n’a fait que se renforcer et se complexifier au cours du xxe siècle. D’abord avec Segalen et sa critique de l’exotisme, qui poursuivait au fond, autour des années 1910, la critique flaubertienne de la stéréotypie, mais qui y ajoutait une dimension philosophique, celle de la radicale méconnaissance de l’altérité que le sujet voyageur européen était contraint de reconnaître, sous peine de se voir accuser de projeter son moi (et, avec lui, ses présupposés culturels) sur les peuples étrangers. Voyager, donc, mais en essayant de se mettre à la place de l’autre, en pensant « chinois », par exemple, et en tentant de nouvelles formes d’écriture. Ce décentrement ne trouvera sa légitimité qu’avec un décalage historique, d’autant que l’Essai sur l’exotisme est paru de manière posthume27, mais, à la suite de la décolonisation, il entrera en convergence avec la critique formulée par les études postcoloniales, celle d’un ethnocentrisme toujours sous-jacent dans la représentation que les voyageurs européens se font de l’ailleurs, comme Edward Said l’a exprimé avec force.
21Peut-on en sortir ? C’est une autre question. S’il est vrai que les récits de voyage sont souvent précédés, dès le xixe siècle, d’une préface ou d’un texte liminaire témoignant d’un malaise générique, comme si le narrateur ne pouvait s’affirmer que de manière négative, en insistant sur le caractère supposément non littéraire (non apprêté, « donc » sincère) de sa relation viatique28, la mauvaise conscience du voyageur semble s’être tout à la fois amplifiée et réorientée, au xxe siècle, vers des questions politiques, au sens large du terme, au point de mettre en question le voyage lui-même : comment peut-on encore voyager, en tant qu’Européen, dans des pays où la population est elle-même privée de cette facilité de circulation ? ou encore : comment peut-on se déplacer en touriste plus ou moins aisé, sachant pertinemment qu’on contribue, ce faisant, à renforcer un système inégalitaire ? Chacun peut trouver la réponse qui lui convient : voyager dans un espace proche, pratiquer l’écotourisme, voyager quand même en refoulant ce type de question, voyager en se disant que le tourisme est aussi une ressource pour les pays en développement, etc. Un constat paradoxal s’impose, en tous les cas : on continue à voyager, plus que jamais, et pas seulement depuis la France ni de l’Europe ou de l’Occident. Quant à la littérature de voyage, quelle que soit le flottement quant à sa définition générique, elle se porte elle-même très bien, son succès éditorial en témoigne.
Préparée par le xixe siècle, qui fut à la fois celui du triomphe de l’orientalisme érotisant et celui de sa critique par un certain nombre de voyageuses (pensons aux visions démythifiantes du harem que livre la comtesse de Gasparin dans son Journal d’un voyage au Levant, en 184829), la littérature de voyage est devenue aujourd’hui un genre ouvert, pas seulement hybride (ce que le récit de voyage est depuis longtemps), mais plus libre qu’avant, que ce soit dans ses acteurs, dans ses destinations, dans ses représentations, dans ses styles et ses parlures, peut-être aussi dans ses formes narratives et dans ses supports médiatiques. Enfin et 22surtout, la littérature de voyage est désormais dotée d’une forte conscience de soi, fût-ce pour contester ses propres usages, pour déjouer les attentes de ses lecteurs – mais c’est peut-être cela même que certains d’entre eux demandent : à un méta-niveau, la transgression des normes génériques, forme métaphorique du dépassement des frontières, est peut-être incluse dans l’identité actuelle de la littérature de voyage. Cédric Gras, dans Saisons du voyage (2018), ne cesse de se poser à lui-même la question de savoir pourquoi il voyage. Il ne renonce pas à raconter des aventures viatiques, mais il le fait en-dehors des circuits touristiques, et surtout il casse volontairement la linéarité du récit, mélange les lieux et les temps, et met en question sa propre démarche viatique. Son récit, signe des temps, a quelque chose d’une intranquillité réflexive, comme si la littérature de voyage ne pouvait aujourd’hui se dire qu’en se mettant elle-même en cause – tout en continuant à dire le monde dans sa beauté, mais aussi dans sa fragilité.
Sarga Moussa
CNRS, UMR THALIM
(CNRS – Université Sorbonne Nouvelle –ENS)
1 Le topos du voyageur menteur remonte à Strabon : voir à ce sujet l’introduction de Peter J. Brenner à son ouvrage Der Reisebericht, Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 1989, p. 14 et suiv. Voir également Percy G. Adams, Travellers and Travel Liars, 1680-1800, Los Angeles et Berkeley, University of California Press, 1962, et Anne-Gaëlle Weber, A beau mentir qui vient de loin. Savants, voyageurs et romanciers au xixe siècle, Paris, Champion, 2004.
2 Voir Jean-Claude Berchet, Le Voyage en Orient. Anthologie des voyageurs français dans le Levant au xixe siècle, Paris, Laffont, « Bouquins », 1985.
3 Voir la thèse manuscrite de Maéva Bovio, Les Voyages en Orient des écrivains français de 1919 à 1952. L’Orient romantique à l’épreuve du nouveau siècle (2 vol.), sous la dir. de Daniel Lançon, Université de Grenoble Alpes, novembre 2016, et Sylvain Venayre, Panorama du voyage (1780-1920). Mots, figures, pratiques, Paris, Les Belles lettres, 2012.
4 Claude Lévi-Strauss, Tristes Tropiques, Paris, Plon, « Terres humaines », rééd. 1984, p. 9.
5 Voir à ce propos Vincent Debaene, L’Adieu au voyage. L’ethnologie française entre science et littérature, Paris, Gallimard, « Bibliothèque des sciences humaines », 2010.
6 Voir Christine Montalbetti, Le Voyage, le monde et la bibliothèque, Paris, PUF, 1997.
7 Sur l’importance de cette notion d’expérience, voir Frédéric Tinguely, « Forme et signification dans la littérature de voyage », Le Globe. Revue genevoise de géographie, 146, 2006, p. 53-65 ; l’auteur propose la définition suivante : « Indépendamment de tout critère formel, on pourra par conséquent définir la littérature viatique comme l’ensemble des textes référentiels d’un déplacement dans l’espace » (p. 55 ; souligné par l’auteur).
8 Voir Yves Baudelle, « Sur les pas d’Hérodote. Nicolas Bouvier et l’usage du monde antique », in « Nicolas Bouvier. L’usage du monde », études réunies par Yves Baudelle et Christian Morzewski, Roman 20-50, hors-série no 8, mars 2018, p. 57-77. Sur l’importance de L’Usage du monde (1963), et plus largement de l’œuvre de Nicolas Bouvier dans la littérature viatique contemporaine, voir le dossier « Bouvier, intermédiaire capital », dans Viatica, hors-série no 1, octobre 2017 : http://revues-msh.uca.fr/viatica/ (consulté le 10/06/2020).
9 Voir Philippe Antoine (dir.), Voyages de la lenteur, série « Voyages contemporains », vol. 1, Paris, Lettres modernes Minard, 2011.
10 Clara Arnaud, Au détour du Caucase. Conversation avec un cheval, Montfort-en-Chalosse, Gaïa Éditions, 2017.
11 Philippe Valéry, Par les sentiers de la soie : à pied jusqu’en Chine, Paris, Transboréal, 2014.
12 « […] ils se remettent tous en selle, les cooks, les cookesses, et déployant, non sans quelques intentions de majesté, des parasols en coton blanc, ils prennent la direction du Nil. Ils disparaissent ; la place nous appartient » (Pierre Loti, Voyages (1872-1913), éd. Claude Martin, Paris, Laffont, « Bouquins », 1991, p. 1291). Sur la façon dont certains écrivains ont tenté de se démarquer des touristes en se présentant comme de « bon » voyageurs, voir Jean-Didier Urbain, L’Idiot du voyage. Histoires de touristes, Paris, Payot, 1991.
13 Voir notamment Ahmad Zaki, L’Univers à Paris. Un lettré égyptien à l’Exposition universelle de 1900, sous la dir. de Mercedes Volait, trad. de l’arabe et annotation par Randa Sabry, Paris, Éditions Norma, 2015.
14 Pour une compréhension renouvelée du phénomène de l’exotisme littéraire, voir Jean-Marc Moura, La Littérature des lointains : histoire de l’exotisme européen au xxe siècle, Paris, Champion, 1998. Sur la critique de l’exotisme dans la littérature francophone, voir Charles Forsdick et David Murphy (dir.), Francophone Postcolonial Studies. A Critical Introduction, Londres, Routledge, 2003, et Romuald Fonkoua (dir.), Les Discours de voyage. Afrique – Antilles, Paris, Karthala, 2009.
15 Signalons ici un petit texte aux frontières du récit de voyage, publié par Édouard Glissant à la fin de sa vie, mais rédigé sur la base du témoignage de son épouse Sylvie Séma : La Terre magnétique. Les errances de Rapa Nui, l’île de Pâques (2007), rééd. avec une préface de Patrick Chamoiseau, Paris, Éditions du Seuil, « Points », 2019.
16 Friedrich Wolfzettel, Le Discours du voyageur : pour une histoire littéraire du récit de voyage en France, du Moyen Âge au xviiie siècle, Paris, PUF, 1996.
17 Roland Le Huenen, Le Récit de voyage au prisme de la littérature, Paris, PUPS, « Imago Mundi », 2015, chap. vi (« Le récit de voyage : l’entrée en littérature », p. 91-103).
18 Voir Jean-Claude Berchet, « Un voyage vers soi », Poétique, no 53, 1983, p. 91-108. Sur l’Itinéraire de Chateaubriand, voir le « Foliothèque » Philippe Antoine commente Itinéraire de Paris à Jérusalem de Chateaubriand, Paris, Gallimard, « Folio », 2006.
19 Philippe Antoine, Quand le Voyage devient Promenade. Écritures du voyage au temps du romantisme, Paris, PUPS, « Imago Mundi », 2011.
20 Nathalie Sarraute, L’Ère du soupçon (1956), Paris, Gallimard, « idées », 1972.
21 Voir James Clifford, The Predicament of culture (1988), trad. de l’américain par Marie-Anne Sichère, Malaise dans la culture : l’ethnographie, la littérature et l’art au xxe siècle, Paris, École Nationale Supérieure des Beaux-Arts, 1996.
22 Sur cette période, voir l’essai de Guillaume Thouroude, La Pluralité des mondes. Le récit de voyage de 1945 à nos jours, Paris, PUPS, « Imago Mundi », 2017.
23 Adrien Pasquali, Le Tour des horizons. Critique et récits de voyage, Paris, Klincksieck, « littérature des voyages », 1994, p. 101.
24 François-René de Chateaubriand, Itinéraire de Paris à Jérusalem, éd. Jean-Claude Berchet, Paris, Gallimard, « Folio », 2005, p. 258.
25 Ibid., p. 256.
26 « Tu fais bien de songer au Dictionnaire des Idées Reçues. Ce livre complètement fait et précédé d’une bonne préface où l’on indiquerait comme quoi l’ouvrage a été fait dans le but de rattacher le public à la tradition, à l’ordre, à la convention générale, et arrangée de telle manière que le lecteur ne sache pas si on se fout de lui, oui ou non, ce serait peut-être une œuvre étrange, et capable de réussir, car elle serait toute d’actualité » (lettre de Flaubert à Louis Bouilhet, de Damas, le 4 septembre 1850, in Gustave Flaubert, Correspondance, t. I, éd. Jean Bruneau, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1973, p. 678-679 ; souligné par l’auteur).
27 Cet ouvrage inachevé, composé de notes, parut pour la première fois en 1955 – on notera la coïncidence avec la publication de Tristes Tropiques de Lévi-Strauss. Mais c’est l’édition parue en 1978 chez Fata Morgana qui a véritablement relancé l’intérêt pour l’Essai sur l’exotisme, et, à travers lui, pour la question de l’altérité en littérature – autre coïncidence : le fameux essai d’Edward Said, Orientalism, que l’on considère comme l’un des textes fondateurs des études postcoloniales, est paru à la même date aux États-Unis.
28 « Ceci n’est pas un livre, ni un voyage », écrit Lamartine dans l’Avertissement de son Voyage en Orient [1835], éd. Sarga Moussa, Paris, Champion, 2000, p. 43. Sur cette question, voir Jean-Claude Berchet, « La préface des récits de voyage au xixe siècle », dans György Tverdota (dir.), Écrire le voyage, Paris, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 1994, p. 3-15.
29 Voir Sarga Moussa, La Relation orientale. Enquête sur la communication dans les récits de voyage en Orient (1811-1861), Paris, Klincksieck, 1995, p. 193 et suiv. Sur les voyageuses d’expression française aux xixe et au xxe siècles, voir Natascha Ueckmann, Genre et orientalisme, trad. de l’all. par Kaja Antonowicz, Grenoble, UGA Éditions, 2020 (sous presse).
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-11102-3
- EAN : 9782406111023
- ISSN : 0035-2136
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-11102-3.p.0013
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 01/03/2021
- Périodicité : Mensuelle
- Langue : Français
- Mots-clés : littérature de voyage, décentrement, formes, crise, mauvaise conscience