YouTubers, The invention of a subjective enunciation?
- Publication type: Journal article
- Journal: Études digitales
2019 – 1, n° 7. Youtoubeurs, youtubeuses : inventions subjectives - Authors: Gomez-Mejia (Gustavo), Nicey (Jérémie), Stalder (Angèle)
- Pages: 17 to 32
- Journal: Digital Studies
Youtubeurs, invention
d’une énonciation subjective ?
Dans le champ des études digitales, Youtube est souvent défini comme une « archive culturelle » : une « archive culturelle » dont la « valeur est un résultat direct de ses caractéristiques non-filtrées, désordonnées, vernaculaires et extrêmement hétérogènes1 », selon les termes de Jean Burgess et Joshua Green en 2009. La valeur de Youtube semble également associée au vertige que procurent ses indicateurs de performance parmi les mythologies statistiques qui caractérisent l’expérience culturelle de notre époque. Avec 1,9 milliards d’utilisateurs mensuels et plus d’1 milliard d’heures de vidéos visionnées chaque jour, la plateforme a tiré parti des vogues successives (le « communautaire », le « participatif », le « social ») et n’a cessé de se transformer depuis sa création en 2005. – « Comment Youtube est devenu Notretube2 ? » : cette question quasi-tautologique de Henry Jenkins peut être reposée en 2019 pour éclairer une trajectoire particulière de la plateforme. Youtube, qui se positionnait jadis comme un simple site de partage de vidéos se targue désormais dans sa présentation institutionnelle non seulement de pouvoir centraliser une « audience internationale » planétaire mais aussi et surtout de « soutenir les créateurs3 ». Ses créateurs – pourrait-on dire – ou plutôt sa propre « marque dérivée » de créateurs : les youtubeurs.
« Youtubeurs » ou « youtubeuses », « créateurs4 » ou encore « vidéastes5 »… : en fonction des acteurs et des discours, des langues et 18des genres, les appellations peuvent varier pour désigner cette catégorie hétéroclite de sujets qui se lancent ou s’investissent durablement dans la production de contenus audiovisuels sur Youtube.com. Qu’il soit question de jeux vidéo ou de maquillage, d’humour ou de politique, de vulgarisation ou de technologie, des intérêts très variés sont investis en images par des sujets se reconnaissant sous cette étiquette générique. Au-delà du cadre strict des vidéos et des chaînes, la portée globale de ceux qu’on nomme « youtubeurs » s’accroît ainsi dans les domaines les plus divers, donnant parfois l’impression de « surprendre » les sociétés contemporaines lorsqu’elles découvrent à quel point leurs voix comptent. C’est sans doute dans cet esprit que le chapô du Frankfurter Allgemeine Zeitung, journal allemand qui consacrait sa section Feuilleton du 16 juin 2019 à Youtube, projette une certaine inquiétude sur les créateurs en question : « Les voix qui s’expriment sur cette plateforme ne peuvent plus être ignorées. Mais que se passe-t-il6 ? ».
Dans la mesure où elle s’intègre au champ des études digitales, la figure du youtubeur offre à l’analyse le spectacle dialectique de l’expression d’un sujet et d’une industrie. Une figure qu’il convient d’historiciser puisque les valeurs qui lui sont aujourd’hui spontanément associées (authenticité, communauté, intimité, légitimité, célébrité7) résultent d’un long travail énonciatif : incarner, filmer, monter, montrer, animer, mettre en mots. Autant de facettes d’un travail youtubesque reconnu par les abonnés, les médias, les marques et les institutions ? Qu’en près d’une quinzaine d’années, Youtube, devenu l’un des bijoux de l’oligopole de Google, ait pu engendrer une appellation dérivée pour désigner ses producteurs de contenus et tracer les contours d’une figure devenue triviale, peut nous interpeller d’emblée : le « youtubeur » pourrait en effet n’être 19qu’un gentilé de plateforme, un vocable de plus dans ce paradigme que peuplent aussi le « twittos » ou l’« instagrammeuse ». Or, ce qui interroge davantage c’est que ce soit justement cette figure – le youtubeur – qui soit chargée d’inventer progressivement une énonciation particulière, susceptible d’interpeller une myriade de sphères sociales en venant leur parler : qu’une figure ainsi nommée, dont l’expression est en apparence indissociable de la plateforme qui l’héberge, accède à son tour au rang de figure hégémonique de notre époque. Comment expliquer que des miniatures des lecteurs vidéo d’une chaîne Youtube puissent surgir in fine des figures emblématiques, des voix influentes et des icônes adulées ? La préoccupation qui nous anime est de cet ordre : il faut alors observer les modalités d’expression des youtubeurs et leurs relations médiées au monde si l’on veut essayer de comprendre un tant soit peu comment ils s’érigent, domaine par domaine, en sujets énonciateurs des multiples facettes de la vie.
Chaînes, vidéos, abonnés :
l’énonciation subjective en question
Dans ses travaux fondateurs sur l’énonciation, Émile Benveniste définit la « subjectivité » comme « la capacité du locuteur à se poser comme sujet8 ». Une capacité éminemment liée au fait de pouvoir dire « je » : « Est “ego” qui dit ego9 », écrit-il en 1966. Pour le linguiste d’Alep, nous pouvons « convertir en énonciation subjective10 » une proposition X ou Y à partir du moment où elle trouve un je-sujet l’assumant. Que penserait aujourd’hui Benveniste de Youtube ? Serait-il aussi intéressé que les auteurs de ce volume par la manière dont les youtubeurs et youtubeuses se posent comme sujets, disent « je » et se positionnent devant toute sorte d’énoncés ? Ces parallèles sont loin d’être rhétoriques. D’une part, la notion d’énonciation nous oblige à penser chaque Youtubeur comme un 20sujet qui doit gérer sans cesse sa position dans le langage, face à autrui et à une certaine réalité communicationnelle. D’autre part, l’extrapolation des célèbres Problèmes de linguistique générale vers le champ émergent des Études digitales nous fait prendre conscience d’un phénomène complexe : cette énonciation n’est pas simplement le fait d’un dire (d’un « locuteur » qui assure « la conversion individuelle de la langue en discours11 ») mais d’une triangulation chaîne-vidéos-abonnés ; l’énonciation subjective en question engage ainsi le youtubeur dans une complexe « poétique du numérique qui articule des manières de faire, avec les régimes du dire et du regard qui lui sont liés12 ». Au-delà des formes strictement langagières, et en dialogue avec les recherches ici réunies, nous pouvons situer trois strates d’analyse pour comprendre ces « articulations » qui rendent possible l’énonciation subjective des youtubeurs.
Chaînes : l’infrastructure de Youtube
comme cadre énonciatif
Le youtubeur ou la youtubeuse s’exprime sur une plateforme. En ce sens, la prise en compte de quelques conditions techno-sémiotiques de production peut offrir une base pour situer l’analyse de son énonciation. Celle-ci existe dans un cadre matériel précis, fourni par l’infrastructure de Youtube.com, qui peut faire l’objet d’une description critique dans le cadre d’une « poétique de l’écrit d’écran13 ». Pour le youtubeur, la plateforme est une sorte de « fabrique de soi14 » qui est loin d’être neutre et confronte l’expression du sujet à une série de disciplines et de normes. Au degré zéro de celle-ci, le sujet qui souhaite exister à l’écran se trouve pris dans un dispositif d’énonciation qui implique l’ouverture d’un « compte » et d’une « chaîne » comme l’expliquent les notices de Youtube : « Avec un compte Google, vous pouvez regarder des vidéos, 21cliquer sur “J’aime” et vous abonner à des chaînes. Cependant, sans chaîne YouTube, vous ne bénéficiez d’aucune présence publique sur YouTube. Même si vous possédez un compte Google, vous devez créer une chaîne YouTube pour mettre en ligne des vidéos, ajouter des commentaires ou créer des playlists15 ». La possession d’une « chaîne » conditionne l’accès du sujet à une forme de dignité de « personne », reconnue par la plateforme et pouvant s’exprimer publiquement. L’image d’une « chaîne personnelle » file alors la métaphore fondatrice du tube cathodique pour accompagner le sujet dans son appropriation d’un « nom » et d’une adresse URL propre (un « indicatif16 » distinct qui suit la syntaxe https://www.youtube.com/user/nomdelachaine). Cette « chaîne » fonctionne, d’une part, comme une page web dont le sujet est l’auteur-énonciateur (un montage comportant une photo, une bannière, des miniatures et des auto-descriptions) et comme un espace d’archivage vivant de vidéos (avec leurs lecteurs, titres et légendages) sous sa responsabilité. À ce cadre énonciatif (technique, documentaire, éditorial, architextuel) vis-à-vis duquel le youtubeur négocie sa propre figuration suivant la promesse du « Broadcast yourself », s’ajoutent d’autres possibilités qui illustrent bien la « plateformisation17 » de Youtube : intégration de la « chaîne personnelle » au « Programme Partenaire YouTube », activation des « fonctionnalités de monétisation », respect des « consignes relatives aux contenus adaptés aux annonceurs18 ». Autant de paramétrages énonciatifs que l’infrastructure de Youtube cristallise, lorsque l’expression du youtubeur cherche à se traduire en une source de « génération de revenus ».
22Vidéos : la performance incarnée
d’une énonciation audiovisuelle
Le youtubeur ou la youtubeuse vous parle et vous regarde dans les yeux. Ces deux traits sont au cœur de ce qui caractérise stéréotypiquement son énonciation : une certaine prosodie, sa façon de saluer, les expressions de son visage ou de ses yeux, articulent concrètement « des manières de faire, avec les régimes du dire et du regard » dans le cadre scripto-audio-visuel des lecteurs vidéo qui actualisent une présence. Le fait que le corps soit une ressource primordiale dans ses productions audiovisuelles nous rappelle l’héritage vivant de la pratique du vlogging (contraction de vidéo et de blogging) : « Une forme de production de vidéos en ligne quasi-exclusivement créée par les utilisateurs […] emblématique de la participation sur Youtube. Ses antécédents se trouvent dans la culture des webcams, des blogs personnels, et dans la “culture du confessionnal” répandue comme caractéristique des talkshows et de la téléréalité focalisée sur l’observation de la vie de tous les jours19 ». Au prisme de cette définition canonique de Burgess et Green, les monologues délivrés face à la caméra, accueillis par Youtube dès ses débuts, constituent la « matrice culturelle » d’une énonciation subjective apte à produire des effets connotatifs de proximité, d’intimité et d’authenticité. En « regardant l’œil vide de la caméra », le youtubeur configure une situation du type « il est là, je le vois, il me parle », telle que la décrivait Eliseo Verón, qui voit le sujet filmé s’adresser explicitement aux internautes-spectateurs et performer « l’axe Y-Y20 » (les yeux dans les yeux). Au-delà du vlog lui-même, d’autres genres canoniques associés aux youtubeurs ont permis de diversifier les dispositifs d’énonciation mis en place et manières de s’incarner à l’écran : « hauls (déballages), tutoriels, questions-réponses et challenges21 » complètent désormais le répertoire expressif des « formats privilégiés » par les youtubeurs ; autant d’occasions pour multiplier leurs performances incarnées au prisme distinctif des styles de captation et de montage qui « font » ce qu’ils « sont ».
23Abonnés : la gestion d’horizons
d’attente relationnels
Le youtubeur anime une communauté d’abonnés. « Abonne-toi ! », « Abonnez-vous », « Subscribe ! » sont devenus des énoncés ritualisés, adressés aux internautes-spectateurs à la fin de la plupart de vidéos. Que nous disent-ils des horizons d’attente relationnels qui se tissent sur Youtube ? De toute évidence, le sujet-énonciateur qu’est le youtubeur doit intérioriser le rôle d’une figure énonciataire que la nomenclature de Youtube qualifie d’« abonné », là où d’autres plateformes font appel à des termes comme « follower » ou « ami ». Absente du contexte de production, la figure complémentaire de l’abonné est prise en charge par la parole du youtubeur, notamment lorsque celui-ci anticipe des effets symboliques au détour de séquences devenues habituelles (salutations, requêtes, remerciements, excuses22). Au détour d’un clic, l’enjeu de la transformation de l’internaute-spectateur (accidentel ou occasionnel) en « abonné » est double. Sur le plan relationnel, il s’agit d’instaurer un imaginaire « communautaire » formalisé par les configurations de la plateforme : en proposant aux abonnés des notifications pour chaque nouvelle vidéo, le dispositif Youtube module un horizon narratif de l’attente. Et dans la durée, au détour des engagements qui se jouent dans l’expérience de visionnage réitérée et par l’intermédiaire des boutons « j’aime » et des commentaires, ce sont des attachements qui se jouent vis-à-vis du youtubeur, dans un cadre plus large qui peut dépasser le périmètre de Youtube (allant d’un suivi de la présence du youtubeur sur d’autres plateformes à l’intégration des collectifs se rassemblant lors de meet-ups ou conventions). Pour décrire la portée de cet horizon, la notion d’« interaction parasociale23 » est souvent mobilisée pour qualifier cette relation psychologique qui fait croire aux membres d’une audience qu’ils connaissent une personnalité médiatique comme si c’était un ami. Cette 24possible illusion d’intimité à distance, entretenue par l’énonciation du youtubeur, ouvre à son tour une série de questionnements qui relèvent d’une rationalité instrumentale : en tant que partenaire « monétisé » de la plateforme ou en tant que médiateur pour des acteurs tiers (marques, institutions), le youtubeur intériorise l’augmentation du nombre d’abonnés comme un objectif en soi. Cette orientation téléologique et transactionnelle de la parole du youtubeur à l’égard des « abonnés » doit être interrogée à la lumière d’intérêts bien précis : à partir du moment où l’on sait qu’un « nombre minimum d’abonnés » est requis pour qu’un youtubeur puisse bénéficier des « fonctionnalités de monétisation », les motifs énonciatifs conventionnels de l’attachement à sa communauté de « fans » se donnent à lire autrement. Une courbe statistique pèse in fine sur l’énonciation du youtubeur, telle qu’on a pu le penser jusqu’ici, à travers ces strates qui configurent sa figure générique – pourtant destinée à s’épanouir dans une multiplicité de paysages.
Subjectivité, circularité, conformité :
les paysages énonciatifs sur Youtube
En apparence, quatre grands champs semblent nourrir les productions des vidéastes sur Youtube : les humoristes, les joueurs (de jeux vidéo ou gamers, de musique, etc.), les vulgarisateurs et les auteurs de tutoriels (allant du tuto beauté au DIY). Mais l’observation des multiples thématiques proposées par la plateforme, qu’elles reposent soit sur les rubriques, soit sur les tags ou simplement sur la diversité des discours et des approches dans les vidéos24, invite en réalité à penser la pluralité des énonciateurs eux-mêmes – lesdits youtubeurs – tout en relevant leur appropriation du dispositif autant que leur adaptation à son régime25 25et à ses contraintes. Que constate-t-on en la matière ? D’une part un éclatement et une segmentation ; d’autre part une forme de stylisation ; enfin, au-delà de la promotion de savoirs et de savoir-faire profanes, se font jour des postures énonciatives dans un contexte de marché de l’attention, marquées par des intérêts et des velléités y compris en dehors de la plateforme elle-même.
La spécialisation par centres d’intérêt est un élément signifiant de Youtube – et de ses concurrents tels Dailymotion, Vimeo, Vpod ou encore Rutube. Combinant les positions de média de masse et d’extrême personnalisation, la plateforme s’appuie sur les principes et mécanismes des réseaux sociaux numériques, pour lesquels l’établissement et la juxtaposition des « rayons » de centres d’intérêt font partie des conditions d’expression de la subjectivité. De fait, Youtube participe à l’éclatement des consommations médiatiques par sa définition de catégories (thématiques), éclatement renforcé par les logiques d’indexation de ses contenus autant que par ses recommandations algorithmiques26. Il en résulte un paysage hyper-segmenté, spécialisé à double titre : non seulement du côté de la production, celle des youtubeurs et youtubeuses, qui optent pour des créneaux éditoriaux divers et en tous les cas distinctifs27 (dont ce dossier tente de se nourrir, cf. infra) ; spécialisé aussi du côté des 26usagers, acteurs de son succès, à la fois en tant que niches successives ou croisées – un utilisateur pouvant privilégier plusieurs thématiques – que le marché de l’attention va savoir valoriser, développer et exploiter avec précision étant données les capacités désormais acquises de ciblage en ligne, et en tant qu’opportunités de nourrir eux-mêmes la plateforme, soit comme composantes d’auto-alimentation par le biais des recommandations auxquelles Youtube incite, soit par l’invitation à créer leur propre chaîne, prétendument singulière28.
Youtube procède en outre, avec ses énonciateurs, à une stylisation d’icônes. Les comptes les plus populaires sont en effet mis en avant par la plateforme, à la fois en home page (ou page d’accueil) et dans les différents espaces de recommandation de visionnage. Certains youtubeurs et certaines youtubeuses bénéficient ainsi du phénomène de vedettariat et constituent, par leurs cadres d’expression voire par leurs gimmicks (notamment ceux d’introduction29, souvent « Salut… » ou « Coucou… ») – en clair par leur énonciation subjective – des modèles esthétiques30. En cascade en quelque sorte, cet univers référentiel et starisé sert d’ailleurs le discours d’incitation de Youtube à la création de nouvelles chaînes et de nouveaux profils. Cette incitation à devenir youtubeur ou youtubeuse rend au passage plus poreuse encore la frontière entre professionnels et amateurs31 27et entre sphère privée et sphère publique/publicisée32. Si tout usager est invité à devenir auteur et diffuseur de ses contenus, en définissant son modèle thématique et esthétique – reprenant en cela la formule ancienne de Walter Benjamin « Chacun aujourd’hui peut légitimement revendiquer d’être filmé33 » – les comptes ne sont auto-médiés qu’en apparence. Ils doivent s’intégrer à un univers organisant pour eux un certain type de médiations, au service d’autres acteurs et d’autres discours sociaux. En témoignent les prescriptions, l’incitation à travailler sa marque, à publier régulièrement donc à maintenir l’attention de son public-cible, autrement dit une inclusion et un renforcement des logiques de notoriété en ligne34.
Il convient enfin de souligner, par et par-delà Youtube, les mises en circulation médiatiques des contenus de ses vidéastes. La nature hautement réticulaire des flux numériques35, fondée sur la viralité, ainsi que l’hyperconnectivité des usagers de la plateforme conduisent en effet à de multiples reprises énonciatives des vidéos par d’autres acteurs – ces reprises étant promues par des fonctionnalités dédiées (boutons de partage, fonction embed des lecteurs, etc.). Parmi ces acteurs tiers portant un intérêt à la figure des youtubeurs, on compte les médias dits traditionnels (soit sur leur support d’origine, soit sur leur site web, soit sur les deux), qui balancent entre fascination et dénigrement36, entre concurrence et création de rubriques dédiées leur constituant en retour une audience assurée – qu’on pense, par exemple, à la rubrique 28du magazine hebdomadaire Télérama « Le meilleur de YouTube37 » (« Que voir sur YouTube ? Qui sont les meilleurs youtubeurs ? […] »). À cette curation et cette caisse de résonance médiatique – qui peut aller jusqu’à l’enrôlement de vidéastes réputés (en France par exemple, Norman ou Monsieur Poulpe, dans des productions informationnelles et/ou fictionnelles), s’ajoutent des débats, conférences ou événements divers (salons, rencontres/meet ups, etc.), ce qui traduit pour la figure des youtubeurs un positionnement certain au sein d’arènes discursives différenciées (politiques, marchandes, etc.). En raison des pouvoirs qui pour certains leur sont attribués, par exemple le statut d’influenceurs38, les youtubeurs exacerbent même ces logiques en faisant (re)vivre leur énonciation dans des sphères hybrides rémunératrices, par exemple via la mise en place de services et produits dérivés (goodies, spectacles, etc.). Il serait donc naïf de ne penser la subjectivité des youtubeurs que comme intentionnelle ou comme véhicule d’un narcissisme : les identités de ces derniers sont non seulement fabriquées (cf. supra) et non cloisonnées, mais elles participent surtout d’une industrie39 qui, sous couvert d’un discours idéologique pseudo-libertaire, formule des injonctions puissantes auprès de ses contributeurs et qui, davantage que la création de valeur, procède d’une captation de valeur.
29Mises en scène, identifications, médiations :
présentation des articles
Comment analyser les complexités qui caractérisent l’énonciation subjective des youtubeurs ? Quels sont les angles privilégiés par les recherches francophones face à cet objet dans le champ des études digitales ? Face à ces questions et à l’image de leur objet d’étude, les contributions qui composent ce dossier se caractérisent par leur diversité : diversité des approches, diversité des terrains numériques, diversité des youtubeurs et youtubeuses, et diversité de leurs publics. Au sein de cette diversité, trois axes majeurs se dessinent et nous permettent de saisir les contours d’une énonciation subjective propre à la plateforme.
Le premier axe est celui de la mise en scène. Une mise en scène que Jean Châteauvert nous propose d’aborder dans la première contribution de ce numéro intitulée « Youtubeurs : l’expérience de l’internaute ». Il y étudie l’expérience du visionnage par leurs publics de youtubeurs en analysant les commentaires qu’ils postent sur une autre plateforme, Facebook, dans une approche temporaliste. Au cours de son étude il relève des principes de mise en scène, qui cultivent des réalisations à la « facture amateur », instituant ainsi entre le youtubeur et son public comme « cadre de référence une situation de communication interpersonnelle ». Des mises en scène qui peuvent aller jusqu’à des scénographies prototypiques comme le montrent Adrien Mathy et Jean-Baptiste Fanouillère dans la deuxième contribution de ce dossier, « Énonciation subjective et simulacre d’intimité sur Youtube : le cas de l’asmr ». Se focalisant sur un genre spécifique de vidéo, l’asmr (Autonomous Sensory Meridian Response) ils avancent « certaines caractéristiques de la pratique des youtubeurs » qui permettent de mettre à jour une énonciation subjective et sensorielle propre à Youtube. Partant d’un corpus de vidéos issues de chaînes anglophones et francophones, ils considèrent alors cette scénographie « comme un dispositif complexe qui sert le discours et aide sa réception ». Une mise en scène interrogée aussi par Laurence Allard dans la contribution « Youtubeuse, youtubeur : travailler à être soi-même à l’âge du talent numérique ? ». Réfléchissant à partir d’un corpus de vidéos (et de leurs commentaires) produites par de jeunes célébrités 30d’internet qui voient s’ouvrir une carrière d’influenceur, et y associant l’analyse d’entretiens réalisés avec des acteurs du champ concerné, elle nous invite à comprendre comment le « travail expressif » – consistant en partie à « se raconter » sur des plateformes socio-numériques comme Youtube ou des applications sociales telles que Instagram, Snapchat ou Tiktok – peut conduire des formes socio-économiques légitimées d’« égoentreprenariat ».
Un second axe permet d’entrevoir des marques d’énonciations subjectives qui constituent des éléments identificatoires comme des marques de présences, d’incarnations, d’ethos qui accompagnent les abonnés au travers de certaines niches de Youtube. Ainsi, Lorreine Petters dans sa contribution « La prescription des marques et des pratiques marchandes sur les chaînes de youtubeuses françaises » analyse un corpus de vidéos publiées sur des chaînes entre janvier et juin 2018 dans une approche pragmatique de la communication. Elle observe une énonciation propre qui relève du désir de l’extimité, « marquée notamment par le vécu » et « des aspects intimes de leur vie » qui alimentent « un effet de sincérité ainsi qu’un sentiment d’accessibilité ». Partant de l’hypothèse que Youtube constitue « un espace d’autopublication relativement libre et techniquement accessible pour des amateurs » permettant de « développer des modes d’énonciations identitaires libérés des contraintes des sociétés de production audiovisuelles », Laure Bolka-Tabary et Marie Després-Lonnet dans « Vidéos d’“unboxing” d’un smartphone : le genre comme marqueur énonciatif de la légitimité des youtubeurs “influenceurs” » ont étudié un corpus de 25 vidéos de déballage de l’iPhone 7 pour saisir cette énonciation présupposée. Hypothèse invalidée par l’analyse, l’étude laisse entrevoir des énonciations aux marques identificatoires fortement genrées favorisées par la plateforme. Des marques d’énonciation fortes sont aussi relevées dans la sphère des joueuses de jeu vidéo. Mobilisant une approche ethnographique pour analyser la présence sur le web de la joueuse Pixelle, Michael Perret, dans sa contribution « “Retrouvez-moi sur Twitch !” La gestion du live streaming comme relation au public et entrée en jeu », souligne des variations locales quand la youtubeuse agit sur la plateforme de streaming Twitch, mais aussi des invariants qui sont des éléments constitutifs du contrat qui lie la joueuse à son public sur Youtube, constituant là encore des marques identificatoires fortes. La contribution de Virginie Spies, « Youtube, un espace d’expression pour 31le chercheur ? » clôt cet axe du dossier. C’est un témoignage réflexif qui « repose en partie sur une forme d’observation participante » : co-réalisatrice de la chaîne Des médias presque parfaits avec Guillaume Hidrot, partie prenante du Frames Festival elle revient par son témoignage sur les questions qu’ils se sont posées en termes d’énonciation notamment par rapport à la place et au rôle de l’énonciateur dans leur entreprise de médiation scientifique en tant que chercheur et vidéaste auteurs.
La question qui lie énonciation subjective et médiation est celle qui parcourt le dernier axe de ce dossier. Certaines formes de médiation s’appuient sur des styles d’existence40 aux configurations relationnelles très spécifiques. La première forme relevée est celle qu’étudie Christophe Premat dans sa contribution « La redécouverte d’un éthos journalistique avec la chaîne Youtube Thinkerview ». C’est par le choix de l’invisibilité du journaliste-énonciateur et sa dénomination par un pseudonyme, Sky, que la médiation peut advenir. Ce qui n’est pas sans susciter l’étonnement, notamment de l’humoriste Guillaume Meurice, qui a testé Thinkerview en 2017 et qui reconnaît là une énonciation singulière : « C’est le pendant de tous les youtubeurs qui sont face caméra et qui crient moi, moi, moi41 ! ». Autre public, autres youtubeurs, autre forme de médiation. C’est ce que nous montrent Sandrine Philippe et Brigitte Simonnot dans leur contribution « Les adolescents et Youtube, des loisirs aux savoirs. Quelle figure des youtubeurs dans l’évaluation de l’information en ligne ? ». Interrogeant des adolescents sur leurs pratiques informationnelles sur la plateforme Youtube, les deux chercheuses soulignent dans les critères de choix et de validation de contenus déclarés par les adolescents la perception de marqueurs de réputation, mais aussi l’identification de marques d’autorité cognitive, et surtout l’importance portée à « la performance montrée, et la performance dans la qualité de production des vidéos ». Enfin, ce dossier s’achève par un texte qui conduit notre regard sur la foule des « experts par en bas » qui contribue en grande partie à la plateforme, et ce dès ses débuts. En combinant approches sémiotiques des images, sociologiques des pratiques 32culturelles amateurs et socio-économiques, Laurie Schmitt, dans sa contribution « Les youtubeurs, ces témoins ordinaires d’évènements extraordinaires », étudie ces nouveaux intermédiaires qu’elle qualifie de youtubeurs d’un jour, « victimes d’événements-catastrophes (séismes ou inondations) ou touristes, spectateurs inopinés » de phénomènes naturels qui « partagent leurs expériences vécues sur Youtube ». L’étude des images et de la créativité de vidéos postées entre 2009 et 2014 montre « une esthétique de leurs productions audiovisuelles », indissociable de leur prise de vue en tant que forme de médiation. Mais ce sont là des « youtubeurs » qui ne s’énoncent pas comme tels, et ne mettent pas en avant leur subjectivité propre.
Ces axes d’analyse constituent des apports originaux des recherches francophones au sein du champ émergent que représente l’étude des youtubeurs comme figures emblématiques des cultures digitales contemporaines. Entre chaînes, vidéos et abonnés, l’analyse de l’énonciation qui caractérise les youtubeurs nous invite à penser le lien étroit qui se tisse entre la subjectivité et des logiques médiatiques de circularité et de conformité. Cet effort de déconstruction permet une approche complexe de l’énonciation subjective des youtubeurs et des youtubeuses, susceptible de saisir ce qui se joue dans leurs mises en scène, face aux identifications et aux médiations singulières qu’ils peuvent configurer.
Gustavo Gomez-Mejia
Jérémie Nicey
Angèle Stalder
Université de Tours
1 Jean Burgess, Joshua Green, YouTube : Online video and participatory culture, Polity Press, Cambridge, 2009, p. 89.
2 Henry Jenkins, “How YouTube became OurTube”, Confessions of an Aca-Fan, 18 octobre 2010. http://henryjenkins.org/blog/2010/10/how_youtube_became_ourtube.html.
3 “YouTube pour la presse”, Youtube, consulté le 15 juin 2019. https://www.youtube.com/intl/fr/yt/about/press/.
4 Bastien Louessard, Joëlle Farchy, Scène de la vie culturelle : YouTube, une communauté de créateurs, Presses des Mines, Paris, 2018.
5 Boris Urbas, « Mémoires d’une culture vidéoludique sur la plateforme Youtube. Expériences de vidéastes amateurs et patrimonialisation du jeu vidéo », Les cahiers du numérique, vol. 12, no 3, 2016, p. 93-114.
6 « Die Stimmen, die sich auf dieser Plattform artikulieren, kann man nicht mehr ignorieren. Aber was tut sich da alles ? ». Harald Staun, “Was auf Youtube zu sehen ist”, Frankfurter Allgemeine, 16 juin 2019. https://www.faz.net/aktuell/feuilleton/debatten/was-auf-youtube-alles-los-ist-16238323.html.
7 Voir par exemple : Stuart Cunningham, David Craig, “Being ‘really real’ on YouTube : authenticity, community and brand culture in social media entertainment”, Media international Australia, vol. 164, no 1, 2017, p. 71-81 ; Florencia García-Rapp, “‘Come join and let’s BOND’ : authenticity and legitimacy building on YouTube’s beauty community”, Journal of Media Practice, vol. 18, no 2-3, 2017, p. 120-137 ; Rachel Berryman & Misha Kavka, “‘I Guess A Lot of People See Me as a Big Sister or a Friend’ : the role of intimacy in the celebrification of beauty vloggers”, Journal of Gender Studies, vol. 26, no 3, 2017, p. 307-320 ; Mingyi Hou, “Social Media Celebrity and the Institutionalization of YouTube”, Convergence, vol. 25, no 3, 2019, p. 534-553.
8 Emile Benveniste, « De la subjectivité dans le langage », in Problèmes de linguistique générale, I, Gallimard, Paris, p. 259.
9 Ibid.
10 Ibid., p. 264.
11 Émile Benveniste, « L’appareil formel de l’énonciation », Langages, no 17, 1970, p. 12.
12 Franck Cormerais, « Pour une poétique du numérique », in Sophie Gosselin et Franck Cormerais (dir.), Poétique(s) du numérique, L’Entretemps, Montpellier, 2008, p. 21.
13 Yves Jeanneret, Emmanuël Souchier, « Pour une poétique de “l’écrit d’écran” », Xoana, no 6-7, 1999, p. 97-107.
14 Gustavo Gomez-Mejia, Les fabriques de soi ? Identité et industrie sur le web, MkF, Paris, 2016.
15 « Créer une chaîne », Youtube, https://support.google.com/youtube/answer/1646861?hl=fr.
16 La métaphore médiatique de l’indicatif est associée par Benveniste à l’expression d’un sentiment de subjectivité : « Si chaque locuteur, pour exprimer le sentiment qu’il a de sa subjectivité irréductible, disposait d’un “indicatif” distinct (au sens où chaque station radiophonique émettrice possède son “indicatif” propre), il y aurait pratiquement autant de langues que d’individus et la communication deviendrait strictement impossible ». Émile Benveniste, « La nature des pronoms », in Problèmes de Linguistique Générale, op. cit., p. 254.
17 La plateformisation correspond au développement sur le web d’un « modèle économique dominant » qui se matérialise par un positionnement sur des « marchés multi-faces » (multi-sided markets). cf. Anne Helmond, “The Platformization of the Web : Making Web Data Platform Ready”, Social Media + Society, 2015. Voir aussi Vincent Bullich et Laurie Schmitt, « Les industries culturelles à la conquête des plateformes ? », tic&société, vol. 13, no 1-2, p. 1-12.
18 « Comment générer des revenus sur YouTube – Aide YouTube », Youtube, https://support.google.com/youtube/answer/72857?hl=fr.
19 Jean Burgess, Joshua Green, YouTube : Online video and participatory culture, op. cit., p. 53.
20 Eliseo Verón, « II est là, je le vois, il me parle », Communications, no 38, 1983, p. 98-120.
21 Rachel Berryman, « Missing the Old YouTube : Collective Nostalgia for Platforms Past », The Web that was : Archives, traces, reflections, Université d’Amsterdam, 19 juin 2019.
22 Jean Kelso Sandlin, Monica L. Gracyalny, “Seeking sincerity, finding forgiveness : YouTube apologies as image repair”, Public Relations Review, vol. 44, no 3, 2018, p. 393-406.
23 Donald Horton, Richard Wohl, “Mass Communication and Para-social Interaction : Observations on Intimacy at a Distance”, Psychiatry, no 19, 1956, p. 215-229. Voir aussi l’analyse du vidéaste américain Anthony D’Angelo, “YouTubeurs, YouTubeuses”, 7 novembre 2017, https://m.youtube.com/watch?v=rMmMYkVxVVQ.
24 Pelle Snickars, Patrick Vonderau (dir.), The YouTube Reader, KB/National Library of Sweden, Stockholm, 2009, www.kb.se/Dokument/Aktuellt/YouTube_Reader_Inledning.pdf
25 Youtube, malgré sa communication répétée sur son écoute et sa prise en compte des remarques de ses utilisateurs, ne laisse en réalité qu’un choix limité voire binaire – celui de l’adhésion ou du désabonnement – face à ses règles et à leurs évolutions, comme en témoignent les plus récentes mi-2019 : « […] Les nouvelles Conditions entreront en vigueur le 22 juillet 2019 (voir un aperçu [lien hypertexte]). Vous aurez la possibilité de les accepter la prochaine fois que vous accéderez à YouTube. Si vous voulez obtenir plus d’informations ou si, pour quelque raison que ce soit, vous n’êtes pas d’accord avec ces nouvelles Conditions et préférez cesser d’utiliser YouTube, vous pouvez accéder à notre Centre d’aide. » (Youtube, mail aux usagers, 19 juin 2019). La manière dont les partenaires et usagers de Google sont contraints de composer avec les « régimes » liés à ses différents outils, services et fonctionnalités, dont Youtube (qui est d’ailleurs quasiment la seule filiale à ne pas inclure le nom de la firme), a été examinée entre autres dans : Gustavo Gomez-Mejia, Jérémie Nicey, Shabnam Vaezi-Nejad (dir.), dossier « Les pouvoirs éditoriaux de Google », in Communication et Langages, no 188, 2016 ; Christian Fuchs, « A contribution to the critique of the political economy of Google », Fast Capitalism, no 8(1), 2011, http://www.fastcapitalism.com.
26 Voir notamment le dossier coordonnée par Franck Cormerais et Jacques Athanase Gilbert, « Le gouvernement des données », Études digitales, no 2, 2016 ; voir aussi, entre autres, le dossier dirigé par Dominique Cardon, « Politique des algorithmes. Les métriques du web », Réseaux, no 177, 2013.
27 Cette distinction peut même clairement devenir pour certains acteurs une stratégie idéologique et/ou commerciale : qu’on pense, pour ne citer qu’elle, à la chaîne controversée MalaiseTV, lancée début 2016 et dont le but n’était pas l’humour mais le cringe (contenu repoussoir créant gêne et malaise émotionnel) : menacée de poursuites pour violation des droits d’auteur sur les extraits télévisuels qu’elle collectait et relayait, la chaîne a fermé sur Youtube pour migrer sur Twitter dont le compte éponyme avait été créé fin 2015.
28 Pour ne prendre que deux exemples de travaux sur ces incitations de l’expression de l’usager, voir : Laurence Allard, Frédéric Vandenberghe, « Express yourself ! Les pages perso. Entre légitimation technopolitique de l’individualisme expressif et authenticité réflexive peer to peer », Réseaux, vol. 117, no 1, 2003, p. 191-219 ; Franck Babeau, « La participation politique des citoyens “ordinaires” sur l’Internet. La plateforme Youtube comme lieu d’observation », Politiques de communication, vol. 3, no 2, 2014, p. 125-150. https://www.cairn.info/revue-politiques-de-communication-2014-2-page-125.htm.
29 Dana Mingione, « Hello Internet ! : An Analysis of YouTuber Greetings », Explorations in Linguistics : An Online Journal of Undergraduate Research, vol. 1, no 1, 2014, p. 19-34. https://sites.sju.edu/mcl/files/2017/05/Vol-1-Issue-1.pdf
30 « Chaque produit se veut individuel ; l’individualité elle-même sert au renforcement de l’idéologie du fait que l’on provoque l’illusion que ce qui est chosifié et médiatisé est un refuge d’immédiateté et de vie. Cette idéologie fait appel surtout au système des vedettes emprunté à l’art individualiste. Plus toute cette sphère est déshumanisée, plus elle fait la publicité pour les grandes personnalités, et plus elle parle aux hommes avec la voix éraillée du loup déguisé en grand’mère. », Theodor W. Adorno, « L’Industrie culturelle », Communications, no 3, 1964, p. 14.
31 Vincent Bullich, « Régulation des pratiques amateurs et accompagnement de la professionnalisation : la stratégie de YouTube dans la course aux contenus exclusifs », Les enjeux de l’information et de la communication, no 16/3B, 2015, p. 27-42, http://lesenjeux.u-grenoble3.fr/2015-supplementB/02-Bullich/index.html ; Marc Jahjah, « Logiques marchandes et désir de distanciation : l’ambiguïté des youtubeurs », InaGlobal, 2017, http://www.inaglobal.fr/numerique/article/logiques-marchandes-et-desir-de-distanciation-l-ambiguite-des-youtubeurs-9573.
32 Patricia G. Lange, « Publicly Private and Privately Public : Social Networking on YouTube », Journal of Computer-Mediated Communication, no 13, 2008, p. 361-380.
33 Walter Benjamin, « L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique », Œuvres III, Folio, Paris 2000 [1939] p. 95.
34 Jean-Samuel Beuscart, Maxime Crépel, « Les trajectoires de notoriété sur le Web 2.0 : quatre figures de l’engagement dans la pratique artistique en ligne », in La participation des amateurs dans l’univers numérique, Digital Life Lab – Institut Telecom Paris, 2011 ; Dominique Cardon, Guilhem Fouetillou, Camille Roth, « Topographie de la renommée en ligne : un modèle structurel des communautés thématiques du web français et allemand », Réseaux, no 188, 2014, p. 85-119.
35 Danah Boyd, « Social Network Sites as Networked Publics : Affordances Dynamics and Implications », in Z. Papacharissi (dir.), Networked Self : Identity, Community, and Culture on Social Network Sites, 2010, p. 39-58 ; Thomas Stenger, Alexandre Coutant (dir.), « Ces réseaux numériques dits sociaux », Hermès, no 59, 2011.
36 Voir le livre du journaliste Vincent Manilève, YouTube derrière les écrans. Ses artistes, ses héros, ses escrocs, Lemieux, Paris, 2018.
37 Télérama, « Le meilleur de Youtube », https:/www.telerama.fr/tag/le-meilleur-de-youtube.
38 Divina Frau-Meigs, « Les youtubeurs : les nouveaux influenceurs ! », Nectart, no 5, 2017, p. 126-136, https://www.cairn.info/revue-nectart-2017-2-page-126.htm
39 Sur ces logiques, voir notamment : Fanny Georges, « Identité numérique et représentation de soi : analyse sémiotique et quantitative de l’emprise culturelle du web 2.0 », Réseaux, no 154, 2009, p. 165-193 ; Gustavo Gomez-Mejia, Les fabriques de soi ? Identité et industrie sur le web, MkF éditions, 2016 ; Yochai Benkler, The Wealth of Networks : How Social Production Transforms Market and Freedom, Yale University Press, 2006 ; Philippe Bouquillion, Bernard Miège, Pierre Mœglin, L’industrialisation des biens symboliques : les industries créatives en regard des industries culturelles, PUG, Grenoble, 2013 ; Nikos Smyrnaios, Les Gafam contre l’Internet, une économie politique du numérique, INA éditions, Bry-sur-Marne, 2017.
40 Michel Foucault, « Le courage de la vérité : l’ascète, le révolutionnaire et l’artiste », Esprit, no 12, 2008, p. 51-60 (dernier cours au Collège de France en 1984).
41 Clément Parrot, « Qui se cache derrière Thinkerview, la chaîne YouTube qui surfe sur le mouvement des “gilets jaunes” ? », France Info, 29 mai 2019, https://mobile.francetvinfo.fr/economie/transports/gilets-jaunes/qui-se-cache-derriere-thinkerview-la-chaine-youtube-qui-surfe-sur-le-mouvement-des-gilets-jaunes_3441317.html.
- CLIL theme: 3157 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Sciences de l'information et de la communication
- ISBN: 978-2-406-10419-3
- EAN: 9782406104193
- ISSN: 2497-1650
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-10419-3.p.0017
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 04-01-2020
- Periodicity: Biannual
- Language: French
- Keyword: Figures, subjects, expression, icons, industry, poetic