Introduction Myths of interiority, from the critique of one myth to that of another?
- Publication type: Journal article
- Journal: Éthique, politique, religions
2020 – 1, n° 16. Mythes de l'intériorité, du métaphysique au politique ? - Author: Delpla (Isabelle)
- Pages: 9 to 24
- Journal: Ethics, Politics, Religions
Introduction
Mythes de l’intériorité,
de la critique d’un mythe à celle d’un autre ?
La philosophie du langage a ouvert des voies originales dans la critique du solipsisme épistémique et sémantique. Wittgenstein a attaqué l’idée même d’un langage privé, réduisant ainsi le solipsiste au silence. Le livre de Jacques Bouveresse Le mythe de l’intériorité sur la signification et le langage privé chez Wittgenstein a fait date1. Quarante plus tard, son ouvrage sur Karl Kraus et la guerre lui offre un lointain écho2. Kraus y dénonce le nationalisme et le solipsisme, notamment allemand et autrichien, qui ont conduit à la Première Guerre mondiale ou ont ensuite miné la paix. Une telle critique le conduisait à défendre un internationalisme humaniste et juridique. Quelle est la portée de cette référence, moins usuelle, au solipsisme en politique ? Peut-on parler de solipsisme politique sur le modèle du solipsisme subjectif ? Peut-il être critiqué sur les mêmes bases que le solipsisme métaphysique ? À la même époque, ce pas est franchi par Hans Kelsen : il voit dans le dogme de la souveraineté de l’État une forme de solipsisme découlant d’une conception subjectiviste du droit : l’État souverain est l’analogue du moi solipsiste, centre du monde, ne voyant dans ce monde qu’un objet de sa volonté et de sa représentation3. Avec ou sans référence explicite au solipsisme, Jeremy Bentham ou Herbert Hart ont également défendu le droit international par une critique de la personnification d’un État doué des pouvoirs exorbitants du sujet solipsiste souverain (B. Bourcier sur Bentham)4. La philosophie du langage leur sert alors à 10attaquer les fictions nuisibles ou les illusions de ce super sujet étatique. Un tel recours à la philosophie du langage ou à des modèles linguistiques n’est pas isolé : à des degrés divers, on le retrouve négativement pour critiquer l’enfermement national ou la souveraineté étatique, positivement pour défendre des formes d’internationalisme ou de cosmopolitisme dans les réflexions de Walzer sur les guerres justes5, dans le modèle d’espace public cosmopolitique d’Habermas ou dans la déconstruction de Derrida et sa défense de l’hospitalité et du cosmopolitisme. On peut aussi chercher des modèles cosmopolitiques dans la critique de l’internalisme sémantique et la traduction radicale de Quine6.
Un air de famille se dégage de ces positions. A-t-il une portée théorique ? Faut-il thématiser un solipsisme politique sur le modèle du solipsisme subjectif ? Peut-on passer de la critique d’un solipsisme métaphysique du sujet à la critique de sa version politique ? Quelles ressources la première offre-t-elle à la seconde ? Pourquoi et comment un tel passage est-il refusé ou recherché ? Un tel passage est-il futile ? Pertinent ? Fertile ? La philosophie du langage peut-elle jouer pour la critique du solipsisme politique un rôle comparable à celui joué dans la critique du mythe de l’intériorité subjective ? Que peut-on attendre de l’analyse linguistique en la matière ? Un fondement ? Un modèle ? Une méthode ? Une analogie ? Une simple inspiration ?
Ces interrogations sont l’objet de ce numéro d’Éthique, Politique et Religion qui a une fonction exploratoire. Car elles ne vont pas de soi : le passage du solipsisme métaphysique au solipsisme politique ou celui de la critique de l’un à celle de l’autre ne relèvent pas de la déduction logique, mais plutôt du paradoxe. Critiquer le solipsisme métaphysique ne s’avère en effet ni nécessaire, ni suffisant pour critiquer sa forme politique. L’isolement du sujet peut certes conduire à son isolement politique7, mais, dans l’histoire de la philosophie, il conduit plus souvent 11à l’inverse. Le sujet solipsiste, cartésien ou lockéen, se trouve ainsi au fondement du libéralisme, voire du cosmopolitisme (B. Gnassounou). Russell, l’un des rares philosophes à revendiquer les vertus du solipsisme épistémique, défendait un internationalisme politique et juridique8. Ses critiques du nationalisme guerrier durant la Première Guerre mondiale doivent d’ailleurs davantage à l’utilitarisme politique qu’à sa théorie de la connaissance9.
À l’inverse, la critique du mythe de l’intériorité subjective appuie la défense par Kelsen du primat du droit international, mais elle peut conduire à refuser l’internationalisme ou le cosmopolitisme. Par des voies différentes, tel est le cas de Thomas Nagel et d’Alasdair MacIntyre, dans des positions inspirées par Wittgenstein (articles de Blondine Desbiolles et Corentin Lelong).
Définitions
Les expressions employées ne vont pas de soi non plus. Parler de solipsisme en politique n’est pas rare dans la presse, cet usage s’accroissant avec les évolutions politiques contemporaines. Le solipsisme désigne alors de manière lâche les tendances égoïstes et narcissiques d’une « génération moi-moi-moi » ou la mégalomanie des dirigeants10. Suivant un usage philosophiquement plus rigoureux, le solipsisme désigne également la fermeture des frontières et celle de l’État au monde extérieur11, notam12ment avec le Brexit12. Il vise aussi le déni de la réalité, en particulier dans le climato-scepticisme13.
Dans des écrits académiques, parler de solipsisme étatique14, de « solipsisme national15 », ou de « solipsisme politique16 » n’est pas nouveau. Pourtant le solipsisme politique n’a pas de définition canonique ou de référence standard en théorie politique, ni d’entrée dans les dictionnaires ou encyclopédies philosophiques. Son usage théorique reste rare et non systématique. Sa signification fluctue, désignant le repli sur soi de l’individu, coupé de la société politique17, ou le repli d’une communauté nationale ou d’un État, coupés des pays étrangers et d’une société internationale18, voire les deux19. Quant à l’expression « mythe de l’intériorité politique », elle est plus rare encore, et employée en référence à Wittgenstein20.
La référence à Wittgenstein et à sa critique du solipsisme est à cet égard complexe. Comme le rappelle Jacques Bouveresse dans le dialogue qui suit, Wittgenstein ne tire pas lui-même de conséquences politiques de ses analyses de la signification, mais d’autres l’ont fait à sa suite. Deux niveaux d’analyse doivent alors être distingués, selon le sens donné au 13solipsisme politique. La critique wittgensteinienne du solipsisme métaphysique contribue clairement à la critique du solipsisme politique pris comme isolement de l’individu. Des anthropologues comme Veena Das s’y sont référés pour montrer le caractère social de nos émotions les plus intimes, comme la douleur. Alasdair MacIntyre, Vincent Descombes et Bruno Gnassounou partent de la conception wittgensteinienne des formes de vie et des règles pour penser l’homme comme animal social et politique. Dans un débat déjà ancien entre libéraux et communautariens, ces derniers opposent la socialité des formes de vie, des traditions et des institutions à une conception libérale de l’individu, atomique et isolé, vu comme un prolongement de l’individualité solipsiste21. La critique de ce solipsisme politique subjectiviste et individualiste découle de la critique du solipsisme métaphysique par le biais d’une philosophie du langage : le(s) sujet(s) cartésien(s) sont dépourvus de langage, de la capacité à former une société ou un groupe politique (B. Gnassounou ; C. Lelong sur MacIntyre).
Peut-on répliquer cette analyse à un degré supérieur, en passant de l’individu au groupe ? Peut-on tirer de Wittgenstein une critique du solipsisme politique, pris comme isolement d’une entité politique vis-à-vis des autres ? À cet égard, les analyses diffèrent, tant dans les réponses que dans les définitions et la manière de poser les problèmes. Commençons d’abord par des définitions. À ce second stade, celui du groupe, le solipsisme politique correspond au solipsisme national, au solipsisme étatique, ou au solipsisme juridique en droit international. Il désigne la conception d’une entité ou groupe politique, cité, royaume, empire, nation ou État, coupée du reste du monde, ignorant ou négligeant son existence22. Quoique peu thématisé, un tel solipsisme politique n’est pas une chimère ou une exception, mais une tendance récurrente en philosophie politique. À des degrés divers, l’insularité, l’effacement ou l’ignorance des étrangers et des pays étrangers ou leur mise entre parenthèses sont des modèles politiques majeurs dans la République de Platon et son Atlantide, dans L’Utopie de More, La Nouvelle Atlandide de Bacon, La cité du Soleil de Campanella, ou la position originale de Rawls 14dans la Théorie de la justice. Comme dans le Contrat social de Rousseau, on n’envisage les relations externes qu’in fine, pour dire qu’on en traitera plus tard : même s’il ne s’agit que d’un moment de la réflexion, ce moment suppose que le contrat social s’instaure dans l’effacement de l’étranger.
Analogie entre les solipsismes
Ces tendances ou moments de la réflexion politiques restent le plus souvent implicites et diffus. Personne ne se revendique d’un solipsisme politique. Pour les expliciter, esquissons un parallèle entre le solipsisme métaphysique et le solipsisme politique. Le solipsisme métaphysique est fondé sur une opposition entre apparence et réalité. L’objet de mes représentations étant incertain, seules mes pensées subjectives sont certaines. Ce solipsisme a trois caractéristiques. Premièrement, j’ai un accès privilégié à mes pensées qui sont privées, inaliénables et incommunicables : je suis le seul à les avoir et à les connaître. Mon expérience privée et intérieure est infaillible et incorrigible. C’est un critère de certitude et de sens. Deuxièmement, il existe un dualisme entre un monde subjectif, connu directement, et le monde physique, connu indirectement, entre intériorité et extériorité. Troisièmement, il y a une asymétrie entre la relation à soi et aux autres. L’existence des autres est doublement douteuse : leur corps n’est connu qu’indirectement et leur esprit s’il existe, est inaccessible.
Ces degrés de doute nous conduisent à distinguer un mythe de l’intériorité du solipsisme radical. Le mythe de l’intériorité correspond à un dualisme entre une intériorité subjective, privée, assurée et une extériorité objective, publique, incertaine. Dans une version radicale où je suis le/la seul/e à exister, je n’ai ni limites, ni extériorité. Les limites de ma conscience sont les limites du monde. Le monde est mon monde. La métaphore de l’intériorité devient inutile.
Par analogie avec le solipsisme métaphysique, définissons le solipsisme politique comme la tendance à concevoir sa société politique comme seule au monde, comme si les pays étrangers et les étrangers n’existaient pas. La politique étrangère et les normes internationales sont ignorées, au 15mieux, secondaires. La Cité ou l’État est une personne, un sujet, existant en et par soi, indépendant et souverain. Il est doué d’une volonté propre et est source de ses normes, infaillible et incorrigible : sans norme supérieure ou extérieure, personne ne peut le contredire. Le sujet étatique est aussi souverain que le sujet individuel (B. Bourcier sur Bentham et E. Pasquier sur Kelsen). Ses membres sont les seuls à posséder les propriétés qui font d’eux des citoyens de ce pays, les seuls à pouvoir les connaître et les comprendre (B. Gnassounou). Cet entre-soi est sûr et assuré, source de certitude. La modernité politique de l’État souverain se construit d’ailleurs par l’emboitement d’une double intériorité, celle de l’individu pouvant se replier sur son for intérieur, et celle de l’État, séparant son for intérieur de l’extériorité des autres États (C. Nouët). Il y a donc une asymétrie fondamentale entre la relation aux compatriotes et celle aux étrangers (s’ils existent). Le « nous » est un royaume secret et nous assure une compréhension interne et immédiate, inaccessible aux autres. (J. Bouveresse ; C. Lelong).
Comme dans le solipsisme métaphysique, on peut en discerner plusieurs degrés, conduisant à distinguer un mythe de l’intériorité politique d’un solipsisme radical. En un premier sens, il y a une opposition entre intériorité et extériorité. Une telle conception peut recouper l’autarcie, le protectionnisme, l’isolationnisme et le nationalisme prônant le confinement à l’intérieur des frontières. C’est une version faible du solipsisme car elle admet l’existence d’une extériorité.
Selon une deuxième version de ce dualisme, compatible avec la première, la séparation nette entre intérieur et extérieur est plus importante que leur opposition. Nous sommes souverains et l’extérieur n’impose ni norme, ni contrainte décisive à l’intérieur. Cette vision englobe les conceptions des relations internationales comme un état de nature anarchique, sans normes. Le droit international n’est qu’un droit secondaire, externe et non contraignant ; ce n’est même pas un vrai droit (voir le dialogue avec Jacques Bouveresse). Nous pouvons alors supprimer le monde extérieur et le droit international, sans affecter l’organisation politique nationale et interne.
Enfin, dans une version radicale du solipsisme, les pays étrangers et les étrangers n’existent pas, l’opposition entre intériorité et extériorité disparaît. Notre État gouverne comme si les limites de notre monde, de notre population et de nos principes politiques n’étaient que celles du 16monde. Pour l’État, seul son droit est du droit et a vocation à devenir le droit mondial. Le monisme juridique étatiste est un impérialisme radical (Kelsen). Un État mondial serait-il alors solipsiste ? Sans poser la question en ces termes, MacIntyre formule une objection similaire contre un cosmopolitisme hégémonique : il y voit une assimilation globale des cultures, niant toute forme d’altérité (C. Lelong).
Spécificité du solipsisme politique
Ces définitions du solipsisme politique permettent de répondre à une objection contre sa thématisation : pourquoi parler de mythe de l’intériorité politique ou de solipsisme politique plutôt que de nationalisme, d’isolationnisme ou de stato-centrisme, notions proches et bien plus courantes en théorie politique ?
En premier lieu, la critique du solipsisme met au premier plan la question de la vérité (entretien avec J. Bouveresse). D’une part, comme dans le solipsisme métaphysique, le problème posé par le solipsisme politique est bien celui de la réalité et de l’illusion : il s’agit de déterminer ce qui est réel. Et le mythe de l’intériorité est construit sur des erreurs, des pseudo-entités et des illusions comme celui de « race pure » que critique Kraus. L’opposition entre étatistes et internationalistes porte aussi sur la réalité du droit international. D’autre part, il s’agit de reconnaître la norme du vrai en politique contre l’emprise de la propagande, des fausses nouvelles ou des faits alternatifs. L’entretien avec J. Bouveresse fait ressortir la complémentarité de cette norme du vrai et de la norme du droit chez Kraus.
En second lieu, le déni ou ignorance de l’étranger, caractéristique du solipsisme politique, est un problème spécifique qui doit être traité en tant que tel. L’autarcie, l’isolationnisme, le nationalisme, le protectionnisme ou le stato-centrisme n’impliquent pas nécessairement un tel déni ou une ignorance de l’étranger. Ils peuvent être fondés sur le désir de se protéger, la peur ou le refus de l’autre, tous sentiments impossibles pour un solipsiste cohérent. Un nationaliste obsidional ou agressif a même besoin de l’autre pour exister. Le nationalisme recoupe le solipsisme lorsqu’il conduit à chosifier les autres, à les déshumaniser et à considérer leurs intérêts ou 17leur existence comme négligeables. Toutefois, on peut aussi défendre une conception non solipsiste de la nation, lorsqu’on y voit une construction internationale, faite d’échanges, à l’instar de Mauss (conception reprise par B. Gnassounou). Il y a donc des recoupements entre le solipsisme et le nationalisme et le stato-centrisme23, mais non synonymie. L’utilisation de ces termes pour désigner l’effacement de l’étranger est trompeuse.
En troisième lieu, poser la question du solipsisme politique, c’est poser une question spécifique : peut-on être une entité politique, un État seul ? De même que Wittgenstein opposait au solipsiste qu’il ne peut avoir un langage seul, Kelsen oppose au solipsiste étatique qu’un État ne peut exister seul, sans droit international. Le jeu de langage de l’entité politique et de l’État ne peut se jouer seul (E. Pasquier, dialogue avec Jacques Bouveresse). Le terme « État » implique une pluralité d’États. Critiquer le solipsisme politique c’est donc critiquer la conception d’un État isolé du monde, à l’instar d’un État sorti d’un état de nature dans les théories contractualistes. Mais pas seulement. C’est aussi contester que la question de la pluralité des États ne soit pas posée d’emblée, que l’on parle d’États, de nations, de groupes politiques, en ne se préoccupant que de leur intérieur, de leur structure interne, sans poser la question de leur extériorité. Cette pluralité est aussi celle des peuples (Kraus).
Allons plus loin : il ne suffit pas alors pour échapper au solipsisme politique de concéder une pluralité des entités politiques. Il ne suffit pas d’accorder que d’autres États existent en dehors du nôtre, que de loin on aperçoit leurs drapeaux, leurs chapeaux et leurs manteaux, probablement forts exotiques. Encore faut-il établir les principes de communication et d’une grammaire internationale (B. Bourcier), d’une inter-souveraineté (E. Pasquier). Parler d’État, c’est supposer des découpages territoriaux, une organisation minimale, des droits et obligations internationaux. L’État ne peut avoir son statut seul. Il n’y a pas de grammaire nationale sans grammaire internationale. Y a-t-il un primat de l’international ? Si le jeu de langage de l’État ne se joue pas seul, c’est notre manière de concevoir la souveraineté politique qui doit être repensée. Ces questions sont pourtant largement ignorées dans la philosophie du droit et 18la philosophie de l’État, comme si le solipsisme y allait de soi et que n’y étaient advenus ni la critique du sujet, ni le questionnement sur l’intersubjectivité (E. Pasquier).
Un ou deux solipsismes politiques ?
On comprend mieux comment une référence commune à Wittgenstein peut conduire à des positions contraires sur le droit international ou le cosmopolitisme. Car les questions posées ne sont pas les mêmes. D’une part, la critique des significations privées conduit à l’idée d’une nécessaire socialité du langage : les catégories politiques n’ont de sens que lorsqu’elles s’enracinent dans des formes culturelles et pratiques sociales. Ces pratiques sociales étant celles de communautés, les catégories politiques ont un sens pour autant qu’elles s’inscrivent dans des communautés.
Le cosmopolitisme prétendant dépasser les communautés étatiques et culturelles se trouve vide de sens et de contenu politique24. C’est donc la même critique qui est adressée à l’individu libéral et au cosmopolitisme vu comme le règne de l’individualisme. Le sujet cosmopolite sans attachement national n’est que la réplique globalisée du sujet libéral et tombe sous la même critique. C’est plutôt ce cosmopolite qui est menacé par le solipsisme politique en raison de sa négation de toute altérité culturelle et de sa prétention à pouvoir tout englober (MacIntyre). S’il faut critiquer un solipsisme politique, c’est celui de l’individu pré ou post social et culturel, tant au plan national qu’international.
Il ne s’agit pas pour autant de défendre un enfermement national, et MacIntyre défend l’idée de traditions ouvertes à d’autres (C. Lelong). Mais, dans cette première approche, la question d’une grammaire internationale, des traditions et institutions internationales n’est pas traitée, pas plus que leur articulation avec les formes nationales.
D’autre part, la critique d’un langage privé ne s’arrête pas à celui de l’individu, mais s’étend à celui de l’État. La philosophie du langage qui a permis de désenclaver le sujet ou l’individu solipsiste peut désenclaver 19l’État-nation. Ils peuvent tous procéder de processus intersubjectifs d’entente (C. Nouët sur Habermas). La question posée n’est pas d’abord celle du dépassement de l’État, mais de savoir si on peut le penser seul. Un État seul pourrait-il avoir un statut, des frontières, des normes, un droit ? La question de l’internationalisme ou du cosmopolitisme ne se réduit pas à un individualisme globalisé. Il faut poser la question de la pluralité des sociétés politiques, mais aussi celle de leurs relations et d’une organisation internationale. Comment penser les institutions inter ou supra nationales ? Il faut aussi articuler grammaire étatique et internationale. C’est la tâche poursuivie par Walzer pour les langages et traditions de la guerre, par Bentham, Kelsen ou Habermas pour le droit public et la notion de souveraineté.
À cet égard, l’opposition précédemment citée entre libéraux et communautariens devient secondaire : ils peuvent tous être des solipsistes politiques qui trouvent parfaitement normal d’analyser les sociétés politiques sans traiter ni de politique étrangère, ni de droit international, comme si leur pays vivait dans une bulle avec des frontières miraculeusement tombées du ciel et dont l’extérieur serait sans conséquence sur l’intérieur. Rawls et MacIntyre se trouveraient dans une catégorie commune les opposant à Bentham, Kelsen ou Habermas. Secondaire, cette opposition peut donc se rejouer au plan international entre les internationalistes fondant une grammaire internationale sur les droits des communautés et les cosmopolites la fondant sur les droits des individus.
La critique du solipsisme national et étatique
par la philosophie du langage
Les contributions de ce numéro éclairent l’intérêt de la philosophie du langage, en particulier celle de Wittgenstein, pour critiquer ce mythe de l’intériorité politique, i.e. national ou étatique. La critique par Wittgenstein de la réification des significations a été largement utilisée par les anthropologues pour refuser la réification des cultures, des ethnies et des identités25, 20contribuant ainsi à la critique d’un solipsisme national. La critique par Bentham de la personnification ou réification de la fiction de l’État, la manière dont elle produit un mythe de l’intériorité politique et l’illusion d’une communauté unie et exclusive des autres va dans le même sens (B. Bourcier). Il en est de même de celle par Kraus d’un entre-soi national à la fois fictif, fondé sur une propagande mensongère, et déshumanisant (entretien avec J. Bouveresse).
La comparaison entre la critique du langage privé par Wittgenstein et celle du solipsisme national par Kraus offre d’ailleurs de nouvelles pistes de réflexion. Jacques Bouveresse tire un fil original du rapprochement entre Wittgenstein et Kraus. Kraus contestait le privilège de l’expérience intérieure de l’Allemagne, celle des Allemands restés en Allemagne, excluant les exilés26. Dans l’Allemagne nouvelle, celle de la révolution nationale, avec son nouveau langage, les membres ne pourraient se comprendre réellement qu’entre eux, sur la base d’une expérience vécue qu’ils ont en commun et qui est d’une espèce unique en son genre. Mais comme Wittgenstein l’a montré, ce n’est pas l’expérience vécue qui décide du sens. Cette critique de la privatisation des concepts politiques vaudrait aussi pour les concepts d’ami et d’ennemi que Carl Schmitt fonde sur une participation existentielle (J. Bouveresse).
Kraus apporte également un argument original contre la prétention à être un État seul. Analysant la dérive du nazisme, il constate que le droit qui s’affranchit de tout droit international, de toute norme internationale s’abolit lui-même. Soumis aux impératifs d’une politique qui lui dicte ses lois, le droit ne suit finalement que les intérêts subjectifs de la nation et de ses dirigeants. Ainsi, le droit national, sans boussole, devient flexible : tout ce qui semblera juste aux dirigeants politiques sera juste. Il n’y a plus qu’une illusion de règle juridique. Privé du droit international et de ses normes de références, le droit national devient aussi chimérique que le langage privé. L’État solipsiste et ultranationaliste ne pourra pas être un État juridique (I. Delpla, dialogue avec Jacques Bouveresse)27.
21Que peut-on espérer d’une telle critique ? Si l’on suit Wittgenstein, on en tirera seulement ce qu’il ne faut pas dire, mais guère ce qu’il faut dire. C’est l’intérêt et les limites de son approche thérapeutique. Au mieux, Wittgenstein préviendra de l’illusion d’une compétence spéciale du philosophe en matière politique (J. Bouveresse).
Construction du numéro
Ce numéro d’Éthique, Politique et Religion vise à ouvrir des pistes de réflexion et à donner des coups de sonde sur des positions possibles. Il ne prétend pas à l’exhaustivité. La position de Kelsen, abordée par Emmanuel Pasquier dans le dialogue avec Jacques Bouveresse, ne fait pas l’objet d’un article spécifique. Il n’y a pas non plus d’article sur Bertrand Russell, sur Herbert Hart, sur Michael Walzer, sur Jacques Derrida ou sur les théories féministes et leurs critiques de différents aspects du solipsisme politique ou juridique, leur internationalisme ou leur cosmopolitisme.
Ce numéro est centré sur un long entretien avec Jacques Bouveresse. En réponse à Isabelle Delpla, J. Bouveresse revient d’abord sur les implications politiques possibles de l’œuvre de Wittgenstein, l’apport de la philosophie à la politique et le rapport des philosophes – souvent désastreux – à la politique. Concernant la pertinence d’une analogie entre mythes de l’intériorité épistémique et politique, il souligne l’importance de la distinction entre apparence et illusion et éclaire les apports de Kraus à la critique du nationalisme et d’un mythe de l’intériorité. Emmanuel Pasquier ensuite rappelle la position de Kelsen sur le droit international et interroge J. Bouveresse sur un possible parallèle avec la démarche de Wittgenstein. Olivier de Frouville (juriste internationaliste) replace la pensée de Kelsen et sa critique du monisme juridique étatique dans les grands courants du droit international. B. Bourcier interroge J. Bouveresse sur la critique du solipsisme par Musil.
Ce dialogue est suivi d’articles qui explorent une variété de réponses aux questions initiales. Benjamin Bourcier analyse la position de Bentham. Quoique Bentham reste tributaire d’une conception subjective de la 22signification, il s’attaque à un mythe de l’intériorité politique par sa démystification du langage et une critique des fictions. Bentham s’oppose au stato-centrisme de Vattel qui personnifie l’État à l’instar d’un sujet politique solipsiste. Bentham critique cette substantialisation de l’État à la fois parce qu’elle est une entité fictive, parce qu’elle favorise la confusion entre intérêt de l’État et intérêt personnel des gouvernants, parce qu’elle favorise aussi l’illusion d’une intériorité nationale et des sentiments nationaux de gloire, qui poussent au bellicisme. Critiquer ce mythe de l’intériorité politique, c’est montrer qu’il s’oppose au plus grand bonheur du plus grand nombre. C’est aussi proposer une nouvelle grammaire de l’international qui n’est plus fondée ontologiquement sur une société des nations, mais sur des institutions : un congrès européen et un tribunal pour la paix assurent un contrôle des gouvernants par les peuples. Bentham plaide donc pour un cosmopolitisme fondé sur les responsabilités cosmopolitiques des gouvernants.
La contribution de Clotilde Nouët permet de comprendre l’émergence d’un mythe de l’intériorité politique à travers les critiques nuancées de l’État nation par Habermas et Koselleck. Habermas s’inscrit résolument dans le tournant linguistique à partir duquel il critique le mentalisme solipsiste au profit d’une intersubjectivité constitutive. Cette entente dialogique s’oppose à l’anthropologie égoïste, atomiste et solipsiste de Hobbes et offre un fondement alternatif à sa conception du contrat social. Refusant l’analogie entre individu et État, Habermas ne passe pas de la critique d’un solipsisme à celle d’un autre, mais utilise le même paradigme, celui de l’entente, pour les éviter. Sa conception de l’entente, impliquant la constitution d’espaces publics, ouvre la voie de son cosmopolitisme, la communauté politique n’étant pas limitée à sa forme historique nationale. Cet espace public cosmopolitique doit être régi par des dispositifs constitutionnels et des normes supra-étatiques à l’instar de ceux garantis par l’Union européenne. Habermas produit ainsi une critique du solipsisme épistémique, du solipsisme anthropologique et du solipsisme ethnocentrique.
Les trois articles suivants traitent du chemin inverse ou comment la critique du solipsisme épistémique et moral ne conduit pas à des positions cosmopolitiques – voire conduit à leur refus. À la différence de Bentham, Kelsen ou Habermas, le cosmopolitisme est envisagé comme une abolition des frontières, de la diversité des cultures, voire des États, et une unification morale et non politique du genre humain.
23Dans son article « Groupe, règle et politique : réflexions », Bruno Gnassounou conteste les termes du problème posé. D’une part, il souligne que le sujet cartésien est l’origine de l’individu libéral et universel, ouvrant au cosmopolitisme. D’autre part, du tournant linguistique anticartésien on ne peut inférer aucune conclusion sur le politique. Toutefois, Gnassounou considère que la notion d’institution selon Wittgenstein permet de trancher la question de la constitution des groupes politiques, dans un sens non cosmopolitique. Dans cette voie, il retrace la manière dont la philosophie sociale est un préalable à la philosophie politique. Il oppose ainsi une conception individualiste (possiblement mentaliste) à une conception « institutionnaliste » de la propriété. Il n’y a de sens à attribuer des droits et des devoirs de justice à un individu que dans le cadre d’une socialité des règles, i.e. une institution. Que peut-on en déduire sur l’existence d’individus collectifs ? Un groupe politique ne peut se constituer que par une structuration interne, par la définition d’une autorité et par contraste avec d’autres groupes. Le cosmopolitisme ne serait qu’une communauté morale et non politique.
Cette position se rapproche de celle défendue par Alasdair MacIntyre, présentée et critiquée par Corentin Lelong. MacIntyre, en référence à Wittgenstein, défend la nature sociale de la rationalité, inscrite dans des formes de vie et des traditions, pour critiquer un solipsisme moral. Sa cible est un émotivisme subjectiviste, voué à l’égoïsme, ou l’individualisme libéral ou nietzschéen, qui croit pouvoir transcender le monde social. Cette défense des communautés ne le conduit pas pour autant à un solipsisme politique ou communautaire. Il conteste en effet l’État nation comme communauté illusoire et plaide en faveur de traditions ouvertes. C. Lelong conteste donc les tentatives de tirer de MacIntyre un quasi-séparatisme dans des communautés religieuses. En défendant des intraduisibles, MacIntyre refuse toutefois le cosmopolitisme prétendant à la transparence de toutes les significations. Sa critique du cosmopolitisme réplique donc celle de la modernité libérale, comme point de vue neutre, impartial. Loin d’être un sujet suprasocial, le cosmopolite reproduit la culture anglo-saxonne dominante. MacIntyre, toutefois, ne s’attaque qu’à des formes limitées et caricaturales du cosmopolitisme.
Thomas Nagel refuse également le cosmopolitisme et l’internationalisme, mais défend ce point de vue de nulle part que conteste MacIntyre. Un tel refus ne découle pas de ses principes initiaux (article 24de Blondine Desbiolles). Thomas Nagel réfute le solipsisme épistémique et le solipsisme moral ou pratique avec des arguments originaux. Privé d’une distinction entre points de vue objectif et subjectif, le solipsiste ne peut être rationnel. Il se trouve donc dépourvu de raisons d’agir, requérant un « souci interpersonnel impartial » et la reconnaissance des raisons d’agir d’autrui. À partir de cette critique de la partialité morale, Nagel limite sa réflexion sur l’impartialité et la solidarité au cadre démocratique de l’État, refusant une impartialité politique internationaliste ou cosmopolitique. B. Desbiolles analyse donc le paradoxe et les faiblesses de la position de Nagel : cette limitation étatique n’est pas cohérente avec sa théorisation de la délibération rationnelle et des rapports entre morale, droit et politique. Elle repose aussi sur des constats empiriques pessimistes et discutables.
Les critiques de B. Desbiolles contre Nagel ou celles de C. Lelong contre MacIntyre convergent : ces auteurs visent d’abord les versions anglo-saxonnes du cosmopolitisme, sans envisager un cosmopolitisme enraciné dans les cultures ou dans des formes institutionnelles, comme l’Union européenne. Ils délaissent aussi les traditions de l’internationalisme inspirées de Durkheim.
Ce numéro est issu d’une journée d’étude « Mythes de l’intériorité : de la critique d’un mythe à un autre ? » qui a eu lieu le 8 février 2019 à l’Université Lyon 3 dans le cadre du programme « Justice globale, droit international et constitution de l’État » dirigé par I. Delpla dans le cadre du Labex COMOD. Cette journée n’aurait pas été possible sans le soutien de l’IRPhiL et du Labex COMOD.
Isabelle Delpla
Université de Lyon
Institut de recherches philosophiques de Lyon (IRPhiL)
1 Le mythe de l’intériorité. Expérience, signification et langage privé chez Wittgenstein, Collection « Critique », Paris, Éditions de Minuit, 1976.
2 Jacques Bouveresse, Les premiers jours de l’inhumanité. Karl Kraus, la propagande, le nationalisme et la guerre, Hors d’atteinte, coll. « Faits & idées », 2019, 245 p.
3 H. Kelsen, Théorie pure du droit, trad. H. Thévenaz, Neuchatel, Édition de la Baconnière, 1953, p. 187.
4 Les noms entre parenthèses renvoient aux articles ou à l’entretien de ce volume : sur la position de Bentham, voir l’article de Benjamin Bourcier ; pour Herbert, Hart, Le concept de droit, chapitre sur le droit international, Facultés Universitaires Saint-Louis Bruxelles, 2006.
5 L’idée d’une réalité morale de la guerre s’ancre dans les significations d’un langage ordinaire et partagé, Michael Walzer, Guerres justes et injustes, Belin, 1977.
6 J’ai consacré plusieurs publications à ce modèle dont La justice des gens, Enquêtes sur les nouvelles après-guerre, chapitre 7, PUR, 2014 ; « Du pays vide : traduction radicale et cosmopolitisme », in Martine Pécharman, Philippe de Rouilhan. Le Philosophe et le langage : études offertes à Jean-Claude Pariente, Librairie philosophique J. Vrin, p. 319-346, 2017 et l’ouvrage à paraître Du pays vide. Réfutation du solipsisme politique.
7 Question discutée pour Max Stirner ou Sonren Kierkegaard, voir Vilfrido Pareto, « L’individuel et le social », Congrès international de Philosophie, 1905, p. 125-131 ; G Palante, Anarchisme et individualisme, La République des Lettres, 2012 ; Narve Strand, « Political Solipsism and Its Risks : Kierkegaard, a Case-Study », présentation au 6th International Kierkegaard Conference, July 2010.
8 Voir Benjamin R. Barber, « Solipsistic Politics : Russell’s Empiricist Liberalism », Political Studies, vol. 23, no 1, p. 12-28. Cet article traite des implications politiques du solipsisme de Russell, notamment de sa conception du pouvoir et du libéralisme, mais guère de son internationalisme.
9 Voir « Ethics of war », The International Journal of Ethics, vol. 25, no 2, Janv. 1915, p. 127-142.
10 Voir David Rothkopf, « The Soul-Sucking, Attention-Eating Black Hole of the Trump Presidency », Foreign Policy, 24 Mars, 2017 ; Normand Lester, « Urgence : la santé mentale de Trump », Le Journal de Montréal, Lundi 13 janvier 2020.
11 Voir William Saletan, « National Solipsism. Donald Trump has a foreign policy of self-glorification and nothing else. », Slate, 17 Janvier 17, 2017 ; Rana Dasgupta, « The Demise of the Nation State », The Guardian, 5 april 2018.
12 Voir Marc Porée, « Brexit, l’impossibilité d’une île », Slate, 18 janvier 2019 ; Sam Byers, « Britain Is Drowning Itself in Nostalgia. Brexit has exposed my country as a solipsistic backwater », New York Times, 23 Mars, 2019 ; « Theresa May’s Brexit will bring about a diminished Britain. The prime minister has bowed to the logic of solipsism », Financial Times, 18 Janvier 2017 ; Hussein Kassim, « Brexit delay : what it would take for the EU to agree article 50 extension », The Conversation, 1 mars 2019.
13 See « Seeking truth among ‘alternative facts’ », The Conversation, 27 Février 2017 ; Jack Holmes, « Someday, They’ll Be Amazed We Didn’t Impeach Trump Over the Climate Crisis », Esquire, oct 25, 2019.
14 H. Kelsen, référence précitée (première publication en 1934).
15 Franz Neumann, Behemoth : The Structure and Practice of National Socialism, 1933-1944, Ivan R Dee, Inc 2009, p. 136 (première publication 1942)
16 Alison M. Jaggar, Feminist Politics and Human Nature, Littlefield, Adams & Company, Harvester Press, 1983, p. 40.
17 A.M. Jaggar, op. cit. ; Rosemarie Tong and Tina Fernandez Botts, Feminist Thought : A More Comprehensive Introduction, Routledge, 2017.
18 H. Kelsen, op. cit.
19 K.M. Fierke « Whereof we can speak, thereof we must be silent : trauma, political solipsism and war », Review of International Studies, 30, 2004, p. 471-491.
20 Francis Sanseigne, GREPH-LEPS, Université de Lyon 2, Compte rendu de Nicolas Mariot, C’est en marchant qu’on devient président. La République et ses chefs de l’État, 1848-2007, Paris, Aux Lieux d’Être, 2007. Je laisse de côté mes propres usages de ces termes dans les publications précitées et dans « Cosmopolitisme ou internationalisme méthodologique », Raisons politiques, vol. 54, no 2, p. 87-102.
21 Voir A.M. Jaggar, op. cit.
22 Signalons une différence importante : le solipsiste métaphysique est singulier, tandis que les solipsistes politiques sont plusieurs. Ils doivent être plusieurs pour avoir une organisation politique, mais ils considèrent leur pays comme le seul au monde.
23 Le stato-centrisme n’est pas non plus équivalent au solipsisme politique. Il désigne deux idées différentes, soit la prévalence de l’État sur la société, soit la prévalence de l’État dans les relations internationales. Dans le premier sens, on peut s’opposer au stato-centrisme tout en restant un solipsiste politique étudiant la société dans un cadre uniquement national, dans le second sens, le stato-centrisme reconnaît la pluralité des États.
24 Tel est la critique de MacIntyre, de Descombes ou de B. Gnassounou contre le cosmopolitisme.
25 Jean-Loup Amselle et Elikia M’Bokolo (dir.), Au cœur de l’ethnie ; Ethnies, tribalisme et État en Afrique, Paris, La découverte, 1985, notamment l’article de Jean Bazin, « A chacun son Bambara », p. 87-128 ; Alban Bensa, La fin de l’exotisme : Essais d’anthropologie critique, Toulouse, Anacharsis, 2006.
26 Kraus vise là Gottfried Benn.
27 Dans un ouvrage à paraître, poursuivant cet argument, je tente de montrer que les solipsistes politiques ne pourraient pas avoir de langage politique (Du pays vide. Réfutation du solipsisme politique).
- CLIL theme: 3133 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Philosophie contemporaine
- ISBN: 978-2-406-10573-2
- EAN: 9782406105732
- ISSN: 2271-7234
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-10573-2.p.0009
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 06-08-2020
- Periodicity: Biannual
- Language: French
- Keyword: Metaphysic solipsism, political solipsism, myth of interiority, individualism, cosmopolitism