Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : En traduisant Franco Sacchetti. De la langue à l’histoire
- Pages : 229 à 232
- Collection : Constitution de la modernité, n° 27
Résumés
Laurent Baggioni etSylvain Trousselard, « Avant-propos. Le regard de Sacchetti sur la politique – Les jeux du rire et du hasard »
En présentant la structure du volume et le résumé des articles, les auteurs invitent à considérer la poétique politique des Trecento Novelle sous un angle positif et non comme une régression par rapport au Décaméron. Ils s’attachent ainsi à mettre au centre de l’analyse le rapport entre les choix littéraires sacchettiens (comme l’abandon du récit-cadre boccacien et la présence de commentaires moralisants) et la représentation d’une crise socio-politique polymorphe caractéristique de cette fin du xive siècle.
Antonio Corsaro, « Introduction »
L’auteur met en relief la spécificité de la « nouvelle » sacchettienne. Les Trecento Novelle apparaissent comme une œuvre ouverte, irréductible à tout schéma moral, doctrinal ou idéologique. La précarité de l’existence, moteur narratif du recueil, se reflète dans la précarité des rapports sociaux, décrits dans un perpétuel mouvement. Critiquant toute attitude intellectualiste, Sacchetti réinvestit alors le récit exemplaire et comique traditionnellement adressé à un public moins cultivé.
Michelangelo Zaccarello, « Le nouveau texte critique des Trecento Novelle de Franco Sacchetti »
L’auteur rappelle les étapes fondamentales de l’histoire du texte en soulignant combien la matière linguistique du recueil, en l’absence d’autographe, est tributaire d’une tradition postérieure. En explicitant les critères de l’édition critique des Trecento Novelle qu’il a publiée en 2014 à Florence aux Edizioni del Galluzzo, Michelangelo Zaccarello démontre néanmoins que certains aspects microtextuels, notamment l’intérêt du narrateur pour la mimésis dialectale, constituent des acquis définitifs.
230Sylvain Trousselard, « Onomastique et représentation de la société dans les Trecento Novelle »
La caractérisation comique des personnages est le fruit de jeux linguistiques variés, comme en témoigne l’inventivité onomastique de Sacchetti, destinée à mettre en relief l’épaisseur socio-économique des personnages. Analysant la désignation de certains personnages, l’auteur révèle de quelle manière le déictique de la personne s’inscrit pleinement dans la diégèse pour renvoyer parallèlement l’attention du lecteur sur les rapports socio-professionnels qui s’invitent alors dans le récit.
Pascaline Nicou, « L’adjectif nuovo chez Sacchetti et le renversement comique du monde »
L’examen de la qualification de personnages insolites par le mot nuovo (qu’on peut traduire par « singulier », « étrange », « extravagant ») traduit une conception du rire fondée sur l’écart par rapport à la norme, conception dont Pascaline Nicou révèle le lien avec la représentation de certains rapports de pouvoir au sein de la société, ainsi qu’avec une dimension politique plus générale correspondant à une critique de la fragilité des sociétés et des États contemporains.
Cécile Terreaux-Scotto, « La famille dans les Trecento Novelle de Franco Sacchetti. Liens fictionnels et ancrage historique »
La famille et la filiation sont marquées par l’ambiguïté : d’un côté, enfants et jeunes gens sont dépeints comme de dangereux rivaux ; de l’autre, leur intelligence est mise en valeur. Cette ambiguïté pourrait tenir au fait que les jeunes gens, de plus en plus présents dans la vie politique après la révolte des Ciompi, sont perçus comme subversifs. En tant que pueri senes, ils pourraient être le signe d’une crise morale profonde, dont la peste évoquée dans le prologue pourrait être l’emblème.
Ismène Cotensin, « Arts, espaces et narration dans les Trecento Novelle de Franco Sacchetti »
Comment la bottega de l’artiste, ouverte sur la rue, participe-elle au flux de la vie citadine ? Comment les différentes anecdotes mettant en scène les 231peintres Buffalmacco ou Giotto – déjà présents dans le Décaméron – révèlent-elles l’évolution de la société florentine, en particulier le statut de l’artiste-artisan ? La représentation des artistes par Franco Sacchetti traduit ainsi leur pleine insertion dans la sociologie urbaine et dans un ensemble de rapports de pouvoir qui structurent plus largement la cité.
Laurent Baggioni, « Analyse politique du rire florentin »
Franco Sacchetti dépeint le rapport entre les détenteurs du pouvoir et leurs sujets selon une polarité qui est l’un des principaux ressorts du comique. La catégorie bakhtinienne de « carnavalesque » semble inadéquate pour définir le comique du recueil, car celui-ci joue plutôt sur le ridicule des dominés plutôt que sur celui des dominants. Le comportement comique des bouffons est néanmoins doté d’une valeur heuristique qui révèle un regard critique porté sur toutes les formes de pouvoir.
Marina Gagliano, « Sacchetti, récit comique et commentaire moralisant dans les Trecento Novelle. Les modèles de Boccace et de Dante »
L’analyse se concentre sur l’instance multiple à laquelle Franco Sacchetti prête son nom et qui est à la fois protagoniste ou témoin, mais aussi narrateur et commentateur. Cette physionomie complexe n’est pas sans rappeler le « Dante » de la Divine Comédie, que l’auteur évoque en présentant la dimension éthique de ses récits. Ainsi, ce « je » aux multiples facettes fait du recueil un espace de communication où se déploie une invitation à la conciliation et à l’exercice des vertus morales et civiques.
Élise Leclerc, « “Perché dice bene il proverbio”. En traduisant les formes sentencieuses des Trecento Novelle »
Les formes sentencieuses sont analysées du point de vue de l’économie générale du texte. Elles apparaissent comme un outillage narratif et rhétorique complexe que le narrateur manie avec précision, en l’articulant aux différentes voix du récit. La finalité commune de ces usages convergents semble être celle de tisser une trame sous-jacente, porteuse d’une sagesse atemporelle et collective, et participant de la mise à distance critique du monde contemporain à l’œuvre dans le recueil.
232Ilaria Tufano, « La dimension politique dans les Trecento Novelle de Franco Sacchetti »
L’observation empirique, développée par Franco Sacchetti, du cadre socio-politique tumultueux de la fin du xive siècle, sa vertigineuse perception de la précarité de l’existence – si éloignée des matrices proto-humanistes de Boccace – sont le fruit d’une vision augustinienne de l’histoire, intrinsèquement mauvaise et violente, que Sacchetti conçoit comme une tragique succession de catastrophes et, de surcroît – il s’écarte en cela d’Augustin –, comme le jouet des permutations de la Fortune.
Enrica Zanin, « Les Trecento Novelle, projet éthique, réception et censure »
L’article questionne le projet éthique de Franco Sacchetti en soulignant sa proximité et ses écarts par rapport à son modèle boccacien. Il l’éclaire à la lumière de sa réception et de sa compréhension par les lecteurs plus tardifs, notamment dans les versions des mêmes nouvelles par Girolamo Morlini et Gianfrancesco Straparola. Le climat de censure qui suit le concile de Trente change la compréhension de ce projet, comme le montre la réception des nouvelles par Vincenzo Borghini et par Antonio da Sangallo.
- Thème CLIL : 4127 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Philosophie -- Philosophie éthique et politique
- ISBN : 978-2-406-11172-6
- EAN : 9782406111726
- ISSN : 2494-7407
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-11172-6.p.0229
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 11/08/2021
- Langue : Français