« Il est séditieux en son cœur » (III, 10) Discours personnel et discours politique dans le livre III des Essais
- Publication type: Journal article
- Journal: Bulletin de la Société internationale des amis de Montaigne
2017 – 1, n° 65. varia - Author: Balsamo (Jean)
- Pages: 11 to 25
- Journal: Bulletin for the International Society of Friends of Montaigne
« Il est séditieux en son cœur » (III, 10)
Discours personnel et discours politique
dans le livre III des Essais
Les Essais ont été reçus par les contemporains de Montaigne et la génération suivante comme des « discours politiques ». La formule se retrouve aussi bien sur le titre de la traduction italienne des deux premiers livres par Girolamo Naselli (Ferrare, 1590), que sur celui de la version anglaise des trois livres due à John Florio (Londres, 1603). Il s’agit certes d’un effet de réception et d’un argument éditorial. Ceux-ci ne se justifiaient pas moins par les titres de certains chapitres, la nature des arguments et des exemples traités, par le contexte dramatique dans lequel furent publiées les premières éditions du livre, par la culture des lecteurs à qui celui-ci s’adressait, et surtout par la personnalité de l’auteur, un gentilhomme de distinction, engagé dans la vie publique de son temps, dont les Essais se présentaient comme le portrait. Pourtant dans son avis au lecteur, Montaigne n’en avait pas proposé une lecture explicite en ces termes, même si l’évocation de sa « bonne foi » en était un clair indice, en relation à la polémique anti-machiavélienne des années 1570. C’est précisément pour répondre à des critiques, réelles ou fictives, qui s’interrogeaient sur la portée réelle d’un livre voué en apparence à une fin trop personnelle, que Marie de Gournay, dans la longue préface apologétique ouvrant l’édition posthume (1595), lia à cette intention politique le portrait que Montaigne avait tracé de lui-même :
Quelle escole de guerre et d’estat est-ce que ce livre ? […] Montaigne peinct la guerre et l’estat avec luy1.
Elle définissait à la fois le politique par son objet (la guerre et les affaires d’État), le mode de son exposition, en relation à un discours personnel, 12et la portée du livre, une « école ». Le politique était en quelque sorte connaturel à la personnalité Montaigne, dans le portrait qui le représentait dans toute sa complexité, privée, publique, littéraire, en relation à la guerre et aux affaires d’État.
L’action des princes, la lutte pour le pouvoir, les relations entre États, la diplomatie et la guerre sont omniprésents dans les deux premiers livres des Essais, dès la première phrase du premier chapitre. Ils ne constituent pas une matière cohérente ni un discours unifié, mais font l’objet d’innombrables exemples qui servent d’illustration souvent contradictoire, dans un grand catalogue des mœurs destiné à un discours consacré à « conférer », à préciser, à « mettre à l’essai », à soumettre des modes de pensée et des valeurs sociales à un examen critique. De façon plus précise, les deux premiers livres présentent aussi quelques chapitres dont les titres annoncent une argumentation portant de façon précise sur des questions diplomatiques ou militaires, le plus souvent dans une perspective historique, allant de l’Antiquité aux guerres d’Italie ; celles-ci constituaient alors pour Montaigne une référence décisive, nourrie de l’expérience de la génération de son père et de la lecture attentive de Guichardin2. Dès 1580, quelques chapitres avaient élargi exemples et références à des événements plus récents, dans le contexte des guerres pour la religion, en proposant un commentaire toujours critiques de la situation française contemporaine : « De la bataille de Dreux » (I, 45), « De la liberté de conscience » (II, 19), « Des mauvais moyens employés à bonne fin » (II, 23). Plusieurs chapitres enfin dissimulaient un discours politique sous un titre détourné : dès le chapitre « Divers événements de même conseil » (I, 23), Montaigne évoquait les guerres, « nos premiers troubles », occasion d’un récit du siège de Rouen et d’un éloge du duc de Guise ; c’était aussi pour lui l’occasion de mettre en exergue la qualité et la fiabilité de son information, celle d’un homme bien introduit. De même, « Des Cannibales » est une critique détournée de la France contemporaine, sur les bases d’un discours de Michel de L’Hospital, tenu quinze ans plus tôt devant le parlement de Bordeaux, comme « De l’amitié » met en valeur le Discours de la servitude volontaire de La Boétie tout en semblant le récuser. Enfin, certains chapitres portent des dédicaces. Derrière les relations amicales, dans le cadre d’une civile 13conversation, et sous l’apparence d’un livre pour Dames, se précisaient des relations de patronage et les réseaux de clientèle, qui définissaient le cadre de l’action publique de Montaigne et la portée de son discours politique : la haute noblesse de Guyenne, dans une relation conflictuelle avec Henri de Navarre, via les familles de Foix, de Duras, de Gramont, la comtesse de Guiche, sans compter Marguerite de Valois pour qui Montaigne avait probablement rédigé l’« Apologie de Raymond Sebond », vigoureux texte de controverse dirigé contre le dogmatisme protestant3.
Le livre III, rédigé entre 1584 et 15874, dans le prolongement immédiat de l’expérience municipale dont Montaigne fit une précise évocation dans le chapitre 10, s’inscrit dans un contexte politique nouveau, celui d’une guerre civile à trois adversaires, le pouvoir royal, le chef de guerre protestant devenu prétendant, la ligue catholique. La publication eut lieu en juin 1588, au moment de la sédition parisienne et l’effondrement du pouvoir royal. Le livre ne porte aucune dédicace. Le réseau des patrons n’apparaît qu’en creux et en situation de faiblesse, dans le chapitre « De la diversion », qui évoque la mort du comte de Gramont, tué au siège de La Fère. L’on pourra ainsi identifier la Dame anonyme que Montaigne se proposait de consoler, soit avec Mme de Duras, la sœur du comte, déjà dédicataire de II, 37, soit la comtesse de Guiche, son épouse, déjà dédicataire de I, 29. Montaigne était le conseiller de cette dernière, qui était devenue entre-temps la maîtresse de Henri de Navarre. La précision « une Dame vraiment affligée » s’éclairerait alors comme une apologie de la comtesse, haïe des protestants de la cour de Navarre, et à qui le parti catholique reprochait son précoce ralliement à l’ennemi de son mari. Ailleurs, en une claire allusion, Montaigne fait l’éloge du gentilhomme « que la France estime beaucoup » (III, 8 : 986) qui l’avait incité à lire Tacite ; il s’agit de Louis de Foix, déjà mentionné dans le chapitre « De la force de l’imagination »), époux de la dédicataire du chapitre « De l’institution des enfants », et qui venait d’être tué avec ses deux frères, des seigneurs catholiques au service de Navarre, au cours d’une escarmouche contre les troupes loyalistes.
14La matière politique, fragmentée et discontinue, est inscrite de façon systématique dans le cadre d’un discours personnel, qui lui donne à la fois son unité, ses limites et son sens, en tant que portrait de l’auteur et récit de sa vie. Dans sa forme, ce discours se distingue des modèles antiques et modernes évoqués et utilisés par Montaigne. Il ne s’agit pas d’une histoire de son temps, analogue aux Mémoires des frères Du Bellay. Dans un long ajout au chapitre « De la force de l’imagination », Montaigne avait récusé le propos historiographique auquel le conviaient ses proches :
estimants que je les voy d’une veue moins blessée de passion qu’un autre et de plus près, pour l’accès que fortune m’a donné aux chefs de divers partis. (I, 20 : 109)
Aux raisons d’ordre stylistique (le refus d’une narration « estendue ») s’ajoutait la mise en exergue d’un éthos exprimant un tempérament véridique, une liberté de jugement et une franchise incompatibles avec le respect dû aux princes dans un genre public et codifié :
Que ma liberté étant si libre, j’eusse publié des jugemens, à mon gré mesme, et selon raison, illégitimes et punissables.
Or les Essais, quand on les lit dans le détail, sont remplis de tels jugements, mais dans le cadre d’un discours privé et sur le mode du paradoxe ou de la dissimulation. Ce discours se distingue aussi, par sa structure et son mode non narratif, des mémoires, tant d’épée à la manière Commynes et de Monluc auxquels Montaigne porta une attention toute particulière, que de Robe à la manière du De vita sua que Jacques-Auguste de Thou allait rédiger au tournant du siècle, tout en portant une même intention apologétique
Aussi long que les précédents, mais plus resserré, le livre III fait apparaître une construction plus concertée ou moins rhapsodique. Deux chapitres sont clairement définis par leur titre comme des discours politiques ou traitant de politique, tous les deux en position remarquable : d’une part, le chapitre liminaire, dont le titre « De l’utile et de l’honnête » offre une formule qui sera reprise et développée en termes médicaux dans le dernier chapitre ; d’autre part le modeste chapitre, « De l’incommodité de la grandeur » (III, 7). Le premier chapitre représente Montaigne en négociateur entre des princes, non nommés, et justifie un 15choix éthique : le refus de la trahison ; le second fait une satire des rois et s’achève sur des exemples qui confirment la violence royale. Sous un titre en forme de précepte à connotation morale, « De ménager sa volonté », le chapitre 10 n’est pas moins entièrement consacré à la question civile de l’engagement dans une charge publique. Ailleurs, le politique, en relation à la guerre civile, la puissance souveraine, l’organisation civile, fait l’objet d’un discours fragmenté, en ce qui peut sembler des digressions, sous forme d’exemples variés, de narrations venant illustrer des analyses ou leur servant de support, complétés d’une codification en forme de sentences et de préceptes. Le chapitre 13, consacré à la représentation non politique d’un Montaigne privé et souffrant, ne s’ouvre pas moins sur un long développement critique, portant sur les défauts de l’ordre judiciaire français, examinés tant sous le rapport du législateur que de l’exécution des lois. Il a été amplifié par un éloge de la « police » des Chinois (III, 13 : 1118). Cette critique généralise un ensemble de défauts, dont le chapitre 11, « Des boiteux » avait illustré un cas particulier. Dans une perspective plus politique, plusieurs chapitres développent la critique du pouvoir royal, dans le contexte des années 1580. Le chapitre « Du repentir » a été mis en relation aux pratiques pénitentielles de Henri III et à son ostentation repentante5. Dans le chapitre « Des coches », sous le leurre séduisant d’un discours érudit et exotique, se dissimule une sévère critique des dépenses somptuaires. Le chapitre 7 poursuit cette critique. Le chapitre 9 évoque les voyages de Montaigne. Est-il pour autant un chapitre consacré au voyage, destiné à offrir une variation personnelle et paradoxale en relation à une methodus apodemica en train de se constituer ? Or c’est précisément un « lieu » de cette méthode que Montaigne développe, en le détournant pour l’amplifier en un discours politique, plus longuement et plus précisément traité : le « lieu » de l’utilité du voyage sous la forme de la « causa incommodi fugiendi ». Le second argument justifiant le voyage est bien celui de la « disconvenance » avec la situation française.
En même temps que les deux premiers livres, entre 1588 et 1592, le livre III a fait l’objet d’une réécriture destinée à une nouvelle édition, consistant en ajouts, mais aussi en de nombreuses modifications du texte original. Dans le chapitre 1, dans une généralisation à la première 16personne du pluriel, la concession que faisait Montaigne aux réalités du politique sous la forme d’une maxime (qui peut aussi être un précepte), « Le bien public requiert qu’on trahisse, et qu’on mente », a été complétée d’un ajout significatif, « et qu’on massacre » (III, 1 : 830), généralement mise en relation avec l’assassinat du duc de Guise. Dans le chapitre 10, la narration de l’action municipale de Montaigne s’élargit à l’ensemble de son action publique, en une nouvelle apologie de l’engagement non partisan, explicitement mise en relation au nouveau contexte politique par une comparaison entre les deux « partis fiévreux » qui se sont succédé en France, mais aussi en relation à un argument déjà développé ailleurs, « J’ai touché ailleurs le zèle », en l’occurrence dans le chapitre ii, 19. Ces ajouts portés sur l’édition de 1588, également répartis sur les trois livres, donnent à ceux-ci une unité nouvelle et devrait conduire à les étudier ensemble, dans la mesure où ils amplifient sur un mode entièrement cohérent aussi bien le discours personnel que la matière politique. Ils ont été rédigés au cours d’une période qui correspond à la retraite politique de Montaigne, conséquence de sa maladie et d’un échec auquel il est fait plusieurs fois allusion dans le livre. On présente parfois la dernière période de rédaction des Essais comme une phase de rupture avec le politique et une orientation nouvelle donné aux Essais, d’ordre privé, littéraire ou philosophique6. Or, loin de perdre en intensité, le discours politique n’a cessé d’être poursuivi et enrichi sur l’Exemplaire de Bordeaux et les derniers ajouts sur la « Copie de Montaigne », base de l’édition posthume. Ce discours met en évidence la cohérence sur la longue durée du livre et du projet qui le sous-tend, indépendamment des péripéties que représentent les éditions successives : il ne cesse d’être un discours personnel et politique.
Ce discours politique n’est pas abstrait, il sert manifestement à décrire et à comprendre le drame de la guerre civile dont Montaigne est non seulement le témoin mais aussi un des acteurs. Tous les chapitres du livre III évoquent les malheurs de la guerre civile tels que Montaigne les éprouve et en relation à son action publique et au gouvernement de son pays, de façon plus ou moins développée (1, 4, 6, 7, 8, 9, 10, 12, 13) ou simplement allusive, en traitant d’autre sujets, en particulier de la conversation civile (2, 3 et 5, 13). Plusieurs d’entre eux font référence à des événements contemporains, mais toujours sous forme allusive. 17Dans le chapitre « De l’utile et de l’honneste », Montaigne évoque « la poisante experience (III, 1 : 836) que lui-même et ses alliés ou ses contemporains » venaient de faire de la trahison7. L’argument du bref chapitre 7 repose sur une allusion :
L’incommodité de la grandeur, que j’ay pris icy à remerque, par quelque occasion qui vient de m’en advertir. (III, 7 : 963)
Ces allusions, que la critique n’a pas éclairées, rappellent que le discours politique des Essais, s’il est toujours contextualisé, ne constitue pas un discours historique. Seul le chapitre « Des boiteux » ne fait pas mention aux guerres civiles. Tel quel, ce discours est lié à une expérience personnelle, au sein d’un contexte historique précis, à un ensemble de relations, de débats et de conflits, impliquant Montaigne, en tant qu’homme publique et privé. Montaigne cherche à comprendre les guerres en fonction d’un paradigme antique, celui des guerres civiles antiques, dont la pertinence est relative, et d’un paradigme médical8. Le temps des guerres civiles est un « temps malade » dans un État malade, dont il éprouve les maux en sympathie avec les maux physiques qui le frappent, et de même que la médecine est incapable de le guérir (chapitre 13), la médecine politique « porte infection ». L’expression « sans remède » revient à plusieurs reprises dans le livre III.
Ce discours a été généralement examiné selon deux perspectives différentes et d’une certaine manière contradictoires : d’une part une perspective biographique et d’autre part une perspective philosophique. En tant qu’il est porté par un discours personnel, voire confondu avec lui, il a été mis en relation à la vie de Montaigne et à un référent extérieur aux Essais, le contexte historique, dans lequel se sont déployées une carrière et une action publique. Le discours personnel, considéré 18comme une source documentaire objective en dépit de son écriture allusive et de la nature paradoxale de son argumentation, permettrait d’éclairer celles-ci. De même que le chapitre « De l’expérience » a nourri les biographies de Montaigne de tous les éléments éclairant ses usages privés, la paraphrase du chapitre « De la physionomie » a servi à la tentative de reconstitution d’un moment critique de sa carrière, de façon d’autant plus péremptoire qu’aucun autre document ne venait appuyer ou infirmer une telle reconstitution9.
Inversement, en tant qu’il a pour objet le politique, ce discours politique a été lu en toute indépendance du discours personnel qui le porte et de ses enjeux rhétoriques, pour être réordonné sur un mode systématique. Il a pu être ainsi inscrit dans une histoire des doctrines et se résoudre en termes conceptuels, ceux d’un Montaigne « penseur politique », proposant une théorie de la souveraineté, un machiavélisme modéré, voire un libéralisme avant la lettre. Cette conception a longtemps négligé le contexte historique dans lequel les Essais ont été rédigés et publiés10. Les travaux plus récents cherchent à mieux contextualiser la « pensée » de Montaigne, pour en faire celle d’un « Montaigne en son temps ». Ils ont recours à l’approche biographique, censée l’éclairer, au risque de faire de la pensée de Montaigne le support de l’action de l’homme politique, sans considération pour la réalité discursive des Essais11. Or Montaigne ne propose ni le récit d’une pratique ni un traité consacré à la meilleure forme de gouvernement, la définition de la souveraineté, l’ordonnance de la « police », à la manière des trois grands traités publiés en 1576, La Politique d’Aristote commentée par Loys Le Roy, La République de Bodin, le Discours contre Machiavel de Gentillet. Montaigne les a lus, comme il a lu les sources classiques, qui constituent son cadre conceptuel et ses références, avec le Discours de la servitude volontaire.
19S’il ne met pas en forme une théorie, le discours politique dans les Essais met en œuvre des concepts et repose, de façon plus générale, sur une culture politique, dont la singularité demanderait encore à être établie. Le livre III est marqué par une référence fréquente au De officiis de Cicéron, comme il met en évidence la lecture de Tacite. Dans le chapitre 7, Montaigne évoque aussi sa lecture de deux traités contemporains, le De iure regni apud Scotos (1579) de Buchanan et la réponse donnée par Adam Blackwood, l’Apologia pro regibus (1581)12. Ces deux ouvrages ont été négligés dans les études portant sur la pensée politique de Montaigne comme sur Montaigne politique. Le premier traité, dû à un ancien maître de l’écrivain, se rattache à la tradition monarchomaque. Il propose une conception du pouvoir royal réglé, soumis à la loi, dans le cadre d’un contrat avec un peuple considéré comme ensemble de citoyens. Le second développe une conception absolutiste. Dans le texte des Essais, Montaigne oppose les deux ouvrages sans pencher, en apparence du moins, pour l’un ou pour l’autre ; il souligne au contraire, la « naturelle envie et contestation » à l’œuvre dans le débat pour « la maîtrise et la sujétion » (III, 7 : 962) qui empêcherait une approche rationnelle et objective. Toutefois, dans le contexte du chapitre, l’évocation des inconvénients de la grandeur, assimilée à l’exercice du pouvoir royal, est implicitement une correction de la seconde thèse, celle de Blackwood, qui assimile le roi à un dieu. Le discours politique des Essais par ses formules et ses références révèle ainsi une orientation ou une sensibilité monarchomaque, que les travaux consacrés à la « pensée » de Montaigne négligent d’autant plus qu’elle est en apparence incompatible avec la loyauté publiquement affichée par Montaigne et son engagement au service de la cause royale.
Ces perspectives, biographique et philosophique ont certes leur pertinence, mais une pertinence heuristique limitée pour comprendre le discours politique des Essais, dans sa nature et dans l’espace singulier où il se déploie, rhétorique et littéraire. Celui-ci, en tant que discours personnel, ne se réduit pas à la doctrine, même lorsque celle-ci est replacée dans le contexte historique des guerres civiles. Il ne se réduit 20pas non plus à la biographie, dans la mesure où il s’agit d’un discours élaboré, porteur d’intentions et d’effets, qui offre une représentation de Montaigne savamment ordonnée, bien différent d’un document objectif. Postérieur aux événements auxquels il fait allusion, il ne se confond pas avec le discours public du Montaigne « politique » engagé dans les affaires de son temps13. Ce discours politique public ou officiel, que Montaigne a tenu dans ses lettres, et en particulier les lettres souvent citées adressées en 1590 à Henri de Navarre devenu Henri IV, ou qu’il pouvait tenir dans ses entretiens avec les princes et les Grands, était un discours obligé, exprimant le respect, la soumission, l’obéissance, en relation à un rang, une étiquette des obligations. Les Essais font allusion à ces discours, ils en rapportent la substance, mais sur un mode toujours allusif ; ils les corrigent en les adaptant à une persona, dans le portrait que Montaigne trace de soi en gentilhomme prudent14, en sujet loyal, en écrivain véridique. Ils disent plus et autre chose que le discours public permis au Montaigne politique. Deux chapitres du livre III révèlent ce discours en excès, le modeste chapitre « De l’incommodité de la grandeur » et le chapitre « De la vanité ».
Longtemps négligé, le bref chapitre 7 a fait l’objet d’une légitime réévaluation15. Il ne se présente pas comme une apologie de l’action publique de Montaigne, développée dans les chapitres 1 et 10, et sur un mode particulier (la fuite), dans le chapitre 9. Il s’agit d’un discours consacré au prince, dans un lien de continuité et de variation avec le chapitre « des Coches » : après la critique du prince prodigue, une correction apportée à celle-ci, par une considération sur la difficulté de l’exercice du pouvoir et la solitude qu’il implique. La position centrale du chapitre, au cœur duquel est mentionné un livre monarchomaque 21du maître de Montaigne, n’est sans doute pas un effet du hasard ; elle répond à la position centrale du chapitre consacré à La Boétie et à la Servitude volontaire dans le livre I. Le chapitre ne se comprend pas moins par une relation interne aux Essais, comme une réécriture de l’argument du chapitre i, 42 « De l’inégalité qui est entre nous », longue démythification des distinctions de rang, qui relèvent de l’apparence voire de imposture si elles ne sont pas fondées sur la vertu. L’exemple de Hiéron définit très précisément les « incommodités » de la royauté, que Montaigne résume en une maxime : « Les avantages principesques sont quasi avantages imaginaires ». Toutefois, le chapitre iii, 7 n’est pas simplement une variation sur le chapitre i, 42. Dans la suite de ses rédactions, il se précise par l’opposition entre la grandeur incommode du prince et le choix vertueux de Montaigne en homme « médiocre ». La critique de l’état royal et de sa fausse grandeur met en évidence, par contraste, la perfection paradoxale de l’état moyen de Montaigne qui se représente ironiquement en « oyson », en niais. Cette modestie apparente révèle, par une série d’antithèses, l’effort vertueux que recouvre le refus de la grandeur : contre le désir et l’ambition, des qualités intérieures et personnelles, conformes à sa « constitution naturelle » et à l’ordre de la providence. Cet accord correspond à un choix éthique qui guide toute sa conduite publique, formulé non sans véhémence par une allusion dépréciative à un mot de César, actualisée par une référence à la hiérarchie parlementaire et au premier office de la carrière publique de Montaigne :
Et tout à l’opposite de l’autre, m’aymerois à l’avanture, mieux deuxiesme ou troisiesme à Périgueux, que premier à Paris : Au moins sans mentir, mieux troisiesme à Paris, que premier en charge. (III, 7 : 961)
L’argumentation est entièrement régie sur un mode personnel. Elle sert à la représentation de Montaigne. Celle-ci se développe en une suite d’affirmations servant moins à décrire un caractère qu’un comportement, privé et public. Elle se développe également, du moins dans la dernière rédaction, par une série d’exemples, qui peuvent être directement rapportés à Montaigne, dont ils constituent comme autant d’avatars. Parmi ses singularités, ce chapitre est le seul chapitre du livre III à ne comporter aucune référence à Socrate, laissant Montaigne, dans l’affirmation de soi en prudent mais aussi en gentilhomme, s’approprier des exemples plus conformes à son statut social. Les exemples auxquels il s’identifie se 22déploient de part et d’autre de l’expression « Je suis desgousté de maistrise et active et passive » (III, 7 : 962). La figure de Thorius Balbus, d’une part, est considérée comme un véritable « exemplaire », un patron sur lequel il pourrait, le cas échéant, former son comportement :
L. Thorius Balbus, gallant homme, beau, sçavant, sain, entendu et abondant en toute sorte de commoditez et plaisirs, conduisant une vie tranquille, et toute sienne, l’ame bien preparée contre la mort, la superstition, les douleurs, et autres encombriers de l’humaine necessité, mourant en fin en bataille, les armes en la main, pour la défense de son païs. (III, 7 : 962)
Cet exemple est positif, représentant un citoyen moyen, conjuguant le bonheur privé et la vertu civique. Introduit sur l’Exemplaire de Bordeaux, il vient corriger ce que la rédaction initiale publiée en 1588 avait de dépréciatif dans le portrait que Montaigne traçait de lui-même (« J’ai ainsi l’âme poltronne »). L’exemple d’Otanez d’autre part, également introduit par un ajout tardif, illustre le refus vertueux de la grandeur, c’est dire du pouvoir. Machiavel l’avait déjà mentionné pour illustrer la victoire de seigneurs vertueux sur l’imposture tyrannique d’un mage (Discorsi, III, 6). Montaigne s’en sert pour amplifier la formule qui le définit (« Je suis desgousté… »), dissociée de son premier contexte, sous la forme d’une paraphrase (« hors de toute subjection et maîtrise, sauf celle des lois antiques », et « impatient de commander comme d’être commandé »).
L’exemple de Thorius Balbus illustre une forme de vertu publique à l’antique. Elle correspond en tout point à la justification que Montaigne fait de sa propre action dans les chapitres apologétiques du livre III, justifiant un engagement limité, fondé sur le partage entre vie privée et action publique, mais capable d’aller jusqu’au sacrifice héroïque. Le second exemple est plus complexe. On a souligné une prétendue faiblesse conceptuelle du contrat politique ainsi évoqué, fonder une paradoxale souveraineté d’ordre privé16. Or l’exemple n’oppose pas une souveraineté privée à une souveraineté publique ; il oppose en fait deux souverainetés publiques, sous forme de deux couples antagonistes. Le premier couple oppose la souveraineté de la loi à celle du roi, une souveraineté bonne, à laquelle Montaigne-Otanez accepte d’obéir, et une souveraineté oppressive, dont il demande d’être exempté. Cette opposition structure l’ensemble 23du discours politique des Essais. Portée par les Monarchomaques et les théoriciens du contrat, elle correspond à la conception plus ancienne de la Monarchie réglée définie par Seyssel, base de l’idéologie parlementaire des années 1550, à laquelle La Servitude volontaire avait donné une contribution décisive. De ce point de vue, le livre III marque bien un retour à la leçon de La Boétie.
Le second couple oppose la souveraineté royale et la « maistrise » qui lui appartient, à la souveraineté publique d’Otanez : une souveraineté individuelle mais non pas privée, au sein d’un même empire, en toute liberté. Cette conception ne relève pas d’une position monarchomaque, fondée sur la conception d’une souveraineté royale modérée par la loi. Elle illustre un idéal nobiliaire, qui définit la noblesse en termes de liberté et de franchise et non pas dans sa relation d’honneur et d’obéissance au prince. Cette conception avait pour Montaigne sa réalité contemporaine, qu’éclaire la référence à l’empire : celle du « freiherr », du « liber baro », du noble immédiat soumis aux seules lois générales, dont il avait pu faire l’expérience en Allemagne17. Cette réalité en revanche est inconcevable en France, ce statut exorbitant est inacceptable dans le cadre de la monarchie française et de son évolution absolutiste dirigée contre toute souveraineté individuelle et toute liberté privilégiée, des individus comme des collectivités. Les Essais offrent le témoignage de cette évolution. La contextualisation qui les éclaire véritablement n’est ni événementielle (les guerres civiles) ni personnelle (la carrière de Montaigne, la relation à Henri III), elle est sociale et idéologique.
Dans le chapitre i, 42, Montaigne évoquait la liberté qui accompagnait sa qualité noble, en relation à une souveraineté reconnue aux lois et au prince :
À la verité nos loix sont libres assez ; et le pois de la souveraineté ne touche un gentil-homme François, à peine deux fois en sa vie : La subjection essentielle et effectuelle, ne regarde d’entre nous, que ceux qui s’y convient. (I, 42 : 287)
Dix ans plus tard, il avait fait l’expérience de l’action publique et du service aux princes. La conscience qu’il pouvait avoir de s’affirmer comme un « seigneur retiré et casanier », libre d’engagement, était moins sereine, 24elle était contraire au devoir de l’obéissance nobiliaire au temps des guerres civiles et aux implications d’une telle obéissance18. Dissimulée derrière l’exemple vertueux de Thorius Balbus, la figure d’Otanez en seigneur immédiat, sous laquelle se rêve le gentilhomme Montaigne, a bien une portée politique, qui s’éclaire dans le cadre institutionnel français et de son évolution à la fin du xvie siècle. La formulation de Montaigne va au rebours du mouvement général de la royauté française, dont elle est la critique. C’est en ce sens dynamique que doit se comprendre le prétendu « conservatisme » de Montaigne, tel qu’il s’exprime dans les Essais. Élargi à l’ensemble du livre, ce discours politique est bien une mise en garde contre le pouvoir absolu de rois despotes.
À la fin du chapitre 7, Montaigne met en évidence la menace que représente le pouvoir de coercition du prince, la violence que le pouvoir exerce contre qui ne se plie pas à son caprice19, ailleurs, dans le chapitre 9, il évoque le subtil réseau d’obligations, de contraintes et d’honneurs par lequel le prince enserre le noble qu’il soumet. Le chapitre 8 répond à ce constat par la représentation contraire de la bonne conférence, le chapitre 9, par la fuite dans le temps et l’espace. Nous avons montré ailleurs quelle était la portée politique de l’ostentation de la bulle de citoyenneté romaine dans le chapitre « de la vanité20 » : un modèle de récompense d’honneur libéré de toute servitude, offrant un paradigme noble, celui du statut sénatorial romain, analogue dans sa portée à la liberté immédiate d’empire du chapitre 7.
Certes, le discours politique et personnel qui se déploie dans les Essais renvoie directement ou de façon allusive aux guerres civiles et à la carrière publique de Montaigne. L’apologie de son action en termes moraux sert à justifier son action. Mais les Essais, dans l’ensemble de leur rédaction et leur cohérence, sont bien plus que l’expression documentaire du Montaigne politique. La représentation que celui-ci donne de lui-même en homme de bien, soucieux du bien public et de l’ordre, 25sert en même temps à justifier un discours paradoxal dans le contexte français, et à le garantir contre l’accusation de subversion. Dans le chapitre « De l’amitié », Montaigne célébrait le Discours de la servitude volontaire, dans la sincérité de sa portée scandaleuse, en soulignant que le goût de la liberté de La Boétie n’était pas incompatible avec son civisme, respectueux des lois et du « repos de son pays » (I, 27 : 201). De façon analogue, le livre III dans son ensemble, peut être lu comme la conciliation d’une liberté de parole extrême, une parrhesia liée à la franchise du gentilhomme, avec la vertu civique et le respect de la loi. Dans les deux cas, la possibilité de la parole libre au point de passer pour séditieuse reposait sur une concession qui minorait en apparence la portée de ce discours : d’un côté, un « sujet traité […] par manière d’exercitation » ; de l’autre, un discours personnel d’emblée caractérisé comme « fadaises », tenues par un niais.
Pas plus qu’ils ne confondent avec l’action du Montaigne public, les Essais ne semblent avoir été une fuite dans le littéraire ou l’abstraction philosophique, liée à un échec politique. Ils constituent jusqu’au bout au contraire une réponse littéraire et morale au politique. L’espace dans lequel ils se déployaient n’était pas seulement un espace intérieur et privé, celui de « l’arrière-boutique » évoquée dans le chapitre 10, mais un espace public, celui de la « boutique de libraire » du chapitre 9, que hantaient des lecteurs réels. Ceux-ci y pouvaient y apprendre par l’autorité convaincante d’un gentilhomme engagé « que toutes choses ne sont pas loisibles à un homme de bien pour le service de son roi ni de la cause générale et des lois » (III, 1 : 18), en un livre où s’exprimait une parole critique, où se formulaient des préceptes capables de guider un engagement public, où se représentaient des exemples de prudence, d’héroïsme et de vertu, où se frayait surtout une voie d’honneur, la seule acceptable pour la noblesse, entre devoir d’obéissance et devoir de révolte, entre une soumission indigne et une révolte illégitime.
Jean Balsamo
Université de Reims
1 M. de Gournay, « Préface », in Les Essais [1595], éd. J. Balsamo & alii, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 42007, p. 17. Toutes nos références renvoient à cette édition.
2 Sur ce point, voir J. Balsamo, « L’expérience italienne “à l’essai” : Montaigne, Machiavel, Guichardin », Montaigne Studies, XXV, 2013, p. 189-206.
3 Voir J. Balsamo, « Marguerite de Valois, Montaigne, l’“Apologie de Raymond Sebond”», in La Cour de Nérac au temps de Henri de Navarre et de Marguerite de Valois, Niort, Albineana, 24, 2012, p. 224-242.
4 La datation probable a été établie par J. Garapon, « Quand Montaigne a-t-il écrit les “essais” du livre III ? », in Mélanges de langue et de littérature du Moyen Âge et de la Renaissance offerts à Jean Frappier, Genève, Droz, 1970, t. I, p. 321-329.
5 Voir G. Hoffmann, « Emond Auger et le contexte tridentin de l’essai “Du repentir” », BSAM, 21-24, 2001, p. 263-275.
6 Voir Ph. Desan, Montaigne. Une biographie politique, Paris, O. Jacob, 2014, p. 518.
7 Pierre de L’Estoile mentionne dans son Journal pour le règne de Henri III, deux épisodes qui peuvent correspondre à l’allusion de Montaigne, d’une part, en mai 1586 le siège de Monségur par le duc de Mayenne et le massacre de la garnison en dépit de l’accord de reddition, justifié par le fait que les protestants avaient eux même trahi leur serment de ne plus prendre les armes contre le roi, qu’illustre l’adage juridique frangenti fidem fides frangatur eidem (éd. Lefèvre, 1943, p. 447) ; d’autre part, en février 1588, en Armagnac, le massacre par un gentilhomme protestant des convives invités à une noce, « commis de tacite consentement du roi de Navarre », qui soupçonnait les convives, tous ligueurs, de fomenter un complot contre lui (p. 544).
8 Sur ce point, voir J. Balsamo, « Des Essais pour comprendre les guerres civiles », Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance, LXXII, 2010, p. 521-540.
9 Voir R. Trinquet, « Aperçus généraux sur l’attitude politique de Montaigne après la mairie de Bordeaux (1585-1592) », BSAM, 4e série, 11, 1967, p. 3-22. Sur le problème de méthode que pose cette utilisation du texte des Essais en termes biographiques, voir J. Balsamo, « Montaigne avant Montaigne ou les scénarios de Roger Trinquet », Montaigne Studies, XX, 2008, p. 129-144.
10 Voir les contributions au volume Montaigne et la philosophie politique, Montaigne Studies, XXVIII, 2016, et la mise au point de Ph. Desan, p. 3-9, qui assimile le discours à l’expérience d’une pratique politique.
11 Sur ce point, voir Th. Menissier, « L’autorité dans les Essais de Montaigne. Nature et limite de la relation d’obéissance », in Montaigne, dir. P. Magnard et Th. Gonthier, Paris, Le Cerf, 2010, 179-204.
12 G. Buchanan, De iure regni apud Scotos (Edinburg, H. Chartrer, 1579) ; A. Blackwood, Adversus Georgii Buchanani dialogum […] pro regibus apologia (Poitiers, Le Page, 1581, rééd., Paris, A. Sittart, 1588). Ces deux ouvrages ont été signalés par P. Villey, Les Sources et l’évolution des Essais de Montaigne, Paris, Hachette, 1933, t. I, p. 84-85 et 96-97.
13 Les annotations sur l’Ephemeris de Beuther, un texte d’ordre privé mais non littéraire, mettent en évidence ces différents plans. On notera en particulier l’éloge du duc de Guise à l’occasion de la mention de son assassinat, à mettre en relation avec la réfutation ironique « Il est de la Ligue : car il admire la grace de Monsieur de Guyse » (III, 10 : 1058).
14 Voir Fr. Goyet, Les Audaces de la prudence. Littérature et politique aux xvie et xviie siècle, Paris, Classiques Garnier, 2009, p. 69-84.
15 Contre l’interprétation dépréciative du chapitre par J. Parkin, « Montaigne, Essais, 3, 7 : le point mort d’un chef d’œuvre », BSAM, 6e série, 5-6, 1981, p. 83-104, le chapitre a été réhabilité par J. Lafond, « ‘De l’incommodité de la grandeur’, ombilic du livre III », in Lire, vivre où mènent les mots. De Rabelais aux formes brèves de la prose, Paris, H. Champion, 1999, p. 61-68, et par R. Scholar, « L’“Oyson” du IIIe livre », in Les Chapitres oubliés des Essais de Montaigne, éd. Ph. Desan, Paris, H. Champion, 2011, p. 225-238.
16 Voir sur ce point Ménissier, « L’autorité dans les Essais… », op. cit., p. 198.
17 Dans le Journal du voyage, le secrétaire note que Montaigne et ses compagnons ont été pris pour « barons et chevaliers » et qu’il « avait voulu qu’on s’y contrefît », éd. F. Garavini, Paris, Gallimard, 1983, p. 127.
18 Voir N. Le Roux, « Honneur et fidélité. Les dilemmes de l’obéissance nobiliaire au temps des guerres de religion », Nouvelle revue du seizième siècle, 22/1, 2004, p. 127-146.
19 Dans sa simplicité, cette « chute discordante » a suscité l’incompréhension de la critique, voir Scholar, p. 234. Elle est en fait la conclusion logique d’une critique de la mauvaise souveraineté.
20 Pour une analyse du chapitre 9 en termes politiques, voir J. Balsamo, « La bulle de citoyenneté romaine : éthique et politique dans “De la vanité” (Essais, III, 9) », in Lectures du livre III des Essais, dir. Ph. Desan, Paris, H. Champion, 2016.
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- ISBN: 978-2-406-06907-2
- EAN: 9782406069072
- ISSN: 2261-897X
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-06907-2.p.0011
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 03-02-2017
- Periodicity: Biannual
- Language: French