Montaigne et les silènes sceptiques
- Publication type: Journal article
- Journal: Bulletin de la Société internationale des amis de Montaigne
2016 – 2, n° 64. varia - Author: Panichi (Nicola)
- Pages: 111 to 127
- Journal: Bulletin for the International Society of Friends of Montaigne
Montaigne
et les silènes sceptiques
Toute presupposition humaine et toute enonciation a autant d’authorité que l’autre, si la raison n’en faict la difference.
(II, 12, 540-501A).
Désenchantement
et fertilité de la contradiction
C’est devenu désormais une sorte de topos de souligner à quel point la philosophie de Montaigne, qui déclare haïr mortellement toute forme de tyrannie matérielle et conceptuelle, active et passive, évite les tentations systématiques ou « architectoniques », adopte les scepticismes (au pluriel : Socrate, Pyrrhon, Sextus Empiricus, Plutarque) comme arme de déconstruction/reconstruction et les lie au concept de « possibilité ».
La skepsis, expérience des limites où la raison mesure son écart de la richesse des choses et ressent son incapacité à en venir à bout, élève le principe de contradiction et la « religion » de la dissemblance au rang de règle suprême, renonçant à la possession de la aeterna philosophia, à la certitude de ses promesses, aux jeux rhétoriques et syllogistiques (avec lesquels, cependant, le Bordelais s’amuse, faisant la preuve qu’il en possède la connaissance et l’usage). Elle expérimente aussi un usage non conformiste de tous les dualismes classiques : nature-coutume, conscience-convention, liberté-nécessité, intus-foris, interne-externe, substance-apparence, essence-phénomène, visage-masque, âme-corps, tous les silènes de l’esprit et souvent des silènes « à l’envers ».
112« J’ouvre les choses plus que je ne les descouvre » (II, 12, 501C1). L’invitation à pénétrer jusqu’à « la moelle » du sens (à la façon de Giordano Bruno) n’implique pas pour Montaigne un simple renversement des couples opposés. Il ne suffit pas, comme l’enseignait Érasme, d’ouvrir le silène. Parfois, le « dedans » même est une idole, le « visage » est masque : l’opération du chirurgien doit devenir opération du sceptique et de l’accoucheur pour comprendre non seulement si la maladie a été extirpée des chairs les plus intimes mais encore, et surtout, si la maladie porte en elle la santé et la santé la maladie, si pour être pleinement sain il est nécessaire d’être malade et si pour être malade il faut être sain.
Il pourra arriver, alors, que Montaigne s’interroge (pour découvrir ensuite la pleine légitimité du doute) pour savoir si la loi de nature elle-même, tellement invoquée par les philosophes, est à son tour un universel erroné (les lois de la nature elles-mêmes se révèlent falsifiées par leur façon de concevoir « différents portraits d’un sujet si uniforme » comme il l’écrit dans un ajout manuscrit du dernier chapitre du troisième livre (III, 13, 1073C) et si les lois de la conscience sont le fruit de la coutume, toujours philtre de Circé et caverne de Platon, une sorte de fausse conscience qui rend impossible ce qui ne l’est pas, l’inusité impossible tandis qu’elle se targue de savoir jusqu’où peut arriver la possibilité de la nature humaine.
Et encore : se poser la question de savoir si la nature, à l’aspect « constant et universel », contient en soi les présupposés de la coustume (en en révélant peut-être même un côté positif), si la nouvelleté n’est pas différente de l’innovation, si l’imagination n’est pas la raison, la constance un mouvement plus lent ; si la constance seule n’est pas l’inconstance, la sagesse folie et la folie sagesse, si l’amitié parfaite n’est pas possible entre plusieurs se multipliant « en confrairie », si le scepticisme nihiliste n’est pas dogmatisme et le dogmatisme la dernière forme du scepticisme ; si le relativisme absolu n’est pas intolérance et si le mouvement n’est pas un universel relatif, si l’identité ne tend pas à la différence et la différence à l’identité, si le vice ne pousse pas au bien, si la peur n’est pas courage (« pour avoir peur, il faut du courage ») et surtout, si le principe de contradiction n’est pas le sel de la logique de la vie et du vivant, et si le moi n’est pas le siège des 113contraires (II, 1). Une autre façon de réaffirmer ce que Montaigne avait déjà dit, dans le sillage d’Héraclite : « nous ne nous trouvons jamais deux fois dans la même condition ».
Pour mieux comprendre la règle des règles de la vie, il faut se rapporter à l’Epistula, 28, 4 de Sénèque, qui en donne une synthèse exemplaire : « c’est vouloir, et ne vouloir pas, toujours même chose. Je ne daignerais, dit-il, ajouter : “pourvu que la volonté soit juste car si elle n’est juste, il est impossible qu’elle soit toujours une”. » (Ibid., 332A). Règle d’une nouvelle sagesse, qui embrasse tous les aspects de la vie humaine (humanae vitae modum) et laisse de côté definitiones sapientiae veteres. Elle est inconstantia et dissimilitudo rerum consiliorumque. Une sorte de silène toujours à l’œuvre, qui dans la perspective dialectique du renversement, relance le souci que Montaigne a de l’éternelle herméneutique incessamment exposée au risque de l’entre-gloser.
Pourquoi continuer alors à s’interroger sur le scepticisme de Montaigne ? Parce que l’histoire n’est pas fermée, l’homme est possibilité, il ne sait ce qu’il peut devenir et ce qu’il pourra être puisque son intelligence l’ignore, malgré le fait que dans les sociétés les vices eux-mêmes constituent un lien malade et cruel qui leur confère et alimente la « santé » et le « bon gouvernement ». Relire le scepticisme de Montaigne signifie reconstruire le parcours génétique de certains des thèmes de fond, philosophiques et éthico-politiques, en se remettant à réinterroger des articulations conceptuelles qui risquent d’aboutir platement à des lieux communs.
En outre, quel usage peut faire du scepticisme un intellectuel qui se proclame non philosophe (« Je ne suis pas philosophe » : III, 9, 950C) ? Si la thèse de départ souvent est complètement renversée et le moteur sceptique, d’élément de limitation, devient générateur de possibilités et de « convictions » (comme celle du caractère intrinsèquement politique du concept d’amitié), quel meilleur usage la « vraie philosophie » même pourrait-elle espérer du plus positivement constructif ?
Mais l’exemple des lois naturelles, nous l’avons vu, nous aide dans ce propos. La nature aussi peut devenir un silène à l’envers dans la perception philosophique. Lorsque Montaigne met en garde contre son faux concept, une sorte de vieil/nouvel idolum, écrit : « Les philosophes, avec grand raison, nous renvoyent aux regles de Nature : mais elles n’ont que faire de si sublime cognoissance : ils les falsifient et nous presentent son visage peint trop haut en couleur et trop sophistiqué, d’où naissant 114tant de divers pourtraits d’un subjet si uniforme ». Au dedans on peut retrouver l’anti-nature.
« J’ouvre les choses
plus que je ne les descouvre »
Dans la perspective de Montaigne, un des fruits majeurs du scepticisme géographique est, notamment, que le Nouveau Monde ne veut pas fonctionner uniquement en tant que paradigme anthropologique du « bon sauvage » – qui agit cependant comme une sorte de mythologème – mais reprojeter l’ordre temporel, en tant que reconceptualisation et resémantisation des âges historiques. Il montre, fait allusion, se pose comme signe et sens de la découverte d’un nouveau paradigme et comme une nouvelle possibilité pour l’humanité, stérilisée par les « monstrueuses guerres », guerres fratricides qui « attisent la guerre, non parce qu’elle est juste, mais parce que c’est guerre » (III, 1, 793C). Le monde enfant, un « étant en possibilité » (alors que notre monde fermera les yeux, s’il les ferme, l’autre monde les ouvrira), prélude à la possibilité de mondes infinis et à leur éternité.
Mais ce même Nouveau Monde semble aussi préfigurer l’espérance, que Montaigne ne s’interdit pas, d’un monde nouveau (où interagissent des notions liées au Nouveau Monde et à l’essai sur l’amitié). Dans notre temps malade, prévient-il, il y a d’autres routes pour nous sauver : « route[s] par ailleurs » (III, 9, 961B ; III, 13, 1068B). Autres que celles du temps de la maladie et de la vieillesse du monde.
La thèse récurrente du conservatisme politique, conclusion du scepticisme théorique, c’est-à-dire le fait que la traduction du scepticisme dans la pratique se résolve dans l’acceptation du statu quo ante, est à la base de la thèse du Montaigne conservateur. Le scepticisme se préfigure comme philosophie du désengagement, annonce et négation de la possibilité même d’une philosophie pratique. Pour cela, Montaigne sceptique proposerait et mettrait en œuvre le désengagement2 même 115accompagné de la formule de l’arrière-boutique : foris ut moris, intus ut libet. Et il n’en déduirait aucune morale universelle (encore une fois, on confond ce que Montaigne a voulu séparé : universalité et université, universalisme et universel (universalité).
Mais l’accusation envers le scepticisme-immobile, en vérité, était déjà repoussée par Plutarque (Adversus Colotem) – un des sources plus importantes des Essais pour la construction d’un scepticisme « à plusieurs visages » – qui déjà argumentait contre la thèse stoïcienne (et sa reprise par les épicuriens) qui voyait dans le scepticisme une Méduse paralysante, instigatrice du principe d’« inaction » et donc niant la valeur de l’agir, encore une fois pratique théorique et théorie pratique du désengagement, de l’acceptation, du consentement3.
On aborde ici, presque un oxymore, le point de la perspective herméneutique, au rivage le plus sensible où émerge la force du scepticisme méthodique (un scepticisme qui met à l’épreuve le scepticisme par le scepticisme même et résout la contradiction sceptique, on le sait, par le « Que sais-je ? », en l’intégrant à la triade de « Du pedantisme »).
Un regard adulte sur l’œuvre de Montaigne ne pourra manquer alors de mettre en évidence non seulement les attentes que le philosophe même entendait recueillir d’une telle nouvelle philosophie (de la vie et du vivre à propos), mais aussi les raisons historiques et politiques qui induisent cette pensée à chercher et trouver des formes prudentielles et préventives, des paroles dissimulatrices pour ne pas éluder la signification de la rencontre avec la censure romaine qui ne laissera pas Montaigne indifférent : du séquestre des Essais par la douane de Rome jusqu’à la demande de la part de l’autorité ecclésiastique de l’autocensure, jusqu’à la non-réponse du Bordelais et même à la sollicitation encore plus pressante à propos des thèmes « censurés » pour finir par la mise à l’Index (posthume) de l’œuvre4.
116En attendant, avec l’arme du scepticisme, Montaigne avait entrepris une œuvre importante, immense, de déconstruction de la métaphysique classique, considérée comme propédeutique d’autres déconstructions : il allait marquer, en montrant au doigt, un nouveau rapport entre philosophie et théologie, religion et morale, morale et politique, politique et religion, une nouvelle conception spatio-temporelle des nations, de l’espace-monde, des âges de l’histoire, de la maladie et de la santé des sociétés – et des consciences. Avec cette même arme, il avait étudié à fond les mécanismes de la pathologie de la politique et le sens à attribuer à l’espace-temps de la politique : entre passé, présent et futur, sa pensée traversait les siècles, les formes de la politique et de l’humain, abattant les frontières entre normalité et monstruosité ; il cherchait des indices du nouveau et dans le nouveau des indices de l’antique, même si le bon modèle antique n’a pas été le dernier pas de la nature. Les yeux de La Boétie le conduiront à l’autre espace-temps du genre humain : la configuration embryonnaire de la politique de l’amitié.
Le dernier chapitre des Essais se clôt sur une perspective fortement humaniste, dans le sens montaignien de l’antihumanisme radical grâce à une dignitas humaine qui doit être totalement reconstituée. Socrate, qui a pratiqué une philosophie « toute en mœurs et en action » (III, 13, 1484 ; 1107C) a donné à l’humanité sa « véritable mesure ». Mais comment est-il possible de savoir vivre bien dans une société corrompue et malade où savoir ne peut plus coïncider avec pouvoir ?
« S’il y a quelque chose du mien,
il n’y a rien du divin »
De cette mesure de l’humain, le silène le plus puissant est l’idée d’« imaginer l’inimaginable ». La critique de la métaphysique classique sur le plan théorique s’unit à l’affirmation éthique du scepticisme : Naturam sequi. L’éthique doit être soumise au scepticisme elle-même. Montaigne veut amener à une solution l’amphibolie mise en évidence parmi les « raisons » de la vérité, qui se corrompt entre les mains humaines, et la centralité du jugement. D’un côté « L’essence mesme de la verité, qui est 117uniforme et constante, quand la fortune nous en donne la possession, nous la corrompons et abastardissons par nostre foiblesse… » (II, 12, 553A), de l’autre « Le jugement tient chez moy un siege magistral » (III, 13, 1074B). Affirmation qui ne restera pas sans conséquences dans l’économie et dans le sens de la conversion du scepticisme des Essais. En effet, aussitôt après, Montaigne ajoutera : « Car encore faut il quelque degré d’intelligence, à pouvoir remarquer qu’on ignore : et faut pousser à une porte, pour sçavoir qu’elle nous est close ». Ce sera une pareille intelligence des choses (res, concepts) qui, une fois poussée (et ouverte) la porte qui est fermée, le conduira – au-delà du scepticisme antique – à penser les concepts de pluralisme et de possibilité. L’« intelligence des choses » devient l’axe épistémologique et heuristique du projet des Essais, le clou fiché dans la roue du temps et de la recherche sans fin.
Si la faiblesse de la raison humaine est le présupposé ontologique du scepticisme montaignien, le dernier livre lui aussi, en particulier l’essai Des coches, répète le thème de fond déjà affronté dans l’Apologie de Raymond Sebond (« Je crains que nostre cognoissance soit foible en tous sens. Nous ne voyons ny gueres loing, ny guere arriere. Elle embrasse peu, et vit peu : courte et en estendue de temps, et en estendue de matiere » : III, 6, 907B). Mais le fait de céder à une telle faiblesse est, surtout, « trahison de [mon] l’entendement » (III, 13, 1074B) qui empêche de pousser la porte pour l’ouvrir, comme Plutarque l’avait enseigné.
Quiconque renonce à l’exercice critique du jugement reste sourd aux paroles de Lucrèce dont Montaigne s’était servi pour stigmatiser la conduite du peuple, des gens communs, de ceux qui ne s’observent pas, ne se jugent pas et laissent dans l’oisiveté la plupart de leurs facultés : l’individu pratique-inerte, le véritable idiot, le mal né, la conscience malheureuse : « Qui ronfle tout éveillé bien que jouissant de la vie et de la vue, mène une vie quasiment morte ».
Sceptiques accomplis, seuls les pyrrhoniens déploient le scepticisme comme authentique puissance intellectuelle et non comme arme épointée. Les pyrrhoniens sont bien conscients que « l’ignorance qui se sçait, qui se juge, et qui se condamne, ce n’est pas une entiere ignorance : Pour l’estre, il faut qu’elle s’ignore soy-mesme ». Ils pratiquent la méthode de la falsifiabilité, comme on lit dans l’Exemplaire de Bordeaux : « Et font estat de trouver bien plus facilement, pourquoy une chose soit fausse, que non pas qu’elle soit vraye ; et ce qui n’est pas, que ce qui est : et ce 118qu’ils ne croyent pas, que ce qu’ils croyent […] Rien ne semble vray qui ne puisse sembler faux » (ibid., 505C). Montaigne sent que de mener « une vie quasiment morte » pourrait risquer de rencontrer, à travers des sentiers opposés à ceux des « gens communs », le scepticisme : l’inertie pratique et la complète transcendance du réel. Mais ce n’est pas le cas des pyrrhoniens (ibid., 505).
Une question plus générale, qui reprend la formulation à peine exposée dans son approche pragmatique, s’était imposée aussitôt au Bordelais sur les traces de Sextus Empiricus : est-il possible de pratiquer le scepticisme, dans son présupposé théorique, c’est-à-dire dans son autodéfinition, à savoir l’aptitude à « opposer les phénomènes et les perceptions intellectives d’une manière quelconque faisant ainsi, par suite de l’égale force [isosthénie] des faits et des raisons en opposition, que nous arrivions, avant tout, à la suspension du jugement [épochè], donc à l’imperturbabilité [ataraxie] » (I, 4, 8) ? Si à travers le « critère » du phénomène, de la phantasia, de la « représentation sensible » comme le précise encore Sextus Empiricus, le scepticisme se limite à ce qu’il sent sans juger de la nature objective de ce qu’il sent, lui est-il possible de vivre en se conformant au scepticisme ? La réponse de Sextus Empiricus est positive dans la mesure où elle s’articule autour des quatre règles aptes à rendre le sceptique adaptable aux us et coutumes de son pays, bon citoyen, sage et actif, en établissant une distance intérieure qui lui permet de ne pas s’engager intellectuellement en pratique : « Quant aux actions de la vie, ils sont en cela de la commune façon. Ils se prestent et accommodent aux inclinations naturelles, à l’impulsion et contrainte des passions, aux constitutions des loix et des coustumes, et à la tradition des arts » (I, 11, 23). Étant donné que « nous ne pouvons vivre sans rien faire du tout », « nous suivons la vie pour ne pas être inertes » (I, 33, 226 ; 34, 237-238).
L’attitude sceptique de Montaigne se reconnaît-il dans le pyrrhonisme de Sextus Empiricus qu’il adopte ou bien fait-il subir à son propre mouvement conceptuel une inversion qui le rend de fait différent du scepticisme de Pyrrhon ? Vexata quaestio, on dira5.
119Certes, Montaigne met en œuvre en de nombreux endroits des Essais la pratique de l’isosthénie mais, avant tout, après avoir reconnu la possibilité (qu’on peut relier au pyrrhonisme) de concevoir la question (Que sais-je ?) à la place de la réponse (Je ne sais rien) des sceptiques de la Nouvelle Académie (II, 12, 527), non seulement il ne déroge pas à ce principe mais il le fait devenir le point de départ du nouveau langage dont les pyrrhoniens eux-mêmes ont besoin. Et il va encore plus loin : tandis que Sextus Empiricus considère les néo académiciens comme de faux sceptiques, Montaigne les introduit dans le dogmatisme, comme il introduit Aristote et Épicure dans le scepticisme : des Pyrrhons à l’envers (ibid., 507). Si, pour le scepticisme antique, la balance pesait les opinions et les considérait comme égales, pour Montaigne la « [ma] balance [est] inegale et injuste » (ibid., 563A).
L’attitude « phénoménologique » de Montaigne le porte à concevoir une théorie des phénomènes et des apparences en relation avec la faiblesse gnoséologique humaine : l’homme perçoit les choses de différentes façons, selon comment il est et selon comment elles apparaissent, en une sorte de double conditionnement ontologique qui n’amène pas cependant au désespoir épistémique et moral (ibid., 560-561A).
Outre l’incapacité de la raison à prouver rationnellement l’existence de Dieu, un autre déchirement, donc, est provoqué par le dilemme qui donne pour acquis l’insuffisance de la via rationis : il n’est pas donné à l’homme de savoir si l’âme est mortelle ou immortelle (ibid., 561A). Si la thèse de l’immortalité de l’âme ne peut être établie (prouvée) par les seules forces humaines (l’intellect se trouve insuffisant et impuissant : ibid., 553A), ce n’est qu’un exemple de ce que l’homme ne trouve que par chance et par hasard la vérité qu’il découvre tout seul ; vérité qui, dans ses mains, est aussitôt corrompue, il n’a pas les moyens de la saisir et de la conserver : « Confessons ingenuement, que Dieu seul nous l’a dict, et la foy : Car leçon n’est-ce pas de nature et de nostre raison » (ibid., 554C). Mais au-delà de la mise en doute de la thèse de l’immortalité de l’âme, l’autre point critique, on le sait, est la crise de la thèse de l’unicité du monde et son non-éternité.
120Échec de Sebond ?
Les silènes des (en) deux livres
Il ne sera donc pas inutile, avant tout, d’essayer de mettre en évidence la nature de certains éléments choisis par le Bordelais pour prouver le caractère bienfaiteur du scepticisme. On verra vite, étant donné la singularité du choix et la modalité de l’opération, que les options, l’une après l’autre, à tour de rôle, plus que fonder le scepticisme, le mettent à l’épreuve et que chaque élément révèle, en l’amplifiant, la tentative et l’intention montaignienne de mettre à l’épreuve le scepticisme par le scepticisme même – échec, selon Montaigne, du scepticisme antique et qui, dans les Essais, produit des effets puissants accompagnés d’un glissement moléculaire du plan théorique au plan éthico-politique.
J’essaie d’en indiquer quelques-unes, à commencer par la défense/démolition de Sebond et de sa Theologia naturalis sive Liber creaturarum concrétisée dans l’Apologie. Mais si nous lisons la seconde partie de la Theologie naturelle dans la traduction de Montaigne, le livre de la Bible, on s’apercevra que Sebond qualifie comme « inimaginables » tous ces concepts que le livre de la nature donnait comme infalsifiables et certes – maintenant, l’homme déchu, seulement la foi dans la parole de Dieu, son écriture dans la Bible, peut servir de supplément à cette certitude. C’est le même lexique utilisé par Montaigne.
Les armes avec lesquelles Montaigne attaque Sebond sont, à bien voir, les mêmes arguments qu’emploie Sebond pour attaquer les « atheistes » : mais si les vérités divines finissent par devenir, même dans la dernière partie de l’œuvre de Sebond, impensables et inimaginables, c’est parce qu’elles sont considérées telles après l’incapacité survenue de lire le livre de la nature, donc de l’impossibilité même d’une théologie naturelle (un résultat qui nie le présupposé ?). Après l’échec de Sebond, Montaigne estime que de tels « impensables » sont dus à la seule volonté de croire : je crois parce que je crois, non parce que ce que je crois est (ou a été ou sera) démontrable : désormais, même le livre de la nature ne peut prouver l’existence de Dieu, étant donné que le mot de Saint Paul (mais aussi des stoïciens, de Platon, 121d’Aristote, de Plutarque) – invisibilia per visibilia autrement dit per visibilia ad invisibilia – n’est plus valable6.
Mais pour montrer la vanité du rationalisme, il aura recours aux mêmes arguments que Sebond (indiqués dans la seconde partie de la Theologia naturalis) en les retournant contre lui : admettre l’impensable et l’inimaginable auxquels la Bible ordonne de croire (le « dit » de Dieu) se retourne contre le présupposé du rationalisme démonstratif du livre de la nature. Charron dans les Trois veritez se montrera encore plus radical à ce sujet7.
L’opus conditionis, en particulier le concept de livre de la nature, pourrait alors apparaître sérieusement compromis par la seconde partie de l’œuvre. Mais, en vérité, pour Sebond, ce n’est qu’apparemment que le livre de la nature perd sa charge épistémologique et morale parce que dans les intentions qu’il explicite la capacité de lire l’opera (les faits) de Dieu (le livre de la nature) doit être reconquise grâce à une profonde réforme morale. Sebond impose même comme devoir suprême à l’homme de se le réapproprier. Si, dans la seconde partie, l’entreprise semble redimensionnée, ou mieux réduite à rien, un tel redimensionnement perd sa propre épaisseur négative s’il est mis en relation avec l’intention parénétique : la nature réclame un homme nouveau, un sage, un homme qui puisse indiquer la voie pour revenir au livre de la nature comme chemin pour connaître Dieu, au livre toujours ouvert qui ensuite se précise comme chemin pour une humanité reconquise : la nature « réclame » un tel homme qui sait lire dans son livre.
Certes, Montaigne ne pouvait approuver un projet où se mêlaient philosophie et théologie, raison et foi, discours humains, c’est-à-dire philosophiques et théologie, comme avait fini par le faire Sebond, si l’on excepte la palinodie finale. Mais il ne pouvait ignorer que l’appel de Sebond au retour au livre de la nature pouvait paradoxalement avoir le sens d’une volonté de décrochage et d’affranchissement de la théologie traditionnelle 122et, en même temps, l’ouverture encore plus paradoxale vers une théologie négative au profit du livre de la nature qui, indépendamment de la révélation, prouve et n’ordonne pas à l’homme de pouvoir arriver à Dieu.
Déontologisation et cratylisme du langage
C’est ce qui arrive aussi pour la conception du langage, l’autre silène sceptique, où tension réaliste et tension idéaliste instaurent une dialectique qui débouche sur une composition inédite, imprévue, digne du Cratyle. L’incipit de De la gloire, en couche A, notamment énonce : « Il y a le nom et la chose : le nom, c’est une voix qui remerque et signifie la chose : le nom, ce n’est pas une partie de la chose, ny de la substance : c’est une piece estrangere joincte à la chose, et hors d’elle » (II, 16, 618A).
La « déontologisation » (« si vous dites, Je ments, et que vous dissiez vray, vous mentez donc » : II, 12, 527B), la séparation entre verba et res, l’opacité du signifiant, l’incertitude et la faillibilité de la dénomination, donc le nominalisme linguistique, l’intention simulatrice et dissimulatrice du cor duplex et de la duplex cogitatio qui rappellent Saint Augustin, ou plutôt Platon, font du langage un instrument incertain et vacillant qui « met à l’écart la vérité » (II, 18, 667A), précise Montaigne dans Du dementir, et se laisse échapper, étant donné sa nature, l’essence de la chose, telle l’eau qu’on serre dans le poing. Et pourtant, dans ce même chapitre, pour c’est dans le langage intersubjectif que réside le lien/véhicule de sauvegarde/santé pour la société entière et l’exorcisation de la « catastrophe ontologique » (II, 18, 666-667A). Le silène de la séparation est dans son essence aussi silène de l’union.
Dans un autre contexte, Montaigne revient sur le problème du langage de la nature qui exprime la valeur intrinsèquement humaine de la chose, dans un cratylisme substantiel. La première observation qui frappe aussitôt le « suffisant lecteur » est la valeur éthique marquée de la philologie « cannibale », une philologie que le scriptor néanmoins fait sienne de façon si évidente qu’on est amené à penser que le sceau est plutôt montaignien et que son sens est en réalité le résultat le plus important des convictions ou le moteur même des réflexions de l’auteur.
123Le message est clair : dans le langage selon nature des sauvages, langage qui exprime la nature de la chose, la philologie de la nature dit « moitié de l’autre » et entend « homme », unité de je-tu, toi-moi, cellule mère du corps naturel/social, du moi commun réalisé par les égales moitiés multipliées en communauté, concept que Montaigne fera agir dans le chapitre De l’amitié en un glissement moléculaire de la dimension individuelle à la dimension sociale. On est ici en présence d’un rapport naturel d’inclusion, comme on le verra dans la rhétorique de la négation des cannibales, macro-signe qui, dans I, 31, accompagnera la communauté sauvage. Le texte, vaguement teinté de platonisme, fait écho, mutatis mutandis, à un endroit du Banquet, et ce ne sera pas le seul, là où Platon rappelle qu’Eros tend à guérir l’ancienne nature humaine, quand les hommes étaient « tout entiers » (192e) et s’efforce « de faire de deux un seul » (191d) et de recomposer l’unité originelle perdue à cause du péché d’orgueil, puni par le dédoublement : la division en deux de l’unité. Processus opposé, selon Montaigne, à celui de la société civile moderne qui, au contraire d’eros, refuse la politique de l’amour, expulse et exclut ses propres « moitiés » les rendant « moitiés besogneuses », expropriées de l’entier et par l’entier, attachées désormais au désir de possession, de rapine, d’anéantissement de l’autre : l’espace de l’autre est occupé par une seule partie qui devient le tout, plénitude innaturelle par expropriation, coupure inédite pour la nature qui ordonne « une moitié exacte » dans l’unité du soi. Processus d’érotisation en l’envers.
Montaigne est fermement convaincu que la voix de la nature ne peut se tromper ; homme dans son « onticité » et son essence est celui qui est moitié de l’autre ; il est homme seulement s’il est moitié de l’autre, s’il a en lui sa réciproque exacte (je-tu). Dans le passage de l’homme à la communauté, la philologie cannibale de la réciprocité réalise l’inclusion, l’homme communautaire-collectif. La voix de la nature des cannibales appelle « moitié besogneuse » celui qui, dans le corps social moderne, a perdu son exacte moitié, soustraite par l’injustice de la modernité, de la civilité, de la « coustume », mais aussi de la mauvaise « nouvelleté » qui réalise et perpétue la pire des « inequalité[s] » comme le précise l’explicit du chapitre « Des cannibales ». La voix de la nature et des cannibales appelle cette division « besogneuse », intolérable « injustice », mais on reconnaît sans hésitation dans cette voix celle de Montaigne.
124La conclusion logique vers laquelle se dirige notre philosophe est que la nature s’étonne que les pauvres, en tant que moitiés expropriées par l’entier – à qui a été refusé le statut de partie nécessaire à l’entier, d’exacte moitié de l’autre dans l’un, son autre moitié – que ce non plus entier, donc ce non-plus-homme, moitié besogneuse, amputée de son autre moitié qui le fait être homme, la nature donc s’étonne qu’ils ne les prennent pas à la gorge et ne mettent pas le feu à leurs maisons, ne se rebellent pas pour reprendre ce qui leur appartient.
N’importe qui sent que, arrivé à ce point, l’argument est devenu plus délicat et « dangereux » car l’allusion à la « rébellion » semble être une invitation à la résistance active, motivée par la plus grande et la plus radicale des injustice[s] : l’inégalité pratiquée par des hommes qui excluent leurs moitiés et les font mourir de faim. Si cette lecture est la bonne, Montaigne se montrerait (il faut ici le conditionnel) sur ce point, tout en se couvrant sous un langage silénique, plus radical que le « révolutionnaire » La Boétie, son exacte moitié (« tout entre nous était à moitié »), l’ami parfait qui, dans la Servitude volontaire, invoquait la résistance passive au tyran et à l’injustice : ne servez plus et le colosse de l’injustice s’écroulera – et il arrêtait son pamphlet notamment par un hymne à l’amitié8.
Dans une sorte de mise en abyme on peut donc en arriver à soutenir que le Nouveau Monde fonctionne comme un silène, de ceux qui plaisaient à Érasme et à Giordano Bruno, avec une valence spatio-temporelle particulière : d’un côté c’est la contre-épreuve de l’efficacité du scepticisme méthodologique qui n’a fermé ni l’espace ni l’histoire, d’un autre côté, la conversion dans la conviction et la certitude de la bonté d’un monde more naturae, dont le (silène du) langage en est la preuve. Le raisonnement de Montaigne ne restera pas arrêté à l’opposition nature/civilisation parce que sa conversion personnelle du scepticisme dessinera d’autres dimensions temporelles possibles dans la civilisation (Venise, 125Lahontan et peut-être la Pologne, par son régime libéral, celèbre par son amour de la liberté et pour son hospitalité aux hommes et aux idées9, modus vivendi de la tolérance) : résultat d’une action réciproque entre deux forces opposées qui, loin de s’exclure, se sont renforcées mutuellement.
Et c’est justement l’intérêt pour Pyrrhon et son école qui devient la clé de voûte de la problématique du « pays infini » et en général le scepticisme le moyen incontournable pour « ouvrir les choses ». On peut dire alors que le Nouveau Monde pour Montaigne vaut surtout comme exemple d’ouverture plus que de découverte. Tout semble se fermer dans un cercle vertueux.
De ce point de vue, l’invitation est claire : il est utile, et même indispensable de continuer à pyrrhoniser au seul sens qu’admet Montaigne : « Quiconque imaginera une perpétuelle confession d’ignorance, un jugement sans pente, et sans inclination, à quelque occasion que ce puisse estre, il conçoit le Pyrrhonisme » (II, 12, 505A) – pas seulement sur le plan spatial. Le thème de la faiblesse de la raison qui investit tous les plans du réel dans ses déclinaisons spatio-temporelles revient dans Des coches qui signale une convergence intéressante entre Machiavel (II, 5) et Montaigne (aussi II, 19) à propos de la tentative a de valoriser l’hypothèse, déjà aristotélicienne et averroïste, d’un effacement total de la mémoire historique à cause de l’action combinée des causes célestes et humaines, évoquée par Machiavel et largement diffusée dans la Renaissance. Le thème n’est tout à fait négligeable en tant que strictement lié à celui de l’éternité du monde. Machiavel l’aborde dans un célèbre texte du Discorsi (II, 5 : Che la variazione delle sètte e delle lingue, insieme con l’accidente de” diluvii o della peste, spegne le memorie delle cose) largement commenté par l’historiographie10.
126L’argument du paragraphe machiavélien (la brièveté de la mémoire humaine comme objection à la thèse de l’éternité du monde) devient l’objet d’une réflexion circonstanciée dans le sixième chapitre du troisième libre des Essais, au moment où Montaigne critique la thèse lucrétienne de la naissance et de la nouveauté du monde, comme le témoignent les marginalia dans son exemplaire du De rerum natura, copieusement annoté et des réflexions consignées à des ajouts manuscrits dans l’Apologie de Raymond Sebond, postérieures à 1588 ; des pages où Montaigne semble être enclin à considérer un monde régi par une temporalité cyclique et beaucoup plus ancien qu’il ne l’était traditionnellement admis, un pays peut-être infini, lui aussi…
L’attitude silénique du scepticisme, en tant qu’attitude critique, a servi pour déconstruire la hiérarchie apparente des êtres, l’échelle de la nature et sa prétention au dogmatisme des certitudes et au raisonnement téléologique, la supériorité illusoire de l’homme devant les animaux qui, comme en témoigne l’observation de la vie animale, possèdent des formes de raison et d’imagination semblables aux humains (observation qui deviendra notamment objet de polémique chez Descartes) – des formes de rationalité politique aptes à donner vie à des formations associatives et symbiotiques semblables et, parfois, meilleures et plus fonctionnelles que chez les humains. Si les bêtes ne manquent pas de langage, autre topos de l’illusoire supériorité humaine, l’homme ne comprend pas le langage animal à cause de sa dégénération, car il y eut un temps où il parlait avec les bêtes, motif cher au néoplatonisme de Francesco Patrizi da Cherso (« le parler n’est pas une prérogative humaine » concède paisiblement la Rhétorique), source probable de ce passage qui donne à Montaigne la possibilité de parler de la signifiance du langage du corps et des grammaires du geste, langage plus vrai et expressif que le langage vocal, étant originel, vox muta naturae.
L’animalité11, enfin, est actrice de sentiments moraux plus élevés que chez l’homme ; si on la compare à l’indignité des êtres humains, elle montre dans un vaste rayonnement toute sa dignitas. L’animal est le vrai silène et le sceau du préjugé humain. Ouvrir les prétentions 127anthropocentriques et le raisonnement vainement téléologique pour trouver le même fondement qu’un hypothétique « avicentrisme »… Et c’est le même anthropocentrisme, vain autant que dangereux, qui fait croire à l’homme qu’il est l’unique spectateur de l’univers, qu’il habite, lui seul, le seul monde de la création, qu’il rend fini ce qui est infini. L’évidence n’est pas vérité, la réalité n’est pas la possibilité.
Mais la possibilité, comme le silène, contient sa propre vérité et la réalité sa possibilité.
Nicolà Panichi
Université d’Urbino, Italie
1 Édition de référence, Essais, Villey-Saulnier, Paris, PUF, 1965 (Quadrige, 2004). Mais je renvoie aussi à l’éd. André Tournon, Imprimerie Nationale, Paris 1998 et id., avec Fausta Garavini, Milan, Bompiani, 2012.
2 Le dernier effort de Philippe Desan a donné, à mon avis, le dernier coup d’escrime à cette interprétation du désengagement. Cf. Philippe Desan, Montaigne. Une biographie politique, Odile Jacob, Paris, 2014.
3 Sur le scepticisme de Plutarque et sa reception chez Montaigne cf. Nicolà Panichi, « Le Scepticisme qui “gaigne” le jugement. Le Plutarque de Montaigne », in Montaigne, Paris, Cerf, 2010, sous la direction de Pierre Magnard et Thierry Gontier, p. 67-80. On peut lire une version anglaise de cet article (« The Scepticism that “conquers the Mind”. Montaigne and Plutarch »), in Renaissance Skepticisms, eds. Gianni Paganini and José R. Maia Neto, Dordrecht, Springer, 2008, p. 183-212.
4 Ce n’est pas un hasard si des Essais émerge un soulignement précis du rapport complexe entre philosophie et théologie, comme témoigne la nouvelle transcription de la première censure. Je renvoie à Nicolà Panichi, Montaigne, Rome, Carocci, 2010.
5 À ce propos, je renvoie aux travaux de Gianni Paganini et en particulier à Skepsis. Le débat moderne sur le scepticisme, Vrin, Paris 2008 et au volume collectif Scepticisms, eds. by G. Paganini and J. Maia Neto, cit. Voir aussi : Frédéric Brahami, Le Scepticisme de Montaigne, Paris, PUF, 1997 ; Id., Le Travail du scepticisme. Montaigne, Bayle, Hume, Paris, PUF, 2001 ; Sylvia Giocanti, Penser l’irrésolution. Montaigne, Pascal, La Mothe Le Vayer. Trois itinéraires sceptiques, Paris, Champion, 2001 ; Plures, L’Écriture du scepticisme, Genève, Droz, 2004, éd. par Marie-Luce Demonet et Alain Legros ; François Roussel, Montaigne. Le magistrat sans juridiction, Paris, Michalon, 2006.
6 Cf. Nicolà Panichi, « Filosofia, teologia e libro della natura : Sebond e Montaigne », in Plures, Teologia e filosofia nel Rinascimento, « Rinascimento », XLVIII, 2009, p. 291-314 ; Ead., « Montaigne traducteur de Sebond », in Le Masque de l’écriture. Philosophie et traduction de la Renaissance aux Lumières, sous la direction de Charles Le Blanc et Luisa Simonutti, Genève, Droz, 2015, p. 109-138. Voir aussi au moins : Philip Hendrick, Montaigne et Sebond. L’art de la traduction, Paris, Champion, 1996 ; Mireille Habert, Montaigne traducteur de la Théologie naturelle, Paris, Garnier, 2010.
7 Cf. le numéro monographique Pierre Charron, « Corpus », 55, 2009, éd. par Philippe Desan.
8 Nicolà Panichi, Plutarchus redivivus ? La Boétie et sa réception en Europe, Paris, Champion, 2008 (tr. de l’italien, Naples, Vivarium, 1999, deuxième éd. Rome, Edizioni di Storia e Letteratura 2008). Je signale aussi les collectifs Amitié et Compagnie. Autour du Discours de la servitude volontaire de la Boétie, Paris, Classiques Garnier, 2012, éd. par Stéphan Geonget et Laurent Gerbier ; Les Figures de la coutume. Autour du Discours de la servitude volontaire, éd. par Laurent Gerbier et Olivier Guerrier, Paris, Classiques Garnier, 2012 ; voir aussi Déborah Knop et Jean Balsamo, De la servitude volontaire. Rhétorique et politique en France sous les derniers Valois, Rouen, PURH, 2014.
9 Cf. Pierre Mesnard, L’Essor de la philosophie politique au xvie siècle, Paris, Vrin, 1977, en part., p. 246.
10 « A quegli filosofi che hanno voluto che il mondo sia stato eterno, credo che si potesse replicare che, se tanta antichità fusse vera, e” sarebbe ragionevole che ci fussi memoria di più che cinquemila anni ; quando e” non si vedesse come queste memorie de” tempi per diverse cagioni si spengano : delle quali, parte vengono dagli uomini, parte dal cielo. Quelle che vengono dagli uomini sono le variazioni delle sètte e delle lingue. Perché, quando e” surge una setta nuova, cioè una religione nuova, il primo studio suo è, per darsi riputazione, estinguere la vecchia ; e, quando gli occorre che gli ordinatori della nuova setta siano di lingua diversa, la spengono facilmente ». Sur ce thème voir surtout Gennaro Sasso, Machiavelli e gli antichi, Milano-Napoli, Ricciardi, 1987, en particulier IV, p. 167-399.
11 Cf. les travaux de Thierry Gontier, De l’homme à l’animal, Paris, Vrin, 1998 ; id., L’Homme et l’animal. La philosophie antique, Paris, PUF, 1999 ; id., La Question de l’animal. Les origines du débat moderne, Paris, Hermann, 2011 et le collectif Animal et animalité dans la philosophie de la Renaissance et de l’âge classique, Louvain, Peteers, 2005.
- CLIL theme: 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN: 978-2-406-06632-3
- EAN: 9782406066323
- ISSN: 2261-897X
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-06632-3.p.0111
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 12-22-2016
- Periodicity: Biannual
- Language: French