Hercule dans les premières histoires universelles en langue vulgaire L’Histoire ancienne jusqu’à César (HAC)
- Publication type: Book chapter
- Book: Trajectoires textuelles de l’Hercule médiéval. Mythographie, historiographie et au-delà
- Pages: 153 to 179
- Collection: Medieval Literary Research, n° 42
- Series: Ovidiana, n° 3
Hercule
dans les premières histoires universelles en langue vulgaire
L’Histoire ancienne jusqu’à César (HAC)
Quand paraissent, au xiiie siècle, les premières histoires universelles en langue française, celles-ci profitent d’une riche tradition historiographique déjà en place, dans laquelle elles peuvent puiser des éléments, en les compilant et les remaniant à leur manière, tout en mettant à contribution d’autres sources. C’est ainsi que ce que l’on regroupe aujourd’hui sous la désignation d’Histoire ancienne jusqu’à César (ci-après HAC) forme un ensemble de compilations, de « rédactions », qui intègrent des éléments remontant à diverses sources1. En vérité, il convient de dire que ce que l’on appelle conventionnellement une « rédaction » de l’HAC pourrait tout aussi bien être considérée comme une œuvre à part entière, tant les différences concernant les contenus, mais aussi leur assemblage, sont importantes. L’étude des parties portant sur Hercule permet de vérifier ce constat. Les portraits et épisodes herculéens qu’offrent ces textes sont assez variés et de nature visiblement composite. Nous espérons ici apporter une lumière plus précise sur le sujet. Nous commencerons 154par présenter les épisodes impliquant Hercule dans ce que l’on désigne habituellement sous le nom de « première rédaction » de l’HAC, avant d’émettre quelques réflexions à propos des modèles textuels, des sources, ainsi que du portrait consacré au héros dans ce cadre.
Les épisodes herculéens
dans la « première rédaction » de l’HAC(HAC1)
On désigne par « première rédaction » de l’HAC (HAC1) une composition rédigée pour Roger IV, châtelain de Lille, vers 12102. L’HAC1 survit, d’après les données rassemblées par Marijke de Visser-van Terwisga dans son édition partielle, dans près de soixante-dix manuscrits3. Entre ces derniers, le témoin le mieux connu est le manuscrit Paris, BnF, fr. 20125 (siglé P, du troisième quart du xiiie siècle), qui renferme ce qui est considéré comme l’état le plus ancien du texte4. Ce dernier, incomplet de la fin, couvre l’histoire de la Création jusqu’à l’époque de Jules César. La composition suit une organisation qui s’appuie, plutôt que sur celle des chroniques traditionnelles mettant en parallèle ou faisant alterner histoire biblique et histoire païenne, sur celle d’une autre œuvre historiographique qui a exercé une influence considérable au Moyen Âge, les Historiae adversum paganos d’Orose, distinguant une succession linéaire de royaumes, de l’Assyrie jusqu’à Rome5. L’HAC adopte cette organisation thématique, tout en l’étendant et en consacrant une part bien plus large aux segments d’histoire ancienne païenne, pour lesquels des sources supplémentaires sont mises à contribution. C’est 155ainsi que la compilation vernaculaire offre, entre autres, un traitement particulier de la matière de Thèbes, s’inspirant du Roman de Thèbes en langue vernaculaire, et de la matière de Troie, d’après le De excidio Troiae de Darès6.
On a aujourd’hui tendance à recourir à un modèle de segmentation de l’HAC1 en différentes sections thématiques, proposée premièrement par Paul Meyer et affinée par la suite par d’autres chercheurs, en particulier par l’historienne de l’art Doris Oltrogge, sur la base d’une étude iconographique des manuscrits7. Nous reproduisons ci-dessous la segmentation d’après Oltrogge (reprise par Marc-René Jung), en indiquant les endroits où Hercule intervient, soit activement, soit sous la forme de simples mentions, et sur lesquels nous reviendrons plus loin8.
Sections |
Présence d ’ Hercule |
I. Genèse II. Orient I III. Thèbes IV. Grecs et Amazones V. Troie VI. Énée VII. Rome I VIII. Orient II IX. Alexandre X. Rome II XI. Jules César (incomplet) |
Mention anecdotique |
Intervention directe |
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Intervention directe |
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Quelques mentions anecdotiques |
Tels sont également les contenus du manuscrit parisien P, qui est devenu en quelque sorte le « manuscrit de base par excellence » sur lequel se sont appuyées les différentes éditions qui ont été publiées à ce jour, comptant des éditions partielles et une édition numérique intégrale du texte9.
156Le manuscrit parisien est en effet le seul témoin à comporter, outre toutes les sections dressées supra, un prologue dans lequel est nommé le chastelain de l’Isle Rogier en tant que seigneur et protecteur de l’auteur de la composition ainsi qu’une série de passages moralisateurs en vers. Ce représentant ancien nous servira également de base pour faire un relevé des principaux éléments herculéens traités dans l’HAC1.
Hercule est évoqué, comme il ressort déjà du tableau supra, dans plusieurs sections de l’HAC1. Entre les différents signes de la présence du héros, il existe des mentions brèves, anecdotiques, n’occupant qu’une ou deux phrases à l’intérieur de segments consacrés à d’autres thématiques, à côté d’épisodes qui sont narrés plus en détail et qui peuvent dans certains cas faire l’objet de chapitres à part. Suivant les histoires antérieures – et l’Historia scholastica en particulier – qui mentionnent un premier Hercule dans le passé biblique, le héros est évoqué dans la section sur la Genèse en tant que fondateur d’un lignage avec une certaine Ethea, fille d’Afferam (un descendant d’Abraham qui aurait donné son nom à l’Afrique et qui aurait conquis la Libye à l’aide d’Hercule10). De même, bien plus loin dans le texte, dans la section IX sur Alexandre le Grand, suivant le témoignage d’Orose, on rencontre une série de souvenirs du passage d’Hercule et Liber Pater en Orient, dont les « bornes d’Hercule » que l’empereur de Macédoine a dépassées11. Les segments principaux à 157propos du héros, dans lesquels ce dernier intervient en personne et qui constituent ainsi en quelque sorte le noyau de sa « vie », se concentrent cependant sur les sections IV et V de l’HAC1, dans des chapitres parlant de l’histoire ancienne autour des Grecs et des Troyens. Suivant la tradition historiographique en place, donc, la prise de Troie reste un point d’ancrage afin de situer le héros sur le canevas de l’histoire. Ce n’est sans doute pas une coïncidence si plusieurs éléments thématiques retenus dans l’HAC1 en rapport avec Hercule (tels Antée, l’expédition des Argonautes, la première destruction de Troie, la comparaison avec Samson, que nous découvrirons dans la suite) étaient déjà en place dans les chroniques latines.
Regardons maintenant de plus près le contexte des sections IV (Grecs et Amazones) et V (Troie) et les éléments herculéens relatés dans ce cadre. Nous avons retenu ce qui nous paraissait être des unités thématiques, renvoyant soit à un épisode soit à un sujet spécifique en rapport avec le héros.
(Section IV : Grecs et Amazones) 12
Contextualisation : les origines des Amazones
Les Amazones sont à l’origine les femmes du peuple des Scythes, restées seules dans leur pays au moment où tous les hommes sont partis pour combattre le roi d’Égypte, Vezones. Quand ces femmes entendent que leurs maris ont péri après avoir soumis l’Égypte et après avoir continué à conquérir d’autres terres, elles instaurent leur propre gouvernement exclusivement féminin, et commencent à leur tour à lancer des campagnes guerrières, afin de venger la mort de leurs maris. À l’époque où la reine des Amazones Synope mène des conquêtes en Asie et en Europe et que deux de ses sœurs, Anthiope et Orchia, restent au pays d’Amazone, la renommée de ces femmes redoutables parvient jusqu’en Grèce. C’est également l’époque où Hercule est en la flor de sa jovente13.
158Portrait d ’ Hercule et comparaison avec Samson 14
Hercule est introduit comme fiz de la roïne Almene qui fu fille le roi Laudaci, qui vint de Crete. On apprend qu’il était d’une force et d’un courage inégalés : plus fors hom ne plus hardis ne fu guaires puis le doloive que fu cil Herculés. On le compare pour cette raison à Samson, à qui il ressemblait en termes de proece et de force et parce que l’un comme l’autre avait accompli mainte merveille en sa vie. L’auteur justifie pourquoi il ne parlera plus de Samson dans le contexte donné, parce que ce dernier était de la lignée des Hébreux, dont il propose de parler plus tard, en soulignant que les deux héros ont toutefois vécu vers la même époque : E bien sachés neportant qu’entre Sanson et Herculés n’ot mie grans tens, quar andui furent ou tan[s] que Troie fu premerement destruite. Mes a Troie ne fu mie Sansos, quar ausi ne furent cil de sa lignee.
L ’ expédition d ’ Hercule et de Thésée contre les Amazones 15
Les Grecs, ayant entendu parler de ces damoiseles[= les Amazones], prennent conseil et décident d’envoyer Hercule contre elles. Le héros part avec neuf nefs en compagnie de Thésée. Arrivés sur les terres d’Amazone, ils attendent la nuit pour surprendre leurs adversaires. La rencontre belliqueuse qui suit est résumée une première fois en peu de mots : les Amazones, prises au dépourvu, ne peuvent s’organiser et les Grecs arrivent, quoiqu’avec peine, à prendre le dessus sur elles, grâce à la grande force et prouece d’Hercule. Nous apprenons qu’Hercule et Thésée ont emmené captives Menalippe et Hippolite, les deux sœurs de la reine (sans que l’on puisse dire avec certitude de quelle reine il s’agit, étant donné que plusieurs sont évoquées dans ce contexte16). Suit une description plus détaillée du combat entre li dui chevalier vaillant et les deux Amazones : Hercule affronte Menalippe, et Thésée Hippolite. Le passage ne manque pas de souligner l’habileté guerrière des deux femmes et la honte de leurs adversaires quand ils se trouvent jetés par terre lors d’une première confrontation. Quand Hercule et Thésée arrivent finalement à retenir les deux sœurs, les autres Amazones abandonnent le champ de bataille. Lorsque la reine de Femenie apprend que les deux guerrières ont 159été prises, elle envoie une pucelle portant un rameau d’olivier en signe de paix au camp des Grecs afin de négocier avec eux. La reine est prête à payer n’importe quelle rançon pour recouvrer ses sœurs. Hercule lui répond qu’il ne demande que les armes de la reine en la remenbrance de sa victoire ainsi que sa promesse qu’elle ne tentera jamais d’envahir la Grèce. La messagère transmet la réponse d’Hercule à la reine, qui en est contente et qui s’apprête tout de suite à aller vers les Grecs et conclure la négociation. Lors de leur rencontre, Hercule lui rend Menalippe, alors que Thésée prend Hippolite pour femme et l’emmène avec lui dans son royaume. Hercule rentre, à son tour, avec les armes de la reine (son identité n’est toujours pas claire). Toute la Grèce se réjouit de sa victoire.
Précisions sur la descendance des Amazones et sur les « maux du siècle 17 »
On apprend qu’entre-temps est morte Orchia, que sa fille Pantesilee lui succède, qui détruira maint pays, et que Sinope revient de ses expéditions en Asie. Suivent deux segments moralisateurs sur les « maux du siècle » pendant lequel régnaient les Amazones impitoyables, et que les peuples des différents pays s’affrontaient et s’entretuaient sans cesse.
La lutte contre Antée 18
Après cette parenthèse, le texte revient à l’histoire d’Hercule, relatant la rencontre entre ce dernier et Antée, située peu après qu’Hercule fut revenu de sa conquête d’Amazonie. Antée est décrit comme un gaiant fort et grant a merveille, habitant une des derraines parties de Gresse. Le texte nous apprend en outre la nature particulière d’Antée, selon les dires de plusieurs : quand ce dernier se sent fatigué pendant un combat, il se laisse tomber au sol, et, dès qu’il sent la froideur de la terre, ses forces lui reviennent doublées – caractéristique qui rend Antée très orgueilleux. Ayant entendu parler du géant, Hercule l’affronte, armé de sa massue. Les deux luttent pendant un certain temps, mais chaque fois qu’Hercule l’abat, Antée se relève, revigoré. Hercule s’étonne que son adversaire ne se fatigue pas, mais, finalement, il le soulève de la terre, en le tenant en l’air entre ses bras, où il l’étrangle et le tue. Hercule est loué pour cet exploit, de grans prouece et grans force.
Autres exploits d ’ Hercule et de Thésée 19
On apprend qu’Hercule a accompli bien d’autres proeces (quar il ne doutoit rien ne lion ne serpent ne nulle autre beste, tant fust crueuse ne orrible). 160L’auteur enchaîne avec des exploits de Thésée, à qui il attribue la victoire sur Cacus, tout en soulignant que cet exploit est parfois attribué à Hercule : Et si ocist un jaiant ausi, Quacus ot a non. Mes teus i a qui dient que Herculés l’ocist, qui bien le peut faire.
(Section V : Troie)
Contextualisation : généalogie des Troyens et des Grecs, premiers conflits 20
À l’époque d’Hercule et de Thésée, le roi Laomédon règne à Troie, alors que Peleüs est roi sur la cité de Pelopenense. L’animosité entre les Troyens et les Grecs est alors déjà enracinée dans les lignées des deux peuples – résultat d’un conflit qui s’était produit à l’époque du grand-père de Laomédon, Tros, fondateur de Troie. Ce dernier avait deux fils, Ylus et Ganimedon, dont le second fut tué par Tantalos, roi de Mycènes et fondateur de la lignée dont descendent les rois Ménélas et Agamemnon (qui partiront en guerre contre Troie à la suite de l’enlèvement d’Hélène21). Le roi Peleüs craint que son neveu Jason, vaillant et aimé du peuple, ne lui usurpe son trône. Pour cette raison, il imagine une stratégie pour se débarrasser de Jason, en l’envoyant en quête de la toison d’or : Si li dist qu’en l’isle de Colcos avoit un mouton qui avoit le visage [sic] d’or, et que bien seroit raisons et droiture a sa vertu et a sa prouece qu’il i alast et si l’en aportast22.
Hercule parmi les Argonautes et la première destruction de Troie 23
Hercule rejoint Jason et les Argonautes quand ils partent à la conquête de la toison d’or. Au cours de leur voyage, ils s’arrêtent près de Troie, mais sont immédiatement congédiés par le roi Laomédon, craignant les conséquences de laisser les Grecs arriver librement sur ses terres. Indignés de ce geste, les Argonautes reprennent leur voyage ; Jason conquiert la toison d’or, et ils rentrent en Grèce24. N’ayant pas oublié 161le comportement du roi de Troie, Hercule rallie les Grecs – Castor et Pollux à Sparte, Télamon à Salamine, Peleüs à Phitiam et Nestor (sans spécification) – pour « venger la honte » que Laomédon leur a faite. Hercule fait apprêter douze navires et les Grecs partent contre les Troyens. Le combat qui s’ensuit est résumé en un seul paragraphe : Laomédon quitte sa ville pour combattre contre les Grecs alors qu’Hercule et ses compagnons attaquent la ville. Laomédon retourne alors en arrière et est tué par Hercule. Les Grecs assiègent Troie et Hercule donne Hésione, la fille de Laomédon, à Télamon, parce que celui-ci est entré dans la ville en premier.
La mort d ’ Hercule 25
Hercule ne vit plus longtemps après cette victoire. Il endure une greveuse maladie qui le pousse au suicide, car elle est si tres greveuse qu’il por la grant fierté entra en un grant fue, si s’arst toz et ensi fina sa vie.
La suite du texte, et de la section V, parle de Priam qui fait réédifier Troie, de l’enlèvement d’Hélène et de la seconde guerre et destruction de la cité.
Réflexions sur la « vie compilée » d’Hercule
entre tradition et innovation
Le portrait d’Hercule dans l’HAC1 est constitué d’une série de composantes remontant à diverses sources, assemblées d’une manière qui repose jusqu’à un certain point sur la tradition historiographique précédente, tout en innovant sur cette base. L’innovation réside, au-delà de la traduction du latin en langue vernaculaire, dans la modification d’éléments déjà en place, par l’insertion de nouveaux matériaux ou par l’ajout de nuances interprétatives. C’est donc en ciblant les points de croisement entre tradition et innovation que l’on doit chercher à étudier la matière en jeu et son évolution. Or les pistes qui s’offrent au chercheur pour aborder 162cette matière sont multiples. Dans la mesure oùl’HAC1 s’insère dans une tradition spécifique, il est possible de chercher d’autres textes qui présentent des parallèles sur le plan des composantes et de leur constellation et qui ont pu servir de modèle à l’auteur de la composition – ou pour lesquels, dans le sens inverse, l’HAC1 a pu servir d’antécédent. En supposant que les matériaux (herculéens) présents dans l’HAC1 ne remontent pas tous à la tradition historiographique précédente, on peut aussi se pencher sur des composantes thématiques individuelles du portrait du héros, en cherchant à éclairer leurs sources (éventuellement indirectes) possibles et leurs trajectoires propres. Il est possible enfin de considérer le portrait d’Hercule dans son intégralité avec ses déclinaisons spécifiques dans une chronique donnée et de chercher à déceler l’« image » qu’elle confère au héros.
Compiler des portraits ressemblants :
une chronique qui anticipe l’HAC ?
Les chercheurs n’ont pas manqué d’identifier des sources pour les différents segments herculéens rappelés supra. L’épisode de l’expédition d’Hercule contre les Amazones, de même que la « préhistoire » parlant des conflits entre les Scythes et le roi d’Égypte, s’inspire dans son ensemble d’Orose, alors que l’intervention du héros à Troie puise dans le De excidio Troiae de Darès26. D’autres éléments, qui viennent s’insérer à l’intérieur de ces grands blocs narratifs, proviennent de la tradition des chroniques dans la lignée d’Eusèbe-Jérôme, dont la comparaison d’Hercule avec Samson ou l’anecdote sur la mort du héros qui se jette dans un feu27. Pour d’autres, les sources restent, suivant Marijke de Visser-van Terwisga, incertaines. Pour n’en évoquer qu’un exemple ici, la lutte d’Hercule contre Antée est, comme l’éditrice l’observe, certes évoquée par Eusèbe-Jérôme, mais l’ancienne chronique latine ne fournit pas toutes les informations présentes dans l’histoire française28. La chronique se tait notamment sur la nature particulière de ce personnage, qui se jette à terre quand il est fatigué afin de s’en relever revigoré. Or on peut se demander dans quelle mesure l’auteur de l’HAC1 a procédé à la compilation de sources disparates suivant sa propre intuition et jusqu’à quel point il s’est inspiré, en revanche, d’une histoire précédente qui avait déjà compilé des matériaux semblables.
163Ajoutons que l’HAC1 n’est pas la première compilation historiographique à combiner des éléments de la tradition des chroniques suivant Eusèbe-Jérôme avec des composantes provenant de l’histoire d’Orose et de celle de Darès. Ce constat même suggère que l’HAC1, outre le fait d’utiliser comme sources les différents auteurs que nous venons de nommer, aurait pris comme modèle une œuvre historiographique préexistante qui aurait procédé à un assemblage de matériaux comparable. S’il ne nous a pas été possible d’identifier le modèle précis de l’HAC1, l’existence même de compilations précédentes appartenant à la tradition historiographique dont l’état de compilation ressemble à celui de l’HAC1 invite à ne pas abandonner les recherches en vue de l’identification du modèle précis. Un texte qui se présente comme « prédécesseur » de l’HAC1 dans ce sens est, par exemple, la chronique universelle latine de Fréculfe de Lisieux (du ixe siècle), qui semble avoir connu une diffusion non négligeable, compte tenu des quelque quarante manuscrits qui en survivent29. Concernant Hercule, les parallèles entre le texte de Fréculfe et l’HAC1 s’observent en premier lieu dans le chapitre de la chronique latine qui parle, entre autres, des Argonautes, des Scythes et des Amazones30. Ce chapitre commence par des anecdotes reprises à Eusèbe-Jérôme, indiquant qu’on est à l’époque où florissaient les trois maîtres de musique Orphée, Musée et Linus, ce dernier étant le maître d’Hercule (Linus etiam magister Herculis famosus erat31). C’est également, continue-t-il, le temps d’Œdipe et le temps des Argonautes in quibus fuerunt Hercules, Asclepius, Castor et Pollux32. Tous les éléments évoqués jusqu’ici sont déjà présents chez Eusèbe-Jérôme, qui fournit en quelque sorte, en nommant Œdipe d’un côté, et les Argonautes de l’autre, les coordonnées thématiques pour les 164sections III (Thèbes) et V (Troie) de l’HAC1. Mais contrairement à Eusèbe-Jérôme, qui se tait à cet endroit sur l’histoire des Amazones, Fréculfe ajoute, dans la suite de son chapitre – eodem quoque tempore – des contenus qui correspondent grossièrement à ceux de la section IV de l’HAC1, à propos du conflit entre les Scythes et le roi d’Égypte, de l’origine du peuple des femmes guerrières ainsi que de l’expédition des Grecs contre elles33.
Vers la fin du chapitre de Fréculfe, on retrouve également les éléments relatifs à Hercule, Thésée et les Amazones, qui sont repris à Orose et qui seront élaborés dans l’HAC1. En d’autres termes, déjà chez Fréculfe, la tradition des chroniques croise celle de l’histoire d’Orose, dont il importe l’essentiel des éléments sur Hercule, mais en les enrichissant, comme c’est le cas dans HAC1. Citons les phrases d’introduction et de conclusion de l’épisode dans les deux textes. Les correspondances de contenu sont relevées en gras dans les deux textes mis en regard34.
Fréculfe (citant Orose) |
HAC1 |
Li renons d’eles vint en Gresse, qui adonc estoit bien puplee et de riches cités et de nobles chivaleries. Segnor, adonques estoit Herculés en la flor de sa jovente. [suit ici le portrait d’Hercule][…] |
|
Hac fama excitas gentes tanta admiratio et formido inuaserat , ut Hercules quoque cum iussus fuisset a domino suo exhibere arma reginae, quasi ad ineuitabile periculum destinatus uniuersam Greciae lectam ac nobilem iuuentutem contraxerit, nouem longas naues praeparauit . [ … ] |
Cil Herculés, dunt je vos fais mention et memoire, oï la novele de ces damoiseles, et cil de Gresse ausi, qui mout les douterent, por ce qu’eles avoient mainte riche terre confundue et maumise. Adonc parlerent ensamble li baron de Gresse et si raisnerent tant a Herculés qu’il dist qu’il iroit en Amazone combatre as Amazonienes. Lors fist Herculés faire .ix. longes nés et grandes. […] |
Sed Theseus Hyppoliten matrimonio asciuit ; Hercules Melanippem sorori reddidi, et arma reginae pretio redemptionis accepit . |
Et Theseüs prist a feme Hippolite, si l’en mena o lui en son regne. E Herculés ot les armes a la roïne, si les en porta ou lui en Gresse. |
Comme on le voit dès les premières phrases mises en comparaison, le texte de l’HAC1 n’est pas une simple traduction du segment correspondant de la chronique latine. Le texte français ajoute des précisions censées contextualiser et « ajuster » le contenu à la culture médiévale. On apprend ainsi que la Grèce, patrie d’Hercule, abonde en riches cités et nobles chivaleries et on voit se rassembler li baron de Gresse (remplaçant le domino suo du texte latin, censé probablement renvoyer à Eurysthée) afin de convaincre le héros de partir. Notons aussi que Fréculfe, qui suit fidèlement le texte d’Orose dans ce passage, ne donne pas de véritable « portrait » d’Hercule, alors que la composition vernaculaire étoffe le passage adapté en y ajoutant des informations supplémentaires relatives au personnage35. S’il est vraisemblable que l’auteur de l’HAC1 ne s’appuie pas ici directement – du moins pas exclusivement – sur Fréculfe, on peut néanmoins supposer qu’il s’est inspiré de ce texte, ou d’une chronique apparentée, pour insérer l’épisode dans sa compilation.
Ce dernier constat ne vaut pas seulement pour le récit à propos des Amazones. Le chapitre suivant de la chronique de Fréculfe36 comporte un ensemble d’autres éléments en rapport avec Hercule, présentés sous une forme bien plus compacte que les mentions éparses que l’on a retrouvées chez Eusèbe-Jérôme et dans les autres chroniques latines mentionnées supra. Fréculfe mentionne, entre autres, l’institution des jeux olympiques, puis la lutte contre Antée et les circonstances de la mort d’Hercule, avant de parler de la guerre de Troie : Troianum decennale oritur bellum, ac demum euersa capitur Troja. Quod ita contigisse <in> historia Daretis atque aliorum legimus37.Ce qui est advenu, nous dit Fréculfe, on peut le lire dans l’histoire de Darès et chez d’autres. Dans la suite de son texte, il insère un résumé des événements annoncés, à commencer par le récit des voyages des Argonautes et du conflit avec Laomédon. Ce résumé ne repose cependant pas directement sur Darès, mais sur l’un des « autres » qui l’avait déjà adapté : c’est la version raccourcie de Darès que l’on retrouve déjà insérée dans certains manuscrits de la chronique du Pseudo-Frédégaire (viiie siècle), que Fréculfe a reprise et 166abrégée davantage38. Le lecteur sera peut-être déçu de constater que cette version raccourcie du Deexcidio Troiae se passe de toute mention d’Hercule. Mais en admettant que Fréculfe n’était pas la source unique du compilateur de l’histoire vernaculaire, on peut considérer la présence même de cet abrégé de Darès chez Fréculfe (et dans des chroniques précédentes) sous une autre lumière : les données suggèrent d’autant plus fortement que l’auteur de l’HAC1 n’a pas inséré au hasard le récit de la première destruction de Troie – ni celui des Amazones, qui le précède – mais qu’il l’a fait, selon toute vraisemblance, parce qu’il avait connaissance des compilations historiographiques déjà existantes visant à accorder une place plus large à l’histoire ancienne païenne que ne le faisaient les chroniques traditionnelles39.
Les observations précédentes nous donnent l’idée de plusieurs « strates » de matériaux qui se superposent progressivement au cours de la tradition des chroniques, ainsi qu’une série grandissante de modèles qui fournissent des constellations grossières (entre autres pour la vie d’Hercule) avec certaines composantes récurrentes. La réalisation concrète de ces composantes peut cependant mobiliser des sources variées, qui peuvent, en outre, se combiner de différentes manières et impliquer des aménagements divers. Ceci est une tendance que l’on observera tout au long de la tradition des histoires, en langue latine comme en langue vernaculaire. Évidemment, il est possible que l’auteur de l’HAC1 ait pris comme modèle un texte qui comportait déjà tous les épisodes dans l’ordre et tels que nous les avons esquissés supra. Dans la mesure où nos recherches n’ont pas abouti à la découverte d’un tel texte, il convient de réfléchir au-delà des « modèles », en élargissant l’enquête aux sources externes à la tradition historiographique qui ont pu fournir des matériaux.
167La quête des sources :
des emprunts à un manuel de savoir mythologique ?
Suivant les notes dans l’édition par M. de Visser-van Terwisga de la section IV des Amazones, certaines bribes d’informations constitutives du portrait d’Hercule restent énigmatiques et de provenance indéterminée. Ainsi, dans une phrase comme celle-ci : Cil Herculés fu fiz de la roïne Almene qui fu fille le roi Laudaci, qui vint de Crete40, l’élément problématique est l’identité de l’ancêtre d’Hercule, Laudaci41, pour lequel on ne trouve pas d’explication dans les ouvrages de référence habituels de la mythologie grecque. Il n’existe aucun personnage appelé ainsi, et le père d’Alcmène (et grand-père maternel d’Hercule) est traditionnellement identifié comme étant Électryon, roi de Tirynthe et de Mycènes42. Or il existe un certain nombre de « généalogies de dieux païens », transmises souvent dans le cadre de compilations de savoir encyclopédique et mythologique, qui comportent des parallèles intéressants43. Juppiter 168genuit de Alcmena, Laudaci filia et uxore Amphitryonis, Herculem, peut-on lire, par exemple, dans une Genealogia falsorum deorum inédite, transmise dans un recueil collectif du xve siècle44. Ce témoignage nous fournit un indice utile pour résoudre notre énigme : l’information présente dans l’HAC1 a vraisemblablement été adaptée d’après un texte latin où le nom concerné figurait, comme dans la généalogie citée, au génitif. En d’autres mots, Laudaci renverrait à la forme nominative Laudacus. Or, s’il n’y a pas de personnage de ce nom dans la mythologie antique, il existe bien un Labdacus45 ; et ce dernier est identifié dans d’autres traités médiévaux sur les dieux et leurs généalogies comme étant le père d’Alcmène. Il apparaît par exemple dans l’œuvre mythographique de Konrad de Mure, qui maintient, dans une entrée de son Fabularius dédiée à Labdacus, que : Labdacus rex frater Hecube fuit, a quo Laius et Alchmena mater trahit Herculis ortum46. Laudaci est donc, selon toute vraisemblance, le résultat soit d’une mauvaise lecture de Labdaci soit d’une adaptation en français de ce nom. En même temps, l’information véhiculée par les généalogies et l’HAC1 se prête à quelques observations intéressantes, car si Labdacus est généralement bien considéré comme le père de Laïus, il n’est aucunement rattaché à Alcmène et Hercule. Par ailleurs, Labdacus, comme ses descendants, est rattaché au cycle thébain ; aucun d’entre eux n’est le roi de Crète. Chacun de ces éléments d’information demanderait une enquête à part – à laquelle nous ne nous livrerons pas ici. On retiendra pour l’instant simplement la présence de la même information dans les généalogies et dans l’HAC1.
169Il est intéressant de noter que d’autres textes mythographiques semblables ou apparentés aux traités évoqués supra, comprenant eux aussi des généalogies des dieux antiques, témoignent des anecdotes retrouvées dans l’HAC1 à propos de Cacus et d’Antée, dont la provenance était également restée incertaine d’après de Visser-van Terwisga47. Considérons l’anecdote à propos de Cacus d’après l’HAC1 : Et si ocist[= Thésée]un jaiant ausi, Quacus ot a non. Mes teus i a qui dient que Herculés l’ocist, qui bien le peut faire48. L’incertitude à propos de l’attribution de l’exploit à l’un ou l’autre des deux héros se rencontre, comme nous le verrons dans la troisième partie de ce travail, dans des commentaires en rapport avec les Métamorphoses49. Elle est cependant présente aussi dans plusieurs manuels de mythologie qui comportent des généalogies divines et dont plusieurs transmettent des listes de probitates Thesei et de probitates Herculi. Dans au moins deux témoins qui rapportent une liste d’exploits de Thésée, on retrouve, parmi les éléments de cette énumération, Mors Caci, que attribuitur Herculi50. L’un des témoins en question, le manuscrit Pal. lat. 1741 de la Bibliothèque vaticane du xve siècle, transmet, entre autres textes mythographiques, également le traité de Konrad von Mure, dans lequel figure la mention du rattachement d’Alcmène à Labdacus51. Le témoin en question est évidemment bien trop tardif pour être la source de l’HAC1. Cependant, les textes mythographiques qu’il recueille datent en grande partie des xiie et xiiie siècles, ce qui suggère que des manuels rassemblant des données semblables ont pu circuler à l’époque de la rédaction de l’HAC1.
Le récit de la lutte d’Hercule contre Antée dans l’HAC1 apparaît à son tour dans des textes mythographiques apparentés aux exemples évoqués supra. Il convient de noter à ce sujet, à titre de précaution, 170que l’épisode en question est relaté par un grand nombre de textes depuis l’Antiquité, dont plusieurs sont déjà mentionnés par de Visser-van Terwsiga dans son édition : dans une note à propos du passage concerné, l’éditrice évoque les noms de Diodore, Eusèbe-Jérôme, Stace, Fulgence et Ovide (et on pourrait en ajouter d’autres), avant de conclure : « mais la source principale est probablement la légende orale52 ». Cette hypothèse n’est peut-être pas fausse si l’on suppose que les manuels de mythologie dont nous avons déjà évoqué plusieurs exemples transmettent un savoir de base que les clercs de l’époque connaissaient en partie par cœur. Cela dit, il est significatif que l’on trouve, dans d’autres textes apparentés ou comparables aux exemples évoqués supra, des parallèles avec l’HAC1 plus convaincants que dans les œuvres des auctoritates nommées par l’éditrice.
Le traité De natura deorum du manuscrit Digby 221 de la Bodleian Library à Oxford (connu aussi sous le nom de « Mythographe de Digby », dont le texte est daté habituellement du xiie siècle), commençant à son tour par une généalogie divine, transmet un résumé sur la lutte entre Hercule et Antée dont certains détails résonnent dans l’HAC153. Mettons en parallèle deux extraits du chapitre du mythographe et du passage dans l’histoire française54.
De natura deorum |
HAC1 |
Ille [ = Antaeus ] autem quotiens defessus erat, totiens se humi sternebat, haustoque spiritu de gremio terrae fortior et integer resurgebat. Vires namque sic prostratus resumebat. Quod ut Hercules tandem sensit, illum in aerem sublevavit , dicens « huc, Antaee, cades » diuque in aere compressus tandem interiit. |
Cil jaians estoit de tel nature que s’il avenist choze qu’il se combatist et il fust tant soupris de lasté et il chaïst a terre, tantost com il sentist la terre et la froidure de li, sa force et s’alaine li fust revenue et doblee, ce dient li pluisor. […] Mout s’en esmerveilloit Herculés, ne ne savoit coment ce pooit estre, et tant qu’en la fin se porpensa. Et lors le leva mout viguorousement de terre a .ii. bras, et tant l’estrainst et tint a force en air qu’il l’estranla et ocist entre ses bras. |
Les textes partagent notamment deux précisions qui manquent, d’après nos enquêtes, dans les autres sources évoquées supra d’après l’édition de Visser-van Terwisga. L’un comme l’autre souligne que c’est quand Antée a épuisé ses forces (quotiens defessus erat ; s’il fust tant soupris de lasté) qu’il se laisse tomber par terre afin de renouveler son énergie. De même, ils soulignent comment Hercule, après avoir lutté contre lui pendant un certain temps, se rend finalement compte de la nature particulière de son adversaire (tandem sensit ; en la fin se porpensa), avant de le soulever en l’air et de l’étrangler entre ses bras. Si le texte français comporte certains détails absents du texte latin (qu’Antée est un jaiant, qu’il sent la froideur de la terre, etc.) et vice versa55, la manière dont l’épisode est résumé dans les deux textes est visiblement proche.
C’est peut-être l’incise ce dient li pluisor dans l’HAC1 qui a motivé la remarque de l’éditrice de Visser-van Terwisga, attribuant la diffusion de ces informations à la tradition orale. Dans le cas en question, li pluisor s’appliquerait cependant aussi au savoir mythographique transmis par voie textuelle, car le passage cité du De natura deorum se retrouve ailleurs, entre autres dans le Commentaire Vulgate des Métamorphoses (xiiie siècle), ainsi que dans une autre compilation mythographique comportant des généalogies divines, celle du manuscrit Dublin, Trinity College, TCD 632 (xve siècle56). Citons les trois textes en vis-à-vis, afin de mettre en évidence les parallèles de contenu57 :
De natura deorum ( xii e s.) |
Commentaire Vulgate ( xiii e s.) |
Dublin, Trinity College, TCD 632 (xv e s.) |
Antaeus fuit filius Terrae, cum quo Hercules luctatus est. |
Antheus erat [var. ajout : quidam gigas58] filius terre cum quo Hercules luctatus est. |
Hercules cum Antheo gigante qui filius terre dicebatur luctatus est, |
Ille autem quotiens defessus erat, totiens se humi sternebat, |
Ille autem quotiens erat fessus, totiens se humi prosternebat. |
qui quotiens defessus fuerat, totiens se terre sternebat |
172
haustoque spiritu de gremio terrae fortior et integer resurgebat. |
Hausto enim spiritu de gremio terre fortior et integer resurgebat : |
haustoque spiritu de gremio terre fortior resurgebat. |
Vires namque sic prostratus resumebat. Quod ut Hercules tandem sensit, illum in aerem sublevavit, dicens « Huc, Antaee, cades » diuque in aere compressus tandem interiit. |
vires namque sic prostratus resumebat. Quod ut Hercules tandem sensit, eum sublevauit in aera, dicens : « Huc, Anthee, cades » diuque in aere pressus tandem interiit. |
Vires namque sic prostratus resumebat. Quod ut Hercules tandem persensit, illum in aerem sullevavit, dicens : « Huc, Anthee, cades. » |
En comparant les données dans ces textes, il apparaît qu’ils transmettent un résumé analogue qui a dû connaître une certaine diffusion, à partir du xiiie siècle au plus tard et, entre autres, dans le domaine français (dont provient le Commentaire Vulgate). On observe par ailleurs que la précision qu’Antée était un géant – absente dans le De natura deorum, mais présente dans l’HAC1 – apparaît parmi la varia lectio de ce morceau de savoir mythologique partagé par les différents textes. La pluralité des témoignages suggère qu’il faisait partie d’un savoir mythographique général qui s’est diffusé grâce aux traités mythographiques ainsi qu’aux commentaires de l’époque qui nous intéresse ici.
Les exemples présentés ci-dessus proviennent, certes, de plusieurs textes différents, dont aucun n’a probablement servi de source directe à l’auteur de l’HAC1. On pourrait cependant s’imaginer que l’auteur-compilateur en question avait intégré les données concernant la généalogie d’Hercule, l’attribution incertaine de la victoire sur Cacus et la lutte contre Antée (et sans doute aussi d’autres informations) à partir d’un manuel de savoir mythologique comparable réunissant déjà ces données, au moins en partie59. Quelques observations encore permettent, il nous semble, de renforcer cette hypothèse. Si aucun des manuels mythologiques évoqués ne comporte toutes les données, ils ne transmettent pas non plus de simples bribes d’information isolées. Le manuscrit TCD 632 de Dublin, par exemple, comporte l’anecdote sur Antée ainsi que l’information généalogique à propos de Laudaci, ancêtre d’Hercule. Le recueil Pal. lat. 1741 intègre cette dernière donnée de même que l’attribution incertaine de la victoire sur Cacus. Dans un autre ordre d’idées, tous les éléments que nous venons de citer survivent dans plusieurs traités du même genre, dont certains remontent au moins jusqu’au xiiie siècle. En outre, il est intéressant d’évoquer la présence de 173données mythologiques en partie analogues dans une autre œuvre historiographique du xiiie siècle, qui a vu le jour dans un contexte géographique différent, mais que d’autres chercheurs ont déjà considérée en rapport avec le même ensemble de traités mythographiques et généalogiques dont nous venons de parler : la General Estoria espagnole60. Cette dernière nomme à plusieurs reprises en tant que source un certain Libro de las generaciones de los dioses de los gentiles – en d’autres termes, une généalogie des dieux païens61. Fait intéressant pour notre propos : la General Estoria fournit à son tour des données généalogiques à propos d’Hercule, nommant à nouveau cet ancêtre étrange que dixeron Laudato. E aquel Laudato fizo a Almena62. Compte tenu de ces données parallèles, il paraît tout à fait plausible que l’HAC1 ait pareillement mis à contribution un manuel contenant des généalogies des dieux païens – qui condensait en peu d’espace un savoir mythologique de base – et que ce soit d’un tel manuel que proviennent certaines des données « d’origine incertaine ». Des textes de ce type, plus concis que les traités des Trois Mythographes du Vatican63, ont, selon toute vraisemblance, circulé largement et servi de référence en la matière.
Les données mythographiques sont donc passées dans l’historiographie, et cela à plusieurs reprises. Au fil du temps, le petit ensemble d’exploits présents dans l’œuvre d’un Eusèbe s’agrandira et s’enrichira de données provenant de textes extérieurs à l’historiographie. L’HAC1 en témoigne, tout comme le feront d’autres histoires que nous examinerons par la suite. L’importation de ces données témoigne non seulement d’un intérêt de la part des clercs et historiens pour les personnages de l’Antiquité païenne, mais également, nous semble-t-il, de la diffusion de textes mythographiques, parmi lesquels les manuels de savoir mythologique comme ceux que nous avons considérés supra occupent probablement une place dont l’importance tend à être minorée.
174La spécificité du portrait d’Hercule
Si l’on suppose que la plupart des éléments constitutifs du portrait d’Hercule dans l’HAC1 n’ont pas été inventés par l’auteur, l’innovation dans un tel texte compilé naît de la combinaison de différents facteurs : la sélection des éléments retenus, la manière dont ils sont assemblés, ainsi que les nuances interprétatives qui peuvent être introduites de la part du compilateur, surtout si ce dernier agit en même temps en tant que traducteur, comme cela paraît être le cas de l’auteur de l’HAC1. En considérant d’un seul coup d’œil les différents épisodes réunis dans son œuvre, on verra émerger un « portrait » d’Hercule. Arrêtons-nous maintenant sur quelques-uns de ses caractéristiques, qui permettront aussi de souligner l’importance persistante de l’hétérogénéité des matériaux.
L’Hercule qui ressort de l’HAC1 est, dans un premier temps, un homme fort et courageux par excellence. On apprend dès son portrait initial qu’il n’y avait guère d’homme plus fors ni plus hardis depuis le Déluge, ce qui place Hercule dans une position à part également sur l’échelle historique. La force et la prouece du héros sont soulignées à plusieurs reprises au cours de sa « biographie ». L’épisode d’Antée montre que ces qualités valent dans leur sens le plus littéral : Hercule est capable de soulever un géant entre ses bras et de le tenir en l’air en le serrant jusqu’à l’étouffer. L’impression est encore renforcée lorsqu’on apprend qu’Hercule, dans le contexte du même épisode, n’est armé que de sa masue grande, tele come convenait à si fort home64. Et comme on lit plus loin, il est sans peur, ne craignant rien, ne lion ne serpent ne nulle autre beste, tant fust crueuse ne orrible65. Cette dernière phrase rappelle les premiers travaux du héros. Tueur de géants, vainqueur de bêtes sauvages, cet Hercule maniant sa massue a lui-même quelque chose de farouche et de « primitif » qui paraît comme un lointain reflet des légendes populaires dont émanait le héros à l’origine. On se souvient à cet égard aussi des réflexions de l’historiographe antique Diodore de Sicile à propos d’Hercule, qui expliquait que les premiers travaux du héros auraient bien mieux convenu à un homme vivant avant l’ère des premières civilisations plutôt qu’à l’époque de la guerre de Troie66.
Dès sa présentation initiale, cet Hercule fait l’objet d’une comparaison avec un homme fort de la légende biblique, Samson, car chacun des deux aurait accompli « mainte merveille » en sa vie. Si le compilateur 175de l’HAC1 a pu trouver la comparaison entre les deux personnages dans l’œuvre de chroniqueurs précédents, il la développe davantage, créant une sorte de double portrait dans lequel il juxtapose, certes assez brièvement, les biographies du héros païen et de son homologue biblique67 :
Herculés fist mainte merveille en sa vie, qui bien funt a reprendre et ausi fist Sansos. Mes de Sanson ne vos parlerai plus ore jusques a tant que par droiture viendra a lui li contes de l’estoire. Ce sera quant parlera[i] des Hebrius, quar il fu de lor lignee. E bien sachés neportant qu’entre Sanson et Herculés n’ot mie grans tens, quar andui furent ou tan[s] que Troie fu premerement destruite. Mes a Troie ne fu mie Sansos, quar ausi ne furent cil de sa lignee.
En relevant les similarités entre les deux héros et en situant leurs vies à la même échelle temporelle de l’histoire, tout en insistant à plusieurs reprises sur le fait qu’ils appartenaient à deux « lignées » distinctes, le compilateur met en relief l’idée des « lignes parallèles » de l’histoire dans lesquelles les deux personnages s’inscrivent suivant la chronologie traditionnelle selon Eusèbe-Jérôme. L’histoire païenne peut faire l’objet d’une comparaison, même d’une analogie, avec l’histoire biblique ; constat d’autant plus intéressant que les segments sur les Hébreux que le compilateur annonce à cet endroit ne trouveront jamais leur chemin vers sa chronique68. Dans les lignes en question on voit transparaître l’un des sujets de prédilection du compilateur de la version longue du texte : l’histoire du Salut, qui lui est très chère et qui semble perpétuellement sous-tendre son texte69.
À côté de cette projection de la figure d’Hercule sur son alter ego biblique, le héros se profile cependant dans une série d’autres épisodes nettement païens, où l’image de l’homme fort reçoit certaines nuances. 176Il est utile d’observer à ce sujet que l’Hercule luttant contre Antée en employant la force de ses bras nus se présente dans un cadre très différent que l’homme que li baron de Gresse choisissent pour mener une expédition contre les Amazones, qui rassemble mout de chevalerie et qui part en compagnie de Thésée et avec neuf navires pour le royaume lointain des femmes guerrières. Considérons un extrait de l’HAC1 décrivant le combat que se livrent les Grecs et les Amazones, qui ne ressemble guère à la lutte d’Hercule contre le géant et qui est, par ailleurs, largement constitué d’innovations par rapport au modèle lointain d’Orose70 :
E tantost com eles vindrent a l’estor, Menalippe jousta a Herculés et Hippolite a Theseüs. Et si tres durement s’entrecontrerent a la grande vigor qu’eles avoient et par la force des riches destriers sor quoi eles seoient, qu’eles et li dui chivalier vaillant, qui ausi contre eles venoient quan qu’il pooient, se porterent a terre. […] Tost furent les damoiseles relevees, qui assés savoient d’armes, et ausi furent li chivalier, Herculés et Theseüs, qui grant vergoigne en orent. Et si ne vos esmerveillés mie s’Erculés chaï, qui fors estoit a merveilles, quar ce fu par aventure par son cheval, qui chargiés estoit de lui et de ses armes, et par le ruiste encontre de la damoisele, qui le chival fist sous lui trebucher et fundre. Tantost com en piés furent revenu, et les damoiseles orent les escus reons avant mis et es poins les espees, li Grigois lor corurent soure, [qui] la force avoient.
On a l’impression de lire la description d’une joute chevaleresque dans un roman en prose : Hercule et Thésée sont li dui chevalier vaillant, et les deux Amazones sont désignées comme des damoiseles (peut-être pour se conformer au registre, peut-être en guise de banalisation), qui s’affrontent d’abord à cheval, arrivent à faire tomber leurs adversaires de leurs montures, empoignant ensuite leurs épées et leurs écus et continuent à combattre à pied. L’acculturation médiévale de la scène est par ailleurs totale aussi sur le plan iconographique du manuscrit Paris, BnF, fr. 20125 (P), où les deux damoiseles sont représentées en pleine armure, au moment où elles désarçonnent leurs adversaires grecs71. L’auteur médiéval semble par ailleurs avoir ressenti comme problématique l’habileté guerrière des femmes lors de cette confrontation, si l’on considère les explications qu’il ajoute afin de justifier pourquoi Hercule 177serait tombé de son cheval. Ce ne serait pas, en fin de compte, à cause de Menalippe, mais par aventure, parce que l’animal est trop chargé et qu’il s’effondre sous le poids du chevalier lors de l’impact. L’Hercule qui sort de cet épisode s’avère également chevaleresque en ce qu’il se présente comme plus « civilisé », et plus diplomate, étant prêt à négocier et à conclure la paix avec la reine des Amazones, en recevant ses armes en symbole de sa victoire.
L’Hercule qui se retrouve en début de la section troyenne est encore un peu différent, sa nature guerrière étant mise en avant. Présenté ici comme camarade de Jason et des Argonautes plutôt que comme compagnon de Thésée, il apparaît d’abord dans un rôle secondaire (Et la fu Herculés ave[c] Jason en compaignie72). Dans le contexte de cet épisode, il n’est plus question de se confronter à un adversaire qui présente une menace directe et imminente, mais de défendre l’honneur symbolique du peuple. Les Grecs se sentent insultés par le roi de Troie qui les chasse de ses terres : Jason et Herculés et cil qui avec aus estoient furent mout aïré de la cruauté le roi Laomedon, por ce qu’il mal ni tort ne li voloient faire, et si vilainement les avoit congeés de son regne73. C’est aussi l’événement déclencheur qui projettera Hercule dans une position plus proéminente dans la deuxième moitié du segment narratif. Il s’émancipe du statut auxiliaire de compagnon de Jason (et il n’est pas non plus un simple émissaire des barons de Grèce, tel qu’il l’était dans le cadre de l’expédition contre les Amazones), car il prend sur lui de rallier les « chevaliers » grecs afin de partir contre Troie74. C’est également lui qui dirige l’armée grecque, une fois en place, et qui remporte la victoire en tuant le roi des adversaires, après avoir devisé un stratagème pour piéger les ennemis lorsque ces derniers sont sortis de leur ville afin de confronter les Grecs75 :
Herculés et sa maisnee s’en ala vers la cité, qui auques estoit de gent voidee, si assailli ceaus qui dedens estoient. Et lors fu nuncié au roi Laomedon ceste choze, qui sans atargier repaira ariere. Et Herculés revint contre lui qui l’ocist en cele bataille.
L’intervention de cet Hercule-guerrier qui conduit avec succès une campagne de vengeance contre les Troyens est aussi décisive pour le tournant des événements qu’elle paraît fugace sur le plan narratif. 178L’HAC1 résume le conflit belliqueux en si peu de mots que cela peut frapper le lecteur ayant traversé des descriptions bien plus étoffées dans les épisodes précédents. En même temps, elle rappelle la nature composite de l’œuvre, caractérisée par l’alternance entre des narrations étendues et des anecdotes succinctes.
Que le texte de l’HAC1 passe des segments narratifs presque « romanesques » vers un mode historiographique plus concis vers la fin de l’épisode en question s’observe également dans les mots brefs évoquant la fin d’Hercule – et de Jason – et de leurs autres compagnons76 :
Segnor, Herculés ne vesqui mie puis lonc tens, ains li prist uns greveuse maladie, et si tres greveuse qu’il por la grant fierté entra en un grant fue, si s’arst toz et ensi fina sa vie. Et Jason moru ausi et pluisor autre de diverses manieres, qui furent en cele compaignie.
Après le récit de la première victoire des Grecs contre les Troyens, ces phrases sont peut-être censées constituer une mise en garde contre la mortalité des hommes et la futilité de leurs exploits. L’apostrophe aux seigneurs, systématique dans l’HAC1 quand il s’agit d’interpeller un public auquel on adresse un enseignement, souligne, tel un nota bene, comment ces hommes illustres, dont Hercule, ont tacitement disparus de la toile de l’histoire. Comme dans les histoires antérieures, Hercule est présenté non comme un dieu ou demi-dieu, mais comme un homme placé dans le cours de l’histoire et qui meurt à un moment donné pendant le défilement des événements. C’est éventuellement aussi la raison, si l’on revient sur le portrait du héros dans son ensemble, pour laquelle aucune mention n’est faite de son rattachement à Jupiter lorsque sont fournies ses « coordonnées » généalogiques initiales, qui se limitent à évoquer sa lignée maternelle, humaine77. Le compilateur se soucie de fournir, au cours de sa biographie en « patchwork » du héros, des points de repère afin de situer et délimiter la vie de cet Hercule-homme dans l’histoire : il était en la flor de sa jovente (formule censée adapter le latin floruit) lorsque les Amazones étaient à leur apogée ; et il vécut, comme on l’apprend dès le début de son portrait, au tans que Troie fu premerement destruite78. Sa mort est placée immédiatement après cet événement qui annonce en quelque sorte la fin du périmètre de sa vie. Restant tout à 179fait conforme aux données dans les chroniques traditionnelles, sa mort est intercalée entre les deux conflits entre Grecs et Troyens.
Hercule – homme fort, chevalier, guerrier – se présente sous des formes diverses, motivées par la multitude des sources et modèles qui le constituent. Dans un texte comme l’HAC1, l’hétérogénéité des éléments est très visible, rendant difficile l’identification d’un « type » d’Hercule univoque. On peut souligner tout au plus que la dimension (semi-)divine de son personnage est entièrement éliminée. L’absence d’une caractérisation ou même d’une valorisation manifeste de son personnage est l’une des caractéristiques qui définit non seulement l’HAC1 mais également d’autres histoires en langue française, dont bon nombre reprendront une partie – et parfois la majorité – des composantes de l’œuvre « fondatrice » que nous venons de regarder. En raison de la nature hétérogène de ces œuvres historiographiques, ce qui paraît au premier regard une innovation ou un ajout dans une compilation donnée est susceptible de faire partie en réalité d’une compilation antérieure perdue. Chaque passage relevant d’une source externe à l’historiographie pourrait avoir été intégré dans une compilation précédente qui nous est aujourd’hui inconnue. Le fait de retracer une tradition implique toujours des inconnues de ce type, que l’on peut réduire toutefois dans la mesure où l’on augmente la quantité des matériaux dépouillés. Ainsi, s’il reste bien des incertitudes sur l’« histoire » de l’Hercule médiéval, nous avons aussi trouvé à clarifier certaines d’entre elles. L’étude des œuvres historiographiques qu’on lira ci-dessous mettra l’accent sur différents aspects, selon l’intérêt qu’ils présentent pour comprendre la tradition d’Hercule dans toute sa diversité.
1 Le titre d’Histoire ancienne jusqu’à César, l’identification d’une première et d’une seconde rédaction du texte, ainsi que la distinction de différentes « sections » du texte (auxquelles nous reviendrons infra),proviennent d’une publication de P. Meyer, « Les premières compilations françaises d’histoire ancienne », Romania, 14, 1885, p. 1-81. – Pour un aperçu général sur les sources des différentes parties de la plus ancienne rédaction du texte, voir Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., p. 334-340. Des remarques sur ces sources sont également données, à des degrés variés, dans les éditions partielles du texte parues jusqu’à présent (voir p. 155-156, n. 9 infra pour les références). La composition et la compilation des matériaux dans cette œuvre ont été étudiées à partir de la section sur l’histoire de Rome par C. Croizy-Naquet, Écrire l’histoire romaine au début du xiiie siècle : l’Histoire ancienne jusqu’à César et les Faits des Romains, Paris, Champion, 1999. Citons finalement deux études de cas portant sur un texte en particulier, le Liber Floridus, œuvre encyclopédique datant du Haut Moyen Âge qui semble avoir servi de source à l’œuvre : F. Montorsi, « Les origines des Francs dans l’Histoire ancienne jusqu’à César. Sur une source inconnue de la première chronique universelle en français », Romania, 40, 2016, p. 415-426, et H. Morcos, « Compilation as Palimpsest : Tracing Origins of the Histoire ancienne jusqu’à César in the Liber Floridus », Queeste, 28:1, 2021, p. 61-95.
2 Cf. Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., p. 335. Voir aussi, à propos de la datation de l’œuvre, l’article récent de F. Montorsi, « Sur l’intentio auctoris et la datation de l’Histoire ancienne jusqu’à César », Romania, 134, 2016, p. 148-165.
3 Histoire ancienne jusqu ’ à César (Estoires Rogier), éd. De Visser-van Terwisga, 2 t. Orléans, Paradigme, 1995-1999. C’est l’une des éditions partielles à travers lesquelles les différentes sections de l’HAC1 nous sont connues (voir la table des sections infra, p. 155). L’édition par M. de Visser-van Terwisga couvre les « sections II à IV » de l’histoire, y compris les parties du texte dans lesquelles se situe le plus grand bloc d’épisodes autour d’Hercule.
4 Cf. Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., p. 348, mais déjà P. Meyer, « Les premières compilations françaises d’histoire ancienne », art. cité, p. 52 sqq.
5 Voir les remarques de C. Gaullier-Bougassas dans l’introduction à son édition de la « section IX » sur Alexandre le Grand de l’HAC1, L’Histoire ancienne jusqu’à César ou Histoires pour Roger, châtelain de Lille. L’histoire de la Macédoine et d’Alexandre le Grand, Turnhout, Brepols, 2012, p. 23-25.
6 Cf. Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., p. 338.
7 P. Meyer, « Les premières compilations françaises d’histoire ancienne », art. cité ; D. Oltrogge, Die Illustrationszyklen zur « Histoire ancienne jusqu’à César » (1250-1400), Francfort, Peter Lang, 1989.
8 Nous n’avons pas compté les simples mentions du nom d’Hercule, par exemple, pour annoncer des segments plus loin dans le texte, mais seulement les occurrences en rapport avec des thématiques ou épisodes spécifiques.
9 Les éditions partielles sont les suivantes : (de la section I) The Heard Word : A Moralized History. The Genesis section of the Histoire ancienne in a text from Saint-Jean d’Acre, éd. M. Coker Joslin, Jackson, University of Mississippi Press, 1986 ; (des sections II-IV) éd. de Visser-van Terwisga, op. cit. ; (de la section V) Jung, dans La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., p. 359-430 ; (de la section VIII) L’Histoire ancienne jusqu’à César ou Histoires pour Roger, châtelain de Lille. L’histoire de la Perse, de Cyrus à Assuérus, éd. A. Rochebouet, Turnhout, Brepols, 2016 ; (de la section IX) L’Histoire ancienne jusqu’à César ou Histoires pour Roger, châtelain de Lille. L’histoire de la Macédoine et d’Alexandre le Grand, éd. Gaullier-Bougassas, op. cit. En outre, la section VI sur Énée a été transcrite par K. Labelle dans le cadre de son mémoire de maîtrise, Sources et autonomisation du savoir historique en français : l’exemple des récits autour d’Énée dans les histoires universelles médiévales, Québec, Université Laval, 2018, p. 34-95. L’édition numérique intégrale de l’œuvre est en effet double, car elle comprend une édition semi-diplomatique ainsi qu’une édition interprétative du manuscrit P, préparées dans le cadre du projet européen The Values of French Language and Literature in the European Middle Ages, sous la direction de Simon Gaunt, au King’s College de Londres, 2015-2020. Le texte est accessible via le site du projet, https://tvof.ac.uk/textviewer/?p1=Fr20125/semi-diplomatic/section/1 (dernière consultation : 29-08-2022).
10 Cf. la section I sur la Genèse : Cis Afferam entra en Libie a tote sa grant gent por conquerre la contree. La li vint Herculus [sic] en aïe e por ce li dona Afferam sa fille a feme qui Ethea estoit apelee. (The Heard Word : A Moralized History, éd. Coker Joslin, op. cit., § 216, p. 124-125)
11 Voir les f. 240v-251r du manuscrit P, et les chapitres 62-64, 68-69, 87 et 90 de l’éd. Gaullier-Bougassas, op. cit. du texte, pour des mentions brèves du héros dans ce cadre. Après avoir conquis l’Orient, Alexandre fait ériger des colonnes au-delà de celles qu’auraient posées avant lui Hercule et Liber Pater : [I]l comanda a ses provos des darraines contrees qu’il bousnes en samblance de colombes d’or meïssent et darraines terres qu’il avoit conquises et outres ces bousnes Hercules et Liber i avoient assises et si fist escrire tote la memoire de ses fais et tote l’uevre qu’il avoit faite en Inde. (chap. 90. Que li rois Alixandres fist bosnes metre sor l’occean o il avoit esté). Voir, pour des observations complémentaires et des éléments bibliographiques sur le sujet, R. Trachsler, Disjointures – Conjointures. Étude sur l’interférence des matières narratives dans la littérature française du Moyen Age, Basel/Tübingen, Francke, 2000, p. 132-135.
12 Les éléments de la section IV sont cités dans cette vue d’ensemble d’après l’éd. De Visser-van Terwisga, op. cit., avec les modifications par rapport au ms. P notées entre crochets. Nous renverrons systématiquement aux chapitres selon cette édition et aux feuillets du ms. P.
13 Éd. De Visser-van Terwisga, op. cit., chap. 138, l. 7-8 ; ms. P, f. 120va.
14 Éd. De Visser-van Terwisga, op. cit., chap. 138, l. 11-18 ; ms. P, f. 120vab.
15 Éd. De Visser-van Terwisga, op. cit., chap. 138-141 ; ms. P, f. 120vb-121vb.
16 Compte tenu des différents noms évoqués, il est question de cinq sœurs (Synope, Anthiope, Orchia, Menalippe et Hippolite). L’une d’entre elles, la reine Synope, est partie pour mener des conquêtes à l’étranger, ce qui suggère que la personne à laquelle fait allusion l’auteur ici est probablement soit Anthiope soit Orchia, qui sont restées pour garder le pays.
17 Éd. De Visser-van Terwisga, op. cit., chap. 142-145, l. 1-23 ; ms. P, f. 121vb-122vb.
18 Éd. De Visser-van Terwisga, op. cit., chap. 145, l. 24-45 ; ms. P, f. 122vb-123ra.
19 Éd. De Visser-van Terwisga, op. cit., chap. 146 ; ms. P, f. 123rab
20 D’après Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., chap. 1-3, p. 359-360 ; ms. P, f. 123rb-123vb.
21 Comme Jung l’a relevé, cette version du récit se distingue de celle transmise par Eusèbe-Jérôme « et dans toute la tradition classique », qui voit commencer les conflits avec l’enlèvement d’Hélène. (cf. « L’histoire grecque », art. cité, p. 188)
22 Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., chap. 3, l. 8-10.
23 Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., chap. 3, l. 21 sqq.- chap. 5 ; ms. P, f. 123vb-124vb.
24 Les événements sont résumés en très peu de mots : Jason et Herculés et cil qui avec aus estoient furent mout aïré de la cruauté le roi Laomedon, por ce qu’il mal ni tort ne li voloient faire, et si vilainement les avoit congeés de son regne. N’en peurent plus faire adonques, por ce qu’il cremirent la force des gens de la contree, ains rentrerent en lor nef, si nagierent par la mer tant qu’il vindrent en Colcos, si firent bien ce qu’il queroient, quar, atot le mouton qui avoit le visage doré, repairerent ariere en Gresse. (Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., chap. 3, l. 30-36, p. 360)
25 Ibid., chap. 5, l. 18-21 ; ms. P, f. 124vb.
26 Voir Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., p. 338-339.
27 Cf. les notes dans l’éd. de Visser-van Terwisga, op. cit., t. 2, p. 155, à propos de la comparaison avec Samson. À propos de l’épisode troyen et la mort d’Hercule, voir Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., p. 407.
28 Éd. de Visser-van Terwisga, op. cit., t. 2, note sur 145, 27.
29 La base FAMA donne une liste de 42 manuscrits, reposant en grande partie sur les données de la Clavis Scriptorum Latinorum Medii Aevi, Auctores Galliae 735-987, t. 3, éd. M.-H. Jullien, Turnhout, Brepols, 2011, p. 37-42. Voir Institut de recherche et d’histoire des textes (IRHT-CNRS), « Notice de Historiarum libri XII, Frechulfus Lexoviensis », FAMA : Œuvres latines médiévales à succès, éd. P. Bourgain et D. Stutzmann, 2019, en ligne : http://fama.irht.cnrs.fr/œuvre/254688 (dernière consultation : 29/09/2022). L’édition actuelle de référence est celle de Michael Allen : Frechulfi Lexoviensis episcopi opera omnia, éd. M. Allen, Turnhout, Brepols, 2002.
30 Livre II, chap. 25 : Assyriorum XXIIII Sosarmus, qui habens successorem Mitreum XXV, quo tempore Tola et Abimelech iudicabant populum Israhel ; ea autem quae de Libero patre et quae de Dedalo siue de Orpheo atque de Ligurgo dicuntur, gesta uel ficta fuisse perhibentur ; quando et Vezones rex Aegypti Scythas adhuc innocuos excitauit ad bella, a quibus uictus est, quomodo etiam exortum est regnum Amazonum et qualiter creuit, quid etiam de Minotauro atque Theseo historiographi senserint, qui illis diebus fuisse dicuntur (cité d’après ibid.).
31 Ibid., chap. 25, l. 32.
32 Ibid., l. 33-34.
33 Ibid., l. 47 sqq.
34 Fréculfe est cité d’après ibid., l. 81 sqq., et l’HAC1, d’après l’éd. de Visser-van Terwisga, op. cit., chap. 138.
35 Sur lesquelles nous reviendrons infra, p. 167 sqq.
36 Frechulfi Lexoviensis episcopi opera omnia, éd. Allen, op. cit., livre II, chap. 26 : Assyriorum XXVI Tautanes ; Hebreorum diuersi iudices fuerunt ; quo in tempore Minoes leges ac iura constituit, et Hercules post plura fortiter gesta morbo instigante flammis se tradidit, et qualiter Troianorum ortum sit bellum seu etiam Troia euersa ; gens Gothorum illis diebus oritur, qualiter creuerit uel quas sedes tenuerit inde usque Iulii Gai Caesaris principatum paululum decerpendo percurrimus.
37 Ibid., l. 28-30.
38 Voir à ce propos Jung, « L’histoire grecque », art. cité, p. 191-192, ainsi que L. Faivre d’Arcier, Histoire et géographie d’un mythe : la circulation des manuscrits du De excidio Troiae de Darès Le Phrygien (viiie-xve siècles), Paris, École nationale des chartes, 2006, p. 336. L’abrégé de Darès inséré dans la chronique du Pseudo-Frédégaire est connu sous le titre d’Historia Daretis Frigii de origine Francorum, parce qu’elle cherche à prouver l’origine troyenne des Francs. À propos des légendes de l’origine des Francs dans l’HAC1, sujet qui ne rentre pas dans le champ de la présente étude car elles ne concernent pas Hercule, on peut consulter l’article de F. Montorsi, « Les origines des Francs dans l’Histoire ancienne jusqu’à César », art. cité, p. 415-426, qui s’intéresse à un autre texte qui intègre un abrégé de Darès dans le Liber Floridus.
39 Pour citer Marc-René Jung, qui avait bien noté la proximité entre les textes dans la partie troyenne, sans pourtant aborder le sujet d’Hercule : « La seule différence entre le texte français [= HAC] et l’histoire universelle latine [= Fréculfe], c’est que l’auteur français traduira le véritable Darès au lieu du Darès mérovingien. » (Jung, « L’histoire grecque », art. cité, p. 191).
40 Éd. de Visser-van Terwisga, op. cit., chap. 138.
41 Précisons, en anticipant nos observations sur la tradition textuelle de l’HACinfra (p. 182 sqq.), que le nom Laudaci n’est pas une lectio singularis propre à P. Il apparaît sous cette forme ou comme variante du type Laudati dans tous les témoins que nous avons examinés (voir liste infra, p. 187-189).
42 M. de Visser-van Terwisga souligne en note sur le chap. 138, 8-9, qu’il y a d’autres occurrences d’un personnage au nom semblable, Leodequi(ns), identifié comme roi de Crète, qui est mentionné non pas dans le manuscrit P, mais dans le manuscrit Vienne, ÖNB, 2576, témoin italien du xive siècle, qui serait le même que le Laudaci évoqué ici. L’éditrice conclut que le passage en question pourrait s’appuyer sur une glose corrompue et/ou lacunaire.
43 Cet ensemble de textes est globalement très peu connu, bon nombre de ses représentants restant inédits. Ils sont mentionnés notamment dans des études qui s’intéressent aux sources de la Genealogia deorum gentilium de Boccace (avant tout le mystérieux Theodontius qui est cité par l’humaniste italien dans son œuvre) et sur un texte appartenant au même genre attribué à Paolo da Perugia, lui aussi nommé par Boccace. Voir à ce propos T. Hankey, « Un nuovo codice delle Genealogie deorum di Paolo da Perugia (e tre manualetti contemporanei) », Studi sul Boccaccio 18, 1989, p. 65-161, et P. R. Schwertsik, Die Erschaffung des heidnischen Götterhimmels durch Boccaccio : Die Quellen der Genealogia Deorum Gentilium in Neapel, Paderborn, Wilhelm Fink, 2014, en part. le chap. « Mythologische Manuale und Göttergenealogien mit inhaltlichen Bezügen zum verschollenen Werk des Theodontius », p. 263 sqq.). Les représentants les mieux connus qui s’inscrivent dans ce même « réseau » de textes mythographiques sont le De natura deorum, connu aussi sous le nom de Mythographe de Digby, transmis par le manuscrit Oxford, Bodleian Library, Digby 221 (xive siècle), dont la composition date peut-être du xiie siècle, et le Fabularius de Konrad von Mure (du xiiie siècle) – les deux partageant avec les généalogies boccaciennes le nom du prétendu ancêtre des dieux païens, Demogorgon. Pour d’autres textes, moins connus, qui se rattachent à ce même ensemble de textes, cf. par exemple, C. Egger, « Heidnische Götter in Admont. Eine anonyme Genealogia deorum gentilium », Mitteilungen des Instituts für Österreichische Geschichtsforschung, Ergänzungsband 42, Vienne/Munich, Oldenburg, 2002, p. 64-94. Nous avons, au cours de nos études, identifié d’autres « manuels mythologiques » contenant des données de savoir mythologique et encyclopédique en commun avec les textes cités dans les études ci-nommées, qui résonnent à leur tour dans l’Ovide moralisé – tel le manuscrit Dublin, Trinity College, TCD 632 du xve siècle (voir, à propos de celui-ci, M. L. Colker, « A Classical Handbook from Medieval England », Scriptorium, 43:2, 1989, p. 268-272). À propos de ces parallèles, cf. L. Endress, « Un répertoire du type “de montibus et fluminibus” dans l’Ovide moralisé ? À propos d’un passage interpolé et ses sources possibles », Ovidius explanatus, op. cit., p. 39-65. Les textes en question restent globalement un champ d’étude très peu exploité.
44 Ms. Paris, BnF, lat. 8372, f. 83v. La généalogie occupe les feuillets 78v-86r du manuscrit. Le texte en question est évoqué par P. R. Schwertsik, Die Erschaffung des heidnischen Götterhimmels durch Boccaccio, op. cit., p. 265.
45 Étant donné la ressemblance entre les graphies u et b dans certains manuscrits, la confusion a pu se produire facilement, d’autant plus que Labdacus n’est pas parmi les personnages les plus connus de la mythologie antique.
46 Conradi de Mure Fabularius, éd. van de Loo, op. cit., entrée Labdacus. D’autres témoignages se retrouvent, entre autres, dans les généalogies du manuscrit de Londres, BL, Burney 311, Item [= genuit] Jupiter de Alcmena, Lapdacii filia, Herculem (f. 69r), et dans le manuel mythographique contenu dans le ms. Dublin, Trinity College, TCD 632, Item Jupiter in specie Amphitrionis cum Alchmena, Laudaci filia, concubuit[…](f. 97v).
47 Cf. le tome 2 de son édition, op. cit., notes à propos de 145, 27 et 146, 7 (p. 163-164).
48 Éd. de Visser-van Terwisga, chap. 146 ; ms. P, f. 123rb.
49 Cf. infra, p. 318 sqq.
50 Ms. Angers, BM, 312, f. 23ra (xiiie siècle) ; ms. Vatican, BAV, Pal. lat. 1741, f. 3r (xve siècle). Les deux témoignent, par ailleurs, aussi d’un deuxième exploit de Thésée, la destruction de Thèbes, relaté dans la phrase précédant immédiatement celle à propos de Cacus dans le texte français : comparer l’HAC1 ([…]ce fu cil dus qui destruist Thebes) avec Angers, BM, 312, f. 23ra et Pal. lat. 1741, f. 3r (Destructio Thebarum).
51 Voir T. Hankey, « Un nuovo codice delle Genealogie deorum […] », art. cité, p. 140 sqq. pour des éléments de description de ce codex, suivis de transcriptions des données généalogiques. Pour une description du manuscrit, cf. M. Kautz, « Vatikan, Biblioteca Apostolica Vaticana Pal. lat. 1741 », Universitätsbibliothek Heidelberg, 2014, en ligne : https://www.ub.uni-heidelberg.de/digi-pdf-katalogisate/sammlung51/werk/pdf/bav_pal_lat_1741.pdf (dernière consultation : 29-09-2022).
52 Op. cit., t. 2, note à propos de 145, 27.
53 Ce traité a été édité par V. Brown, « An Edition of an Anonymous Twelfth-Century Liber de natura deorum », Mediaeval Studies, 34, 1972, chap. 141. De Antaeo (p. 52).
54 Ibid. à gauche, et, à droite, éd. de Visser-van Terwisga, chap. 145, l. 29-32, 41-44 ; les gras sont de nous.
55 Le texte français ne donne pas les mots qu’Hercule aurait adressés à son adversaire, Huc, Antee, cades, cités d’après la Pharsale de Lucain, autre texte à ajouter au répertoire d’auctoritates qui relatent l’épisode.
56 Voir à propos de ce dernier, Colker, « A Classical Handbook from Medieval England », art. cité, p. 268-272, ainsi que Endress, « Un répertoire du type “de montibus et fluminibus” dans l’Ovide moralisé ? », art. cité, p. 51 sqq.
57 Suivant l’édition par Brown du De natura deorum dans son article « An Edition of an Anonymous Twelfth-Century Liber de natura deorum », art. cité, chap. 141. De Antaeo (p. 52) et nos transcriptions du Commentaire Vulgate d’après le manuscrit Vatican, BAV, Vat. lat. 1598, f. 91r, et du manuscrit de Dublin, TCD 632, f. 98r.
58 L’ajout se retrouve dans le manuscrit Vatican, BAV, Pal. lat. 1663. Nous n’avons pas fait un relevé complet des témoins du commentaire.
59 À propos des manuels de savoir mythologique, voir aussi nos remarques supra, p. 167-168, n. 43, et infra, p. 321.
60 La General Estoria intègre notamment, comme les généalogies boccaciennes et bon nombre des textes antérieurs, la figure de Demogorgon comme ancêtre des dieux (cf. p. 167, n. 43 supra). Voir, à propos de ces rapports, par exemple l’étude de P. R. Schwertsik, art. cité, p. 274 sqq. ainsi que L. Ciccone, « “Ut testatur Ovidius” : Boccaccio lettore dei commenti alle Metamorfosi », Intorno a Boccaccio / Boccaccio e dintorni2019. Atti del Seminario internazionale di studi (Certaldo Alta, Casa di Giovanni Boccaccio, 12-13 settembre 2019), éd. G. Frosini, Florence, Firenze University Press, 2020, p. 77-91, ici 79 et 83-85.
61 Voir à propos de cette source, P. S. Suarez-Somonte et T. Gonzalez Rolan, « Aproximación a la fuente latina del “Libro de las generaciones de los dioses de los gentiles” utilizada en la General Estoria de Alfonso X el Sabio », Cuadernos de Filología Clásica. Estudios Latinos, 4, 1993, p. 93-111.
62 Alfonso el Sabio, General Estoria. Segunda parte. vol. 2, éd. A. G. Solalinde, L. A. Kasten et V. B. Oelschläger, op. cit., chap. 394 « Del linaje de Ercules e commo fue fecho ».
63 Voir nos p. 88-110 supra.
64 Éd. de Visser van Terwisga, op. cit., chap. 145, l. 35.
65 Ibid., l. 4-5.
66 Cf. supra, p. 49-50.
67 Éd. de Visser-van Terwisga, op. cit., chap. 138, l. 12-18 ; ses corrections du ms. P entre crochets.
68 Il y a d’autres passages similaires qui annoncent l’histoire des Hébreux, comme l’a noté Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., p. 335-337.
69 Suivant l’esprit orosien, il cherche dans d’autres passages de son œuvre à présenter l’histoire sainte comme étant supérieure à l’histoire païenne, notamment à travers les moralisations qui parsèment sa composition. On en trouve un exemple intercalé entre la victoire sur les Amazones et celle sur Antée, portant la rubrique parlante Qu’encore seroient les grans persecutions sor terre, se li saint home n’estoient (cf. éd. de Visser-van Terwisga, chap. 144). On notera, en anticipant les p. 187 sqq.infra, où nous aborderons la tradition manuscrite de l’HAC1, qu’à côté d’un ensemble réduit de représentants de l’ancien état textuel dont témoigne P, un grand nombre de manuscrits de l’HAC1 omettront les éléments moralisateurs, comme, entre autres, la comparaison étendue entre Hercule et Samson. La présence ou l’absence des éléments qui annoncent et rappellent cette « histoire supérieure », également dans le cadre des épisodes herculéens, paraît comme l’une des distinctions essentielles entre les deux principaux états textuels de l’HAC1.
70 Éd. de Visser-van Terwisga, op. cit., chap. 140, l. 8-12 et chap. 141, l. 1-8 ; ses corrections du ms. P entre crochets.
71 Le moment est illustré dans plusieurs manuscrits de l’HAC, dont l’essentiel des témoins du cycle iconographique D. On peut consulter les tables comparatives des illustrations dans trente-deux manuscrits de l’HAC1 dans l’ouvrage de Oltrogge, Die Illustrationszyklen […], op. cit. Les éléments à propos d’Hercule se trouvent aux p. 77-78 (troisième et quatrième page rabattable).
72 Jung, La légende de Troie en France au Moyen Âge, op. cit., § 3, l. 21.
73 Ibid., § 3, l. 30-32.
74 Quant Herculés entendi lor volentés, il fist apareillier .xij. nés et faire, et si eslist chivaliers teus com lui pleut en Gresse por metre ens et por vengier cest afaire (Ibid., § 5, l. 3-5).
75 Ibid., § 5, l. 18-21.
76 Ibid.
77 Cela peut cependant aussi être une conséquence non voulue de la source utilisée par l’auteur.
78 Éd. de Visser-van Terwisga, op. cit., chap. 138.
- CLIL theme: 3438 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques -- Moyen Age
- ISBN: 978-2-406-15464-8
- EAN: 9782406154648
- ISSN: 2261-0367
- DOI: 10.48611/isbn.978-2-406-15464-8.p.0153
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 01-24-2024
- Language: French