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Les Triumphes excellens et magnifiques du treselegant poete La réception manuscrite et imprimée de la mise en prose attribuée autrefois à Georges de La Forge
- Publication type: Article from a collective work
- Collective work: Traductions imprimées, traductions pour l’imprimé (1470-1550)
- Author: Turbil (Alessandro)
- Pages: 137 to 152
- Collection: Encounters, n° 618
- Series: Medieval civilization, n° 58
LES TRIUMPHES EXCELLENS
ET MAGNIFIQUES DU TRESELEGANT POETE
La réception manuscrite et imprimée de la mise en prose attribuée autrefois à Georges de La Forge
Les Triumphi de Pétrarque furent translatés cinq fois en français entre 1470 et 1550. Parmi ces cinq traductions, ne figure qu’une seule mise en prose qui nous est parvenue en deux versions différentes. La plus ancienne semble avoir vu le jour entre 1470 et 1490, sous la plume d’un poète bourbonnais dont nous ignorons tout, à l’exception du nom, Georges de La Forge, que nous révèle une note manuscrite du xviiie siècle. La seconde version fut probablement produite à Paris quelques décennies plus tard à partir du texte précédent, remanié par un auteur resté anonyme dans le but de rendre le contenu érudit et allégorique du poème plus compréhensible grâce à des amplifications à visée didactique et moralisante.
Ces deux versions, l’une courte et l’autre longue, apparaissent étroitement liées sur le plan génétique, même si elles affichent des différences structurelles et textuelles. La mise en prose des Triumphi connut, en effet, trois phases rédactionnelles tout au long d’une période d’environ quatre décennies : le premier état du texte, le plus ancien, coïncide avec la version courte (1470-1490) ; le deuxième état, intermédiaire, correspond au vaste travail de refonte effectué au tournant du xvie siècle, comme en témoignent les différentes versions de la prose longue qui nous sont parvenues sous forme manuscrite (1500-1510) ; enfin, le troisième état coïncide avec le texte publié par le libraire Barthélemy Vérard en 1514, c’est-à-dire une dernière révision de la prose portant principalement sur la composition et l’ordre des chapitres.
L’intérêt suscité par les Triumphes en proseest attesté par le nombre de témoins ayant conservé la version courte (cinq) et la version longue 138(trois), qui n’est égalé par aucune autre traduction versifiée du poème1. Aujourd’hui, le texte de la version la plus ancienne ou courte est conservé dans trois copies de la fin du xve siècle (Paris, BnF, fr. 1119 et BnF, n.a.fr. 10867 ; München, BSB, cod. gall. 14) et dans deux copies du début du xvie siècle (Paris, B. Arsenal, 3086 et B. Ste-Geneviève, 1125)2. De son côté, la version longue nous est parvenue dans trois manuscrits du début du xvie siècle, tous divisés en deux volumes abondamment illustrés (Paris, BnF, fr. 12424 et B. Arsenal, 5065 ; Wien, ÖNB, 2581-2582 ; Sankt-Peterburg, RNB, fr. F-v-XV-4)3. D’après les catalogues anciens, d’autres exemplaires ont dû aussi exister4. Nous pouvons identifier les premiers possesseurs de ces manuscrits grâce aux armoiries peintes ou aux signatures qui figurent sur certains d’entre eux. En revanche, il est impossible de savoir avec certitude qui commandita le remaniement de la prose. Publié enfin en 1514 par Barthélemy Vérard, le texte connut un grand succès et fut réédité plusieurs fois jusqu’en 1554.
Les caractéristiques et la forme de la prose courte montrent qu’elle fut conçue notamment pour rendre le poème accessible à des destinataires non-italianisants sous une forme proche d’une traduction littérale ou presque5. Les trois témoins les plus anciens de cette traduction présentent des éléments non sans intérêt pour saisir sa toute première circulation. D’un côté, l’exemplaire munichois partiellement illustré (BSB, cod. gall. 14) est le seul manuscrit pouvant nous fournir des 139informations précieuses sur l’arrivée de ce texte à Paris vers 1490, ce qui permet d’établir un terminus ante quem. De l’autre côté, les deux exemplaires Paris, BnF, n.a.fr. 10867 et BnF, fr. 1119 nous permettent, quant à eux, de formuler des hypothèses sur la circulation du texte étant donné qu’ils sont contenus dans deux recueils factices ; l’étude des filigranes et des ouvrages rassemblés avec la prose courte est tout à fait déterminante à ce sujet.
Dans le ms BnF, n.a.fr. 10867, par exemple, le texte de Georges de La Forge occupe les f. 17r-83r (Briquet 13041, Bourg-en-Bresse 1473), tandis qu’au verso du f. 83 figure une transcription partielle de l’épitaphe de Philippe le Bon, que l’on attribue à Jean Molinet. Copié par une main différente et avec une encre différente, mais toujours dans une écriture cursive du xve siècle, ce fragment transmet les vingt-quatre premiers vers du poème consacré au duc de Bourgogne. C’est en nuançant l’hypothèse proposée par A. Armstrong, selon laquelle les manuscrits contenant l’Épitaphe seraient très souvent produits dans le milieu bourguignon, que nous interprétons la présence de ce poème, qui désigne Philippe comme roi au moins en titre, comme un signe de l’orientation culturelle ou des intérêts politiques du possesseur du recueil à l’égard des visées plus séparatistes, voire impériales, de Charles le Téméraire6. La proximité de la datation de l’Épitaphe et des filigranes, en outre, pourrait suggérer que cette partie du codex fut copiée à une époque où les guerres de Bourgogne étaient encore d’actualité. Par ailleurs, l’intérêt pour la culture bourguignonne chez les premiers lecteurs de la mise en prose de Georges de La Forge est signalé aussi par la présence dans le ms BnF, fr. 1119 d’un autre ouvrage étroitement lié du point de vue codicologique à notre texte. Il s’agit de la Danse aux aveugles de Pierre Michault, secrétaire signant auprès de Charles le Téméraire. Ce poème, qui occupe les f. 47r-85v (Briquet 1558-9, Nantes 1476) du manuscrit, partage avec le texte de la prose courte le même ensemble de cahiers (f. 1r-46r : Briquet 12055, Draguignan 1453 [f. 1-24] ; Briquet 1558-9, Nantes 1476 [f. 25-46])7. Même si nous ne disposons pas de preuves 140suffisantes pour identifier un milieu culturel d’origine – hormis la mention d’un auteur présumé, Georges de La Forge, et d’une aire géographique, le Bourbonnais, qui font l’objet de débats depuis plusieurs décennies –, l’étude codicologique des manuscrits précités confirme au moins que notre texte a dû voir le jour entre 1470 et 1490. Si la mise en prose courte peut effectivement être localisée dans le Bourbonnais aux alentours des années 1470, il est probable qu’elle ait été rédigée dans des milieux culturels proches de la cour du duc Jean II de Bourbon et de sa femme Agnès de Bourgogne, ceux que fréquentaient aussi les Robertet, comme nous l’avons suggéré ailleurs8. L’introduction à Paris de ce texte, dont une copie fut illustrée par le Maître de Jacques de Besançon dans un style datant du début des années 1490 ou peu avant, aurait pu se réaliser donc grâce à l’avènement des Beaujeu à la tête du duché de Bourbon en 1488, car le duc Pierre II fut effectivement l’un des clients pour qui cet artiste, connu aussi sous le nom de François le Barbier fils, illustra plusieurs manuscrits9.
141Pour conclure sur la version courte, nous allons nous pencher sur les deux témoins plus tardifs, à savoir les ms Paris, B. Arsenal, 3086 et B. Ste-Geneviève, 1125, pour mettre en évidence le rôle qu’ils jouent dans l’attribution du texte et pour réfléchir à la circulation de ce dernier dans les premières décennies du xvie siècle. L’exemplaire de l’Arsenal transmet un texte fortement altéré par un copiste interventionniste, tandis que la copie de la B. Sainte-Geneviève présente un texte beaucoup plus fiable, proche de celui que transmet le ms BnF, n.a.fr. 1086710.
L’importance de l’exemplaire de l’Arsenal réside surtout dans la note qui mentionne le nom de Georges de La Forge sur l’un des feuillets de garde et qui a dû être ajoutée par le marquis de Paulmy ou par l’un de ses secrétaires. Tirée d’un exemplaire aujourd’hui perdu, connu comme la copie du château d’Anet11, la note est libellée comme suit : « Le Livre des Tryumphes de petrarche translaté (en prose) de langue Tuscanie (sic) par george de la forge bourbonois. Le ms est tres bien conservé orné de tres belles lettres initiales ».
L’autre copie du xvie siècle, conservée à la Bibliothèque Sainte-Geneviève, devait contenir des illustrations pertinentes pour l’étude des milieux dans lesquels circula le texte de Georges de La Forge au tournant du siècle. Cet exemplaire a été mutilé au cours du xviie ou du xviiie siècle, ce qui a entraîné la perte de l’incipit de chaque Triomphe et de toutes les illustrations sauf une12. En effet, celle-ci nous est parvenue grâce à une reproduction à l’encre de Chine qui représente le Triomphe d’Amour (Paris, B. Ste-Geneviève, 965, p. 28). Ses éléments 142iconographiques rappellent les illustrations du même Triomphe qui apparaissent dans l’édition de la prose longue publiée par B. Vérard en 1514 aussi bien que dans une copie (Paris, BnF, fr. 22541, f. 1r) de la version en français du Commento ai Trionfi de Bernardo Ilicino, confectionnée à Rouen entre 1518 et 152113. Il s’avère donc que les copies tardives de la prose courte, en plus de témoigner de la circulation de ce texte à une époque où la version longue était déjà en préparation, voire en circulation, permettent de faire des recoupements intéressants en matière d’iconographie dans toute une série de textes qui ont fait communiquer au cours des deux premières décennies du xvie siècle des cercles culturels différents14.
Tout en englobant la prose la plus ancienne, la version longue présente de nombreuses amplifications et des innovations d’ordre structurel. De plus, il existe quelques différences significatives entre les manuscrits et l’imprimé, tant dans l’ordre des chapitres que dans le texte, de sorte que l’on peut identifier plusieurs versions de ce remaniement. Alors que les deux volumes confectionnés autour de 1508-1510 pour Philippe de Gueldre ou pour Antoine de Lorraine (Wien, ÖNB, 2581-2582) devraient renfermer la version plus soignée du texte, les deux autres témoins – offerts au roi Louis XII (Sankt-Peterburg, RNB, fr. F-v-XV-4) et à Jacques de Daillon (Paris, BnF, fr. 12424 et B. Arsenal, 5065), seigneur du Lude – dévoilent quant à eux des incohérences, parfois étonnantes, par rapport à la composition des Triomphes de Renommée, de Temps et de Divinité15.
Afin de mettre en évidence les caractéristiques de la refonte à laquelle le texte de Georges de La Forge a été soumis au cours de la première décennie du xvie siècle, nous avons dressé le tableau ci-dessous sur la base du système proposé en 1951 par E. H. Wilkins pour désigner de 143manière univoque chaque chapitre du poème à partir de son incipit (Triumphus Cupidinis, A-B-C-D ; Triumphus Pudicitiæ, E ; Triumphus Mortis, Y-F-G ; Triumphus Famæ, H-I-J-K-Z ; Triumphus Temporis, L ; Triumphus Eternitatis, M)16. Dans le cadre de ce travail, nous nous limiterons à quelques observations ponctuelles.
Version Courte |
Version longue (manuscrite) |
Version longue (imprimée) |
||||
Triomphe |
Incipit |
Incipit |
Incipit |
|||
Amour |
A B C D |
N 17r ; F 1r ; B 1r ; A 1r N 22r ; F 4v ; B 4v ; A 4r N 28r ; F 8v ; B 9r ; A 8r N 33r ; F 12r ; B 12v ; A 11r |
A D C B |
P1 3v ; V1 2r P1 8r ; V1 7r P1 14r ; V1 13r P1 18v ; V1 17v |
A+D C B |
a2r+a3r a4v a5v |
Chasteté |
E |
N 39v ; F 16v ; B 18r ; A 15v |
E |
P1 81r ; V1 80r |
E |
e1v |
Mort |
F G H |
N 45r ; F 20v ; B 22r ; A 19v N 51r ; F 24v ; B 25v ; A 23r N 56v ; F 29r ; B 30r ; A 27r |
F G H |
P1 131r ; V1 130r P1 139r ; V1 138r P1 147r ; V1 146r |
F+G H |
g3v+g6v h2v |
144
Renommée |
I J K |
N 61r ; F 31v ; B 34r ; A 30r N 64v ; F 34r ; B 36v ; A 32v N 68v ; F 36v ; B 39r ; A 34v |
I1 J1 K1 I J K |
P2 4r ; V1 180r ; S 3r V2 2r ; S 113v V2 127r ; S 224r S 267r P2 100r ; S 273r P2 119v ; S 290v |
I J K2 J1 K1 |
k1v k4r l3v F3r M4r |
Temps |
L |
N 71v ; F 38v ; B 43r ; A 37r |
L L1 |
P2 138r ; S 307r V2 226r |
L |
P4r |
Divinité |
M |
N 78r ; F 42v ; B 48r ; A 41r |
M M1 |
P2 151r ; S 318v V2 271r |
M |
Q2r |
La séquence des chapitres qui composent le texte de Georges de La Forge (ABCD-E-FGH-IJK-L-M) se distingue principalement pour la structure du Triomphe de Mort en trois sections (FGH) dont H constitue, en réalité, une variante du premier chapitre de Renommée. La prose courte correspond donc au type ‘I.A’, selon la nomenclature élaborée par C. Appel, ou à la famille ‘α1’, d’après G. Guerrini17. Il n’est pas sans intérêt de remarquer que, d’un point de vue macro-textuel, la séquence FGH, puisqu’elle est conservée par l’auteur de la version longue, permet de voir encore un lien entre le ‘texte source’ de Georges de La Forge et le remaniement.
L’ordre des chapitres dans la prose longue, indépendamment de la pluralité des versions disponibles dans Renommée (I, I1, J, J1, K, K1, K2), Temps (L, L1) et Divinité (M, M1), ne correspond en revanche à aucune typologie répertoriée18. De plus, la version manuscrite de ce texte imposant comporte entre treize et seize chapitres, alors que la version imprimée n’en contient que treize, en raison de l’union de A+D et F+G19. Il est donc évident que le remaniement fut retouché à plusieurs reprises avant 1514, tant par rapport à sa forme qu’à sa structure.
145Si l’auteur de la prose longue s’est sans doute appuyé sur le texte de la prose courte (encore décelable, bien que retravaillé, dans les chapitres A, D et C d’Amour, F et G de Mort et I de Renommée), de nombreuses interpolations de nature didactique allant de quelques paragraphes à plusieurs pages amplifient le remaniement d’une façon qui efface, comme dans un palimpseste textuel, la version plus ancienne. L’imprimé de 1514 dévoile également des traits distinctifs par rapport aux Triomphes d’Amour (A et D rassemblés dans le même chapitre), de Mort (G et H rassemblés dans le même chapitre) et de Renommée (K2) que nous n’avons pas la possibilité d’étudier ici dans le détail20.
Le Triomphe de Renommée, tel qu’il apparaît dans la princeps diffusée par Vérard, est sans doute la section qui permet le mieux d’apprécier l’état in fieri du remaniement et l’implication du libraire dans le travail de refonte. En comparant le texte de l’imprimé (IJK2J1K1) avec les versions transmises par les manuscrits, nous remarquons que ni le témoin de Vienne (I1J1K1), ni le témoin de Saint-Pétersbourg (I1J1K1IJK), ni le témoin de Paris (I1JK)21 ne comportent la même séquence. Après le chapitre i (modelé sur le texte de la version courte), se succèdent dans la princeps les chapitres J, K2, J1 et K1, tous attestés dans la tradition manuscrite, à l’exception de K2 qui est vraisemblablement le fruit le plus original de l’activité de découpage et de collage mise en place pour l’édition. Le chapitre que nous avons appelé K2 en raison de son incipit coïncide, d’un côté, avec K (f. l3v-l5v) quant aux vies de quelques philosophes (dont il sera à nouveau question en K1) et, de l’autre, avec I1 (f. l3v-F2v), version amplifiée du chapitre i qui est consacré aux hommes d’armes romains.
La structure singulière du Triomphe de Renommée que propose l’édition Vérard (IJK2J1K1) laisse présumer que le libraire intervint sur différents aspects structurels et textuels, en réassemblant les chapitres à partir d’un ou de plusieurs manuscrits (I1JK ; I1J1K1 ; I1J1K1IJK) qu’il avait à sa disposition. L’imprimé semble parvenir à une sorte de synthèse qui tente de remédier à la grande instabilité de la tradition manuscrite, sans pour autant s’efforcer d’atténuer l’effet redondant qui résulte de la séquence hypertrophiée des chapitres relatifs au Triomphe deRenommée.
146Les pages qui suivent seront consacrées au sort du texte passé à l’imprimé qui, grâce à ses nombreuses réimpressions, a presque joué le rôle d’une vulgate.
On connaît deux tirages portant la même date de l’editio princeps (160 f., 2o, a-l6 A-P6 Q4) publiée à Paris, le 23 mai 1514, par Barthélemy Vérard, fils du grand libraire Antoine22. Cette impression fut réalisée avec le matériel typographique de Gillet Cousteau dont la marque figure au f. a1v23. L’imprimeur profita également du matériel que lui fournit le libraire, en particulier des gravures sur bois et des initiales24. Les soixante-dix-sept illustrations de l’imprimé correspondent toutes à des bois différents, à l’exception de cinq images qui sont répétées deux ou plusieurs fois à l’intérieur du volume. Les illustrations représentant les six Triomphes en pleine page n’avaient jamais apparu chez Vérard 147avant 151425. Le second tirage se distingue d’avec le premier par ces trois aspects : en premier lieu, le décalage dans la distribution du texte à l’intérieur des colonnes qui peut concerner quelques mots, mais aussi plusieurs lignes26 ; en deuxième lieu, plusieurs petites différences intéressent les initiales ornées et les abréviations qui sont parfois rendues sous leur forme étendue27 ; enfin, les bois apparaissent plus abîmés et le décor autour des gravures a été modifié à plusieurs endroits28. Le premier tirage présente par conséquent non seulement une meilleure version du texte mais aussi une mise en page plus soignée par rapport au deuxième, tant au niveau de la composition typographique que de la disposition des décorations.
La fortune éditoriale dont bénéficia la prose longue au fil du temps est illustrée par les sept rééditions diffusées à Paris et à Lyon dans les quarante années après 1514, à savoir : Paris, Jean de La Garde, 1519 (in-2)29 ; Paris, Hémon Le Fèvre, 1519 et 1520 (in-2)30 ; Paris, Jean 148Petit, 1528 (in-2)31 ; Lyon, Romain Morin, 1531 et 1532 (in-8)32 ; Paris, Denis Janot 1538 et 1539 (in-8)33 ; Paris, Jeanne de Marnef, 1545 (in-16)34 ; Paris, Estienne Groulleau, 1554 (in-16)35. L’étude de la tradition imprimée fait clairement apparaître deux tendances : la première, plus conservatrice, concerne les éditions publiées avant 1530 (de Jean de La Garde à Jean Petit) qui se rapprochent davantage de l’editio princeps ; la seconde, plus novatrice, implique un texte partiellement remanié par l’édition lyonnaise de Romain Morin, repris ensuite par les éditions parisiennes de Denis Janot, de Jeanne de Marnef et d’Estienne Groulleau.
Les éditions gothiques publiées entre 1519 et 1528 préservent le format in-folio ainsi que la typographie de l’editio princeps, mais elles remplacent la mise en page à deux colonnes par des longues lignes. L’édition de 1519 publiée par Jean de la Garde (230 f., 2o, a8 b-z6 &4 A-M6 N8 O6) est la première à introduire cette nouvelle mise en page qui inclut, d’ailleurs, des résumés marginaux. Cet imprimé ne reproduit que cinq gravures de l’édition de 1514, tandis que les six illustrations des Triomphes en pleine 149page ont été remplacées par des bois plus petits36. On sait que Gillet Cousteau collabora, entre 1492 et 1523, avec divers libraires parisiens, parmi lesquels trois autres éditeurs des Triumphes en proseen plus de Vérard, à savoir Jean de la Garde, Hémon Le Fèvre et Jean Petit37. Le fonds de cet imprimeur pourrait nous éclairer sur les réseaux éditoriaux de la capitale et mériterait d’être examiné en détail. En effet, la composition typographique de l’édition publiée par Hémon Le Fèvre en 1520 (174 f., 2o, a-z6 &6 A-E6) est encore une fois l’œuvre de Gillet Cousteau. L’imprimeur calque l’édition de Jean de La Garde en reprenant ses manchettes et huit de ses gravures38. La dernière édition qui reproduit le texte conçu par Vérard est celle qu’imprima Philippe Le Noir pour Jean Petit en 1528 (160 f., 2o, a-f8 g-z6 &6 A6) à partir de l’édition de 1520 (Hémon Le Fèvre) dont elle hérite la distribution des initiales et des résumés marginaux39. L’ouvrage imprimé par Le Noir comporte dix-neuf bois, dont deux proviennent du fonds Vérard et trois ont été attribués à Gabriel Salmon (le jeune homme tenant la traîne d’une dame et l’allégorie de la Paix et de la Guerre figurent dans les Menus propos de Gringore de 1521 ; le Triomphe de la Mort, dans les Heures de Nostre Dame de 1525)40. Il est connu que Michel Le Noir copiait les éditions d’Antoine Vérard ; Philippe, actif de 1520 à 1545, ne dérogea donc pas aux habitudes de son père41.
Ce petit corpus d’éditions gothiques parisiennes reproduit le texte édité par Vérard sans le modifier, au point d’en respecter le plus souvent la division des paragraphes. On y ajoute, cependant, des manchettes à partir de 1519. Nous soulignons que la reprise de gravures sur bois déjà en usage constitue une tendance tout à fait conservatrice et qu’aucune édition de la version de 1514 postérieure à 1528 n’est connue.
150Facteur à Lyon, entre autres du libraire Jean Petit42, Romain Morin offre à ses clients une édition des Triumphes imprimée en romain par Denys de Harsy en 1531 et en 1532 (210 f., 8o, a-f8 g4 h-z8 A8 B4 C10 D8)43. Cette édition appartient à une série de petits in-8 dont la mise en page, le type d’illustration, l’adaptation des textes et l’usage prévu sont comparables44. Le libraire ne se limite pas à modifier la typographie des imprimés précédents et à diminuer la taille du format, mais il intervient également dans le texte pour supprimer de nombreux passages45. Le Triomphe de Renommée est la section où le besoin d’alléger le texte de 1514 est le plus manifeste, ce qui se traduit par des transitions qui suppriment la mention de certains personnages et le début de certains chapitres, faussant donc l’ordre établi par Vérard. Le texte hypertrophié de ce triomphe ressort ainsi considérablement réduit, de manière à mettre en valeur certaines vies et anecdotes (le plus souvent reproduites inégalement dans l’édition Morin) au détriment d’autres46. 151Le libraire introduit également une nouveauté concernant la représentation des Triomphes car les différentes sections du volume (à l’exception du Triomphe d’Amour) s’ouvrent sur une page de titre intermédiaire, dans laquelle figurent le même encadrement et la même vignette. À partir de cette édition, l’illustration spécifique des allégories portées en triomphe disparaît.
L’édition en romains publiée par Denis Janot en 1538 et en 1539 (208 f., 8o, A-F8 G4 H-Z8 AA8 BB4 CC-DD8) suit le remaniement de Morin en ce qui concerne le texte et les six pages de titre intermédiaire qui marquent le passage d’un Triomphe à l’autre. Ce modèle est encore respecté dans les deux éditions suivantes. L’édition composée en italique, en 1545, par Jeanne de Marnef (306 f, 16o, A-Z8 Aa-Pp8) reprend le texte de Janot, son époux défunt, sans aucun changement, à l’exception de la réduction du format et de l’ajout d’un huitain de Jacques Bourgeois, signé de sa devise (J’attends le temps). Ce huitain a également été repris dans l’édition d’Estienne Groulleau de 1554 (289 f., 16o, A-Z8 Aa-Nn8). Tout en calquant son ouvrage sur l’imprimé Marnef, le libraire ajoute dans son édition l’adaptation en français par Clément Marot de la chanson pétrarquienne Standomi un giorno alla finestra (Rvf, 323)47. Cette décision d’inclure dans un même recueil le Chant des Visions etles Triumphes en prose marque, en quelque sorte, la fin d’une traduction à succès qui avait atteint son dernier ‘potentiel commercial’ à la fin de l’âge d’or du poème pétrarquien en France ; un âge qui, curieusement, a duré aussi longtemps que la fortune de notre texte (1470-1554) et s’est éteint avec l’imposition des Fragmenta comme modèle poétique du Grand Pétrarquisme français. Nous ne saurions oublier qu’il s’agit des années qui suivent la diffusion de l’épitaphe adressée par le roi François Ier à la dame célébrée par Pétrarque dans 152son chansonnier et la publication par Vasquin Philieul de la première traduction partielle des Fragmenta en français sous le titre de Laure d’Avignon (1548)48.
En conclusion, il est légitime de se demander dans quelle mesure les réseaux culturels et le medium ont contribué à la transformation de notre mise en prose au fil du temps, en raison des différents publics que ce texte a su attirer, d’abord dans le Bourbonnais, ensuite à la cour du roi Louis XII, puis lors de son passage à l’imprimé49. La version publiée en 1514 est celle qui a été la plus marquée par les conditions de sa fruition, qu’il s’agisse de la composition typographique, du format, de l’introduction des manchettes et, plus tard, du remaniement partiel opéré pour faire face à l’hypertrophie du Triomphe de Renommée. Même si les nombreux acteurs qui ont pu participer à la réalisation des différentes versions des Triumphes en prose resteront toujours dans l’ombre, étudier la réception de cet ouvrage a permis de dresser un tableau général de ses itinéraires à travers les deux principaux media de l’époque, le manuscrit et l’imprimé. L’existence d’un réseau aussi étendu et durable de rapports entre différents interlocuteurs, des traducteurs-remanieurs aux professionnels du livre, souligne la spécificité d’une culture dans laquelle la translatio a joué un rôle de premier plan, non seulement sur le plan de la médiation, mais surtout sur le plan de l’appropriation et de l’exploitation d’un produit culturel.
Alessandro Turbil
1 Il s’agit de la traduction en vers alexandrins à rimes plates par Simon Bourgouin (Paris, B. Arsenal, 6480, Paris, BnF, fr. 2500-2501 et BnF, fr. 12423 ; New Haven, Yale UL, Beinecke Libr., 875 ; un exemplaire ayant appartenu à Anne de Polignac, que l’on croyait disparu, se trouve dans une collection privée en Suisse), de la traduction en vers décasyllabiques par Jean Maynier d’Oppède (Paris, BnF, fr. 20020) et encore de la traduction en vers décasyllabiques par Vasquin Philieul (pas de témoins manuscrits connus).
2 Voir Alessandro Turbil, « Autour de l’iconographie du Triomphe d’Amour dans deux mises en prose, entre manuscrit et imprimé », Studi Francesi, no 192, 2020, p. 580-587. Seuls les exemplaires de la Bayerische Staatsbibliothek et de la Bibliothèque Sainte-Geneviève possèdent ou ont dû posséder des illustrations.
3 Le témoin de Saint-Pétersbourg est mutilé du premier tome. Quelques fragments de la prose longue sont également transmis par le ms Paris, BnF, fr. 1118.
4 Voir à ce propos la notice 3604 in Guillaume de Bure, Catalogue des livres de la bibliothèque de feu M. le Duc de La Vallière, Paris, Chez Guillaume de Bure fils aîné, 1783, p. 504.
5 Dans cette version, par exemple, le Triomphe de Chasteté prend la forme d’un dialogue entre Chasteté-Laure, la Mort et l’auteur, ce qui est peut-être son apport le plus original, de sorte qu’il sera repris ensuite par l’auteur de la version longue.
6 Adrian Armstrong, « Avatars d’un griffonnage à succès : “L’Épitaphe du duc Philippe de Bourgogne” de Jean Molinet », Le Moyen Âge, no 113, 2007, p. 25-44.
7 La dernière partie du texte de Georges de La Forge et le texte de la Danse aux aveugles ont été copiées sur du papier présentant le même filigrane, à savoir Briquet 1558-9. Il est ainsi possible d’affirmer que la traduction des Triumphi et la Danse aux aveugles formaient vraisemblablement une section unitaire dès le début et que cette dernière fut réunie ensuite aux autres textes de ce recueil factice.
8 Alessandro Turbil, « Les Tre Corone dans la bibliothèque des Bourbons et l’affaire Pétrarque au tournant du xvie siècle : Moulins-Montbrison l’espace d’un réseau d’italianisants ? », Poco a poco. L’apport de l’édition italienne dans la culture francophone, éd. C. Lastraioli et M. Scandola, Turnhout, Brepols, 2020, p. 265-281. L’identification des relations ayant lié, autour des années 1470, les Robertet, le duc de Bourbon et tel Florimond de La Forge, seigneur de Genétines dans le Bourbonnais, nous a poussé à considérer cette attribution à Georges de La Forge comme vraisemblable. En outre, les liens familiaux unissant le duc Jean II avec la maison de Bourgogne, ainsi que sa participation à la Ligue du Bien Public, dans laquelle il s’allia au comte de Charolais, futur Charles le Téméraire, et à bien d’autres, dont le duc François II de Bretagne, permettraient en fait d’expliquer les éléments d’origine bourguignonne et bretonne que nous avons pu reconnaître dans les témoins plus anciens de cette traduction.
9 Cette datation nous a été suggérée par M. Deldicque, que nous souhaitons remercier ici. Parmi les possesseurs des manuscrits illustrés par le Maître (tout comme des imprimés sur vélin réalisés en collaboration avec le libraire Antoine Vérard à partir de 1492), figurent de hauts fonctionnaires et des membres de l’aristocratie de cour, outre que des souverains comme Charles VIII, Anne de Bretagne, Louis XII et encore Henry VII d’Angleterre. En particulier, entre 1493 et 1495, cet artiste exécuta les illustrations d’au moins quatre exemplaires des Statuts de l’ordre de Saint Michel destinés aux plus hauts dignitaires de cet ordre. L’un de ces exemplaires, le ms New York, PML, M. 20, fut réalisé pour le duc Pierre II de Bourbon, qui devait aussi commanditer au Maître une copie (Paris, BnF, fr. 14363) pour l’offrir, vers 1493 ou 1494, au roi Charles VIII. Voir à ce propos Mathieu Deldicque, « L’enluminure à Paris à la fin du xve siècle : Maître François, le Maître de Jacques de Besançon et Jacques de Besançon identifiés ? », Revue de l’Art, no 183, 2014, p. 9-18, et Mathieu Deldicque et Matthieu Desachy, « Le nom des anges. Le Maître de Jacques de Besançon et les peintures du Jugement dernier de la cathédrale d’Albi », Patrimoines, revue de l’Institut national du patrimoine, no 9, 2012, p. 73, n.11.
10 Voir Alessandro Turbil, Pétrarquiser : pour un corpus numérisé du lexique pétrarquiste des origines, Thèse de doctorat sous la direction de G. Parussa et P. Cifarelli, Université de Turin – Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, 2018.
11 L’inventaire de la librairie d’Anet, qui fut dressé en 1724, atteste la présence d’un exemplaire historié de la plus ancienne mise en français des Triumphi en ce termes : « Les Triomphes de Petrarque translatez en prose de langue toscane, par George de la Forge, Bourbonois, avec les Complaintes d’Alain Chartier, in-folio, Ms sur vélin, dans lequel se trouve une miniature de la grandeur du volume, qui est d’une très grande beauté » (Ernest Quentin-Bauchart, Les femmes bibliophiles de France, Paris, Morgand, 1886, p. 316, no 89).
12 La description assez minutieuse que l’abbé Claude du Molinet fournit de ce codex, dans son Inventaire des principaux manuscrits de la bibliothèque de l’abbaye de Sainte-Geneviève (Paris, B. Ste-Geneviève, 965), confirme que son entrée dans la collection abbatiale eut lieu en 1681 et que sa mutilation ne put se produire qu’après 1687.
13 Cf. Alessandro Turbil, « Autour de l’iconographie du Triomphe », op. cit., p. 580-587. Ce manuscrit fut exécuté à Rouen pour Anne Malet de Graville. Voir Myra Dickman Orth, Renaissance manuscripts : the sixteenth century, Harvey, Miller Publishers, 2015, vol. 2, p. 230.
14 Au moins trois milieux intellectuels sont concernés, à savoir : le rouennais, où la glose d’Ilicino a été traduite en français en 1503 ; la cour de Louis XII, où la version manuscrite de la prose longue a circulé dans la première décennie du xvie siècle ; et l’atelier de B. Vérard, où a été réalisée la version publiée en 1514.
15 Pour la datation des témoins voir Myra Dickman Orth, Renaissance manuscripts, op. cit., vol. 2, p. 45.
16 Ernest Hatch Wilkins, The Making of the ‘Canzoniere’and other Petrarchan Studies, Roma, Edizioni di Storia e Letteratura, 1951, p. 379-406. Pour signaler l’incipit de chaque chapitre, nous faisons référence à l’édition critique des Triumphi établie par Vinicio Pacca et Laura Paolino (Trionfi, Rime estravaganti, Codice degli abbozzi, Milano, Mondadori, 1996), en incluant aussi les chapitres dont le statut se situe entre le fragment et le brouillon. A : Al tempo che rinova i mie’ sospiri. B : Era sì pieno il cor di meraviglie. C : Poscia che mia fortuna in forza altrui. D : Stanco già di mirar, non sazio ancora. E : Quando ad un giogo ed in un tempo quivi. Y : Quanti già ne l’età matura ed acra. F : Quella leggiadra e glorïosa donna. G : La notte che seguì l’orribil caso. H : Nel cor pien d’amarissima dolcezza. I : Da poi che Morte triumphò nel volto. J : Pien d’infinita e nobil meraviglia. K : Io non sapea da tal vista levarme. Z : Poi che la bella e glorïosa donna. L : De l’aureo albergo, co’ l’aurora inanzi. M : Da poi che sotto ’l ciel cosa non vidi. Voici les cotes des exemplaires de la version courte et de la version longue de notre mise en prose : (N) Paris, BnF, n.a.fr. 10867 ; (F) Paris, BnF, fr. 1119 ; (B) München, BSB, cod. gall. 14 ; (A) Paris, B. Arsenal, 3086 ; (P1) Paris, B. Arsenal, 5065 ; (P2) Paris, BnF, fr. 12424 ; (V1) Wien, ÖNB, 2581 ; (V2) Wien, ÖNB, 2582 ; (S) Sankt-Peterburg, RNB, fr. F-v-XII-4. La mutilation subie par le ms Paris, B. Ste-Geneviève, 1125 concerne tous les incipit.
17 Carl Appel, Die Triumphe Francesco Petrarcas im kritischen Texte,Halle, Max Niemeyer 1901, p. 106 ; Gemma Guerrini, « Il sistema di comunicazione di un ‘corpus’ di manoscritti quattrocenteschi : i Trionfi del Petrarca », Scrittura e civiltà, no 10, 1986, p. 175.
18 Cette disposition s’expliquerait à notre avis par une intention éditoriale. Le chapitre B, qui est placé à la fin du TC, est le seul à présenter des amplifications, tandis que les précédents (ADC) reproduisent assez fidèlement le texte de la version courte. Cette approche nous semble avoir été adoptée aussi dans les premiers chapitres de TM et TF.
19 Le témoin de Saint-Pétersbourg, avant la mutilation, devait transmettre la séquence de chapitres suivante : ADBC-E-FGH-I1J1K1IJK-L-M.
20 Une étude plus approfondie paraîtra dans l’édition critique que nous sommes en train de préparer.
21 Dans ce dernier cas, toutefois, la présence d’au moins un autre chapitre (mutilé) est mentionnée au f. 99v (S’ensuyt la quarte partie du triumphe de renommee).
22 Jacques-Charles Brunet, Manuel du Libraire et de l’Amateur de Livres, Paris, Firmin-Didot, 1863, vol. IV, c. 560 ; French Vernacular Books. Books published in the French language before 1601, éd. A. Pettegree et al., Leiden – Boston, Brill, 2007, no 43016 ; John Macfarlane, Antoine Vérard, Londres, Bibliographical Society, 1900, no 286 ; Brigitte Moreau, Inventaire chronologique des éditions parisiennes du xvie siècle, Paris, Imprimerie municipale, 1977, vol. II, p. 271, no 933 ; Ruth Mortimer, Catalogue of Books and Manuscripts, part 1 : French 16th century books, Cambridge MA, Harvard University Press, 1964, no 423 ; USTC no 26291. Exemplaires : Cambridge (États-Unis), Harvard UL, Houghton Libr., Typ 515 14 683 [tirage 1] ; Edinburgh, NLS, Newb 4428 [tirage 2] ; Londres, BL, General Reference Collection 83-l-1 [2] ; Oxford, Bodl. Libr., Douce P 27 [2] ; Paris, B. Arsenal, Fol. B-742-Rés [2] ; Paris, BnF, Rés-Yd-80 [1] ; Paris, BnF, Rés-Yd-81 [1] ; Rouen, BM, Dieusy g 38 [1]. Le tirage 1 dévoile une meilleure version du texte aussi bien qu’une mise en page plus soignée par rapport au tirage 2 ; ce dernier apparaît postérieur à la lumière de l’état de ses bois, de sa composition plus imprécise et de quelques omissions concernant, en particulier, quatre colonnes de texte et une gravure.
23 L’impression a été réalisée avec les caractères typographiques B3 [105mm] et B12 [84mm]. Voir Frank Isaac et David Shaw, Typographical Catalogue of books printed in France 1501-1520 in the British Library, 2020 : 83.1.1 (en ligne). La marque typographique de Gillet Cousteau (f. a1v) provient du fond Vérard. Même si les armes de France couronnée, soutenues par deux anges sont également représentées dans la marque typographique de Barthélemy Vérard (f. a1r), les deux dispositifs diffèrent par rapport à certains éléments (en particulier, dans la caractérisation des anges et de la couronne) et peuvent être identifiés avec Renouard 1089 (Barthélemy Vérard) et avec Renouard 14 (Gillet Cousteau).
24 Louis-Gabriel Bonicoli, La production du libraire-éditeur parisien Antoine Vérard (1485-1512) : nature, fonctions et circulation des images dans les premiers livres imprimés illustrés, Thèse de doctorat sous la direction de J.-P. Caillet, Université Paris Ouest-Nanterre La Défense, 2015, p. 57-60. C’est par exemple le cas de l’illustration concernant Didon et Sychée, qu’Antoine Vérard avait déjà employée dans la Bible des poètes publiée en 1493, en 1498 et encore en 1507 (Guy Bechtel, Catalogue des gothiques français. 1476-1560, Paris, Librairie Giraud-Badin, 2010, P-119).
25 Voir Guy Bechtel, Catalogue, op. cit., P-119 ; Joseph Burney Trapp, « Remarques sur l’iconographie des Trionfi de Pétrarque », La Postérité répond à Pétrarque : sept siècles de fortune pétrarquienne en France, éd. E. Duperray, Paris, Beauchesne, 2006, p. 219-248 ; A. Turbil, « Autour de l’iconographie du Triomphe », op. cit., p. 580-587.
26 Voir par exemple au f. a3r col. b (tirage 1, dernière ligne : « en me tournant de ça et de » ; tirage 2 : « et ravisant certaines choses »), au f. a4v col. a (emplacement des pieds de mouche), au f. l6v (tirage 1, en haut : col. a de 6 lignes et col. b de 5 lignes ; tirage 2, en haut : col. a de 7 lignes et b de 6 lignes) ou encore au f. G2r (tirage 1, en bas : col. a et b de 10 lignes ; tirage 2, en bas : col. a et b de 13 lignes). L’absence dans le tirage 2 d’un passage de quatre colonnes qui couvre les f. A2v-A3r dans le tirage 1 se veut une preuve supplémentaire de l’antériorité de ce dernier tirage. Nous excluons catégoriquement l’hypothèse d’une mutilation ou de la perte d’un feuillet parce que A2v et A3r, qui manquent dans le tirage 2, appartiennent à deux feuillets différents dans le tirage 1.
27 Voir f. a1r ‘L’ ; a1v ‘V’ ; a3r ‘C’ ; a4r ‘S’ ; c1r ‘Q’ ; c2v ‘H’ ; c3r ‘V’ ; d4v ‘L’ ; et passim.
28 Voir f. b6v ; c2r ; c4r ; d4r ; f1v ; g4v ; g6v ; i3v ; k1v ; l6v ; B5v ; F3r ; L2r ; L3v ; M4r ; N3r ; N4r ; N5v et passim. La forme du décor autour des gravures a été modifiée à plusieurs endroits (voir f. b6v ; c2r ; c4r ; d4r ; f1v ; g4v ; g6v ; i3v ; k1v ; l6v ; B5v ; F3r ; L2r ; L3v ; M4r ; N3r ; N4r ; N5v et passim) et plusieurs bois apparaissent plus abîmés dans le tirage 2 (voir f. c3v ; f4v : g2v ; F3v ; F6v ; H6r ; I1r ; K2r ; N3r ; O3v ; P6v). Nous signalons également l’omission d’un bois, dans le tirage 2 au f. d1v, à laquelle l’imprimeur suppléa en ajoutant de l’espace vide autour du titre « De cynara et mirrha sa fille » ; et encore, dans la vignette au f. e6v, nous remarquons le changement de l’apparence et de la posture de l’homme.
29 Guy Bechtel, Catalogue, op. cit., P-120 ; French Vernacular Books, op. cit., no 43018 ; Brigitte Moreau, Inventaire chronologique, op. cit., p. 556, no 2172 ; USTC no 26404.
30 Guy Bechtel, Catalogue, op. cit., P-121 ; Jacques-Charles Brunet, Manuel du Libraire, op. cit., c. 561 ; French Vernacular Books, op. cit., p. 544, no 43017 et 43019 ; Brigitte Moreau, Inventaire chronologique, op. cit., p. 619, no 2447 ; USTC no 95503 et 26429.
31 Guy Bechtel, Catalogue, op. cit., P-122 ; Jacques-Charles Brunet, Manuel du Libraire, op. cit., c. 561 ; French Vernacular Books, op. cit., no 43024 et 43023 ; Brigitte Moreau, Inventaire chronologique des éditions parisiennes du xvie siècle, Paris, Imprimerie municipale, 1985, vol. III, p. 434, no 1585 ; Ruth Mortimer, Catalogue of Books, op. cit., no 424 ; USTC no 55610.
32 Jean Babelon, La Bibliothèque française de Fernand Colomb, Paris, H. Champion, 1913, no 172 ; Henri-Louis Baudrier, Bibliographie lyonnaise, Lyon, L. Brun, 1901, vol. V, p. 373-374 ; Jacques-Charles Brunet, Manuel du Libraire, op. cit., c. 561 ; French Vernacular Books, op. cit., no 43027 et 43030 ; USTC no 66252 et 22439.
33 Jacques-Charles Brunet, Manuel du Libraire, op. cit., c. 561-562 ; French Vernacular Books, op. cit., no 43041 et 43042 ; Brigitte Moreau, Inventaire chronologique des éditions parisiennes du xvie siècle, Paris, Imprimerie municipale, 2004, vol. V, p. 419, no 1463 ; Ruth Mortimer, Catalogue of Books, op. cit., no 426 ; August Émile Picot, Catalogue des livres composant la bibliothèque de feu M. le Baron James de Rothschild, Paris, Morgand, 1884, II, p. 653, no 1026 ; Stephen Rawles, Denis Janot : Parisian Printer and Bookseller (fl. 1529–1544) : A Bibliographical Study, Warwick, Université de Warwick, 1976, no 84 et 106 ; USTC no 57084.
34 Herbert M. Adams, Catalogue of Books Printed on the Continent of Europe, 1501-1600 in Cambridge libraries, Cambridge, Cambridge University Press, 1967, P 839 ; Jacques-Charles Brunet, Manuel du Libraire, op. cit., c. 562 ; French Vernacular Books, op. cit., no 43048 ; USTC no 49538.
35 Henri-Louis Baudrier, Bibliographie lyonnaise, op. cit., 1895, vol. I, p. 203 ; Jacques-Charles Brunet, Manuel du Libraire, op. cit., c. 562 ; French Vernacular Books, op. cit., no 43052 ; Jeroom Machiels, Catalogue van de boeken gedrukt voor 1600 aanwezig op de Centrale bibliotheek van de Rijksuniversiteit Gent, Gent, Centrale Bibliotheek, 1979, P 247 ; USTC no 60317.
36 Pour l’édition de Jean de la Garde nous faisons référence à la notice d’autorité de la BnF (BP16_103835) aussi bien qu’aux descriptions fournies dans les répertoires. Voir supra n. 30.
37 Pour la liste des imprimés attribués à cet imprimeur voir Frank Isaac et David Shaw, Typographical Catalogue, op. cit. : Gillet Cousteau (en ligne).
38 Voir la notice d’autorité de la BnF BP16_104108. Une version antérieure de l’édition Le Fèvre (USTC no 95503), datant de 1519 et dont aucun témoin n’a survécu, est mentionnée dans les répertoires. Voir supra n. 31. Cf. Frank Isaac et David Shaw, Typographical Catalogue, op. cit. : C.57.f.3 (en ligne).
39 Jean Petit travailla avec Gillet Cousteau jusqu’en 1523, date de décès de ce dernier.
40 Voir la notice d’autorité de la BnF BP16_105775.
41 Mary Beth Winn, Tristan, chevalier de la Table Ronde, vol. 1, Paris, Classiques Garnier, 2020, p. 33.
42 Henri-Louis Baudrier, Bibliographie lyonnaise, op. cit., 1901, vol. V, p. 357-377.
43 On dénombre en réalité CCX f. (au lieu de CCVIII) car la foliotation reprend à LI, après LII. L’édition de 1531 et la réimpression de 1532 ont la même fasciculation ; à la page de titre, elles présentent l’année d’édition (1531 ou 1532), tandis que les colophons citent la même date, soit M.D.XXXI.
44 Voir William Kemp, « Les petits livres français illustrés de Romain Morin (1530-1532) et leurs dérivés immédiats », Il Rinascimento a Lione, éd. A. Possenti et G. Mastrangelo, vol. 1, Roma, Edizioni dell’Ateneo 1988, p. 465-525.
45 William Kemp, « Les petits livres français », op. cit., p. 484, 499, 501, 505 et 511-512. Les variantes textuelles introduites par Petit nous semblent réapparaître chez Morin avec des corrections, probablement tirés de l’édition Le Fèvre. L’examen de quelques passages à proximité des initiales révèle les variantes qui suivent : Le Fèvre c1r “Peu de temps” et “Quant le” ; Petit b4r-v “Et puis peu de de temps” et “Et quant” ; Morin d4r “Peu de Temps” “Et quant” ; et encore Le Fèvre d2v-d3r “Apres que mirrha”, “Apres que mirrha” et “Apres les promesses” ; Petit c3r-c3v “Apres que Myrrha”, “Et Quant Myrrah” et “Alors apres les promesses” ; Morin f2v-f3v “Apres que mirrha”, “Apres que mirrha” et “Apres les promesses”.
46 Voici une liste de quelques suppressions et réductions qui ont affecté le texte de Renommée : Morin s3r de Massinissa (I ch.) à Sémiramis (II ch.), 5 colonnes (Vérard l1ra-l2ra) ; M s4r-vde Nabuchodonosor à Aristote-Pythagore (III ch.), 5½ col. (V. l3ra-l4rb) ; M s4vde Pythagore aux deux Fabius, 22 col. (V. l4va-A2vb) ; M s5vdes deux Caton (avant de traiter du Censeur) aux deux Paul, 32 col. (V. A3rb-B5rb) ; M s6vde deux Paul à Marcus Atilius Regulus, 16 col. (V. B6ra-C3vb) ; dans Marcus Atilius Regulus, 6 col. (V. C4rb-C5vb) de ‘la mémoire de luy soit honnoree et prisee’ à ‘Si Actilius eust voulu obtemperer’ ; M s6v-7rd’Actilius Regulus à Midas, 5 col. (V. C5vb-D1ra) ; M s7r-v de Midas à Marcus Furius Camillus, 1 col. (V. D1vb-D2ra) ; M t2r de Marcus Furius Camillus à Horatius Coclès, 12½ col. (V. D3rb-D5rb) ; M t3rd’Horatius Coclès à Pompée, 5 col. (V. D5vb-D6vb) ; M t3v-t4rde Pompée à Sylla, 1 col. (V. E1rb) ; M t4r-vde Sylla à Marius, 7½ col. (V. E1va-E3vb) ; M t4v-t5r de Marius à Tiberius Gracchus, 2 col. (V. E3vb-E4rb) ; M t6r-v de Quintus Metellus à Vespasien, 2½ col. (V. E4vb-E5rb) ; M t6v de Vespasien à Nerva-Trajan, 1½ col. (V. E5va-E5vb) ; M t7r-vde Nerva-Trajan (abrégé) à Numa Pompilius, 6 col. (V. D8va-F1vb) ; M v1v de la liste des rois de Rome (III ch.) à Hannibal (V ch.), 2 col. (V. F2vb-F3va), et passim.
47 En 1538 et 1539, Denis Janot avait déjà réuni le Chant des Visions avec la traduction des Triumphi due à la plume de Jean Maynier d’Oppède. Ce volume, commercialisé avec Charles et Arnoul L’Angelier, constitue le premier recueil ‘pétrarquiste’ paru en France. Voir Jean Balsamo, « François Ier, Clément Marot et les origines du pétrarquisme français (1533-1539) », Les poètes français de la Renaissance et Pétrarque, éd. J. Balsamo, Genève, Droz, 2004, p. 35-51.
48 En 1555, ce docteur en droit de Carpentras publie enfin à Avignon chez Barthélemy Bonhomme l’intégralité des Rerum vulgarium fragmenta et des Triumphi en français sous le titre Toutes les euvres vulgaires de Françoys Petrarque.
49 William Kemp et Mathilde Thorel, « Édition et traduction à Paris et à Lyon 1500-1550 : la chose et le mot », Histoire et civilisation du livre, no 4, 2008, p. 133.
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- ISBN: 978-2-406-16459-3
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- ISSN: 2261-1851
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