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La Littera manuscrite à l’épreuve de l’imprimerie Le cas du De eruditione principum de Guillaume Peyraut (xiiie siècle)
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Traductions imprimées, traductions pour l’imprimé (1470-1550)
- Auteur : Lorillard (Claire)
- Pages : 213 à 226
- Collection : Rencontres, n° 618
- Série : Civilisation médiévale, n° 58
LA LITTERA MANUSCRITE
À L’ÉPREUVE DE L’IMPRIMERIE
Le cas du De eruditione principum
de Guillaume Peyraut (xiiie siècle)
L’absence problématique du
De eruditione principum
dans les corpus imprimés
Un best-seller médio-latin
Les chercheurs recensent aujourd’hui la somme considérable de 52 exemplaires manuscrits du De eruditione principum en latin1. Ces copies sont réparties sur plusieurs siècles : la plus ancienne date de 13032, les plus récentes débordent sur le xive siècle et un ultime témoin du xviie siècle se trouve à Florence3. En revanche, nous ne connaissons pas d’incunable de l’œuvre, et si le texte latin a été imprimé, ce fut seulement à partir de 1570, quand il a été confondu avec l’Opusculum de regimine principum ou De regno ad regem Cypri, et donc fautivement intégré aux œuvres complètes de Thomas d’Aquin4. Il y 214figure encore aujourd’hui comme texte apocryphe, Opera aliqua false adscripta Thomae5, dans le Corpus thomisticum (en ligne). Même s’il n’a été imprimé que tardivement et fautivement, le traité de Guillaume s’est donc vu garantir une diffusion très large dans sa version en latin. Sa traduction française n’a en revanche pas connu la même fortune, loin de là. Ne subsistent en effet que trois copies manuscrites de la première traduction, que nous désignerons sous le titre de Livre de l’erudicion des princes, à l’instar du choix fait par la base ARLIMA. Ces copies datent de 13726, de 1375-13807, du milieu du xve siècle8, et il faut attendre 1857 pour que le miroir de Guillaume soit traduit une seconde fois en français par l’abbé Blandel9. Si le traité de frère Guillaume a réussi à « survivre » jusqu’à aujourd’hui, il appartient depuis longtemps aux textes dont la lecture et l’étude sont devenues anecdotiques, même dans les milieux ecclésiastiques, même en latin, et malgré sa diffusion sur internet. Sa traduction en français a, quant à elle, fait l’objet d’un véritable oubli dès le xve siècle, quand le traité bénéficiait encore paradoxalement d’une grande renommée dans sa version latine. Pourtant, cette traduction a très certainement participé à la construction de l’image que Charles V souhaitait laisser à la postérité et qui lui permit de légitimer le trône des Valois.
Le Livre de l ’ erudicion des princes
dans le programme du « sage roi »
En digne miroir augustinien, le traité de Guillaume pense le pouvoir comme une charge héritée du péché originel, qui oblige l’homme à œuvrer pour son salut. Seule une vie exemplaire de type christique, pieuse, pacificatrice, humble et bienveillante peut permettre à un gouvernant de 215servir de modèle aux autres, de les régir10 en œuvrant pour la paix et la justice, et de légitimer ainsi son pouvoir. La signature de Charles V à la fin du codex de Besançon11 atteste que la copie manuscrite de 1372 faisait bien partie de la librairie royale et qu’elle fut sans doute commanditée par le roi lui-même. La composition du codex, sa foliotation et son index indiquent par ailleurs que Le Livre de l’erudicion des princes ouvrait un recueil composé de huit autres textes moraux en traduction, ce qui appuie la thèse de son importance aux yeux du roi. Ce traité était suivi d’une traduction du DeRegimine principum de Gilles de Rome, ce qui n’est pas non plus un hasard. Les deux traités proposent de gouverner pour le « bien commun » : l’un en présente la justification théologique, tandis que l’autre en développe le versant pratique et aristotélicien. Alors qu’il possédait des exemplaires de ces textes en latin, Charles V les fit quand même traduire et il les offrit à la lecture de tous, au sein de la « librairie du Louvre ». La visibilité et la lisibilité du Livre de l’erudicion des princes au milieu des autres ouvrages de sagesse du Louvre nous obligent à lui rendre sa place dans l’histoire et dans le projet politique royal : parce que c’est un miroir traduit, le roi montrait ainsi que « le prince ne peut bien gouverner que si le modèle du bon gouvernement est connu et reconnu de tous » (C. Galderisi)12, y compris de ceux qui ne lisent pas le latin ; parce que c’est un miroir chrétien, Charles V tendait à sa cour l’image d’un roi érudit et « sage » car « très chrétien13 », soucieux des enseignements de 216frère Guillaume. Les riches enluminures qui accompagnent le propos présentent ainsi le roi en oraison, avant d’être sollicité par son conseil. Le panégyrique royal patiemment brossé par Christine de Pizan dans Le livre des faits et bonnes mœurs du sage roi Charles V confirmera d’ailleurs a posteriori que le roi a cherché à suivre point par point le programme du De eruditione principum, jusque dans ses aspects les plus monastiques. La traduction du traité de frère Guillaume semble avoir ainsi joué son rôle dans le « programme systématique14 » de la librairie royale et dans la mise en scène d’un pouvoir pensé à l’aune de la « bonne réputation » (Christine de Pizan) : cette traduction matérialise le lien de Charles V avec Dieu et avec son peuple, et entraîne avec elle l’ensemble de la lignée des Valois, dont ce miroir reflète l’éducation, même si le propos monastique trouvera vite ses limites avec les successeurs de Charles V. Cette traduction concourut donc pleinement, dans la dernière partie du xive siècle, à défendre leur lignée et leur légitimité, leur ouvrant ainsi l’accès à la souveraineté du rex imago Dei, face aux prétentions des Anglais, du Pape et des ducs, et suite aux « ordalies » des épidémies de peste et les défaites de L’Écluse, Crécy, Poitiers.
Les raisons de l’absence du Livre de l’erudicion
des princes dans les corpus imprimés
La dispersion des copies manuscrites
avant l’invention de l’imprimerie
La raison la plus probable à l’absence de cette traduction dans les corpus imprimés tient sans doute beaucoup à son invisibilisation précoce dans les inventaires. La première copie, le ms Besançon BM 434, fut répertoriée par le bibliothécaire de la librairie du Louvre, Gilles Mallet, en 1373, 1411, 1413, après quoi le codex disparaît des inventaires15, passe entre les mains de plusieurs possesseurs plus ou 217moins légitimes, dont l’un fait même gratter l’ex-libris royal de 1372, qui attribuait le codex à Charles V. Le codex est finalement redécouvert en 1882 par Auguste Castan dans le fonds de la bibliothèque de Besançon16. Il est assez facile d’imaginer pourquoi cette copie n’est pas arrivée jusqu’à un imprimeur. La deuxième copie, le ms Paris, BnF fr. 1728, se trouve dans un codex qui appartenait également, selon Delisle, à la librairie de Charles V. C’est une réplique partielle du premier recueil, non répertoriée par Gilles Mallet mais produite, d’après L. Delisle, dans l’atelier royal à destination d’un prince ou d’un membre de la famille royale17. L’histoire de cette copie n’est pas connue avant son apparition dans les inventaires au xviiie siècle, quand elle reçut l’estampille « BIBLIOTHECAE REGIAE », qui l’intégra enfin à la Bibliothèque royale. La troisième copie est plus tardive : l’écriture gothique cursive et les modifications apportées aux graphies des deux premiers manuscrits indiquent qu’elle date du xve siècle. Les armoiries et une signature biffée en fin de manuscrit laissent supposer qu’elle a appartenu à Jean d’Averton, seigneur du Maine vers 1450-1460, mais jusqu’à présent cette copie n’a pas été datée précisément. Elle fit partie au xviie siècle du fonds Le Tellier18 et revint donc ensuite à la bibliothèque Sainte-Geneviève. Nous manquons d’informations sur les conditions de sa fabrication, mais si elle a réellement appartenu aux seigneurs du Maine au xve siècle, sa localisation dans l’ouest de la France l’écartait des lieux de production et des trajets des imprimés, même si l’atelier La Tour et Morel d’Angers19 n’était pas très loin. L’accès aux trois copies du Livre de l’erudicion des princes qui nous sont parvenues semble donc 218avoir été un peu difficile et c’est sans doute la raison la plus évidente de la non-diffusion de la traduction sous forme imprimée. Mais cela n’explique pas pourquoi le traité latin, fort de ses 52 manuscrits, n’a, lui non plus, pas fait partie des premières vagues d’impressions, ni pourquoi il n’a pas été retraduit.
Une identification floue
Le référencement du De eruditione principum est problématique depuis le xiiie siècle. L’hypothétique Guillaume Peyraut (c. 1200-c. 1271) n’a « signé » aucune de ses œuvres et ne se désigne que sous l’étiquette de « frère prêcheur ». Comme le rappelle l’enquête scrupuleuse d’A. Dondaine20, son existence et ses œuvres ne nous sont connues que par le témoignage de ses contemporains dans l’ordre dominicain : les frères Gérard de Frachet21, Salimbene22, Étienne de Bourbon23. Leurs témoignages sont repris par Bernard Gui vers 127824 et par certains copistes des œuvres latines de Guillaume lors des siècles suivants25. La graphie de son nom varie d’un témoignage à l’autre, puis d’une étude à l’autre26. En plus de ce problème de nom, les copistes ont attribué le De eruditione principum à Humbert de Romans27 ou Vincent de Beauvais28, ou encore, nous l’avons signalé, à Thomas d’Aquin29. Toutes ces attribu219tions ont été discutées au début du xviiie siècle par Quétif et Echard30 puis, par les chercheurs aux xixe et xxe siècles, sans pour autant que la question soit tranchée, puisque l’attribution du De eruditione principum est encore litigieuse aujourd’hui. Pourtant, les fausses attributions ne peuvent être rendues responsables de la mise à l’écart du traité par les imprimeurs : elles ont même certainement participé au succès du texte latin lors des xiiie, xive et xve siècles et elles ont peut-être aussi poussé Charles V à en commanditer une traduction. Elles auraient tout aussi bien pu retenir l’attention des imprimeurs dès la fin du xve siècle, à une époque où le nom d’auteur, surtout s’il est prestigieux, joue un rôle publicitaire majeur et permet d’organiser les corpus imprimés31. À défaut d’auteur, il arrivait aussi que le nom du traducteur joue ce rôle d’affichage. Malheureusement, dans le cas qui nous occupe, le traducteur est lui aussi un « homme invisible32 », qui ne se nomme pas et qui n’écrit malheureusement rien sur son « geste traductif ». Dotée d’une attribution auctoriale floue et privée de l’aura d’un traducteur connu, il était difficile pour cette traduction de passer les portes de l’imprimerie33. En outre, si le titre du traité de Guillaume est resté fixe en latin, son titre français est très fluctuant. Le français propose en effet plusieurs termes équivalents pour traduire le latin eruditio et l’intitulé varie ainsi 220d’une copie à l’autre, il varie au sein même des index liminaires, et il varie encore de chapitre en chapitre : Livre de l’enseignement des princes, ou Livredu gouvernement des roys et des princes, ou Livredu gouvernement des princes, ou Livrede l’enseignement des roys et des princes ou enfin Livre de l’erudicion des princes. À ce brouillage interne à l’œuvre s’ajoute la confusion avec le titre de deux miroirs traduits parmi les plus célèbres de la période : Li Livres du gouvernement des rois et des princes de Gilles de Rome, traduit par Henri de Gauchi, ou encore la traduction du Secretum secretorum d’Aristote, qui est édité par Vérard en 1497, sous le titre de Livre du gouvernement des roys et des princes également34. Le marché des éditions était saturé de traductions portant des titres potentiellement identiques et laissait finalement peu de place au traité de Guillaume.
Une traduction de qualité discutable
La qualité de cette traduction peut aussi expliquer sa mise à l’écart. L’édition du texte a montré que le traducteur et les trois copistes transposent médiocrement le texte latin. Cette traduction présente en effet une langue française intermédiaire, qui restitue mal les concepts théologiques, qui calque souvent la syntaxe latine, selon la tendance des traductions effectuées entre 1370 et 1400, et qui accumule les leçons : nombre de phrases offrent alors de véritables défis de compréhension au lecteur, comme le montre l’exemple suivant :
Tales Christianos imperatores dicimus esse felices interim spe, postea re ipsa futuros, cum id, quod expectamus, advenerit 35 .
Tiex empereres disons nous estre beneurez crestiens entre ceu et en aprés yceulz a estre en celle chose, comme ce sera venu que nous entendons36.
Le traducteur fait ici deux mélectures : interim (pendant ce temps / dans cette vie) a sans doute été lu interid (entre cela) ; spe (avec l’espoir) a 221dû être lu se (lui-même) puis improprement rattaché au syntagme postea re ipsa futuros, qui sera traduit : et en aprés yceulz a estre en celle chose. Si les sous-entendus de la phrase latine peuvent la rendre obscure, la phrase française, elle, ne veut plus rien dire. La faute en incombe certainement en grande partie à la qualité de la copie latine qui a servi de base à la traduction, mais sans doute aussi à la maladresse du traducteur, ainsi qu’à celle des trois copistes qui ont répercuté des phrases inintelligibles, sans s’interroger sur leur sens. D’ailleurs, quand il a été intégré aux œuvres de Thomas d’Aquin, le texte latin lui-même a été mal édité. Il souffre encore aujourd’hui de mélectures nombreuses, qui permettent de mesurer le désintérêt dont il a peu à peu fait l’objet.
La possibilité du Livre de l’erudicion
des princes dans les premiers imprimés
Outre les raisons évoquées plus haut, l’absence du traité de Guillaume dans les corpus des premiers imprimeurs parisiens n’est en réalité pas si étonnante : les impressions en langue vernaculaire n’ont véritablement débuté à Paris qu’après 1490, car le lectorat parisien se composait d’universitaires, d’ecclésiastiques et « d’hommes de robe » qui lisaient en latin plutôt qu’en vernaculaire. Le texte latin non plus n’a pas été imprimé à Paris, sans doute car les scriptoria implantés dans la ville furent très nombreux et très productifs jusqu’à la fin du xve siècle, au point de reléguer l’imprimerie à « une activité d’appoint37 », et en dehors du programme des universités, les inventaires montrent que peu de textes patristiques et scolastiques sont imprimés à Paris jusqu’au début du xvie siècle38. La traduction du traité de Guillaume ne correspondait donc pas au marché des imprimeurs parisiens. Il n’apparaît pas non plus dans les inventaires des imprimeurs hors du Royaume (Suisse, Pays-Bas, Italie), et il n’en existe pas de traduction médiévale vernaculaire, autre qu’en français39. En revanche, les conditions semblaient 222réunies pour que le traité de Guillaume soit imprimé à Lyon durant la grande période 1470-1485, où il aurait pu en effet correspondre au goût du lectorat qui fit la fortune des imprimeurs lyonnais. La concurrence avec les imprimeurs allemands et italiens avait poussé leurs homologues lyonnais à s’adapter aux attentes des lecteurs locaux, souvent cultivés, mais pas assez pour lire couramment le latin, et qui achetaient donc des traductions imprimées : les magistrats, les médecins de la ville, les marchands attirés par les foires. Le Livre de l’erudicion des princes aurait ainsi fort bien pu bénéficier de cette « niche » lyonnaise, spécialisée dans l’impression de textes traduits. Les ordres mendiants lyonnais furent en outre régulièrement mis à contribution pour conseiller le choix des textes à imprimer et pour les « translater ». Ils permirent ainsi l’impression de nombreux textes de type sermonnaire en langue vernaculaire : traités édifiants, hagiographiques ou moraux, puisés dans les bibliothèques prestigieuses des robins ou des seigneurs retirés sur leurs terres. Autant de textes qui seront ensuite récupérés par les imprimeurs parisiens et rouennais, avant de devenir la fameuse « Bibliothèque bleue » des Oudot-Garnier40. Les témoignages des dominicains identifient par surcroît Guillaume comme l’un de leurs frères et ils n’ont jamais cessé, à partir du xiiie siècle, de diffuser son œuvre : il n’est alors pas déraisonnable d’imaginer les ordres mendiants lyonnais favoriser une impression du De eruditione principum, dans la traduction royale ou dans une nouvelle traduction. Pourtant, d’après notre connaissance des inventaires, le traité n’a pas été retraduit et il n’a pas non plus été imprimé en latin. Outre les raisons déjà mentionnées, il semble que ni en latin, ni en traduction, ce traité n’ait trouvé un lectorat suffisamment large pour justifier sa mise sous presse. Pourquoi ?
Le lectorat élitiste des miroirs
L’étiquette miroir du prince est particulièrement fourre-tout et il serait franchement audacieux de fournir des chiffres. Néanmoins, en nous limitant aux seuls « manuels d’éducation à destination des princes », une dizaine de titres ont été traduits en français41 entre le xiiie et la fin du 223xve siècle, et deux titres éclipsent tous les autres en quantité de manuscrits et en retraductions :le Liber de informatione principum (anonyme) avec ses trois traductions différentes et sa vingtaine de copies manuscrites, et surtout le Liber de regimine principum (Gilles de Rome), qui donna lieu à six traductions différentes dans plus de 45 copies manuscrites42. Pourtant, malgré son succès, le traité de Gilles de Rome ne fut pas imprimé en français et seules les traductions du Liber de informatione principum par Jean Golein puis d’Octavien de Saint-Gelais, furent mises sous presse43. Le sort du Livre de l’erudicion des princes semble donc faire partie d’un mouvement général : les traités d’éducation à destination des princes furent très peu imprimés et le corpus de ces traités, pourtant très prisés et très diversifiés au cours des xiie et xiiie siècles, se réduisit drastiquement aux xive et xve siècles, lors de la phase de traduction d’une part, lors de la mise sous presse d’autre part. Nous savons que les contraintes économiques jouent à plein : imprimer les miroirs des princes n’était sans doute pas assez rentable. Pourtant, le traité de Guillaume se diffusait encore à l’époque de l’imprimerie comme le prouvent bien ses 52 copies latines manuscrites, dont beaucoup datent du xve siècle. S’il a « survécu », c’est donc manuscrit et en latin, ce qui semble montrer que le De eruditione principum n’avait pas trouvé son lectorat non-latiniste, à l’instar d’ailleurs de la grande majorité des autres traductions de miroirs. Nous avons évoqué la faiblesse de la traduction. Peut-être pourrions-nous avancer l’hypothèse que la faiblesse n’en soit pas une et que le traducteur du De eruditione principum « fasse de la résistance » ? Si Charles V conçoit sa librairie comme un espace de vulgarisation, le traducteur anonyme qui se charge de translater le traité de Guillaume en français semble choisir au contraire de ne pas vulgariser le propos latin et de le transférer a minima. Son français est très littéral : il obscurcit le sens des phrases. Les gloses sont rares : très peu de concepts théologiques sont expliqués. C’est ennuyeux, car Le Livre de l’erudicion des princes est un florilège de citations bibliques, patristiques et antiques, au service du tissu sermonnaire. La traduction se présente alors un exercice 224un peu vain, car au lieu d’ouvrir le contenu du traité à un lectorat qui n’a ni le savoir linguistique, ni le savoir culturel pour bien le saisir, elle le rend encore plus obscur et inaccessible à un lecteur non-latiniste et non-théologien, comme si, selon C. Galderisi, le lectorat vulgaire n’était pas estimé digne du propos spéculaire, car incapable de le lire en latin :
Les miroirs des princes latins ne sont pas seulement des œuvres destinées à l’éducation du prince. Ils sont surtout des traités qui ont pour vocation la transmission d’une culture théologique, morale et politique dont le principal destinataire est la clergie elle-même. Là est leur principale utilitas ; là réside leur profit moral et éthique. Le clerc compose certes ces traités pour les offrir au destinataire aristocratique qui les a commandités, mais il écrit surtout pour les autres clercs, pour contribuer à l’édification d’une classe sociale et culturelle qui assoit ainsi son pouvoir et conforte son sentiment de supériorité par rapport aux laïcs, soient-ils des princes ou des illitterati. […] Ce conflit traverse tout le Moyen Âge. Les traductions des miroirs latins n’ont ni pour vocation de former la clergie, ni la prétention de revendiquer la supériorité du lignage intellectuel, du moins jusqu’à la fin du Moyen Âge44.
Si, paradoxalement, le propos spéculaire n’était pas destiné aux princes, mais à la clergie chargée de les instruire, celle-ci n’avait en effet aucun intérêt à le translater si elle désirait garder sa mainmise sur les gouvernants et rester dans les lieux de pouvoir. Par sa piètre qualité, la traduction du miroir de Guillaume Peyraut est d’ailleurs une preuve évidente de transfert manqué – pourquoi pas d’autocensure ? –, et il semble évident que ses jours étaient comptés, à l’instar de l’essentiel des traductions vernaculaires de miroirs réalisés à l’époque de Charles V : les inventaires montrent en effet qu’en majorité, ces traductions ne dépasseront pas les trois copies manuscrites, en plus de ne pas être imprimées. Le livre de l’erudicion des princes semble alors avoir été pris dans un mouvement général de déclin progressif du genre, qui affecta jusqu’aux ouvrages les plus prestigieux : de la traduction du Polycraticus (Jean de Salisbury) ne restent que trois copies manuscrites et aucun imprimé ; de l’Erudicion des enfants nobles de Vincent de Beauvais ne reste qu’un unique manuscrit ; de chacune des traductions françaises du miroir de Gilles de Rome qui 225s’ajoutent à celle d’Henri de Gauchi, ne reste qu’un seul manuscrit et aucun imprimé45. Pourtant l’éducation des gouvernants continue à intéresser et le genre, en réalité, se métamorphose. La traduction glosée du De regimine principum effectuée par Henri de Gauchi connut, nous l’avons dit, une très grande fortune, sans doute car elle offrait à ses lecteurs des élucidations sémantiques, syntaxiques et des gloses didactiques. En banalisant le propos aristotélicien, elle réussit à atteindre un nouveau et large lectorat. En 1409, la traduction glosée par Laurent de Premierfait du De casibus virorum illustrium (Boccace) fut également un succès éditorial remarquable46, et des écrivains comme Christine de Pizan, Philippe de Mézières ou Évrard de Conty écrivirent avec succès sur l’éducation et la politique aux xive et xve siècles, mais directement en français et au moyen de fables, de dialogues, d’allégories ou de portraits, c’est-à-dire de genres romancés47, qui ne relevaient donc plus du seul apanage d’une caste cléricale, jalouse de sa culture latine. Cette adaptation linguistique et générique du propos spéculaire acta la lente disparition des miroirs sous forme de traités purs. De « pierre angulaire », le genre devint alors un véritable « angle mort » de ce formidable outil de vulgarisation et de transfert que constitua l’imprimerie.
Alors que le De eruditione principum de Guillaume Peyraut connut un grand succès en latin et que sa traduction tenait sa place dans la librairie du Louvre et dans le programme politique de Charles V, sa diffusion s’est peu à peu réduite au cercle exclusif des latinistes et aucune édition imprimée n’en est attestée à ce jour ni en latin, ni en traduction : cet ouvrage n’a pas su trouver la voie de son transfert vernaculaire. Cette 226absence peut s’expliquer par l’escamotage des copies manuscrites, ou par une identification trop peu transparente du traité. La qualité de la traduction entre également en ligne de compte, à la limite de l’acte de résistance d’une clergie qui tient à conserver son savoir et le pouvoir qu’il lui confère sur les puissants. En réalité, ces traités n’étaient sans doute pas destinés à être vulgarisés et, à de rares exceptions près, ils ne le seront pas, entraînant le déclin du genre. Le sort du traité de Guillaume Peyraut révèle ainsi particulièrement bien les tensions qui agitent la société française des xive et xve siècles. Texte-seuil, il synthétise la transition d’une époque à une autre, par son genre, sa langue, son support matériel, et par la manière dont il alimente la réflexion sur la traduction et le transfert des savoirs. Il est finalement très représentatif du paradoxe que met en lumière le changement de paradigme radical amorcé par la traduction, puis confirmé par l’imprimerie : les miroirs des princes ne pouvaient être vulgarisés, car ils n’avaient pas été pensés pour que les princes en soient les lecteurs.
Claire Lorillard
Université de Poitiers – CNRS
1 Antoine Dondaine en recensait 34 copies manuscrites en latin en 1948 : « Guillaume Peyraut : vie et œuvres », Archivum fratrum praedicatorum, no 18, 1948, p. 32 ; Thomas Kaeppeli en comptait, 25 ans plus tard, 52 copies manuscrites : Scriptores ordinis praedicatorum medii aevi, Roma, Istituto storico domenicano, 1973, vol. II, p. 151-152. Ce nombre de 52 copies est repris aujourd’hui par la base Bibale : « Guillelmus Peraldus : De eruditione principum ».
2 Ms Vaticano, BAV, Vat. lat. 811, cité par A. Dondaine, « Guillaume Peyraut », op. cit., p. 220.
3 Ms Firenze, BML, Med. Pal. 49.
4 Antoine Dondaine, « Guillaume Peyraut », op. cit., p. 232 : « Ajoutons que depuis l’édition romaine de 1570, le traité figure dans les impressions des œuvres de s. Thomas, soit qu’elles soient complètes (Venise 1593-1594, Anvers 1612, Venise 1745-1788, etc.), soit qu’elles ne reproduisent que la collection des Opuscules (Venise 1587, 1596, Paris 1634, 1656, 1660, etc.) » ; Thomas Kaeppeli, Scriptores ordinis praedicatorum, op. cit. : « ed. S. Thomae Opera omnia, Romae 1570, XVII, 226v-267v ; éd. Parmae 1865, XVI, 390-476 ; Parisiis 1875, XXVII, 551-673 etc. », p. 151.
5 « Quelques œuvres faussement attribuées à Thomas ».
6 Ms Besançon, BM, 434.
7 Ms Paris, BnF, fr. 1728.
8 Ms Paris, BnF, fr. 1208.
9 Thomas d’Aquin, L’éducation des princes, opuscule 73 [apocryphe] trouvé à la bibliothèque du Vatican en 1303 et attribué à saint Thomas, Traduction Abbé Bandel, Paris, L. Vivès, 1857 (en ligne).
10 Jacques Krynen rappelle l’étymologie du mot « roi » héritée d’Augustin et d’Isidore : reges a regendo vocati qui « suggère le rapprochement rex – regere – corrigere – recte facere (ou agere) […] celui qui ne corrige pas ne régit pas. Donc en agissant droitement, on garde le nom de roi, on le perd en agissant mal », cité dans « Rex christianissimus », L’Empire du roi. Idées et croyances politiques en France, xiiie-xve siècle, Paris, Gallimard, 1993, p. 167.
11 Auguste Castan, « Un manuscrit de la bibliothèque du roi de France Charles V retrouvé à Besançon », Bibliothèque de l’École des chartes, no 43, 1882, p. 216 ; Christiane Raynaud, Images d’une éducation choisie : L’enseignement des princes de Guillaume Peyraut et Le livre du gouvernement des princes de Gilles de Rome dans le ms 434 de la Bibliothèque municipale de Besançon, Paris, Le Léopard d’or, 1993, p. 177-189 ; Noëlle-Laetitia Perret, Les traductions françaises du Deregimine principum de Gilles de Rome, Leiden, Brill, 2011, p. 71-75.
12 Claudio Galderisi, « Des nains devenus des maîtres à penser : les traductions françaises des miroirs des princes », La rumeur des distances traversées. Transferts culturels, traductions et translations entre Moyen Âge et Modernité, Turnhout, Brepols, 2021, p. 193.
13 Jacques Krynen, « Rex christianissimus », op. cit., p. 345-384 ; Id., « Genèse de l’État et histoire des idées politiques en France à la fin du Moyen Âge », Culture et idéologie dans la genèse de l’État moderne. Actes de la table ronde de Rome (15-17 octobre 1984), Rome, École Française de Rome, 1985, p. 395-412 ; Bernard Schnerb, « Charles V au miroir du Songe du Vergier », Le Moyen Âge, no 116, 2010, p. 545-559.
14 Donal Byrne : « Rex imago Dei : Charles V of France and the Livre des propriétés des choses », Journal of Medieval History, 7/1, 1981, p. 97-113.
15 Léopold Delisle, Recherches sur la bibliothèque de Charles V, Paris, no 7/1, H. Champion, 1907, vol. I, p. 260, notice 59 : « Le manuscrit figura jusqu’en 1413 sur les inventaires de la librairie du Louvre […] Il était sorti de la librairie du Louvre avant l’année 1424 ».
16 Cf. note 11, supra.
17 Léopold Delisle, Recherches sur la bibliothèque de Charles V, op. cit., vol. II., p. 89, notice 519bis : « Exemplaire non porté aux anciens inventaires, mais qui est une réplique partielle du volume précédent et qui a tout l’air d’avoir été faite, sinon pour le Roi, pour un prince de la famille royale » ; Id., Recherches sur la bibliothèque de Charles V, op. cit., vol. I, p. 260-262, notice 60 : « Quoiqu’il ne soit pas mentionné dans les inventaires de la librairie du Louvre, je crois bien qu’il a été copié pour le roi Charles V […] s’il n’a pas été incorporé dans la librairie du Louvre, il a dû être fait dans les mêmes ateliers que les livres du roi et destiné à un personnage de la cour ».
18 « Le Tellier 15 », puis « REGIUS 7416.2 ».
19 Dominique Coq, « Les incunables : textes anciens, textes nouveaux », Histoire de l’édition française. Le livre conquérant. Du Moyen Âge au milieu du xviie siècle, éd. R. Chartier, H.-J. Martin, Paris, Promodis, 1982 [rééd. Fayard, 1989], p. 206.
20 A. Dondaine, « Guillaume Peyraut », op. cit., p. 164-167 et 181-182.
21 Chronique de l ’ Ordre ajoutée aux Vitae Fratrum (1259-1260).
22 Il en parle 30 ans après leur rencontre de 1249, dans le Chronicon (ca 1284).
23 Il lui attribue la paternité de la Somme dans son œuvre De septem donis Spiritus Sancti (composé avant 1260).
24 De quatuor in quibus Deus Ordinem predicatorum insignivit (1304).
25 Le copiste du ms Valence, BM, 133 (olim 115), xiiie siècle, f. 228, rapporte par exemple avec prolixité ce qu’il croit savoir de la vie de Guillaume : voir Dondaine, « Guillaume Peyraut », op. cit., p. 167.
26 Perladi, Peiraut, Peyrauta, Peranto, Perauto, Peraldo, Paraut, Peraut, Perrault, Payraut, Payraud, Peyraud, Peyraut… : A. Dondaine fixe le nom Peyraut à partir de son lieu de naissance supposé, le village de Petra Alta, « Guillaume Peyraut », op. cit., p. 168-169.
27 Ms Praha, APH-KPMK, N. XXXI (1373) ; ms Wroclaw, BU, IV.F.49 (1454) : « Incipit prologus in librum eruditionis principum compilatus per Humbertum fratrem, quintum magistrum ordinis predicatorum ».
28 Ms Vaticano, BAV, Reg. lat. 1037 (xvesiècle) : « Frater Vincentius belvacensis ordinis predicatorum, de nobilitate et eruditione principum », après un premier titre « Liber de eruditione principum editus per quendam religiosum de ordine fratrum predicatorum ».
29 Le traité de Guillaume Peyraut a été intégré aux œuvres complètes de Thomas d’Aquin en 1570, suite à l’erreur d’attribution de la copie toulousaine (1303) qui servit de base à l’édition vaticane : Ms Vaticano, BAV, Reg. lat. 811 : « Explicit liber eruditionis principum, editus per fratrem Tho. de ordine fratrum predicatorum. Deo gratias. Ego Iacobus de castello de organiano urgellensis diocesis scripsi hunc librum tholose as opus mei, currente ab [sic] anno incarnatione domini mocccotertio[sic] » (f. 78r).
30 « Stylus ita convenit cum eo quo utitur ubique Peraldus, presertim in summa de vitiis et virtutibus, ut ovum ovo non sit similius », Jacques Quétif, Jacques Échard, Scriptores ordinis praedicatorum recensiti. Notisque historicis et criticis illustrati, Paris, Picard, 1910-1914, t. I, p. 135.
31 C. Marchello-Nizia rappelle en effet que « la notion d’auteur » commence à avoir une importance cruciale à partir du xve siècle où elle devient « un principe de classement des œuvres dans les manuscrits », Ead., La langue française aux xive et xve siècles, Paris, Nathan, 1997, p. 61.
32 Lawrence Venuti, The translator’s Invisibility. A History of Translation, London, Routledge, 1995.
33 Olivier Delsaux rappelle notamment les exemples de Jean de Meun qui s’est vu attribuer la traduction de la Consolation de Philosophie (1350), ou de Nicole Oresme à qui a été attribuée la traduction du De Remediis (Pétrarque) en réalité effectuée par Jean Daudin, ou encore l’attribution à Laurent de Premierfait par Vérard des Œuvres traduites de Sénèque (1500) : « Quand les auteurs étaient des nains. L’auctorialité des traducteurs à l’aube de la modernité », Quand les auteurs étaient des nains. Stratégies auctoriales des traducteurs français de la fin du Moyen Âge, éd. O. Delsaux, T. Van Hemelryck, Turnhout, Brepols, 2019, p. 19-21.
34 À ce sujet, voir Anne Schoysman, « Colard Mansion et Antoine Vérard, éditeurs de textes sur la véritable noblesse et le gouvernement des princes. L’apport d’un recueil à la tradition des textes », Cahiers de recherches médiévales et humanistes, no 44, 2022-2, p. 123-146.
35 « ces rois chrétiens sont heureux dans ce monde par l’espérance, et ils le seront dans l’autre par la réalité, lorsque le jour que nous attendons sera venu », Abbé Blandel, op. cit., Livre II, chapitre XIII.
36 Guillaume Peyraut, Le Livre de l’erudicion des princes, traduction anonyme, ms Besançon, BM, 434 (f. 30va).
37 Dominique Coq, « Les débuts de l’édition en langue vulgaire en France : Publics et politiques éditoriales », Gutenberg-Jahrbuch, no 62, 1987, p. 68.
38 C’est particulièrement le cas pour les œuvres de Thomas d’Aquin, Pierre Lombard, Albert le Grand sans doute suite à la querelle entre les nominalistes et les réalistes (querelle des universaux). Dominique Coq, « Les incunables », op. cit., p. 222.
39 Il existe une traduction en allemand, mais elle date de 1868, et la traduction italienne du ms Paris, BnF, ital. 233 (72415) (xve siècle), signalée par Thomas Kaeppeli, Scriptores ordinis praedicatorum, op. cit., p. 152, et reprise dans le recueil Transmédie, est en réalité une traduction de l’Opusculum de regimine principum / De regno ad regem Cypri de Thomas d’Aquin, comme le prouve la notice BnF.
40 Voir à ce sujet : Dominique Coq, « Les débuts de l’édition », op. cit., p. 59-72.
41 Claudio Galderisi en donne un inventaire détaillé dans op. cit., p. 194-197.
42 Gavino Scala, La tradizione manoscritta del Livre du gouvernement des roys et des princes di Henri de Gauchy, Tesi di dottorato sotto la dir. di A. Schoysman, Università di Siena, 2021, p. 402.
43 Le Livre de l’information des princes (traduction de Jean Golein en 1379) est imprimé en 1516 et 1517, selon ARLIMA.
44 Claudio Galderisi, La rumeur des distances traversées. Transferts culturels, traductions et translations entre Moyen Âge et Modernité, Partie III : Les Lettres françaises à l’école des traducteurs, Turnhout, Brepols, 2021, p. 201.
45 C’est le sort que connut d’ailleurs la traduction du « Livre du gouvernement des princes selonc frere Giles de l’ordre de saint Augustin [Gilles de Rome] » qui fut copié après le traité de Guillaume Peyraut dans le ms Besançon, BM, 434 : Noëlle-Laetitia Perret, Les traductions françaises du De regimine principum, op. cit., p. 71-75 ;Gavino Scala, La tradizione manoscritta del Livre du gouvernement des roys et des princes, op. cit., p. 402.
46 De la traduction de 1409, il reste aujourd’hui une soixantaine de manuscrits et deux éditions anciennes (Colart Mansion 1476 et Antoine Vérard 1494), à comparer avec la dizaine de manuscrits (aucun imprimé) qui restent de la première traduction, littérale, par Premierfait en 1400.
47 Joëlle Ducos signale que le goût pour la fable et la mythologie imprègne d’ailleurs jusqu’aux traductions scientifiques d’Évrard de Conty et Nicole Oresme, Ead., « Goût des sciences et écriture du savoir à la cour de Charles V », Le goût du lecteur à la fin du Moyen Âge, éd. D. Bohler, Paris, Le Léopard d’Or, 2006, (« Cahier du Léopard d’Or », 11), p. 225-243.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-16459-3
- EAN : 9782406164593
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-16459-3.p.0213
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 26/06/2024
- Langue : Français
- Mots-clés : Guillaume Peyraut, traduction, miroir des princes, résistance cléricale, absence