Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Sources hagiographiques et procès de canonisation. Les circulations textuelles autour du culte des saints (xvie-xxe siècle)
- Pages : 407 à 411
- Collection : POLEN - Pouvoirs, lettres, normes, n° 30
Résumés
Philippe Castagnetti, « Introduction »
Étudier les circulations textuelles qui mettent en relations les discours savants ou populaires sur un saint ou un possible saint et le continent archivistique des minutes des procès de canonisation permet d’approfondir la notion même d’hagiographie. Alors que les écrits hagiographiques alimentent le procès et le constituent en producteur d’hagiographie, ces échanges participent à l’émission, la diffusion, la réception et la transformation du discours sur la sainteté moderne et contemporaine.
Sara Caredda et Ramon Dilla Martì, « Vescovi e santi prelati tra arte e agiografia. La cappella di San Oleguer nella cattedrale di Barcelona »
Textes hagiographiques et procès de canonisation offrent souvent des descriptions détaillées des tombes et des chapelles funéraires des candidats à la sainteté, qui ont parfois disparu depuis. Cet article se centre sur l’étude de la chapelle de saint Oleguer, évêque de Barcelone, canonisé en 1670, du Moyen Âge au xxe siècle en contextualisant les différents moments historiques de cet espace funéraire décoré par certains des sculpteurs les plus renommés de la scène artistique catalane.
Pierre-Anne Forcadet, « La sainteté de Louis IX au temps de la monarchie absolue de droit divin. Hagiographie et État souverain »
Une démarche diachronique est suivie pour analyser un phénomène étrange de circularité. L’hagiographie de saint Louis a en effet précédé et favorisé sa canonisation. Puis elle a ressurgi au xviie siècle pour servir la sanctification de la monarchie absolue même, à défaut de profiter au prince en personne. Comme on ne peut plus diviniser le roi, il a fallu diviniser la royauté. Et paradoxalement ainsi est apparu l’État souverain moderne, impersonnel et détaché de la morale et de la religion.
408Philippe Castagnetti, « Le recours aux ouvrages historiques et biographiques dans le procès de canonisation de Marguerite de Cortone »
La canonisation en 1728 de Marguerite de Cortone († 1297) relève d’un casus exceptus au vu des normes d’Urbain VIII. La cause mobilise une documentation dont rend compte un Memoriale de 1665 exploité par la Positio de virtutibus de 1666. Il énonce les conditions d’intégration d’écrits dits historiques aux pièces d’un procès. Passant de la théorie à la pratique, la synthèse est suivie d’une bibliographie relative à Marguerite, sans préciser les modalités d’exploitation des références livresques.
Françoise Michaud-Fréjaville, « Hagiographie et canonisation. Quand Jeanne d’Arc dit “je” »
Au début des démarches pour la canonisation de Jeanne d’Arc, J. Fabre, républicain agnostique, et le chanoine Le Nordez ont offert un florilège des paroles de l’héroïne, égrenés en lectures journalières pour un public féminin. Chez Fabre, le mois de mai de Jeanne est transmis par Durant Laxart, issu du peuple français que Jeanne a libéré de l’étranger. Le Nordez se souciait davantage de la formation des dames de la bonne société pour en faire les mères parfaites de garçons croyants et patriotes.
Sylvène Édouard, « Un saint pour la cause. La canonisation de Diego de Alcalá, entre exigences procédurales et tradition hagiographique »
Le propos de cette contribution est de revenir sur les hagiographies et la canonisation (1588) du frère lai Diego de Alcalá (v. 1400-1463), à partir d’une documentation manuscrite et imprimée très importante, produite entre 1463 et 1663. Ces informations permettent d’établir les différents critères qui ont pu faire de Diego un saint, certes déjà ancien mais digne de la Réforme catholique, et de mesurer l’impact du concile de Trente sur l’écriture hagiographique.
Axelle Guillausseau, « Canonisation et hagiographie. Réflexions sur une relation circulaire à partir de la “légende hagiographique” d’Ignace de Loyola »
Malgré les interdits pontificaux, les imprimés consacrés à Ignace de Loyola se multiplient avant sa canonisation. Les scripteurs s’appuient sur les documents produits par les autorités ecclésiastiques, les considérant comme des 409sources et comme des références sur le plan méthodologique. La canonisation devient alors un passage obligé des Vies du saint et, dans une logique circulaire, les hagiographes se voient assigner une fonction d’illustration mais aussi de défense du centralisme romain.
Cécile Vincent-Cassy, « La canonisation de l’archevêque de Valence Thomas de Villeneuve après les décrets d’Urbain VIII. Modèle et négociations »
Le procès de canonisation de Thomas de Villeneuve aboutit en 1658, sous le pontificat d’Alexandre VII. La figure du saint est celle d’un clerc exemplaire, associant l’ostentation de l’humilité et celle de la perfection vertueuse ainsi que l’orthodoxie de la pensée théologique et dogmatique. Nous examinons non seulement la fabrique du saint, notamment à travers l’enrichissement et l’impression de ses hagiographies, mais aussi le contexte militaire et diplomatique des années 1640-1650 expliquant ce triomphe.
Giovanna Fiume, « L’agiografia di Francisco Escrivá e la beatificazione di Juan de Ribera »
Juan de Ribera, archevêque de Valence et patriarche d’Antioche, est décédé le 6 janvier 1611 et le Collège du Corpus Christi qu’il a fondé lance aussitôt son procès de béatification. Sa biographie par le jésuite Francisco Escrivá, publiée en 1612, et les suivantes scandent les étapes du processus de béatification, contribuent à en surmonter les contradictions et interviennent dans la construction de la réputation de Ribera, qui finit par correspondre au modèle du saint évêque post-tridentin.
Laura Guinot Ferri, « La béatification d’Inés de Benigànim († 1696). Sainteté féminine et guérison miraculeuse »
Inés de Benigànim, religieuse augustine déchaussée, ne fut béatifiée qu’en 1886. Le procès est influencé par une hagiographie de 1715, par les oratoriens valenciens et par la noblesse locale. La quête d’un miracle adéquat dans la période 1797-1798 se fait pressante. Le xixe siècle est atone, jusqu’à une réactivation après 1875, associée à un miracle puis à la parution d’une biographie fondée sur les écrits du confesseur, en lien avec la modélisation d’un nouveau type de sainteté féminine.
410Nicole Lemaitre, « Pourquoi canoniser un pape ? L’exemple de Pie V (1672 et 1712) »
Dans quel contexte Pie V, le pape de la victoire sur les Turcs, a-t-il été béatifié puis canonisé ? Si sa réputation de sainteté est incontestable en 1572, l’appel à la croisade fait place à la promotion du pasteur ascétique. Le Grand Inquisiteur n’est pas mis en avant car les protestants sont toujours là. Lépante n’a jamais été oubliée, mais les dominicains ont préféré privilégier la figure du prophète et de l’ascète italien qui œuvrait à l’expansion du catholicisme dans les terres nouvelles.
Paula Almeida Mendes, « Hagiographie et stratégie de canonisation. La cause du jésuite portugais João Cardim »
L’analyse des Vies du jésuite portugais João Cardim – De vita, et moribus P. Ioannis Cardim Lusitani e Societate Iesu (1645), de Filipe Alegambe, et Vida e virtudes do admiravel Padre João Cardim (1659), du P. Sebastião de Abreu – montre comment ces textes ont été conçus et utilisés dans le cadre de son procès de canonisation. Cependant, bien qu’il soit mort en odeur de sainteté et qu’on lui ait attribué des vertus héroïques et des miracles post mortem, le procès n’a pas eu le résultat attendu.
Éric Suire, « Les biographies spirituelles dans les Animadversiones du promoteur de la Foi (xviie-xxe siècle) »
Écrites par un témoin ou tirées d’autobiographies, les biographies spirituelles exaltaient l’héroïsme des figures majeures du catholicisme réformé, avant d’être examinées à leurs procès de canonisation. Elles suscitaient les critiques du promoteur de la Foi, auxquelles devaient répondre les avocats de la cause. Leur confrontation précise avec les témoignages oraux annonce la création de la Section historique, en 1930, qui transforma la procédure juridique en une étude scientifique des sources.
Serena Spanò Martinelli, « Hagiographie et construction d’une sainteté officielle à Bologne (xve-xviiie siècles) »
L’article présente le culte des saints, la production hagiographique et les procès de canonisation lancés à Bologne à l’époque moderne. En l’absence d’une base textuelle solide, le culte ne dépasse pas le niveau local. Ce culte 411local reste l’essentiel, au xvie siècle, pour le cardinal Paleotti et les fidèles tandis qu’au xviiie siècle, l’oratorien G. B. Melloni espère que son travail d’hagiographe favorisera l’ouverture de nouveaux procès et contribuera à l’heureuse conclusion de ceux déjà ouverts.
Christian Renoux, « La naissance illégitime de Louise de Marillac entre biographies et procès de canonisation (xvie-xxe s.) »
L’illégitimité de Louise de Marillac, connue de son vivant, avait été tue par N. Gobillon († 1706), son unique biographe. Lors de son procès de canonisation, quelques témoins déposent, en secret, pour réfuter cette illégitimité qu’un historien avait redécouverte quelques années auparavant. Pour cela, ils s’appuient principalement sur le texte de Gobillon, littéralement « canonisé ». Louise de Marillac sera proclamée sainte en 1934 sans que la vérité soit faite sur les conditions de sa naissance.
Pierre-Antoine Fabre et Gérard Neveu, « “Rythmes” de l’hagiographie et désynchronisation des temps religieux (xviie-xxe s.). Les jeunes saints de la Compagnie de Jésus et Rome, entre rhétorique performative et censure institutionnelle »
Partant d’une situation paradoxale de la Compagnie de Jésus au xixe siècle – contraste d’un certain silence historiographique et d’une prolifération hagiographique – notre démarche vise, à travers les figures des trois jeunes saints jésuites, à montrer les distorsions imposées aux carrières posthumes de ces figures au départ contemporaines par les réformes pontificales successives et leurs effets sur les transformations de l’espace-temps liturgique au sein de l’église romaine de Sant’Ignazio.
Jacopo De Santis, « Santità e Repubblica nella Roma del 1849. La figura del santo in una città in rivoluzione »
À travers l’analyse des péripéties de trois personnages en odeur de sainteté, présents à Rome en 1849, l’article entend vérifier la valeur heuristique des sources hagiographiques pour l’étude des événements de la seconde République romaine. L’analyse de cette documentation a permis de restituer différentes lectures et interprétations des événements de 1848-1849 à Rome, révélant la façon différente dont les aspirants à la sainteté les ont vécus.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-13169-4
- EAN : 9782406131694
- ISSN : 2492-0150
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-13169-4.p.0407
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 21/09/2022
- Langue : Français