La "langue de Canaan" à l’épreuve des sermons (1600-1750) L’exemple des psaumes
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Revue Bossuet Littérature, culture, religion
2018, n° 9. varia - Auteur : Skupien Dekens (Carine)
- Pages : 35 à 58
- Revue : Revue Bossuet
La « langue de Canaan »
À l’Épreuve des sermons (1600-1750)
L’exemple des psaumes
Que n’a-t-on pu écrire sur la langue de Canaan, ses phrases « qui se trainent », son style « prosaïque », et surtout, son décalage avec la langue usuelle1 ! Il ne s’agira pas ici de refaire l’histoire de ce langage, du xvie siècle2 à nos jours3, ou d’en trouver les sources4, mais plutôt de tenter de le replacer dans le cadre plus global de l’évolution de la langue classique au xviie et au début du xviiie siècle.
Cette période de la langue française, globalement qualifiée de « français classique » est l’objet de discussions importantes parmi les historiens de la langue5 qui n’y voient pas une seule période, mais qui cherchent à définir, si tant faire se peut, le point de rupture entre un français préclassique, encore très proche de celui de la fin du xvie siècle, et le français classique proprement dit. La frontière entre les deux états de langue est discutée : 1660 pour F. Brunot6 qui se base sur l’histoire littéraire en 1966, 1630 environ pour 36B. Combettes en 20037, qui structure le temps selon le travail des remarqueurs et des grammairiens. Plus récemment, les chercheurs ont proposé d’établir la date de ce changement de période, en analysant finement de petits changements pour voir à quel moment ils ont eu lieu8, sachant qu’ils n’auront évidemment pas tous lieu en même temps. Dans ce domaine, le développement de la linguistique de corpus, qui travaille sur de grandes quantités d’informations, apporte un renouvellement important. Ainsi, grâce aux différents types de corpus mis à disposition, on peut se demander si ces changements auront lieu de la même manière et à la même époque dans tous les genres textuels. Il est en effet légitime de penser que certains auteurs, en lien étroit avec la cour à Versailles, intégreront plus rapidement à leur style les tours à la mode, recommandés par Vaugelas9. D’autre part, certains genres, comme la correspondance diplomatique, seront plus archaïsants, par nature10. Comme on le voit, les variables sont nombreuses et d’autres éléments devraient encore être pris en compte pour établir une périodisation, comme les variables socio-linguistiques, les représentations face à la norme, les phénomènes de mode, etc.
À cet égard, le fait que la langue des protestants ait été dès l’origine stigmatisée et décrite comme « différente » nous oblige à nous interroger sur ses spécificités, tellement importantes qu’elles ont été perçues non seulement par un Académicien comme Valentin Conrart, mais par ses locuteurs, comme le théologien du xixe siècle Édouard Reuss.
37Ainsi cette recherche se donne pour but d’approcher la réalité de ce langage, d’abord de manière métadiscursive, avec l’évocation rapide de quelques textes publiés en marge des tentatives de révision des psaumes, puis par l’analyse détaillée de la langue des sermons et de celle des citations bibliques en général, et psalmiques en particulier, qui y sont insérées.
la perception du changement linguistique
chez les intellectuels protestants
Ce n’est que vers la fin du xviie siècle que des commentaires ironiques contre le « style réfugié » verront le jour11. Pour la période qui nous intéresse, à savoir le temps qui sépare la traduction de la Bible dite « de Genève » de 158812 et les premières révisions par J.-F. Ostervald13, le décalage de style, voire de langage, évoqué dans les textes, souvent des préfaces, des épîtres ou des lettres (Amyraut en 164914, Conrart en 166815, La Bastide en 167716) ou dans les œuvres 38elles-mêmes (Drelincourt en 165517, Abadie en 168918) peut être considéré de deux manières.
Dans les sermons, le style simple, revendiqué ou justifié, est considéré positivement, preuve de la simplicité évangélique, du « style de Dieu19 », éloignement salutaire du style pompeux goûté par le siècle, mais il peut aussi être regretté, en particulier lorsqu’il s’agit des traductions de la Bible ou des Psaumes.
Ainsi, Amyraut s’excuse-t-il d’être différent des « écrivains de ce temps20 ». Même si l’auteur explique avoir été malade et n’avoir pas eu le loisir d’enrichir son texte, l’opposition qu’il indique entre « enrichissements » d’une part et « euidence de verité » d’autre part implique une préférence toute évangélique.
Car vous n’y trouuerez à la verité aucun ornement considerable, & point du tout de cette pompeuse éloquence, ny de cette éclattante erudition dont la pluspart des Écriuains de ce temps parent leurs ouurages, comme on releue une étoffe de couleurs voyantes, & de magnifiques enrichissemens. Mais ie suis asseuré pourtant, que s’il vous plaist prendre la peine de le lire, vous y trouuerez asses de force & d’euidence de verité, pour ne regretter pas beaucoup ce qu’on y auroit peu adiouster par les embellissements du sçavoir ou du langage21.
Six ans plus tard, Drelincourt fait dialoguer un missionnaire catholique, qui critique les « fassons de parler barbares » des Psaumes, avec un « Chrétien Réformé » qui explique d’une part qu’il faut replacer les Psaumes de Marot dans leur contexte linguistique, et, d’autre part que la rudesse du langage ancien se rapproche plus du langage même de l’Esprit saint « en sa simplicité » :
Le Missionnaire. Si les airs de vos Pseaumes sont agreables, les vers en sont fort grossiers : il y a de vieus mots qui ne sont plus en vsage, des fassons de parler barbares, & des rimes insupportables.
39Le chr. Ref. Ceus qui ont mis les Pseaumes en la rime dont nous-nous servons se sont religieusement attachez au texte Ebreu ; ce qui a rendu leur ouvrage difficile & contraint. Mais outre cela, il faut considerer le tems que cela a esté fait, & le style qui avoit alors la vogue. […] I’avouë que depuis ce tems-là la langue Françoise a grandement changé, & qu’elle est parvenuë à un tout autre degré de delicatesse & de perfection. Ie confesse mesme que ce siecle a produit d’excellens Poëtes qui ont mis en lumiere des Pseaumes dont les vers sont polis & elegans ce qui se peut. […]. Si nos Pseaumes ne sont pas capables de contenter les sens & de chatoüiller l’oreille, je soûtiens qu’ils sont fort propres à émouvoir les consciences & à élever le cœur à Dieu. […] De moy, les paraphrases les plus riches, les plus disertes, & les plus pompeuses, ne me touchent point si vivement que le texte mesme du S. Esprit en sa simplicité ; Et ce qui approche le plus de ceste simplicité, c’est ce qui m’edifie davantage. […] Comme Dieu parle à nous en des termes simples, nous le devons imiter en parlant à luy, & croire qu’il n’y a point de fassons de parler qui luy soyent plus agreables que celles dont il est l’auteur. Nostre Peuple est accoûtumé aus vieus mots qui vous choquent si fort22.
Comme on le voit, il ne s’agit pas seulement de justifier un style particulier dans les traductions bibliques, mais aussi son imitation : « nous le devons imiter en parlant à luy ».
Par la suite, il semble de plus en plus difficile d’admettre cette rudesse, d’autant qu’elle commence à empêcher la compréhension des textes sacrés. Cela apparaît dans le débat sur la nécessité de modifier la version de la Bible de Genève de 1588, devenue canonique23. Par exemple, l’Académicien Valentin Conrart se plaint, dans une lettre au Genevois Turretini du 10 décembre 1668 :
C’est une chose pitoyable, Monsieur, que l’Écriture sainte estant le seul fondement de notre Créance, et la seule règle de notre vie, nous n’en ayions qu’une version si rude et, en plusieurs endroit, si peu intelligible que beaucoup de personnes et particulièrement les jeunes gens sont empéchez de saisir le sens d’une infinité de passages dont ils récitent les paroles par cœur, après les avoir leues mille fois ou apprises comme des perroquets24.
40Le texte le plus complet à cet égard est la préface de Marc-Antoine de La Bastide à la révision des Psaumes par Conrart, publiée après sa mort en 1677. Les changements linguistiques sont décrits les uns après les autres :
Non seulement les mots ont eu la destinée qu’ont d’ordinaire les langues vivantes de naitre & de mourir, mais ce n’est plus le même tour, ni le même caractere, Et l’on voit même plusieurs expressions dans le vieux langage, qui étoient fort bonnes en ce tems-là, mais qui sont devenües choquantes, ou qui ont aujourd’huy un sens different de celuy qu’elles avoient autrefois25.
Par ailleurs, la norme s’est imposée, « les regles du langage sont infiniment plus severes, on a peine à souffrir la moindre des libertez dont on vient de parler26 ». Comme le préfacier s’adresse au public habitué à l’ancienne version, il doit justifier, non pas la rudesse du style de cette révision, mais justement son absence. Il n’est plus possible, en 1677, de tout garder de la version de 1562, en en respectant les rimes et la musique qui plus est. Les hébraïsmes ne doivent pas être changés, mais on peut les adoucir,
quand les figures du langage Hebreu semblent un peu dures pour nous ou trop éloignées de nos manieres. Car nous sommes obligez de reconnoitre qu’à quelques perfection que nôtre langue soit montée nos expressions n’ont pas toujours la même Énergie, ni toujours la même grace que celles de la langue sainte27.
Cependant, les caractéristiques stylistiques « de ces sortes de matieres pieuses » doivent être conservées, même si elles sont passées de mode dans le langage ordinaire :
D’autre côté on retient encore quelques mots de l’ancienne version qui semblent n’être presque plus dans l’usage ordinaire du monde, comme tabernacle, pervers, detresse, & quelques autres : mais ce sont des termes auxquels nous sommes accoûtumez dans ces sortes de matieres pieuses, on les prononce encore à toute heure dans nos Chaires, & l’on fait que les expression qui ont plus d’air de nouveauté, n’ont pas toujours la même force sur les esprits que celles qu’un long usage a comme consacrez, sur tout dans les matieres de Religion28.
41Ainsi donc, à la fin du xviie siècle, on s’octroie le droit, voire le devoir, de réviser enfin les psaumes, tout en en conservant les spécificités.
l’évolution de la langue
dans les sermons protestants du xviie siècle
Si le style des sermons protestants se veut délibérément différent de celui qui est à la mode, comme le dit clairement Amyraut, dans une préface à un recueil de sermons29, peut-on en dire autant de la langue elle-même ? A priori, il n’y a pas de raison que les changements morphosyntaxiques qui ont eu lieu au xviie siècle ne se retrouvent pas dans les sermons. Mais les textes que nous venons d’aborder justifient une certaine résistance à la mode, surtout du point de vue du lexique mais aussi des « tours » ou du « caractère ». Ainsi, on peut se demander quels sont les changements de la « langue ordinaire » qui apparaissent aussi dans la langue des sermons, et à quel rythme.
Nous avons montré ailleurs30 que les citations bibliques sont souvent restées fidèles à la version de 1588, et sont donc par nature plus archaïques que la langue des sermons eux-mêmes. Nous nous proposons donc d’analyser ici plus précisément d’une part la manière dont les citations des psaumes sont intégrées aux sermons et les changements qui y seraient éventuellement apportés par les prédicateurs, et, d’autre part, quelques éléments de syntaxe qui ont connu une évolution au cours du xviie siècle, en faisant bien la distinction entre les citations bibliques d’un côté, et les paroles du prédicateur, de l’autre.
L’hypothèse de départ de cette recherche était que les citations des psaumes dans les sermons pouvaient être différentes de celles du reste 42de la Bible par la présence importante dans la mémoire des pasteurs des psaumes chantés, particulièrement dans la version de Marot-Bèze. Il s’agissait donc de voir quelle source les prédicateurs allaient mobiliser lors de leurs prêches : la Bible dans les versions de référence (Olivétan, 1535, pour le tout début de la période, Bible de Genève 1588, puis Ostervald, 1724 et 1744) ou le psautier, Marot-Bèze en 1562 ou Conrart en 1677.
Pour cette étude, nous avons utilisé les textes et les outils d’analyse développés pour le projet SERMO, de l’Université de Neuchâtel31. Le corpus SERMO contient 62 sermons protestants francophones, édités pour la plupart à Genève, entre 1550 et 1750, représentant 600571 mots. Ces textes ont été préparés pour l’analyse et l’exploitation semi-automatique dans une approche de linguistique diachronique, d’histoire des genres paralittéraires et d’analyse du discours en diachronie. La chaîne de traitement appliquée aux textes permet des recherches linguistiques complexes, comme des suites de lemmes, tokens, ou parties du discours, dans leur graphie originale ou modernisée. Par ailleurs, un étiquetage permet de traiter différemment les citations bibliques, le texte des sermons, ou les titres, ce qui nous sera particulièrement utile ici. Des recherches plein texte sont aussi possibles, ainsi que le téléchargement des transcriptions et des outils de traitement.
Parmi les sermons du projet SERMO, nous avons sélectionné d’abord tous ceux dans lesquels des psaumes étaient cités. Puis, afin de permettre une analyse fine de chaque citation, nous avons sélectionné un sermon par décennie, en choisissant à chaque fois celui qui comportait le plus de citations psalmiques, pour arriver à la liste suivante, comportant une centaine de citations :
1593 Théodore de Bèze, Sermons sur l’histoire de la resurrection de nostre Seigneur Iesus Christ. Genève, Jean Le Preux, deuxième sermon.
1604 Guillaume Du Buc, XXIIII Homelies ou Sermons de M. Guillaume Du Buc fidele ministre de l’Eglise de Lausanne, sur l’oraison dominicale. Nouuvellement mis en lumiere, À Genève, Jean Le Preux, quatrième sermon.
1613 François de Combles, Premier sermon tovchant la preparation reqvise povr communiquer deuëment & dignement à la Cene de nostre Seigneur, Genève, Pierre et Jaques Chouet.
431624 Gilbert Primerose, Six Sermons de la reconciliation de l’homme avec Dieu, Sedan. Deuxième sermon.
1632 Michel Le Faucheur, Sermon des souffrances des Fidelles & de leur gloire, Charenton, Pierre Avvray.
1645 Jean Mestrezat, Sermon sur le pseaume CXXX. Vers. 1. 2. 3. & 4, Charenton.
1658 Jean Daillé, Melange de Sermons, Amsterdam, sermon XIX. Sur Luc I. Vers. 46. 47. 48. 49.
1667 Jean Daillé, XXI sermons de Jean Daillé, sur Le X Chapitre de la I Epitrë de S. Paul aux Corinthiens, Genève, sermon premier.
1676 François Turrettin, Sermons sur divers passages de l’Écriture sainte, Genève. Le bonheur du peuple de Dieu, ou sermon sur ces paroles du Ps XXXII. verset 12.
1687 Frédéric Spanheim, Recueil de Sermons pour la consolation de l’Eglise, Leide. Le souvenir salutaire. Ou sermon sur ces Paroles de l’Apocal. Chap. ii. vers. 5.
1695 Claude Brousson, La Manne mystique du desert, ou Sermons Prononcez en France dans les Déserts & dans les Cavernes durant les ténébres de la nuit & de l’affliction, les années 1689, 1690, 1691, 1692, & 1693. Premiere Partie. Amsterdam. Sermon VI. Sur ces paroles d’Osée, Chapitre v. v. 14. & 15.
1716 Bénédict Pictet, L’Examen des chrétiens. Ou Sermon sur Apoc. III. v. 1. 2. 3. Recité le 12. de Septembre 1715. dans un jour de Jeune. Genève.
1722 Antoine Maurice, Sermons sur divers textes de l’Écriture. Genève. La Prière de Daniel. Sermon Sur Daniel Chapitre ix v. 3. 4. 5. 6. 7. 8.
1737 Jean Henri Le Maître, Sermons sur divers textes de l’Écriture sainte prononcez dans des occasions extraordinaires, Lemgo. Sermon X. Le Culte Spirituël des Chrêtiens.
1745 Vinchon Des Vœux, Trois Sermons. I. Sur la véritable Patrie des François Réfugiés. II. Sur l’interposition singulière de la Providence dans la Révolution de 1688. III. Sur l’obligation indispensable de soutenir les Droits du Roi contre les Rebelles, Dublin. Sermon sur la véritable Patrie des François Réfugiés.
1750 Isaac Jacquelot, Sermons sur divers textes de l’Écriture sainte, Prononcés devant sa Majesté le Roi de Prusse, Genève. De l’Utilité des afflictions, Ou Sermon sur Rom. 8. vers. 24.
Dans un deuxième temps, nous avons relevé systématiquement les sources bibliques pour chaque texte32 et comparé les citations dans les sermons avec leur original, afin de repérer les variations et les libertés prises par le prédicateur. Conformément à notre hypothèse de départ, nous avons aussi comparé toutes les citations aux versets correspondant 44dans le Psautier huguenot, qui ne seront pas cités ici, car ils ne semblent pas avoir eu d’influence. Cependant, l’intégration variable au cours de notre période des versets tirés de la Bible apportait à elle seule matière à réflexion. La comparaison systématique et précise des citations dans les sermons à la version source (1535, 1588, 1624) fait apparaître les éléments décrits ci-dessous.
l’intégration des citations psalmiques
dans les sermons
On distingue trois périodes :
1. Avant 160033 : Pendant cette période, les pratiques sont variables. Certains prédicateurs semblent traduire eux-mêmes sans qu’aucune source ne soit identifiable (par exemple Séguier34, en 1598). D’autres sont déjà fidèles à la traduction de Genève (par exemple Merlin35, en 1594). Théodore de Bèze, quant à lui, alterne entre citations de 1588 et traductions propres. En effet, les deux citations des psaumes contenues dans le sermon de notre sous-corpus constitué pour cette recherche sont, l’une reprise fidèlement de 1588 (Ps 27, 136), l’autre traduite directement d’après l’hébreu par le prédicateur qui peut se permettre, comme Calvin37, de traduire au fur et à mesure (Ps 40, 1). Cela peut être déduit 45de la présence d’hébraïsme, comme dans la citation du Psaume 40 (« I’ay attendu en attendant »), qui ne se trouve ni chez Olivétan (« I’Ay attendu le Seigneur ») ni dans la Bible de 1588, (« I’ai patiemment attendu »)38.
En ce qui concerne les autres citations bibliques, il y a aussi alternance : certaines citations viennent de 1588, mais avec adaptation syntaxique légère due au changement de position des pronoms39, par exemple la citation de Lc 22, 29 dans le sermon de Bèze (1593), « Ie vous dispose le Royaume comme mon Père me l’a disposé », alors que l’on trouve « et ie vous dispose ainsi que mon père ma dispose le royaume » dans la Bible d’Olivétan, et « Parquoi ie vous dispose le royaume comme mon Père le m’a disposé » dans la Bible de Genève40.
D’autres versets, comme ceux qui sont mis en exergue de ce sermon de 1593, les évangiles de la Résurrection (Mt 28, 1-4 ; Mc 16, 9 ; Jn 20, 1) ne sont pas repris de la Bible de Genève, mais leur source n’est pas identifiable, et on peut légitimement penser à une traduction personnelle de Bèze.
2. 1600-1700 : Pendant le xviie siècle, les citations de la Bible insérées dans les sermons viennent toutes de la version, désormais canonique, de 1588. Les versets cités en exergue et sur lesquels sont centrés les sermons (par exemple Mestrezat, sermon sur le Ps 130) sont rigoureusement identiques à la source alors que dans ceux qui sont intégrés au texte, on constate parfois de petites adaptations.
Or, ce sont précisément ces petits changements qu’il nous faut observer pour percevoir l’évolution du sentiment du changement linguistique ou du rapport au texte de 1588 au cours du siècle. On peut ainsi répertorier différents types de modifications apportées aux citations psalmiques.
– Les psaumes cités en exergue sont presque tous cités sans aucun changement41, ou avec de petits changements graphiques, par 46exemple i > y (nuict > nuit) dans le sermon de Du Buc (1604) sur le Ps 139, 7-12 :
Où iray ie arriere de tõ Esprit ? Et où fuiray-ie arriere de ta face ? Si ie pren les ailes de l’aube du iour & ie me loge derriere la mer ; là aussi me conduira ta main, & ta dextre m’y empoignera. Si ie di au moins les tenebres me couuriront & me soustrairõt de ta presence : voila la nuit qui seruira de lumiere tout autour de moy42.
– Pour les citations insérées dans le sermon, comme l’a montré I. Kirschleger43, certaines modifications permettent une meilleure intégration dans le texte même : dans le sermon de Du Buc du tout début de notre période, le maintien des archaïsmes et des hébraïsmes (« il parlera à eux ») a la fonction de marqueur de la citation biblique, ce sont les guillemets de l’oral. Mais les autres changements opérés semblent nécessaires pour une meilleure intégration au sermon lui-même, du point de vue du sens (« renversera ses projets », pour continuer l’idée du Dieu « dominateur de toutes creatures ») ou du point de vue rhétorique (« en fin » au lieu de « Lors »), pour permettre de clore la période plutôt que de la relancer :
[Ps 2, 4-5] Et puis qu’il est le dominateur de toutes creatures, pas vne d’icelles ne nous pourra nuire, il maintiendra son Eglise au milieu de ses ennemis, cõme il a promis, & quoy qu’ils brassent & machinent, celuy qui reside és cieux s’en rira & renuersera ses proiects, & en fin parlera à eux en sa colere & les rendra esperdus en l’ardeur de son ire44.
– On relève une accentuation des archaïsmes, alors qu’il s’agit d’une mode syntaxique condamnée. Dans le sermon de Le Faucheur (1632), la citation du Ps 16, 11 de la Bible de Genève, « Ta face est un rassasiement de ioye : il y a des plaisances en ta dextre pour 47iamais », devient : « Car il y a plaisances en la dextre de Dieu pour iamais, & rassasiement de ioye en sa face ». De même celle du Ps 73, 25, « Quelle autre ai-ie au ciel ? or n’ai ie prins plaisir en la terre en rien autre qu’en toi », devient dans le sermon : « Quel autre ay-ie au ciel ? Or n’ay-ie pris plaisir en terre en nul autre qu’en toy45 ». On constate ici que le prédicateur a supprimé des articles (un rassasiement ; des plaisances ; en la terre) qui se trouvaient pourtant dans la version de 1588, comme s’il avait voulu souligner la citation biblique par ce trait syntaxique qu’on pourrait percevoir comme archaïque. En réalité, même si l’article zéro était plus répandu au xvie siècle qu’au xviie, devant un non-comptable comme ici, il a tendance à se répandre au milieu du xviie siècle, comme le regrette Vaugelas en 1647 :
Il a esprit. C’est depuis peu que cette nouvelle façon de parler est en vogue. Elle regne par toute la ville & s’est même insinuée à la Cour, mais elle n’y a pas esté bien reueüe, comme ayant fort mauvaise grace, & trop d’affectation. […] Il faut dire il a de l’esprit46.
On en trouve des exemples chez Corneille (« J’ai tendresse pour toi ; elle a montré joie »).
– La structure de la phrase complexe (connecteurs logiques notamment) est modifiée. Dans la citation du Ps 51, 5 : « Car ie cognoi mes transgressions, & mon peché est continuellement deuant moi. I’ai peché contre toi proprement : & ai fait ce qui est desplaisant deuant tes yeux : afin que tu sois cognu iuste quant tu parles, & trouué pur quant tu juges » dans la version de 1588), dans un sermon qui porte sur le psaume 130, Mestrezat supprime l’adverbe « proprement », difficilement compréhensible, délaissant au passage l’idée de restriction (« Contre toi seul j’ai péché ») :
ie recognois mes transgreßions, & mon peché est continuellement deuant moy, j’ay peché contre toy, & fait ce qui est desplaisant deuant tes yeux, de sorte que tu seras trouué juste quand tu me condamneras, & pur quand tu me iugeras.
Mais c’est surtout les changements introduits dans la consécutive qui sont intéressants : changement de connecteur (afin que > de sorte que) 48et changement dans la coordination, où deux attributs du sujet (juste et pur) se rapportent à un seul verbe support, contre deux dans l’original. La phrase du sermon est plus compacte que celle de 1588, s’éloignant légèrement en cela du style paratactique biblique47.
– Certains archaïsmes lexicaux sont supprimés. Comme le remarquait Conrart, certains mots jugés trop vieux (ce jourd’hui, mais aussi ailleurs liesse > joye) sont remplacés par de plus modernes. C’est le cas dans le sermon de Primerose, où la citation du Ps 2, 7 (« Ie raconterai de poinct en poinct l’ordonnance, l’Eternel m’a dit, C’est toi qui es mon Fils, ie t’ai ce iourd’hui engendré ! ») devient : « C’est toy qui es mon Fils, ie t’ay auiourd’huy engendré48 ».
Ce phénomène a lieu surtout pour les prépositions dont le caractère archaïque semble particulièrement remarqué, et dont le remplacement ne porte pas à conséquence du point de vue du sens. Chez Daillé, dans une citation du Ps 130, 1 (« Mon ame, beni l’Eternel, & tout ce qui est dedans moi, beni le Nom de sa saincteté49 »), dedans devient en50, ailleurs, ès devient en51, en > dans : « Mon ame (dit-il) beni le Seigneur & tout ce qui est en moi beni le nom de sa Sainteté52 ».
– Certains hébraïsmes syntaxiques sont supprimés. Dans une citation du Ps 139 (« Eternel, tu m’as sondé & cognu. 139.2 Tu cognois quand ie m’assieds & quand ie me leue, tu apperçois de loin ma pensee. 139. 4. Voire deuant que la parole soit sur ma langue, voici, ô Eternel, tu cognois desia le tout. 11 Si i’ai dit, Au moins les tenebres me couuriront : voila la nuict qui seruira de lumiere tout autour de moi53 »), Mestrezat cherche à supprimer des caractéristiques syntaxiques hébraïques, à savoir l’accumulation paratactique, en transformant la parataxe de 1588 (suites de phrases sans lien 49syntaxique) en une période composée de phrases coordonnées et subordonnées ; d’autre part, il supprime les hébraïsmes Voire et voici :
Eternel tu m’as sondé & cognu, tu cognois quand ie m’aßieds & quand ie me leue, tu apperçois de loin ma pensée, & deuant que la parole soit sur la langue tu cognois desia le tout. Si i’ay dit, au moins les tenebres me couuriront, voilà la nuict seruira de lumiere à l’entour de moy.
3. 1700-1750 : on ne peut plus, dès lors, citer telle quelle la Bible de Genève. Le premier prédicateur de cette période, Bénédict Pictet, dont la doctrine en matière d’inspiration divine des Écritures54 le met à l’abri d’une sacralisation de quelque traduction que ce soit, ne se réfère à aucune source identifiable. Puis, huit ans après, les citations d’Antoine Maurice sont proches de la première révision de la Bible de Genève par Jean-Frédéric Ostervald, parue en 1724, mais comme le sermon a été prononcé avant 1724, il est difficile d’affirmer qu’il en ait tiré directement les versets cités. Remarquons cependant que la version de 1724 était très proche de celle de 1588, et ce n’est que la révision de 1744 qui deviendra la nouvelle bible de référence pour plus de 100 ans. Les versets de psaumes qu’on trouve dans le texte de Maurice sont donc proches à la fois de 1588 et de 1724, sans les archaïsmes évidents de la Bible de Genève55.
50Quant aux derniers textes de notre période, ceux de Jean-Henri le Maître, Vinchon des Vœux et Isaac Jacquelot, ils sont tous très clairement basés sur la version de 1724 qu’ils citent sans aucun changement. Nous n’avons pas, dans ce sous-corpus sur les psaumes, de sermons plus tardifs qui seraient basés sur la version d’Ostervald de 1744.
En résumé, on observe que les traductions propres au prédicateur ne se trouvent qu’à la fin du xvie siècle et au début du xviiie, et qu’une évolution du rapport au texte source se dessine clairement, avec une diminution des citations sans changements (on passe de 71.7 % à 50 %), et une augmentation des interventions pour moderniser le texte, surtout après 1700 (de 15 à 35 %).
% des citations |
Nb de citations/période |
Pas de changement (par rapport à la Bible de référence : 1588 puis 1724) ou changement graphique léger |
Changements rhétoriques (intégration au sermon) |
Accentuation des archaïsmes |
Changements syntaxiques (connecteurs et structure) |
Suppression des archaïsmes et des hébraïsmes |
Traduction propre |
||||||
1590-1600 |
2 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
2 |
100 % |
1600-1650 |
60 |
43 |
71.7 % |
1 |
1.66 % |
5 |
8.33 % |
4 |
6.66 % |
9 |
15 % |
0 |
0 |
1650-1700 |
29 |
22 |
75.86 % |
0 |
0 |
0 |
0 |
2 |
6.89 |
5 |
17.2 % |
0 |
0 |
1700-1750 |
20 |
10 |
50 % |
2 |
10 % |
0 |
0 |
0 |
0 |
7 |
35 % |
1 |
5 % |
On peut se demander dans quelle mesure cette périodisation correspond à celle qu’on observe pour les révisions du psautier lui-même. 51J. Gœury56, repris par I. Kirschleger57, montre comment le caractère intangible de la Bible de 1588 commence à être remis en question vers 1640-1650, comme si la distance linguistique commençait à être ressentie comme vraiment problématique. La période de « crise » identifiée ici répond parfaitement à la période de rupture dans l’évolution morpho-syntaxique du français préclassique et classique identifiée par Ayres-Bennett et Caron58, à savoir 1620-1640, avec un point de rupture autour de 1630. La perception du changement, légèrement retardée par rapport à sa réalité, explique que ce ne soit que 10 ou 20 ans plus tard que l’urgence de la modernisation apparaisse dans les textes.
Dans les sermons eux-mêmes, la fidélité à la version des psaumes de 1588 frémit à partir de Jean Daillé, en 1658 et s’affaiblit avec le xviie siècle finissant.
langue des citations bibliques
et langue des sermons :
une Évolution diachronique contrastÉe
À ce stade de nos recherches, il n’est pas possible de faire apparaître une différence de traitement des citations des psaumes de celles du reste de la Bible. Cette constatation est relativement étonnante et infirme notre hypothèse de départ. En effet, on pourrait penser que la mémorisation des psaumes dans la version de Marot/Bèze entraine le prédicateur à en insérer des extraits dans son sermon. Or, cela ne semble pas être le cas. Nous avons comparé toutes les citations des psaumes dans notre corpus de recherche avec leur version tirée du psautier huguenot, pour nous apercevoir de la totale étanchéité des genres. Le peu de différences observées entre le traitement des citations des psaumes et du reste de la 52Bible est peut-être explicable par le fait que nous n’avons analysé que les citations clairement identifiées et référencées en marge. La liberté que les prédicateurs ont pu prendre avec les sources psalmiques s’est selon toute vraisemblance manifestée dans d’autres types de citations, comme les paraphrases ou les centons59. On peut donc penser que, en ce qui concerne les citations clairement identifiées, le pasteur prêche bible à la main, et ne laisse pas les paroles des chants s’infiltrer dans ses prédications.
Pour cette raison, nous pouvons utiliser l’ensemble des sermons du corpus SERMO, et plus seulement ceux qui citent des psaumes pour la suite de la recherche. En effet, afin d’obtenir des résultats statistiques significatifs, nous avons besoin d’un nombre plus important de citations.
Afin d’observer objectivement ce que les prédicateurs ressentaient intuitivement et qui les poussait à moderniser les citations, nous choisirons quelques évolutions syntaxiques qui ont eu lieu au xviie siècle, pour voir dans quelle mesure elles se sont répandues dans toutes les couches des textes homilétiques. Les trois aspects choisis ici ont été proposés par Ayres-Benett et Caron60 pour observer l’évolution de la langue classique et permettront de placer la langue des sermons dans une perspective plus globale.
« Dans »/« dedans »
On peut observer, par exemple, que certaines unités ayant eu au départ deux fonctions n’en retiennent qu’une au cours du xviie siècle. C’est le cas des formes dedans/dessous/dessus/dehors qui pouvaient être utilisées indistinctement comme prépositions et comme adverbes et qui se superposaient donc aux formes simples dans/sous/sur/hors61. Autour de 1630, les formes composées se spécialisent en tant qu’adverbe, et les formes simples ne sont plus utilisées que comme préposition62. 53En ce qui concerne la paire dedans/dans, la spécialisation de dedans en tant qu’adverbe entraîne l’apparition et la croissance de la préposition dans. Ainsi, on peut comparer la fréquence de cette préposition dans l’ensemble du corpus SERMO, en ne prenant que les citations (Fig. 1) d’une part, et en les excluant des textes des sermons, d’autre part (Fig. 2).
Fig. 1 – Fréquence de dans |
Fig. 2 – Fréquence de dans dans |
Il apparaît très clairement que cette innovation linguistique pénètre d’abord, et de manière plus massive dans les textes des prédicateurs (Tableau 2), et que ce n’est qu’à partir de 1720 que la fréquence de « dans » des citations rattrape celle de la « langue normale ». La chute des deux dernières décennies de notre période est due à l’adoption de la révision d’Ostervald, très proche du texte de 1588.
Place du clitique
Une autre évolution observable concerne l’ordre des mots, en particulier des pronoms clitiques. On sait en effet que le français préclassique et classique va passer d’un ordre Clitique Verbe conjugué Verbe infinitif (CVV), à savoir pronom clitique devant le verbe conjugué (« Je le veux voir ») à un ordre Verbe conjugué Clitique Verbe à l’infinitif (« Je veux 54le voir »)63. Dans le corpus SERMO pris globalement, on trouve les proportions suivantes pour les verbes « vouloir » et « pouvoir ».
Corpus Sans citations |
Pourcentage type |
Pourcentage type |
SERMO 1590–1650 |
134 = 92.4 % |
11 = 7.6 % |
SERMO 1650-1699 |
120 = 76.9 % |
36 = 23.1 % |
SERMO 1700-1750 |
34 = 30 % |
83 = 70 % |
Corpus Seulement les citations |
Pourcentage type |
Pourcentage type |
SERMO 1590–1650 |
13 = 100 % |
0 |
SERMO 1650-1700 |
3 = 75 % |
1 = 25 % |
SERMO 1700-1750 |
3 = 37 % |
5 = 63 % |
Pour cet aspect syntaxique, on constate que le déplacement du clitique commence au même moment dans les sermons et dans les citations, mais ralentit au xviiie siècle pour les citations64.
« Lequel »/« qui »
On observe à cette période le remplacement progressif du pronom relatif marqué en genre et en nombre (lequel, laquelle, lesquels, lesquelles) en position de sujet par le pronom relatif qui. D’après Ayres-Bennett et 55Caron65, ce changement a lieu vers 1630, ce que nous observons aussi dans les sermons. Les citations, quant à elles, restent plus archaïques, jusque vers 1670, s’adaptent à la nouvelle tournure jusqu’à 1720, puis reviennent à plus d’archaïsmes par la suite.
Fig. 3 – Lequel, pronom relatif sujet |
Fig. 4 – Lequel, pronom relatif sujet |
Les trois phénomènes que nous venons d’observer montrent que les citations, sans surprise, conservent plus longtemps des traits archaïques, comme « dedans » préposition, la suite « Je le veux voir », ou « lequel » au lieu de « qui ». Il faut souligner ici que nous observons dans les trois cas un retour à une langue plus archaïque autour de 1720, marquant l’influence de la première version d’Ostervald, puis, pour la dernière décennie de notre période, le rapprochement de la langue des citations avec celle des sermons, grâce à la révision de 1744, beaucoup plus moderne.
Cependant, aucune de ces marques n’a de lien particulier avec les langues sources de la Bible. À cet égard, il est intéressant d’observer deux autres traits qu’on pourrait qualifier d’hébraïsmes syntaxiques, et de voir si la sensibilité aux hébraïsmes, responsables du fameux « Patois de Canaan66 » évolue dans le temps. Il s’agit de l’utilisation du futur jussif67, 56à la place de l’impératif dans des formules comme « Tu ne tueras point » et de l’abondance de la conjonction « et ».
Futur
Fig. 5 – Futur dans les citations68. |
Fig. 6 – Futur dans les textes |
Si on exclut la fin du xvie siècle, on voit que le taux de futur explose dans les citations dès l’adoption de la traduction de Genève. Puis il diminue au fur et à mesure du siècle, lorsque les prédicateurs commencent à prendre quelques libertés avec le texte de 1588. Par la suite, la décennie de 1730, qui voit l’adoption de la première version d’Ostervald, très proche de celle de 1588, connait un nouveau pic de futurs, avant une baisse, lors de l’adoption de la révision de 1744. L’évolution dans les sermons eux-mêmes ne suit pas du tout la même tendance.
« Et »
La même observation peut être faite avec la conjonction « et » (trad. du l’hébreu « waw »), particulièrement symptomatique du style paratactique biblique.
57
Fig. 7 – Et dans les citations. |
Fig. 8 – Et dans les textes |
La diminution du nombre de « et » qui s’observe dans le texte même des sermons, correspond à un changement dans la perception globale de la cohésion textuelle au cours de notre période (tableau 7)69 . De manière générale, le nombre de conjonctions (coordination ou subordination) diminue sur toute la période. Comme on le voit en comparant les deux tableaux, le nombre de « et » dans les citations augmente fortement avec l’adoption de la bible de Genève, puis évolue parallèlement à la courbe de la langue des sermons, mais à une échelle beaucoup moins importante pour les citations elles-mêmes, et enfin, on retrouve un retour au style biblique paratactique dès l’adoption de la Bible d’Ostervald de 1724.
Au terme de cette recherche, nous pouvons replacer les sermons dans l’ensemble de la production écrite en français préclassique et classique. Nous constatons un triple retard : premièrement, dans les textes métadiscursifs, la rudesse de la syntaxe, contraire à la mode du temps, l’étrangeté du lexique, sont perçues à partir de 1650 seulement, pour être louées ou blâmées. Puis, la tension augmente, le décalage s’accentue, le 58retard est de plus en plus évident. Deuxièmement, du point de vue de la langue elle-même, si l’on considère que le point de rupture entre les deux états de langue se situe vers 1630, il faut constater que la langue des sermons eux-mêmes accuse un retard d’au moins 20 ans, selon les phénomènes observés. Troisièmement, en ce qui concerne les citations bibliques, qu’il s’agisse des psaumes ou de tout autre livre de la Bible, le retard est beaucoup plus important, puisque ce n’est que vers la fin du xviie siècle que les prédicateurs osent introduire quelques changements à la version canonique de 1588, avant de revenir provisoirement à un français archaïsant entre 1720 et 1740.
En conclusion, on peut affirmer qu’il existe une claire différence entre la langue commune et celle de la Bible, avec un stade intermédiaire représenté par la langue des sermons. Ainsi, prêcher « selon le stile de l’Écriture Sainte70 », c’est adopter la langue de son époque, mais avec un décalage chronologique certain, et y laisser largement transparaître le style spécifique de la Bible, qui, jusqu’à 1744, sera encore celui de la fin du xvie siècle.
Carine Skupien Dekens
Université de Neuchâtel, ILCF
1 Édouard Reuss, « Romanische Übersetzungen », dans Herzog’s Encyclopedy, cité et traduit par Emmanuel Pétavel, La Bible en France, Paris, Librairie française et étrangère, 1864, p. 186.
2 Véronique Ferrer, « La langue de Canaan, les clairs desseins d’un verbe inspiré », dans Cahiers Textuels, no 27, 2003, p. 33. Avec mes remerciements à Jean Vignes et à Isabelle Garnier pour leurs précieux renseignements.
3 Émile G. Leonard, Le Protestant français, Paris, Presses Universitaires de France, 1955, p. 117.
4 Voir à ce propos Carine Skupien Dekens, « Du Corbeau enroué au Patois de Canaan, l’influence des traductions bibliques sur le sociolecte protestant », dans Les Protestants à l’époque moderne, une approche anthropologique, dir. Olivier Christin et Yves Krumenacker, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2017, p. 397-416.
5 Pour un état complet de la question, voir Wendy Ayres-Bennett et Philippe Caron, « Periodization, Translation, Prescription, and the Emergence of Classical French », dans Transactions of the Philological Society 114 (1), 2016, p. 1–52. https://doi.org/10.1111/1467-968X.12081.
6 Dans Histoire de la langue française des origines à nos jours, Paris, Colin, 1966, t. III, cité d’après Claire Badiou Monferran, « Le français préclassique et l’early Modern French », dans « Périodisation(s) », Diachroniques, éd. Robert de Dardel, Michel Banniard et Bernard Combettes, PU Paris-Sorbonne, no 1, avril 2011, p. 83-110.
7 Voir Évolution et variation en français préclassique. Étude de syntaxes, éd. B. Combettes, Paris, Champion, 2003.
8 Voir B. Combettes « La périodisation en linguistique : problèmes théoriques et méthodologiques », 2008, accessible en ligne via http://www.linguistiquefrancaise.org, Collection des Congrès Mondiaux de Linguistique Française ; Bernard Combettes et Christiane Marchello-Nizia, « La périodisation en linguistique historique : le cas du français classique », éd. Bernard Combettes, Céline Guillot, Évelyne Oppermann-Marsaux, Sophie Prévost et Amalia Rodríguez Somolinos, Le Changement en français. Études de linguistique diachronique, Bern, Berlin, Bruxelles, Frankfurt am Main, New York (NY), Oxford, Wien, Lang, 2010, p. 129-142 ; Élizabeth C. Traugott, et Graeme Trousdale, Constructionalization and Constructional Changes, Oxford, OUP, 2013.
9 Voir à ce propos Claude Favre de Vaugelas, Remarques sur la langue française, Édition critique avec introduction et notes par Zygmunt Marzys, Genève, Droz, 2009, p. 19 sq.
10 Voir par exemple le corpus de la correspondance diplomatique du congrès de Westphalie APWCF, Annette Gerstenberg et Bryan Jurish, Acta Pacis Westphalicae, corpus linguistique, Berlin-Brandenburgische Akademie der Wissenschaften, 2017, http://kaskade.dwds.de/dstar/apwcf/›.
11 Voir Pierre-André Sayous, Histoire de la littérature française à l’étranger, vol. 2, Paris, Cherbulier, 1853, p. 83 : « À la longue, le contraste entre le français consacré devant l’Église et la langue usuelle devint si frappant, que les adversaires et les profanes parmi les Réformés en faisaient des railleries toujours plus indécentes. Les catholiques que la curiosité attirait aux sermons protestants, trouvaient ridiculement barbare ce mélange d’expressions surannées ».
12 La Bible, qui est toute la saincte Escriture du Vieil et du Nouveau Testament : Autrement, l’Anciene et la Nouvelle Alliance. Le tout reveu et conferé sur les textes hebrieux et grecs par les Pasteurs et professeurs de l’Eglise de Geneve, Genève, Jérémie Des Planches, 1588.
13 Jean-Frédéric Ostervald, La Sainte Bible qui contient le Vieux et le Nouveau Testament, c’est-à-dire l’Ancienne et la Nouvelle Alliance, Amsterdam, Rotterdam, 1724 ; La sainte Bible, qui contient le Vieux et le Nouveau Testament / revue et corrigée sur le texte hébreux et grec par les pasteurs et les professeurs de l’Église de Genève ; avec les argumens et les réflexions sur les chapitres de l’Écriture Sainte et des notes par J. F. Ostervald, Neuchâtel, Abraham Boyve, 1744.
14 Moyse Amyraut, Six livres de la vocation des pasteurs, Saumur, J. Lesnier, 1649.
15 Lettre de Valentin Conrart, membre de l’Académie française à Turretini, datée du 10 décembre 1668, citée par François Laplanche, « La Bible chez les Réformés », dans Le Siècle des Lumières et la Bible, dir. Yvon Belaval et Dominique Bourel, Paris, Beauchesne, 1986, p. 459-480.
16 Valentin Conrart, Le Livre des Psaumes En vers François, par Cl. Ma. & Th. de Be. Retouchez par feu Monsieur Conrart, Conseiller Secretaire du Roy, Maison & Couronne de France, & des Finances. Premiere Partie. Se vend à Charenton, Par Antoine Cellier, Estienne Lucas, & la Veuve Ollivier de Varennes, 1677. Préface.
17 Charles Drelincourt, Neuf Dialogues contre les Missionnaires sur le Service des Eglises Réformées, Genève, Samuel Chouët, 1655.
18 Jacques Abbadie, Traité de la vérité de la religion chrétienne, vol. 2, Rotterdam, 1689.
19 Ibid., p. 318.
20 Moyse Amyraut, Six livres de la vocation des pasteurs, op. cit., non paginé.
21 Id. Tous les textes sont retranscrits selon la graphie originale, y compris pour la ponctuation, sauf ceux qui sont cités d’après un autre auteur.
22 Ch. Drelincourt, Neuf Dialogues contre les Missionnaires […], op. cit. p. 60-61.
23 Frédéric Delforge, « Les éditions protestantes de la Bible en langue française », dans Le Grand siècle et la Bible, dir. Jean-Robert Armogathe, Paris, Beauchesne, 1989, p. 327. Un Genevois, Jean Diodati batailla pendant toute sa vie pour obtenir l’autorisation de publier sa traduction française de la Bible, ce à quoi s’opposaient fermement les Réformés français, en particulier de l’école de Saumur. Sa traduction fut publiée en 1644. Voir François Laplanche, L’Écriture, le sacré et l’histoire. Érudits et politiques protestants devant la Bible en France au xviie siècle, Amsterdam & Maarssen, APA-Holland University press, 1986, p. 362.
24 Lettre du 10 décembre 1688 de Valentin Conrart à Turretini, op. cit., p. 564.
25 Valentin Conrart, Le Livre des Psaumes En vers François, op. cit. Préface non paginée.
26 Ibid.
27 Ibid.
28 Ibid.
29 « Je sçay bien que pour ce qui regarde l’éloquence, on les trouvera [les sermons] peu dignes de ce siecle, ou on essaye de la monter au plus haut point de sa pompe & de sa sublimité », Épître dédicatoire, Sermons sur quelques sentences de l’Écriture. À Saumur, Chez Isaac Desbordes, Imprim. & Marchand Libraire, 1647, cité d’après Inès Kirschleger, Les Psaumes dans la Tradition Réformée (1610-1715), thèse dactylographiée de l’Université Paul-Valéry Montpellier III, sous la direction du Professeur Christian Belin, 2009, p. 238.
30 C. Skupien Dekens, « Du corbeau enroué au Patois de Canaan », art. cité.
31 http://sermo.unine.ch/SERMO/, dirigé par C. Skupien Dekens. Transcriptions, étiquetage, traitement informatique effectués par Magdalena Augustyn, Cinthia Meli et Ljiljana Dolamic, avec la collaboration d’Aurélie Elzingre-Reusser.
32 Avec mes remerciements à Cinthia Meli qui a effectué ce travail fastidieux avec beaucoup de minutie. Sur le site sermo.unine.ch, toutes les citations bibliques sont accompagnées des références et des citations de leur source, Bible de 1588, Bible d’Ostervald de 1724 ou de 1744 ainsi que de la traduction moderne tirée de la Segond 21.
33 Pour une approche plus large de la périodisation, voir C. Skupien Dekens, « Du Corbeau enroué au Patois de Canaan », art. cité.
34 Nicolas Séguier, Vintquatre Homelies, ou, Sermons familiers, sur le LIII. Chap. du Livre des Revelations du prophete Esaïe, Genève, Antoine Blanc pour Jacques Chouet, 1598.
35 Pierre Merlin, Sermons sur le livre d’Ester, Genève, François le Preux, 1594.
36 La citation du Ps 27, 1, apparaît ainsi dans le sermon de Bèze (1593), « l’Eternel est ma lumiere (voire l’Eternel mort & ressuscité pour moy) de qui auray-ie peur ? l’Eternel est la force de ma vie, de qui auray-ie frayeur ? » ; dans la Bible d’Olivétan (1535), « Le Seigneur est ma lumiere & mon salut : de qui auroy je crainte : le Seigneur est la force de ma vie : de qui auray ie paour ? » ; et dans la Bible de Genève (1588), « L’Eternel est ma lumiere & ma delivrance, de qui aurai-ie peur ? L’Eternel est la force de ma vie, de qui aurai-ie frayeur ? ».
37 Max Engammare, « Calvin connaissait-il la Bible ? Les citations de l’Écriture dans ses sermons sur la Genèse », Bulletin de la Société de l’histoire du Protestantisme Français, vol. 141, 1995, p. 163-184.
38 Pour le Ps 40, 1, on trouve ainsi dans le sermon de Bèze, « I’ay attendu en attendant, & Dieu s’est tourné de mon costé » ; dans la Bible d’Olivétan (1535), « I’Ay attendu le Seigneur / & il sest encline vers moy / & a exauce mon cry » ; et dans la Bible de Genève (1588), « I’ai patiemment attendu l’Eternel, & il s’est encliné vers moi, & a ouï mon cri ».
39 Voir ci-dessous.
40 Nous soulignons.
41 Voir par exemple le sermon de Primerose (1624) sur le Ps 45, 8 : « O Dieu, ton Dieu t’a oinct d’huile de liesse par dessus tes compagnons », repris sans changement de la Bible de Genève : « Tu aimes iustice, & hais meschanceté : pource, ô Dieu, ton Dieu t’a oinct d’huile de liesse par dessus tes compagnons ».
42 Le texte de la Bible de Genève donne : « Où irai-ie arriere de ton Esprit ? & où fuirai-ie arriere de ta face ? Si ie monte aux cieux tu y es, si ie me trouve gisant au sepulcre, t’y voila. Si ie pren les ailes de l’aube du jour, & ie me loge derriere la mer : Là aussi me conduira ta main, & ta dextre m’y empoignera. Si i’ai dit, Au moins les tenebres me couuriront : voila la nuict qui seruira de lumiere tout autour de moi » (nous soulignons).
43 Les Psaumes dans la Tradition Réformée, op. cit., p. 302 sq.
44 Le texte de la Bible de Genève donne : « Celui qui reside és cieux s’en rira : le seigneur se moquera d’eux. Lors il parlera à eux en sa colere, & les rendra esperdus en l’ardeur de son ire » (nous soulignons).
45 Nous soulignons.
46 Cité d’après Nathalie Fournier, Grammaire du français classique, Paris, Belin, 2002, p. 152.
47 Voir à ce propos C. Skupien Dekens, « Du Corbeau enroué au Patois de Canaan », art. cité, p. 409.
48 Nous soulignons.
49 Bible de Genève (1588).
50 Voir ci-dessous.
51 Voir à ce propos C. Skupien Dekens, « Du Corbeau enroué au Patois de Canaan », art. cité, p. 412.
52 Nous soulignons.
53 Bible de Genève (1588).
54 Voir à ce propos F. Laplanche, L’Écriture, le Sacré et l’Histoire, op. cit., « Pictet devant l’Écriture », p. 620 sq.
55 Voir par exemple le Ps 79, 1-2 : on trouve chez A. Maurice (1722) « O Dieu, les nations sont entrées dans ton héritage, elles ont souillé le Temple de ta Sainteté, & elles ont reduit Jérusalem en un monceau de pierres ; on a donnè les corps morts de tes Serviteurs pour viande aux oiseaux des Cieux, la chair de tes bien-aimés aux bêtes de la terre. Jusques à quand, ô Eternel ! seras tu à jamais irrité, & ta jalousie brulera-t-elle comme un feu ? » ; dans la Bible d’Ostervald de 1724, « O Dieu, les nations sont entrées dans ton héritage ; ils ont souillé le Temple de ta Sainteté & ils ont mis Jérusalem en monceaux de pierres. 2. Ils ont donné les corps morts de tes serviteurs pour viande aux oiseaux des Cieux, la chair de tes bien-aimez aux bêtes de la terre. 5. Jusques à quand, Ò Eternel ! te courrouceras tu à jamais ? ta jalousie s’embrasera-t-elle comme un feu ? » ; et dans la Bible de Genève de 1588, « O Dieu, les nations sont entrees en ton heritage : ils ont pollu le Temple de ta saincteté, & ont mis Ierusalem en monceaux de pierres. Ils ont donné les corps morts de tes serveiteurs pour viande aux oiseaux des cieux, la chair de tes bien-aimés aux bestes de la terre. […] Jusques à quand, Ô Eternel ? te courrouceras-tu à iamais ? ta ialousie s’embrasera-elle comme un feu ? » Et pour le verset 9, on trouve de même : « O Dieu de nôtre délivrance aide ton Peuple pour l’amour de la gloire de ton Nom, & le délivre » (A. Maurice) ; « Ô Dieu de nôtre délivrance, aide-nous pour l’amour de la gloire de ton Nom, & nous délivre » (Bible d’Ostervald) ; « Ô Dieu de nostre deliurance, aide-nous, pour l’amour de la gloire de ton Nom, & nous recoux » (Bible de Genève). Nous soulignons.
56 J. Gœury, « Paraphrastes ou réviseurs ? Les poètes protestants face au psautier sous le régime de l’Édit de Nantes (1598-1685) », dans Les Paraphrases bibliques aux xvie et xviie siècles, éd. V. Ferrer et A. Mantero, Genève, Droz, T.H.R., no 415, 2006, p. 301-319.
57 I. Kirschleger, Les Psaumes dans la Tradition Réformée, op. cit. p. 48.
58 W. Ayres-Bennett et P. Caron, « Periodization, Translation, Prescription, and the Emergence of Classical French », art. cité, p. 46.
59 Voir I. Kirschleger, Les Psaumes dans la Tradition Réformée, op. cit., p. 316.
60 W. Ayres-Bennett et P. Caron, « Periodization, Translation, Prescription, and the Emergence of Classical French », art. cité.
61 Voir à ce propos Antonella Amatuzi, Wendy Ayres-Bennett, Annette Gerstenberg, Lene Schoesler et Carine Skupien Dekens, « Améliorer et appliquer les outils numériques. Ressources et approches pour l’étude du changement linguistique en français préclassique et classique », Linguistique historique, Strasbourg, ELiPhi, à paraître.
62 Bengamin Fagard et Laure Sarda, « Étude diachronique de la préposition dans : des emplois spatiaux-temporels aux emplois abstraits ? », dans Autour de la préposition (position, valeurs, statut et catégories apparentées à travers les langues), éd. Jacques François, Caen, Presses universitaires de Caen, 2007, https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00198985 ; Denis Vigier, « La préposition dans au xvie siècle. Apports d’une linguistique instrumentée », dans Langages, 2017/2, no 206: « Du quantitatif au qualitatif en diachronie : prépositions françaises », p. 107 et 117.
63 Ce sujet est largement débattu, voir notamment Lene Schøsler, « Grammaticalisation et dégrammaticalisation : étude des constructions progressives en français du type Pierre “va / vient / est chantant” », dans Sémantique et diachronie du système verbal français, éd. Emmanuelle Labeau, Carl Vetters et Patrick Caudal, Cahiers Chronos, no 16, Amsterdam, New York, Rodopi, 2007, p. 91-119 ; Christian Lehmann, « Thoughts on Grammaticalization », Classics in linguistics, vol. 1, 3rd ed., Berlin, Language Science Press, 2015 ; Amatuzzi et al., « Améliorer et appliquer les outils numériques. Ressources et approches pour l’étude du changement linguistique en français préclassique et classique », art. cité.
64 Cependant, les chiffres dans les citations sont trop faibles pour être significatifs.
65 W. Ayres-Bennett et P. Caron, « Periodization, Translation, Prescription, and the Emergence of Classical French », art. cité.
66 Voir C. Skupien Dekens, « Du corbeau enroué au patois de Canaan », art. cité.
67 « Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre cœur, de toute votre âme, et de toutes vos forces », traduction catholique du Deutéronome VI, 4–5 (1684), Le Maistre de Sacy, cité par Gabriel Spillebout, Grammaire de la langue française du xviie siècle, Paris, Picard, 1985, p. 215.
68 Il n’est pas possible de distinguer le futur jussif des autres usages de ce temps de manière automatique. Cependant, la fréquence des futurs est significative.
69 Voir C. Skupien Dekens, « Ponctuation et cohésion : ce que les premiers mots nous disent. Étude sur un corpus de textes religieux du xvi-xviiie siècle », Verbum, à paraître ; Gilles Siouffi, « Quelques remarques sur la phrase au xviie siècle », dans La Phrase : Mélanges offerts à Jean-Pierre Seguin, dir. Catherine Rannoux et Jacques Dürrenmatt, Poitiers, La Licorne, no 42, 1997, p. 233-244 ; et du même auteur, « Vaugelas et la notion de cohésion », dans Problèmes de cohésion syntaxique de 1550 à 1720, éd. Janine Baudry et Philippe Caron, Limoges, Pulim, 1998, p. 279-231, et « Le regard des grammairiens », dans Évolution et variation en français préclassique, op. cit., p. 19-67.
70 I. Kirschleger, Les Psaumes dans la tradition réformée, op. cit. p. 226.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-08785-4
- EAN : 9782406087854
- ISSN : 2494-5102
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-08785-4.p.0035
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 11/12/2018
- Périodicité : Annuelle
- Langue : Français