Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Paul Claudel, aujourd’hui
- Pages : 483 à 491
- Collection : Rencontres, n° 470
- Série : Littérature des xxe et xxie siècles, n° 39
Résumés
Didier Alexandre, « Introduction »
Présentation du volume qui rassemble les contributions aux colloques commémoratifs du cent cinquantième anniversaire de Paul Claudel, à Chicago, à Paris et à Tokyo en 2018. Si Claudel fait partie de notre patrimoine, de quel Claudel parlons-nous ? Du diplomate, de l’écrivain, de l’homme de théâtre, du poète, du catholique ? Universitaires français, japonais, américains, femmes et hommes de théâtre envisagent la contemporanéité de l’écrivain, de son vivant jusqu’à aujourd’hui.
Jean-Luc Marion, « Habiter poétiquement le monde »
Si Claudel rejoint le projet même de Mallarmé pour lequel la poésie doit créer le monde, en révéler l’essence, c’est avec une approche rimbaldienne de dépossession de soi qu’il va mettre cet impératif en œuvre. Ainsi doit se créer un vide « pour Dieu », pour voir le monde et le recevoir. Et le restituer.
Thomas Pavel, « “Ce lien entre lui et moi”, Le Soulier de satin, I, V »
Comparés aux individus fragiles, toujours à la recherche d’eux-mêmes et qui hantent les romans du xxe siècle, les personnages du Soulier de satin sont de véritables preux, sûrs d’eux-mêmes, issus directement de Dieu, sachant bien que leur tâche consiste à assurer à la fois l’unité d’un couple choisi dès l’instant de la création du monde et celle de la terre sur laquelle ils vivent. Leur amour et leur courage d’imaginer l’harmonie géographique et spirituelle du monde les rendent inoubliables.
484Pascal Dethurens, « Claudel contemporain ? Le poète, les lumières du siècle et la part de l’ombre »
Claudel est-il encore lisible aujourd’hui ? Encore acceptable, encore parlant, encore présent pour nous ? Ce qu’il convient d’expliciter dans la question « Claudel contemporain ? », c’est bien ce qui nous met à l’épreuve de son œuvre quand tout nous sépare d’elle.
Dominique Millet-Gérard, « Inactualité de Paul Claudel »
Claudel est-il si « résolument contemporain » ? Sa personnalité complexe résiste à une telle épithète simplificatrice : d’abord dans son rapport à l’actualité, tantôt enthousiaste tantôt réticent ; puis dans ses choix esthétiques, partagés entre modernité provocatrice et admiration pour l’archaïsme eschyléen ou japonais : son style n’est-il pas inclassable, aux antipodes de l’écriture contemporaine ? Enfin dans sa quête du sens, transcendant toute mode ou idéologie.
Pierre Brunel, « Claudel et la mondialisation. Pour une nouvelle lecture du Soulier de satin »
Souvent reprise, y compris par de grands économistes, la phrase qui ouvre la première « journée » du Soulier, « la scène de ce drame est le monde », s’impose au début de la réflexion engagée dans ce volume. Pour Claudel, le « tout-monde » (Édouard Glissant) est inséparable du catholicisme et, devant le Japonais Daibutsu, Don Rodrigue définit sa vocation comme celle d’un « homme catholique » qui ne peut tolérer qu’une partie du monde « vive dans l’hérésie ».
Yvan Daniel, « Paul Claudel, ambassadeur du monde en France »
Cette contribution analyse la dimension mondiale de l’expérience diplomatique et professionnelle mais aussi personnelle et créatrice de Claudel. Conscient des conséquences de la mondialisation, non seulement sur la vie internationale, diplomatique, économique et financière, mais aussi dans la création littéraire, dès son premier séjour en Asie, et jusque dans les années de sa retraite, le diplomate-écrivain joue le rôle d’« ambassadeur du monde en France ».
485Claude Pérez, « Claudel. Mondialisation, modernité, nostalgie »
On a récusé la pertinence du terme de « mondialisation », appliqué à Claudel, au motif qu’il serait anachronique. L’étude montre que cette assertion est inexacte. Claudel diplomate et économiste est (notamment durant sa période chinoise) l’un des agents de ce que les historiens de l’économie appelle aujourd’hui la première mondialisation, qui s’achève en 1914. Ses œuvres se soucient moins de célébrer les différences locales que de les relier.
Michel Jarrety, « Claudel, Valéry et l’Europe »
Valéry et Claudel partagent le souci de conciliation européenne que Briand cherche à promouvoir, mais si le second prend en compte des considérations politiques, territoriales ou économiques, et envisage des États-Unis d’Europe pour contrer la puissance économique américaine, le premier s’en tient à la défense et illustration de l’esprit européen qui a fait l’exception du vieux continent, et à la différence de Claudel, ne se soucie pas des relations avec l’Orient.
Didier Alexandre, « Le Japon exemplaire de Paul Claudel »
Durant son séjour diplomatique au Japon, de 1921 à 1927, Paul Claudel met en pratique une forme d’interculturalité qui repose paradoxalement sur le constat historique de l’uniformisation du globe, sur la conscience de la nécessité des différences culturelles et, enfin, une intime proximité, sensible, intellectuelle, et évidemment poétique entre la culture japonaise et la culture française.
Claude Pérez, « Un, et deux. Duplicité de Claudel »
« Le monde est un » : cette phrase, qui peut s’entendre de plusieurs manières (ce peut être une proposition théologique, philosophique, économico-politique, scientifique, poétique…) énonce un des articles essentiels de la « doctrine » de Claudel, conforme sur ce point à l’épistémologie romantique. Pourtant, la dualité, la duplicité est partout dans son œuvre et essentielle à sa poétique. Cet article s’attache à décrire ce paradoxe et à en mesurer les enjeux.
486Ayako Nishino, « Le mondialisme de Claudel au Japon »
Cet article éclaire la notion de « mondialisme » que Claudel a trouvée au Japon. Il s’agit de son regard qui cherche à reconnaitre « l’unité du monde » dans l’art japonais. Ses textes adressés aux Japonais, son discours à l’occasion de la publication de Sainte Geneviève en particulier dévoilent deux aspects de ce regard : l’intemporalité et le refus de la barrière des langues.
Catherine Mayaux, « Claudel lecteur de la presse d’après son Journal »
Claudel pratique toutes sortes de journaux auxquels il réagit publiquement ou dans son Journal. Cette lecture, pendant laïc de celle du bréviaire, consonne avec l’écriture du diariste. Les articles sur la vie spirituelle, les (neuro)sciences, l’histoire et l’archéologie retiennent son attention. Il lit dans l’actualité le témoignage d’événements subtilement gouvernés par un « dess(e)in » où le divin tient sa place, et cherche dans les événements une morale, ou au moins, une leçon universelle.
Anne Verdure-Mary, « La réception de l’œuvre de Claudel par Gabriel Marcel. Deux catholicismes face à face »
Gabriel Marcel, philosophe, dramaturge et critique, converti au catholicisme en 1929, entretient avec l’œuvre de Claudel une relation complexe. S’il considère le dramaturge comme rénovateur du théâtre chrétien et salue le ton des premières pièces, il se montre critique quant à son évolution et oscille entre enthousiasme et agacement : sobriété, humilité, pauvreté, qu’il considère comme essentielles en religion ne se retrouvent pas dans le théâtre claudélien, qualifié parfois de dogmatique.
Michel Jarrety, « Claudel et Valéry, une amitié bien incertaine »
Claudel et Valéry se sont brièvement rencontrés aux Mardis de Mallarmé, mais aucune amitié n’en est née. Ils se retrouvent dans les salons parisiens à la fin de la première guerre mondiale et leurs relations deviennent plus étroites. Mais une secrète rivalité de poète à poète se fait jour, et Claudel se montre parfois sévère pour Valéry dans son Journal. La seconde guerre mondiale les rapproche : une même hostilité à l’Occupant les réunit, et, l’âge venant, les querelles littéraires s’effacent.
487Géraldine Poels, « Paul Claudel, écrivain médiatique. Un parcours à travers les archives de l’INA »
Paul Claudel est présenté à travers les traces audiovisuelles de sa vie et de son œuvre, dans les collections de l’INA (Institut national de l’audiovisuel), qui témoignent de l’importance de sa reconnaissance, de son vivant, et de l’influence de son œuvre jusqu’à nos jours. À travers le parcours proposé ici, d’interviews en adaptations, Claudel apparaît en effet non seulement comme écrivain, mais comme une grande figure médiatique de son temps.
Marie Gaboriaud, « Claudel et la musique de son temps, un “paradis de l’Absence” ? »
Le rapport de Claudel à la musique, son wagnérisme repenti et ses collaborations avec des compositeurs sont bien connus. Reste encore à interroger sa position dans l’époque musicale. Que pouvait être alors le rapport à la musique d’un auteur toujours en partance, souvent absent des saisons parisiennes, mais citoyen averti du monde, et témoin, en Chine ou aux États-Unis, de pans inédits de la vie musicale de son temps ?
François Bompaire, « La corde au cou de l’ironie ? Refus, définition et pratiques de l’ironie chez Paul Claudel »
En 1933, dans les paraboles que sont La Mort de Judas et Le Point de vue de Ponce Pilate, Paul Claudel engage un dialogue avec Gide, Suarès et Goethe sur le scepticisme et l’ironie. Avec la fausse proximité du ventriloque, il donne voix à deux ironistes au sens du xixe siècle – pratiquant la dérision de l’idéal, ici christique. La possibilité d’un discours ironique catholique, d’une histoire claudélienne de l’ironie et d’incompréhensions entre son rapport à l’ironie et le nôtre s’y fait jour.
Ayako Nishino, « Claudel devant ses contemporains japonais »
Cet article examine la réception de la figure de Claudel par certains de ses contemporains japonais. Pour Omi Komaki, socialiste, père de la littérature prolétarienne, il avait été « représentant du bourgeois français ». Mais la conférence sur Charles-Louis Philippe lui a fait découvrir la véritable valeur de Claudel, poète ouvert à l’universalité, qui écrit à la place du peuple.
488Yvan Daniel, « Paul Claudel et la Chine contemporaine »
Cette contribution analyse le point de vue de Claudel sur la Chine et son développement politique et économique, bien après son séjour sur place (1895-1909), dans les bouleversements de la fin des années 1940 et les années 1950. Elle s’intéresse en particulier aux réactions et aux analyses de Claudel au moment de la proclamation de la République populaire de Chine en 1949.
Pascale Alexandre-Bergues, « Le théâtre claudélien au confluent des cultures »
Claudel découvre le théâtre japonais lors de son séjour au Japon entre 1921 et 1927. L’étude souhaite replacer cette découverte dans un contexte plus général : cette expérience d’altérité s’inscrit dans la quête, qui anime alors l’Occident et la France, de formes dramaturgiques nouvelles. Le nô rejoint ainsi la galerie des formes théâtrales qui ont permis à l’écrivain d’édifier un théâtre novateur, au confluent des cultures.
Sever Martinot-Lagarde, « Claudel et Brecht. Deux parcours dramaturgiques en miroir »
Les premières œuvres de Brecht sont proches de celles de Claudel par leur tonalité anarchiste et lyrique. Le tournant de la maturité rapproche aussi les deux auteurs, qui inventent une dramaturgie de la parabole visant à rendre le geste signifiant et accompagnant l’action par le commentaire sur l’action. Ces conceptions sont résolument contemporaines, même si le catholicisme de Claudel a trouvé moins d’écho auprès des gens de théâtre que le marxisme de Brecht.
Bei Huang, « Claudel, promeneur à Shanghai, devant une Chine intemporelle et actuelle »
Entre 1895 et 1898, Claudel a passé la majorité de son temps à Shanghai où il a eu son premier poste diplomatique en Chine. Cinq poèmes de Connaissance de l’Est sont nés à cette époque, faisant voir une Chine largement intemporelle, avec sa vieille cité, sa population millénaire, sa religion populaire et son art du jardin. À côté cependant, il existe une Chine en pleine mutation dont le diplomate est un témoin privilégié. Entre les deux l’attitude du poète montre toute sa complexité.
489Michel Wasserman, « Le Japon, une ambassade mythique et fondatrice »
Parenthèse culturelle au sein d’une carrière diplomatique qui fut avant tout celle d’un « commercial », la mission d’ambassadeur de Claudel au Japon fonda les instruments et modes opératoires qui structurent encore la relation bilatérale. Elle fut l’occasion pour l’écrivain de se livrer, avec des créateurs japonais, à des actions de « métissage » artistique dont témoignent notamment La Femme et son ombre (drame dansé pour acteurs de kabuki), et le recueil des Cent phrases pour éventails.
Didier Alexandre, « Le moment américain dans l’œuvre de Paul Claudel »
Claudel centre son ambassade aux États-Unis, de 1927 à 1933, sur trois objectifs : l’image de la France aux États-Unis ; la question des dettes ; la crise de l’économie américaine, perçue dès 1928. Il prend acte de la mondialisation économique et politique. Poète, il lit autant cette Amérique moderniste en fonction de sa poétique qu’il ne modifie sa poétique à son contact. Le moment américain est un moment charnière dans l’œuvre poétique et l’activité diplomatique, qui sont indissociables.
Lionel Cuillé, « L’Apocalypse de la technique, une herméneutique claudélienne »
Si le voyage aux États-Unis confirme l’enthousiasme de Claudel pour « l’élasticité » du caractère américain avant la crise économique de 1929, de nombreux textes attestent d’un rapport complexe à l’égard de la technique : critiquée lorsqu’elle détourne des fins dernières, elle participe aussi de la co-naissance de la création divine. Apocalyptique, la technique (comme le cinéma documentaire) dévoile certaines obscurités de la Bible, tout en attestant de la fin du monde qu’elle contribue à précipiter.
Éric Touya de Marenne, « Claudel dans/pour l’avenir. Diplomatie, économie, éco-critique »
Cette étude explore dans quelle mesure les questions que Claudel pose à son époque peuvent nourrir nos réflexions face aux problèmes actuels et futurs du xxie siècle, liés aux crises politiques, économiques, et environnementales contemporaines, dans le contexte de ce que nous appelons la mondialisation.
490Bei Huang, « La poétique du vide dans Cent phrases pour éventails »
Le recueil de Cent phrases pour éventails de Claudel, paru à Tokyo en 1927, se caractérise par une poétique du vide. Chaque poème se veut une « phrase », un « souffle ». La présente communication propose d’analyser cette poétique selon trois dimensions : le vide comme champ de résonance, le vide comme espace de rapports et le vide comme miroir intérieur.
Pascal Lécroart, « Les écritures dramatiques contemporaines dans la postérité du verset claudélien »
Malgré l’éloignement temporel, Claudel reste une référence souvent présente quand on évoque les écritures dramatiques contemporaines. Peut-il pour autant être encore un modèle pour les auteurs ? À travers le cas particulier de la disposition du texte dite « en verset », l’article cherche à en mesurer une influence possible sur le théâtre des cinquante dernières années, parfois revendiquée, parfois masquée ou détournée, éventuellement réelle ou fantasmée.
Adélaïde Jacquemard-Truc, « Antoine Vitez. Lire et jouer Partage de Midi après Claudel »
Les archives de la mise en scène de Partage de Midi par Antoine Vitez sont conservées à la bibliothèque de l’IMEC. Leur étude permet de suivre l’histoire de cette mise en scène, de sa conception à sa réception. Les notes de travail de Vitez révèlent les différentes options de mise en scène envisagées et celles auxquelles il a renoncé. Sa lecture de la pièce est explicitée par ses écrits préparatoires et sa correspondance. Enfin, le dossier de presse reflète la réception de la mise en scène.
Raphaèle Fleury, « Un opéra pour le Soulier de satin »
Témoignage de la librettiste associée au projet, cet article expose les motivations de l’Opéra national de Paris à passer commande au compositeur Marc-André Dalbavie d’un opéra sur Le Soulier de satin qui sera créé dans la grande salle de Bastille au printemps 2021, et présente les principes dramaturgiques qu’elle a mobilisés et mis en œuvre pour l’établissement du livret.
491Florence Naugrette (coordinatrice), « Table ronde. Jouer Claudel aujourd’hui »
Table ronde présentée et animée par Florence Naugrette, professeur à Sorbonne Université. Avec Éric Ruf, comédien, metteur en scène et administrateur général de la Comédie-Française ; Yves Beaunesne, metteur en scène, directeur de la Comédie Poitou-Charentes ; Daniel Mesguich, comédien, metteur en scène, auteur ; Christian Schiaretti, metteur en scène et professeur à l’ENSATT.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-10422-3
- EAN : 9782406104223
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10422-3.p.0483
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 28/12/2020
- Langue : Français