Georges Docquois, Bêtes et gens de lettres,
Paris, Librairie Ernest Flammarion, 1895, p. 90-91
[…]
– N’avez-vous point aussi tenté l’élève des rossignols ?
– Vous connaissez Luscignole ?
– En effet, et je n’aurais eu garde de ne point remarquer la savante profession de foi d’oiselier que vous y faites.
– C’est que, voyez-vous, les rossignols m’ont beaucoup préoccupé. Nous en avons fait pendant longtemps la chasse, mon père et moi. Nous fabriquions nous-mêmes les filets pour les prendre. Nous y pensions dès le commencement d’avril, qui est l’époque de l’arrivée des rossignols en France. Il ne fallait pas songer à les capturer au moment de la couvée, sous peine de les voir promptement mourir de tristesse. Il n’est pas besoin que je vous fasse, au sujet de l’élève du rossignol, le petit résumé de cours que je viens de vous faire pour le faucon. Sachez seulement que cet oiseau délicieux, malgré l’absence du décor lunaire, chante infiniment mieux en captivité qu’à l’état libre. Il a, alors, un ramage ininterrompu, achevé comme une véritable mélodie. À ce propos, les anciens nous la baillaient belle en classant – de même que la perdrix, garrula perdrix ! – le rossignol dans la catégorie des oiseaux parleurs. Pline ne nous raconte-t-il pas qu’il y avait, à Rome, une auberge dans laquelle, le soir, on était très étonné d’entendre des rossignols parler entre eux politique ! Et il ajoutait, avec une assez jolie naïveté, ou avec une intention de mystification, que, probablement, ces oiseaux avaient retenu et répétaient les conversations des soldats et des rouliers qui venaient boire dans l’auberge !…