Établissement du texte
- Publication type: Book chapter
- Book: Mélodrames. Tome V, volume II. 1811-1814
- Pages: 663 to 667
- Collection: French Theatre Library, n° 72
ÉTABLISSEMENT DU TEXTE
Le texte que nous publions ici est établi d’après la première édition publiée en 1814 chez Barba (64 p. in-8o). Il respecte les principes généraux et les objectifs énoncés dans la « Note sur la présente édition ».
Il subsiste deux manuscrits pour Le Chien de Montargis. Le premier est conservé par la SHLML (boîte no 6, pièce no 71). Ce manuscrit autographe est composé d’un cahier cousu de 60 feuillets doubles qui porte le titre Le Chien de Montargis, ou la Forêt de Bondy. Le recto de chaque page est numéroté et comporte les dialogues et didascalies. La page opposée, non numérotée, est réservée uniquement aux corrections et ajouts. Suivant son habitude, Pixerécourt esquisse un calendrier de travail sur le dos de son manuscrit ; la pièce est rédigée entre le 1er mars et le 28 mai. Ce manuscrit propose une variante importante pour le dénouement. Celle-ci, comme toutes les nombreuses autres provenant de ce manuscrit, sont introduites dans les notes par l’abréviation MsA.
Le second manuscrit est conservé au département des manuscrits de la BnF (sous la cote naf 2886). Le visa de la Direction générale de la Police et celui du Département de la Police de Paris, qui sont apposés sur ce manuscrit, permettent de l’identifier comme un manuscrit de la censure. Cet exemplaire retourné au théâtre par le bureau de la censure a servi lors du travail de mise en scène, ce qui explique qu’il porte des informations à propos de la musique et de la mise en scène. Il s’agit d’un cahier de 25 feuillets doubles portant le titre Le Chien de Montargis, ou la Forêt de Bondy. La mise en page particulière (division de la page en deux avec une pliure verticale au milieu) correspond à celle caractéristique des copies employées par le souffleur. Ce manuscrit donne une version comparable à celle contenue dans MsA, mais avec de nouvelles variantes, introduites dans les notes par le sigle MsT. Les passages biffés et les corrections du dénouement aident à suivre les choix opérés entre le moment d’acquérir les visas au moment des premières répétitions et la publication.
664Fidèle au souci de produire une édition qui réinscrit Le Chien de Montargis dans l’univers théâtral du mélodrame, notre texte retient des éléments qui font revivre l’espace scénique et sonore prévu. Nous intégrons les notes portées par Pixerécourt sur le manuscrit d’auteur (MsA) et du théâtre (MsT), qui précisent l’emplacement et le contenu souhaité des musiques de scène. Nous incluons également les notes tirées du matériel d’orchestre (Mat. th) qui peuvent aider le lecteur à mieux saisir les dimensions physique et sonore de la mise en scène. Toutefois, ne voulant pas compromettre la lisibilité, ces informations se trouvent en note infrapaginale et sont introduites par le sigle situant la provenance du texte cité (MsA, MsT ou Mat. th). Afin de ne pas surcharger inutilement l’appareil critique, les biffures illisibles sont abandonnées.
Le Chien de Montargis, ou la Forêt de Bondy a fait l’objet de plusieurs rééditions en français : l’une en 1814 (Le Chien de Montargis, ou la Forêt de Bondy, Paris, Barba, 1814, 2e éd., 64 p. in-8o) ; l’autre en 1935 (Le Chien de Montargis, ou la Forêt de Bondy, Montargis, Impr. M. Midol, 1935, 91 p.). Ces deux éditions reprennent à leur compte la leçon de la première édition de 1814, tout en introduisant quelques minimes changements pour la première. Aussi avons-nous ignoré l’édition de 1935, qui ne comporte pas de variantes, et avons-nous renseigné celles de la seconde édition Barba de 1814, introduites dans les notes par l’abréviation Éd-1814(2). La pièce figure également dans le Théâtre choisi (t. 3, p. 103-192). Les variantes, peu nombreuses, sont introduites par le sigle TC.
La partition musicale que nous publions a été établie d’après le matériel d’orchestre, conservé au département de la musique de la BnF ([A. Piccini], ms., s. d., 13 livrets : vl conducteur, vl 1, vl 2, alt, b [2 ex.], fl, bn, cl 2, tbn, c. à p., cors 1 & 2, timb, 472 fo, cote : Mat th 182). Ce matériel d’orchestre a subi de lourds remaniements au fur et à mesure des nombreuses reprises du mélodrame. Certains livrets sont originaux et datent de l’époque de la création, d’autres sont des copies plus tardives. L’emploi d’un papier bleu (caractéristique des partitions établies dans les années 1840-1850) et la présence du tampon du papetier Dantier, établi sur le boulevard du Temple entre 1838 et 1858, permettent d’identifier les dates approximatives auxquelles ces copies furent réalisées. Deux dates figurent également sur le matériel d’orchestre, l’une (19 octobre 1822) apparaît sur le livret des basses, l’autre (1853) est
665mentionnée sur le même livret, mais relève d’une autre écriture. Ces quelques éléments attestent que le matériel d’orchestre a servi pour les représentations du Chien de Montargis entre 1814 et au moins 1853. Son usage prolongé explique le besoin d’en renouveler les livrets. C’est le cas pour les parties du violon conducteur, de l’alto, de la flûte, des cors et des timbales. Le matériel d’orchestre contient aussi un livret pour le cornet à pistons, qui relève d’un ajout tardif puisque cet instrument ne fut inventé qu’en 1820. Les livrets originaux subsistent toutefois pour les parties des violons 1, violons 2, basses (2 exemplaires), clarinettes 2, basson et trombone.
En dépit de l’état de conservation du matériel d’orchestre, fort abîmé à certains endroits des livrets les plus anciens, nous avons tout de même choisi d’éditer la partition musicale du Chien de Montargis. D’une part parce que les manuscrits de Pixerécourt contiennent des annotations qui doivent se lire comme autant de directives adressées au compositeur sur le contenu musical souhaité. Éditer la musique permet ainsi de mesurer à quel point Piccini répond aux desiderata de Pixerécourt, ce qui est, à quelques exceptions près, toujours le cas comme on pourra le constater à la lecture des notes infrapaginales, dans lesquelles nous avons mis en regard les annotations de l’auteur et la réalité musicale traduite par la partition d’orchestre. D’autre part parce que ce matériel d’orchestre donne bien la musique originale. Il a certes subi de larges coupures au gré des reprises successives. Mais aucune des compositions originales n’a été réécrite. Elles ont simplement été allégées, raccourcies de quelques mesures, sans doute pour coller à de nouveaux jeux scéniques. L’analyse du matériel d’orchestre nous permet toutefois de savoir que certaines de ces coupures ont été entérinées au fur et à mesure des reprises entre 1830 et 1850. Des mesures, biffées sur les livrets anciens, n’ont tout simplement pas été recopiées lors du renouvellement du matériel d’orchestre et ne figurent plus sur les livrets les plus récents. Ce constat va dans le sens de l’observation formulée par le critique du Ménestrel (article daté du 19 janvier 1834) qui déplorait la disparition de la musique dans le mélodrame. Le matériel d’orchestre du Chien de Montargis lui donne raison ; certains morceaux ont été amputés de moitié et l’ouverture a fini par être entièrement supprimée. On assiste donc bien, à partir des années 1830, à une diminution progressive de la place de la musique dans le spectacle mélodramatique. Ces coupures prouvent aussi que
666la portée sémantique de la musique de scène n’était plus forcément comprise. Dans l’acte I du Chien de Montargis, par exemple, Piccini a introduit le célèbre « Pas cadencé » des marches napoléoniennes dans un morceau conçu pour accompagner une pantomime comique (voir acte I, No 16). L’on comprend aisément l’intention parodique de cette insertion : le « Pas cadencé », dévitalisé par son utilisation au cœur d’une séquence burlesque, évoque inévitablement, pour le public de juin 1814, la Grande Armée et l’abdication récente de Napoléon1. Le morceau fut bien conservé lors des reprises ultérieures. Il fut même réintroduit à un autre moment du mélodrame, en remplacement d’un morceau dès lors supprimé, pour évoquer ce que les didascalies présentent comme « une musique guerrière ». La répétition de ce morceau à deux endroits du mélodrame prouve que l’intention parodique première n’avait plus cours, ou tout au moins ne pouvait plus être décryptée par les spectateurs des années 1830-1850.
Nous avons établi la partition musicale suivant le même principe éditorial que pour les autres partitions des mélodrames de Pixerécourt : il s’agit d’une transcription et d’une mise en partition de la source, et non pas d’une édition de la musique. C’est pourquoi nous avons souhaité intervenir le moins possible sur les partitions, de manière à offrir un document le plus proche possible des sources manuscrites. Le lecteur pourra ainsi rencontrer quelques non-sens musicaux qu’il pourra facilement résoudre. Nous avons toutefois harmonisé les indications de tempo et l’orthographe des silences. Nous ne sommes pas du tout intervenue sur les parties des instruments transpositeurs. En effet, le matériel d’orchestre présente deux cas de figure : soit la partition est transposée (c’est le cas pour les timbales et le cornet à pistons), soit le copiste s’est contenté d’indiquer la tonalité. Nous avons respecté à la lettre ces indications. On trouvera donc des instruments transposés, d’autres non. La tonalité est toujours précisée en tête de portée.
L’ensemble des ratures et omissions ont été renseignées. Lorsque ces ratures ne concernent que quelques parties, nous avons signalé, sur la
667portée correspondante, le début et la fin de la rature par les indications <Biffé…> et <… biffé>. Lorsque ces sections raturées n’ont pas été recopiées sur les livrets les plus récents du matériel d’orchestre, nous l’avons signalé par l’indication <mesures absentes> intégrée à l’endroit concerné. Lorsque la biffure concerne un numéro entier, nous l’avons indiqué par la mention <Numéro biffé>, portée soit au niveau du numéro (lorsque le morceau est biffé sur l’ensemble des parties), soit sur la portée correspondante (lorsque le morceau est biffé sur certaines voix de l’orchestre uniquement). Ces annotations, accompagnées des commentaires que nous avons intégrés chaque fois en note de façon à introduire le morceau, permettent de bâtir une partition suffisamment lisible pour que le lecteur puisse comprendre le jeu des corrections entre la musique originale et ses reprises.
1 Les corrections effectuées sur le matériel d’orchestre sont si nombreuses, que nous avons choisi d’introduire nos commentaires sur le contenu sémantique de la musique de scène directement dans les notes infrapaginales qui introduisent chaque morceau. Le lecteur pourra ainsi plus aisément suivre la correspondance entre le contenu musical voulu par Pixerécourt et la composition effectivement réalisée par Piccini.
- CLIL theme: 3622 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Théâtre
- ISBN: 978-2-406-10557-2
- EAN: 9782406105572
- ISSN: 2261-575X
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-10557-2.p.0035
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 03-15-2021
- Language: French