Biographie de Lydie Salvayre
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Lydie Salvayre
- Pages : 219 à 225
- Collection : Écrivains francophones d’aujourd’hui, n° 8
Biographie
de Lydie Salvayre
La mère de LS, Montserrat Montclus Vaqué, dite Montse, naît à La Fatarella (un village de Catalogne) dans une famille de petits paysans. Elle est la dernière d’une fratrie qui comporte deux filles, Teresa et Francisca, et un garçon, Josep. La légende raconte que la mère de Montse, dont le visage avait été abîmé par la variole, réussit à trouver un mari grâce à l’argent qu’elle gagna lors d’une tombola. On la disait extrêmement dévote.
Le père de LS, Andres Arjona Ramirez, naît à Higuera de Calatrava (village andalou) dans une famille bourgeoise. Sa mère meurt dans sa petite enfance. Il sera élevé par des domestiques. Son père dilapidera sa fortune en jouant à des jeux d’argent.
1936 |
Josep, le frère de Montse, part travailler comme ouvrier saisonnier à Lérida et découvre une ville en proie à la fièvre révolutionnaire. Le projet libertaire l’exalte. Il revient dans son village, un foulard rouge et noir noué autour du cou, et le désir de faire triompher ses idées anarchistes. Pas Pleurer (2014) rend compte de cette période. |
1937 |
Le père de LS s’engage dans l’armée républicaine. Montse de son côté retrouve sa sœur Francisca qui travaille comme domestique à Barcelone. |
1938 |
Les 2 parents de LS se rencontrent à Barcelone. Andres, qui est toujours soldat dans l’armée du général communiste Lister, aurait fourni de la nourriture aux deux sœurs. Montse a 16 ans. Andres 26. |
220
Janvier 1939 |
La bataille de l’Ebre s’achève par la victoire de Franco. Montse et sa sœur décident de s’enfuir à pied en direction de la France. Andres et les troupes de Lister encadrent la longue colonne des espagnols qui quittent leur pays. Andres et Montse se retrouvent en février 39 dans le camp de concentration d’Argelès-sur-mer. Montse est enceinte. |
Septembre 1939 |
Montse est transférée dans un camp de femmes à Pradelles (Haute Loire). Elle y accouche de sa fille aînée, Marie, qui va vivre ses premiers mois dans des conditions très rudes. |
1940 |
Andres, qui est resté au camp d’Argelès, s’en évade, et rejoint Montse et sa fille. Ils sont orientés vers le camp d’internement de Mauzac (Dordogne). |
1941 |
Les parents de LS sont embauchés comme ouvriers agricoles par le maire de Marquay (Dordogne). Leur deuxième petite fille décède quelques jours après sa naissance. |
1945 |
Ils rejoignent le frère de Montse, Josep, à Autainville (Loir et Cher). |
15 mars 1946 |
Naissance de Lydie à Autainville. |
1947 |
Déménagement à Auterive (Haute Garonne) où réside l’amie de Montse, Rose, native elle aussi de La Fatarella. |
1948 |
Naissance de Montse, dernière des trois filles. |
1949 |
Andres et Montse tentent l’expérience d’une ferme communautaire, avec 3 autres familles, à Fronton. Échec cuisant. |
1950 |
Retour à Auterive. Le père de LS travaille dans le bâtiment, d’abord comme manœuvre, ensuite comme maçon. La famille va habiter successivement dans trois logis sordides, et plus tard dans une petite Cité HLM qui est en périphérie de la ville. |
1953 |
Mort de Staline. LS voit pleurer son père pour la 1re fois de sa vie. |
221 |
LS est inscrite à l’école communale d’Auterive. À 10 ans, elle passe l’examen d’entrée en 6e, à Toulouse. C’est la première fois qu’elle se rend à la ville. Elle est si impressionnée qu’elle se montre incapable d’effectuer les exercices demandés. Elle sera la seule de sa classe à être collée, et pleurera de désespoir. |
Elle intègre ensuite le Cours Complémentaire d’Auterive (écoles créées par Pétain) où elle apprend la cuisine, la couture et l’économie domestique. Son directeur, M. Filhol, qui est aussi son professeur de français, l’encourage à lire des romans et LS va se prendre de passion pour la lecture. |
|
1960 |
M. Filhol, directeur du Cours Complémentaire, entreprend des démarches pour que LS soit admise comme pensionnaire au Lycée Raymond Naves de Toulouse. LS y restera pensionnaire jusqu’au baccalauréat. |
1961 |
Pendant l’été, LS et sa petite sœur accompagnent leur mère à la Fatarella où vivent les grands-parents maternels. Les trois dorment dans le grenier de la maison où sèchent les figues, les noisettes et les amandes. La maison ne dispose ni d’eau courante ni d’électricité. C’est le temps du franquisme. LS, bien que très jeune, perçoit l’hostilité de certains villageois à l’égard de sa mère. Les vieilles haines ne sont pas mortes. Quant au père de LS, il a rompu tout lien avec sa famille restée en Espagne. |
1963 |
LS obtient le bac philo. |
Elle gagne le premier prix d’un concours de twist sur la scène du Rex à Auterive, prix qu’elle considère comme son premier prix littéraire. |
|
Sa sœur aînée Marie rencontre Yves Rougé, son futur mari. Celui-ci est passionné de littérature. Il va jouer un rôle déterminant dans la passion de LS pour les livres. |
|
222
1966 |
LS qui suit les cours de Littérature à la Faculté de Lettres de Toulouse, rue Albert Lautman, obtient un certificat de Lettres Modernes. |
1968 |
En mai elle est de toutes les manifs. |
Août 68 |
Les chars russes envahissent Prague, comme ils l’ont fait en 56 à Budapest. À table, la sœur ainée de LS se risque à dire son écœurement. Le père se lève et la gifle. LS le déteste. LS déteste son fanatisme. Plus tard, elle décidera de ne plus porter son nom. |
1969 |
Elle s’inscrit à la Faculté de Médecine de Toulouse avec l’intention de devenir psychiatre. |
1974 |
Elle épouse Robert Salvayre qui vient d’être nommé interne en médecine à l’Hôpital d’Aix en Provence. LS terminera ses études de médecine, puis de psychiatrie à Marseille. Elle fera son mémoire sur Le Procès de Gilles de Rais de Bataille. |
1979 |
Elle travaille comme psychiatre résident dans la Clinique Psychiatrique de Bouc Bel Air, près de Marseille, expérience inoubliable. Se sépare de son époux. Publie des textes brefs dans les revues Banana Split animée par Liliane Giraudon et Jean-Pierre Viton et Détours d’écriture dirigée par Patrick Hutchinson. |
1981 |
Elle déménage à Paris et travaille comme pédopsychiatre dans un Centre Médico Psychologique à Argenteuil, puis à Sannois. |
1990 |
Elle écrit en quelques mois La Déclaration qu’elle envoie par la poste à Elisabeth Gille qui dirige une collection de littérature chez Fayard (celle-ci mourra en 1996). À sa sortie, le livre est remarqué par la critique. Dans le journal Libération, c’est Michèle Bernstein qui chronique ce roman (et les deux qui suivront) pour la plus grande fierté de LS. Elle rencontre Bernard Wallet qui travaille avec Christian Bourgois aux éditions Fayard. Il est le premier lecteur de tous ses livres. Elle dit qu’elle ne saurait se passer de sa lecture. |
223
1992 |
Son père est hospitalisé dans un service de psychiatrie. Il a le sentiment d’être persécuté. |
1994 |
Elle travaille au CMPP (Centre Médico-Psycho-Pédagogique) de Bagnolet dont elle devient la directrice. Bagnolet accueille un nombre considérable d’immigrés et LS a le sentiment que le monde entier vient à elle. Elle ne se lasse jamais d’entendre le français tel qu’il est réinventé par ces populations. Elle mène de front son activité de pédopsychiatre et son travail d’écrivain. Sur le plan éditorial, elle reste fidèle à Elisabeth Gille devenue éditrice chez Rivage (où elle ne reste que quelques mois) puis aux Éditions du Seuil. |
1995 |
Elle publie La Puissance des Mouches dans la collection « Fiction & Compagnie », dirigée par Denis Roche aux éditions du Seuil, et noue un lien fort avec Denis Roche et son épouse Françoise. |
1996 |
Bernard Wallet crée, seul, les éditions Verticales. Les premiers temps sont riches et enthousiasmants. BW rêve de faire une sorte de commune d’écrivains. LS noue des amitiés littéraires avec Chloé Delaume et Éric Chevillard. |
1997 |
Publie La Compagnie des Spectres qui obtient le Prix Novembre (aujourd’hui Prix Décembre) et le Prix du Meilleur Livre de l’Année décerné par magazine Lire. Jacques Derrida lui écrit une longue lettre. Bernard Pivot l’invite à Apostrophes. Le livre figure sur la dernière sélection du Goncourt. Un critique littéraire se montre particulièrement affable, puis empressé, puis franchement insistant, puis se livrant à des insinuations libidineuses que LS interrompt. |
Décès de son père. |
|
Elle reçoit une lettre d’Éric Chevillard qui la remplit de joie. |
|
224
2000 |
Elle publie Les Belles Âmes. Le livre est violemment éreinté par ce même journaliste qui s’était montré, trois auparavant, des plus suaves. Ce critique, dès lors, ne cessera, de livre en livre, de poursuivre LS de son ressentiment avec une violence qui intriguera tous ses proches et ne sera pas sans effet sur l’accueil critique général de son œuvre en France. LS souffrira de ce brutal retournement dont les raisons ne lui semblent pas relever seulement de la littérature, mais dont il lui sera interdit de parler. Chaque fois qu’elle essaiera de le faire, on l’exhortera à se taire. |
2001 |
Lecture du Cri du Sablier de Chloé Delaume et début d’une amitié. |
2002 |
Rencontre avec le musicien Serge Teyssot-Gay par l’intermédiaire de Bernard Wallet. Ils travailleront ensemble sur plusieurs projets dans le plus grand bonheur en particulier Contre, Dis pas ça et « la peur ». Plus tard, LS collaborera avec Bruno Chevillon, musicien de Jazz, puis avec Claude Barthélémy, guitariste et compositeur. |
2003 |
LS et BW achètent une vieille maison dans un village du Gard, Le Pin, où ils nouent de solides amitiés. |
2004 |
LS installe sa mère, qui n’est plus autonome, à Paris afin de rester proche d’elle. Depuis qu’elle souffre de la maladie d’Alzheimer, sa mère énonce tout haut ce que les autres pensent tout bas des divers comportements familiaux, et cette absence de censure met régulièrement LS en joie. |
2006 |
LS, dont la plupart des romans sont traduits en anglais, participe en avril au Festival International Pen World Voices organisé par Salman Rushdie. Rencontre avec l’écrivain américain Rick Moodie à l’Université de New York dont elle garde un beau souvenir. |
2007 |
Décès de sa mère. |
225
2008 |
Bernard Wallet quitte les éditions Verticales qu’il a fondées. Dans BW (Seuil 2009) LS rend compte de ce départ qui est un déchirement. Pierre Michon écrira à BW : Je refeuillette sans cesse l’hymne homérique de l’andalouse. Tous ceux qui l’ont lu et dont j’en parle au téléphone se disent bouleversés par cette lecture, qu’ils te connaissent ou pas. Un petit exemple de la simplicité lyrique archaïque, au cas où tu ne connaîtrais pas le bouquin : « …qui aima les livres autant que les femmes. Et que quoi ? Et que les bêtes. » Tout est dans cette coupure interrogative ici, mon cher professeur. Et ça ne se trouve pas sous le pied d’un cheval. Je vous embrasse tous les deux. P |
LS est discrète sur la scène médiatique. Elle n’est ni sur Facebook ni sur Twitter. |
|
2011 |
Publication de Hymne. Denis Roche lui écrit : Ton livre est une merveille, j’ai quand même décidé de rester blanc (de toute façon je n’ai jamais eu l’oreille musicale). Et il lui envoie une Stratocastor Fender, modèle réduit exact de la guitare de JH. |
2012 |
Publication de Sept Femmes avec Benoît Yvert aux éditions Perrin. Finaliste du Prix Renaudot. |
2013 |
Olivier Bétourné, patron du Seuil, devient son éditeur. LS se dit heureuse de cette collaboration. |
Mai 2014 |
elle apprend qu’elle est atteinte d’une maladie grave, et apprend à vivre avec l’idée de ne pas être immortelle. |
Novembre 2014 |
Elle reçoit le prix Goncourt pour Pas pleurer. |
2016 |
Publication d’une version augmentée du Petit Traité d’Éducation Lubrique (éd. Points Seuil). |
Octobre 2017 |
Publication de Tout Homme est une nuit. |
2018 |
collabore aux Inrocks (une chronique par mois) |
2019 |
Publication de Marcher jusqu’au soir. |
Octobre 2019 |
décide de quitter Paris pour vivre dans le Sud. |
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-10563-3
- EAN : 9782406105633
- ISSN : 2430-8080
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10563-3.p.0219
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 08/02/2021
- Langue : Français