Cette première partie, qui ne restreint pas le terme « champ » à son sens strictement bourdieusien, se propose de montrer, en diachronie, comment l’Art nouveau et les débats autour du renouveau des arts décoratifs pénètrent le champ littéraire. Il s’agit de repérer les médiateurs et les précurseurs de ces traversées, les espaces et les temporalités où elles se déploient. Trois grandes scansions rythment la réception de l’Art nouveau par les écrivains qui lui sont contemporains : la première (1889-1895) concerne l’émergence de l’Art nouveau et son installation dans le pyasage littéraire de la fin du siècle, au lendemain de l’Exposition universelle de 1889. La deuxième phase de cette réception (1895-1900) est marquée par la consécration et la contestation de cette annexion de l’Art nouveau par les écrivains symbolistes et décadents, cibles des critiques d’art professionnels et de la mouvance naturiste. Enfin, la troisième phase (1900-1930) est celle d’une désaffection progressive des écrivains à l’égard l’Art nouveau, qui connaît un rapide déclin après 1900 avant le réenchantement des années 1930 : cette redécouverte par les surréalistes, qui ne sera qu’esquissée, constitue à la fois le terme de notre parcours et les jalons de recherches futures. Dans tous les cas, nous nous demanderons comment la réception de l’Art nouveau par les écrivains et les différentes places que le style occupe dans leur musée imaginaire s’inscrivent dans les débats littéraires du temps et se reconfigurent avec eux.