Gouverner l’artillerie au sein d’une monarchie composite Structures transversales, centralisation et résistance
- Auteur lauréat du Prix Turriano 2017 de l’International Committee for the History of Technology et du Prix d’histoire militaire 2017 du ministère des Armées
- Publication type: Book chapter
- Book: Les Artilleurs et la Monarchie hispanique (1560-1610). Guerre, savoirs techniques, État
- Pages: 115 to 196
- Collection: History of Technology, n° 21
Gouverner l’artillerie
au sein d’une monarchie composite
Structures transversales, centralisation et résistance
J’ai préveu et prédit malheur en Angleterre a Monsieur de Sainct-Aldegonde et des Pruneaux, lorsque je leurs dis que leurs négociations tiroit après soy la ruine de nostre prince et du Bas-Païs, cognoissant la contrariété de meurs et d’humeurs des deux peuples et la différence de cela à la possession de la liberté, laquelle jamais ils ne voudroient quicter, ayant eu les citadelles pour estre maistres du prince : car il est bien certain que celuy est maystre de l’Estat qui est maistre de la force publicque, et ne preste obeissance que ce qu’il lui plaist, en sorte que la souveraineté, ne souffrant jamais division, se trouveroit partie entre le prince et les subjectz qui causeroit la ruine d’un Estat1.
Jean Bodin, depuis sa captivité à Anvers, le 21 janvier 1583.
Introduction
Ces mots qu’écrivit l’un des plus célèbres penseurs politiques du xvie siècle montrent combien les questions de pouvoir politique et de contrôle des moyens militaires étaient alors considérées comme intimement liées. Cette lettre de Jean Bodin à son beau-père fut écrite dans le contexte de la révolte d’une partie des Pays-Bas contre l’autorité de leur souverain, le roi Philippe II. À l’été 1580, les provinces rebelles de 116l’Union d’Utrecht offrirent le gouvernement de leurs territoires au duc d’Anjou, frère du roi de France2. Arrivé à Anvers au début de l’année 1582, ce prince ne tarda cependant pas à découvrir que son pouvoir politique, militaire et fiscal était extrêmement limité au sein de cette association politique de provinces aux diverses structures administratives et aux multiples privilèges et libertés. Se sentant dépossédé des moyens de lutter contre l’avance du prince de Parme et des troupes loyales à Philippe II, le duc d’Anjou et ses conseillers français, parmi lesquels se trouvait Jean Bodin, résolurent de se rendre « maystre de l’Estat » en s’emparant de la citadelle d’Anvers, symbole de la « force publicque » au sein de la capitale des provinces rebelles. Pour le théoricien de la souveraineté qu’était Bodin3, son prince ne pouvait en effet exercer de pouvoir politique au sein des provinces de l’Union d’Utrecht sans obtenir le contrôle des dispositifs militaires de première importance. D’ailleurs, cette conception se matérialisait dans la pratique politique de l’époque ; par exemple, lorsque des tentatives de réconciliation eurent lieu entre rebelles et royalistes à Gertruidenberg en 1577, les principaux points de désaccord portèrent sur le contrôle des forteresses, des navires et de l’artillerie4. Malheureusement pour le duc, son coup d’état échoua, ses troupes, insuffisantes en nombre, furent aisément vaincues par la garnison restée loyale aux États Généraux et Anjou, Bodin ainsi que le reste de leurs hommes furent faits prisonniers.
Selon la logique décrite par Bodin – et suivie par le duc d’Anjou – le contrôle de l’artillerie constituait un aspect fondamental du pouvoir monarchique. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que le recours croissant aux grands dispositifs de combat qu’étaient les forteresses et les flottes de guerre se soit accompagné du développement de structures administratives permettant à l’État de s’assurer la maîtrise de l’artillerie. Ce chapitre a pour objectif d’identifier et de décrire ces structures qui furent mises en place dans le courant du xvie siècle afin d’équiper les armées de la Monarchie hispanique en pièces d’artillerie, en munitions et en hommes capables de les faire fonctionner selon la volonté du roi et de ses ministres. Or, présenter la guerre comme moteur de la construction 117de l’État moderne n’a absolument rien d’une nouveauté. Cependant, cette analyse centrée sur un aspect précis de l’administration militaire sera l’occasion de montrer certaines spécificités du service de l’artillerie au sein du processus général de construction de l’État. En outre, il faut rappeler que cette souveraineté que Bodin décrit comme le contrôle et la centralisation de la force n’avait, à la fin du xvie siècle, rien d’une réalité politique. Les nombreuses études qui se sont attachées à comprendre l’articulation du pouvoir au sein de ce qu’Elliott a appelé une « monarchie composite5 » n’ont cessé de mettre en avant son caractère non-intégré et fragmenté. Par conséquent, ce chapitre propose une analyse à l’intersection de ces deux grandes tendances historiographiques, à mi-chemin entre la narration du renforcement du pouvoir central par la guerre et celle de la structure politique divisée de la Monarchie hispanique.
Rôle de la guerre dans la construction
de l’État moderne
La souveraineté que Bodin décrivait comme s’appuyant sur la maîtrise absolue de la force est devenue une réalité au sein des États-nations de l’époque contemporaine. Ainsi, Max Weber écrivait au sortir de la Première Guerre mondiale que « l’État est une forme de communauté humaine qui revendique (avec succès) le monopole de la violence physique sur un territoire particulier6 ». Or, cette vision wébérienne du pouvoir politique a fortement inspiré quelques-uns des récits les plus influents sur la construction de l’État moderne. Ces études, qui sont l’œuvre de grands noms de la sociologie politique anglo-saxonne tels que Tilly7, Downing8, Ertman9, Mann10, Porter11 et plus récemment Stasavage12, se sont intéressées au développement des États européens sur un mode 118comparatif et sur des échelles de temps très longues. Or, ces auteurs ont tous pour point commun de placer la guerre au cœur des dynamiques de construction étatique. Ainsi l’affirme Charles Tilly : « la guerre et la préparation pour la guerre ont produit les principaux composants des États européens13 ». Agissant selon un processus de sélection naturelle, la transformation de l’échelle de la guerre aurait forcé les États à se doter de structures administratives de plus en plus complexes et à développer des systèmes de financement à travers la fiscalité. L’abondance des ressources, la disponibilité de capital financier, la dispersion des territoires, le poids politique des assemblées représentatives expliquent qu’aient coexisté des formes d’États très variées telles que les grandes monarchies territoriales, les cités-États oligarchiques, ou encore les empires coloniaux. Néanmoins, durant le dernier millénaire, le paysage géopolitique européen a vu le nombre d’États drastiquement diminuer, la compétition militaire faisant disparaître ceux d’entre eux incapables de se transformer en efficaces fiscal-military States – dont l’aboutissement est aujourd’hui l’État-nation.
Ces récits de la généalogie des États contemporains ont eu un écho considérable dans le champ de la sociologie politique, mais leur réception auprès des historiens a été plus mitigée. Si l’entreprise ambitieuse des sociologues politiques est sans aucun doute stimulante14, bon nombre d’historiens adoptent une position de méfiance face à cette explication à facteur unique15. En effet, Tilly, Downing et leurs confrères portent très peu d’attention à la dimension judiciaire du pouvoir pourtant au centre de la construction des États modernes selon d’autres auteurs comme Strayer16. Et qu’en est-il des rituels civiques qui mettaient en scène – et en ordre – la communauté sociopolitique et constituèrent, selon Muir, un aspect essentiel de la longévité politique de la République de Venise17 ? Est-il possible d’expliquer le développement des États-nations sans intégrer les mécanismes idéologiques et culturels à l’œuvre 119dans la constitution des nationalismes18 ? Comme le remarquent Gunn, Grummitt et Cools, la construction des États fut un processus complexe impliquant de multiples variables parmi lesquelles le poids de la guerre reste encore à évaluer avec plus de précision19.
Peu d’historiens se sont risqués à produire des récits aussi ambitieux que ceux des sociologues politiques. L’historiographie sur la construction de l’État moderne se caractérise par une multitude d’études plus limitées dans l’espace, dans le temps et dans les problématiques abordées, et dont il serait par conséquent impossible de rendre ici compte de manière exhaustive. Néanmoins, parmi les historiens comme parmi les sociologues, la guerre est reconnue comme un des principaux facteurs de constitution des États européens. La pertinence historique du binôme guerre-État est rendue manifeste par la tournure du débat qui a suivi la publication du livre de Parker sur la Révolution Militaire et l’essor de l’Occident20. En revisitant la thèse de Roberts21, Parker explique comment, à l’époque moderne, la mutation des « techniques de guerre » – le mot anglais warfare renvoyant à des éléments technologiques tout autant que tactiques – transforma profondément les États européens, leur donnant un avantage militaire décisif sur les autres États du monde. Or, comme on en a rendu compte en introduction du précédent chapitre, la thèse de Parker a suscité un débat portant sur les dates, les techniques et tactiques véritablement révolutionnaires mais ne remettant pas en question la relation entre transformation de la guerre et construction de l’État moderne22. La compétition entre États et la course à l’innovation militaire figurent désormais au cœur des discussions de l’histoire globale, signe que le débat ouvert par Roberts et Parker est encore loin d’être clos23.
120De nombreuses études mettent en évidence le caractère pionnier de la Monarchie hispanique non seulement dans l’évolution des techniques de guerre mais aussi dans la structuration de son appareil militaire. Parker lui-même a étudié comment l’Espagne a pu déployer et maintenir, malgré la distance, « la plus grande armée de l’époque » dans le but de réprimer la révolte des Provinces-Unies durant la guerre de Quatre-Vingts-Ans (1567-1648)24. Le maintien de plusieurs dizaines de milliers de soldats sur une si longue période est ainsi présenté par Parker comme un défi logistique et administratif sans précédent que les agents de la Monarchie hispanique ont su relever avec un certain succès, l’échec final de la répression étant imputé à l’excès d’ambition des projets géopolitiques des Habsbourg en Europe. Parker décrit tout un système fait de structures administratives, de ressources matérielles et d’hommes de diverses origines – espagnols, italiens, allemands, bourguignons, wallons – transitant entre les différents territoires de la Monarchie, notamment sur le fameux chemin des Espagnols, afin d’appliquer les stratégies décidées à Madrid. À propos de cette même armée de Flandre, González de León a plus récemment mis en évidence la professionnalisation croissante des officiers sous les ordres du duc d’Albe25. Dès le début des affrontements en 1567, ces derniers mirent en place un système d’organisation militaire extrêmement efficace, fondé sur la promotion des compétences, du mérite et de l’expérience, qui eut cependant tendance à s’éroder avec le passage des générations.
Plus généralement, les structures et différentes branches de l’appareil militaire de la Monarchie hispanique ont fait l’objet de nombreuses études mettant en évidence leur important développement au cours du xvie siècle. Ainsi, dans son ouvrage comparatif sur la construction des fiscal-military States entre 1500 et 1700, Jan Glete présente l’Espagne comme le premier État à avoir mis en place à grande échelle un système 121d’administration de forces militaires permanentes26. René Quatrefages a quant à lui analysé en détail le système d’organisation de l’infanterie espagnole regroupée au sein des redoutables Tercios qui obtinrent, en Flandre et dans le reste de l’Europe, une réputation d’invincibilité jusqu’au milieu du xviie siècle27. Considérant ces structures d’organisation de l’armée comme des éléments clés de la révolution militaire, Quatrefages a consacré un second ouvrage à expliquer leur origine en remontant au temps des Rois Catholiques et aux premières décennies du xvie siècle, époque de mise en place d’une armée permanente28. L’organisation des forces navales a quant à elle fait l’objet d’études portant sur diverses unités telles que les escadrons de galères méditerranéennes analysées par Olesa Muñido29 et plus récemment par Williams30, ou encore l’armada de Flandre décrites par Stradling31. Les armadas atlantiques – de protection de la carrera de Indias et del mar Océano – ont également suscité de nombreuses analyses à différentes échelles et sur différentes périodes, si bien qu’il n’est pas aisé de dégager une vision complète des structures administratives de ces flottes de guerre32. La multitude des publications sur différents éléments de la bureaucratie militaire espagnole montre à quel point il est difficile de l’appréhender dans sa totalité à travers des approches institutionnelles. Même les ouvrages les plus volumineux tels que la synthèse de Martínez Ruiz33 ou encore les actes des deux conférences Guerra y Sociedad en la Monarquía Hispánica34 ne parviennent 122à rendre compte que de manière partielle du système d’organisation militaire de la Monarchie hispanique.
Or, l’intérêt porté par l’ensemble de ces publications à l’administration de l’artillerie est extrêmement marginal et force est de constater qu’aucune étude conséquente n’a été publiée à ce sujet depuis l’œuvre de Vigón en 194735. Les rares exceptions concernent, on l’a mentionné dans le précédent chapitre, l’époque des Rois Catholiques au tournant des xve et xvie siècles, à ce moment crucial de l’avènement de l’artillerie « moderne36 ». Ces études révèlent l’émergence des premières structures permanentes d’administration de l’artillerie en Castille à l’occasion de la reconquête de Grenade (1482-1492). Cependant, comme l’a montré le chapitre précédent, le xvie siècle fut une période d’intensification de l’usage de l’artillerie. De plus, la Monarchie Catholique acquit à cette époque un degré de complexité sans précédent puisqu’elle se transforma en un vaste conglomérat d’États dispersés en Europe et dans le monde. Il semble par conséquent nécessaire et pertinent d’analyser les structures que la Monarchie mit en place afin de gérer et contrôler son artillerie à travers son vaste empire.
Cependant, la question du contrôle des moyens militaires par le pouvoir monarchique central est plus complexe que certaines approches institutionnelles classiques ne pourraient le laisser croire. Ainsi, dans son ouvrage consacré au gouvernement des affaires militaires de l’Espagne, Thompson oppose deux logiques concurrentes : celle de l’administration militaire directe par des agents du roi et celle du contrat de nature commerciale (asiento) avec un administrateur privé tel qu’un grand vassal ou un banquier37. Le recours à ces asientistas parfois chargés du ravitaillement de l’armée ou encore du maintien d’escadrons entiers de galères se faisait souvent au bénéfice d’économies financières pour la Monarchie mais aussi parfois au détriment de l’efficacité opérationnelle. Plus récemment, Alicia Esteban Estríngana s’est intéressée aux mécanismes de contrôle comptable au sein de l’armée de Flandre38. Cette étude révèle les difficultés qu’a 123pu rencontrer le roi pour contrôler à distance l’action non seulement de ses officiers comptables mais aussi de ses gouverneurs qui, à l’image du général Alexandre Farnèse, furent suspectés de détourner le système au profit de la construction de leur propre pouvoir. Ces limites de l’exercice du contrôle militaire par le politique sont également au cœur de publications portant sur d’autres époques, comme celle de Torres Sánchez sur l’Espagne du xviiie siècle39, ainsi que d’autres aires géographiques, comme celle de Parrott sur l’armée de Richelieu40.
Autrement dit, pour comprendre comment s’organisait l’administration de l’artillerie au sein de la Monarchie hispanique, il faut tenir compte de la complexité de la relation entre le politique et le militaire à l’époque moderne. D’une certaine manière, l’approche généalogique des récits de la construction de l’État biaise le regard de l’historien qui croit reconnaître dans les structures de l’administration militaire de Philippe II ce monopole de la violence qui constitue, selon Weber, l’État. Comme l’illustre la mésaventure de Bodin et du duc d’Anjou, les mécanismes de fonctionnement des États du xvie siècle étaient bien différents de ceux du xxe siècle. De plus, ce type d’analyses cherchant dans le passé les éléments du présent tend à réduire le champ d’étude au cadre national, puisqu’il s’agit d’expliquer la constitution de ce qui deviendra plus tard un État-nation. Malgré tout, l’entité politique au centre de cette étude, la Monarchie hispanique, n’est absolument pas réductible à l’Espagne. Elle était constituée d’un ensemble de territoires qui composent l’Espagne actuelle, mais qui allaient également bien au-delà, en Italie, aux Pays-Bas, en Afrique, en Amérique, en Asie. L’intégration politique de ces différents territoires sous l’autorité d’un souverain unique est encore fort débattue aujourd’hui. Dans quelle mesure l’usage d’une demi-couleuvrine était-il contrôlé, depuis Madrid, à Barcelone, à Messine, à Anvers, à Oran, à Veracruz ou à bord d’un galion de l’armada del mar Océano ? De par sa nature fortement politique, le contrôle de l’artillerie doit par conséquent être analysé dans le cadre des débats sur le gouvernement et l’articulation de ce qui était une « monarchie composite » pour reprendre la célèbre formule de John Elliott41.
124Monarchie composite et empire espagnol :
tensions autour du gouvernement
des affaires militaires
Au sein de l’abondante historiographie sur l’organisation politique de la Monarchie hispanique, le paradigme dominant est celui d’Elliott et de Koenigsberger42. À la vision d’une Europe constituée d’embryons des États-nations contemporains que l’on trouve dans les travaux des sociologues politiques, ces historiens ont substitué une Europe qui, à l’époque moderne, aurait été constituée d’États ou de monarchies « composites ». Ces entités politiques se composaient de diverses unités territoriales et juridictionnelles relativement autonomes mais réunies sous une même souveraineté. Le vaste ensemble d’États sur lequel régnait Philippe II en constitue le plus parfait exemple. Il était en grande partie le fruit d’unions dynastiques telles que celle qui, par le mariage d’Isabelle et de Ferdinand en 1469, joignit les couronnes de Castille et d’Aragon. Ces royaumes étaient eux-mêmes composites, l’Aragon incluant aussi la souveraineté sur les royaumes de Sicile, Sardaigne, Majorque, Valence et les comtés de Barcelone, Cerdagne et Roussillon. Avant la mort de Ferdinand en 1516, cet héritage dynastique fut augmenté de conquêtes dont les principales furent les royaumes de Grenade, de Navarre, de Naples, quelques ports d’Afrique du nord, sans oublier les premières vagues de conquête du Nouveau Monde. Son petit-fils Charles ajouta à cet ensemble son héritage des ducs de Bourgogne – là aussi un État composite constitué des duchés de Brabant, de Luxembourg et des comtés de Flandre, Hollande, Zélande, Bourgogne, Artois, Hainaut, etc. – ainsi que l’héritage autrichien de son grand-père paternel l’empereur Maximilien. Le conglomérat d’États qu’il transmit à son fils Philippe excluait ce dernier élément, mais y ajoutait le duché de Milan, porte et verrou de la péninsule italienne. Enfin, durant son règne, Philippe II fit, par droits dynastiques appuyés d’une conquête, l’acquisition du royaume de Portugal et de son vaste empire maritime.
Ce qu’explique Elliott, c’est que ce processus d’agrégation de territoires qui s’étala sur le long xvie siècle n’impliqua pas une intégration 125complète de ces différentes unités politiques au sein de ce que j’appelle dans cette étude la « Monarchie hispanique ». La plupart des unions se firent sur le principe de l’aeque principaliter qui signifiait, selon la formule du juriste espagnol du xviie siècle Solórzano Pereira, que ces royaumes devaient être gouvernés « comme si le roi qui les possédait tous ne possédait que chacun d’eux à titre individuel43 ». Autrement dit, le monarque devait les traiter comme des entités politiques distinctes et donc préserver leurs lois, juridictions et privilèges. Dans cette perspective, l’historiographie récente sur les domaines italiens de la Monarchie hispanique a cherché à déconstruire le mythe du colonialisme castillan en présentant le poids gouvernemental espagnol comme amoindri par les pouvoirs politiques et institutions locales telles que les parlements sicilien, napolitain et milanais44. De même, les Pays-Bas ou encore la Catalogne sont crédités de fortes traditions parlementaires ayant considérablement limité le champ d’action du roi45. Cette division du pouvoir politique impliquait également une fragmentation des systèmes fiscaux, le prélèvement des taxes étant le fruit d’une négociation entre le monarque et les organes de représentation parlementaire de chaque territoire46. Une telle situation favorisait l’existence d’administrations fiscales autonomes en défense d’intérêts locaux : les Catalans, pas plus que les Hollandais, ne consentirent à ce que l’impôt sortît de leur territoire47. Comme le rappelle Regina Grafe, cette fragmentation territoriale de la souveraineté allait bien au delà du découpage par « royaume », 126puisqu’au sein du royaume d’Aragon, le monarque devait négocier l’impôt séparément avec les cortes de Catalogne, d’Aragon, de Valence et de Majorque, tandis qu’au sein de la Castille existaient divers privilèges et exceptions juridiques (fueros) au Pays Basque, en Navarre, à Grenade, à Murcie ou encore en Galice48.
La prédominance de ce paradigme des États composites ne doit pas pour autant conduire à renier l’existence d’une entité politique qui était plus que la simple somme de ses parties. Cet excédent distinguant l’État composite de la simple juxtaposition d’États est néanmoins particulièrement difficile à saisir. L’agrégation de territoires, que ce fût par héritage ou par conquête, s’accompagnait de processus d’intégration ou d’incorporation desquels était censée émerger une nouvelle cohésion ou union de l’ensemble des territoires49. Pour désigner cette structure unissant les États d’un même prince, l’historien trouve à sa disposition diverses expressions forgées par l’historiographie. L’expression de « Monarchie catholique », construite à partir du titre de Rois Catholiques octroyé par le pape Alexandre VI à Ferdinand et Isabelle en 1496, rappelle que la cohésion des différents États se fondait sur leur rattachement à une personne, l’héritier des Rois Catholiques. Néanmoins, elle sous-entend une prédominance, au cœur de l’association, des royaumes de Castille et d’Aragon – auxquels est originellement attaché le titre de « catholique ». L’expression que j’ai choisi d’employer dans ce livre et qui est la plus couramment utilisée dans l’historiographie espagnole actuelle, la « Monarchie hispanique » (la Monarquía Hispánica), trouve ses racines dans le nom Hispania que les Romains de l’Antiquité attribuaient à la péninsule ibérique. Il s’agit donc d’une définition culturelle insistant sur la prédominance des Ibériques au sein de l’État composite des Habsbourg. L’expression de « Monarchie espagnole », courante dans l’historiographie anglo-saxonne (the Spanish Monarchy), affirme quant à elle sans détour la prépondérance de l’Espagne au sein de l’association d’États.
De manière plus ou moins explicite, toutes ces expressions font état de la relation asymétrique qui s’établit entre l’Espagne et le reste des 127États de cette vaste association politique. Le phénomène de « castillanisation » – car c’est la Castille plus que l’Espagne qui y tenait le rôle central – de la Monarchie devint particulièrement visible à partir de la seconde moitié du xvie siècle, sous le règne de Philippe II, lorsque la cour s’installa à Madrid50. Ce fut à cette époque que le système de gouvernement polysynodal mis en place sous Charles Quint prit son véritable essor51. Divers conseils, d’État, de guerre, des finances, d’Italie, des Indes, traitaient, depuis Madrid, des affaires de gouvernement selon leur nature et le territoire concerné. En parallèle de ce processus de développement d’un centre politique, se construisit toute une structure administrative de contrôle à distance des territoires52. La monarchie composite de Philippe II se dota progressivement d’un centre de gouvernement où une écrasante majorité de Castillans eurent tendance à favoriser d’autres Castillans au sein des structures administratives émergentes. La Castille, principal acteur, devint également le principal contributeur fiscal de cet appareil étatique53. Rien ne reflète mieux cette position de domination castillane que l’expression d’« empire espagnol » qui renvoie à l’idée d’un certain colonialisme de la Castille non seulement en Amérique mais aussi dans tous les États européens sous son contrôle. Victime de 128la leyenda negra protestante, associée au franquisme par les historiens espagnols, cette expression est réapparue sous la plume des hispanistes anglo-saxons54 et italiens55 et connaît désormais un regain d’intérêt de la part d’une historiographie espagnole non pas nationaliste mais tournée vers des approches transnationales56. En ce sens, évoquer la monarchie de Philippe II sous le terme d’empire est une façon d’accentuer, au-delà de son caractère fragmenté et composite, les continuités, les liens, les forces transversales qui en faisaient une sorte d’espace « continuum » comme l’évoque Fernando Bouza57.
Il faut par ailleurs souligner la forte dimension militaire de ces dispositifs de contrôle des territoires par le gouvernement central madrilène. L’autorité des hommes servant de courroie entre Madrid et l’administration des différents territoires de la Monarchie, qu’ils fussent vice-rois58, gouverneurs59 ou capitaines généraux60, s’exprimait dans l’attribution qui leur était faite du commandement militaire suprême de la région dont ils avaient la charge. Ils étaient épaulés dans cette tâche par un certain nombre d’officiers, généralement originaires du royaume de Castille – mais pas uniquement61 – et directement choisis 129par le roi et les conseils madrilènes pour leur loyauté et leurs liens souvent personnels avec l’élite gouvernante. On peut citer à titre d’exemple le rôle crucial joué par le contador (comptable) de l’armée, le vénitien Juan Rena, dans le processus d’intégration du royaume de Navarre62. En Sicile, les postes clés de commandement de l’infanterie espagnole et des principales forteresses de l’île étaient confiés à des Espagnols dont la loyauté était éprouvée63. À Milan, non seulement le commandement, mais aussi les soldats formant partie de la garnison du château devaient prouver leur origine espagnole ou faire partie du cercle de familiers du gouverneur64. Au Portugal et aux Açores, au mépris des conditions énoncées à l’issue des cortes de Tomar de 1581, la Monarchie hispanique conserva tout un réseau de forteresses dotées de garnisons castillanes occupant le territoire65.
La construction de cet appareil militaire directement relié au gouvernement central madrilène concourait à la constitution de transversalités au sein d’une monarchie composite fragmentée. La mise en commun des ressources et des moyens militaires ainsi que leur coordination à partir de Madrid devait créer un avantage de puissance militaire dont bénéficiaient tous les membres de la monarchie composite. Comme l’implique la thèse de Parker sur la révolution militaire66, le développement de technologies de guerre onéreuses – l’artillerie, les fortifications modernes, les flottes de guerre – et le changement d’échelle qu’elles impliquèrent favorisa certainement la mise en place de cet appareil militaire au-dessus des structures politiques locales préexistantes. Pour le gouvernement central, il s’agissait de se donner les moyens de ses ambitions géopolitiques qui, pour le xvie siècle, furent essentiellement de tenir en respect les deux principaux rivaux qu’étaient la France et l’empire Ottoman, défendre le monopole sur le Nouveau Monde et, à 130partir de 1567, vaincre la rébellion hollandaise. Pour les unités territoriales constituant cet État composite, l’acceptation de cette force militaire dirigée depuis l’extérieur était un moyen de satisfaire aux nouvelles exigences de défense de la guerre moderne. Cependant, les études de cas sur les dynamiques d’incorporation des territoires à la Monarchie insistent sur les deux facettes de cette présence militaire castillane, offrant une garantie de protection du territoire contre toute invasion extérieure, mais jouant aussi un rôle dissuasif à l’intérieur, contre les luttes de factions et les possibles défections de loyauté67.
Pour concilier ces deux peintures antinomiques, celle de la monarchie composite et celle de l’empire espagnol, il faut considérer qu’il exista un certain équilibre entre pouvoir central et autonomie locale. Ainsi, à propos de l’intégration de la Navarre, José Miguel Escribano Paez conclut que la Monarchie préférait s’assurer de la sécurité du royaume à travers l’adhésion sociale plus que par les investissements militaires68. De même à Milan, les projets de centralisation furent souvent ajournés afin d’éviter de générer trop de tensions entre le gouvernement espagnol et les sujets milanais69. D’après Marc Greengrass, la tension entre violence et acceptation sociale fut un trait caractéristique des processus d’intégration de nouveaux territoires au sein des États européens de l’époque moderne70. Il faut par ailleurs être conscient que respecter un certain équilibre entre la construction d’une administration impériale et le respect des pouvoirs locaux fut un exercice politique particulièrement délicat. Loin de constituer une garantie contre tout soulèvement, la présence militaire castillane joua un rôle de premier plan dans le déclenchement des grandes révoltes. En effet, l’un des principaux points de ralliement de la rébellion des Pays-Bas fut sans nul doute la présence ravageuse des soldats espagnols, italiens et allemands de Philippe II71. De même, la révolte des Catalans en 1640 fut initiée par des heurts entre soldats du 131roi et paysans locaux72. Survenue quelques mois plus tard, la révolte du Portugal fut en grande partie le résultat de l’exaspération générale contre la présence des soldats castillans sur le sol portugais, de plus en plus perçue comme « une infraction au pacte d’amour et de confiance qui unit le roi à ses sujets » comme l’écrit Jean-Frédéric Schaub73.
L’étude de la construction, par le gouvernement central madrilène, de structures de contrôle de l’artillerie doit s’effectuer en tenant compte de ces tensions inhérentes au fonctionnement politique complexe de la Monarchie hispanique. Ce chapitre s’attachera donc à comprendre comment l’administration de l’artillerie s’articulait entre Madrid et les différents territoires de la Monarchie. Ce thème, extrêmement vaste, aurait pu à lui seul faire l’objet d’un autre livre. Il sera ici uniquement abordé dans ses grandes lignes afin de servir de contexte et de socle au reste de l’exposé. De plus, il s’agira de rendre compte de l’apport heuristique de l’étude de l’artillerie aux débats actuels sur le fonctionnement et l’articulation politique de la Monarchie hispanique. Par rapport à l’administration militaire prise dans son ensemble, la gestion de l’artillerie offre un objet d’analyse relativement limité qu’il est donc plus aisé d’appréhender et d’étudier comparativement sur plusieurs territoires. De cette manière, plutôt que de présenter une analyse centrée sur un territoire en particulier et sur ses rapports avec le gouvernement central comme le font la plupart des publications, le focus sur l’artillerie rend possible cette étude de la Monarchie dans sa « transversalité » et dans sa « globalité » qu’ont récemment appelé de leurs vœux plusieurs hispanistes74.
132Structuration du gouvernement
de l’artillerie dans la péninsule ibérique
Comme le chapitre précédent l’a mis en évidence, les besoins en artillerie de la péninsule ibérique furent décuplés entre le début et la fin du xvie siècle. Or, ce saut quantitatif fut accompagné – et c’est sans doute ce qui le rendit possible – de la construction d’une imposante structure administrative permettant de gérer, à l’échelle de la péninsule, les pièces d’artillerie, les munitions et les hommes qui les utilisaient. Directement rattachée au centre du pouvoir à travers la figure du capitaine général de l’artillerie, membre du conseil de guerre du roi, cette structure constituée d’officiers, de comptables, d’ingénieurs, d’artisans et d’artilleurs permit à la Monarchie de resserrer progressivement son contrôle sur la production et l’utilisation du matériel de guerre au sein d’un espace pourtant marqué par de nombreuses fragmentations politiques, administratives et juridictionnelles.
Le capitaine général de l’artillerie
et le conseil de guerre
Le gouvernement de l’artillerie en Espagne est inséparable de la figure du capitaine général de l’artillerie qui se construisit tout au long du xvie siècle. Un premier noyau permanent de serviteurs de l’artillerie fut constitué par Ferdinand et Isabelle à l’époque de la reconquête de Grenade et dans les dernières années du xve siècle75. Il est difficile pour cette époque de parler de structure d’administration car le service de l’artillerie s’inscrivait peu dans le temps : le recrutement et le licenciement suivaient le rythme et le déplacement des campagnes militaires76. En 1501, les Rois Catholiques avaient ainsi à leur service trois capitaines d’artillerie sur trois différents théâtres d’opération, en Andalousie, à Perpignan et à Naples77. Il s’agissait 133plutôt de commandants responsables de l’usage de l’artillerie sur le champ de bataille que d’administrateurs de l’artillerie d’un territoire. Cette situation avait néanmoins généré un « grand désordre » auquel Ferdinand et Isabelle souhaitèrent remédier en investissant un certain Mosen San Martín de la charge de proveedor y veedor general de la artillería, responsable de tout le matériel et le personnel artilleur78. Même si ce titre s’éteignit avec son premier bénéficiaire, l’existence temporaire de cet office révèle les prémices d’un mouvement de centralisation de l’administration de l’artillerie. Dans les années suivantes, plusieurs « capitaines d’artillerie » se succédèrent sans que leurs titres ne spécifient clairement les limites de leur champ d’action79.
La situation changea cependant avec l’accession au pouvoir de la dynastie des Habsbourg. En 1524, Charles Quint nomma le chevalier de l’ordre de Saint Jean de Jérusalem et prieur de Barletta, frère Gabriel Tadino di Martinengo, « capitaine de notre artillerie d’Espagne et de la couronne d’Aragon80 ». Il s’agissait du premier titre qui établissait clairement le commandement d’un individu sur le matériel et le personnel d’artillerie du territoire correspondant aux royaumes de Castille et d’Aragon. Cette territorialisation, absente de la charge donnée en 1501 à Mosen San Martín, allait devenir un élément essentiel du gouvernement de l’artillerie. Le titre dans sa forme stabilisée fut attribué pour la première fois en aout 1541 à don Pedro de la Cueva, le faisant « capitaine général de l’artillerie des royaumes de Castille et d’Aragon81 ». Il faut noter que le passage de simple capitaine à capitaine général représentait un saut considérable pour le statut du commandant de l’artillerie. Le titre de capitán general correspondait alors à l’autorité militaire maximale sur un territoire donné. Il faisait partie des attributions principales de la plupart des vice-rois82 et était donné aux commandants militaires suprêmes de certaines régions 134telles que Grenade83, la Galice84, ou, plus tard, l’océan Atlantique et les côtes andalouses85. Le nouveau statut acquis par don Pedro de la Cueva en 1541 en faisait l’autorité suprême sur un domaine du champ militaire réduit – l’artillerie – mais sur un territoire bien plus vaste que la plupart des autres capitaineries générales. Cependant, l’institution était encore vacillante et, à la mort de son titulaire en 1545, aucun remplaçant ne fut nommé avant plusieurs années86.
La véritable institutionnalisation du titre de capitaine général de l’artillerie remonte au milieu du xvie siècle, lorsque Juan Manrique de Lara en fut investi le 31 aout 155187. La charge acquit alors une stabilité visible à travers les longs exercices des trois hommes – tous morts en fonction – qui l’ont occupée durant la seconde moitié du xvie siècle : Juan Manrique de Lara de 1551 à 1570, Francés de Álava de 1572 à 158688, Juan de Acuña Vela de 1586 à 160689. Cependant, dans les années 1550, la fonction assumée par Juan Manrique de Lara différait dans les faits assez peu de celle des capitaines d’artillerie du début du xvie siècle qui jouaient un rôle opérationnel de chefs des gens d’artillerie sur le champ de bataille. Manrique de Lara commanda en effet l’artillerie au siège de Metz en 155290, puis lors de la guerre de Sienne (1552-1555) et enfin à Saint-Quentin en 155791. En 1558, il fut envoyé à Naples comme vice-roi par intérim afin de défendre la Calabre contre une invasion 135ottomane92. Ce ne fut qu’à partir des années 1560 qu’il put retourner en Espagne assumer ses responsabilités de capitaine général de l’artillerie sur le territoire originellement défini dans son titre. Or, cette période correspond à un grand tournant dans le gouvernement de la Monarchie hispanique. Rompant avec l’itinérance européenne de Charles Quint, Philippe II choisit alors de sédentariser la cour à Madrid, transformant cette ville en véritable centre du gouvernement polysynodal93. À partir de ce moment-là, les devoirs administratifs du capitaine général de l’artillerie l’éloignèrent du champ de bataille. Durant les quatre dernières décennies du xvie siècle, on ne vit qu’une seule fois un capitaine général de l’artillerie d’Espagne prendre la tête d’une armée : ce fut en 1580, lorsque Francés de Álava accompagna le duc d’Albe lors de la grande opération d’invasion du Portugal94.
La charge de capitaine général de l’artillerie avait entre temps acquis un caractère politique de première importance. Il faut d’abord remarquer le prestige de l’origine sociale des capitaines généraux de l’artillerie. Juan Manrique de Lara était le fils du duc de Nájera, Grand d’Espagne95. Francés de Álava descendait de l’une des plus fameuses familles navarraises, issue d’une branche bâtarde des rois de Navarre96. Le premier avait été vice-roi de Naples en 1558, le second, ambassadeur de Philippe II à Paris entre 1562 et 157197. Juan Manrique de Lara fut également, dans les années 1560, l’un des membres les plus actifs des conseils de guerre et d’État98. Bien qu’il ne participât pas au conseil d’État, Francés de Álava obtint un siège au conseil de guerre en même temps que le titre de capitaine général de l’artillerie99. Autrement dit, entre 1560 et la mort de Francés de Álava en 1586, les capitaines généraux de l’artillerie jouèrent un rôle politique de premier plan au sein du gouvernement central de la Monarchie hispanique.
La poids politique du capitaine général de l’artillerie diminua soudainement avec le successeur de Francés de Álava, Juan de Acuña 136Vela. Son origine sociale était pourtant semblable à celle de ses prédécesseurs : il était le fils de Blasco Núñez Vela, premier vice-roi du Pérou assassiné en 1546 lors de la rébellion de Gonzalo Pizarro, et son frère n’était autre que l’archevêque de Burgos, l’un des principaux prélats d’Espagne100. Juan de Acuña Vela était un homme de cour, élevé auprès de l’impératrice Isabelle de Portugal puis devenu page de Charles Quint101. Il avait cependant suivi une carrière militaire plus que politique. Au début des années 1580, il servait en tant veedor general de l’armée de Flandre, l’un des plus hauts postes de supervision administrative102. Toutefois, sa nomination, en 1586, à la charge de capitaine général de l’artillerie ne s’accompagna pas d’une invitation à siéger au conseil de guerre. Dans ses premières années d’exercice, Juan de Acuña Vela fut même parfois maintenu loin du centre gouvernemental madrilène. On le retrouve ainsi à Lisbonne en 1587 et 1588, veillant aux préparatifs de l’Armada d’Angleterre103. En 1589, il inspecte les mines de soufre et la production de salpêtre de la région de Carthagène104. En 1590, il supervise la fabrication d’un nombre élevé de pièces d’artillerie à la fonderie de Malaga105. Néanmoins, la dimension gouvernementale de la charge de capitaine général de l’artillerie fut finalement restaurée à partir de la fin de l’année 1595, lorsque Acuña Vela fut enfin invité à siéger à la plupart des sessions du conseil de guerre106. Signe manifeste du caractère politique qu’avait acquis l’office, ce fut l’un des plus proches collaborateurs du duc de Lerma, le marquis de San Germán, qui fut choisit pour succéder au vieux capitaine général à sa mort en 1606107.
137Par ailleurs, il faut noter que l’application des pouvoirs politiques, administratifs et judiciaires du capitaine général de l’artillerie s’inscrivait dans un espace traversant plusieurs royaumes de la monarchie composite. L’instruction remise à Francés de Álava en 1572 donne un aperçu de l’amplitude territoriale de son autorité. Elle stipulait notamment que le capitaine général devait superviser les entrepôts de munitions des royaumes de Castille (Burgos, Fontarrabie, Saint-Sébastien, Malaga, Carthagène), de Navarre (Pampelune), d’Aragon (Barcelone et Perpignan), mais aussi les entrepôts de Sardaigne, des îles Baléares (Minorque, Majorque, Ibiza), et des nombreux présides africains (Oran, Mers El-Kébir, Peñon de Velez, Melilla, La Goulette près de Tunis)108. En 1586, les instructions de Juan de Acuña Vela tenaient compte de la récente acquisition du Portugal et ajoutaient donc à cette liste les entrepôts de Lisbonne, Porto et des Açores. Il s’agissait par conséquent d’une activité administrative transversale aux divisions politiques de l’union aeque principaliter. Cet ensemble de territoires englobant la péninsule ibérique ainsi que ses « îles » (de la Sardaigne aux Açores, en passant par ces îlots espagnols qu’étaient les présides africains) correspondait précisément à l’espace politico-juridique du conseil de guerre109. En ce sens, le développement de l’activité du capitaine général de l’artillerie fut indissociable de celui de ce conseil et, même lorsque Juan de Acuña Vela ne fut pas invité à y siéger entre 1586 et 1595, il entretint une intense correspondance avec ses membres110.
Une vaste structure d’administrateurs
et de techniciens
Les pouvoirs du capitaine général de l’artillerie en faisaient le chef administratif d’un vaste réseau d’agents de la Monarchie. Ses instructions lui octroyaient le commandement de tous les individus appartenant au service de l’artillerie – hauts officiers, comptables, artilleurs, ingénieurs – dans les limites territoriales qui viennent d’être précisées111. Il 138possédait également un pouvoir de nomination des officiers de rang inférieur lui permettant de choisir qui entrait au service du roi en tant qu’artilleur112. Le monarque retenait cependant la nomination de tous les postes intermédiaires et supérieurs de cette structure administrative, limitant ainsi la capacité du capitaine général de se construire une clientèle à travers l’exercice de sa charge113. L’autre aspect essentiel de son autorité demeurait son pouvoir judiciaire. Le capitaine général de l’artillerie acquit le privilège de pouvoir se constituer juge d’appel pour des délits civils ou criminels de tout homme sous son commandement114. Comme cela sera exposé plus loin, ce droit lui permettait de défendre ses hommes et son autorité face à d’autres pouvoirs concurrents.
Les responsabilités administratives du capitaine général de l’artillerie étaient bien plus amples que son titre ne pouvait le laisser paraître. Elles incluaient bien entendu la gestion de l’artillerie, ce qui signifiait que le capitaine général devait s’assurer, par des inspections qu’il déléguait généralement à des tiers, que l’artillerie de toutes les places fortes de son espace politico-juridictionnel fût opérationnelle. Il s’agissait de contrôler que les pièces étaient en bon état, en nombre suffisant, montées sur des affûts convenables, bien pourvues de boulets, poudres et autres munitions115 et, lorsque ce n’était pas le cas, de proposer au conseil de guerre des solutions pour y remédier116. Dans cette même logique, le capitaine général de l’artillerie ou ses représentants locaux devaient également vérifier que les artilleurs en charge de les utiliser étaient capables et en nombre suffisant117. Les responsabilités du capitaine général en matière de gestion de l’armement s’étendaient au-delà des pièces d’artillerie puisqu’il était également responsable, on l’a vu, de la supervision des entrepôts de munitions (casas de municiones). Or, dans ces entrepôts se mélangeaient souvent pièces d’artillerie, munitions, armures, piques et 139arquebuses118. Les instructions du capitaine général ne faisaient d’ailleurs pas de distinction entre la gestion des pièces d’artillerie et des autres armes119. Et dans les faits, c’était bien au capitaine général de l’artillerie que le roi recourait lorsqu’il était nécessaire de ravitailler l’armée en armes et armures : par exemple, en 1596, Juan de Acuña Vela fut chargé de faire livrer aux galions de Pedro de Zubiaur 2 500 corselets entreposés à Burgos ainsi que 3 000 arquebuses, 600 mousquets et 4 000 piques fabriqués en Biscaye120.
Le capitaine général de l’artillerie devait non seulement gérer une grande partie du matériel de guerre de la péninsule ibérique, mais il était également en charge d’en superviser la fabrication. Toute une industrie d’armement se mit en place dans le courant du xvie siècle sous la direction des agents du conseil de guerre. Malaga accueillait, depuis l’époque des Rois Catholiques, l’une des principales fonderies de canons de la Monarchie121. À la fin du xvie siècle, sa capacité de production atteignait une centaine de pièces par an122. La fonderie de Burgos pourvoyait quant à elle depuis les années 1530 aux besoins en artillerie du nord de l’Espagne123. Néanmoins, dans les dernières décennies du xvie siècle, son activité déclina considérablement au profit de nouveaux centres de production124. Ainsi, en préparation de la Grande Armada contre l’Angleterre, ce fut à Lisbonne qu’on envoya tous les fondeurs de Burgos125. La capitale portugaise, qui était sans doute déjà un centre important de production d’artillerie 140du temps des Avis126, devint le principal fournisseur en artillerie des armadas atlantiques qui se développèrent à la fin du xvie et au début du xviie siècle : on y fabriqua à un rythme effréné un grand nombre de pièces pour l’armada de 1588127, puis encore une centaine de pièces pour l’armada de 1597128, tandis que de multiples documents témoignent de son activité régulière aux tournants des xvie et xviie siècles129. La forte demande en artillerie des galions de l’armada del mar Océano engendra également la mise en place d’une fonderie dans le port de La Corogne130. Ultime preuve que les flottes atlantiques constituèrent un important stimulus pour la production d’artillerie, Séville vit se développer une importante fonderie de canons à partir du milieu du xvie siècle131. Établissement privé appartenant à la famille Morel, cette fonderie fournissait sur commande les navires privés de la carrera de Indias aussi bien que ceux appareillés par la casa de la contratación132. Bien que leur collaboration avec cette institution fît des Morel des partenaires privilégiés du conseil des Indes, le capitaine général de l’artillerie parvint à recourir parfois à leurs services : Juan Morel, qui bénéficiait d’un salaire parmi le personnel de l’artillerie133, vint ainsi en aide à la fonderie de Malaga en 1590134 et obtint du conseil de guerre en 1594 un privilège pour travailler le cuivre andalou d’une mine récemment découverte135.
141L’autorité du capitaine général de l’artillerie sur les établissements de production d’armement allait bien au-delà des fonderies de canons. Pour l’année 1599, le conseil de guerre recensait un total de treize manufactures (fabricas) dépendantes du ministère de l’artillerie136. La plus grande en termes de production était sans aucun doute la manufacture d’armes de Placencia, au Pays Basque, où étaient fabriqués des milliers d’arquebuses, de piques et de mousquets pour équiper l’infanterie espagnole137. Dans cette région du nord de l’Espagne où le fer abondait, on trouvait une seconde manufacture d’importance : à Eugui, près de Pampelune étaient produits chaque année des milliers de boulets de canon de tous types et de tous calibres, ainsi que des armes et armures138. Ces treize manufactures incluaient également des moulins à poudre en Navarre, à Carthagène, à Malaga, à Grenade139, ou encore à Burgos140, dont la production était complétée par des contrats (asientos) passés avec des particuliers141. Une partie des matières premières utilisées pour produire la poudre noire était extraite d’autres fabricas sous l’autorité du capitaine général de l’artillerie, comme la mine de soufre de Hellín près de Carthagène142 ou bien les sites d’extraction de salpêtre à Lérida, à Almería, à Tembleque près de Tolède ainsi qu’en Aragon143. L’histoire de ces sites de production mériterait une étude à part entière, ces quelques lignes d’informations permettant simplement de saisir l’ampleur de la structure administrative à la tête de laquelle se trouvait le capitaine général de l’artillerie.
142Les ingénieurs et les travaux de fortifications eux-mêmes se trouvaient rattachés à l’autorité de ce personnage. D’abord, il faut noter que les ingénieurs dépendaient financièrement du personnel de l’artillerie144. En outre, signe de leur lien de subordination, le capitaine général de l’artillerie n’hésitait pas à leur confier des missions, comme ce fut le cas en 1581 lorsque Francés de Álava ordonna à un ingénieur de visiter les fortifications de la côte de Grenade145. La responsabilité de visiter les fortifications fit plus tard partie des devoirs de la charge détenue par Juan de Acuña Vela146. Ce dernier joua ainsi souvent le rôle de courroie de communication entre les ingénieurs et le conseil de guerre. Ses instructions précisaient d’ailleurs qu’on attendait de lui qu’il vînt commenter aux conseillers les plans et modèles de fortifications après ses visites147. Ainsi, en 1596 ce fut don Juan de Acuña Vela qui présenta devant le conseil les détail des différents projets de fortifications des ports de Guipúzcoa par l’ingénieur Tiburzio Spannocchi148. Quelques années plus tôt, lors des travaux de fortification du port de Lisbonne par ce même ingénieur, ce fut le lieutenant d’Acuña Vela, Hernando de Acosta, qui écrivit un rapport au conseil de guerre149. Or ce lien entre artillerie et fortification ne doit pas surprendre dans la mesure où les plans de constructions de forteresses devaient tenir compte de l’usage offensif et défensif des pièces. Ainsi, le lieutenant Acosta évoquait dans son rapport les essais effectués avec différentes pièces d’artillerie depuis le fort de São Julião pour savoir si la fortification de l’îlot de Bugio était nécessaire afin d’assurer la défense de l’entrée de la baie de Lisbonne150.
Cette branche technique de l’appareil militaire qui s’était développée dans le courant du xvie siècle avait généré toute une structure d’officiers sous le commandement du capitaine général de l’artillerie. Un système de gestion comptable de ce corps s’était progressivement mis en place sur le modèle d’organisation administrative de l’infanterie depuis les réformes 143du Gran Capitán lors des premières guerres d’Italie151. On y trouvait notamment des pagaduría et contaduría, c’est à dire des comptabilités spécialement dédiées à l’artillerie. Le noyau de cette organisation comptable se situait à Burgos, ce qui faisait de cette ville le cœur administratif de l’artillerie castillane. Quatre générations – Francisco, Martín, Miguel et Juan Caro del Rincón – s’y succédèrent au long du xvie siècle afin d’exercer l’office de pagador del artillería152. Ces hommes avaient la responsabilité de distribuer les salaires des individus inscrits dans les livres de compte de l’artillerie de places fortes aussi éloignées que Fontarrabie, Saint-Sébastien, Pampelune, Burgos, Malaga et Gibraltar153. L’office de contador del artillería de Burgos, tenu quant à lui par Antonio del Peso puis par les frères Frías, consistait à contrôler les absences du personnel de l’artillerie et à tenir à jour les livres de comptes de l’artillerie ainsi que les justificatifs et ordres de paiement signés du capitaine général154. Bien entendu, la répartition de l’activité comptable entre le contador et le pagador visait à limiter les fraudes grâce au contrôle mutuel. Dans les années 1580, ces comptables de Burgos géraient non seulement les salaires de plus de cent vingt artilleurs mais aussi ceux de la plupart des ingénieurs, des fondeurs, des charpentiers et des forgerons du royaume de Castille et ils eurent également à superviser les comptes de la manufacture d’armes de Placencia ainsi que les moulins à poudre de Burgos et Tembleque155.
Suite au développement quantitatif de l’usage de l’artillerie décrit dans le chapitre précédent, tout un réseau de contadores et pagadores de l’artillerie fut déployé au sein de la péninsule ibérique. La Catalogne disposait depuis au moins le milieu du xvie siècle, d’un pagador et un contador de l’artillerie indépendants de Burgos156. Après son annexion en 1580, le Portugal disposa également d’une comptabilité de l’artillerie 144séparée157. De même, à la Corogne, l’escadre de l’armada del mar Océano acquit dans les années 1590 un contador de l’artillerie indépendant158, bientôt promu au titre de veedor (inspecteur) de l’artillerie de l’armada159. En outre, certains lieux pourtant rattachés à la comptabilité de Burgos disposaient localement de leurs propres agents comptables, comme Fontarrabie et Saint-Sébastien160 ou encore la Navarre161. La gestion quotidienne de certaines manufactures revenait à un veedor particulier, comme à Eugui162 ou encore à Hellín163. Enfin, tous les entrepôts de munitions et certaines places fortes disposaient d’un mayordomo (majordome) de l’artillerie en charge de veiller sur le matériel de guerre appartenant à la monarchie – pièces d’artillerie, poudre, armes et munitions164.
Le personnel placé sous l’autorité du capitaine général de l’artillerie ajoutait à ces officiers un grand nombre de subalternes. Comme le chapitre précédent l’a mis en évidence, les artilleurs en garnison au sein de la péninsule ibérique se comptaient par centaines. Le service ordinaire de l’artillerie comprenait également, en sus de quelques assistants au service des comptables, des spécialistes de la poudre (polvoristas)165 ainsi que des charpentiers et des forgerons en charge de fabriquer et maintenir les affûts des pièces d’artillerie et les munitions166. Ces effectifs pouvaient exceptionnellement augmenter en 145vue de grandes campagnes militaires. Ainsi, 600 sapeurs (gastadores) espagnols et 200 florentins furent recrutés comme main d’œuvre pour aider au transport de l’artillerie lors de l’invasion du Portugal en 1580167. Pour l’encadrement des troupes d’artillerie – sapeurs et artilleurs confondus – on recruta aussi des gentilshommes d’artillerie (gentilhombre de artillería)168. Or, ces deux catégories d’offices revêtaient un caractère temporaire et, une fois la campagne militaire terminée, sapeurs et gentilshommes recevaient tous leur congé169. La gestion de l’artillerie revenait alors à son niveau d’activité ordinaire. Néanmoins, même à son niveau ordinaire, cette gestion était devenue, dans les dernières années du xvie siècle, une tâche relativement complexe de par le nombre d’acteurs impliqués, la diversité des expertises et la dispersion géographique des activités.
C’est la raison pour laquelle des lieutenants assuraient le lien entre le capitaine général de l’artillerie et cette administration dispersée sur l’ensemble de la péninsule ibérique. Apparu autour des années 1520, l’office de lieutenant avait longtemps permis de suppléer aux longues absences voire parfois à l’inexistence d’un chef supérieur de l’artillerie170. Plus tard, leur nombre crût à proportion de l’administration de l’artillerie. En 1558, ils n’étaient encore que deux171. Une décennie plus tard, leur nombre avait doublé172 tandis que leur charge s’était territorialisée, les transformant en véritables courroies entre le capitaine général et la gestion de l’artillerie sur le terrain. Dans cette perspective, l’un d’entre eux devait résider au cœur administratif du système, à Burgos. Un autre lieutenant veillait sur le complexe navarro-basque où, comme on l’a vu, se trouvaient d’importantes garnisons d’artilleurs ainsi que les principales manufactures d’armes. La Catalogne, région sensible car à la frontière du rival français, hébergeait le troisième de ces lieutenants, tandis que le quatrième alternait entre Carthagène et Malaga, importants lieux de production de pièces d’artillerie, de soufre 146et de poudre173. En 1576, suite à la rénovation du système défensif des Baléares, un nouveau lieutenant fut institué à Majorque174. La conquête du Portugal conduisit à la création de deux nouveaux lieutenants, l’un à Lisbonne175, l’autre aux Açores176. Après la révolte de l’Aragon en 1591 et la construction de la forteresse de Jaca, un lieutenant y fut installé en 1593177. L’année suivante, suite au développement de l’armada del mar Océano, les ports de la Corogne et du Ferrol furent également dotés d’une lieutenance de l’artillerie178. Cette flotte de guerre obtint dans les mêmes années un lieutenant d’artillerie qui lui était spécifiquement dédié179. Par conséquent, à la fin du xvie siècle, une dizaine de lieutenants quadrillaient ainsi l’espace juridico-politique du capitaine général de l’artillerie, constituant les nœuds les plus solides de cette vaste toile de contrôle de l’artillerie dont le centre se situait à Madrid.
Centralisation et résistance
au sein de la péninsule ibérique
Le processus de construction d’une administration de l’artillerie à l’échelle de l’espace politico-juridique du conseil de guerre n’eut absolument rien de trivial. Cette structure liée au gouvernement central se déploya bien souvent au détriment du pouvoir d’acteurs locaux. En effet, avant que le conseil de guerre n’envoyât des comptables et des lieutenants spécifiquement chargés de l’artillerie, la gestion du matériel de guerre revenait à d’autres autorités, telles que les commandants de garnison 147choisis par le roi ou bien les institutions municipales ou régionales. Ces acteurs ne virent pas toujours d’un bon œil qu’une partie de leur pouvoir politique et financier – nomination et commandement des artilleurs, usage du matériel – leur fût ôtée par l’administration émergente liée au capitaine général de l’artillerie. Par conséquent, il convient d’analyser par quels mécanismes et dans quelles limites cette structure administrative parvint à s’imposer face à ces pouvoirs concurrents préexistants.
Une structure administrative construisant
des transversalités
Le vaste réseau d’agents à la tête duquel se trouvait le capitaine général de l’artillerie acquit un degré de centralisation et de transversalité sans pareil au sein de la Monarchie hispanique. Le reste de l’appareil militaire monarchique se caractérisait par la relative dispersion de son commandement. Le pouvoir militaire sur une région donnée était en effet souvent délégué à un capitaine général, charge qui se cumulait parfois avec celle de vice-roi180. La péninsule ibérique demeurait donc fracturée par une multiplicité de structures militaires qui soulignaient le découpage politico-territorial d’avant les Rois Catholiques : la Navarre, la Catalogne, Grenade, la Galice, toutes ces unités territoriales de la monarchie composite correspondaient à des capitaineries générales. La force de cohésion de cet ensemble provenait principalement du gouvernement orchestré par le conseil de guerre, au sein duquel aucun de ces capitaines généraux ne fut invité à siéger avec régularité181. Leur rôle politique et militaire était d’ordre régional et réclamait leur présence permanente sur le terrain. Il faut en ce sens mettre en avant l’exception notable que constituait le capitaine général de l’artillerie qui était non seulement un membre régulier du conseil de guerre, mais qui jouissait aussi d’un pouvoir exécutif géographiquement très étendu, des Açores à la Sardaigne et du Pays Basque aux presidios africains. Seuls les guardas de 148Castilla, la cavalerie qui constitua le premier noyau d’armée permanente des Rois Catholiques182, connurent une transversalité comparable à celle de l’artillerie, avec des compagnies installées dans différentes régions de la péninsule ibérique183. Cette institution ne bénéficia néanmoins pas de capitaine général avant que le duc de Lerma ne s’en octroya la charge au début du xviie siècle184.
Comment expliquer cette particularité de l’administration de l’artillerie par rapport au reste de l’appareil militaire de la péninsule ibérique ? On peut d’abord avancer une raison fonctionnelle. L’artillerie, arme chère à la fabrication et coûteuse à l’usage, gagnait à être gérée à grande échelle. Il était ainsi possible à la Monarchie de concentrer les efforts et de les coordonner. Par exemple, à Eugui, près de Pampelune, on concentrait les moyens de productions – capital, matières premières mais aussi compétences – afin d’alimenter en boulets les quatre coins de la péninsule et même la carrera de Indias185. La structure construite autour de la figure du capitaine général de l’artillerie permettait de réaliser cette coordination à grande échelle en passant outre les multiples divisions juridico-territoriales qui fragmentaient l’Espagne. De plus, il faut ici rappeler la dimension politique du contrôle de l’artillerie qui a servi d’introduction à ce chapitre. Le réseau d’individus sous les ordres du capitaine général de l’artillerie était spatialement étendu mais structurellement plat : très peu de niveaux hiérarchiques séparaient les subalternes du centre décisionnaire. Les lieutenants mais aussi les artilleurs eux-mêmes entretenaient un dialogue constant avec le conseil de guerre. Parmi les memoriales, c’est-à-dire les requêtes traitées par le conseil, on trouve une surreprésentation d’artilleurs qui, comptant sans doute sur l’appui du capitaine général de l’artillerie, n’hésitaient pas à demander diverses grâces et avantages186. De cette manière, malgré l’éloignement géographique et social, une certaine relation de proximité pouvait s’établir entre le centre de gouvernement et les individus en charge du matériel militaire le plus stratégique de la Monarchie 149hispanique. Cette relation fut même institutionnalisée puisqu’il y eut à la cour, à partir des années 1580, un représentant et protecteur des gens d’artillerie dont le rôle était d’appuyer les demandes de ses collègues187.
Il faut cependant mettre en évidence les nombreuses limites de ce phénomène de centralisation du contrôle de l’artillerie. Le système décrit jusqu’ici fut le fruit d’un long processus fait de luttes, de tensions et de négociations. Au sein même de l’appareil militaire, une concurrence existait entre l’institution du capitaine général de l’artillerie et d’autres structures administratives. Si l’autorité du capitaine général de l’artillerie s’étendait à tous les artilleurs de la péninsule ibérique dans un sens élargi, la gestion comptable autonome du personnel artilleur avait une étendue plus limitée. Les artilleurs de Minorque, par exemple, étaient inscrits sur un livre de compte général de la garnison, tenu à jour par un contador qui n’était pas sous l’autorité du capitaine général de l’artillerie188. De même, dans les premières années d’existence de l’armada del mar Océano, les artilleurs dépendaient pour leurs paies des mêmes contadores que le reste des équipages189. Que signifiait, pour l’un de ces artilleurs, dépendre de l’autorité du capitaine général de l’artillerie lorsque les officiers qui le payaient appartenaient à une structure d’encadrement différente et bien plus omniprésente au quotidien ? Et que se passait-il lorsqu’un artilleur d’une garnison frontière devait choisir entre exécuter les ordres reçus depuis la lointaine Madrid et ceux, parfois contradictoires, du commandant de la place forte ?
Le capitaine général de l’artillerie disposait d’un ensemble de prérogatives lui permettant d’affirmer et de renforcer son autorité. Il bénéficiait, on l’a vu, d’un pouvoir de nomination des artilleurs, ce qui lui permettait en théorie de choisir des individus selon sa convenance190. Il 150avait également le pouvoir de renvoyer celui qui ne le satisfaisait pas191. Enfin, l’outil le plus puissant consistait en un ensemble de privilèges, appelés preeminencias, attribués aux hommes sous son commandement. Ces privilèges furent le résultat d’une lente construction qui suivit le développement de la structure administrative de l’artillerie. Une première cédule royale de 1553 octroyait un certain nombre de privilèges aux artilleurs « ordinaires » du roi192. Comme le noyau de l’administration de l’artillerie se situait alors à Burgos, l’ordonnance était adressée directement aux autorités municipales de cette ville, mais également « à toute autre autorité à qui la cédule serait montrée », ce qui laisse penser qu’elle s’appliquait également aux artilleurs d’autres garnisons telles que Saint-Sébastien, Fontarrabie ou encore Perpignan. Le 17 avril 1577, une seconde cédule fut publiée afin de confirmer ce fait en spécifiant que les preeminencias des artilleurs devaient s’appliquer partout et à toutes les juridictions193. Elles furent par la suite complétées par d’autres cédules émises en 1583, 1593 et 1596, afin d’octroyer de nouveaux privilèges, d’en préciser le contenu et les limites, mais aussi de prévoir des sanctions contre toute justice qui n’en respecterait pas l’application194. La cédule de 1596, spécifiait clairement que ces privilèges s’étendaient à l’ensemble de la péninsule ibérique sans exception195.
Il est intéressant de noter que ces preeminencias revêtaient une certaine matérialité. En effet, elles étaient reproduites et imprimées à Madrid en de nombreux exemplaires qui étaient ensuite datés et signés par le capitaine général de l’artillerie avec le nom de l’artilleur qui en bénéficiait196. S’ils voulaient jouir des nombreux avantages énoncés dans les cédules, les artilleurs devaient être en mesure de présenter ce document comme attestation de leur service au sein de l’artillerie du roi. Certains le perdaient en mer, d’autres l’abîmaient peu à peu avec le temps et 151demandaient à le renouveler197. Les individus les plus prudents transportaient leur cédule de preeminencias avec une grande précaution, tel l’artilleur Alonso Gallardo qui, lorsqu’il fut saisi par les autorités locales en plein Séville « sortit une boîte avec certains papiers qu’il affirma être son titre d’artilleur, sa provision d’artilleur et ses libertés198 ».
Cette cédule imprimée que certains appelaient un título, un titre d’artilleur, octroyait à son porteur un certain nombre de privilèges et libertés. Assimilés à des gens de guerre, les artilleurs pouvaient notamment jouir du droit de porter des armes et de s’entraîner avec en chassant199. Ils étaient également exemptés d’un certain nombre de devoirs, comme l’hébergement des soldats200 et la participation aux tours de garde nocturnes201. Enfin, le principal privilège était d’ordre judiciaire : les gens d’artillerie bénéficiaient d’un fuero (exception juridique) qui ne les rendaient justiciables que par leur capitaine général de l’artillerie. La cédule de 1583 spécifiait bien qu’il était interdit à toute justice de se saisir de leur personne ou de leurs biens202. Cette ordonnance permet aussi d’identifier la source d’inspiration de ces privilèges accordés aux artilleurs puisque l’exception juridique reprenait directement le règlement des guardas de Castilla, cette cavalerie de patrouille à l’intérieur de la péninsule ibérique203. Le fuero militaire était sans aucun doute l’un des principaux instruments dont disposait le conseil de guerre pour asseoir son pouvoir en passant outre les libertés politiques et velléités autonomistes des différentes unités de la monarchie composite. Dans le cas de l’artillerie, ce privilège juridique permit incontestablement de renforcer la solidité du lien entre le capitaine général de l’artillerie, appartenant au centre gouvernemental madrilène, et son vaste réseau d’agents.
152Le cas du lieutenant Diego de Prado
dans la garnison de Perpignan
Les tensions liées au contrôle de l’artillerie qui se jouaient à un niveau local, ainsi que le rôle du fuero artilleur se saisiront mieux à travers l’exposé des troubles survenus à Perpignan et Roses en 1593. Situées dans une région limitrophe du royaume de France, ces deux villes jouaient un rôle clé dans le système défensif de la péninsule ibérique, raison pour laquelle elles accueillaient d’importantes garnisons de soldats et d’artilleurs. Le commandement militaire de ces garnisons était rattaché à la capitainerie général de Catalogne, c’est-à-dire à la personne du vice-roi qui était alors le duc de Maqueda204. À Perpignan, l’autorité de ce personnage était déléguée à un lieutenant, le maître de camp Juan de Urbina, qui avait lui-même autorité sur le commandant de la forteresse de Roses, le sergent Ramón Torrella. La gestion de l’artillerie constituait cependant une sorte d’exception puisque se trouvait, à Perpignan, un lieutenant du capitaine général de l’artillerie qui recevait ses ordres directement de don Juan de Acuña Vela. Depuis la fin de l’année 1592, cette charge était assumée par Diego de Prado205, proche collaborateur d’Acuña Vela206, homme savant qui avait d’ailleurs rédigé un manuscrit d’artillerie dédié à son général207. Se sachant sous la protection du capitaine général de l’artillerie, ce dernier n’hésita pas à entrer en conflit avec les commandants militaires locaux afin de défendre les prérogatives d’autonomie de l’artillerie.
Les garnisons de Roses et Perpignan couvaient un ensemble de problèmes qui apparurent soudainement lorsque la tension entre Diego de Prado et le commandant Juan de Urbina monta à l’automne 1593. À Roses d’abord, les artilleurs avaient reçu des ordres de Prado les invitant à retirer la plupart des pièces de leurs affûts, ne laissant en défense que le strict nécessaire : deux demi-couleuvrines et un sacre faisant face à la mer208. L’objectif était alors de ranger les affûts en bois dans un entrepôt afin 153de les préserver des pluies hivernales. Prado muta également l’un des artilleurs de Roses dans une tour de défense côtière209. Ces ordres unilatéraux du lieutenant d’artillerie provoquèrent une petite crise locale dans la forteresse de Roses. En l’absence du sergent Torrella, l’alférez (porte-étendard) Torralba commandait la garnison et il semble s’être violemment opposé aux ordres de Prado. Les artilleurs décidèrent alors d’envoyer l’un des leurs à Perpignan afin d’informer leur lieutenant des grandes difficultés qu’ils rencontraient. Bravant les menaces de l’alférez Torralba, le messager transporta une lettre du maître artilleur Petillas dans laquelle ce dernier décrivait, non sans couleurs, le comportement extrêmement hostile du commandant de la garnison :
L’alférez dit qu’il perdra ses yeux plutôt que de consentir à ce que l’on exécute les ordres de Votre Grâce et il affirme que quelqu’un paiera pour ça. Et il en sera certainement ainsi parce qu’ils nous ont déjà menacés plusieurs fois. Dans la nuit de dimanche, durant le tour de garde, le sergent Torrella m’a averti que, à la moindre difficulté que nous ferions sur le fait de tirer avec l’artillerie ou pas, ils nous ouvriront la tête ou nous couperont un bras et que le premier qui tentera de s’échapper d’ici, ils le jetteront dans la prison et l’étrangleront avec un garrot210.
Le lieutenant Prado fit enregistrer devant notaire ces documents ainsi que le témoignage du messager qui confirmait le contenu de la lettre211.
La violence et les menaces de mort prononcées par l’alférez Torralba reflétaient une montée de tension entre, d’une part, le groupe de soldats et commandants locaux – Urbina, Torrella, Torralba – et, d’autre part, le groupe des artilleurs et de leur lieutenant. Il y a fort à croire que Diego de Prado avait alors décidé de mettre fin à un certain nombre de privilèges et abus de ces chefs militaires. Ce témoignage enregistré devant notaire faisait sans aucun doute partie d’un dossier qu’était en train de constituer Prado en accumulant, avec la complicité de ses hommes, les preuves des fautes des commandants. Cette ambiance de 154complot apparaît clairement lorsqu’une lettre destinée à Prado s’égara entre Roses et Perpignan ; les artilleurs dénoncèrent le coup sournois de quelque traître de la faction des commandants212. Aux capitaines de la garnison de Roses, Prado reprochait notamment un usage abusif des salves d’artillerie qui étaient tirées avec la poudre payée par le roi. Parmi les nombreux enregistrements de salves injustifiées, le plus scandaleux était sans aucun doute ces trois canons, deux demi-couleuvrines, deux sacres et plusieurs autres petites pièces que le commandant Torrella fit tirer à blanc pour saluer la vicomtesse de Peralada213. Cette galanterie, véritable démonstration de pouvoir de la part de ce capitaine de garnison, montre que la question politique du contrôle de l’artillerie revêtait une dimension symbolique tout autant qu’effective. Certains commandants tendaient manifestement à se comporter comme les véritables seigneurs du lieu.
Cependant, le principal combat de Diego de Prado se livrait non pas à Roses mais à Perpignan, contre le maître de camp Juan de Urbina, commandant militaire du comté de Roussillon. Pour commencer, Urbina utilisait le matériel de guerre de la Monarchie à des fins privées, se comportant lui aussi comme un seigneur plus que comme un serviteur du roi. Ainsi, à la fin du mois de septembre 1593, il avait fait sortir quelques armures des entrepôts royaux afin de les prêter à des gentilshommes lors d’un tournoi de joute qu’il avait organisé214. Prado avait également remarqué que sept pièces d’artillerie avaient mystérieusement disparu de la place forte depuis l’inventaire réalisé par son prédécesseur215. En représailles, sans doute, aux menées de Diego de Prado, Juan de Urbina s’attaqua au maître artilleur Francisco Pau Ferrer, se constituant juge dans le procès qui l’opposait au marchand Honophil Paulete216. Comme le dénonça Diego de Prado au conseil de guerre, l’action était complètement illégale car le jugement revenait de droit au capitaine général de l’artillerie en raison du fuero des artilleurs217. Ce fuero judiciaire offrait ici une protection à des artilleurs dont l’un des 155rôles attendus était de contrôler les abus de personnages politiques et militaires relativement puissants à une échelle locale.
Cette situation extrêmement tendue ne manqua pas de tourner à la guerre ouverte. Lorsque le commandant Urbina quitta la ville pendant trois jours pour chasser le cygne en compagnie de l’évêque, le lieutenant d’artillerie Prado ordonna au maître artilleur Francisco Pau Ferrer – celui-là même qui était menacé par la justice d’Urbina – de monter des cadenas à la porte des entrepôts royaux218. Le plan de Diego de Prado était de prévenir tout abus du commandant en attendant de recevoir la réponse du conseil de guerre à propos de son projet d’installation d’une serrure à trois clés contrôlant l’accès au matériel de guerre. À son retour, Juan de Urbina entra dans une « fureur terrible » et fit emprisonner Diego de Prado au château, tandis que son complice artilleur, auteur des cadenas, fut mis au pilori comme un vulgaire criminel219. Urbina joua de son pouvoir militaire sur la communauté locale et menaça les notaires de les mettre eux aussi au pilori s’ils s’impliquaient davantage dans les manigances du lieutenant d’artillerie220. Voulant lancer une procédure d’information avec témoins pour la présenter au roi, les artilleurs de Perpignan sollicitèrent la justice locale qui refusa catégoriquement de s’impliquer dans le conflit221. Le vice-roi de Catalogne n’apporta pas plus de soutien au lieutenant d’artillerie, se contentant de lui rappeler qu’en cas d’attaque soudaine – ce qui n’était pas le cas en septembre 1593 – il était essentiel que le lieutenant d’artillerie et ses hommes exécutassent tous les ordres du maître de camp Juan de Urbina222.
Cependant, les actions de Diego de Prado étaient parfaitement légitimes. Une cédule royale spécifiait qu’à l’exception des cas d’urgence, la distribution de l’artillerie, des armes et des munitions de guerre nécessitait des ordres du roi adressés au capitaine général de l’artillerie ou à son lieutenant223. Contrôler la consommation de poudre, choisir les artilleurs en poste, préserver l’artillerie de la Monarchie étaient là quelques-unes des principales fonctions du lieutenant d’artillerie. Néanmoins, il était manifestement difficile de mener à bien ces missions 156face au pouvoir et à la résistance de certains commandants. Diego de Prado n’aurait probablement jamais pris le risque de s’attaquer aux abus d’Urbina et Torrella s’il n’avait pas bénéficié de la protection de ce puissant personnage qu’était le capitaine général de l’artillerie. Dès qu’il apprit la nouvelle, Juan de Acuña prit la défense de ses hommes devant le conseil de guerre, réclamant des sanctions contre les commandants de Perpignan et Roses qui emprisonnaient des gens d’artillerie contre les cédules de preeminencias224. Après avoir consulté les preuves accumulées par Diego de Prado, les ministres du conseil de guerre annotèrent ainsi la lettre du capitaine général de l’artillerie :
Que l’on installe une serrure à trois clés dans les entrepôts de munitions, et que l’une des clés soit remise au lieutenant d’artillerie, l’autre au veedor (inspecteur) et la troisième au majordome de l’artillerie, et pour le reste, que l’on s’en remette au vice-roi de Catalogne pour les points annotés par don Diego de Prado225.
Il s’agissait d’une victoire incontestable du parti des artilleurs sur celui des commandants de garnison. Les ordres royaux à destination de Diego de Prado partirent le 20 novembre 1593. En janvier 1594, des serrures à trois clés verrouillaient les entrepôts de munitions de Roses et de Perpignan de sorte que seuls le lieutenant de l’artillerie, le majordome et le veedor pouvaient y avoir accès226. Entre temps, la situation s’était apaisée à Roses où, de retour de Barcelone, le sergent Ramón Torrella avait demandé à ce que fussent respectés les ordres du lieutenant d’artillerie concernant les affûts227. Toutefois, de vives tensions persistaient à Perpignan, où le commandant Urbina préparait sa riposte. Au début de l’année 1594, il demanda à Diego de Prado et au veedor Guevara un grand nombre de mèches pour les soldats228. Cette fois-ci, il présenta un ordre du vice-roi qui lui donnait son soutien, affirmant qu’il s’agissait d’un cas d’urgence229. Face aux refus de 157Prado et Guevara, il les menaça, les maltraita ce qui les conduisit à se plaindre une nouvelle fois au conseil de guerre, « en défense de leur honneur et réputation230 ».
Comment expliquer que la situation put se répéter si peu de temps après la victoire du capitaine général de l’artillerie et de son lieutenant ? À l’issue des troubles de l’automne 1593, le conseil de guerre n’avait pas statué sur les sanctions à prendre contre Juan de Urbina et avait remis la question au jugement du duc de Maqueda, vice-roi de Catalogne. Or, le duc protégeait indubitablement Urbina. À aucun moment il ne chercha à venir en aide à Diego de Prado lorsque celui-ci était menacé231. Au printemps 1594, plutôt que de châtier les coupables comme le lui demandait le capitaine général de l’artillerie, il envoya au conseil de guerre un plaidoyer en faveur de Juan de Urbina232. Selon le vice-roi, les abus de salves et d’usage du matériel de guerre étaient bien peu de choses à côté de l’incroyable manque de respect avec lequel le lieutenant d’artillerie avait procédé contre le commandant de Perpignan233. Maqueda retournait complètement la situation, exprimant sa désapprobation complète du fuero des artilleurs et demandant des sanctions contre Diego de Prado pour avoir outrepassé ses prérogatives234. En s’attaquant aux abus des commandants de forteresses – dans l’intérêt financier de la Monarchie – Diego de Prado s’était fait de puissants ennemis. Nul doute que, sans la protection du fuero et le soutien politique du capitaine général de l’artillerie, sa mission eût été vouée à l’échec. Le lieutenant d’artillerie était parvenu à limiter l’accès des commandants au matériel de guerre en installant des serrures à trois clés à Perpignan et Roses, mais il ne souhaita pas risquer plus longtemps sa vie et sa carrière contre des hommes tels que Juan de Urbina et le duc de Maqueda : peu de temps après ces incidents, il demanda sa mutation auprès du capitaine général de l’artillerie235.
158Fueros d’artilleurs, politique de centralisation
et résistances locales
Ces altercations entre pouvoirs militaires localement implantés et artilleurs jouant un rôle de contrôle au service du gouvernement madrilène étaient monnaie courant à la fin du xvie siècle. Récurrentes à Perpignan236, on les rencontre aussi dans les forteresses de Galice, par exemple, où les commandants se plaisaient à abuser des salves contre l’avis du lieutenant d’artillerie237. Or, l’autorité qu’avait acquise le capitaine général de l’artillerie au sein de certaines garnisons était une conquête récente et incomplète. Des instructions données à don Francés de Álava en 1574 excluaient ainsi de son ressort et de son pouvoir de nomination les places fortes d’Afrique du nord et celles de Navarre, Fontarrabie et Saint-Sébastien238. Cependant, jouant de son influence à la cour, Francés de Álava parvint, en 1582, à négocier auprès du roi et du conseil de guerre le pouvoir de nomination sur les artilleurs de la citadelle de Pampelune239. Douze ans après, en 1594, le lieutenant d’artillerie de Navarre, Pedro Fernández de la Carrera, devait encore se battre au quotidien contre les différents châtelains et commandants militaires de Pampelune pour faire valoir l’autonomie administrative de l’artillerie et le fuero judiciaire des artilleurs, mais il pouvait désormais compter sur le soutien du roi et d’une partie du conseil de guerre240.
Souvent, les velléités madrilènes de contrôle de l’artillerie se heurtaient également à d’autres structures de pouvoir antérieures. Ainsi, à Majorque, l’artillerie était administrée par des institutions politiques locales – jurats, universitat – jusqu’à ce qu’un lieutenant d’artillerie fût introduit en 1576241. Les prétentions de ce nouveau venu à visiter l’artillerie et à s’emparer progressivement de son administration rencontrèrent une vive opposition de la part de ces pouvoirs locaux, bientôt soutenus par le vice-roi. Durant trois décennies, cette opposition se manifesta par des actes de résistance tels que le classique emprisonnement du lieutenant ou encore le recours à un dossier judiciaire constitué de faux 159témoignages pour discréditer son action242. Face à ces attaques, le capitaine général de l’artillerie et le conseil de guerre prirent systématiquement la défense de leur homme. Or, ces petits conflits judiciaires expriment des tensions d’ordre politique entre, d’une part, les intérêts d’individus ou de communautés locales résolus à défendre leur pouvoir et, d’autre part, le contrôle grandissant du gouvernement madrilène dans certains champs stratégiques tels que l’artillerie. Les archives du conseil de guerre contiennent une multitude de plaintes d’artilleurs arrêtés sans motif par diverses autorités locales qui agissaient ainsi probablement en signe de protestation face à l’avancée de l’administration centrale243.
Il faut toutefois signaler que la jouissance de ces privilèges favorisait certains abus de la part des gens d’artillerie. Ainsi, en témoigne un autre épisode s’étant déroulé à Perpignan mais quelques années plus tard et avec d’autres protagonistes. Signe d’une certaine détente des relations entre artilleurs et soldats de la garnison, le remplaçant d’Urbina au commandement militaire du Roussillon, Fernando de Toledo, hébergeait au château Pedro de León Peralta, remplaçant du lieutenant d’artillerie Prado. Néanmoins, la situation changea brusquement lorsque, de retour d’une longue absence, le commandant Toledo mit au jour les amours secrets qu’entretenait le lieutenant d’artillerie avec une demoiselle de compagnie de sa femme244. Profitant du fait qu’il logeait juste à côté des appartements des dames, le lieutenant avait apparemment creusé un trou dans le mur par lequel il pouvait communiquer avec la belle et échanger des billets d’amour que le commandant avait faits saisir et envoyer au conseil de guerre pour preuve de la trahison de son hôte245. Pire, le lieutenant d’artillerie avait permis à son meilleur ami, le sergent Velarde, d’entretenir par le même biais une relation secrète avec la fille du commandant ! Accablé par l’abondance de preuves, le lieutenant avait été emprisonné à Collioure sur ordre du vice-roi. Les individus étaient différents mais le schéma était identique à 1593 : le commandant de 160Perpignan, avec la complicité du vice-roi de Catalogne, agissait contre le lieutenant d’artillerie. Or, comme en 1593, le conseil de guerre insista pour que le jugement des fautes du lieutenant d’artillerie fût remis au capitaine général de l’artillerie, Juan de Acuña Vela246. Autrement dit, la protection du fuero artilleur s’appliquait même lorsque les torts commis avaient lieu hors du contexte d’exercice de l’office. En outre, cette protection inconditionnelle était relativement efficace puisque Pedro de León Peralta était encore lieutenant d’artillerie quelques années plus tard247. De même à Lisbonne, le lieutenant d’artillerie Alonso de Céspedes avait envoyé ses hommes battre jusqu’aux portes de la mort un Portugais qui lui devait de l’argent, à titre privé semble-t-il248. Le gouverneur du Portugal fit jeter en prison le commanditaire du délit mais, sans doute suite à l’intervention du capitaine général de l’artillerie, le lieutenant Céspedes put bientôt retourner à l’exercice de son office sous la bienveillante protection du conseil de guerre249.
Par ailleurs, il est important de remarquer que d’autres institutions gouvernementales concurrentes du conseil de guerre recoururent à cette arme qu’étaient les privilèges d’artilleurs pour étendre leur autorité. À Séville, la casa de la contratación, institution dépendante du conseil des Indes, parvint ainsi à conquérir sa propre juridiction sur les artilleurs de la carrera de Indias. Afin d’inciter la participation à son école d’artilleurs, l’enseignant de cette institution sollicita pour ses disciples les mêmes privilèges que ceux des artilleurs de Burgos250. Dans un premier temps, la jouissance de ces privilèges demeura cependant dépendante du capitaine général de l’artillerie et non du conseil des Indes. Lorsque le capitaine général résolut, en 1581, de ne plus signer les cédules de preeminencias parce qu’un différend l’opposait au maître de l’école sévillane, les artilleurs perdirent temporairement leurs privilèges251. Cependant, avec le passage des années, la situation tourna finalement à l’avantage du conseil 161des Indes. En 1594, la casa de la contratación obtint comme responsable de son école l’un des plus anciens lieutenants d’artillerie, Francisco de Molina, avec l’autorisation spéciale de signer les cédules de privilèges252.
Cette nomination fit enrager Juan de Acuña Vela qui se plaignit au conseil de guerre de ce qu’un nouveau capitaine général de l’artillerie avec juridiction sur Séville venait d’être instauré :
Alors que l’école est subordonnée à don Juan [de Acuña Vela] et que les artilleurs y sont sélectionnés par lui en vertu des lettres qu’il tient de Votre Majesté, on lui arrache ces prérogatives de ses mains pour les mettre dans celles de Francisco de Molina en lui donnant cette nouvelle commission grâce à laquelle ce dernier peut désigner les artilleurs qu’il veut et leur donner les cédules de privilèges que le dit don Juan a la faculté d’attribuer, de sorte que le dit Francisco de Molina se retrouve de fait capitaine général de l’artillerie de cette région253.
Cette citation montre combien, dans l’esprit des membres du conseil de guerre, le pouvoir exécutif du capitaine général de l’artillerie allait de pair avec son pouvoir judiciaire et de nomination. Désormais, les artilleurs sortant de l’école sévillane étaient placés non plus sous la protection du capitaine général de l’artillerie et du conseil de guerre, mais sous celle de la casa de la contratación et du conseil des Indes. Lorsque les autorités de Séville ou d’autres villes leur cherchaient querelle, c’est aux juges de la casa de la contratación qu’ils faisaient appel254. Ce coup politique du conseil des Indes rendait de fait l’administration de l’artillerie de la carrera de Indias moins dépendante du conseil de guerre. Par conséquent, s’il y eut incontestablement un phénomène général de centralisation du contrôle de l’artillerie, il ne fut néanmoins pas systématiquement synonyme de concentration des pouvoirs aux mains du capitaine général de l’artillerie.
Qu’ils fussent utilisés par le conseil de guerre ou celui des Indes, ces privilèges et fueros jouèrent un rôle clé dans la mise en place d’une administration de l’artillerie transversale à la fragmentation politico-juridique 162de ce qui demeurait encore une monarchie composite. Ce pouvoir de nature judiciaire venait protéger et renforcer le déploiement des tentacules de la pieuvre polysynodale madrilène qui, progressivement, tâchait d’établir un contrôle sur les multiples structures politico-juridiques préexistantes. En d’autres termes, dans ce récit du développement de l’administration de l’artillerie, il n’y a pas à choisir entre Strayer255 et Tilly256. La construction de cette branche particulière de l’État fut le résultat de la compétition militaire avec les autres puissances politiques, comme Tilly le raconte, mais les moyens de sa mise en place revêtirent un caractère fortement juridique, la justice étant la principale source de pouvoir de l’État selon Strayer. Comme le formule Jean-Frédéric Schaub dans le cas du Portugal, le conflit de juridictions était une forme d’exercice de la politique257. Le fuero des artilleurs, et plus généralement les fueros d’un certain nombre de soldats tels que les guardas de Castilla, fut en quelque sorte une réponse ad hoc du conseil de guerre aux nombreuses libertés et privilèges d’un certain nombre de territoires de cette monarchie composite. Dans le cas précis de l’artillerie, il s’agissait également d’un instrument de contrôle des abus d’autres serviteurs du monarque.
Il faut néanmoins souligner les limites de ces mécanismes de construction de transversalités au sein de la Monarchie hispanique. L’expansion du contrôle par Madrid des moyens militaires les plus stratégiques allait à l’encontre des pactes signés entre le souverain et les sujets de ses différents territoires. Au Portugal, la présence d’un lieutenant en charge de l’artillerie portugaise et ne recevant ses ordres que du conseil de guerre et du capitaine général de l’artillerie constituait une infraction aux engagements pris à Tomar en 1581 tout autant que la présence de garnisons espagnoles en territoire portugais258. En outre, l’application des privilèges d’artilleurs et les nombreux abus impunis qu’ils engendrèrent suscitèrent sans aucun doute la colère d’un certain nombre de sujets. En d’autres termes, ces transversalités mises en place, le plus souvent de force, par le gouvernement madrilène ne suffisaient pas à garantir la cohésion de la monarchie composite. De cela témoigne la révolte portugaise de 1640 dont l’une des causes, selon Schaub, fut l’exaspération générale contre les privilèges 163judiciaires des soldats castillans qui finirent par être considérés comme une armée d’occupation259. En outre, il faut préciser que le phénomène décrit ici fut circonscrit à l’espace politico-juridictionnel du conseil de guerre, c’est-à-dire à la péninsule ibérique, aux îles Baléares, à la Sardaigne, aux presidios africains et aux Açores. La centralisation du contrôle de l’artillerie, inaboutie dans cet espace limité de la Monarchie hispanique, ne fut jamais tentée dans les mêmes termes à l’échelle du vaste empire.
L’artillerie des États italiens :
une structure polycentrique coordonnée
La gestion de l’artillerie au sein des États italiens de la Monarchie hispanique contrastait avec celle de la péninsule ibérique. En Italie, il n’existait en effet aucune structure transversale comparable à celle du capitaine général de l’artillerie castillan. Au contraire, cette administration se caractérisait par un certain polycentrisme. Chaque État – les royaume de Sicile et de Naples, le duché de Milan – possédait sa propre structure de gouvernement de l’artillerie. Dans la péninsule ibérique, la gestion de l’artillerie avait acquis une certaine autonomie permettant au conseil de guerre d’exercer un contrôle sur l’activité des commandants militaires locaux, tandis qu’en Italie, l’artillerie demeurait partie intégrante du reste de l’appareil militaire. À ce titre, le personnage qui en avait la charge était le vice-roi (ou son équivalent à Milan, le gouverneur), qui, en tant que capitaine général, détenait le commandement suprême de tout l’appareil militaire présent sur son territoire260. Cela ne signifiait pas pour autant que Madrid abandonnait toute idée de contrôler l’artillerie sur ces territoires : les vice-rois entretenaient une correspondance avec le conseil d’État au sujet de l’artillerie. En outre, chacun des États italiens bénéficiait de la présence d’un capitaine général de l’artillerie nommé par le roi et son conseil d’État, et constituant une sorte de garde-fou en cas de mauvaise gestion par le vice-roi. Cependant dans les faits, loin de Madrid, ce personnage n’eut jamais un pouvoir politique comparable à son équivalent castillan.
164Contrôle de l’artillerie dans le royaume de Sicile
En Sicile, la présence d’un capitaine général de l’artillerie collaborant avec le vice-roi remontait au moins au milieu du xvie siècle261. Comme dans le cas des premiers capitaines généraux de l’artillerie en Espagne, cette charge renvoyait alors à un commandement militaire de terrain. Le capitaine Andronico de Espinosa participa ainsi à la prise de Mahdía (Tunisie) où il trouva la mort en 1550262. Plusieurs individus se succédèrent ensuite à cette charge mais, dans les années 1570, il n’y avait plus de capitaine général de l’artillerie de Sicile263. Sur les recommandations de Juan de Soto, secrétaire de don Juan d’Autriche, le conseil d’État insista pour envoyer un nouveau capitaine général de l’artillerie264. En plein contexte d’une attaque ottomane visant la forteresse de La Goulette, juste en face de la Sicile, la situation déplorable de l’artillerie sicilienne dépeinte par Soto ne put qu’encourager les ministres à rapidement nommer un responsable265. Plusieurs noms furent avancés266, et le choix retomba finalement sur Bernardino de Velasco267, capitaine castillan d’expérience qui avait déjà servi cette même charge en Sicile dans les années 1560 avant de devenir commandant de galères à Naples268. Toutefois, cette nomination ne fut apparemment pas du goût du duc de Terranova, alors en charge du gouvernement de la Sicile269. D’abord, le nom du candidat qu’il avait suggéré pour l’office – Juan de Angulo – avait été parfaitement ignoré par le conseil d’État270. Ensuite, la nomination de 165Velasco menaçait la position de Baldassare Gago, l’un des protégés de Terranova qui l’assistait en tant que lieutenant d’artillerie271.
Selon un schéma qui n’était pas sans rappeler l’épisode de Perpignan, une dispute ne tarda donc pas à éclater entre, d’une part, ce grand aristocrate sicilien extrêmement bien implanté localement272 et désirant défendre son autorité et, d’autre part, le capitaine castillan, envoyé par le conseil d’État pour remettre de l’ordre dans la gestion de l’artillerie. Au printemps 1575, le nouveau capitaine général de l’artillerie présenta au duc de Terranova une liste de prérogatives associées à sa charge, telles que le pouvoir de nomination, l’autorité suprême sur le personnel d’artillerie et les manufactures d’armement, la juridiction particulière sur ses hommes273. En d’autres termes, il s’agissait pour Velasco de se faire, en Sicile, un véritable alter ego du capitaine général de l’artillerie d’Espagne. Or, il était hors de question pour Terranova de voir se développer sous son gouvernement une structure indépendante de l’artillerie. Il se plaignit au conseil d’État des demandes d’autorité excessives de Bernardino de Velasco274. Il annota point par point les prétentions que le capitaine général de l’artillerie lui avait remises, tâchant de spécifier systématiquement que cette charge dépendait du vice-roi : par exemple, il reconnaissait que le personnel d’artillerie devait être approuvé par le capitaine général de l’artillerie, mais il expliquait qu’en Sicile seul le vice-roi avait la faculté de nomination275. Quant à la création d’une juridiction particulière des artilleurs, Terranova écrivit sans détour :
Aucune chose n’est plus pernitieuse à la quiétude de la Sicile ni à la conservation du bon ordre de la justice que les projets de fonder de nouvelles juridictions276.
L’assise politique locale du duc de Terranova était si forte que le nouveau capitaine général de l’artillerie se trouva dépouillé de tous les 166moyens de faire valoir les prérogatives attachées à sa charge. Ainsi, après avoir remarqué la mystérieuse disparition de 400 ducats de munitions, Bernardino de Velasco dut avouer au conseil d’État son impuissance face au réseau d’agents du duc de Terranova277. Il s’était fait accompagné en Sicile de six experts en artillerie, mais ces derniers avaient fini par l’abandonner car, après plusieurs mois de travail, Terranova continuait de refuser de leur verser un salaire278. Isolé au milieu d’étrangers menaçants, le capitaine général de l’artillerie écrivit même au conseil qu’il craignait pour sa vie279. Le fait est qu’il mourut, assez opportunément pour Terranova, seulement quelques mois plus tard280. Le conseil d’État se montra alors plus conciliant avec le duc, acceptant de nommer son candidat, Juan de Angulo, au poste de capitaine général de l’artillerie281.
Victoire politique manifeste du duc de Terranova, cette nomination tendit à cantonner le capitaine général de l’artillerie au rôle d’exécutant des ordres du vice-roi. On ne trouve ainsi aucune lettre de Juan de Angulo envoyée au conseil d’État. Toute son activité était discutée sur place avec le vice-roi, qui lui-même entretenait la communication avec le conseil d’État. Or, l’activité de l’île en matière d’artillerie était relativement intense au vu de sa modeste taille. Depuis les réformes défensives des années 1570, la Sicile disposait d’importantes garnisons d’artilleurs, auxquelles s’ajoutait tout un réseau d’écoles d’artillerie282. L’escadre de galères siciliennes nécessitait d’être ravitaillée en armes et munitions283. Les villes de Messine et de Palerme possédaient donc des fonderies de canons qui constituaient les principaux établissement d’armement de l’île284. Pas moins de six ingénieurs à temps plein inspectaient les fortifications et dirigeaient de nouveaux chantiers de construction285. Juan de Angulo servit donc de chef d’orchestre de cet ensemble jusqu’à sa mort 167survenue en 1602286. Le fait qu’un seul et même individu fut pendant près d’un quart de siècle à la tête de la gestion de l’artillerie sicilienne amena à cette administration une certaine stabilité malgré la relative instabilité du gouvernement qui passa, pendant cette période, entre les mains de huit vice-rois. Il en avait résulté un développement prospère de cette administration qui avait atteint, au début du xviie siècle, une taille démesurée par rapport au rôle géopolitique déclinant de la Sicile. Après la mort du capitaine général de l’artillerie, le vice-roi du moment proposa une réforme de l’artillerie réduisant les postes et supprimant l’office de Juan de Angulo, jugé inutile287.
Contrôle de l’artillerie dans le royaume de Naples
Le royaume de Naples possédait depuis au moins le milieu du xvie siècle une charge de capitaine général de l’artillerie mais cette dernière tarda à acquérir un véritable sens institutionnel. L’individu qui la reçut en 1561 était le maître de camp Pedro Díaz Carrillo de Quesada, mais il occupait alors le commandement de la forteresse de la Goulette en Afrique du nord288. Ce n’est qu’à partir de l’année 1573 qu’il put finalement prendre possession de sa charge à Naples, lorsqu’il fut remplacé dans le commandement de La Goulette suite à la prise de Tunis par don Juan d’Autriche289. À partir de ce moment, le poste de capitaine général de l’artillerie fut durablement implanté à Naples dans la mesure où Carrillo de Quesada en fit une affaire de famille. En effet, en 1582, il demanda à prendre sa retraite et à transférer la charge à son gendre Juan Vázquez de Acuña, ce que le conseil d’État accepta290. Ce dernier nomma son fils Pedro comme lieutenant d’artillerie en 1598 et, en 1605, il obtint du conseil d’État que sa charge lui serait transmise à sa mort qui survint en 1610291. Ce fait constituait une exception notable : Naples fut l’unique territoire de la Monarchie hispanique où 168la charge de capitaine général de l’artillerie se développa sur le modèle d’une succession dynastique.
À Naples, la fonction du capitaine général de l’artillerie devint un peu plus politique qu’en Sicile. Ce personnage était en effet invité à siéger au conseil collatéral, principal organe de gouvernement de la vice-royauté napolitaine292. Néanmoins, Carrillo de Quesada semble avoir eu quelques difficulté à faire entendre sa voix au sein de cette petite assemblée en charge de conseiller le vice-roi293. Ainsi, face à la menace d’une invasion massive des Ottomans en 1575, il se plaignit au roi que le cardinal de Granvelle, alors vice-roi, n’écoutait aucune de ses recommandations et mises en garde294. Granvelle conservait manifestement la main haute sur la gestion de l’artillerie. Sous le gouvernement des vice-rois suivants, le marquis de Mondéjar et don Juan de Zuñiga, le capitaine général de l’artillerie tenta d’étendre ses pouvoirs295. Carrillo de Quesada souhaitait notamment obtenir l’autorité sur les dépenses en matière d’artillerie, de munitions et de personnel, c’est-à-dire instituer une administration de l’artillerie relativement autonome vis-à-vis du vice-roi, comme celle qui existait en Espagne. Cependant, par deux fois des conseillers s’érigèrent en défenseurs des prérogatives vice-royales et obtinrent que les ordres de paiement du capitaine général de l’artillerie dussent être accompagnés de l’accord du vice-roi296. Cela réduisait dans les faits son rôle à celui de simple exécutant dépendant de l’autorité du vice-roi. Par conséquent, la gestion de l’artillerie napolitaine a laissé assez peu de traces dans les archives du gouvernement central madrilène, peu d’éléments quotidiens étant discutés entre Naples et Madrid297.
Toutefois, la correspondance des vice-rois de Naples avec Madrid ne laisse aucun doute sur le fait que ce royaume de l’Italie méridionale était un important centre d’artillerie et d’armement pour la Monarchie. Il ne s’agissait pas tant de la taille de ses garnisons d’artilleurs qui, comme l’a montré le chapitre précédent, étaient plus faiblement pourvues 169que la plupart des autres territoires. En revanche, l’atout principal du royaume de Naples gisait dans sa puissance de production. Sa capitale disposait d’une fonderie de canons capable de pourvoir les besoins locaux mais aussi d’exporter298. Les importants gisements de fer de l’île d’Elbe, près des presidios de Toscane (sous administration de la vice-royauté napolitaine) permettaient d’approvisionner en boulets de canon les États du sud de l’Italie299. Naples produisait également de grandes quantités de poudre noire300. Dans les faubourgs de la capitale, près de la Porta Capuana, l’un des lieux de production de poudre prit accidentellement feu en 1589 et l’explosion qui en suivit souffla les alentours, causant des dizaines de morts et blessés301. L’intense activité de production napolitaine permettait de ravitailler en armes et munitions une imposante escadre de galères. Comptant une cinquantaine de navires dans les années 1570, cette unité constituait alors, à elle seule, la moitié des effectifs de galères de toute la Monarchie302. Le déclin de l’escadre napolitaine fut par la suite amplement compensé par les énormes nécessités d’armement des galéasses qui furent construites dans les arsenaux napolitains303. Enfin, la vice-royauté employait toute 170une cohorte d’ingénieurs qui permettait de quadriller et d’inspecter l’armement et les fortifications de ce vaste territoire304.
Contrôle de l’artillerie dans le duché de Milan
Dernière acquisition de la Monarchie en Italie (1535), le duché de Milan possédait une artillerie dans un état de désordre profond si l’on en croit les nombreux témoignages de l’époque. D’après le magistrato ordinario (la cour des comptes milanaise) qui dénonçait cette situation en 1577, ce chaos avait été généré par la multiplicité des administrations en charge de l’artillerie ainsi que leur manque de coopération305. Du temps des guerres d’Italie, le capitaine général de l’artillerie et son personnel n’avaient été responsables que du matériel de campagne de l’armée impériale tandis que l’artillerie présente dans les différentes villes et forteresses était demeurée aux mains d’officiers locaux306. Autrement dit, comme en Espagne, le commandant en chef de l’artillerie avait d’abord été un capitaine opérationnel sur le champ de bataille mais, à Milan, malgré une longue période de paix, la transition vers le rôle de chef de l’administration ne s’était pas complètement réalisée. Par conséquent, coexistaient encore à la fin des années 1570 diverses administrations, celle de la Monarchie (le capitaine général, le majordome et leurs comptables), celle de l’ancien duché (le magistrato ordinario, le commissaire aux munitions et ses officiers), et enfin celles très localisées de quelques châtelains307.
Afin de remettre de l’ordre dans ces affaires, le capitaine général de l’artillerie Jorge Manrique de Lara308 sollicita à de multiples reprises l’extension de son autorité à toute l’artillerie, les fortifications et le 171personnel artilleur du duché309. En 1578, sa demande auprès du roi reçut le soutien du gouverneur de Milan, le marquis d’Ayamonte :
Nous n’avons trouvé aucun sens aux choses de l’artillerie si ce n’est une grande perte d’argent, une confusion et un embarras importants comme il y en aura toujours tant que toute l’artillerie, les munitions, les fortifications et tout ce qui leur est annexe ne seront pas à la charge d’une seule et même personne310.
Cependant, la tentative se solda par un échec et, lorsque le duc de Terranova reçut le gouvernement de Milan en 1583, il déplora à son tour l’état catastrophique dans lequel se trouvait l’artillerie311. Favorable lui aussi à un renforcement des pouvoirs du capitaine général de l’artillerie, il demanda au conseil d’État que fussent envoyés à Jorge Manrique des ordres très clairs et précis quant au rôle qu’on attendait de lui312. Le résultat immédiat fut l’envoi d’instructions au capitaine général et au majordome de l’artillerie leur octroyant la main haute sur la gestion de l’artillerie, des fortifications, des munitions et du personnel de l’ensemble de l’État de Milan313.
Toutefois, l’élite locale milanaise n’apprécia absolument pas ce tour de force qui revenait à la déposséder de tout contrôle sur l’artillerie. On écrivit une plainte au régent Ponzon du conseil d’Italie, comme cela arrivait chaque fois que l’on souhaitait contourner l’autorité du gouverneur314. Les instructions du capitaine général de l’artillerie, écrivirent les Milanais, excluaient soudainement du contrôle de l’artillerie le magistrato ordinario, institution locale qui avait « toujours » été en charge des canons et munitions315. En exprimant leur mécontentement face à cette mesure de centralisation, l’élite milanaise espérait voir le gouvernement madrilène faire marche arrière. En effet, à la suite de la révolte des Pays-Bas en 1567, le duché de Milan était devenu un territoire stratégique 172de transit des troupes le long du chemin des Espagnols316. Comme l’explique Stefano D’Amico, cette situation avait favorisé l’autonomie de cet État et le gouvernement madrilène avait souvent renoncé à ses projets de centralisation afin de ménager ses sujets milanais317. C’est sans doute ainsi qu’il faut expliquer l’absence de réponse de Madrid, pendant plusieurs années, face aux demandes du capitaine général de l’artillerie et des gouverneurs. Cependant, les nombreux succès d’Alexandre Farnèse aux Pays-Bas au début des années 1580 durent sans doute redonner confiance à Philippe II et ses ministres quant à la fin imminente de la révolte318. Au milieu de l’année 1585, cinq jours exactement après la capitulation d’Anvers, le roi envoya au gouverneur Terranova l’ordre de mettre fin à tous les abus introduits dans la gestion de l’artillerie afin que « cette chose si importante soit mise en perfection319 ».
Cette relative timidité de Madrid à prendre le contrôle des affaires stratégiques de l’État milanais est également perceptible à travers la question de la production d’armement et de munitions. Milan avait beau être l’un des principaux centres de production d’armes et d’armures en Europe320, on n’y trouvait aucun équivalent des manufactures royales d’Eugui ou de Placencia. Pourtant, la Monarchie y faisait régulièrement l’acquisition d’importantes quantité de piques, arquebuses et autres corselets, mais ces objets étaient achetés directement auprès des nombreux fabricants de la ville321. La production de salpêtre était également tenue par des acteurs économiques privés, ce qui empêchait le gouverneur de développer une production de poudre noire322. En revanche, le château de Milan possédait une fonderie de canons pour laquelle le gouvernement 173madrilène affichait de grandes ambitions : en 1575, on fit acheter, avec de l’argent castillan, assez de métal pour fabriquer un demi-millier de pièces d’artillerie323. Or, treize ans plus tard, les trois quarts de ce métal demeuraient encore inutilisés au château Sforza324. La raison de cette faible production était bien simple : les spécialistes et les gouverneurs successifs s’accordaient tous à dire que la fonderie du château de Milan était trop petite et malcommode325. Depuis les années 1570, ils n’avaient eu de cesse de répéter au roi qu’il convenait de déménager cette fonderie dans le parc du château de Pavie, bien plus spacieux, possédant déjà de nombreux bâtiments dont un entrepôt de munitions, et situé à proximité du Tessin ce qui facilitait le transport des pièces326. Néanmoins, ce projet de déménagement déplaisait fortement au magistrato ordinario car ses officiers, habitants à Milan, souhaitaient conserver un accès aisé à la fonderie afin de pouvoir en superviser l’activité327. Or, ces considérations d’ordre politique prévalurent longtemps sur les arguments techniques. Ce ne fut que lorsqu’il reçut carte blanche de la part du roi en 1585 que le duc de Terranova mit finalement en place cette fonderie de Pavie328, sans toutefois parvenir à pérenniser son activité puisque, vingt ans plus tard, on évoquait encore le projet de la rouvrir329.
Au sein de cet État où les agents de la Monarchie rencontrèrent des difficultés à s’emparer du contrôle de l’artillerie, le capitaine général de l’artillerie assumait un rôle semblable à son homologue napolitain. Sa fonction revêtait une dimension politique puisqu’il était membre du conseil secret, principal organe de gouvernement en charge de conseiller le gouverneur330. Comme à Naples et à Palerme, le capitaine 174général de l’artillerie agissait comme un exécutant du commandant militaire suprême. En dépit de sa stabilité, cet office ne s’était jamais construit dans un rapport de force vis-à-vis du gouverneur de l’État. Jorge Manrique de Lara, détenteur de la charge pendant trois décennies, de 1574 au début du xviie siècle331, avait plutôt appris à coopérer avec les gouverneurs afin de mieux contrer les prétentions des institutions milanaises. Son successeur, le capitaine Cristóbal Lechuga332, célèbre auteur de traités militaires333, était reconnu comme le favori et protégé du comte de Fuentes, alors gouverneur de Milan334. En revanche, lorsque l’office échut à Francisco de Padilla en 1610, ce dernier dénonça les limites de son pouvoir, se plaignant de ce qu’il avait besoin de l’accord du gouverneur pour tout type de dépenses335. Il affirmait également que les principaux commandants – le gouverneur et les capitaines des grandes garnisons – le privaient de son pouvoir de nomination des gens d’artillerie et l’empêchaient de leur donner des ordres336. En d’autres termes, le capitaine général de l’artillerie à Milan voyait son autonomie et son autorité beaucoup plus limitées que son homologue ibérique.
Coordination et transversalités
entre péninsules italienne et ibérique
Un schéma général de gestion de l’artillerie au sein des trois États italiens de la Monarchie hispanique se dessine. Dans chacun d’eux, l’administration de l’artillerie s’était structurée autour d’un couple de serviteurs monarchiques, le vice-roi et le capitaine général de l’artillerie. Or, au sein de ce duo régnait systématiquement un profond déséquilibre des rapports de force en faveur du premier. Cette situation contrastait 175avec celle de la péninsule ibérique où le capitaine général de l’artillerie, membre de la cour et du gouvernement central, disposa d’assez de pouvoir pour construire l’autonomie de son administration vis-à-vis des vice-rois et autres capitaines généraux. La position de force des vice-rois en Italie provenait en partie du système de gouvernement central et des jeux de factions qui s’y déroulèrent. La montée en puissance des juntas (réunions gouvernementales restreintes) en marge des conseils conjuguée à l’aristocratisation générale du gouvernement renforcèrent le pouvoir et l’autonomie des alter ego du roi en Italie337. Contrairement à ce qui se passa au sein de la péninsule ibérique, le personnel de l’artillerie ne joua pas, en Italie, le rôle de contrôle des abus des pouvoirs militaires locaux. D’ailleurs, la Monarchie disposait pour ses possessions italiennes d’un instrument de contrôle spécifique : les visitas, sorte d’enquêtes menées sur le terrain, parfois pendant plusieurs années, par des envoyés spéciaux du monarque afin de vérifier la bonne administration de l’État338. Or, le personnel de l’artillerie fut même parfois la cible de ces contrôles. À Milan, des charges furent ainsi retenues contre le lieutenant d’artillerie Antonio del Campo en 1588339, tandis que le capitaine général de l’artillerie Lechuga fut accusé de détournement de fonds lors de la construction du fort de Fuentes au début du xviie siècle340.
L’absence d’une structure de gouvernement de l’artillerie transversale aux vice-royautés ne signifia pas pour autant que chacun de ces centres d’artillerie fonctionnait de manière cloisonnée. Il existait une sorte de coopération entre les différentes vice-royautés italiennes permettant de transférer du matériel de guerre là où la nécessité le requérait. En 1572, le gouverneur de Milan fit ainsi envoyer de la poudre et des armes en Sicile afin de ravitailler la flotte de galères de don Juan d’Autriche avant sa campagne en Méditerranée orientale341. L’année suivante, la Sicile et Naples envoyèrent des pièces d’artillerie pour renforcer la défense de la forteresse de La Goulette, en Afrique du nord342. Après la prise de cette place forte par les Turcs en aout 1574, la Sicile, menacée d’un 176débarquement ottoman, reçut d’urgence de grandes quantités d’armes, de poudre et d’affûts en provenance de Naples et Milan343. À la même période, le vice-roi de Naples fit envoyer de la poudre et du salpêtre en Sardaigne au cas où l’attaque serait portée sur cette île344. Témoignage des fréquents échanges d’armement à travers la Méditerranée occidentale, on trouvait à Cagliari aussi bien des pièces de Malaga que de Milan345. En outre, ces échanges perdurèrent au-delà de la période de forte menace ottomane puisqu’en 1596, par exemple, le vice-roi de Sicile faisait encore l’acquisition d’affûts d’artillerie et de poudre provenant du royaume de Naples346.
Par ailleurs, à mesure que la pression ottomane diminua, ces centres d’artillerie italiens se trouvèrent de plus en plus connectés à la péninsule ibérique. Dès avant les années 1580, le royaume de Naples fournissait régulièrement de l’artillerie à l’Andalousie347. Plus tard, les territoires italiens participèrent au gigantesque effort que requit la Grande Armada de 1588. Ainsi le vice-roi de Sicile offrit des pièces, des hommes, de la poudre et des munitions348 tandis que Naples envoya quatre galéasses armées d’un total de deux cents pièces349. Dans la crise qui suivit le retour catastrophique de cette flotte, tous les États italiens furent mis à contribution. Le vice-roi de Naples fit rapidement armer deux nouvelles galéasses et leur fit transporter d’énormes quantités de poudre350. Accompagnées de navires de transport, ces galéasses firent escale à Savone en Ligurie afin d’embarquer une centaine de pièces lourdes fabriquées à Milan et transportées à grands frais sous la supervision du gouverneur351. De son côté, le vice-roi de Sicile offrit de l’artillerie, des armes et des armures à l’Espagne352. Ces circonstances 177particulières stimulèrent la coopération entre les différents territoires de la Monarchie. L’entreprise de 1588 avait engendré des pertes colossales sans diminuer la puissance des Anglais sur mer. Les ressources envoyées par les gouverneurs des États italiens aidèrent donc à reconstruire rapidement une flotte de guerre. Or, comme le chapitre précédent l’a montré, la mise en place d’une armada permanente del mar Océano couplée à la croissance du trafic de la carrera de Indias générèrent par la suite d’énormes besoins en artillerie. Les structures d’administration de l’artillerie fermement établies à Palerme, Naples et Milan en collaboration avec les vice-rois et le gouvernement madrilène permirent de ravitailler régulièrement les flottes atlantiques. Encore en 1600, le vice-roi de Naples envoyait 62 pièces, 600 q. de poudre (plus de 27 tonnes) ainsi que 26 400 boulets à Carthagène où ce matériel fut réceptionné par un agent du capitaine général de l’artillerie Acuña Vela353.
Dans les dernières décennies du xvie siècle, malgré les fragmentations politiques, juridictionnelles et administratives, la Monarchie hispanique était donc capable de mobiliser et transférer de l’Italie vers l’Espagne les ressources nécessaires à son tournant géopolitique vers l’Atlantique. Du point de vue de l’artillerie, il y avait bien, malgré quelques frottements et coincements, une machine impériale en fonctionnement. Il s’agissait, en quelque sorte, d’une version informelle et non-systématique du futur projet d’Union des Armes d’Olivares : une coopération militaire et fiscale à l’échelle de la monarchie composite354. Au sein de l’espace ibérique, cette coopération fut notamment permise par la mise en place d’une administration transversale. Entre l’Italie et Madrid par contre, la relation était non pas bureaucratique mais personnelle et élitiste. Il s’agissait d’un lien de confiance entre, d’une part, le roi et ses plus proches ministres et, d’autre part, cette haute aristocratie qui leur était très proche socialement – et bien souvent personnellement – et qui fut envoyée gouverner l’Italie355. Les administrations de l’artillerie de chacun des territoires italiens se constituèrent donc avant tout comme des instruments renforçant le pouvoir exécutif des représentants du roi, 178parfois contre la volonté des élites locales. Il en résulta une structure qui, bien que de nature polycentrique, pouvait coordonner ses efforts en recourant à des échanges de lettres entre un nombre très limité d’acteurs. Il faut ajouter que la coopération exécutive des vice-rois s’accompagnait également, dans une certaine mesure, d’une coopération fiscale implicite des territoires qu’ils gouvernaient : ainsi, le matériel de guerre fourni par l’Italie à la péninsule ibérique fut régulièrement financé par les chambres des comptes locales des villes ou des royaumes les produisant356. L’ampleur de cette coopération fiscale est toutefois difficile à cerner sans une étude détaillée des comptes qui dépasse le cadre de cet ouvrage.
Limites au gouvernement
de l’artillerie à l’échelle de l’empire
Ce chapitre s’est jusqu’ici efforcé de montrer les processus de centralisation à l’œuvre au sein des territoires de la Monarchie hispanique. Dans la seconde moitié du xvie siècle, l’État des Habsbourg s’était doté de structures bureaucratiques étroitement liées au gouvernement central de Madrid. De la sorte, avant la fin du xvie siècle, il devint possible à la Monarchie de s’assurer d’un contrôle direct sur l’artillerie, les fortifications et le matériel de guerre en dépit des multiples fragmentations inhérentes à sa condition d’État composite. Malgré certaines résistances, ce processus de construction d’un système transversal de gestion de l’artillerie connut un succès relatif au sein de la péninsule ibérique et, associé à l’institution vice-royale en Italie, il permit une relative intégration des territoires méditerranéens du roi catholique. Néanmoins, d’autres territoires échappèrent en partie à cette centralisation de l’artillerie. Avant de clore cette analyse des structures de contrôle de l’artillerie, il convient par conséquent de comprendre dans quelle mesure et pour quelles raisons des territoires tels que les Pays-Bas ou les Indes échappèrent en partie au phénomène de centralisation de l’artillerie qui toucha les péninsules italienne et ibérique.
179Fragmentation administrative
de l’artillerie aux Pays-Bas
Les processus de construction d’une administration de l’artillerie au sein des territoires présentés jusqu’ici suivirent tous un schéma relativement semblable. D’abord, ces administrations s’établirent souvent sur des structures préexistantes de taille relativement réduite. Ensuite, elles se constituèrent autour d’un capitaine général de l’artillerie qui, commandant d’abord des batteries d’artillerie sur le champ de bataille, devint progressivement une figure politique et administrative ayant vocation à réunir sous son autorité tout le matériel de guerre et le personnel lié à son usage ou à sa production. Aux Pays-Bas cependant, des conditions tout à fait différentes menèrent à une fragmentation relative du contrôle de l’artillerie. D’abord, les structures de gestion de l’artillerie préexistantes avaient déjà connu un important développement depuis le milieu du xve siècle, ce qui les rendait plus difficiles à intégrer à l’appareil gouvernemental madrilène. Mais surtout, la révolte des Pays-Bas initiée en 1567 plongea cette région dans un état de guerre continuel pendant plusieurs décennies, ce qui nuisit à toute transition du capitaine général de l’artillerie de son rôle opérationnel vers son rôle centralisateur.
Au xve siècle, les ducs de Bourgogne avaient fait des Pays-Bas l’un des principaux lieux de développement de l’artillerie à poudre moderne en Europe357. Sous Philippe le Bon (1419-1467) et Charles le Téméraire (1467-1477), toute une administration de l’artillerie constituée d’un maître, de contrôleurs, de receveurs, de gardes et de lieutenants vit le jour en Bourgogne et en Flandre358. Au sein de cette organisation dont le fonctionnement reste flou faute d’études, la ville de Malines acquit une certaine prépondérance non seulement en tant que lieu important de production de poudre et de canons359 mais aussi en tant que centre de rassemblement des gens d’artillerie360. Or, en acquérant les Pays-Bas bourguignons, les Habsbourg héritèrent de cette administration déjà bien 180structurée. Lorsqu’en 1542, Charles Quint proclama une « instruction et ordonnance advisée faicte et conclute par l’Empereur sur la conduite des maîtres et officiers de son artillerie en les pays d’Embas », se référant aux maître d’artillerie, contrôleur, lieutenant, receveur, commis, gentilshommes d’artillerie et canonniers, il ne fit que préciser le fonctionnement d’un système administratif déjà en place et organisé autour de Malines comme principal centre productif et dépôt d’artillerie des Pays-Bas361. Cette ordonnance confirmait l’autonomie de l’artillerie flamande au sein de cette superstructure politique en construction qu’était la monarchie composite des Habsbourg.
Or ce système flamant-bourguignon de gestion de l’artillerie survécut à la crise de la révolte des Pays-Bas. Ainsi, les comptes de George Van den Driessche, commis à la recette de l’artillerie entre 1567 et 1574362, témoignent d’une intense activité de contrôle de l’armement et du personnel rattachés au conseil des finances des Pays-Bas. Ils portent néanmoins sur l’extraordinaire, c’est-à-dire sur les dépenses irrégulières et, si les gages des canonniers de Malines et Mons apparaissent en 1572, c’est parce qu’ils furent engagés à titre exceptionnel dans le siège de Mons363. Dans ces listes, on voit apparaître de nombreux « commis à la garde de l’artillerie et munitions » – sans doute équivalents des majordomes d’artillerie en Espagne – de diverses places fortes (Anvers, Maastricht, Charlemont, Arras, Gravelines), des maîtres canonniers à Saint-Quentin, Hesdin et Philippeville, des fondeurs à Malines, Utrecht et Namur, tout un monde d’artisans et de fabricants d’armes et d’affûts à Malines, des conducteurs de chevaux pour transporter l’artillerie d’une ville à l’autre, des gentilshommes de l’artillerie (ordinaires et extraordinaires) ainsi qu’un « receveur général des salpêtres et poudres de sa majesté » répondant au nom d’Antoine Van den Veughe364. Cette structure administrative locale de gestion de l’artillerie était responsable de ce que les sources appellent « l’arsenal de Malines » ainsi que d’un certain nombre de 181garnisons que les contrôleurs de l’artillerie avaient pour mission de visiter régulièrement365.
La crise de la révolte des Pays-Bas généra cependant une administration de l’artillerie concurrente. Ainsi, au sein de l’armée du duc d’Albe envoyée en 1567 se trouvaient un contador et un pagador de l’artillerie chargés de la gestion comptable des nombreux artilleurs, gentilshommes d’artillerie et autres sapeurs accompagnant cette armée de répression de la révolte366. Or, loin de s’éteindre rapidement, la révolte d’une partie des provinces des Pays-Bas engendra un conflit de plusieurs décennies avec la Monarchie hispanique qui fut amenée à maintenir sur place la plus grande armée de l’époque, l’armée de Flandre367. Par conséquent, ce noyau administratif temporaire de l’artillerie de 1567 devint partie intégrante de l’armée : en 1574, les mêmes contador et pagador de l’artillerie officiaient encore368 et en 1598, l’armée de Flandre comptait deux de chacun de ces officiers, signe du développement de sa structure369. Cette branche spécifique de l’armée de Flandre gérait les trains d’artillerie essentiels dans cette guerre caractérisée par un grand nombre de sièges370. En outre, elle était impliquée dans la gestion des garnisons « espagnoles » où résidaient certains contingents de l’armée371. Il s’agissait d’une administration constituée de Castillans, écrivant en castillan et dont les offices reprenaient la terminologie en vigueur en Espagne tandis que l’administration dépendante du conseil des finances des Pays-Bas fonctionnait avec des Flamands et Wallons écrivant en français et sa terminologie la rattachait à celle en vigueur du temps des ducs de Bourgogne. Autrement dit, deux univers administratifs et culturels 182différents se partageaient la gestion de l’artillerie du roi catholique aux Pays-Bas. Cette séparation apparaît de manière univoque dans le rapport fait au conseil des finances par l’officier Van Zinnicq, au début du xviie siècle, inventoriant toutes les pièces d’artillerie et munitions des places fortes de la région372. Certains lieux, tels que Gand, Damme, Nieuport, Dunkerque, Cambrai et Anvers furent exclus de ses visites car, écrivit-il, ils étaient « à la charge de ceulx de l’exercito373 » Ce dernier terme, du castillan ejército, renvoyait bien entendu à l’armée de Flandre et à sa branche particulière de gestion de l’artillerie.
Néanmoins, ces deux structures étaient théoriquement réunies sous un seul et même chef. Ainsi, fidèle à la terminologie bourguignonne, le commis à la recette de l’artillerie Van den Driessche intitulait le comte de Meghem « maître de l’artillerie374 », tandis que les instructions du contador Mendivil et du pagador Navarrete leur donnaient pour commandant ce même personnage avec le titre de « capitán general del artillería del ejército375 ». Cette situation aurait pu favoriser la fusion des deux structures, mais, en raison de l’état de guerre quasi-permanent, le capitaine général de l’artillerie demeura, aux Pays-Bas, un commandant de terrain plus qu’un chef administratif et politique. Du fait, entre autre, de la dangerosité à commander les batteries de canons en plein combat, cet office fut sujet à une grande instabilité en comparaison de ses équivalents en Espagne et en Italie376. Jacques de la Cressonière trouva ainsi la mort au siège de Harlem en 1573377, le comte de Varax fut tué d’un coup de mousquet à la bataille de Turnhout en 1597378, tandis que Valentin de Pardieu perdit un bras au siège de l’Écluse en 1587 et fut tué devant Doullens en 1595379. D’autres, tels le seigneur 183de Treslon, perdirent cette charge suite à leur inaptitude à commander sur le champ de bataille380.
Au caractère instable et opérationnel de la charge de capitaine général de l’artillerie s’ajoutait le chaos politique général dû aux dynamiques de la révolte. En 1572, la ville de Malines, arsenal et centre administratif de l’artillerie des Pays-Bas, accueillit les troupes rebelles du prince d’Orange avant d’être mise à sac par l’armée de Flandre quelques mois plus tard381. Au plus fort des troubles, lorsqu’en automne 1576, à la suite de la mort du gouverneur Luis de Requesens, les États Généraux et les États rebelles s’entendirent à Gand pour mettre un terme à l’occupation des troupes étrangères382, cette même ville de Malines bascula du côté de la révolte. Dès lors et jusqu’en 1585, ce centre d’artillerie œuvra au service du prince d’Orange et des provinces rebelles contre l’armée de don Juan d’Autriche et d’Alexandre Farnèse383. Cet exemple montre clairement les immenses difficultés que pouvait rencontrer la Monarchie dans le contrôle de son artillerie. Un changement d’allégeance engendrait parfois bien plus de pertes d’artillerie qu’une défaite sur le champ de bataille. D’ailleurs, Valentin de Pardieu, seigneur de La Motte, lieutenant du capitaine général de l’artillerie et, dans les faits, principal commandant de l’artillerie384, suivit lui aussi la cause des États Généraux en 1576 et ne retourna au camp royaliste qu’en avril 1578385. Seule la structure espagnole d’administration de l’artillerie au sein de l’armée de Flandre dut rester, dans cette crise, fidèle au service de la Monarchie hispanique.
Assez paradoxalement, aux Pays-Bas, malgré la présence abondante de troupes armées, le gouvernement madrilène se trouvait dans une position affaiblie pour s’emparer des moyens de contrôle de l’artillerie. La crise de la pacification de Gand (1576) qui conduisit à l’alliance entre 184provinces fidèles et provinces rebelles contre l’occupation espagnole fut incontestablement le résultat de la politique de renforcement de l’autorité royale par la violence qu’avait menée le duc d’Albe entre 1567 et 1572386. Imposer un contrôle castillan de l’artillerie par la force, c’eût été suivre cette direction qui avait manifestement conduit la Monarchie hispanique droit à la catastrophe. Luis de Requesens, successeur du duc d’Albe, en était conscient, comme en témoigne sa gestion de la dispute qui éclata, en 1574, entre l’administration de l’artillerie espagnole et sa rivale flamande387. Le contrôleur Bernard Veussels et le contador Miguel de Mendivil se plaignaient ainsi tous deux des interférences qui existaient entre leurs charges. Loin de chercher à favoriser l’administration castillane, le gouverneur Requesens invita les deux partis à l’entente et à la coopération, départageant leur champ d’action selon la source de l’argent dépensé : Mendivil devait s’occuper de ce qui était payé par l’argent en provenance de Castille et Veussels tenir les comptes de ce qui était payé par l’argent des Pays-Bas. Cette décision avait du sens sur le plan politique mais assez peu sur le plan de l’efficacité administrative car, comme le fit remarquer le lieutenant d’artillerie Monsieur de Gomiecourt en 1578 :
Toute cette machine de l’artillerie est très confuse tant à cause de la multitudes d’ordres particuliers qui ont été donnés à différentes époques que du fait des diverses personnes en charge qui sont très opposées les unes aux autres388.
La coexistence de deux administrations de l’artillerie distinctes constitua donc une sorte de compromis politique pour la Monarchie hispanique. Le maintien de l’ancienne structure bourguigno-flamande ménageait, dans certaines limites, la sensibilité des sujets des Pays-Bas, tandis que la présence d’une structure espagnole garantissait un minimum de service en cas de défection de la première. Ce compromis politique transparaît également dans le choix des capitaines généraux de l’artillerie. Alors que dans les péninsules italienne et ibérique, cette charge retomba systématiquement entre les mains de Castillans, aux Pays-Bas, entre 1567 et 1618, on compta 185seulement un capitaine général castillan (Luis de Velasco, entre 1598 et 1602) et un allemand (Charles de Mansfeld entre 1585 et 1590), le reste étant composé d’aristocrates locaux389. Cette charge était par conséquent utilisée par la Monarchie comme une forme de patronage et d’attachement de clients localement très puissants. C’est ainsi qu’il faut comprendre le projet de Requesens de nommer capitaine général de l’artillerie le jeune comte d’Arenberg, qui n’était pourtant pas en âge de commander390. Avoir un capitaine général de l’artillerie choisi parmi la noblesse du pays facilitait aussi sans doute la relation de l’armée de Flandre avec l’ancienne administration de l’artillerie bourguigno-flamande où tout se passait en langue française et avec des individus locaux.
Dans les faits, la coopération entre « exercito » et administration malinoise fonctionna à de multiples reprises. Au début des troubles, en 1568, le lieutenant d’artillerie Jacques de la Cressonière rejoignit l’armée du duc d’Albe avec l’artillerie de Malines391. Après la défection malinoise des années 1576-1585, Alexandre Farnèse continua malgré tout de recourir à cette ville comme dépôt d’artillerie et centre de production de poudre392. D’ailleurs, certains ouvriers de l’artillerie du roi y obtinrent des privilèges judiciaires qui n’étaient pas sans rappeler les fueros des artilleurs en Espagne393. Dans les années 1590, les comptes du commis de l’artillerie et munitions de Malines révèlent de multiples livraisons à l’armée de Flandre394. Il remit notamment de nombreuses pièces d’artillerie à Pedro Sommariva, « majordome de l’artillerie du roi au champ », individu appartenant sans doute à la même famille que Bartolomé Sommariva, fondeur de pièces à Malaga, Lisbonne et La Corogne395. Parmi les personnes recevant l’artillerie de Malines, on trouve également un contador de l’artillerie de l’armée de Flandre, ainsi 186que deux capitaines d’artillerie espagnols, Lechuga et Ufano, plus tard célèbres auteurs de traités396. Il faut par ailleurs reconnaître que les plaintes quant au grand désordre de l’artillerie des Pays-Bas cessèrent à la fin du xvie siècle. Lorsqu’en 1593, de grands projets de réforme furent entamés au sein de l’armée de Flandre, l’artillerie fut la seule branche épargnée de toute critique car son général, Valentin de Pardieu seigneur de la Motte, la gérait « avec beaucoup de soin et d’attention397 ». Sous le gouvernement des archiducs Albert et Isabelle-Claire-Eugénie, l’administration de l’artillerie connut une longue période de stabilité entre 1602 et 1618, sous la direction du comte de Bucquoy398. Indice d’une tendance à la centralisation, ce dernier conduisit, en 1609, un projet de standardisation des calibres de pièces fabriquées aux Pays-Bas espagnols399.
Cependant, même s’il y eut incontestablement une remise en ordre de l’artillerie entre 1590 et 1610, l’administration continua d’y être morcelée. Pour rappel, lorsque l’officier Van Zinnicq fut envoyé visiter les places fortes du pays au début du xviie siècle, il ne put inventorier les pièces des garnisons espagnoles400. En 1615, le lieutenant d’artillerie Tomas Vingarde dressa une liste de toute l’artillerie des provinces de Flandre, d’Artois et de Hainaut, mais les gouverneurs de Mariembourg, Charlemont et Philippeville refusèrent de lui ouvrir leurs portes faute de lettres patentes qui leur fussent spécifiquement adressées401. Par ailleurs, le développement de flottes de guerre à Anvers et Dunkerque engendra d’importants besoins en artillerie et en artilleurs402 mais leur gestion incomba au conseil de l’amirauté, ce qui les plaçait en dehors des compétences du capitaine général de l’artillerie. Les artilleurs à bord de ces navires étaient ainsi inscrits au sein des compagnies des différents 187capitaines au service de l’amirauté, comme le reste des équipages403. En d’autres termes, en comparaison de la péninsule ibérique où les mouvements des hommes et du matériel, orchestrés par le capitaine général de l’artillerie et ses lieutenants, peuvent être précisément suivis à partir de la correspondance du conseil de guerre, la gestion de l’artillerie des Pays-Bas, encore dans les premières années du xviie siècle, apparaît à l’historien bien moins ordonnée et centralisée.
Absence de structures d’administration
de l’artillerie aux Indes
La situation de l’artillerie dans les territoires américains de la Monarchie hispanique contrastait avec celle de toutes ses possessions européennes. Dans ce nouveau monde, en effet, il n’existait pas de structures d’administration de l’artillerie préexistantes à la conquête espagnole404. En outre, ces territoires se caractérisaient par une certaine faiblesse des ressources militaires, tant humaines que matérielles, au regard de leur vaste étendue : comme l’a montré le chapitre précédent, le parc d’artillerie de l’ensemble des Indes occidentales équivalait environ à celui de la Sicile ou du Portugal. Par conséquent, au xvie siècle, aucune structure différenciée d’administration de l’artillerie ni aucun capitaine général de l’artillerie ne virent le jour outre-Atlantique. La gestion de l’artillerie resta essentiellement une préoccupation des commandants militaires locaux de chaque place forte, voire de chaque région. Cependant, ces multiples autorités partageaient toutes un point commun : leur dépendance extrême envers l’Espagne en matière de ravitaillement d’artillerie, d’armes et de personnel technique. Toutefois, face aux attaques répétées des corsaires anglais ainsi qu’à l’incapacité chronique de Madrid à répondre à leurs besoins, certains de ces commandants parvinrent à réduire progressivement leur dépendance vis-à-vis de la métropole.
L’artillerie fut un souci récurrent des commandants militaires des Indes occidentales. De tous les territoires ultramarins parvenaient continuellement au roi des plaintes quant au manque de pièces, de munitions et d’artilleurs. Ainsi, en 1565, le gouverneur de Cuba García Osorio demanda au monarque l’envoi de quatre pièces de bronze, 36 arquebuses 188et deux artilleurs405. Une vingtaine d’années plus tard, le commandant de la forteresse de La Havane sollicitait 80 pièces d’artillerie et une trentaine d’artilleurs pour renforcer la défense du lieu et armer les six frégates qui venaient d’y être construites406. À peine arrivé à son poste de capitaine de Porto Rico en 1582, Diego Menéndez de Valdés écrivit à Madrid qu’il lui fallait d’urgence six pièces lourdes pour défendre le port ainsi que cinq artilleurs car il n’y en avait plus aucun de vivant sur place407. À Carthagène des Indes, le gouverneur Zuazo demandait quant à lui au roi quatre couleuvrines et douze canons de gros calibres pour la forteresse408. À Portobelo en 1597, le gouverneur Alonso de Sotomayor réclama 38 pièces d’artillerie et 12 artilleurs pour garnir ses trois fortins409. Au Mexique, ce furent les vice-rois successifs qui enjoignirent à Madrid de les pourvoir en artillerie. Ainsi le comte de la Corogne puis le marquis de Villamanrique requirent plusieurs fois l’envoi de pièces pour garnir la forteresse de San Juan de Ulúa410. Par conséquent, il est possible d’affirmer que, jusqu’aux dernières années du xvie siècle, les Indes dépendaient complètement de l’Espagne pour ce qui relevait de l’artillerie.
Or ce système de gestion construit sur un modèle centre-périphérie très polarisé et très étendu présentait un certain nombre de problèmes. D’abord, le gouvernement de la Monarchie se montra continuellement incapable d’assumer le rôle de centre pourvoyeur d’armement que lui demandaient de jouer les commandants militaires des Indes. À Madrid, les requêtes de ces commandants relevaient du ressort du conseil des Indes et la mise à exécution des ordres royaux qui en résultaient incombait aux officiers de la casa de la contratación, à Séville411. Or, la priorité de ces officiers était la préparation des convois de la carrera de Indias qui, comme l’a mis en évidence le chapitre précédent, consommaient des ressources colossales en matière d’artillerie et de munitions. En Andalousie, il devenait parfois difficile aux agents du roi de se procurer ne serait-ce 189que de faibles quantités d’armes. Ainsi, Antonio de Guevara, agent du conseil des finances détaché à Séville, fut chargé en 1582 de trouver deux demies-couleuvrines à envoyer à La Havane412. Apparemment, les officiers de la casa de la contratación n’en avaient aucune de disponible et, en désespoir de cause, Guevara dut demander aux ducs d’Arcos et de Medina Sidonia de les fournir à partir de leur collection privée413. Six ans plus tard, la demi-couleuvrine fournie par Medina Sidonia constituait encore la plus grosse pièce de La Havane, ce qui démontre bien que la casa de la contratación était alors incapable de faire face à la fois à la demande d’armement lourd des forteresses américaines et à celle des galions et navires marchands de la carrera de Indias414.
Afin de résoudre ce problème récurrent du manque d’artillerie des territoires américains, on recourut à l’organe de gouvernement ayant les ressources les plus adéquates pour y faire face : le conseil de guerre. Bien que le Nouveau Monde demeurât hors du territoire juridico-politique de ce conseil, certaines demandes en artillerie des officiers de la casa de la contratación y furent régulièrement l’objet de consultations415. D’ailleurs, dans le dernier quart du xvie siècle, des réunions spéciales (juntas) réunissant des membres du conseil de guerre et du conseil des Indes eurent régulièrement lieu416. Le capitaine général de l’artillerie Francés de Álava tenta alors d’étendre son influence aux places fortes des Indes. En 1578, il fit ainsi remarquer au roi que le conseil des Indes ne prenait aucune mesure pour remettre de l’ordre dans l’artillerie des garnisons des Caraïbes417. Plus tard, il voulut envoyer un de ses hommes, Juan Venegas Quijada418, pour inspecter les places fortes des Indes et prendre le commandement de Saint-Domingue419. Toutefois, les Indes restèrent en dehors du contrôle du capitaine général de l’artillerie et 190aucune lieutenance d’artillerie dépendante du conseil de guerre n’y fut créée. Le nœud du problème demeura donc que l’on demandait au capitaine général de l’artillerie de simplement livrer les ressources sous son contrôle à des officiers sous l’autorité du conseil des Indes. En d’autres termes, la participation active à ce système lui revenait peu intéressante car il ne pouvait pas nourrir l’espoir d’étendre son réseau de clientèle, son prestige et son autorité. Il n’y a donc pas à s’étonner que le roi dût envoyer, en 1600, plusieurs rappels à Juan de Acuña Vela pour qu’il daignât faire livrer à Séville des pièces d’artillerie afin d’équiper les forteresses de Portobelo et Carthagène des Indes420.
À cette difficulté chronique de réponse du centre madrilène aux demandes des gouverneurs, se greffait l’immense problème des rythmes de communication entre l’Amérique et Madrid. En cas de menace soudaine, il était impossible aux commandants locaux d’obtenir à temps l’artillerie nécessaire à la défense. D’autant plus que le théâtre des affrontements avec les Anglais s’étendit peu à peu de l’Atlantique au Pacifique. Ainsi, au début de l’année 1587, le marquis de Villamanrique, vice-roi du Mexique, demandait, comme son prédécesseur avant lui, des pièces pour la forteresse de San Juan de Ulúa421. Cependant, ses préoccupations basculèrent soudainement des Caraïbes à la côte ouest lorsqu’il apprit que le corsaire anglais Thomas Cavendish avait passé le détroit de Magellan. À l’automne 1587, il écrivit à Madrid à propos du projet d’avoir une armada de protection sur les côtes du Pérou, expliquant que la principale difficulté n’était pas de construire les navires mais bien de les équiper en artillerie422. Cependant, ce projet ne pouvait rien, dans l’immédiat, contre l’avancée du corsaire anglais le long de la côte occidentale de l’Amérique. Le vice-roi avait eu beau demander à de multiples reprises au conseil de le pourvoir en artillerie, ses requêtes avaient toutes été ignorées et les ports du Pacifique se trouvaient totalement dégarnis de canons423. Il était bien entendu trop tard pour espérer obtenir aucune aide de l’Espagne. Néanmoins, 191souhaitant protéger les galions de Manille à leur retour vers Acapulco, le vice-roi envoya deux navires sous le commandement de Diego García de Palacio, haut officier de justice de Mexico et auteur de traités d’artillerie et de navigation424. Il émit cependant quelques doutes quant à leur chance de succès :
Le jour suivant, le docteur Palacio est sorti en mer avec ses deux nefs, bien qu’elles ne soient pas aussi bien pourvues qu’il convient en artillerie, en munitions et en personnel, en raison du peu de disponibilité qu’il y a par ici des choses de ce genre, et en particulier d’artillerie425.
Cette tentative désespérée se solda par un échec. Incapable de rattraper Cavendish à cause de vents et de courants contraires, García de Palacio ne put engager le combat426. La fin de l’histoire, le vice-roi la raconta ainsi à Philippe II :
Lorsque la nef Santa Ana de Votre Majesté vint à naviguer près du port de San Lucas, qui se trouve sur les pointes de Californie, les navires corsaires surgirent et s’en emparèrent après avoir combattu un moment. Comme la nave ne possédait ni artillerie ni armes, son équipage dut se rendre et le corsaire captura tout ce qu’elle transportait en demandant ce qui l’intéressait par le registre, et tout ce qu’il ne pouvait pas charger dans ses cales, il le brûla427.
Cavendish, avec à peine une centaine d’hommes et deux navires de petite taille428, était parvenu à s’emparer d’un galion de Manille car tous les 192éléments du système défensif espagnol sur la côte pacifique (navires et ports confondus) étaient dépourvus d’artillerie.
Or, le vice-roi proposait une solution à ce problème : comme le cuivre abondait au Mexique, il suffisait de mettre en place une fonderie de canons429. Seulement la dépendance de l’Amérique envers l’Espagne en matière d’armement avait de multiples facettes. Le successeur du marquis de Villamanrique à la vice-royauté, don Luis de Velasco y Castilla, voulut mener à bien ce projet, mais il se rendit compte qu’il n’avait ni l’étain suffisant pour produire du bronze, ni les hommes compétents pour fabriquer des canons430. Or, comme souvent, la casa de la contratación ne put satisfaire sa demande et le nouveau vice-roi résolut donc de faire avec les ressources disponibles localement. En 1591, il associa deux fondeurs de cloches et un artilleur-armurier répondant au nom de Cristóbal Gudiel, se procura de l’étain au prix fort et parvint, malgré certains échecs, à leur faire fondre quelques pièces431. À travers cet exemple mettant en scène le vice-roi du Mexique en personne traitant de fonderie avec un unique artilleur compétent et deux particuliers, on voit l’extrême rareté des ressources humaines et matérielles de Nouvelle-Espagne ainsi que l’absence totale de structures de gestion de l’artillerie.
Néanmoins, ce premier projet de fabrication d’artillerie marqua le début d’un processus d’autonomisation du Mexique vis-à-vis de l’Espagne. À la toute fin du xvie siècle, le comte de Monterrey, successeur de don Luis de Velasco, développa tout un centre d’armement autour de cette première fonderie située dans le bois Chapultepec près de Mexico432. On y trouvait notamment des entrepôts d’armes et de munitions, ainsi qu’un moulin à poudre. Le vice-roi avait également passé un contrat pour obtenir en abondance du cuivre de la région du Michoacán et faisait fondre non seulement de petites pièces mais aussi de grandes couleuvrines afin de garnir enfin les bastions du port de San Juan de Ulúa433. En 1601, il écrivit au roi qu’une fonderie avait été mise en place à Acapulco afin d’armer les galions de Manille : une dizaine de pièces y avaient déjà été fabriquées434. En 1604, la production d’artillerie 193excédait les besoins locaux et le vice-roi put même vendre des pièces aux navires de la carrera de Indias qui en étaient mal équipés435. Entre temps était apparue une petite structure administrative locale faisant de la Nouvelle-Espagne un centre émergent d’artillerie de la Monarchie hispanique. On y trouvait désormais un capitaine d’artillerie au côté duquel travaillait l’artilleur Gudiel, promu au titre de armero mayor de Su Magestad (armurier principal de Sa Majesté) ainsi que des fondeurs de canons à Acapulco et Chapultepec436.
De tels processus de développement de centres d’artillerie furent sans doute à l’œuvre dans d’autres territoires des Indes occidentales. Ainsi, on tenta d’installer une fonderie de canons à Manille dans la dernière décennie du xvie siècle437. Grâce au prix très actif des métaux provenant de Chine, on espérait y produire de l’artillerie à moindre coût, mais la casa de la contratación ne parvint pas à trouver de fondeurs et les vice-rois du Mexique ne souhaitèrent pas se défaire de leur précieux Cristóbal Gudiel occupé à la fonderie de Chapultepec438. À Cuba, en revanche, l’entreprise tourna au succès. L’île possédait d’importants gisements de cuivre qui commencèrent à être exploités au début des années 1590439. En 1597, le capitaine général don Juan de Acuña Vela parvint à faire envoyer l’un de ses hommes, Francisco Sánchez de Moya, en tant que capitaine d’artillerie de Cuba440. Or, ce capitaine s’en alla à Cuba avec toute une équipe de fondeurs, d’armuriers et de comptables afin d’établir une fabrique de canons à la Havane. En 1599, Cuba et Chapultepec constituaient indubitablement les deux principaux centres de production d’artillerie des Indes puisque Cristóbal Gudiel fut chargé par le vice-roi du Mexique de réaliser une étude comparative des coûts de production de ces deux établissements afin de montrer au roi l’avantage qu’il y avait à fabriquer de grandes quantités d’artillerie au Mexique441. Par conséquent, il est possible d’affirmer qu’à la charnière des xvie et xviie siècles, certains territoires des Indes occidentales se constituèrent 194en tant que centres d’artillerie, ce qui était une première étape vers l’apparition d’une véritable structure d’administration de l’artillerie telle qu’il en existait en Espagne et en Italie.
L’artillerie de l’Estado da India portugais était quant à elle dotée de structures depuis la première moitié du xvie siècle, mais elle conserva une grande autonomie vis-à-vis du gouvernement madrilène après l’annexion du Portugal en 1580. Très tôt au xvie siècle, des pièces, de la poudre et des munitions furent produites dans plusieurs des principales garnisons portugaises en Asie – Goa, Cochim, Diu442. Au sein de la capitale vice-royale, à Goa, un condestavel mor da India et un condestavel mor da Armada se partageaient le commandement de plusieurs dizaines d’artilleurs sur mer et sur terre443. Or, cette structure n’a laissé presqu’aucune trace parmi les documents du gouvernement centrale de la Monarchie hispanique. En d’autres termes, après l’annexion de 1580, les Castillans prirent le contrôle de l’artillerie au Portugal, mais ils laissèrent aux Portugais le soin de gérer l’artillerie de l’Estado da India. Entre le gouvernement madrilène et l’administration des Indes orientales, il y avait parfois un peu de coopération mais il y avait surtout une claire séparation administrative. Ainsi, lorsque le conseil de guerre remit de l’artillerie « pour armer les galions partant aux Indes orientales », ses agents dressèrent une liste précise de la valeur de chaque pièce qui était confiée « à la couronne de Portugal444 ». En outre, peut-être par esprit de revanche contre l’intrusion castillane dans les affaires militaires portugaises, cette administration des Indes orientales refusait d’employer les hommes de l’appareil militaire espagnol. Par exemple, en 1593, lorsque les galions San Pablo et San Simon furent remis à la « couronne de Portugal », cette administration fit renvoyer tous les équipages445.
195Conclusion
Cette étude du gouvernement de l’artillerie aboutit à une vision particulière des dynamiques d’intégration à l’œuvre au sein de la Monarchie hispanique. Loin du morcellement habituellement dépeint par l’historiographie de la monarchie composite, la péninsule ibérique apparaît, à la fin du xvie siècle, sous les traits d’un espace continu au sein duquel le capitaine général de l’artillerie et le conseil de guerre pouvaient, depuis Madrid, orchestrer la gestion du matériel de guerre de Pampelune à Malaga et de Perpignan à Lisbonne. Récente conquête, encore incomplète, cette administration transversale de l’artillerie s’imposa dans une grande partie de la péninsule ibérique et de ses îles grâce à la protection politique et judiciaire du monarque. À ce bloc bureaucratique ibérique relativement cohérent venaient se connecter trois centres administratifs italiens – Palerme, Naples et Milan – qui, bien que fonctionnant chacun séparément, agissaient en coordination avec le gouvernement madrilène à travers le pouvoir des vice-rois et gouverneurs, véritables chefs exécutifs des administrations de l’artillerie de chacun de ces États. Ce complexe politico-administratif centré sur Madrid et s’étendant de Naples à Lisbonne permettait, sans qu’elle fût juridiquement formalisée, une coopération militaire à grande échelle entre différentes unités politiques de la Monarchie hispanique. Néanmoins, cette coordination n’exista pas à l’échelle de l’ensemble de l’empire. Aux Pays-Bas, la guerre rendit difficile l’établissement d’un gouvernement de l’artillerie centralisé dépendant de Madrid comme il y en avait en Italie. Par ailleurs, les territoires américains se caractérisaient au xvie siècle par l’inexistence de structures d’administration de l’artillerie et ce n’est véritablement qu’au début du xviie siècle que certains centres d’artillerie y émergèrent. Enfin, cette peinture structurelle de l’artillerie de la Monarchie hispanique ne saurait être complète sans une analyse socioprofessionnelle des individus qui, parce qu’ils choisirent d’entrer au service de l’artillerie des Habsbourg, contribuèrent au développement et à la vitalité de ces structures administratives. C’est précisément cette lacune que le chapitre suivant entend combler.
196Fig. 18 – Organigramme des structures d’administration de l’artillerie de la Monarchie hispanique.
1 Citation reprise à Koenigsberger, Helmut, Monarchies, States Generals and Parliaments, op. cit., p. 298.
2 Ibid. p. 294. Le reste du paragraphe suit le récit qu’en fait Koenigsberger.
3 Demelemestre, Gaëlle, Les deux souverainetés et leur destin. Le tournant Bodin – Althusius, Paris, Les éditions du Cerf, 2011.
4 Koenigsberger, Helmut, Monarchies, States Generals and Parliaments, op. cit. p. 274.
5 Elliott, John H., « A Europe of Composite Monarchies », op. cit.
6 Weber, Max, « Politics as a Vocation », dans The Vocation Lectures, Indianapolis, Cambridge, Hackett Publishing Company, 2004, p. 33.
7 Tilly, Charles, Coercion, Capital and European States, AD 990-1992, op. cit.
8 Downing, Brian M., The Military Revolution and Political Change, op. cit.
9 Ertman, Thomas, Birth of the Leviathan : Building States and Regimes in Medieval and Early Modern Europe, Cambridge ; New York, Cambridge University Press, 1997.
10 Mann, Michael, The Sources of Social Power. Vol. 1, A History of Power from the Beginning to A.D.1760, Cambridge, Cambridge University Press, 1986.
11 Porter, Bruce D., War and the Rise of the State, op. cit.
12 Stasavage, David, States of Credit : Size, Power, and the Development of European Polities, Princeton, N.J., Princeton University Press, 2011.
13 Tilly, Charles, Coercion, Capital and European States, AD 990-1992, op. cit. p. 28.
14 Cornette, Joël, « La révolution militaire et l’État moderne », Revue d’histoire moderne et contemporaine, vol. 41, no 4, 1994, p. 696-709.
15 Gunn, Steven, Grummitt, David, Cools, Hans, « War and the State in Early Modern Europe : Widening the Debate », War in History, vol. 15, no 4, 2008, p. 371-388.
16 Strayer, Joseph R., On the Medieval Origins of the Modern State, Princeton, N.J., Princeton University Press, 1970.
17 Muir, Edward, Civic Ritual in Renaissance Venice, Princeton, N.J., Princeton University Press, 1981.
18 Anderson, Benedict, Imagined Communities. Reflections on the Origins and Spread of Nationalism, Londres, Verso, 1983. Hobsbawm, Eric, Nations and Nationalism since 1780 : Programme, Myth, Reality, Cambridge ; New York, Cambridge University Press, 1991.
19 Gunn, Steven, Grummitt, David, Cools, Hans, « War and the State in Early Modern Europe », op. cit.
20 Parker, Geoffrey, The Military Revolution, op. cit.
21 Roberts, Michael, The Military Revolution, 1560-1660, op. cit.
22 Voir notamment Rogers, Clifford J., The Military Revolution Debate, op. cit. Black, Jeremy, Beyond the Military Revolution : War in the Seventeenth Century World, Palgrave Macmillan, 2011.
23 Hoffman, Philip T., Why did Europe Conquer the World ?, op. cit. Andrade, Tonio, The Gunpowder Age, op. cit. Agoston, Gábor, « Firearms and Military Adaptation : The Ottomans and the European Military Revolution, 1450-1800 », Journal of World History, vol. 25, no 1, 2014, p. 85-124. Andrade, Tonio, Kang, Hyeok Hweon, Cooper, Kirsten, « A Korean Military Revolution ? Parallel Military Innovations in East Asia and Europe », Journal of World History, vol. 25, no 1, 2014, p. 47-80. Eaton, Richard, Wagoner, Philip B., « Warfare on the Deccan Plateau, 1450-1600 : A Military Revolution in Early Modern India ? », Journal of World History, vol. 25, no 1, 2014, p. 5-50.
24 « The methods used to mobilize and maintain the largest army of its day », Parker, Geoffrey, The Army of Flanders and the Spanish Road, 1567-1659 : the Logistics of Spanish Victory and Defeat in the Low Countries’ Wars, Cambridge, Cambridge University Press, 1972, préface p. xv.
25 González de León, Fernando, The Road to Rocroi, op. cit.
26 Glete, Jan, War and the State in Early Modern Europe : Spain, the Dutch Republic, and Sweden as Fiscal-Military States, 1500-1660, Londres ; New York, Routledge, 2002.
27 Quatrefages, René, Los tercios españoles (1567-1577), op. cit.
28 Quatrefages, René, La Revolución Militar Moderna. El Crisol Español, Madrid, Ministerio de Defensa, 1996.
29 Olesa Muñido, Francisco-Felipe, La organización naval de los estados mediterráneos y en especial de España durante los siglos xvi y xvii., Madrid, Editorial Naval, 1968.
30 Williams, Phillip, Empire and Holy War in the Mediterranean, op. cit.
31 Stradling, R.A., The Armada of Flanders, op. cit.
32 Cerezo Martínez, Ricardo, Las armadas de Felipe II, Madrid, Editorial San Martin, 1989. Goodman, David C., Spanish Naval Power, 1589-1665, op. cit. Mira Caballos, Esteban, Las armadas imperiales, op. cit. Mira Caballos, Esteban, La Armada Guardacostas de Andalucía y la defensa de la Carrera de Indias, 1521-1550, Séville, Muñoz Moya Editor, 1998. Phillips, Carla R., Six Galleons for the King of Spain, op. cit.
33 Martínez Ruiz, Enrique, Los soldados del Rey. Los ejércitos de la Monarquía Hispánica (1480-1700), Madrid, Actas, 2008.
34 García Hernán, Enrique, Maffi, Davide (éd.), Guerra y sociedad en la monarquía hispánica : política, estrategia y cultura en la Europa Moderna, 1500-1700, Madrid, Laberinto : CSIC Fundación MAPFRE, 2006. García Hernán, Enrique, Maffi, Davide (éd.), Estudios sobre Guerra y Sociedad en la Monarquía Hispánica. Guerra marítima, estrategia, organización y cultura militar (1500-1700), Valence, Albatros, 2017.
35 Vigón, Jorge, Historia de la Artillería Española, op. cit.
36 Cobos Guerra, Fernando, La artíllería de los Reyes Católicos, op. cit. Ladero Galan, Aurora, « Artilleros y artillería de los Reyes Católicos (1495-1510) », op. cit.
37 Thompson, I. A. A, War and Government in Habsburg Spain, 1560-1620, op. cit.
38 Esteban Estríngana, Alicia, Guerra y finanzas en los Paises Bajos Católicos. De Farnesio a Spinola (1592-1630), Madrid, Ediciones del Laberinto, 2002.
39 Torres Sánchez, Rafael, Military Entrepreneurs and the Spanish Contractor State, op. cit.
40 Parrott, David, Richelieu’s Army : War, Government and Society in France, Cambridge, Cambridge University Press, 2001.
41 Elliott, John H., « A Europe of Composite Monarchies », op. cit.
42 L’expression a été utilisée pour la première fois en 1975 par Koenigsberger, Helmut, « Dominium Regale or Dominium Politicum et Regale », op. cit. C’est cependant John Elliott qui est à l’origine du succès historiographique de ce concept, John H. Elliott, « A Europe of Composite Monarchies », op. cit.
43 Elliott, John H., « A Europe of Composite Monarchies », op. cit. p. 53.
44 Galasso, Giuseppe, « Italia nel sistema imperiale spagnolo », dans Centros de Poder Italianos en la Monarquía Hispánica, Martínez Millán, José, Rivero Rodríguez, Manuel (éd.), Madrid, Ediciones Polifemo, 2010, p. 15-28. Benigno, Francesco, « I parlamenti nei regni italiani soggetti alla monarchia spagnola : Nuove prospettive di ricerca », dans ibid. p. 57-76. D’Amico, Stefano, Spanish Milan, op. cit., p. 123-134. Galasso, Giuseppe, Alla periferia dell’Impero : il Regno di Napoli nel periodo spagnolo (secoli xvi-xvii), Turin, Einaudi, 1994. Le pouvoir du parlement sicilien avait déjà été mis en avant il y a longtemps par Koenigsberger, Helmut, The Government of Sicily under Philip II of Spain : a study in the Practice of Empire, Londres ; New York, Staples Press, 1951.
45 Elliott, John H., The Revolt of the Catalans, op. cit. Koenigsberger, Helmut, Monarchies, States Generals and Parliaments, op. cit.
46 Muto, Giovanni, « The Spanish System : Centre and Periphery », dans Economic Systems and State Finance, Richard Bonney (éd.), Oxford, New York, Oxford University Press, 1995.
47 Tracy, James D., Holland under Habsburg Rule, 1506-1566 : the Formation of a Body Politic, Berkeley, University of California Press, 1990. Elliott, John H., The Revolt of the Catalans, op. cit.
48 Grafe, Regina, Distant Tyranny. Markets, Power, and Backwardness in Spain. 1650-1800, Princeton, N.J., Princeton University Press, 2012, p. 118-119.
49 Gil Pujol, Xavier, « Integrar un mundo. Dinámicas de agregación y de cohesión en la monarquía de España », dans Las Indias occidentales. Procesos de incorporación territorial a las Monarquías Ibéricas (siglos xvi a xviii), Oscar Mazín Gómez et José Javier Ruiz Ibáñez (éd.), Mexico, El Colegio de México, 2012, p. 69-108.
50 Kamen, Henry, Empire, op. cit., p. 151 et suiv. Elliott, John H., Imperial Spain, op. cit., p. 257.
51 Martínez Millán, José, Instituciones y elites de poder en la monarquía hispana durante el siglo xvi, Madrid, Ediciones de la Universidad Autónoma de Madrid, 1992. Fernandez Conti, Santiago, Los Consejo de Estado y Guerra en la época de Felipe II (1548-1598), Valladolid, Junta de Castilla y León, Consejería de educación y cultura, 1998. Escudero, José Antonio, Los hombres de la Monarquía Universal, Madrid, Real Academia de la Historia, 2011. Domínguez Nafría, Juan Carlos, El Real y Supremo Consejo de Guerra (siglos xvi-xviii), Madrid, Centro de Estudios Políticos y Constitucionales, 2001. Rivero Rodríguez, Manuel, Felipe II y el Gobierno de Italia, op. cit. Schäfer, Ernst, El Consejo Real y Supremo de las Indias, Salamanque, Junta de Castilla y León, Consejería de Educación y Cultura, 2003. Carlos Morales, Carlos Javier de, El Consejo de Hacienda de Castilla, 1523-1602. Patronazgo y clientelismo en el gobierno de las finanzas reales durante el siglo xvi, Valladolid, Junta de Castilla y León, Consejería de Educación y Cultura, 1996.
52 Elliott, John H., The Revolt of the Catalans, op. cit. p. 78. Ruiz Ibáñez, José Javier, Sabatini, Gaetano, « Monarchy as Conquest : Violence, Social Opportunity, and Political Stability in the Establishment of the Hispanic Monarchy », The Journal of Modern History, vol. 81, no 3, 2009, p. 501-536.
53 Yun Casalilla, Bartolomé, Marte contra Minerva : el precio del imperio español, c. 1450-1600, Barcelone, Crítica, 2004. Thompson, I. A. A, « Public Expenditure and Political Unity : Spanish Monarchy and European Union », dans Dinero, moneda y crédito en la Monarquía Hispánica, Antonio Miguel Bernal (éd.), Madrid, Marcial Pons, Historia, Fundación ICO, 2000, p. 879-888.
54 Koenigsberger, Helmut, The Government of Sicily under Philip II of Spain, op. cit. Elliott, John H., Imperial Spain, op. cit. Kamen, Henry, Spain’s Road to Empire : the Making of a World Power (1492-1763), Londres, The Penguin press, 2002.
55 Calabria, Antonio, The Cost of Empire : the Finances of the Kingdom of Naples in the Time of Spanish Rule, Cambridge ; New York, Cambridge University Press, 1991. Galasso, Giuseppe, Alla periferia dell’Impero, op. cit.
56 Yun Casalilla, Bartolomé, Iberian World Empires and the Globalization of Europe 1415-1668, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2019. Yun Casalilla, Bartolomé, Las redes del Imperio. Elites sociales en la articulación de la monarquía Hispánica, 1492-1714, Madrid, Marcial Pons, 2008. García Hernán, David (éd.), La historia sin complejos. La nueva visión del Imperio Español, Madrid, Editorial Actas, 2010, voir en particulier sur l’histoire du concept d’empire l’article de Rivero Rodríguez, Manuel, « El imperio en su apogeo », p. 136-176, et García Carcél, Ricardo, « Elliott, el hispanismo británico y la leyenda negra », p. 259-296. Ruiz Ibáñez, José Javier, Martínez Alcalde, María, Campillo Méndez, María Magdalena (éd.), Felipe II y Almazarrón, op. cit.
57 Bouza, Fernando, « La configuración de la Monarquía Hispánica », dans La historia sin complejos. La nueva visión del Imperio Español, op. cit. p. 77.
58 Hernando Sánchez, Carlos José, « Los virreyes de la Monarquía española en Italia. Evolución y práctica de un oficio de gobierno », Studia Historica, Historia moderna, vol. 26, 2004, p. 43-73.
59 D’Amico, Stefano, Spanish Milan, op. cit. p. 139.
60 Jiménez Estrella, Antonio, Poder, ejército y gobierno en el siglo xvi, op. cit., 2004.
61 Voir les remarques de Kamen sur l’importante contribution des non-Castillans à la construction de cet empire espagnol : Kamen, Henry, Empire, op. cit.
62 Escribano Páez, José Miguel, El Coste de la Defensa, op. cit.
63 Koenigsberger, Helmut, The Government of Sicily under Philip II of Spain, op. cit. p. 50.
64 Ribot Garcia, Luis Antonio, « Soldados españoles en Italia. El castillo de Milán a finales del siglo xvi », dans Guerra y sociedad en la monarquía hispánica, op. cit. p. 408.
65 Schaub, Jean-Frédéric, Le Portugal au temps du Comte-Duc d’Olivares (1621-1640), op. cit., p. 20, 245 et suiv. Schaub, Jean-Frédéric, « Maritime Archipelago, Political Archipelago. The Azores under the Habsburgs (1581-1640) », dans Polycentric Monarchies : How did Early Modern Spain and Portugal Achieve and Maintain a Global Hegemony, Pedro Cardim, Tamar Herzog, José Javier Ruiz Ibáñez et Gaetano Sabatini (éd.), Eastbourne, Portland, Vaughan, Sussex Academic Press, 2012, p. 11-26.
66 Parker, Geoffrey, The Military Revolution, op. cit.
67 Schaub, Jean-Frédéric, Le Portugal au temps du Comte-Duc d’Olivares (1621-1640), op. cit. p. 20. Chavarría Múgica, Fernando, « Monarquía fronteriza : guerra, linaje y comunidad en la España moderna (Navarra, siglo xvi) », thèse soutenue à l’Institut Universitaire Européen, Florence, 2006, p. 82-83 et 279. Escribano Páez, José Miguel, El Coste de la Defensa, op. cit. p. 252.
68 Escribano Páez, José Miguel, El Coste de la Defensa, op. cit. p. 357.
69 D’Amico, Stefano, Spanish Milan, op. cit., p. 140.
70 Greengrass, Mark, Conquest and Coalescence. The Shaping of the State in Early Modern Europe, Londres, Edward Arnold, 1991.
71 Koenigsberger, Helmut, Monarchies, States Generals and Parliaments, op. cit. p. 270.
72 Elliott, John H., The Revolt of the Catalans, op. cit. p. 394 et suiv.
73 Schaub, Jean-Frédéric, Le Portugal au temps du Comte-Duc d’Olivares (1621-1640), op. cit., p. 284.
74 Ruiz Ibáñez, José Javier, « Les acteurs de l’hégémonie hispanique, du monde à la péninsule Ibérique », Annales. Histoire, Sciences Sociales, traduit par Jean-Frédéric Schaub, vol. 4, 2014, p. 927-954. Bouza, Fernando, « La configuración de la Monarquía Hispánica », op. cit. Voir également l’introduction de Cardim, Pedro, Herzog, Tamar, Ruiz Ibáñez, José Javier, Sabatini, Gaetano (éd.), Polycentric Monarchies, op. cit.
75 Cobos Guerra Fernando, La artíllería de los Reyes Católicos, op. cit. ; Ladero Galán, Aurora, « Artilleros y artillería de los Reyes Católicos (1495-1510) », op. cit.
76 Ibid.
77 Arántegui y Sanz, José, Apuntes históricos sobre la artillería española en la primera mitad del siglo xvi, op. cit., p. 208.
78 Le document est intégralement transcrit dans ibid. p. 209.
79 Voir les documents transcrits dans ibid. p. 212-216.
80 « Capitán de nuestra artillería de España y de la Corona de Aragon », document transcrit dans ibid., p. 221.
81 « Capitán general de la artillería de los reinos de Castilla y de Aragón », ibid., p. 228.
82 Hernando Sánchez, Carlos José, « Los virreyes de la Monarquía española en Italia », op. cit. ; En Catalogne, ce n’était pas le cas dans la première moitié du xvie siècle, Escartín Sánchez, Eduardo, « La Capitanía General de Cataluña bajo Felipe II », dans Felipe II y el Mediterráneo, vol. III, Barcelone, Sociedad Estatal para la Conmemoración de los Centenarios de Felipe II y Carlos V, 1999, p. 377-392.
83 Jiménez Estrella, Antonio, « La Capitanía General del reino de Granada durante el reinado de Carlos V », dans Carlos V, Europeísmo y Universalidad. La organización del poder, tomo II, J.L. Castellano Castellano et F. Sánchez-Montes González (éd.), Madrid, 2001, p. 339-368.
84 Vázquez Gómez, José, Quinientos años de la Capitanía General de Galicia, Madrid, Ministerio de Defensa, Servicio de Publicaciones, 1985.
85 Salas Almena, Luis, Colaboración y conflicto. La capitanía general del Mar Océano y costas de Andalucía, 1588-1660, Cordoue, Universidad de Córdoba, 2002.
86 Arántegui y Sanz, José, Apuntes históricos sobre la artillería española en la primera mitad del siglo xvi, op. cit. p. 229.
87 Titre intégralement transcrit dans ibid. p. 231-233.
88 Voir sa biographie dans Rodríguez, Pedro, Rodríguez, Justina, Don Francés de Álava y Beamonte. Correspondancia inédita de Felipe II con su embajador en Paris (1564-1570), Saint-Sébastien, Sociedad Guipuzcoana de Ediciones y Publicaciones, 1991. Son titre de capitaine général de l’artillerie : AGS GYM leg. 76/133 (17/05/1572).
89 Titre de capitaine général de l’artillerie, AGS GYM leg. 365/81 (30/08/1586). Eloge à sa mort, AGS GYM leg. 654/57 (20/09/1606).
90 En 1571, l’ingénieur Gabrio Cerbelloni fait allusion à la participation de Juan Manrique à Metz, AGS EST leg. 1135/117 (12/11/1571).
91 Salazar y Castro, Luis de, Historia Genealógica de la Casa de Lara, vol. II, Llanos y Guzman, 1697, p. 255-256.
92 Ibid. p. 257 et Hernando Sánchez, Carlos José, « Los virreyes de la Monarquía española en Italia », op. cit.
93 Kamen, Henry, Empire, op. cit. p. 161.
94 Rodríguez Pedro, Rodríguez, Justina, Don Francés de Álava y Beamonte, op. cit. p. 74-75.
95 Salazar y Castro, Luis de, Historia Genealogica De La Casa De Lara, op. cit. p. 255.
96 Rodríguez Pedro, Rodríguez, Justina, Don Francés de Álava y Beamonte, op. cit. p. 4.
97 Ibid.
98 Voir les nombreuses apparitions de ce personnage dans Fernandez Conti, Santiago, Los Consejo de Estado y Guerra en la época de Felipe II (1548-1598), op. cit.
99 Ibid. Pour l’invitation à rejoindre le conseil, voir AGS GYM leg. 77/74 (année 1572).
100 Juan de Acuña Vela figure dans l’arbre généalogique des seigneurs de Tabladillo, RAH, leg. 9/301, fol. 48 v. Je remercie Rafael Girón pour cette information. Sur l’assassinat de Blasco Nuñez Vela, voir Elliott, John H., Empires of the Atlantic World, op. cit., p. 132-133.
101 Voir le panégyrique rédigé par les membres du conseil de guerre juste après sa mort, AGS GYM leg. 654/57 (20/09/1606).
102 Ibid. Pour le rôle du veedor general, voir González de León, Fernando, The Road to Rocroi, op. cit. p. 32.
103 AGS GYM leg. 215/7 à 11 (Aout 1587), AGS GYM leg. 203/29 à 34 (novembre 1587), AGS GYM leg. 222/51 à 55 (mars 1588).
104 AGS GYM leg. 254/219 à 221 (décembre 1589).
105 AGS GYM leg. 281/230 à 236 (mars 1590), AGS GYM leg. 284/265 (mai 1590).
106 Juan de Acuña Vela apparaît pour la première fois comme membre du conseil de guerre dans AGS GYM lib. 70, fol. 239r (02/12/1595).
107 Domínguez Nafría, Juan Carlos, El Real y Supremo Consejo de Guerra (siglos xvi-xviii), op. cit. p. 108-109.
108 AGS GYM leg. 76/133 (17/05/1572).
109 Domínguez Nafría, Juan Carlos, El Real y Supremo Consejo de Guerra (siglos xvi-xviii), op. cit. p. 39 et 81-82.
110 En témoignent les nombreuses lettres citées dans la note précédente (no 101), et bien d’autres des legajos de AGS GYM des mêmes années.
111 Voir les instructions de Francés de Álava, AGS GYM leg. 76/133 (17/05/1572) et de Juan de Acuña Vela, AGS GYM lib. 43, fol. 22v-35r (30/08/1586).
112 Ibid.
113 Cette limitation rendait d’ailleurs furieux Francés de Álava. Voir AGS GYM leg. 135/205 à 207 (année 1582).
114 Voir les premières cédules de ces privilèges, AGS GYM leg. 114/203 (10/02/1553 et 16/04/1567).
115 Pour un exemple, voir les nombreux inventaires d’artillerie dans AGS GYM leg. 365/94, 95, 125, 149, 196 (année 1592).
116 Voir la plainte de Juan de Acuña Vela à propos du fait que ses recommandations n’étaient pas suivies, AGS GYM leg. 654/150 (05/04/1606).
117 Sur les exigences de compétence des artilleurs, voir p. 389-394.
118 Voir l’inventaire de la casa de munición de Cadix le 05/05/1586, AGI CT leg. 5108 (sans num.). Voir aussi les comptes du gérant de la casa de munición de Burgos, AGS CMC 1a época leg. 520.
119 AGS GYM lib. 43, fol. 22v-35r (30/08/1586).
120 AGS GYM lib. 77, fol. 34r (08/06/1596).
121 Cobos Guerra, Fernando, La artíllería de los Reyes Católicos, op. cit. p. 13-14 ; Voir les divers témoignages de l’activité de la fonderie dans la première moitié du xvie siècle, Arántegui y Sanz, José, Apuntes históricos sobre la artillería española en la primera mitad del siglo xvi, op. cit. p. 171-188.
122 Un total de 218 pièces d’artillerie y furent fabriquées entre mi-1590 et mi-1592, AGS GYM leg. 365/179 (15/10/1592).
123 Voir les documents datant de 1535 dans Arántegui y Sanz, José, Apuntes históricos sobre la artillería española en la primera mitad del siglo xvi, op. cit. p. 191-197.
124 Plusieurs fondeurs apparaissent dans les documents comptables de Burgos, mais rien ne garantit que leur activité avait réellement lieu à Burgos AGS GYM lib. 70, fol. 39r (10/09/1594). Très rares sont les mentions de pièces fondues à Burgos dans les inventaires.
125 AGS GYM leg. 213/195 (année 1587).
126 En témoignent les nombreuses pièces de fabrication portugaises se trouvant aux Açores à l’arrivée des Espagnols en 1583, AGS GYM leg. 149/336 (18/09/1583), AGS GYM leg. 149/338 et 350 (18/09/1583).
127 Martin, Colin, Parker, Geoffrey, The Spanish Armada, op. cit., p. 155. Un document évoque 70 pièces fondues par Luis Cesar en un mois, AGS GYM leg. 222/56 (25/03/1588).
128 AGS GYM lib. 77 fol. 177r (09/07/1597).
129 AGS GYM lib. 70 fol. 21v-22r (03/08/1594), lib. 77 fol. 21v (13/05/1596), leg. 688/57 (14/03/1605).
130 Le fondeur Bartolomé Sommariva fut envoyé à La Corogne en 1596 : AGS GYM lib. 77, fol. 23v et 267r.
131 Mora Piris, Pedro, La Real fundición de bronces de Sevilla, siglos xvi a xviii., Séville, Escuela superior de ingenieros, 1994.
132 AGI IG leg. 1952, lib. 4, fol. 101v-102r (03/11/1596). Voir aussi les listes de pièces d’artillerie marquées aux noms des « prieur et consuls des marchands », à celui du facteur de la casa de la contratación ou encore à celui de l’avería (taxe finançant l’armada de guarda de la carrera de Indias), dans AGI CT leg. 3915 (année 1574) ainsi que AGS GYM leg. 118/103 (09/10/1581).
133 AGS CMC 2a epoca leg. 414 (Juan Morel apparaît dans la liste de 1584), AGS GYM lib. 70, fol. 39r (10/09/1594).
134 AGS GYM leg. 281/230 (12/02/1590).
135 AGS GYM lib. 70, fol. 86v-78r (12/11/1594).
136 AGS GYM leg. 552/286 (24/03/1599).
137 En plus du document ci-dessus, voir par exemple AGS GYM lib. 57, fol. 145r (24/03/1591) et AGS GYM lib. 77, fol. 19r (04/05/1596).
138 Un exemple sur l’année 1595 : commande de 2 100 boulets pour l’armada del mar Océano, AGS GYM lib. 70, fol. 117r (15/01/1595), commande de 11 200 boulets pour la carrera de Indias, AGS GYM lib. 70, fol. 182v-183r (30/08/1595), commande de 1 200 arquebuses pour la carrera de Indias, AGS GYM lib. 70, fol. 228r (04/11/1595).
139 AGS GYM leg. 552/286 (24/03/1599).
140 Mention dans les années 1580 de « la fabrica de pólvora del castillo de Burgos » et « polvoristas de Burgos : Marcos de Pedrosa, Maestre Andrés de Uriarte, Elmo de Borgoña » dans AGS CMC 2a época leg. 414.
141 Mention des « asientos entre Don Francés de Álava y Juan Bautista Matias y su hermano Alonso Matias, hijos de Paulo Matias, defunto, polvoristas vecinos de Sevilla » dans ibid. Ces deux frères passèrent de nombreux contrats avec les capitaines généraux de l’artillerie : en préparation de l’armada de 1588, AGI CT leg. 5108 (05/02/1588) ou encore en 1594, AGS GYM lib. 70 fol. 24v-25r (03/08/1594). Autre exemple d’asientista : Francisco Trujillo à Grenade, AGS GYM lib. 70, fol. 93r (28/11/1594).
142 Voir le rapport détaillé de Juan de Acuña Vela, AGS GYM leg. 254/219 et 221 (14/12/1589).
143 AGS GYM leg. 552/286 (24/03/1599).
144 Voir les ingénieurs apparaissant dans les comptes du pagador del artillería entre 1570 et 1590 : AGS CMC 2a época leg. 414.
145 AGS GYM leg. 118/226 (17/10/1581).
146 AGS GYM lib. 43 fol. 22v-35r (30/08/1586).
147 Ibid.
148 Voir la mention « señalada por don Juan de Acuña Vela » à la fin du document, AGS GYM lib. 77, fol. 36v-38r (11/06/1596).
149 AGS GYM leg. 281/176 (17/02/1590).
150 Cet essai conduisit à la fortification de la tour do Bugio, aujourd’hui dotée d’un phare, voir ibid.
151 Sur ces réformes, voir Quatrefages, René, La Revolución Militar Moderna. El Crisol Español, op. cit. p. 137-140.
152 AGS GYM lib. 77 fol. 221r-222v (19/11/1597).
153 Comptes de Francisco Caro del Rincon, années 1520, AGS CMC 1a época leg. 635 (4). Comptes de Miguel Caro del Rincón, années 1570-1590, AGS CMC 2a época leg. 414.
154 Sur Antonio del Peso, voir AGS GYM leg. 133/261 (année 1582). Titre et instruction remis à Juan de Frías, AGS GYM lib. 43 fol. 180v-183r (19/12/1586).
155 Voir les comptes de Miguel Caro del Rincón, AGS CMC 2a época leg. 414.
156 Comptes du pagador García de Velasco, AGS CMC 1a época leg. 600 (années 1549-1556). L’office de contador de l’artillerie fut tenu par Pedro Juan de San Clemente (mort en 1585), puis par Cristóbal de Osorio, AGS GYM lib. 43 fol. 62v-64r (18/09/1586).
157 Voir les plaintes d’Alonso de Céspedes qui ne touchait plus de salaire suite au décès du pagador, AGS GYM leg. 213/112 (03/04/1587). Il fut remplacé par Gonzalo de Salamanca, AGS GYM leg. 254/184 (02/12/1589). Discussion pour pourvoir le poste de contador de l’artillerie, AGS GYM leg. 209/172 (année 1587). Exemple de l’activité du contador Sánchez de Moya, AGS GYM leg. 378/38 (23/10/1593).
158 Pedro López de Soto, AGS GYM leg. 276/223 (12/06/1589).
159 AGS GYM leg. 300/158 (13/07/1590).
160 Juan Pérez de Ubilla, contador de l’artillerie à Fontarrabie et Saint-Sébastien, AGS GYM leg. 263/199 (29/11/1589).
161 Pedro Martínez de Angulo, pagador de la manufacture de Eugui, AGS GYM leg. 391/306 (22/10/1593). Lope de Chávez, contador de l’artillerie de Navarra, AGS GYM leg. 378/25 à 27 (21/10/1593).
162 Geronimo de Aybar succéda ainsi à Lope de Elio comme veedor de la manufacture d’Eugui, AGS GYM lib. 70 fol. 258 (04/02/1596).
163 Voir le bilan de la carrière d’Alonso Carrasco de Cuellar, AGS GYM leg. 627/83 (année 1604).
164 Exemple d’activité d’un majordome de l’artillerie : Pedro de Godoy à Burgos, AGS CMC 1a época leg. 520 (années 1536-1545).
165 Voir les comptes de Miguel Caro del Rincón, AGS CMC 2a época leg. 414.
166 AGS GYM leg. 182/113 (année 1585), leg. 389/164 (09/02/1593), leg. 212/64 (17/0/1587). Voir aussi les carpinteros et herreros apparaissant dans les comptes de Burgos : AGS GYM lib. 70, fol. 39r (10/09/1594).
167 « Pedro Lanze, coronel de los 600 gastadores que sirvieron en el artillería del dicho ejercito de Portugal, que con ellos secorriese los 200 gastadores italianos […] cargo de los capitanes Juan de Masquino y Josepe Balsamo, las dos companías de los florentines », AGS CMC 2a época leg. 414.
168 Ibid.
169 AGS GYM leg. 105/129 et 131 (23/09/1580).
170 Arántegui y Sanz, José, Apuntes históricos sobre la artillería española en la primera mitad del siglo xvi, op. cit. p. 216, 218, 228-230.
171 Titre de lieutenant à Hernando de Acosta, AGS GYM leg. 174/27 (13/09/1558).
172 Titre de lieutenant à Juan de Carvajal, AGS GYM leg. 174/55 (20/05/1569).
173 Ce découpage géographique apparaît explicitement dans AGS GYM leg. 88/250 (17/08/1578).
174 Seguí Beltrán, Andreu, « La administración de la artillería del Reíno de Mallorca en el siglo xvi », Bolletí de la Societat Arqueològica, vol. 69, 2013, p. 143-157.
175 Le lieutenant Alonso de Céspedes, voir AGS GYM leg. 144/183 (25/04/1583).
176 Le lieutenant Pedro de Pando, voir AGS GYM leg. 148/320 (année 1583).
177 Lieutenant Hernando de Acosta d’abord temporairement, AGS GYM leg. 387/664 (07/11/1593). À sa mort, la lieutenance fut renouvelée en la personne de Francisco de Peralta Ortíz : AGS GYM lib. 70 fol. 85r (12/11/1594).
178 Le lieutenant Miguel García, AGS GYM lib. 70 fol. 56v (19/09/1594).
179 Le lieutenant Pedro de Santisteban, AGS GYM leg. 364/142 (03/07/1592), puis le lieutenant Pedro de Guevara, AGS GYM leg. 604/218 (24/03/1604).
180 Escartín Sánchez, Eduardo, « La Capitanía General de Cataluña bajo Felipe II », op. cit. Jiménez Estrella, Antonio, « La Capitanía General del reino de Granada durante el reinado de Carlos V », op. cit. Salas Almena Luis, Colaboración y conflicto, op. cit. Hernando Sánchez, Carlos José, « Los virreyes de la Monarquía española en Italia », op. cit.
181 Certains capitaines généraux siégèrent au conseil de guerre mais rarement conjointement à l’exercice de leur charge de capitaine général. Voir Domínguez Nafría, Juan Carlos, El Real y Supremo Consejo de Guerra (siglos xvi-xviii), op. cit. Fernandez Conti, Santiago, Los Consejo de Estado y Guerra en la época de Felipe II (1548-1598), op. cit.
182 Quatrefages, René, La Revolución Militar Moderna. El Crisol Español, op. cit.
183 Pazzis Pi Corrales, Magdalena de, « Las Guardas de Castilla : algunos aspectos orgánicos », dans Guerra y sociedad en la monarquía hispánica, op. cit. p. 767-787.
184 García García, Bernardo José, La pax hispánica : política exterior del Duque de Lerma, Louvain, Leuven University Press, 1996. p. 122.
185 AGS GYM lib. 70 fol. 182v-183r (30/08/1595).
186 À titre d’exemples, voir AGS GYM leg. 182 (année 1585), AGS GYM leg. 394 (année 1593).
187 Dans les années 1580, il s’agissait de Juan de la Concha, artilleur de Burgos « que reside en esta corte por solecitador de la gente de la dicha artillería, por orden de su Magestad », AGS CMC 2a época leg. 414. Dans les années 1590, c’était Sebastian de Treviño, ancien artilleur qui avait un vaste réseau social de gens d’artillerie partout dans la péninsule ibérique, aux Açores, dans l’armada del mar Océano et même dans les galères de Bretagne, voir AGS GYM lib. 70, fol. 38r (10/09/1594) et AGS GYM leg. 552/447 (06/10/1599).
188 AGS GYM leg. 276/273 et 275 (06/03/1589).
189 Par exemple, AGS GYM leg. 389/253 (09/05/1593) et 694 (20/10/1593). Au début du xviie siècle, l’escadre de Lisbonne disposait d’un contador de la artillería séparé : AGS GYM leg. 604/312 (03/09/1603).
190 Voir les titres de Francés de Álava et Juan de Acuña Vela, AGS GYM leg. 76/133 (17/05/1572) et lib. 43 fol. 22v-35r (30/08/1586).
191 Ibid.
192 Cette cédule du 10/02/1553 est imprimée dans AGS GYM leg. 114/203.
193 AGS GYM leg. 114/203.
194 Voir un exemplaire imprimé de toutes ces cédules dans le dossier « Andrés Muñoz el bueno, expediente sobre las exenciones de los artilleros de la Casa de la Contratación », AGI IG leg. 2007 (sans num.).
195 Voir l’adresse dans ibid.
196 Pour des exemples de ces documents imprimés et signés, voir AGS GYM leg. 281/232, AGS GYM leg. 370/56, AGI IG leg. 2007 (dossier intitulé « Andrés Muñoz el Bueno, artillero, sobre que se le haga merced del officio que esta vaco por Andrés de Espinosa »).
197 Voir les nombreuses demandes de ce type dans AGI CT leg. 4871.
198 « Saco una caja con ciertos papeles que dijo era su título de artillero y provisiones de artilleros y libertades ». Voir la procédure d’information menée par la casa de la contratación dans AGI IG leg. 2007 (sans num.).
199 Cédule du 10/02/1553, AGS GYM leg. 114/203.
200 Ibid.
201 Cédule du 17/04/1577, ibid.
202 Voir l’exemplaire de la cédule dans le dossier « Andrés Muñoz el bueno, expediente sobre las exenciones de los artilleros de la Casa de la Contratación », AGI IG leg. 2007 (sans num.).
203 « Por quanto en las ordenanças nuevas de la gente de mis guardas ay un capitulo del tenor siguiente », ibid.
204 Escartín Sánchez, Eduardo, « La Capitanía General de Cataluña bajo Felipe II », op. cit.
205 Voir la sélection de Diego de Prado comme lieutenant, AGS GYM leg. 364/152 (29/08/1592).
206 Il assista Juan de Acuña Vela à Lisbonne lors de la préparation de l’armada d’Angleterre, AGS GYM leg. 209/189 (04/09/1587). Acuña Vela louait ses compétences au conseil de guerre : AGS GYM leg. 284/265 (09/05/1590). Avant d’obtenir la lieutenance, il servait comme entretenido auprès du capitaine général, c’est-à-dire comme une sorte d’assistant, AGS GYM lib 57, fol. 21v-22r (29/05/1590).
207 Prado, Diego de, « La obra manual y pláctica de artillería », op. cit. Voir aussi p. 427, 475-478 et 525.
208 AGS GYM leg. 391/320 (Prado à Tomas de Petillas, le 04/09/1593).
209 Ibid. (Prado à Juan González, le 08/09/1593).
210 « El alférez dice que primero perderá los hojos que concienta se haga lo que Vuestra Merced manda por sus ordenes y dice alguno lo pagara esto y cierto será ansí porque ya nos han ameneçado, a mí me desafío el sargento el domingo a la noche en el querpo de guardia […] que en la primera occasión que aya sobre el tirar o no tirar que nos abrirán la cabeça o cortaran un braço y más que él que se moviere lo hecharán en la prisión y darán un garrote », ibid. (Tomas de Petillas à Diego de Pardo, le 21/09/1593).
211 Voir la déposition devant écrivain public du 23/09/1593, ibid.
212 Ibid. (lettre de Petilla à Pardo du 02/10/1593).
213 Ces témoignages figurent tous dans le même dossier, ibid.
214 AGS GYM leg. 378/1 (01/10/1593).
215 Ibid.
216 Voir les dépositions enregistrées devant notaire, AGS GYM leg. 391/377 (septembre 1593).
217 AGS GYM leg. 378/1 (01/10/1593).
218 AGS GYM leg. 391/320 (26/09/1593) et leg. 378/12 (14/10/1590).
219 AGS GYM leg. 378/12 (14/10/1593).
220 Ibid.
221 AGS GYM leg. 391/319 (07/10/1593).
222 AGS GYM leg. 378/112 (24/10/1593).
223 AGS GYM leg. 378/111 (10/11/1593).
224 AGS GYM leg. 391/318 (sans date, probablement octobre-novembre 1593).
225 « Que se echen las tres llaves en los magacenes y una tenga el teniente del artillería, otra el veedor, y otra el mayordomo della, y en lo demás se sirva al virrey lo apuntado en las cartas de don Diego de Prado », ibid.
226 AGS GYM leg. 398/226 (08/02/1594).
227 AGS GYM leg. 391/320.
228 AGS GYM leg. 398/56 (08/01/1594) et leg. 398/178 (29/01/1594).
229 AGS GYM leg. 398/179 (29/01/1594).
230 AGS GYM leg. 398/56 (08/01/1594) et leg. 398/178 (29/01/1594).
231 AGS GYM leg. 398/226 (08/02/1594).
232 AGS GYM leg. 401/142 et 143 (25/05/1594).
233 Ibid.
234 Ibid.
235 La mutation fut acceptée par le roi sur demande de Juan de Acuña Vela, AGS GYM lib. 63 fol. 307r (16/07/1594).
236 AGS GYM lib. 85 fol. 52r (04/07/1599).
237 AGS GYM leg. 564/2 (11/02/1600).
238 AGS GYM leg. 135/207 (18/03/1574).
239 AGS GYM leg. 135/202 (année 1582).
240 AGS GYM lib. 63 fol 270r-272v (23/04/1594) et lib. 70 fol. 113r (08/01/1595).
241 Seguí Beltrán, Andreu, « La administración de la artillería del Reíno de Mallorca en el siglo xvi », op. cit.
242 Ibid. Voir aussi AGS GYM leg. 437/401 (28/07/1595).
243 À Malaga : AGS GYM leg. 281/240 (13/02/1590) ; puis encore en 1601 : AGS GYM leg. 586/248 (27/01/1601). Dans un village de Castille : AGS GYM leg. 370/55 (année 1592). À Pampelune : AGS GYM leg. 398/328 (26/02/1594). À Burgos, en plein cœur du centre d’administration de l’artillerie, le pagador Caro del Rincón ainsi que des artisans furent emprisonnés, AGS GYM lib. 77 fol. 226v-230r (05/12/1597).
244 L’histoire est racontée avec de nombreux témoignages dans AGS GYM leg. 552/371 et 374 (31/05/1599).
245 Certains sont recopiés dans le document précédent, ibid.
246 Ibid.
247 Il était encore lieutenant d’artillerie de Catalogne en 1601, AGS GYM leg. 586/123 (année 1601).
248 AGS GYM leg. 144/183 et 186 (25/04/1583).
249 Son jugement avait été remis au conseil de guerre par ordre du roi, AGS GYM leg. 148/9 (09/08/1583). Céspedes exerça l’office pendant encore plusieurs années : AGS GYM leg. 209/139 (26/08/1587) et leg. 281/177 (24/02/1590).
250 La mesure fut acceptée par le conseil des Indes et le roi : AGI IG leg. 1968 lib. 21 fol. 104v-105r (15/11/1576). Pour plus d’informations à ce sujet, voir p. 343.
251 AGS GYM leg. 114/202 (24/06/1581).
252 AGS GYM leg. 365/83 (04/03/1594).
253 « Estando esta escuela subordinada al dicho don Juan y siendo todos los dichos artilleros nombrados por él en virtud de los despachos que tiene de Vuestra Magestad, se la sacan de su mano y la meten en la del dicho Francisco de Molina dándole con esta comisión para que el pueda nombrar los que quisiere y darles las cedulas de preeminencias que el dicho don Juan tiene facultad de dar de manera que viene a ser capitán general en aquella parte el dicho Francisco de Molina », ibid.
254 Voir les dossiers « Andrés Muñoz el bueno, expediente sobre las exenciones de los artilleros de la Casa de la Contratación » et « pleyto de conpetencia de juridición » dans AGI IG leg. 2007.
255 Strayer, Joseph R., On the Medieval Origins of the Modern State, op. cit.
256 Tilly, Charles, Coercion, Capital and European States, AD 990-1992, op. cit.
257 Schaub, Jean-Frédéric, Le Portugal au temps du Comte-Duc d’Olivares (1621-1640), op. cit.
258 Ibid. p. 20.
259 Ibid. p. 253 et suiv.
260 Hernando Sánchez, Carlos José, « Los virreyes de la Monarquía española en Italia », op. cit.
261 AGS EST leg. 1142/210 (16/06/1574).
262 Ibid.
263 C’est ce que l’on peut déduire de la démarche du conseil d’État qui demanda des informations en 1574 sur l’office disparu de capitaine général de l’artillerie de Sicile. Voir la réponse de Juan de Soto (secrétaire de don Juan d’Autriche) ibid. et la consultation du conseil, AGS EST leg. 1142/216 (03/07/1574).
264 Ibid.
265 Sur l’attaque de la Goulette, voir García Hernán, Enrique, « La conquista y la pérdida de Túnez por don Juan de Austria (1573-1574) », dans Mutazioni e permanenze nella storia navale del Mediterraneo. Secc. xvi-xix, Guido Candiani, Luca Lo Basso (éd.), Milan, Franco Angeli, 2010, p. 39-95.
266 Notamment Luis de Saavedra, Juan de Angulo et Bernardino de Velasco, AGS EST leg. 1142/216 (03/07/1574).
267 AGS EST leg. 1142/211 (25/12/1574).
268 Voir AGS EST leg. 1142/210 (16/06/1574) et AGS EST leg. 1065/17 (15/01/1573).
269 Il portait le titre de président et non de vice-roi car il était natif de l’île. Voir sa nomination : AGS EST leg. 1135/100 (01/11/1571).
270 AGS EST leg. 1142/216 (03/07/1574).
271 AGS EST leg. 1144/63 (24/05/1575).
272 Sur Terranova, voir Aymard, Maurice, « Une famille de l’aristocratie sicilienne aux xvie et xviie siècles : les ducs de Terranova », Revue Historique, vol. 247, 1972, p. 29-66 ; Grâce à son pouvoir régional bien développé, Terranova sut également nuire efficacement à son successeur Marco Antonio Colonna, Bazzano, Nicoletta, Marco Antonio Colonna, Rome, Salerno Editrice, 2003.
273 AGS EST leg. 1144/71 (15/06/1575).
274 AGS EST leg. 1144/66 et 69 (15/06/1575).
275 AGS EST leg. 1144/71.
276 « Nessuna cossa è piu pernitiossa alla quiete di Sicilia et alla conservatione de buoni ordini della giustitia che procurar di fundar nuove jurisditioni », ibid.
277 AGS EST leg. 1144/73 (16/07/1575).
278 Ibid.
279 Ibid.
280 Les nouvelles du remplacement de Bernardino de Velasco suite à son décès se trouve dans AGS EST leg. 1146 (année 1576).
281 La nomination de Juan de Angulo se trouve aussi dans AGS EST leg. 1146 (année 1576).
282 Favarò, Valentina « La Sicilia fortezza del Mediterraneo », Mediterranea ricerche storiche, vol. 1, 2004, p. 31-48. Voir p. 64 pour les garnisons siciliennes et p. 379-381 pour les écoles d’artilleurs.
283 AGS EST leg. 1144/30 et 31 (26/03/1575).
284 Voir par exemple AGS EST leg. 1144/25 (24/03/1575), leg. 1068/58 (28/03/1575), leg. 1156/223 (23/10/1588).
285 AGS EST leg. 1160/14 (18/01/1602). Exemple de chantiers dans les années 1590 : AGS EST leg. 1158/91 (17/05/1596).
286 AGS EST leg. 1160/54 (06/04/1602).
287 AGS EST leg. 1160/82 (02/09/1602).
288 Son titre : AGS EST leg. 1074/187 (30/04/1561). Des preuves de son commandement à la Goulette dix ans après sa nomination : AGS EST leg. 1136/242 (14/03/1571). L’absence total de son poste napolitain est confirmée par AGS EST leg. 1081/12 (28/12/1579).
289 Son remplacement à la Goulette : AGS EST leg. 1139/4 (23/01/1573).
290 AGS EST leg. 1086/151 (14/06/1582). La retraite de Carrillo de Quesada fut financée par un salaire de lieutenant d’artillerie AGS EST leg. 1086/77 (17/08/1582).
291 AGS EST leg. 1106/286 et 287 (année 1605) et leg. 1116/16 (29/01/1610).
292 Hernando Sánchez, Carlos José, Castilla y Nápoles en el siglo xvi, op. cit.,. p. 198-199.
293 Sur l’obligation de conseil de cette institution gouvernementale, voir Peytavin, Mireille, Visite et gouvernement dans le royaume de Naples, xvie-xviie siècles, Madrid, Casa de Velázquez, 2003, p. 246.
294 AGS EST leg. 1066/132 (01/03/1575).
295 AGS EST leg. 1074/186 et 188 (26/04/1577) et leg. 1081/12 (28/12/1578).
296 Voir en particulier le rôle joué par le régent Alonso de Salazar, AGS EST leg. 1081/10 (24/12/1579).
297 Je me réfère au fond « Estado » des Archives de Simancas.
298 AGS EST leg. 1066/56 (19/07/1575). Liste d’artillerie au Portugal dans laquelle se trouvent 20 pièces napolitaines : AGS GYM leg. 688/34 (07/06/1608).
299 Voir une allusion faite par le duc de Terranova aux boulets produits sur l’île d’Elbe, AGS EST leg. 1142/187 (20/12/1574). Il est difficile de savoir qui produisait ces boulets, les agents du vice-roi de Naples, ou bien ceux du Grand Duc de Toscane. La contribution de l’île d’Elbe à la sidérurgie du Grand Duché à été étudiée en détail : Morelli, Roberta, « Men of Iron : Masters of the Iron Industry in Sixteenth-Century Tuscany », dans The Workplace before the Factory : Artisans and Proletarians, 1500-1800, Thomas Max Safley et Leonard N. Rosenband (éd.), Ithaca, Cornell University Press, 1993, p. 146-164. Cardarelli, Romualdo, « Le miniere di ferro dell’Elba durante la signoria degli Appiano e l’industria siderurgica toscana nel cinquecento », Ricerche Storiche : Rivista semestrale del Centro piombinese di studi storici, vol. 31, « Il ferro e la sua archeologia », 2001, p. 295-427. Cependant, les liens entre les mines d’Elbe et la Monarchie hispanique demeurent peu connus malgré l’importante influence espagnole sur la seigneurie de Piombino et la présence de garnisons à Piombino, Portolongone (aujourd’hui Porto Azurro) et Marina di Rio : Angiolini, Franco, « I Presidios di Toscana : cadena de oro e llave y freno de Italia », dans Guerra y sociedad en la monarquía hispánica, op. cit., p. 171-188.
300 AGS EST leg. 1066/10 (22/01/1575), leg. 1089/307 (08/12/1588).
301 AGS EST leg. 1090/24 (22/02/1589).
302 Sur le ravitaillement de ces galères, voir AGS GYM leg. 1065/18 (13/06/1573). Sur les effectifs de galères, voir p. 93-94.
303 Elles étaient généralement armées d’une cinquantaine de pièces chacune, AGS GYM leg. 195/43 (année 1587) et cet armement était procuré par les soins du vice-roi de Naples, AGS EST leg. 1089/307 (08/12/1588).
304 J’ai pu relever une quinzaine de noms différents pour les années 1570-1580, parmi lesquels le célèbre Giulio Cesare Brancaccio, l’auteur andalou de traités d’artillerie Luis Collado ainsi que d’autres figures importantes telles que Scipione Campi, Gabrio Serbelloni et Domenico Fontana. Voir AGS EST leg. 1065/34 et 35 (année 1571), leg. 1066/10 (22/01/1575) et 82 (29/09/1575), leg. 1142/205 et 206 (année 1574), leg. 1073/79 (17/04/1577), leg. 1106/284 (année 1605).
305 AGS EST leg. 1260/122 (31/01/1577).
306 Ibid.
307 Ibid.
308 Sans doute un lointain cousin de Juan Manrique de Lara, capitaine général de l’artillerie d’Espagne entre 1551 et 1570. Il obtint sa charge en 1574, AGS EST leg. 1260/118 (25/12/1574).
309 AGS EST leg. 1249/59 (08/03/1578). Jorge Manrique évoque ses demandes répétées dans AGS EST leg. 1260/126 (28/10/1583).
310 « No se ha hallado cossa con cossa sino es mucha perdición de hazienda y confussión y embarazo como le habrá siempre que assí toda el artillería como los pertrechos, fortificaciones y cossas todas anexas a ella deste estado no estén a cargo de una sola persona », AGS EST leg. 1249/78 (12/03/1578).
311 AGS EST leg. 1260/119 (28/10/1583).
312 Ibid.
313 AGS EST leg. 1260/120 à 124.
314 Stefano D’Amico, Spanish Milan, op. cit. p. 134.
315 AGS EST leg. 1260/134 (sans date, année 1584 ?).
316 Parker, Geoffrey, The Army of Flanders and the Spanish Road, 1567-1659, op. cit.
317 D’Amico, Stefano, Spanish Milan, op. cit. p. 140.
318 Koenigsberger, Helmut, Monarchies, States Generals and Parliaments, op. cit. p. 315-316. Van Nimwegen, Olaf, The Dutch Army and the Military Revolutions, 1588-1688, Woodbridge, The Boydell press, 2010, p. 151.
319 « Hagays poner por escripto los apuntamientos y cabos necesarios para hazer una muy acertada instrucción que quite todos los abusos que hubiere introduzidos y que de la forma mejor y más conveniente para que lo de la artillería como cosa tan importante se haga en perfición », AGS EST leg. 1261/91 (22/08/1585). Voir aussi la réponse enthousiaste du duc de Terranova : AGS EST leg. 1260/109 (octobre 1585).
320 D’Amico, Stefano, Spanish Milan, op. cit. p. 36 et 64.
321 Voir par exemple le capitaine Xuarez envoyé à Milan pour acheter 6 000 piques, 8 000 arquebuses, 2 000 lances de cavalerie, 3 000 morions, 300 cuirasses, 200 corselets, etc. AGS EST leg. 1141/6 (11/12/1574).
322 Terranova au conseil secret de Milan, AGS EST leg. 1260/126 (28/10/1583).
323 La correspondance du roi avec le comte de Cifuentes évoque un achat de 20 000 q. de metal (environ 920 tonnes) pour fondre de l’artillerie, AGS EST leg. 1263/80 (année 1588). En comptant une moyenne de 40 q. par pièce (1,8 tonnes), ce métal pouvait permettre de fondre environ 500 pièces.
324 Ibid.
325 Le gouverneur Ayamonte : AGS EST leg. 1246/69 (13/08/1577). Le gouverneur Terranova : AGS EST leg. 1260/109 (octobre 1585). Le capitaine général de l’artillerie Jorge Manrique : AGS EST leg. 1260/126 (année 1583). Le fondeur d’artillerie Giovan Battista Busca, AGS EST leg. 1260/127 (01/09/1583).
326 Ibid.
327 AGS EST leg. 1260/134 (sans date, année 1584 ?).
328 AGS EST leg. 1260/109 (octobre 1585).
329 AGS EST leg. 1294/21 (25/01/1605).
330 Sur le consiglio segreto, voir Signorotto, Gianvittorio, Milano Spanola. Guerra, istituzioni, uomini di governo (1635-1660), Milan, Sansoni Editore, 1996, p. 80. Stefano D’Amico, Spanish Milan, op. cit. p. 131.
331 Sa nomination : AGS EST leg. 1260/118 (25/12/1574). La dernière mention de Jorge Manrique se trouve dans un compte rendu de visite de fortification par Lechuga : AGS EST leg. 1294/21 (25/01/1605).
332 Voir l’autobiographie de Lechuga dans l’imprimé Descargos del capitan Christóval Lechuga, Milan, 1612, dans AGS VIT leg. 278 (19).
333 Lechuga, Cristóbal, Discurso que trata del cargo de Maestre de Campo General, Milan, P. Malatesta, 1603. Lechuga, Cristóbal, Discurso del Capitán Cristóval Lechuga en que trata de la artillería y de todo lo necessario a ella, con un tratado de fortificación y otros advertimientos, Milan, Marco Tulio Malatesta, 1611.
334 Felipe de Haro parle ainsi du comte de Fuentes lors de sa visite à Milan : « su favorezido que es el capitán Cristóbal de Lechuga », AGS EST leg. 1298/8 (13/02/1609).
335 AGS EST leg. 1299/124 (28/07/1610).
336 AGS EST leg. 1299/128 (08/08/1610).
337 Rivero Rodríguez, Manuel, Felipe II y el Gobierno de Italia, op. cit.
338 La documentation produite par ces visites constitue la section « Visitas de Italia » des archives de Simancas.
339 AGS VIT leg. 330 (2) fol. 159 (année 1588).
340 AGS VIT leg. 278 (19).
341 AGS EST leg. 1138/76, (19/03/1572).
342 AGS EST leg. 1139/82 (12/06/1573).
343 AGS EST leg. 1141/180 (30/11/1574) et 6 (11/12/1574), leg. 1144/30 (26/03/1575).
344 AGS EST leg. 1066/10 (22/01/1575).
345 AGS GYM leg. 88/43 (27/07/1578).
346 AGS EST leg. 1158/91 (17/05/1596).
347 AGS EST leg. 1079/88 et 89 (30/04/1579). Dans l’entrepôt d’armes de Cadix se trouvaient en 1586 un canon et dix esmeriles provenant de Naples : lettre d’Antonio de Guevara à la casa de la contratación, AGI CT leg. 5108 (sans num.).
348 Ainsi, 24 pièces d’artillerie bien pourvues de boulets et de poudre furent envoyées de Sicile à Carthagène, AGS EST leg. 1155/87 (20/03/1587) et AGS GYM leg. 195/41 (29/03/1587).
349 Martin, Colin, Parker, Geoffrey, The Spanish Armada, op. cit.
350 AGS EST leg. 1089/307 (08/12/1588).
351 La moitié de ces pièces étaient des canons de 53 lb. de calibre, AGS EST leg. 1264/97 (03/12/1589), AGS EST leg. 1265/85 (20/02/1589) et 55 (18/04/1589).
352 AGS EST leg. 1156/115 (09/03/1589).
353 AGS GYM lib. 85 fol. 92v-93r (06/06/1600).
354 Elliott, John H., Imperial Spain, op. cit. p. 329-332. Schaub, Jean-Frédéric, Le Portugal au temps du Comte-Duc d’Olivares (1621-1640), op. cit. p. 2-3.
355 L’étroitesse des liens de loyauté, d’amitié ou de famille entre les vice-rois d’Italie et les factions gouvernementales de la cour de Philippe II est souligné par Rivero Rodríguez, Manuel, Felipe II y el Gobierno de Italia, op. cit.
356 Divers exemples en Sicile et à Milan : AGS EST leg. 1068/58 (20/03/1575), leg. 1264/97 (03/12/1588) et AGS GYM leg. 195/41 (29/03/1587).
357 Crouy-Chanel, Emmanuel de, « Le canon jusqu’au milieu du xvie siècle », op. cit.
358 Voir les nombreuses occurrences de ces personnages dans ibid. Voir aussi Garnier, Joseph, L’Artillerie des ducs de Bourgogne : d’après les documents conservés aux archives de la Côte-d’Or, Paris, H. Champion, 1895, en particulier chapitre « le personnel » p. 209 et suiv.
359 Crouy-Chanel, Emmanuel de, « Le canon jusqu’au milieu du xvie siècle », op. cit. en particulier p. 69-70 et 298.
360 Voir les nombreuses demandes d’envoi de canonniers de Malines que fit Charles le Téméraire durant ses campagnes, Van Doren, P.J. Inventaire des archives de la ville de Malines, troisième tome : lettres missives, Malines, Imprimerie de Van Velsen, 1865. p. 192 (07/08/1468), 202 (30/04/1472), 217 (09/04/1475), 227 (05/08/1576).
361 AGS EST leg. 577/131 (01/01/1542).
362 Il exerçait cette fonction au nom du receveur de l’artillerie Hugues de Domicin, gentilhomme de bouche de la duchesse de Parme. Voir AGR CC no 26 167 à 26 171.
363 AGR CC no 26 170.
364 AGR CC no 26 167 à 26 171.
365 Voir les nombreuses visites de forteresses du contrôleur de l’artillerie Vincent de Schift dans les premières années du xviie siècle, AGR CP no 560. Dans la même liasse, aux fol. 87r-89v : « inventaire de l’arsenal de Malines » (14/01/1605).
366 Voir les titres de pagador de l’artillerie (Juan de Navarrete) et de contador de l’artillerie (Miguel de Mendivil), AGS EST leg. 535/318 et 327 (12/03/1567).
367 Sur l’armée de Flandres, voir Parker, Geoffrey, The Army of Flanders and the Spanish Road, 1567-1659, op. cit. ; González de León, Fernando, The Road to Rocroi, op. cit.
368 Le contador Mendivil et le pagador Navarrete sont tous deux cités dans AGS EST leg. 560/99 (19/08/1572).
369 Gaspar de Burgos et Juan de Aycaga étaient alors contadores de l’artillerie, tandis que Pedro de Issasi et Pedro de Echavarrías étaient pagadores de l’artillerie, AGS EST leg. 615/141 (année 1598).
370 Entre 1578 et 1590, Alexandre Farnèse reconquit ainsi 95 villes, Parker, Geoffrey, The Army of Flanders and the Spanish Road, 1567-1659, op. cit. p. 7.
371 AGS EST leg. 560/11 (07/11/1574).
372 AGR CP no 563.
373 Pour un exemple, voir ibid. fol. 9.
374 AGR CC no 26 169 (année 1571).
375 AGS EST leg. 535/318 et 327 (12/03/1567).
376 L’office changea de mains une quinzaine de fois entre 1567 et les premières années du xviie siècle, González de León, Fernando, The Road to Rocroi, op. cit. p. 39.
377 Mendoza, Bernardino de, Comentarios de lo sucedido en las guerras de los Paises Baxos desde el año de 1567 hasta el de 1577, op. cit., p. 182. Mendoza prétend que Jacques de la Cressonière n’était que lieutenant d’artillerie, mais, depuis la mort du comte de Meghem en 1572, il occupait la charge de capitaine général de l’artillerie, voir González de León, Fernando, The Road to Rocroi, op. cit. p. 39.
378 Coloma, Carlos, Las guerras de los Estados Baxos, Barcelone, 1627, p. 237.
379 Diegerick, I.L.A., Correspondance de Valentin de Pardieu, seigneur de la Motte (1574-1594), Bruges, Vandecasteele Werbrouck, 1857, p. 58 et 62.
380 Depuis le siège d’Oudewater, le gouverneur Luis de Requesens se plaignit au roi de l’inaptitude de Treslon : AGS EST leg. 564/74 (17/08/1575). Treslon fut par la suite écarté du commandement de l’artillerie : AGS EST leg. 564/137 (19/11/1575).
381 Mendoza, Bernardino de, Comentarios de lo sucedido en las guerras de los Paises Baxos desde el año de 1567 hasta el de 1577, op. cit. p. 160.
382 Koenigsberger, Helmut, Monarchies, States Generals and Parliaments, op. cit., p. 271.
383 Voir les nombreuses lettres des autorités de la ville, Van Doren, P.J., Inventaire des archives de la ville de Malines, quatrième tome : lettres missives, Imprimerie de Van Velsen, 1866, p. 244-343.
384 AGS EST leg. 564/137 (19/11/1575).
385 Diegerick, I.L.A., Correspondance de Valentin de Pardieu, seigneur de la Motte (1574-1594), op. cit. p. 22.
386 Koenigsberger, Helmut, Monarchies, States Generals and Parliaments, op. cit. p. 270.
387 AGS EST leg. 560/99 et 102 (19/08/1574).
388 « Toda esta machina del artillería va muy confusa, por la diversidad de las ordenes particulares que ay hechas en diversos tiempos, y por diversas personas muy contrarias en sí », AGS EST leg. 577/130 (21/10/1578).
389 González de León, Fernando, The Road to Rocroi, op. cit. p. 39. J’ai exclu de cette liste le comte Peter Ernest de Mansfeld pour n’avoir trouvé aucune confirmation dans les documents du fait qu’il ait occupé cette charge.
390 AGS EST leg. 564/137 (19/11/1575).
391 Mendoza, Bernardino de, Comentarios de lo sucedido en las guerras de los Paises Baxos desde el año de 1567 hasta el de 1577, op. cit. p. 54.
392 Van Doren, P.J., Inventaire des archives de la ville de Malines, cinquième tome : lettres missives, Malines, Imprimerie de Van Velsen, 1868. p. 66, 68, 82, 106, 113.
393 Ibid. p. 68 et 127.
394 AGR CP no 560, fol. 135r-138.
395 Bartolomé Sommariva fondit des pièces à Malaga : AGS GYM leg. 82/146 (24/10/1577), puis à Lisbonne : AGS GYM leg. 222/55 (25/03/1588), puis à La Corogne : AGS GYM lib. 70 fol. 21v-22r (03/08/1594).
396 AGR CP no 560 fol. 135r-138. Le capitaine Cristóbal Lechuga y apparaît comme lieutenant d’artillerie en octobre 1595. Devenu capitaine général de l’artillerie à Milan, il publia le Discurso del Capitán Cristoval Lechuga en que trata de la artillería, op. cit. Diego Ufano apparaît quant à lui en tant que gentilhomme de l’artillerie en août 1598. Il fut par la suite capitaine d’artillerie de la citadelle d’Anvers et publia : Tratado de la artillería y uso della, op. cit. Sur ces traités, voir p. 458-462.
397 AGS EST leg. 606/237 (année 1593).
398 González de León, Fernando, The Road to Rocroi, op. cit. p. 39.
399 Diego Ufano, Tratado de la artillería y uso della, op. cit. p. 65.
400 AGR CP no 563.
401 AGR CP no 560 fol. 198-220 (année 1615).
402 Voir p. 104 et R.A. Stradling, The Armada of Flanders, op. cit.
403 Excellents exemples de ces listes dans les années 1599-1608 à Dunkerque et Anvers : AGR CA no 79.
404 Martínez Ruiz, Enrique, La defensa del Imperio, 1500-1700, op. cit.
405 AGI SANTO DOMINGO leg. 99 R.9 N.29 (06/05/1565).
406 Voir la « relación de lo que ha menester que se envie de España para acabar de fabricar y aparejar las seis fragatas », et autres documents de l’année 1588 dans AGI CT leg. 5108 (sans num.).
407 AGS GYM leg. 128/56 et 59 (14/07/1582) et leg. 133/200 (27/07/1582).
408 AGS GYM leg. 604/43 (04/04/1603).
409 AGI PANAMA leg. 1/139 (15/11/1597).
410 AGI MEXICO leg. 20/110 (12/04/1583) et leg. 21/9 (22/04/1587).
411 Quelques exemples : AGI SANTO DOMINGO leg. 99 R.9 N.29 (06/05/1565) et leg. 2280 lib.3, fol. 26 et 123 (année 1571). AGI PANAMA leg. 1/139 (15/11/1597).
412 AGS GYM leg. 125/168 (07/04/1582).
413 Ibid. et AGS GYM leg. 125/169 (10/04/1582) et 186 (23/04/1582).
414 Lettre du commandant de La Havane le 12/09/1588 dans AGI CT leg. 5108 (sans num.).
415 Le facteur Francisco Duarte, à propos des besoins de la Havane en 1582, AGS GYM leg. 133/257. Le président Bernardino de Avellaneda : AGS GYM leg. 564/231 (17/02/1600). Voir aussi la lettre du capitaine général de Panama, Gerónimo Zuazo, AGS GYM leg. 604/43 (04/04/1603).
416 Fernandez Conti, Santiago, Los Consejo de Estado y Guerra en la época de Felipe II (1548-1598), op. cit. p. 134,190 et 197.
417 AGS GYM leg. 88/142 (21/02/1578).
418 Juan Venegas Quijada avait servi de lieutenant du capitaine général de l’artillerie lors de la prise de l’île de Terceira cette même année : AGS GYM leg. 146/269 (juin 1583).
419 AGS GYM leg. 149/215 (13/09/1583).
420 AGS GYM lib. 85 fol. 82 (04/04/1600).
421 AGI MEXICO leg. 21/9 (22/04/1587).
422 Trois galions et deux zabras, AGI MEXICO leg. 21/21 (21/10/1587). Cet escadron se serait ajouté à l’armada del mar del Sur, trop occupée à transporter l’argent du Pérou à Panama pour protéger efficacement la côte pacifique. Voir Perez-Mallaína, Pablo E., Ramírez Bibiano, Torres, La Armada del Mar del Sur, op. cit.
423 AGI MEXICO leg. 21/22 (30/10/1587).
424 Il était auditeur de la Audiencia Real, tribunal principal de Mexico, et publia : García de Palacio, Diego, Dialogos Militares de la formación e información de personas, instrumentos y cosas necessarias para el buen uso de la guerra, Pedro Ocharte, Mexico, 1583. García de Palacio, Diego, Instrucción nauthica, para el buen uso y regimiento de las naos, su traça y govierno conforme a la altura de Mexico, Mexico, Pedro Ocharte, 1587.
425 « Ha salido el doctor Palacio el día siguiente con sus dos naos aunque no tan bien aderezadas de artillería y municiones y gente como conviene, por la poca comodidad que ay en esta tierra de las cosas de su género y particularmente de artillería »,AGI MEXICO leg. 21/21 (21/10/1587). Autre témoignage de l’angoisse du vice-roi dans AGI MEXICO leg. 21/22 (30/10/1587).
426 AGI MEXICO leg. 21/30 (12/10/1587).
427 « Viniendo navegando la nao Santa Ana de Vuestra Magestad junto al puerto de San Lucas, que es en las puntas de California, salieron estos navíos de los cosarios y la tomaron aviendo primero peleado con la gente della algún rato, más como no trayan artillería ni armas se uvieron de rendir y el cosario saqueo todo lo que en ella venía pidiendolo por el registro y, lo que no pudo cargar en sus naos, lo quemo », AGI MEXICO leg. 21/35 (15/01/1588).
428 Fish, Shirley, The Manila-Acapulco Galleons : The Treasure Ships of the Pacific : With an Annotated List of the Transpacific Galleons 1565-1815, Central Milton Keynes, AuthorHouse, 2011, p. 192.
429 AGI MEXICO leg. 21/21 (21/10/1587).
430 AGI MEXICO leg. 22/60 (31/10/1591).
431 Ibid. Sur le métier de Gudiel, voir AGI MEXICO leg. 21/21 (21/10/1587).
432 AGI MEXICO leg. 24/25 (04/10/1599).
433 Ibid.
434 AGI MEXICO leg. 24/65 (01/11/1601).
435 AGI MEXICO leg. 26/27 (20/04/1604).
436 AGI MEXICO leg. 25/37 (28/05/1603).
437 AGI MEXICO leg. 21/50 (30/11/1588) et leg. 23/50 (19/04/1596).
438 Ibid.
439 AGS EST leg. 606/243 (année 1593).
440 AGI CT leg. 5254, N.2, R.1 (26/05/1597). Une biographie de Francisco Sánchez de Moya est consultable p. 227.
441 Voir les documents accompagnant la correspondance du vice-roi, AGI MEXICO leg. 24/25 (04/10/1599).
442 Machado de Castro, Tiago, « Bombardeiros na Índia », p. 82, 86, 96. Sur la fonderie de Diu, voir la remarque de Diego Ufano sur la gigantesque pièce baptisée « el tiro de Diu » à Lisbonne : Ufano, Diego, Tratado de la artillería y uso della, op. cit. p. 39.
443 Machado de Castro, Tiago, « Bombardeiros na Índia », op. cit. p. 54-60.
444 AGS GYM leg. 688/34 (07/06/1608).
445 En témoignent les nombreuses plaintes des artilleurs de ces galions auprès du conseil de guerre, AGS GYM leg. 397/96 (05/02/1593), 124 (16/03/1593) et leg. 389/212 (01/04/1593), 238 (27/05/1593) et 253 (09/05/1593).
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- ISBN: 978-2-406-11556-4
- EAN: 9782406115564
- ISSN: 2264-458X
- DOI: 10.48611/isbn.978-2-406-11556-4.p.0115
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 08-11-2021
- Language: French