Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Le xixe siècle, lecteur du xvie siècle
- Pages : 665 à 672
- Collection : Rencontres, n° 473
- Série : Devenir de la Renaissance française et européenne, n° 3
Résumés
Jean-Charles Monferran et Hélène Védrine, « Préface. Le xixe siècle, lecteur du xvie siècle »
Cette préface présente les objectifs de l’ouvrage : permettre une meilleure compréhension du xixe siècle, en examinant comment celui-ci a redécouvert le xvie siècle, lu, édité, commenté, récrit, mais aussi actualisé les auteurs de la Renaissance française ; faire le pari que ce détour par les lectures, esthétiques ou politiques, du xixe siècle n’est pas sans intérêt pour la compréhension du xvie siècle lui-même et de ses œuvres.
Michel Jeanneret, « Lunatiques d’autrefois, mes semblables, mes frères »
Le xvie siècle est perçu comme un âge de la démesure et de l’exubérance, permettant au xixe siècle d’exprimer sa nostalgie pour une culture excentrique, libre et libertine, qui opère comme un programme et un catalyseur. De la folie comme libération et énergie, on bascule cependant dans la folie comme altération morbide de la réalité, nourrissant les préoccupations de la psychiatrie du xixe et l’imaginaire d’auteurs comme Nerval ou Nodier.
Michel Magnien, « La Bibliothèque elzevirienne (1853-1898) et la redécouverte de la littérature de la Renaissance au xixe siècle en France »
Parmi les nombreuses collections bibliophiliques qui ont permis la redécouverte de la littérature de la Renaissance dans la seconde moitié du xixe siècle, il faut accorder une attention toute particulière à la Bibliothèque elzevirienne fondée par P. Jannet en 1853, en raison de sa durée et de la qualité matérielle et scientifique des 176 volumes qui la constituent. Il s’agira donc de souligner l’audace visionnaire de son fondateur, puis d’essayer de déterminer les raisons de sa réputation et de son succès.
666Marine Le Bail, « La bibliophilie aux couleurs de la Renaissance. Le xvie siècle retrouvé de Charles Nodier et Paul Lacroix »
Les bibliophiles occupent une place singulière au sein du vaste mouvement d’érudition qui s’attacha, dès le début du xixe siècle, à l’étude de la langue et de l’histoire du Moyen Âge et de la Renaissance. Par l’attention portée à la matérialité des ouvrages de cette période, manuscrits ou imprimés, des collectionneurs comme Nodier ou Lacroix contribuèrent à imposer l’idée d’une voie d’accès possible à un xvie siècle « authentique », miraculeusement préservé à travers ses vestiges documentaires.
Guillaume Berthon, « De l’archaïsme au travestissement. Le goût romantique et décadent pour les livres des débuts de l’imprimerie »
L’article étudie la façon dont les imprimeurs du xixe siècle se sont progressivement emparés des codes typographiques des débuts de l’imprimerie, mettant fin à l’hégémonie des Didot. Les Perrin et Jannet les imposent d’abord pour l’édition des textes anciens avant que Poulet-Malassis et Lemerre ne tentent d’imprimer des auteurs modernes en habit d’autrefois. L’analyse des rêveries typographiques de Huysmans montre enfin comment les hommes du xixe ont réinterprété ces codes de façon ludique.
Raphaël Cappellen et Christelle Girard, « Les renaissances éditoriales de Rabelais au xixe siècle »
La diversité des manières d’éditer Rabelais est remarquable tout au long du xixe siècle. Cet article propose un panorama de l’histoire éditoriale de Rabelais au xixe siècle en insistant tout particulièrement sur les premières éditions des années 1820 et sur la profusion d’éditions de la seconde moitié du siècle. Sont en particulier abordées deux questions qui reviennent constamment dans le discours des éditeurs, la langue de Rabelais et son obscénité.
Michel Magnien, « Pamphlet d’actualité ou document historique ? Le sort éditorial du Discours de la Servitude volontaire au long du xixe siècle »
Depuis l’édition Coste des Essais, la diffusion du DSV s’était faite dans l’ombre de Montaigne. La Révolution avait restitué son autonomie à ce texte dérangeant. Durant le xixe siècle, différents adversaires de l’ordre établi l’ont 667brandi comme étendard de la liberté. Sa diffusion connaît alors un double régime : des penseurs plus ou moins révolutionnaires lui redonnent sa dimension pamphlétaire, tandis que les montaignistes en font un objet historique, neutralisé par la science philologique.
Martine Jey, « Montaigne. Regards croisés de René Doumic, de Gustave Lanson et de Ferdinand Brunetière »
L’institution scolaire reconnaît tardivement un « classique » en Montaigne. Par l’examen de trois histoires de la littérature scolaire, celles de René Doumic, de Gustave Lanson et de Ferdinand Brunetière, cet article analyse la manière dont s’opère cette reconnaissance institutionnelle, quelles réticences elle rencontre et quel rôle on attribue à Montaigne dans l’histoire nationale en cette fin de siècle.
Christophe Imbert, « La grâce d’une Italie renaissante et chrétienne. Visions du romantisme français »
Les poèmes d’Auguste Barbier, Auguste Brizeux et Antoni Deschamps font de la Renaissance italienne une figure tutélaire du romantisme français. La redécouverte du tombeau de Raphaël à Rome éclaire le moment de 1830 qui entre non seulement en communication avec le souffle risorgimental de l’Italie moderne, mais encore avec une Renaissance historique qui s’actualise sous la forme d’un idéalisme chrétien enraciné dans le siècle de Léon X, et qui promeut esthétiquement une sorte de venustà baptisée.
Bernard Vouilloux, « Grotesques et arabesques entre intersécularité et interculturalité »
Le xixe siècle donne le nom d’« arabesques » à ce que le xvie siècle nommait des « grotesques », tandis qu’à l’époque de Montaigne, les deux termes, employés comme substantifs ou comme adjectifs, étaient pris dans un sens différent de celui qu’ils auront pour les contemporains de Nodier, Hugo ou Gautier. Les chemins qui mènent d’une époque à l’autre sont tortueux, et nombreuses les voies de traverse qui en complexifient le tracé, pour ne rien dire des sentiers qui s’amorcent en amont.
668André Guyaux, « Sainte-Beuve a-t-il eu l’intuition du baroque ? »
Dans tout ce qu’il lit, y compris la littérature de son siècle, Sainte-Beuve guette les signes affleurant de l’anticlassicisme. Ses préjugés l’empêchent d’apprécier Jean de Sponde ou Théophile de Viau à leur juste valeur, comme ils l’empêcheront de comprendre Baudelaire.
Emmanuel Buron, « “Renouvelons aussi / Toute vieille pensée”. L’usage des poèmes du xvie siècle par les poètes romantiques (Hugo, Gautier) »
Cet article examine l’incidence de la poésie du xvie siècle sur quelques poètes de 1830. Les épigraphes renaissantes des Odes et Ballades permettent à Hugo de dégager certains aspects de sa poétique tandis que celles d’Albertus de Gautier participent d’une pratique de l’imitation différentielle. Ainsi, l’usage de la terza rima dans La Comédie de la mort renouvelle la pratique de Tyard dans les Erreurs amoureuses. Les poèmes du xvie siècle fournissent aussi des modèles d’un discours passionné.
Christophe Dupraz, « Le xixe siècle, auditeur du xvie siècle. La poésie ancienne dans la mélodie française du xixe siècle »
La poésie ancienne, particulièrement la poésie du xvie siècle, a largement nourri l’inspiration des musiciens français du xixe siècle : un important corpus de mélodies en porte témoignage. Notre étude se veut une première investigation quantitative et qualitative de l’ensemble de ce corpus.
Hugues Marchal, « La poésie scientifique renaissante au xixe siècle. Histoire d’un refoulement »
La réhabilitation romantique de la poésie renaissante ne s’est pas étendu à ce qu’Albert-Marie Schmidt allait plus tard nommer la poésie scientifique du xvie siècle. Mais si Sainte-Beuve, en particulier, a refusé de réhabiliter un auteur comme Du Bartas, n’était-ce pas d’abord pour éviter de concéder un quelconque avantage à des « classiques » nostalgiques de la poésie de l’Empire, et en particulier de Delille, lui-même auteur de poèmes scientifiques ?
669Michel Jourde, « Jacques Peletier, poéticien du symbolisme ? La Vogue, août-décembre 1886 »
Entre août et décembre 1886, la revue symboliste La Vogue, dirigée par G. Kahn, publie la traduction de l’Art poétique d’Horace par J. Peletier suivie de l’Art poëtique de ce dernier. L’article étudie les conditions de cette publication (due à A. Dehodencq), la forme à la fois brute et altérée donnée au texte de Peletier, la place de ce texte dans la revue, sa réception et ce que cette publication apporte à notre compréhension de la poétique de Peletier et de sa place dans l’histoire de la poétique.
Valentina Bisconti, « La construction de la diachronie au xixe siècle. Quels usages de la langue du xvie siècle ? »
L’article analyse les stratégies d’appropriation de la langue du xvie siècle par les descripteurs du xixe. Langue d’anticipation ou de transition, la langue du xvie siècle est un miroir : les usages mal-fondés de la modernité y trouvent un correctif, les bons usages leur histoire. Le travail descriptif opère une conversion : les matériaux imparfaits des grammaires du xvie siècle deviennent le fondement empirique de la linguistique du xixe.
Anne-Pascale Pouey-Mounou, « Une œuvre en représentation. Le Capitaine Fracasse de Théophile Gautier et Rabelais »
Théophile Gautier s’inspire de la geste rabelaisienne dans Le Capitaine Fracasse pour célébrer le romantisme et la vie de la littérature même. L’hypotexte rabelaisien contribue à construire une image romantique de la Renaissance, anti-classique et anti-bourgeoise, informe ironiquement la fabrique des personnages et leurs relations en miroir, et nourrit une recherche de connivence fondée sur un encanaillement circonscrit de la langue dans des sociolectes burlesques de comédiens et de brigands.
Olivier Bivort, « La Renaissance de l’École romane »
Transfuge du symbolisme et en rupture avec ce mouvement, Jean Moréas publie Le Pèlerin passionné (1891), recueil où il développe, parfois jusqu’au pastiche, un programme poétique fondé sur un retour à la langue « d’avant la réforme de Malherbe ». Groupés autour de lui, les membres de l’« École 670romane » vont pousser son entreprise dans le sens d’un nationalisme réactionnaire où le xvie siècle est appelé à restaurer le « génie de la langue » et de la « race », dénaturé par le romantisme.
Daniel Maira, « “Une coquetterie magnifique”. La révolution impossible de la Renaissance d’après Alphonse Esquiros »
Pour son roman Le Magicien (1838) qui se déroule à la cour des derniers Valois, Esquiros s’inspire de Notre-Dame de Paris. Ce roman a sans doute permis à Michelet de façonner son idée de Renaissance, car bien avant les cours qu’il donnera au Collège de France, Esquiros s’était intéressé à l’âme de la Renaissance, qui devient pour lui une époque du progrès de l’esprit et des libertés du peuple, de la recherche d’infini, et encore d’un retour à une nature qui retrouve la sensualité païenne.
Stéphane Arthur, « Le xvie siècle à l’épreuve de la scène romantique »
Avec la trilogie que Vitet consacre aux guerres de Religion, les scènes historiques contribuent à mettre à la mode la représentation du xvie siècle et préparent la révolution romantique sur scène. En effet, les dramaturges de la période romantique puisent volontiers leurs sujets dans le siècle de François Ier et d’Henri III, pour des raisons esthétiques, puisque c’est le temps d’avant l’absolutisme, et politiques, le temps troublé des guerres de Religion préfigurant celui des révolutions.
Sylvain Ledda, « Assassinats et guerres de Religion sur la scène romantique »
Les guerres de Religion exercent une fascination sur les dramaturges romantiques. Représenter cette période trouble de l’histoire consiste souvent à mettre en scène l’assassinat politique. Exactions et crimes ponctuent ainsi les drames dont l’action se déroule dans la seconde moitié du xvie siècle. Cet article s’intéresse à la signification idéologique des crimes politiques du xvie siècle à l’âge romantique.
671Guy Ducrey, « Le xvie siècle à l’opéra : la politique et le rêve. Sur La Reine Fiammette de Catulle Mendès »
Parmi les très nombreux opéras du xixe siècle qui prennent le xvie pour cadre, La Reine Fiammette de Xavier Leroux (1903), adapté d’un conte dramatique composé par Catulle Mendès, occupe une place singulière. Cette bluette onirique à décors italiens se renverse soudain en tragédie des guerres de Religion et de l’arbitraire juridique. À ce titre, elle déchaîna les passions dans une France déchirée par l’affaire Dreyfus, et pour laquelle le xvie siècle servit soudain de contre-modèle effrayant.
Frank Lestringant, « Agrippa d’Aubigné au xixe siècle. Du romantisme à l’affaire Dreyfus »
Ce parcours de la réception d’Agrippa d’Aubigné commence par Emmanuel Viollet-le-Duc, l’« inventeur », sous la Restauration, de d’Aubigné poète, se poursuit par Baudelaire, Sainte-Beuve, Isidore de Gaillon et Saint-Marc Girardin, et s’achève, au seuil du xxe siècle, par Paul Stapfer, qui établit en 1900 la filiation entre Agrippa d’Aubigné et Victor Hugo. Les Tragiques, d’une actualité brûlante au temps de l’affaire Dreyfus, seraient préfigurés par Les Châtiments.
Bertrand Marquer, « “Rappelez-vous le tableau d’André Vésale”. Lectures de l’humanisme médical au xixe siècle »
Cet article interroge les fonctions du souvenir de Vésale au xixe siècle. Figure notoire de l’humanisme médical, le « prince des anatomistes » est tour à tour présenté comme un précurseur de Bichat, utilisé comme archétype romantique du savant « frénétique », ou célébré comme un modèle de fusion entre l’art et la science. Mais au-delà de la diversité de ces « rappels », cet article entend rendre compte du pouvoir imageant d’un « tableau », le célèbre frontispice du De humani corporis fabrica.
Christine Bénévent, « Érasme au xixe siècle : premiers aperçus »
Le xixe siècle a fait d’Érasme un libre-penseur. Cette étude tente de mettre en lumière les mécanismes qui ont rendu recevable une telle image : celle-ci occulte l’immense pan théologique de son œuvre, comme elle conduit à négliger 672une importante production scolaire contemporaine, qui faisait d’Érasme un classique latin. C’est peut-être dans le retrait progressif du latin et la revendication simultanée d’une identité nationale incarnée par la langue que s’est opérée la réduction d’Érasme.
Paule Petitier, « Rabelais révolutionné. Les ressorts politiques d’une canonisation littéraire »
Au cours du xixe siècle, Rabelais est devenu un auteur du nouveau canon littéraire, consacré sous la Troisième République. Or, cette réévaluation d’un auteur souvent ostracisé pour son obscénité a tenu à une lecture idéologique de la part du camp libéral (au sens large). À la faveur de cette interprétation postrévolutionnaire, des traits plus ou moins durables de la réception de Rabelais se sont cristallisés : le penseur de l’éducation, le créateur du français, l’auteur populaire et progressiste…
Stéphane Zékian, « Rabelais sous la Coupole »
Dans les premières années de la Troisième République, l’Académie française inscrit François Rabelais au programme de son prix d’éloquence. Cette canonisation n’est que l’aboutissement tardif d’un processus long et tortueux. L’article s’attache aux principales étapes ainsi qu’aux modalités de cette reconnaissance officielle. Il expose surtout les conditions à remplir pour que Rabelais puisse entrer sous la Coupole.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-10176-5
- EAN : 9782406101765
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10176-5.p.0665
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 14/12/2020
- Langue : Français