Avant-texte
- Publication type: Book chapter
- Book: Le Nouveau Panurge avec sa navigation en l’Isle Imaginaire
- Pages: 11 to 46
- Collection: Seventeenth-Century Library, n° 27
- Series: Voyages réels et voyages imaginaires, n° 1
Avant-texte
Jacques Boulenger, un des premiers à s’être intéressé au Nouveau Panurge, émet à propos de cette œuvre un jugement qui tient de la boutade : « C’est un pamphlet catholique qui mériterait […] d’être protestant1 ». Les chercheurs qui ont suivi ses traces ne se montrent guère plus élogieux à l’endroit du texte, qui était resté longtemps dans l’oubli. Le récit hybride, situé à mi-chemin entre le voyage utopique et le dialogue lucianesque, a pourtant connu trois éditions successives entre 1615 et 1617. À défaut d’avoir produit un chef-d’œuvre, l’auteur de cette Ménippée a su composer un livre de circonstance, qui n’est pas sans qualités littéraires. À ce titre, l’œuvre mérite pleinement une édition critique. En plus de comporter des passages comiques, le récit nous renseigne sur les différends entre huguenots et champions de la Contre-Réforme, qui s’affrontent dans le Dauphiné et le midi de la France.
Le contexte
Dans la France du renouveau tridentin, le Dauphiné et le Languedoc constituaient des bastions du protestantisme2. Valence, Die, Montauban, Montélimar, Orange, Nîmes et Montpellier, villes à majorité protestante, jouissent, à la fin du xviie siècle, d’un rayonnement culturel qui fait l’envie des catholiques. Die, surnommée la « petite Genève », de même qu’Orange, Montauban et Nîmes possèdent des académies réputées et des presses où se 12publient des livres de controverse3. La proclamation de l’édit de Nantes en 1598, loin d’apaiser complètement les tensions en permettant la cohabitation pacifique des membres des deux confessions, se traduit par une guerre des imprimés, avivée par l’installation des Jésuites à Nîmes en 1596 et à Die en 1600. L’ascendant de ces missionnaires de la Compagnie de Jésus, considérés comme « le fer de lance de la contre-attaque catholique4 » aux idées de la Réforme, gagne du terrain et suscite de l’inquiétude parmi les ministres. Et pour cause. Pierre Coton, redoutable orateur aux yeux des pasteurs, attire un vaste auditoire à ses prêches lors de ses excursions à Avignon, à Nîmes, à Grenoble et à Marseille. Il réussira, grâce à ses talents de prédicateur, à convertir plusieurs huguenots, dont Guillaume Reboul, secrétaire du duc de Bouillon, en 1596. L’apostasie de Reboul, perçu comme le porte-plume des Jésuites, aura d’ailleurs un certain retentissement littéraire avec la publication de plusieurs pamphlets, dont Les Salmonées qui portent sa signature et La Cabale des Reformez, publiée sous les initiales d’un certain I. D. C., mais que la plupart des historiens lui attribuent. La parution de ce dernier pamphlet attaquant avec virulence les membres du consistoire de Nîmes – et en particulier le jeune pasteur Jean de Falguerolles – porte à son comble la tension entre huguenots et catholiques du pays d’Oc. Après 1598, le climat est si hostile que les régions protestantes sont davantage perçues par les missionnaires jésuites comme un champ de bataille que comme une terre d’apostolat5.
À la suite du départ de Pierre Coton pour la maison professe de Paris, Jean Arnoux et d’autres membres de la Compagnie prendront la relève et assumeront la responsabilité de ramener dans le giron de l’Église romaine les huguenots les plus endurcis. Les prédications se muent en des joutes verbales enflammées, se prolongeant dans de nombreux opuscules clandestins, plus ou moins commandités par les membres de la Compagnie. Comme le rappelle à juste titre Benjamin Dupas, les « jésuites, rétablis en France depuis 1603, et désireux d’élargir leur influence, laissaient, 13semble-t-il, une grande latitude à leurs écrivains, quitte à désavouer après coup tel ou tel ouvrage6 ». On ne peut qu’être surpris de la violence de certains écrits signés de la main des disciples d’Ignace de Loyola. Pierre Labbe, en introduction à son édition critique de La Cabale des Reformez, qu’il prête sans preuve véritable à la plume de Pierre Coton, évoque le passé de polémiste du futur confesseur du roi7. Certains des libelles attribués au jésuite et directeur spirituel d’Henri IV, par la crudité et la verdeur des propos, pourraient rivaliser avec l’œuvre de Rabelais8. Déjà houleuse, la cohabitation entre ministres huguenots et missionnaires de la Compagnie se détériore avec l’assassinat d’Henri IV en 1610, qui alimente les sentiments anti-jésuites dans l’opinion publique. Le régicide perpétré par Ravaillac attise en effet de vieilles rancœurs et déchaîne les passions dans les provinces méridionales, où la Réforme compte le plus d’adeptes9. Plusieurs pasteurs imputaient la mort du souverain à l’influence des Jésuites et ont amorcé en 1610, avec l’Anti-Coton, où est prouvé que les Jésuites sont coupables du parricide d’Henri IV, attribué à Pierre du Coignet, une cabale contre la Société de Jésus. Pierre Coton riposte quelques mois plus tard avec la Lettre declaratoire, révélant un talent de pamphlétaire, puis d’autres prendront la relève. Les factums se succèdent alors et les imprimeries locales tournent à plein régime. Conscients de la force de l’arme qu’est la polémique, les Jésuites ouvrent des chaires de controverse dans plusieurs établissements d’enseignement. Parallèlement aux débats, publiés en grand nombre sous forme d’actes de conférences publiques, se déclare une guerre de pamphlets destinés à des lettrés rompus à la polémique théologique10.
14Les enjeux du pamphlet
Dans ce contexte de tensions religieuses, l’excommunication du pasteur de Nîmes, Jérémie Ferrier, survenue en 1613, et celles de quelques autres apostats viennent encore échauffer les esprits11. Le Nouveau Panurge fait non seulement écho à ces hostilités, mais aussi à plusieurs événements politiques et, entre autres, aux synodes de Privas, de Die et du Bas-Languedoc où plusieurs ministres ont été censurés pour atteinte aux bonnes mœurs. Pensons notamment à François Murat12, Jacques Crespe, Siméon Codur (ou Codurc) et Clément Dauphin13 dont il est question dans Le Nouveau Panurge. Ces échos aux actes des synodes traduisent le souffle et l’esprit revanchards qui animent le pamphlétaire14 aux tendances ultra-catholiques.
La promenade de Panurge dans les sept villes de l’Enfer avec le truchement Erminevade laisse percevoir les égarements des ministres de la Réforme. Ainsi, dans la ville d’Orgueilleuse au quartier d’Hypocrisie, Panurge découvre-t-il des cuves destinées à tourmenter les hypocrites. Outre les dames imbues de leurs corps, certains ministres, dont Jacques 15Repusseau, y auront une place assignée. Ce pasteur, nommé par dérision « vipereau cassé », « pourceau », « pur veau15 », élira domicile dans une des grandes cuves tapissées de lames, où il est attendu. À propos de cette cuve « fraischement fabriquée », Panurge se prend à considérer les trois cercles qui en ornent la façade externe sur laquelle on trouve les trois mots « Hypocrisie, Inobedience, et Obstination16 » ; la présence de ces termes signifie, au dire d’Erminevade, que le futur damné a rompu ses vœux et désobéi à son ordre :
[Cela] veut dire qu’il est un grand hypocrite, qui recerche sa gloire, qui se mesprise pour estre d’avantage loüé : qui recerche l’honneur du monde par richesses et autrement. Et ce mot Inobedience, marque qu’il a mesprisé ses prelats, le Celibat et le merite d’Obedience. […] Et l’autre mot Obstination, c’est qu’il a voulu quitter Dieu pour aller au diable17.
Dans la ville voisine d’Avarice, Panurge rencontre le ministre Sébastien de Julien, surnommé Pinatelier et condamné à forger sans relâche des pinatelles brûlantes « à mains nues18 ». Toujours dans cette ville, le célèbre disciple de Pantagruel reconnaît Jean Valeton, auteur du Resveille-matin des apostats sur la révolte de Jacques Illaire en la réfutation des escrits publiés au nom d’icelui (s.l., s.n., 1608), qui attaque de manière virulente le père Coton et Jacques d’Illaire. L’apparition du pasteur de Privas, Valeton, aux Enfers a de quoi surprendre, puisqu’il était toujours en exercice au moment de la composition du Nouveau Panurge. Mais l’auteur ne s’embarrasse pas de telles inconséquences, faisant cohabiter les vivants et les morts dans ses Enfers allégoriques.
La ville de Luxure réserve au protagoniste une surprise non moins grande : Siméon Codur (ou Codurc) y est particulièrement tourmenté pour avoir en l’autre monde commis l’adultère avec la femme de Laurent Brunier. Jean-Antoine Cante et Clément Dauphin y sont semblablement malmenés en raison de leurs mauvaises mœurs. Au quartier des Sodomites, le narrateur flanqué de son truchement découvre Théodore de Bèze et « son mignon Audibert19 », qui y ont élu domicile, ainsi que Jean de Falguerolles et « [t]ant de Moines deffroqués, tant de Prestres 16reniés, tant d’Apostats20 ». Dans ces charges contre les chefs de la Réforme se reconnaît la stratégie évangélique des Jésuites qui visent d’abord les leaders en pensant du même coup rallier leurs fidèles. Il est évident que l’auteur cherche à discréditer les pasteurs pour en détourner les ouailles et, ce faisant, il tombe dans la polémique facile lorsqu’il accuse de libertinage les théologiens de la Réforme. Chaque ville parcourue est le théâtre de nouvelles révélations scabreuses et de nouveaux griefs contre les ministres. Dans la ville d’Envie, les âmes envieuses sont tourmentées à l’aide d’un fouet par les ministres. Le narrateur y croise le ministre André Caille, conduit par plusieurs diablotins, alors qu’il vient de rendre l’âme. Le moment fort du récit coïncide avec la rencontre de Calvin et de Luther, enchaînés l’un à l’autre et se mangeant comme de vilains anthropophages dans la chambre des controverses. Suit un débat théologique entre Panurge et les deux hérésiarques, représentés comme à court d’arguments. Bien qu’il n’épargne aucun pasteur, l’auteur du Nouveau Panurge se défend bien de faire preuve de malveillance. Panurge invite d’ailleurs son ami Créophile à pardonner à son prochain21 et souhaite que Repusseau s’amende pour éviter le triste sort qui l’attend dans le quartier d’Hypocrisie de la ville Orgueilleuse. Du reste, le pamphlétaire soutient, dans son épître aux ministres du Dauphiné, avoir été inspiré par « l’amour de [s]on prochain22 » et vouloir le salut de ses compatriotes égarés sur les traces de Calvin, qui mènent tout droit aux Enfers. Il exhorte non sans ironie les ministres dauphinois à lire un ou deux chapitres de son œuvre lors de leurs prêches, pour montrer aux sectateurs les dangers de l’hérésie23. Dans une autre des pièces liminaires, un des apologistes de l’œuvre en réitère l’objectif apostolique :
Je croy que les freres en Christ
Ayant fueilleté ton escrit
Changeront de mœurs, et de vie :
La peine, et les torments divers,
17Que tu leur descris des enfers,
Leur en doit mettre au cœur l’envie24.
Panurge doit fréquemment modérer la vindicte et la hargne de ses compagnons qui souhaitent mettre « à feu25 » les établissements des huguenots et chasser ceux-ci du royaume de France. Au terme de sa visite des Enfers, le disciple de Pantagruel propose une solution plus pacifique pour calmer les tensions religieuses en France :
Ne seroit-il pas meilleur les gaigner par douceur, et par ce moyen tascher de sauver leurs ames les convertissant ? Ne sçavez vous pas que Plus gaudent angeli super uno peccatore pœnitentiam agente, quam super nonaginta novem justi qui non indigent pœnitentia ? Qu’estimeriez-vous le proffit que feroit celuy là qui sauveroit une Ame des feux d’Enfer, et d’entre les pates de Satan, et qui seroit la cause que ceste Ame recevroit par la main des Anges, la couronne de gloire26 ?
Panurge affirme vouloir devenir le « tres-intime amy27 » des ministres du Dauphiné, si l’on en croit son épître liminaire. Ce souhait est-il purement ironique ? Il est permis de douter de la sincérité de ce vœu pieux, à la lecture d’un ouvrage aussi farouchement anti-protestant.
Quoi qu’il en soit, Le Nouveau Panurge est particulièrement féroce envers les hérésiarques Calvin et Luther, accablés sous une pluie d’injures et représentés comme des anthropophages. Leur métamorphose en cannibales constitue d’évidence une riposte aux griefs des protestants contre le sacrement de l’eucharistie. L’auteur dit souhaiter que les tourments des deux théologiens aux Enfers soient divulgués au public et deviennent ainsi un incitatif à la conversion de leurs adeptes :
Advertissez les de la peyne que vous, et tous les vostres qui sont çà bas souffrent : à fin qu’ils quittent ceste reformation nouvelle28.
Et le voyage est le prétexte de nouvelles charges contre les ministres rencontrés. Non loin de la ville d’Ire au quartier de Blasphème, Panurge révèle à ses amis avoir repéré les logis d’André Guérin et de Clément 18Dragon. Dans la ville de Gourmandise, on ne se surprendra pas de trouver la place réservée au ventripotent Daniel Chamier, surnommé « la Chimere29 » ou « Chimera30 ». La ville de Paresse accueillera les âmes des pasteurs Peyrol et Ferrier à leur décès, en raison de leur inconsistance face à la vérité31. Dans ce pays d’outre-tombe, on distingue plusieurs générations de pasteurs, ceux qui ont fait l’objet d’une dégradation récente au Synode de Privas, mais aussi d’autres, comme Jean de Falguerolles et Sébastien de Julien, que le pamphlétaire ne connaissait que par le biais de La Cabale des Reformez et des écrits de Reboul, cibles de nombreux brocards. En effet, dans l’un et l’autre cas, le narrateur reprend les charges réunies contre eux et les surnoms diffusés dans La Cabale des Reformez.
D’autres rencontres non moins étonnantes attendent le voyageur. Dans la ville d’Envie, il découvre le logis de François Ravaillac, désigné de manière périphrastique comme le « sacrilege Engoulmoisin32 », demeure qu’on aurait spontanément placée dans la ville d’Homicide. Dans la vallée de Misère, Panurge et son guide Erminevade apprennent qu’un personnage d’importance, « grand plaideur33 », y est attendu. Ce futur damné, désigné de manière cryptée sous le pseudonyme de Silopie, n’est vraisemblablement nul autre que Pierre du Moulin, rédacteur d’un traité, Les Eaux de Siloé, pour éteindre le feu du purgatoire, qui s’inscrit en faux contre le traité Le Torrent de feu auquel plusieurs jésuites de Tournon auraient collaboré. Le pasteur était également l’adjoint modérateur au Synode de Privas en 1612, indice qui conforte la thèse de l’origine dauphinoise de l’auteur.
C’est en vérité un bien curieux Enfer que celui que visite Panurge, puisqu’il comporte non seulement sept villes calquées sur les cercles de l’Enfer dantesque évoquant les sept péchés capitaux, mais aussi une ville des Universités et des écoles réformées. D’aucuns se surprendront de voir Panurge visiter, au terme de son odyssée, la ville des Universités où se 19tient « un grand colloque des reformés34 » et dans laquelle se trouvent aussi des « escholles pretenduës35 ». Quel besoin les âmes damnées auraient-elles de s’instruire ? La cohésion du tableau se ressent quelque peu de cette incursion dans le monde des collèges. Mais les impératifs de la satire et surtout la dénonciation de l’enseignement des huguenots autorisent sans doute le pamphlétaire, probablement maître de collège lui-même, à railler ses rivaux. En effet, on ne reconnaît que trop bien dans les programmes scolaires des élèves du royaume de Pluton une parodie du catéchisme des maîtres calvinistes qui enseignent « que Dieu est injuste d’avoir donné des commandements aux hommes36 ». Dans la classe supérieure, on professe le libertinage : « On apprent [aux écoliers] que la vraye et legitime Eglise ne peut estre veüe plainement à l’œil, qu’on se doit laisser aller à ses volontés, soit bien, soit mal, n’importe ; mais qu’on se souvienne de la predestination37 ». Dans la troisième classe, ce sont les aspirants pasteurs qui sont le plus malmenés, comme quoi la cible principale du pamphlétaire est ceux qui exercent le même métier que lui38. Ce chapitre, qui se situe presque en porte-à-faux par rapport à l’imagerie traditionnelle des Enfers, confirme notre hypothèse voulant que le pamphlétaire soit un enseignant affilié à la Compagnie de Jésus. Le passage permet d’attaquer des points de la doctrine de Calvin et les prêches de ceux qui y adhèrent, criant, tempêtant, blasphémant « mille execrations contre toute la Papauté39 » du haut de leurs « chaires Ministrales40 ». On aura décelé derrière cette caricature l’implication personnelle de l’auteur, probablement lui aussi engagé dans la bataille apostolique du Dauphiné.
Riposte aux pamphlets anti-catholiques, tels la Satyre Menippée (1593) et peut-être L’Enfer41, un opuscule anonyme que Charles Read attribue sans preuve réelle à Agrippa d’Aubigné, Le Nouveau Panurge use des 20mêmes armes que les libelles huguenots. Comme l’auteur anonyme de L’Enfer, qui introduit, sous les cieux infernaux, des ecclésiastiques et autres notables célèbres, Panurge, prête-nom de l’auteur, retrouve au royaume de Pluton non seulement les pasteurs défunts, mais encore les places réservées à certains prêcheurs vivants dans l’une des sept villes infernales. On note une certaine confusion temporelle dans la description des Enfers, où le pamphlétaire place certains pasteurs toujours en vie. Valeton passe de manière anachronique de la sphère des vivants au royaume des morts. Le pamphlet, davantage qu’une volonté d’apostolat, laisse transparaître une hostilité exacerbée par une soif de vengeance. On peut penser qu’un proche du parti huguenot comme le renégat Jérémie Ferrier aurait pu servir d’informateur. Qu’ont en commun tous les pasteurs attaqués, si ce n’est d’avoir exercé un ministère dans la région du Languedoc ou du Dauphiné et d’avoir défié des membres de la Compagnie de Jésus ?
Une misogynie virulente
L’animosité contre les huguenots se double d’une misogynie aiguë, qui tombe parfois dans l’obscénité. Les femmes, autre cible de prédilection de l’auteur, sont constamment rabaissées, humiliées ou torturées, quand elles ne deviennent pas la proie des désirs sexuels du narrateur et de ses compagnons. Les premières silhouettes féminines entrevues en la terre des Margajacs, décrites comme des « popines […] nues, belles, et fraisches42 », annoncent déjà le ton gaillard du livre. L’île Imaginaire, utopie bouffonne où les vieillards se rajeunissent, ne compte point de femmes : les Imaginairiens « n’en veulent point pour tout : non plus que les Amazones d’hommes43 ». En revanche, aux Enfers, elles sont, on s’en doute bien, largement représentées, quelle que soit leur confession. Dans la description de la ville Orgueilleuse, la satire des femmes sourd à nouveau : « Ensemble y sont attachées ces dames qui n’ont rien que vanité, qui se fardent le corps, et le parfument de 21senteurs : qui n’ont un liard pour les pauvres, et ont des escus pour faire la piaffe : qui trainent de longues queües ; qui pensent leur beauté estre l’unique miroir des hommes ; qui rehaussent leurs tetins, pour donner et prendre l’avoine44 ». Le pamphlétaire n’est pas moins cynique devant les tourments infligés aux femmes fornicatrices dans la ville de Luxure, où les diables introduisent dans leurs parties intimes du plomb fondu : « il est vray que cela leur sert de remede aux douleurs de la matrice45 », conclut-il non sans cruauté. Les compagnons de Panurge, au récit de son odyssée, témoignent de la même malice envers les femmes, présentées comme le fléau de l’humanité. Taumaste loue même la sagesse des Imaginairiens qui vivent dans le célibat : « la femme […] a apporté toutes sortes de malheurs, tesmoin la boite de Pandore, tesmoin encore vostre histoire. Cor noir, je ne me fieray jamais à beste qui porte deux culs parce que tousjours il y en a un de breneux, et la plus part du temps tous deux46 ». L’un des principaux griefs formulés à l’endroit des pasteurs est leur fréquentation des femmes : « ils ont rompu les chaisnes de ceste chasteté, et prenant la volée sur les murs des Cloistres ; ils se sont jettez en ceste mer de Libertinage, sur un, mais bien fragile vaisseau, qui est la femme47 ».
Un livre publié dans la clandestinité
L’année de la parution du Nouveau Panurge, publié sans date ni achevé d’imprimer, reste conjecturale. Toutefois, plusieurs allusions à l’actualité de l’époque, notamment à l’assassinat d’Henri IV le 14 mai 1610, permettent de situer l’élaboration de l’œuvre pendant la régence de Marie de Médicis et peu de temps avant le mariage du futur Louis XIII avec Anne d’Autriche, qui eut lieu le 18 octobre 161548.
22D’autres incidents survenus dans les églises réformées viennent conforter notre hypothèse. En effet, l’auteur du Nouveau Panurge évoque l’entrée en fonction de Daniel Chamier49, adversaire redoutable de l’Église catholique, nommé pasteur à Montauban à la fin mai 1612, comme le révèlent les Actes du Synode national de Privas50. Il est également question de la destitution de Clément Dauphin qui, lors du Synode de Die en 161351, fut mis à l’amende pour fraude et « publiquement degradé [du titre] de Pasteur52 ». L’auteur mentionne ensuite l’émeute qui chassa le pasteur Jérémie Ferrier de Nîmes deux jours après son excommunication par les membres du Synode du Bas-Languedoc le 14 juillet 161353, ainsi que sa conversion au catholicisme la même année.
À la fin du livre, maître Guillaume, rencontré aux Champs Élysées, fait en outre mention, sans toutefois les nommer, de « quelques Princes, voire mesme ceux dont madite Dame, et bonne amye [la régente] faisoit plus d’estat » qui « s’estoyent esloignez de la Cour, soubs apparence de quelque mescontentement54 ». Le lecteur averti reconnaîtra Henri II de Bourbon, prince de Condé, et les ducs de Nevers, de Bouillon, de Vendôme, de Mayenne et de Longueville qui quittèrent Paris en janvier 1614 après que Marie de Médicis eut supprimé leurs pensions, jugées trop élevées pour les finances du royaume55. Si les ducs de Mayenne et de Longueville 23rentrent à la cour après avoir signé le traité de Sainte-Menehould le 15 mai 1614, les autres princes n’y retournent qu’après la tenue des États généraux le 26 octobre 161456. De toute évidence, les princes n’étaient pas encore revenus à la cour de France au moment où Panurge mettait la dernière main à son manuscrit. Qui plus est, la référence saisonnière à « ce temps d’Esté57 », évoqué quelques lignes plus loin, laisse supposer que la rédaction du Nouveau Panurge fut achevée au cours de l’été 1614.
Mais en quelle année le pamphlet sort-il des limbes de l’imprimerie ? Là encore, il faut se contenter d’approximations. Toutefois, on peut sans risque d’erreur affirmer que la parution de l’édition princeps est postérieure à l’été 1614, mais antérieure à 1616, quand paraît à Lyon une autre édition qui porte la mention « Jouxte la coppie imprimée à la Rochelle ». Si la plupart des bibliographes ont retenu 1615 comme date de publication, il n’est pas impossible que l’achevé d’imprimer remonte à la fin de 161458.
On compte quatre états du texte avec quelques variantes d’un exemplaire à l’autre. L’édition princeps de 1614 ou 1615, parue sans date chez le pseudo-imprimeur Michel Gaillard, est suivie peu de temps après d’un nouveau tirage corrigé, présentant la même mise en page et la même adresse éditoriale, mais dépourvu du frontispice à l’effigie de Panurge59. 24Au verso de la page de titre se trouve ajouté par dérision un « privilège du Roy de l’autre monde ». Puis en 1616, des presses lyonnaises voit le jour une troisième édition, laquelle est reprise et incluse l’année suivante dans un recueil intitulé Nouvelles recreatives, plaisantes, curieuses, et admiratives, d’un renommé vieil-homme nommé Panurge, & du voyage que fist son ame en l’autre monde pendant le rajeunissement de son corps et portant comme lieu d’impression Toulouse, mention trompeuse, comme le confirme l’adresse éditoriale « chez bien-faisant Chasse-Diables ». Celle-ci rappelle l’imprimeur fictif de l’Histoire de la Mappe-Monde Papistique nommé satiriquement « Brisaud Chasse-diables ». Quatre éditions en trois ans, autant dire que l’œuvre eut un retentissement immédiat, et la polémique qui s’ensuivit justifia sans doute qu’un autre auteur anonyme décidât de publier – probablement en 1623, si l’on en croit un des liminaires – une suite aux aventures de Panurge. Il est, à nos yeux, peu probable que la Suitte du Nouveau Panurge, présentée comme la continuation, soit de la même encre, en raison du ton beaucoup plus sérieux et de l’érudition poussée du rédacteur, qui multiplie les références théologiques. Le « second livre » du Nouveau Panurge comporte, en effet, de très nombreuses citations en grec et même quelques-unes en hébreu, ce qui m’incline à croire que l’auteur pourrait être le jésuite Jacques Isnard, professeur au collège de Tournon et auteur du célèbre Mercure reformé, texte satirique émaillé de fragments en langues anciennes. Qui plus est, les marques d’imprimeur, les ornements sur le bandeau, les motifs des lettrines et les caractères de ce dernier pamphlet sont identiques à ceux de la Suitte du Nouveau Panurge. Ces correspondances frappantes suggèrent la même provenance éditoriale et confortent notre hypothèse concernant l’attribution de la deuxième partie du diptyque au savant supérieur de la mission jésuite de Die.
Un pamphlet en quête d’auteur
Que Le Nouveau Panurge parût sous l’anonymat n’a rien pour surprendre, étant donné la virulence des attaques contre les huguenots et les propos crus qui y fourmillent. L’œuvre suscita un intérêt certain, 25ce dont témoignent les multiples conjectures sur son attribution. Elle fut rangée à tort par certains critiques dans le « corpus de Reboul » parce qu’elle se rapportait à la polémique autour de son apostasie. Cette attribution avait bien sûr quelque fondement, puisque, comme dans La Cabale des Reformez60 et quelques autres pamphlets, il y est encore question à plusieurs reprises du renégat nîmois et de ses démêlés avec le pasteur Jean de Falguerolles :
L’Anragé fils d’Æolle y [aux Enfers] estoit fort tourmenté, toutesfois parmy son tourment il ne cessoit de maudire Reboul, parce qu’en se reboultant il avoit aussi reboulté plusieurs autres reboultez61.
Si l’on retrouve dans l’œuvre une véhémence contre les huguenots analogue à celle présente dans le « corpus de Reboul », dont elle reprend d’ailleurs certaines anagrammes et plusieurs jeux de mots, les propos grossiers et les plaisanteries graveleuses qu’elle contient l’en écartent. Qui plus est, des raisons historiques infirment carrément cette hypothèse : le renégat huguenot a été exécuté en 1611, avant la publication du livre autour de 1615. À ces arguments irréfutables s’ajoutent, selon Frank Lestringant, des raisons idéologiques : il paraît difficile d’admettre qu’un ancien adepte de la Réforme pût publier un ouvrage aussi virulent contre les protestants62. Chenoa Marshall, dans son mémoire de maîtrise consacré à l’édition de ce pamphlet, a hasardé comme auteur le nom du jésuite Pierre Coton, qui a converti et fréquenté Guillaume Reboul63. Même si certains indices plaident en faveur de cette attribution, comme la familiarité de l’auteur avec le cas de Reboul et celui de Jérémie Ferrier, tous deux convertis par le célèbre jésuite, d’autres traits paraissent l’invalider. En effet, la grivoiserie et la trivialité de plusieurs passages du Nouveau Panurge semblent infirmer cette hypothèse. Le jésuite, au dire de Daniel Chamier, avec qui il entretenait un commerce 26épistolaire, était peu doué pour les débats : « Cotton fit à ma premiere lettre […] une belle réponse en grec, plus jaloux de déployer son érudition que d’engager une solide controverse64 ». Un autre argument qui rend caduque l’idée de cette attribution est l’allusion moqueuse à Pierre Coton lui-même, que le pamphlétaire reproduit à l’instar des détracteurs du célèbre jésuite : « Fi, fi ; du coton, çà que je bouche mes oreilles65 ». Qui plus est, le caractère graveleux, voire scatologique, du récit et la misogynie féroce du pamphlet ne correspondent pas aux écrits polémiques de celui qui devint le confesseur d’Henri IV.
Toujours dans cette recherche de la paternité de l’œuvre, d’aucuns ont avancé le nom du jésuite Jacques Isnard, chef de la mission de Die à la même époque et futur auteur du Mercure reformé66. Mais pour peu qu’on examine les deux œuvres, trop de variations orthographiques et stylistiques les éloignent67, et une comparaison attentive de ce pamphlet avec Le Nouveau Panurge infirme à nos yeux cette hypothèse. Si l’on admet que le pamphlet fut rédigé entre 1613 et 1614, on pourrait encore avancer comme auteur le nom de Jean Arnoux, célèbre controversiste 27et rédacteur de plusieurs textes satiriques, dont La Confession de foy de Messieurs les Ministres, convaincuë de nullité par leurs propres Bibles, avec la replique à l’escrit concerté, signé et publié par les quatre Ministres de Charenton (Rouen, Osmont, 1617), et qui, en raison de ses talents de pamphlétaire, succéda à Pierre Coton dans les fonctions de confesseur du roi. Le père Arnoux arrive dans la région de Die en 1613, ce qui rend plausible notre supposition, bien qu’aucun document ne permette de la vérifier.
Charles Read établit pour sa part quelque parallèle entre Le Rabelais reformé de François Garasse et Le Nouveau Panurge : « si l’on rapproche Le Nouveau Panurge du Rabelais réformé qui devait paraître quatre ans plus tard (Brusselles (?), 1619) et avoir aussi plusieurs éditions, on est frappé de certaines analogies, et l’on est porté à croire que ceci a inspiré cela, et que l’un et l’autre sont des produits de l’officine loyolatique68 ». En effet, de tous les écrivains jésuites, c’est sans aucun doute l’auteur du Rabelais reformé et du Banquet des sages qui se rapproche le plus, par le style, le ton moqueur et l’imagerie bouffonne, du Nouveau Panurge. Mais la date présumée de composition du Nouveau Panurge (autour de 1615) affaiblit les arguments en faveur de cette attribution. François Garasse, né à Angoulême en 1585, était professeur à Poitiers, puis à Bordeaux avant et pendant la période de rédaction du Nouveau Panurge. Ses premiers écrits, l’Horoscopus Anticotonis (1614) et l’Elixir calvinisticum (1615), furent publiés en latin69. On y retrouve cependant la même fougue dans la lutte contre les huguenots et les mêmes images crues. Toutefois, les cibles diffèrent. Dans Le Rabelais reformé, Garasse s’attaque au ministre Isaac Casaubon qu’il « couvre d’ordures70 ». Il serait cependant étonnant qu’il ait servi de porte-plume aux soldats de la Contre-Réforme pour fustiger les ministres du Dauphiné. De plus, les passages en langue d’oc contenus dans Le Nouveau Panurge suggèrent que son rédacteur était originaire du sud-est de la France, et non de la ville d’Angoulême comme François Garasse.
28Un maître d’école ?
Plusieurs passages du pamphlet laissent supposer que l’auteur était professeur au collège de Tournon ou dans une maison d’enseignement voisine. Dans les Enfers et plus précisément dans la chambre de Pluton, on trouve des « escholes » où professent les diables71 : dans les petites classes où les élèves sont pour la plupart « abecedaires72 », les maîtres diables parodiant les huguenots « les instruis[ent] sur tout que Dieu est injuste d’avoir donné des commandements aux hommes, lesquels sont impossibles d’accomplir, non pas mesme quand ils auroient son sainct Esprit » et « qu’il ne faut croire que deux sacremens en l’Eglise, le Baptesme et la Cene73 ». Comment ne pas reconnaître ici l’un des griefs des catholiques à l’encontre des huguenots ? Le pamphlétaire s’en prend de manière détournée à l’enseignement donné dans les académies protestantes. La ville des Universités, où siègent le roi Pluton, le roi Minos, les fils de Zeus Éaque et Rhadamanthe et « une infinité de surveillans et [de] peres consistoriaux74 », semble une parodie des consistoires huguenots. La troisième et dernière classe est constituée de
ceux qu’on a esleus pour le ministrat, lesquels sont exhortez à pis faire que les autres. Avant que sortir de là on leur apprent tous les points de controverse, et sur tout les advise t’on de se roidir contre l’Eglise Papale, se mocquer de leurs Messes, Sacremens, heures Canoniales, Veilles, Jeusnes, Caresmes, Quatre-temps, Penitences, Disciplines, Processions, et autres ceremonies. Qu’il faut tenir bon que le Pape est l’Antechrist. Qu’en leurs chaires Ministrales ils doivent crier, tonner, tempester, blasphemer mille execrations contre toute la Papauté, et se mocquer de la confession auriculaire75.
On reconnaît dans cet enseignement une allusion au livre De Papa Antechristo, de quo Sacra Scriptura76 (1612) de Jean Sharp, professeur à l’Académie de Die. En outre, les multiples saillies contre les ministres inclinent à penser que le rédacteur était un de leurs adversaires théologiques.
29Si l’on suppose que le pamphlétaire était lui-même un prédicateur jésuite de la région du Dauphiné, peut-on déceler d’autres traces de son identité ? Jacques Boulenger, qui, en véritable pionnier, consacre plusieurs pages à ce pamphlet, pense que l’écrivain aurait déguisé son nom sous l’expression « Parler d’Uranie » dans le quatrain à la louange de Panurge qui clôt le pamphlet :
On n’entend de ta voix qu’une douce harmonie,
Panurge le mignon du Lygien troupeau :
Ce tiltre aussi t’est deu, car du besson coupeau,
Tu beus avec les flots, le Parler d’Uranie77.
Le critique décrypte cette anagramme comme la transposition du nom d’un certain Pierre Arnauld78. Mais qui était ce Pierre Arnauld ? Vraisemblablement un obscur jésuite qui n’a pas laissé d’écrit, si l’on en croit le Dictionnaire des ouvrages anonymes et pseudonymes composés, traduits ou publiés en français et en latin par des religieux de la Compagnie de Jésus, depuis sa fondation jusqu’à nos jours de Carlos Sommervogel79. À défaut de nous fournir des renseignements sur les écrits de ce jésuite, le Catalogus triennalis des Archivum Romanum Societatis Jesu permet de retracer son itinéraire dans la Compagnie. Né en 1561, il fut novice au collège d’Avignon, où il fit probablement la connaissance de Pierre Coton et peut-être même de Guillaume Reboul. Dans une note laissée par son supérieur au collège d’Avignon, il est dit travailleur, mais peu doué pour la littérature et colérique80. Il s’éteignit en 1624 dans ce même collège à l’âge de 63 ans. Peut-on penser que cet humble procureur et administrateur de collège ait pu composer Le Nouveau Panurge ? Il est permis d’en douter. Enfin, s’il servit de prête-plume, comme le suggère l’anagramme finale, il est probable qu’il n’en fut pas le seul rédacteur. Au vrai, Le Nouveau Panurge, comme la Satyre Menippée et probablement La Cabale des Reformez, est une œuvre collective, à laquelle prirent part plusieurs membres de la Société de Jésus. Ce que semble notamment confirmer le lieu présumé de l’édition, soit la ville de Tournon, où l’imprimeur lyonnais Claude Michel avait aménagé des presses et se voyait confier les 30livres des membres de la Compagnie et des professeurs du collège. Du reste, on sait à coup sûr que l’auteur (ou vraisemblablement les auteurs) était lettré, pétri de littérature et latinophone, comme le montrent les citations latines, souvent reproduites de mémoire.
Plusieurs incohérences dans le texte pointent vers une rédaction collective. Alors que la dédicace s’adresse aux ministres du Dauphiné, des allusions visent les ministres du Languedoc. En outre, on retrouve plusieurs morceaux rédigés en occitan, mais là encore des inconséquences transparaissent : alors qu’un quatrain est écrit en parfait provençal81 dans les confidences que monsieur Bonnet fait à Mlle Béguin, d’autres sont écrits dans un parler d’oc fortement gallicisé, ce qui conforte l’idée d’une rédaction à plusieurs mains82. Malgré le masquage de son identité, l’auteur laisse des traces de celle-ci : on peut presque à coup sûr affirmer que l’un des auteurs est Languedocien de naissance ou d’adoption ; l’autre est probablement Dauphinois, comme l’énonce la dédicace. Il est également question de la construction des arènes de Nîmes83, référent comparatif, de l’église Saint-Maurice de Vienne dans le Dauphiné84, de la foire de Beaucaire85. L’on évoque encore le tremblement de terre survenu à Montélimar en 161086, sans parler des attaques lors du Synode de Privas contre plusieurs ministres de la région du Dauphiné ou du Bas-Languedoc. Enfin, avec la satire des écoles réformées87 et les allégations contre les pasteurs de l’Académie de Die, notamment Jean Sharp, on peut supposer que l’un des auteurs était professeur, sans doute au collège de Tournon, établissement rival dans le Vivarais.
Maints passages du pamphlet suggèrent d’ailleurs que l’un des auteurs était fort versé en théologie. En témoigne tout particulièrement la liste des hérésies dressée au chapitre xxiii. On peut penser que les derniers chapitres ont été rédigés par un proche du huguenot repenti Jérémie Ferrier, ex-pasteur de Nîmes, qui connaissait très bien les milieux protestants. La ville des Universités donne lieu à une satire des consistoires 31dont les membres qualifiés de « surveillans et peres consistoriaux88 » se confondent avec les juges des Enfers. De même que l’auteur cache son identité, l’éditeur se voile sous un nom fictif, soit celui de Michel Gaillard. Gustave Brunet, dans son livre Imprimeurs imaginaires et libraires supposés89, s’inscrit en faux contre l’existence de Michel Gaillard. Mais le choix de ce pseudonyme éditorial n’est pas indifférent à nos yeux, puisque la Response apologetique à l’Anticoton et à ceux de sa suite a été publiée chez Michel Gaillard en 1610. Ce camouflage apparent livre en réalité un indice supplémentaire sur l’identité de l’imprimeur, de toute évidence affilié aux Jésuites. Enfin, il est évident que Le Nouveau Panurge n’a pas pu être publié à La Rochelle, fief du protestantisme charentais, pas plus que la Response apologetique à l’Anticoton, qui porte la même inscription.
On peut penser que, contrairement à ce qu’indique la page de titre, Le Nouveau Panurge fut imprimé à Tournon chez Claude Michel, où publient des polémistes de la Société de Jésus, à laquelle était très certainement associé le rédacteur90. Du reste, Chenoa Marshall croit avoir identifié les motifs du bandeau au début du Nouveau Panurge avec ceux qui figurent dans plusieurs livres parus dans cette maison d’édition91. Ces motifs sont également les mêmes que ceux de la Suitte du Nouveau Panurge, qui porte la même adresse éditoriale.
Quoi qu’il en soit, on ne peut déterminer avec certitude quel fut l’auteur du Nouveau Panurge ; il est fort probable que ce soit une œuvre collective comme la Satyre Menippée, dont elle s’inspire. La première partie, qui se déroule aux Enfers, et la conclusion, qui transporte le lecteur aux Champs Élysées et qui présente un dialogue en vers92 émaillé d’allusions aux disputes théologiques, paraissent écrites d’une 32encre différente. Malgré les reprises de certaines charges contre les pasteurs, on note une disparité stylistique entre les sections du pamphlet : Erminevade appelle Panurge « Monsieur » dans les Champs Élysées, ce qu’il n’a jamais fait auparavant. Malgré les indices que l’auteur masqué égrène, à la manière du Petit Poucet, sur son identité, une recherche sur la paternité de l’œuvre nous ramène à de simples conjectures et, faute de documents précis, le mystère ne pourra pas être entièrement dissipé, ainsi que Panurge se plaît à le rappeler :
Il n’appartient qu’aux belles ames
De descouvrir mes anagrammes ;
Mesdise de moy qui voudra
Panurge fut, est, et sera93.
Présentation de l’œuvre
Le Nouveau Panurge s’amorce comme un voyage fictif dans la pure tradition de l’utopie. Après avoir erré pendant dix ans, assis à califourchon sur le dos d’un dauphin, son protagoniste aborde à l’île Imaginaire. Vivant en autarcie, la société insulaire exclusivement masculine assure sa pérennité grâce à une curieuse cure de rajeunissement. Les vieillards sont décharnés, alors que leurs sens sont endormis sous l’effet du malvoisie. Pendant leur sommeil, tandis que leur chair est pétrie, les âmes des insulaires séjournent dans les Enfers puis dans les Champs Élysées. Panurge fera lui-même les frais de ce traitement : malgré toute sa frayeur, il sera happé par les rajeunisseurs dont l’art s’apparente davantage à un acte de boucherie, voire de cannibalisme, qu’à une opération chirurgicale. Pendant cette longue opération qui dure plusieurs jours et dont la description relève du macabre, l’âme se promène aux Enfers. Aussi, loin d’en avoir fini avec ces cannibales, Panurge en retrouve-t-il d’autres dans l’au-delà, où les âmes sont semblablement « hachées, et deschiquetées à petits loppins, que les plus malotrus diableteaux amassent, et en font des pastés, et archipots, qu’ils mangent fort friandement94 ». Panurge 33en voit même quelques-uns « qui s’en lesch[ent] le bout des ongles95 ». Les sept villes de l’Enfer, que Panurge visite, flanqué de son fidèle Erminevade, qui lui sert de guide et d’interprète, lui font découvrir les âmes tourmentées des plus célèbres pasteurs de la Réforme. Ainsi rencontre-t-il les ministres Siméon Codur (ou Codurc) et Théodore de Bèze dans la ville de Luxure dans des positions qui heurtent les bonnes mœurs, mais la clef de voûte de la visite est sans aucun doute la rencontre de Calvin et de Luther « se mangeans et rongeans l’un l’autre dès la ceinture en haut96 » dans la chambre des controverses. Pied de nez évident aux accusations lancées contre les catholiques par les huguenots, qui assimilent l’eucharistie à un acte de cannibalisme.
Une marqueterie textuelle
Œuvre composite, Le Nouveau Panurge repose sur un assemblage de textes disparates allant de l’Antiquité à la période contemporaine. L’odyssée de Panurge convoque en contrepoint toute une série de références intertextuelles. À défaut de pouvoir les énumérer toutes, mentionnons les plus importantes. La description de l’au-delà avec la scission entre Enfers et Champs Élysées dérive des canevas homérique et surtout virgilien. Les figures mythologiques évoquées dans l’Enfer du Nouveau Panurge rappellent la descente dans l’Hadès d’Ulysse et celle d’Énée au royaume de Pluton pour communiquer avec les défunts. La trajectoire de l’ami de Pantagruel, partant de Phrygie pour se rendre à l’île Imaginaire, s’inspire du voyage odysséen, lorsqu’Ulysse quitte Troie pour regagner Ithaque97. La suite de son voyage le fait d’ailleurs naviguer entre les îles grecques et dans le monde mythique gréco-romain. Là, Hégémon, le conducteur de Panurge, se souvient de l’enlèvement d’Europe98 par Jupiter, de celui d’Hélène par Pâris. Après avoir fait force sacrifices en l’honneur de Poséidon et d’Amphitrite, ce guide « promit [à son protégé] 34bonne issue de ce navigage99 ». Sur la mythologie antique se greffe aussi une légende celtique. L’île de Borondon sur laquelle le protagoniste échoue rappelle bien saint Brendan, figure irlandaise connue pour ses voyages, qui atterrit à l’île des Bienheureux après avoir cherché le Paradis terrestre. Ainsi l’île Imaginaire constitue-t-elle une réplique satirique de l’île des Bienheureux des voyages de saint Brendan, que plusieurs plaçaient non loin des Indes occidentales.
On ne saurait lire cette œuvre, et en particulier l’épisode de la descente aux Enfers, sans se remémorer également La Divine Comédie de Dante. Le cadastre des Enfers rappelle un peu celui de l’Inferno. Dans l’évocation des villes de Luxure, d’Avarice, de Gourmandise et d’Ire, on reconnaîtra plusieurs régions de l’Enfer dantesque divisé en anneaux concentriques que le narrateur doit traverser. Dante inclut aussi dans son œuvre un cercle infernal réservé aux hérésiarques, duquel le pamphlétaire a peut-être tiré l’argument de son livre. Qui plus est, plusieurs des tourments infligés aux âmes, tels les nuages de guêpes qui s’acharnent sur elles, les serpents qui les assaillent à l’aide de leur venin et les morsures répétées qu’elles s’infligent entre elles, semblent correspondre d’une œuvre à l’autre100.
Au reste, la géographie d’outre-tombe sert de cadre narratif à nombre d’œuvres satiriques de l’époque, à commencer par la Mappe-Monde Nouvelle Papistique, carte parue en 1566 et représentant Rome comme la bouche béante de l’Enfer, destinée à illustrer les thèses des huguenots voulant que « le pape [soit] l’Antéchrist, l’Église romaine l’institution du Diable, et la messe une pure abomination101 ». Il n’est pas impossible non plus que l’auteur, affilié à l’officine loyolatique, ait voulu répliquer à un autre pamphlet anti-catholique intitulé L’Enfer et publié sous l’anonymat au début du siècle, dans lequel le narrateur-pèlerin visite le royaume de Pluton, escorté par un jésuite à qui les diables ouvrent toutes les portes. On accède à ce domaine souterrain par une porte secrète du collège des Jésuites, ce qui suggère des affinités entre l’ordre ignacien et les maîtres diables.
35Enfin, on ne saurait parler du Nouveau Panurge sans évoquer la dette de l’auteur envers son devancier Rabelais. Le titre même nous incite tout naturellement à penser au célèbre ami de Pantagruel. Rabelais, qui s’en est pris dans son œuvre tant aux partisans de Rome qu’à ceux de Genève, se trouve utilisé par les polémistes des deux camps102. La Satyre Menippée et La Cabale des Reformez, dont s’inspire aussi le pamphlétaire, puisaient à la source rabelaisienne. Que l’anonyme du Nouveau Panurge se réclame à plusieurs reprises de l’auteur du Pantagruel ne fait donc l’objet d’aucune audace particulière : « Avec les Rabelistes je sçay rabeliser103 », prévient, dès son avis au lecteur, Panurge, qui subvertit l’institution religieuse ou plus exactement le dogme huguenot en le dégradant jusqu’aux facéties les plus grasses, dignes de celles de Rabelais. Outre la rémanence du comique farcesque, on aura bien sûr reconnu les personnages d’Hégémon, d’Épistémon et de Thaumaste issus de la geste rabelaisienne, sans oublier ceux de Gymnaste, d’Eusthènes, de Carpalim, d’Eudémon, de Xénomanes, de Ponocrates, du frère Jean des Entommeures et de quelques autres dont s’enquiert Panurge rajeuni, au fil d’une conversation104. À la résurrection de ces personnages s’ajoutent de nombreuses citations tirées du Pantagruel et un jeu de reprises idiomatiques ou lexicales qui confortent la filiation rabelaisienne.
Le pamphlet ressortit encore à la thématique du voyage et à la découverte de pays imaginaires que l’on retrouve dans le Pantagruel. Le canevas narratif, avec son odyssée maritime et son séjour dans l’autre monde, calque celui bien reconnaissable du Quart Livre et du Cinquiesme Livre. Les réminiscences y sont nombreuses. Que le nouvel avatar de Panurge soit « sauvé miraculeusement des flots par un Dauphin, et porté contre 36toute esperance en l’Isle Imaginaire105 » n’est évidemment pas un hasard. L’épisode répond à une prière de son modèle rabelaisien au début du Quart Livre, alors qu’il se trouvait au milieu de la tourmente : « Vray Dieu envoye moy quelque daulphin pour me saulver en terre106 ». L’île Imaginaire, avec ses hacheurs de chair humaine, n’est pas sans rappeler la « Fontaine de jeunesse » au royaume de la Quinte-Essence107, où les vieilles femmes sont « reffondues, et entierement remises108 » en leur prime beauté, alors que les hommes se voient enduits d’une « Pelade » nommée « Ophiasis109 », qui les rajeunit instantanément. La hantise du cannibalisme, omniprésente sous la plume du pamphlétaire, n’est pas non plus étrangère à Rabelais. Aux abords de l’île de Ganabin, Panurge met en garde ses compagnons contre la férocité des insulaires : « Ilz sont par la mort bœuf de boys, pires que les Caniballes. Ilz nous mangeroient tous vifs110 ». À cette horreur s’adjoint celle de la damnation éternelle et des puissances de l’Enfer. Diables et damnés envahissent les livres du Pantagruel, comme ils se manifestent dès les premières pages du Nouveau Panurge. Pensons aussi à la fréquence des jurons et des invocations aux diables qui émaillent les dialogues de Rabelais et tout particulièrement les répliques de Panurge111. Mieux encore, songeons aux appréhensions du même personnage devant la Sibylle : « Les aureilles me cornent, il m’est advis que je oy Proserpine bruyante : les Diables bien toust en place sortiront. O les laydes bestes. Fuyons. Serpe Dieu je meurs de paour. Je n’ayme poinct les diables112 ». Ou encore à ses craintes au chevet de Raminagrobis, menacé de damnation éternelle : « Qui sçait s’ilz [les Diables] useroient de qui pro quo, et en 37lieu de Raminagrobis grupperoient le paouvre Panurge quitte ? Ilz y ont maintes fois failly estant safrané et endebté113 ».
Ces réminiscences, loin d’être anodines, participent du retournement de l’œuvre rabelaisienne, satirisée dans Le Nouveau Panurge. En effet, la plupart des substrats rabelaisiens sont exploités à rebours ou à contresens. Le Panurge rabelaisien se voit, à l’instar du « Nouveau Panurge », embroché par des cannibales, mais, alors que ceux-ci étaient des Turcs dans le Pantagruel, notre pamphlétaire réveille, pour sa part, le souvenir des Margajats, d’après les révélations d’André Thevet et de Jean de Léry114. Tandis que Pantagruel, dans le roman éponyme, « deffit les Caniballes115 », Panurge devient leur victime, qu’il s’agisse des rajeunisseurs ou des anthropophages du Brésil.
La visite des Enfers entraîne un revirement plus significatif encore. Si l’âme de Panurge, endormi au malvoisie, descend au royaume des morts à la suite d’Épistémon, puis de Pantagruel chez Rabelais, ses découvertes sont ici bien différentes. Là où l’auteur anonyme décrit les diables comme des tortionnaires impitoyables, Épistémon, dans le Pantagruel, les perçoit « comme de bons compaignons » et se dit « bien marry de ce que Panurge l’avoit si tost revocqué en vie116 ». Chez Rabelais, le périple anticipé de Pantagruel au domaine de Pluton s’insère dans un canevas épique. À en croire la conclusion du roman et la suite annoncée, le fils de Gargantua « combatit contre les diables, et fist brusler cinq chambres d’enfer, et mist à sac la grande chambre noire, et getta Proserpine au feu117 ». Or, rien de tel dans Le Nouveau Panurge, où le voyage dans le monde souterrain se déroule sur le mode de la passivité et de la crainte. L’esprit du protagoniste, se promenant d’une ville infernale à l’autre, se laisse guider par Erminevade, qui lui révèle les secrets du royaume de Pluton. De même, la chorographie infernale renverse celle proposée par l’Épistémon de Rabelais après sa résurrection. Au contraire de Panurge, celui-ci n’y rencontre pas de ministres huguenots, mais plutôt plusieurs papes comme Jules II, Boniface VIII, Alexandre VI Borgia, Sixte IV, Nicolas III, Calixte III et Urbain VI. Les 38brocards contre l’Église catholique et le haut clergé sont du reste récurrents dans Le Quart Livre. L’idée que la papauté soit associée au monde infernal se trouve reprise dans Le Cinquiesme et dernier livre, du bon Pantagruel, œuvre publiée dix ans après la mort de Rabelais, mais où la satire religieuse de la papauté s’est durcie et dénote une « inspiration ouvertement protestante118 ». Comme l’a bien vu Frank Lestringant, l’île Sonnante « donne sur “l’autre monde” », expression récurrente pour la désigner119. Cette enclave peuplée de « sacrés oiseaux », représentation métaphorique des dignitaires ecclésiastiques, rappelle à maints égards la sphère infernale. Il suffit de penser à l’évocation des diables dans la bouche de Panurge, mais aussi à celle du fleuve Léthé, qui prélude à la mutation de cette enclave papiste en un enclos infernal, comme en témoigne l’avertissement d’Aeditue : « Si une fois il vous entend ainsi blasphemans, vous estes perdus bonnes gens, voyez vous là dedans sa cage un bassin ? D’iceluy sortira foudre, tonnoirre, esclairs, diables et tempeste : par lesquels en un moment serez cent pieds souz terre abismez120 ». Autant dire que les blasphémateurs seront conduits aux Enfers et tourmentés par ces « diables d’oiseaux121 ». À la lumière de ce passage, il est permis de lire la représentation des ministres huguenots torturés par les diablotins du Nouveau Panurge comme une riposte directe à la charge de Rabelais contre l’Église romaine.
Les valeurs y sont souvent inversées. Alors que dans le Pantagruel, la goinfrerie est perçue comme une action positive, dans les Enfers du Nouveau Panurge, elle est souvent appréhendée comme un vice : dans la ville de Gourmandise, l’on introduit dans la bouche des pauvres qui y séjournent force crapauds et serpents. Le pastiche s’abouche à la veine rabelaisienne, mais avec une résonance macabre. La satire de l’institution religieuse ou ecclésiale se cristallise autour de sa cible principale, le protestant. Rabelais, ouvert aux revendications de la Réforme122, ne pouvait manquer d’être tourné en dérision par son continuateur, qui convoque 39son imaginaire pour mieux le révoquer. Le Nouveau Panurge est donc un palimpseste à l’envers et se dessine comme un anti-Pantagruel.
Outre l’œuvre de Rabelais, Le Disciple de Pantagruel fournit au pamphlétaire le cadre utopique d’une île imaginaire sans femmes et le motif de la cure de rajeunissement sous l’effet du malvoisie, ainsi que celui de la résurrection des vieillards :
Et quant ilz sont mors on les retire, & puis on les faict seicher au soleil, comme les merlus parez, ou comme la den ou l’estocfy en flandres, & après qu’ilz sont bien secz, on les faict brusler & mettre en cendre, laquelle on paistrit avec le blanc & glaire des œufz & du brouillamyny, lesquelz on malaxe tout ensemble comme paste & quant tout cela est bien courroyé & paistri ensemble l’on en mect de gros loppins dedans des moules qui sont telz & semblables que ont aultresfoys esté iceulz defunctz avant leur mort123.
La résurrection des vieillards pratiquée dans les îles de Cocagne et les autres îles du Disciple de Pantagruel rappelle encore les rituels « de souffle-à-culs » qui, selon Guy Demerson et Christiane Lauvergnat-Gagnière, « font partie des liturgies génératrices du carnaval124 ». Les substrats textuels du pamphlet sont donc multiples.
Sans prétendre à l’exhaustivité, il faut encore citer, au nombre des sources les plus évidentes du Nouveau Panurge, la Satyre Menippée de la vertu du Catholicon d’Espagne. Et de la tenue des Estatz de Paris. Le « grand Recipé125 » est une riposte moqueuse au « Catholicon d’Espagne » de la Satyre Menippée, étrange potion ou électuaire permettant aux Ligueurs qui le consomment tous les vices et toutes les libertés. Mais cette concoction s’apparente encore davantage à la recette du « Mithridat Consistorial » qui, dans La Cabale des Reformez, a entre autres pour vertu de transformer les réformés en bons chrétiens126.
40En plus de s’inspirer de l’imaginaire rabelaisien et de ses imitateurs, le pamphlétaire fait encore écho à plusieurs pamphlets anti-huguenots, dont il reprend certaines anagrammes et autres jeux de mots. Entre ce pamphlet et d’autres libelles comme La Cabale des Reformez et Le Banquet des Sages, il y a une évidente communauté de pensée. Comme la Satyre Menippée, ces deux derniers livres exploitent le voyage imaginaire. Le narrateur de La Cabale des Reformez, de religion catholique, se déguise en huguenot afin de pénétrer au cœur de la société protestante, à Nîmes, découvrant ainsi une multitude de secrets et observant le comportement des pasteurs. Dans Le Nouveau Panurge, le protagoniste déambule dans l’Enfer, peuplé uniquement de protestants, où lui sont révélés les péchés des pasteurs. Mais le rapprochement ne s’arrête pas là. De même que le narrateur de La Cabale des Reformez découvre le livre des secrets de la cabale protestante127, de même Maître Syrmatophorus révèle à Panurge la Chronologie de nos feaux Sectateurs, et bien aymés peuplateurs [du] Royaume de l’enfer128 rédigée avec du « sang et [de] l’urine129 ». Ces deux livres contiennent deux curieuses « recettes » : dans La Cabale des Reformez, la recette (Confection du Mithridat Consistorial) rend invisible les actes hérétiques et les outrages commis par les protestants, et comporte des ingrédients fabuleux, tels le « Fiel de lion, [les] Dents d’Aspic, [les] Langues de Viperes », que l’on fait « brusler au feu d’ambition » puis moudre dans le « mortier de calomnie130 ». Dans Le Nouveau Panurge se trouve « un grand Recipé131 » qui sert à entretenir l’hérésie des protestants à travers les siècles au moyen de plusieurs ingrédients, tels « les os d’un ciron, les cervelles d’un Enclume, les trippes d’un Landier », que l’on fait piler « dans le mortier d’Opiniastreté », puis « fondre au feu d’Inobédience132 ». Le choix des ingrédients trahit assez bien l’intention satirique de cette fantaisie pharmaceutique qui, dans les deux cas, se veut une riposte au célèbre Catholicon d’Espagne. À ces 41emprunts s’ajoutent quantité d’anagrammes et de reprises lexicales qui traduisent un esprit de clan. Si Le Nouveau Panurge est l’œuvre d’un seul écrivain, la plume de celui-ci se met au service des champions de la Contre-Réforme.
La langue du Nouveau PanurgE
Le pamphlet, rédigé dans un style gaulois, mêle la langue savante aux expressions populaires puisées dans les patois régionaux, mais aussi chez Rabelais, auquel il emprunte force mots et tournures. Ainsi, l’on ne se surprendra pas de voir, sous la plume de l’auteur, le fameux ergo gluc ponctuer le discours de Panurge lorsque celui-ci se moque du livre projeté par Créophile133. Le fonds rabelaisien fournit encore tout un répertoire de mots pour désigner les réalités corporelles que les lois de la bienséance passeraient sous silence. Derrière les termes « virolet134 », « breneux135 », « calibis136 » se reconnaît encore l’influence du Pantagruel. À ce lexique s’ajoutent les créations verbales que le pamphlétaire, jonglant avec les mots, concocte lui-même : pensons aux « calibistonnades137 », au verbe « barelicoquer138 » ou à son dérivé « barelicoquin139 » plaisamment forgé pour décrire les frasques sexuelles des huguenots aux Enfers. Non sans quelque mépris pour sa génitrice, il dira de sa mère qu’elle fut « enflutée140 » par Pan avant de lui donner naissance. La fantaisie verbale brille particulièrement lorsque le pamphlétaire se livre à son occupation favorite, la satire des huguenots. Les sévices infligés à Jean de Falguerolles dans la ville de Luxure lui inspirent cette boutade : « il ne cessoit de maudire Reboul, parce qu’en se reboultant il avoit aussi reboulté plusieurs autres reboultez141 ». La paronomase est chez lui une figure de prédilection pour tourner en dérision les patronymes de ses cibles. Ainsi 42François Ravaillac, particulièrement « travaillé » par les furies des Enfers, est-il surnommé plaisamment « travaillac142 », tandis que Jacques Guillot, auteur présumé de la Satyre Menippée, est désigné comme « le guille143 », soit le trompeur. Ces quelques exemples révèlent bien l’humeur bouffonne qui habite ce pamphlet.
Mais l’humour du pamphlétaire est souvent sombre. Fidèle à la tradition polémique anti-protestante, l’auteur déshumanise les pasteurs huguenots, ses bêtes noires, en les animalisant. C’est en effet avec un sourire grinçant qu’il décrit les souffrances infligées à Théodore de Bèze, tourmenté avec du plomb fondu : « il urloit comme un loup affamé, tantost il mugissoit comme un taureau qui a perdu sa genisse, puis changeant de notte il se mettoit à braire comme un vieux Asne144 ». Avec la même malice, il s’emploie à décrire les sévices exercés sur François Ravaillac, dont la chair est si boursouflée par des morsures de serpents qu’il est comparé à son tour à un « taureau » qu’on mène à la « boucherie145 ».
Jonglant avec les mots et faisant preuve d’une verve satirique incomparable, le pamphlétaire affiche tout au long de son récit une passion pour l’étymologie qui le conduit même à décrire Panurge comme le fils du dieu Pan et de la princesse Orgeo146, filiation du reste étrangère à l’œuvre de Rabelais. L’auteur joue encore avec l’étymologie grecque quand il crée le mot « philosofolie ». Son goût pour les associations verbales et les jeux de mots l’entraîne parfois dans l’erreur, au point où il se fourvoie même sur l’origine du toponyme « Angleterre », qu’il assimile à tort au pays de l’« Anglerie147 », alors que sa signification première est, comme on sait, terre des Angles.
Outre les calembours, le pamphlétaire multiplie les expressions qui font fortement image. Les âmes vantardes dans la ville d’Orgueilleuse sont désignées comme des « releveurs de moustaches », des « paons de rues148 ». Qui plus est, le comique verbal de l’œuvre tient à la transposition des expressions figurées au sens propre, procédé également récurrent chez François Rabelais et nombre d’autres auteurs satiriques. Ainsi Panurge, se croyant perdu au 43début de son odyssée, confesse-t-il plaisamment : « il me print envie de faire la mort d’un Cygne, affin qu’on dit que Panurge avoit eu autant de courage en la mort qu’en la vie149 ». Il infléchit à sa fantaisie les sentences proverbiales : « tel parle du loup, qu’il le tient par la queüe150 » ou encore « les chiens abayent la Lune, mais ils n’ont garde de la mordre151 ». De même, lorsque Panurge demande à Hégémon s’il n’est pas bon d’« avoir la puce à l’oreille gauche152 », celui-ci lui répond : « [N]on ma foy[,] monsieur, il est beaucoup meilleur à la droite153 », prenant l’expression grivoise au pied de la lettre. Ce détournement de la langue imagée est à tel point topique dans l’œuvre qu’on pourrait penser que tout le voyage aux Enfers est la réalisation du vœu liminaire d’Hégémon qui dit à Panurge qu’il est prêt à le suivre « où que diable soit154 ». Ce vœu prophétique donne d’ailleurs le ton au livre et annonce le voyage dans l’autre monde.
On ne saurait du reste passer sous silence l’affection du pamphlétaire pour les anagrammes, qui émaillent sa prose et ses vers. Dans la tradition ludique de la Renaissance, l’auteur du Nouveau Panurge s’emploie à cultiver le mystère sur son identité, mais aussi sur celle de quelques pasteurs :
Mais mon esprit n’est agité
Sinon qu’à dire verité.
Si dans l’obscur de mes Enigmes
On s’embroüille en des vains discours,
Ce n’est qu’aux ames plus infirmes,
Que j’ay donné les nuicts pour jours155.
S’il reprend des anagrammes connues des lecteurs et divulguées dans des pamphlets antérieurs, d’autres noms codés comme « Silopye156 » sont beaucoup plus difficiles à décrypter et, même avec les indices laissés par les devisants, le mystère ne peut être clairement élucidé. À défaut de bénéficier de la faconde et de la verve créatrice de Rabelais, le rédacteur de ce pamphlet témoigne d’une certaine virtuosité dans la satire et la caricature.
44La fortune de l’œuvre
Bien que Le Nouveau Panurge ait longtemps été relégué aux oubliettes, refoulé dans une sorte de purgatoire littéraire, l’œuvre connut d’évidence un certain succès auprès des contemporains, à en juger par les trois éditions successives. La Suitte du Nouveau Panurge, publiée environ neuf ans plus tard, soit après juillet 1623, témoigne du bon accueil de l’œuvre par certains :
Qui que soit l’Autheur du Nouveau Panurge diversement recognu, si ne peut on dire neantmoins que son gentil esprit n’ait peint en son genre d’escrire, non moins subtilement que veritablement en nostre siecle, cheri et aimé des plus curieux : et qui ostant le masque à ses Enigmes, espluchant ses fictions, desnoüant ses Anagrammes157 ont trouvé que tout cela n’estoit qu’un ombrage à la verité, qui la rendoit plus esclatante158.
Si elle connut une bonne fortune, l’œuvre suscita aussi la controverse et nourrit la jalousie de certains « envieux159 » qui se moquèrent de Panurge et de ses écrits, comme en témoigne encore « L’Apologie pour Le Nouveau Panurge », liminaire de la Suitte du Nouveau Panurge que nous avons jugé utile de faire figurer en annexe. La polémique littéraire eut des résonances théologiques et engendra force débats autour de la situation des Enfers et des souffrances qui y sont infligées. La Suitte du Nouveau Panurge annoncée à la fin de la première partie160, mais aussi dès le privilège parodique, qui permet aux écrivains de compléter les pages blanches161, répond en particulier à un désir de justification de la part du camp jésuite. On s’étonnera sans doute qu’il ait fallu huit ans avant que les aventures de Panurge puissent connaître leur dénouement. Plus qu’une réplique aux libelles huguenots, la deuxième partie du diptyque se dessine peut-être comme 45une nouvelle riposte aux violences perpétrées contre les catholiques en 1621 et à l’expulsion des Jésuites de Nîmes la même année162. L’auteur, qui sans doute n’est pas le même que celui du Nouveau Panurge, a cru pouvoir tirer profit du canevas du voyage dans l’au-delà pour développer ses propres idées théologiques et lancer une contre-offensive envers les calvinistes.
Notre édition
Pour établir le texte, j’ai choisi la copie de la première édition qui comporte le frontispice de Panurge, en consignant, en annexe, les variantes les plus significatives que présentent les trois éditions subséquentes. Conformément au protocole des éditions Garnier, j’ai respecté l’orthographe de l’édition princeps, sauf quand la lisibilité pouvait être compromise. A été conservée la ponctuation de l’époque, notamment l’emploi du point-virgule entre la principale et la subordonnée, de la virgule entre le sujet et le verbe, du point après les nombres. Semblablement a été préservé l’usage archaïque de la majuscule à l’initiale de certains noms communs. Le lecteur trouvera à la fin de l’ouvrage un glossaire où sont expliqués les mots anciens ou ceux dont la signification différait à l’époque, ainsi que les expressions n’ayant plus cours aujourd’hui.
Pour faciliter la lecture du texte, j’ai encore effectué les modifications suivantes :
–dissimilation des caractères i/j et u/v ;
–restitution du n ou du m, selon le cas, suivant les voyelles e, o et a lorsqu’elles portent un tilde (~) ;
–résolution de certaines abréviations comme « Panur. » en « Panurge », « M. G » en « Maistre Guillaume », « S. » en « sainct » et « SS. » en « saintcs » ;
–abolition des ligatures anciennes et du s long ;
–remplacement des esperluettes par « et » ;
46–correction de la ponctuation aberrante et ajout de certains signes de ponctuation, comme les tirets dans les dialogues, la virgule entre les éléments d’une énumération ;
–utilisation des majuscules après un point, un point d’interrogation en début de phrase et pour les noms propres, ainsi qu’au début de chaque réplique dans les dialogues ;
–ajout des apostrophes manquantes ;
–ajout de l’accent grave pour distinguer notamment « a » et « à », « la » et « là », « ou » et « où », « ça » et « çà », et de l’accent aigu pour marquer le é tonique final (qu’il soit suivi ou non d’un e muet en voyelle finale, p. ex. « accusée ») ;
–ajout des accents circonflexes pour distinguer certains homophones, comme le « eut » du « eût » ;
–remplacement de la majuscule par la minuscule après les deux-points, sauf dans le cas de noms propres.
Toutes les autres modifications apportées au texte original, le plus souvent limitées à la correction de coquilles, d’aberrations orthographiques ou d’omissions syntaxiques, ont été signalées en note.
Au terme de ce travail, il me faut remercier le CRSHC et le programme d’aide à la recherche de mon université, dont les subsides ont facilité mes travaux. Merci également à Chenoa Marshall pour sa collaboration à l’établissement du texte, à l’élaboration de plusieurs notes, à l’inventaire des variantes et à la rédaction de quelques passages de l’introduction, ainsi qu’à Stéphanie Girard pour l’annotation de l’annexe, la révision linguistique du manuscrit et la préparation de la bibliographie, du glossaire ainsi que de l’index. Je suis enfin redevable à la générosité des personnes suivantes : Robert Bonfils, Emmanuel Desiles, Claude La Charité, Frank Lestringant, Claude Mauron, Paul Oberholtzer, Réal Ouellet et Sylvie Requemora-Gros.
Marie-Christine Pioffet
1 Jacques Boulenger, « À propos de Me Guillaume : Le Nouveau Panurge », Revue des livres anciens : documents d’histoire littéraire, de bibliographie & de bibliophilie, t. 1, 1914, p. 452.
2 Selon Bernard Dompnier, la très grande majorité des protestants vivant en France se trouvent dans la moitié méridionale du pays (Le venin de l’hérésie. Image du protestantisme et combat catholique au xviie siècle, Paris, Le Centurion, coll. « Chrétiens dans l’histoire », 1985, p. 14).
3 Dans la seule ville de Die, on compte trois presses, celles de Jean Gautier (1609-1613), de Jean Rodolphe Le Fèvre (1613-1618) et d’Ézéchiel Benoît (1618-1662). Voir à ce sujet Eugène Arnaud, Notice historique et bibliographique sur les imprimeurs de l’Académie protestante de Die en Dauphiné au xviie siècle, Grenoble, Imprimerie Édouard Allier fils, 1870, p. 9 sq.
4 Robert Sauzet, Contre-Réforme et Réforme catholique en Bas-Languedoc. Le diocèse de Nîmes au xviie siècle, Louvain/Paris, Vander-Oyez/Publications de la Sorbonne, 1979, p. 172.
5 B. Dompnier décrit le Dauphiné comme une région « où s’affrontent deux armées » (Le venin de l’hérésie, op. cit., p. 103).
6 Benjamin Dupas, « Autour du Père Garasse, 1623-1626 : l’invention collective d’un auteur unique », in « Parler librement ». La liberté de parole au tournant du xvie et du xviie siècle, éd. Isabelle Moreau et Grégoire Holtz, Lyon, ENS Éditions, 2005, p. 54.
7 Pierre Labbe, Édition annotée et commentée de La Cabale des Reformez tirée nouvellement du puits de Democrite par I. D. C. généralement attribuée à Reboul, thèse de 3e cycle sous la direction de Guy Demerson, Université de Clermont II, 1981, Introduction, p. liii-lvii.
8 Ibid., p. liii sq.
9 Très vite, on attribua aux Jésuites une complicité dans ce régicide, et un libelle intitulé Entrevue de M. d’Epernon et de Ravaillac accusa notamment Pierre Coton de s’être « abouché à Angoulême à trois assassins, leur promettant de dire la messe à leur intention » s’ils passaient à l’acte (Jean-Christian Petitfils, L’Assassinat d’Henri IV. Mystères d’un crime, Paris, Perrin, coll. « Tempus », 2009, p. 167).
10 Bernard Dompnier identifie trois formes de controverses : « Les traités de théologie polémique, écrits pour montrer le bien-fondé des positions d’une confession et réfuter les thèses adverses […]. Un deuxième type se présente sous une forme voisine mais avec quelques variantes. Il s’agit des comptes rendus de conférences tenues verbalement entre les représentants des deux confessions […]. Ces comptes rendus sont présentés par un des protagonistes qui s’efforce par des ajouts ou des commentaires de montrer que l’erreur de la confession adverse a été démontrée. Enfin, la troisième catégorie des ouvrages de controverse est celle des récits de conversion » (Le venin de l’hérésie, op. cit., p. 171).
11 Voir à ce sujet Joël Poivre, Jérémie Ferrier, 1576-1626 : du protestantisme à la raison d’État, Genève, Droz, 1990 et infra, la présente édition du Nouveau Panurge. Avec sa navigation en l’Isle Imaginaire, son rajeunissement en icelle, & le voyage que fit son esprit en l’autre monde pendant le rajeunissement de son corps. Ensemble une exacte observation des merveilles par luy veuës, tant en l’un que l’autre monde [abr. NP], p. 186, n. 554. Toutes les références au Nouveau Panurge renvoient à la présente édition, les pages placées entre crochets correspondant à celles de l’édition originale (La Rochelle, Michel Gaillard, s. d. [ca 1615]).
12 Voir infra, NP, p. 274 [267] et n. 1067.
13 Le ministre Clément Le Corvier dit le Dauphin fut mis à l’amende en 1613 pour avoir été reconnu coupable d’adultère et avoir subtilisé une somme d’argent au pasteur André Richaud. Voir Charles Read, « Daniel Chamier. Post-scriptum à nos dernières recherches », Bulletin historique et littéraire de la Société de l’histoire du protestantisme français, no 35, 1886, p. 558, n. 3 ; voir aussi infra, NP, p. 275 [268] et n. 1078.
14 J’utilise ici, par commodité, le singulier, bien que l’ouvrage ait sans doute été rédigé à plusieurs mains, comme je le montrerai plus loin.
15 Infra, NP, p. 145-146 [99-100].
16 Infra, NP, p. 145 [98].
17 Infra, NP, p. 146 [99].
18 Infra, NP, p. 151 [106].
19 Infra, NP, p. 159 [117].
20 Infra, NP, p. 160 [118].
21 Infra, NP, p. 148 [103].
22 Infra, NP, p. 61 [f. A 2 ro].
23 Cf. « Faute d’autre matiere il vous sera permis en vos presches, lire un, ou deux chapitres de mon histoire à ceux de vostre secte, pour leur donner courage, et les asseurer que veritablement Panurge ne dit rien qu’il n’ait veu : et les advertirez, que ce Royaume est fort grand, et spacieux, et que les villes n’y sont peuplées que des Ames pretendues reformées (qui est une chose remarquable) » (infra, NP, p. 61-62 [f. A 2 vo]).
24 Infra, NP, p. 67-68 [f. A 5 ro].
25 Infra, NP, p. 256 [250].
26 Infra, NP, p. 257 [250].
27 Infra, NP, p. 63 [f. A 3 vo].
28 Infra, NP, p. 167 [128].
29 Infra, NP, p. 266 [259].
30 Infra, NP, p. 181 [148-149].
31 On aurait aussi bien pu voir Jérémie Ferrier apparaître dans la ville de Paresse, dans la ville d’Avarice ou dans celle d’Ire. Ses détracteurs ont souligné son goût pour l’argent et son tempérament colérique (J. Poivre, Jérémie Ferrier, op. cit., p. 60). Mais le pamphlétaire, probablement jésuite, voit dans ce ministre renégat un converti embarrassant, trop tiède pour qu’on fasse ses louanges et trop longtemps « pourfendeur des jésuites » (ibid., p. 69).
32 Infra, NP, p. 170 [132].
33 Infra, NP, p. 194 [166].
34 Infra, NP, p. 215 [198].
35 Id.
36 Infra, NP, p. 217 [202].
37 Infra, NP, p. 218 [203].
38 Voir infra, NP, p. 219, n. 718.
39 Infra, NP, p. 219 [205].
40 Id.
41 Ce pamphlet retrouvé dans les manuscrits de Conrart s’en prend à la réputation du jésuite Pierre Coton, accusé d’avoir tenté de suborner une jeune fille pour obtenir « beaucoup de nouvelles qui scandalisoient fort l’Eglise » (éd. Charles Read, Paris, Librairie des bibliophiles, 1873, p. 19).
42 Infra, NP, p. 87 [17].
43 Infra, NP, p. 95 [25].
44 Infra, NP, p. 147-148 [102-103].
45 Infra, NP, p. 157 [115].
46 Infra, NP, p. 117 [58].
47 Infra, NP, p. 174 [138].
48 Nous retrouvons l’assassin d’Henri IV aux Enfers dans Le Nouveau Panurge, p. 170-171 [132-133], et l’auteur emploie l’image de l’union du lys et de l’aigle pour représenter le mariage futur entre Louis XIII et Anne d’Autriche (infra, NP, p. 90, 217, 289, 292 [20, 201, 283, 288]).
49 Infra, NP, p. 181 [149].
50 Le Synode national de Privas eut lieu du 23 mai au 4 juillet 1612. Voir Guillaume Félice, Histoire des synodes nationaux des Églises réformées de France, Paris, Grassart, 1864, p. 149.
51 Le Synode de Die eut lieu du 25 avril au 10 mai 1613 et Clément Dauphin fut trouvé coupable de fraude, un délit décrit dans Le Nouveau Panurge (infra, p. 276-277 [269]). Charles Read, dans son article « Daniel Chamier. Post-scriptum à nos dernières recherches » (art. cité, p. 558-560), présente une transcription du procès-verbal du Synode de Die par M. Auzière qui précise la sentence du pasteur condamné à payer la somme de dix écus d’amende pour couvrir les frais du procès.
52 Infra, NP, p. 277 [269].
53 Infra, NP, p. 262-263 [256-257]. Robert Sauzet, dans son livre Contre-réforme et Réforme catholique en Bas-Languedoc. Le diocèse de Nîmes au xviie siècle, inclut cette courte description : « Le 14 juillet 1613, le consistoire de Nîmes et les députés du Synode du Bas-Languedoc avaient prononcé l’excommunication de Ferrier. Dès le lendemain, une émeute se déchaîna contre l’apostat à la sortie du présidial où il avait obtenu une charge de conseiller. Le populaire le poursuit, l’injurie (“vege lou, lou traitre, Judas”), lui lance des pierres et brise les portes et les fenêtres de sa maison » (op. cit., p. 170).
54 Infra, NP, p. 288 [283].
55 Au début de l’an 1614, face à un énorme déficit budgétaire, la reine régente réduit les pensions les plus importantes, notamment celles des princes de la cour. Henri II de Bourbon publie, le 18 février 1614, un manifeste dans lequel il accuse Concini, sans toutefois le nommer, d’avoir conseillé à l’État de piller et de vider les coffres du royaume. Paradoxalement, une bonne partie des dépenses auxquelles ce prince factionnaire fait référence fut employée à éviter une guerre civile en apaisant les princes de la cour, lui en particulier. Sur ce sujet, voir Jean-Christian Petitfils, Louis XIII, Paris, Perrin, 2008, p. 166.
56 Le 13 janvier 1614, Henri II de Bourbon, prince de Condé, et les ducs de Nevers et de Mayenne, suivis des ducs de Bouillon, de Longueville et de Vendôme, se retirent de la cour. Le manifeste du 18 février, écrit par le prince de Condé, réclame la tenue d’États généraux dans les trois prochains mois et un report du mariage royal d’Anne d’Autriche et de Louis XIII. La régente négocie un traité de paix avec les princes rebelles le 15 mai 1614 à Sainte-Menehould, donnant de nouvelles pensions aux princes, repoussant les mariages royaux à la majorité de Louis XIII et fixant comme date préliminaire pour la tenue des États généraux celle du 25 août 1614 (date qui sera repoussée jusqu’au 26 octobre de la même année). Les princes, excepté les ducs de Longueville et de Mayenne, refusent de revenir à la cour avant l’ouverture des États généraux, afin de maintenir la pression sur la régence. À ce sujet, voir J.-C. Petitfils, Louis XIII, op. cit., p. 166-168 et Caroline Bitsch, Vie et carrière d’Henri II de Bourbon, prince de Condé (1588-1646). Exemple de comportement et d’idées politiques au début du xviie siècle, Paris, Honoré Champion, 2008, p. 132-133 et 142.
57 Infra, NP, p. 290 [285].
58 Voir Charles Read, « Pamphlets du temps, en ce qui concerne “le grand Chamier” », Bulletin historique et littéraire de la Société de l’histoire du protestantisme français, no 35, 1886, p. 417.
59 Voir infra, fig. 2, p. 55.
60 Anonyme, La Cabale des Reformez, tiree nouvellement du puits de Democrite, par I. D. C. [abr. CR], Montpellier, Le Libertin, imprimeur juré de la saincte Reformation, 1597.
61 Infra, NP, p. 159-160 [118].
62 Frank Lestringant, « Une liberté féroce : Guillaume Reboul et Le Nouveau Panurge », in « Parler librement ». La liberté de parole au tournant du xvie et du xviie siècle, éd. Isabelle Moreau et Grégoire Holtz, Lyon, ENS Éditions, coll. « Feuillets », 2005, p. 122.
63 Chenoa Marshall, Le Nouveau Panurge, édition avec introduction, notes et glossaire, mémoire de maîtrise sous la direction de Mawy Bouchard, Université d’Ottawa, 2009, Introduction, p. xv sqq.
64 Charles Read, Daniel Chamier. Journal de son voyage à la cour de Henri IV en 1607 et sa biographie, Genève, Slatkine Reprints, 1971 [Paris, Agence centrale de la Société d’histoire du protestantisme français, 1858], p. 221.
65 Infra, NP, p. 82 [11].
66 Sur un catalogue manuscrit de la Bibliothèque municipale de Grenoble figure d’ailleurs le nom de Jacques Isnard comme auteur du Nouveau Panurge. Rédacteur présumé du Mercure reformé apportant consolation à Messieurs, & Réverends Peres, les Ministres de Dyois, & Valentinois, désolez, hélas ! pour la perte de Madame du Poët, & de cent autres, reduicts à l’Eglise Catholique, l’an 1619. en ces païs ([abr. MR], La Rochelle, Guillaume du Coing [Tournon ?, Claude Michel ?], s. d. [ca 1620]), le jésuite Jacques Isnard professait au collège de Die, où il s’acquit une « grande réputation » dans ses débats avec les huguenots. Ce collège avait été érigé pour combattre l’Académie de Die dirigée par les huguenots (Paul Dudon, « Les Jésuites dans le Diois (1610-1763) », Revue d’histoire de l’Église de France, t. XV, no 66, 1929, p. 10). À la suite de la publication de son Mercure reformé, il sera contre-attaqué par le pasteur Alexandre de Vinay, qui rédigea un an plus tard un pamphlet intitulé Le Jésuite démasqué, contenant la dernière conférence tenue à Crest avec le P. Isnard Jésuite (ibid., p. 11).
67 Après avoir comparé des échantillons des deux pamphlets, Stéphanie Girard en vient à la conclusion que de manière générale, Le Mercure reformé contient beaucoup de graphies archaïques, telles « publicque », « traict », « bruict », « traicter », « picquer », « poincte », « produicte », « parfaict », « flesche », « jesuiste », « doubte », « loing », « tesmoing », par opposition au Nouveau Panurge, publié six ans auparavant, qui opte dans ces cas-là pour des orthographes conformes à l’usage d’aujourd’hui. Ainsi, Jacques Isnard oppose aux graphies « Die », « celeste », « celibat », « Penitence » qu’on retrouve dans le Nouveau Panurge, celles plus archaïques de « Dye », « cœleste », « cœlibat », « Pœnitence ». À ces divergences orthographiques s’ajoutent d’importantes variantes stylistiques et syntaxiques qui invalident l’hypothèse d’une paternité littéraire commune.
68 C. Read, « Pamphlets du temps, en ce qui concerne “le grand Chamier” », art. cité, p. 420.
69 Charles Nisard, Mémoires de Garasse (François) de la Compagnie de Jésus, Paris, Amyot Éditeur, 1860, p. vii.
70 Ibid., p. ix.
71 Infra, NP, p. 211 [192].
72 Infra, NP, p. 217 [202].
73 Id.
74 Infra, NP, p. 215 [198].
75 Infra, NP, p. 219 [204-205].
76 Traduction : « Le pape est l’Antéchrist dont parle l’Écriture ».
77 Infra, NP, p. 295 [291].
78 J. Boulenger, « À propos de Me Guillaume : Le Nouveau Panurge », art. cité, p. 452.
79 Paris/Bruxelles/Genève, Société générale de librairie catholique, 1884.
80 Mention manuscrite figurant dans le Catalogus triennalis des Archives des Jésuites à Rome (Archivum Romaneum Societatis Jesus) pour l’année 1614, fo 242.
81 Infra, NP, p. 273 [266].
82 Voir infra, NP, p. 256-257, n. 936.
83 Infra, NP, p. 211 [193].
84 Infra, NP, p. 113 [52].
85 Infra, NP, p. 73-74 [1-3].
86 Infra, NP, p. 260 [254].
87 Infra, NP, p. 219 [205]. La ville des Universités est ainsi nommée parce que les « diables [y] tiennent leurs escholes » (NP, p. 211 [192]).
88 Infra, NP, p. 215 [198].
89 Gustave Brunet, Imprimeurs imaginaires et libraires supposés, Paris, Tross, 1866, p. 55. Au sujet du lieu et de la maison d’édition du Nouveau Panurge, voir aussi les remarques de C. Marshall dans son mémoire de maîtrise inédit, Le Nouveau Panurge, édition avec introduction, notes et glossaire, op. cit., Introduction, p. vii-viii.
90 Denis Pallier, « Le livre et les propagandes religieuses. Les réponses catholiques », in Histoire de l’édition française, t. 1 : Le livre conquérant. Du Moyen Âge au milieu du xviie siècle, éd. Henri-Jean Martin et Roger Chartier, avec la collaboration de Jean-Pierre Vivet, Paris, Promodis, 1983, p. 337.
91 C. Marshall, Le Nouveau Panurge, édition avec introduction, notes et glossaire, op. cit., Introduction, p. xi.
92 C. Read envisage ce poème comme un « amphigouri », dans lequel affleurent une multitude d’allusions au Synode de Privas, tenu le 4 juillet 1612, qu’il a tenté d’élucider (« Daniel Chamier ; post-scriptum à nos dernières recherches », art. cité, p. 538).
93 Infra, NP, p. 66 [f. A 4 vo].
94 Infra, NP, p. 147 [102].
95 Id.
96 Infra, NP, p. 161 [120].
97 Homère, Iliade, éd. et trad. Eugène Lasserre, Paris, Garnier, 1955, ch. xxiii, v. 277-283, p. 375.
98 Infra, NP, p. 81 [11].
99 Infra, NP, p. 85 [14].
100 Voir notamment Dante Alighieri, « Enfer », in Œuvres complètes, éd. et trad. André Pézard, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1965 : guêpes, ch. iii, v. 64-67, p. 898 ; serpents, ch. xxiv, v. 82-99, p. 1032-1033 ; morsures, ch. xxx, v. 34-51, p. 1078 ; et infra, NP, p. 164, 170-171, 185 [124, 131-133, 154].
101 Frank Lestringant, « L’Histoire de la Mappe-Monde Papistique », Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 142, no 3, 1998, p. 701.
102 Voir à ce sujet les remarques de Frank Lestringant dans « Une Satyre Ménippée au service de la Contre-Réforme : La Cabale des Reformez attribuée à Guillaume Reboul », in Cité des Hommes, cité de Dieu. Travaux sur la littérature de la Renaissance en l’honneur de Daniel Ménager, éd. Jean Céard, Marie-Christine Gomez-Géraud, Michel Magnien et François Rouget, Genève, Droz, 2003, p. 301.
103 Infra, NP, p. 70 [f. A 7 ro].
104 Cf. « Gymnaste qu’est-il devenu ? Esisthenes vit il encore ? Ma grand amie Thelone a elle bien eslevé ses enfans, le petit Carpalin, et le mignon Picrochole ? Elopas a-il recouvré la parolle ? Eudemion est-il tousjours bien fortuné ? Xenomanes a-il achevé de circuir la terre, travaille il encore à sa Cosmographie superuniverselle ? Rhysotome est-il d’accord avec Ægonome ? Ont ils à force chevres ? Est-il saison de fromages pour eux, et pour nous ? Thyropanoicte a-il encores crocheté la porte du thresor Lemnien ? Ponocrates travaille-il tousjours sans se lasser ? Et frere Jean des Antomeures conserve il bien le clos de son Abbaye ? Porte-il tousjours son grand bracamard ? Mes resveurs de Dipsoide parlent-ils de moy ? Mes galoises se souviennent elles encore de leur Panurge ? » (infra, NP, p. 76-77 [4-5]).
105 Infra, NP, p. 80 [8-9].
106 François Rabelais, Le Quart Livre, in Œuvres complètes [abr. OC], éd. Mireille Huchon, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1994, chap. xxi, p. 590. Sauf indication contraire, toutes les références à l’œuvre de Rabelais renvoient à cette édition.
107 F. Rabelais, Le Cinquiesme Livre, in OC, chap. xx, p. 773.
108 Ibid., chap. xx, p. 772.
109 Id.
110 F. Rabelais, Le Quart Livre, in OC, chap. lxvi, p. 696.
111 Cf. « de par le petit diable » (F. Rabelais, Le Tiers Livre, in OC, chap. ix, p. 378) ; « je me donne à travers tous les Diables, comme un coup de boulle à travers un jeu de quilles » (ibid., chap. xi, p. 383) ; « Allons mon amy (frère Jean) de par tous les Diables allons » (ibid., chap. xv, p. 398) ; « Que Diable (dist Panurge) veult prætendre ce maistre Alliboron » (ibid., chap. xx, p. 414) ; « Va (respondit Panurge) fol enraigé au Diable : et te faiz lanterner à quelque Albanoys » (ibid., chap. xxv, p. 431). On multiplierait en vain les exemples qui foisonnent dans l’œuvre.
112 Ibid., chap. xvii, p. 403-404.
113 Ibid., chap. xxiii, p. 421.
114 Voir André Thevet, Les singularités de la France antarctique. Le Brésil des Cannibales au xvie siècle, éd. Frank Lestringant, Paris, La Découverte/Maspéro, 1983, p. 52, et Jean de Léry, Histoire d’un voyage faict en la terre du Brésil [1578], éd. Frank Lestringant, Paris, Le Livre de Poche, coll. « Bibliothèque classique », 1994, p. 147.
115 F. Rabelais, Pantagruel, in OC, chap. xxxiiii, p. 336.
116 Ibid., chap. xxx, p. 322.
117 Ibid., chap. xxxiiii, p. 336.
118 Voir à ce sujet Frank Lestringant, « L’allégorie géographique au service de la polémique religieuse : les nouveaux mondes du Pape selon Rabelais, Pierre Viret, Jean-Baptiste Trento et quelques autres », in Geographiae imaginariae : dresser le cadastre des mondes inconnus dans la fiction narrative de l’Ancien Régime, Actes du xxiie colloque de la SATOR d’octobre 2008, éd. Marie-Christine Pioffet, Québec, PUL, « Les collections de la République des Lettres – Symposiums », 2011, p. 47.
119 Ibid., p. 48.
120 F. Rabelais, Le Cinquiesme Livre, in OC, chap. viii, p. 744.
121 Ibid., chap. viii, p. 745.
122 On ne se surprendra pas si, comme le note Lazare Sainéan, l’œuvre du Tourangeau a reçu un meilleur accueil dans les pays protestants que dans les milieux catholiques (L’influence et la réputation de Rabelais. Interprètes, lecteurs et imitateurs, un rabelaisien (Marnix de Sainte-Aldegone), Paris, Librairie Universitaire J. Gamber, 1930, p. 24).
123 Anonyme, Le Disciple de Pantagruel : les navigations de Panurge [abr. DP], éd. Guy Demerson et Christiane Lauvergnat-Gagnière, Paris, Nizet, coll. « Société des textes français modernes », 1982, p. 66 n. 106. F. Lestringant, dans « Une liberté féroce : Guillaume Reboul et Le Nouveau Panurge », établit quelque parallèle entre le rajeunissement pratiqué sur l’île Imaginaire et l’archipel de Cocagne du Disciple de Pantagruel, ainsi qu’un lien avec le folklore français (art. cité, p. 127).
124 DP, p. 66.
125 Infra, NP, p. 223 [209].
126 CR, p. 27 sq.
127 Cf. CR, p. 34-35 : « Il estoit couvert d’une peau de brebis blanche avec sa laine : pour corrayes, et attaches il avoit quatre belles et longues queuës de renard blanc : les fueillets d’iceluy estoyent de parchemin grand et fort, faict de peau de vieux loup : ce qui se voyoit au poil, lequel ayant esté laissé autour des fueillets, les embelissoit comme vignettes. »
128 Infra, NP, p. 228 [217].
129 Infra, NP, p. 227 [216].
130 CR, p. 28.
131 Infra, NP, p. 223 [209].
132 Infra, NP, p. 223-224 [210].
133 Infra, NP, p. 125 [70].
134 Infra, NP, p. 109 [46].
135 Infra, NP, p. 117 [58].
136 Infra, NP, p. 82, 119 [11, 61].
137 Infra, NP, p. 119, 160 [61, 118].
138 Infra, NP, p. 82, 156, 159 [11, 113, 117].
139 Infra, NP, p. 159 [117].
140 Infra, NP, p. 102 [35].
141 Infra, NP, p. 160 [118].
142 Infra, NP, p. 171 [133].
143 Infra, NP, p. 196 [170].
144 Infra, NP, p. 157 [115].
145 Infra, NP, p. 171 [133].
146 Infra, NP, p. 100 [33].
147 Infra, NP, p. 208 [189].
148 Infra, NP, p. 147 [102].
149 Infra, NP, p. 90 [20].
150 Infra, NP, p. 79 [8].
151 Infra, NP, p. 70 [f. A 7 ro et vo].
152 Infra, NP, p. 81 [10].
153 Id.
154 Infra, NP, p. 83 [11].
155 Infra, NP, p. 65-66 [f. A 4 ro et vo]. Les jeux de devinettes étaient fort à la mode à l’époque et le pamphlétaire prend plaisir à s’exprimer par énigmes. Voir infra, NP, p. 66, n. 3.
156 Infra, NP, p. 202 [180].
157 Dans l’adresse de « Panurge au zoile », c’est-à-dire au critique envieux, l’auteur mentionne les « Enigmes » et les « anagrammes » que seules les « belles ames » pourront déchiffrer (infra, NP, p. 66 [f. A 4 ro et vo]). Dans l’ode « Sur le retour de Panurge » qui suit, on lit : « Tu caches soubs tes fictions / Mille belles inventions » (ibid., p. 67 [f. A 5 ro]).
158 SNP, « Apologie pour Le Nouveau Panurge », p. 311 [i-ii].
159 SNP, « Apologie pour Le Nouveau Panurge », p. 311 [iii].
160 Infra, NP, p. 294 [290].
161 « […] est commandé à tous ceux qui sçauront amplifier audit Panurge soit par commentaires, ou autrement, de librement le faire, & d’y remplir les feuillets blancs, si tant est qu’il y en a » (infra, NP, « Extraict du Privilege du Roy de l’autre monde », p. 59-60 [n. p.].
162 R. Sauzet, Contre-Réforme et Réforme catholique en Bas-Languedoc. Le diocèse de Nîmes au xviie siècle, op. cit., p. 170.
- CLIL theme: 3439 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques -- Moderne (<1799)
- ISBN: 978-2-406-06133-5
- EAN: 9782406061335
- ISSN: 2258-0158
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-06133-5.p.0011
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 08-11-2017
- Language: French