Préface
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : Le Concept d’organisation chez Saint-Simon
- Pages : 9 à 25
- Collection : Bibliothèque de l'économiste, n° 48
- Série : 1, n° 26
PRÉFACE
L’œuvre de Saint-Simon a été peu commentée d’un point de vue philosophique même si Durkheim, Gurvitch ou Ansart ont montré qu’elle était porteuse d’une pensée originale et créatrice, fondatrice des sciences humaines et du socialisme. Parmi les commentateurs, Jean-Paul Frick fait exception car il lit Claude-Henri de Saint-Simon comme doit être lue toute œuvre philosophique : il s’efforce d’identifier « une problématique interne, spécifique et permanente » qui constitue le socle conceptuel de la doctrine. Les critiques (Célestin Bouglé, Elie Halévy) souvent séparent l’œuvre en différents « moments » ou parties : on passerait des considérations de philosophie des sciences à des propos sur l’organisation ou la physiologie sociale par un saut méthodologique et doctrinal. Dans le travail de Jean-Paul Frick rien de tel. L’œuvre est considérée comme ayant une unité et l’ouvrage ici édité s’attache à mettre en évidence cette dernière. En prenant en charge l’ensemble des textes de Saint-Simon, l’auteur tente d’identifier les concepts fondamentaux qui les sous-tendent, en particulier celui d’organisation. Il se saisit de Saint-Simon comme Aubenque l’a fait d’Aristote ou Guéroult de Descartes.
L’édition récente des Œuvres complètes1 de Saint-Simon, expurgée des interventions des disciples et établie par un retour aux manuscrits originaux justifie a posteriori la lecture de Jean-Paul Frick (qui n’avait pu lire Saint-Simon que dans l’édition Anthropos de 1966 ou son reprint par Slatkine en 1978) dans la mesure où l’unité d’intention de l’œuvre apparait désormais plus clairement.
Jean-Paul Frick, né en 1939, est décédé prématurément (en 1991) sans avoir pu éditer son immense travail sur Saint-Simon (une thèse d’État soutenue à l’université Paris IV en 1981). Il met dans Le concept d’organisation toutes les ressources méthodologiques et l’attention aux notions que procurent l’histoire de la philosophie (il a collaboré avec 10Robert Derathé, comme lui professeur à l’université de Nancy, à la traduction des Principes de philosophie du droit de Hegel2) pour commenter Saint-Simon, Comte, Condorcet et Say dans des articles3 et dans un ouvrage de grande qualité4.
Les travaux de Gouhier font de Saint-Simon au mieux un précurseur de la science sociale, jamais à proprement parler un philosophe. Ceci n’engage pas seulement l’interprétation de l’œuvre de Saint-Simon, mais aussi celle d’Auguste Comte. Si l’on inscrit Comte dans la lignée de la philosophie socialiste de Saint-Simon, on reconnait alors (contrairement à la lecture néo-catholique de Gouhier et à celle néo-conservatrice de plusieurs commentateurs actuels) l’existence d’une généalogie philosophique du républicanisme au xixe siècle en France. Dénier à Saint-Simon la qualité de philosophe, c’est rendre illisible le chemin doctrinal qui va de la Révolution française à la IIIe République. Ce chemin certes ne s’articule pas seulement aux œuvres de Saint-Simon et Comte ; le néo-kantisme, le socialisme de Pierre Leroux et beaucoup d’autres écoles de pensées sont parties prenantes de ce grand courant mais les œuvres de Saint-Simon, Bazard et Comte, surtout si on les articule, sont essentielles à sa compréhension.
Pour mettre en évidence la cohérence épistémologique et philosophique d’une œuvre qui ne permet rien moins que l’ouverture de l’espace des sciences sociales, J.-P. Frick situe les concepts forgés par Saint-Simon dans leur rapport avec la philosophie naturelle du xviiie siècle, avec les travaux d’histoire naturelle, ceux de l’École de Montpellier (Stahl, Barthez, etc.). Diderot, Buffon, Maupertuis5 ont employé le terme d’organisation, mais 11comment l’ont-ils fait ? Saint-Simon n’est pas un simple continuateur de l’histoire et de la philosophie naturelle du xviiie siècle, pas plus qu’il n’est un simple précurseur du positivisme.
Également la mise en évidence de la relation peu étudiée entre les Idéologues et Saint-Simon ouvre à une lecture républicaine de cette filiation. Le travail critique des Lumières se poursuit avec pour vecteur une anthropologie philosophique (Cabanis entre autres a établi un parallélisme entre les crises cérébrales et les crises sociales). C’est à cette articulation entre histoire naturelle et physiologie sociale, à l’examen du rôle des Idéologues, ces « libéraux anti-théologiens et anti-métaphysiciens6 » que se consacre Jean-Paul Frick. Ce dernier ne fait pas d’érudition, même si sa connaissance de la philosophie du xviiie siècle, celle de C.-H. de Saint-Simon est remarquable. Il n’étudie pas les influences, mais établit l’identité d’une doctrine (qui lie biologie et science de l’homme) au travers de l’approche philosophique d’un concept.
Dans cette étude, on voit Saint-Simon dépasser le schématisme de Condorcet ainsi que la conception anhistorique de l’Idéologie mais sans rompre avec eux. Pour Condorcet, l’humanité n’a pas d’histoire, au sens moderne du terme, elle ne met pas en œuvre « un auto-déploiement de soi à travers le temps7 ». Il manque justement à Condorcet, qui compte encore sur la combinaison et le calcul des probabilités pour approcher scientifiquement les phénomènes moraux et politiques, l’idée de vie qui permettra de penser la continuité, l’ordre immanent des sociétés et de l’histoire. D’où l’importance de la physiologie et de la biologie naissante pour compléter l’expression théorique de ce que l’esquisse de Condorcet a proposé.
12La notion d’organisation
et l’idée de classification
Comme Cabanis et de Tracy, Saint-Simon part d’un naturalisme moral et social. La vie humaine, individuelle ou collective, se conçoit sur un mode parent de celui de la vie biologique, en particulier parce qu’elle tire son ordre d’une régulation interne. Le vitalisme de Bordeu (1722-1776) ou Barthez (1734-1806), l’École de Montpellier en général, fournit le modèle d’une forme de spontanéité auto-normée de la vie sociale. Aucun Dieu, aucun principe métaphysique, aucune Nature éternelle ne sont des hypothèses nécessaires pour la comprendre. L’auto-transformation de l’humanité dans l’histoire est une mise en ordre, cet ordre émerge spontanément d’un principe interne immanent. « L’organisation fournit le concept décisif permettant d’ordonner le réel et éventuellement d’y lire une progressivité8 » écrit J.-P. Frick.
La physiologie (et non l’anatomie) telle qu’elle se conçoit dans la biologie naissante permet de conceptualiser le travail du temps, l’historicité. Et c’est la notion d’organisation qui est le vecteur de la relation entre passé, présent et avenir. Il ne s’agit en rien d’un réductionnisme. Les phénomènes sociaux ne sont pas abordables seulement avec les méthodes de la physique. Le Mémoire sur la science de l’homme innove dans la mesure où il tâtonne génialement pour fonder une science nouvelle, parente de ses prédécesseurs, mais également adaptée aux entités qu’elle veut connaître scientifiquement. Un nouvel espace philosophique, matérialiste, postule un principe unitaire pour la totalité des phénomènes, humains et non humains. L’« enchainement des formes vivantes » (Maupertuis) est le modèle de l’ordre présent dans la nature, mais aussi dans l’histoire des sociétés. La réalité sociale est appréhendable sur un mode qui s’inspire de la connaissance de la vie des organismes singuliers.
Mais ce n’est pas n’importe quelle histoire naturelle qui sert ici de référence, Buffon plutôt que Linné, la classification plutôt que la nomenclature9. 13Au xviiie siècle les naturalistes français ont préparé le transformisme et le futur évolutionnisme. Quoi qu’il en soit dans le domaine de l’histoire naturelle comme dans celui de la philosophie Saint-Simon innove et s’oppose au fixisme créationniste. Ce faisant il ouvre l’espace de la science de l’homme :
l’œuvre de Saint-Simon écrite de 1802 à 1825 se situe exactement dans la période décisive de l’histoire intellectuelle européenne, dans cette mutation où fut abandonné le mode de pensée propre aux Lumières et où fut instaurée cette structure intellectuelle dans laquelle les sciences sociales deviennent possibles, l’homme faisant alors l’objet d’une connaissance scientifique10.
Après avoir tâtonné autour du newtonianisme et de la philosophie de la nature du xviiie siècle Saint-Simon d’après Jean-Paul Frick ouvre un espace théorique en rupture avec ceux-ci. On va voir que les principes de connaissance du vivant tels que Linné par exemple les met en œuvre ne sont pas repris par Saint-Simon bien que souvent, dans un premier temps, il résume et semble reprendre telles quelles les thèses de ses prédécesseurs dans des textes qui ont statut de fiche de lecture autant que d’ouvrages proprement dits.
Longtemps la nomenclature s’est attachée à la description de l’ordre naturel fixe et stable depuis l’origine de la Création. Cet ordre était celui d’une série de singularités comprises comme des espèces distinctes créées par Dieu ; « D’espèces nous en comptons autant qu’il y a eu au commencement d’espèces diverses créées11 ». La nomenclature par conséquent se conçoit comme non arbitraire et unique. Chaque singularité végétale ou animale a une définition, et prend place dans un ensemble fixiste et essentialiste : « Au commencement des choses pour chaque espèce de vivant, il fut créé une paire unique du sexe. La raison nous en persuade12. » Le terme de nomenclature vient de nomen calo, « appeler par son nom », le nomenclator à Rome est celui qui nomme et désigne les citoyens à son maître (en période électorale, pour que celui-ci puisse s’adresser à chacun d’eux). De plus, le nom dans le cadre de la nomenclature classique n’est pas arbitraire, il exprime 14la nature de ce qui nommé : les noms sont donc bien adéquats à ce qu’ils désignent.
La classification moderne au contraire suppose une dynamique, une réalité généalogique de la vie et une dimension temporelle : l’histoire naturelle, en devenant la biologie, incorpore le travail du temps, l’historicité. La classification biologique alors ne restitue pas un ordre naturel fixe, mais la constitution progressive et graduée de l’organisation des êtres vivants en séries. À partir de l’organisme animal ou de la plante la plus simple, il s’agit de repérer la gradation de la complexité dans la composition de l’organisation. Il paraît avéré que
À la veille de la Révolution française s’affrontent deux conceptions de la classification du vivant, totalement inconciliables d’un point de vue logique. L’une, basée sur le continu, génère un cadre permettant d’imaginer des transformations d’un organisme dans un autre ; l’autre, donnant des unités taxinomiques discrètes, produit des ruptures, des coupures au sein d’un ensemble dont l’organisation paraît alors structurellement figée13.
La classification des sciences et la théorie générale de la classification, la forme de l’encyclopédie seront les instruments de réflexion de Saint-Simon et plus tard de Comte. Au-delà de Bacon, de D’Alembert, une philosophie nouvelle de la classification, la conception d’une connaissance scientifique qui construit les instruments du questionnement qu’elle adresse à la nature (à laquelle elle n’a pas accès directement, mais d’abord par le vecteur des hypothèses ou des dispositifs expérimentaux), s’imposera. La connaissance est désormais construite, historique, approximative, perfectible. Comme la classification dans la définition qu’en donne la Philosophie zoologique de Lamarck, elle est utile à la communication entre les savants mais n’a pas de naturalité.
Ce que montre bien Jean-Paul Frick c’est l’importance du concept d’organisation, de l’Essai sur l’organisation sociale (1804) à L’Organisateur (1819-1820), le mot et l’idée sont partout présents. La biologie nouvelle (le terme en Français est employé pour la première fois par Lamarck en 1802) et la future sociologie s’articulent l’une à l’autre. Est mis en évidence le fait qu’il n’y a pas de réductionnisme dans la proposition de Saint-Simon, en effet il y a des phénomènes physiques et des phénomènes moraux. L’ordre social est une réalité différente de l’ordre naturel mais 15qui en fait néanmoins partie. Il y a une égale capacité de la réalité à produire des phénomènes purement physiques et des phénomènes que l’on nomme moraux.
La différence entre l’ordre purement physique et l’ordre humain s’explique parce que l’on peut appeler la capacité complexificatrice et créatrice de la nature. C’est autour de la notion d’organisation, comme nous le verrons que se jouera l’approfondissement de cette continuité complexificatrice14.
La physiologie sociale,
naissance de la science de l’homme
Il y a donc d’abord une volonté d’innovation épistémologique et philosophique chez Saint-Simon. La société comme objet de connaissance est pour lui un phénomène dynamique : elle « vit » dans l’histoire, au sens où elle se produit et se crée elle-même, immanente comme la vie animale. La science des sociétés, la physiologie sociale, étudiera donc la société dans son action de transformation, dans ses modes d’organisation du travail et de transmission des connaissances. Comme dans la vie animale, classes et groupes sociaux naissent et parfois perdurent, l’histoire sociale donne à voir l’émergence et dans certains cas la perpétuation de formes singulières de vie. La « physiologie sociale » sera donc d’abord l’étude de ce qui caractérise la vie, c’est-à-dire l’émergence de formes neuves d’organisation. Elle est pensée et définie sur une base conceptuelle : « sa sociologie et sa philosophie sont si intimement unies que bien loin qu’elles soient externes l’une à l’autre, il est plutôt malaisé et presque impossible de les séparer et d’exposer l’une indépendamment de l’autre15 » écrit Durkheim à propos de Saint-Simon.
L’organisation interne des sociétés ordonnées en séries de groupes et de classes se construit par analogie avec la physiologie dans l’épaisseur de la construction historique. Les sociétés sont en perpétuelle transformation, 16un principe interne les ordonne et non un principe formel ou un ordre empiriquement constatable. Les sociétés, groupes ou classes n’ont donc pas d’ordonnancement directement visible. Leurs principes d’organisation sont étudiés par la science de l’homme qui s’attachera donc à approcher les « rapports internes entre les éléments dont l’ensemble est une fonction16. » La méthode employée sera parente de celle utilisée en biologie. La science de l’homme étudie les transformations de l’ordre humain collectif, dans son immanence.
Les êtres vivants sont, depuis le changement d’épistémè au début du xixe siècle, considérés comme des ensembles à trois dimensions où les structures s’étagent en épaisseur, selon un ordre dicté par le fonctionnement de l’organisme pris dans sa totalité. La surface d’un être est commandée par la profondeur et le visible des organes par l’invisible des fonctions. Ce qui régit la forme, les propriétés, le comportement d’un être vivant, c’est son organisation17. Les sociétés comme objets de connaissance seront donc approchées sur le mode « physiologique ». La physiologie comme théorie générale de l’organisation comptera les sociétés humaines parmi ses objets. Saint-Simon d’ailleurs déclare solennellement : « Mes amis, nous sommes des corps organisés, c’est en considérant comme phénomènes physiologiques les relations sociales que j’ai conçu le projet que je vous présente18. »
Les sociétés humaines doivent être étudiées comme sont étudiées les espèces animales dans la biologie naissante. Ce sont les nouvelles modalités d’explication des variations et procédés de classifications qui inspirent Saint-Simon. Il semble donc que dans ses textes fondateurs de la science de l’homme, Saint-Simon accrédite le modèle foucaldien de rupture épistémologique. Cette nouvelle science (cette méthode nouvelle, ces objets nouveaux) est issue d’une coupure ou d’un changement radical : « les révolutions scientifiques suivent de près les révolutions politiques19 » écrit Saint-Simon dans l’Introduction aux travaux scientifiques du xixe siècle.
De manière vague (en ce qui concerne Saint-Simon) ou de manière cohérente (pour ce qui est de la philosophie des sciences d’Auguste Comte), les fondateurs de la science de l’homme revendiquent l’originalité d’une 17méthode qu’ils empruntent à la biologie naissante : « nous présenterons la science de l’homme basée sur des observations physiologiques20 ». Cette méthode leur impose de considérer le caractère global, « organisé », des phénomènes qui sont étudiés, ce que Saint-Simon appelle le « mécanisme » des phénomènes. Cette dynamique de la nature et de la société était absente des philosophies ou des sciences du xviiie siècle.
Bien que la notion d’organisation soit cardinale pour comprendre la philosophie de Saint-Simon, il faut souligner que nous sommes ici dans un tout autre cadre que celui de l’organicisme vitaliste qui caractérise la pensée réactionnaire21. Loin de supposer une unité naturelle et spontanée de la société, chez Saint-Simon et Comte « on passe de l’image anthropomorphique du corps politique à celle d’organisme et d’organisation22. » L’organisation tient à une série de relations horizontales, à la différence d’un corps politique souvent pourvu d’une tête (le gouvernement, le monarque) ou une Machine efficace (Léviathan, l’homme artificiel de Hobbes).
On trouve chez Saint-Simon une conception de la biologie comme physiologie des fluides. La vie est flux continu et caractérise les corps organisés à l’inverse de la rigidité discontinue des corps bruts. Notre philosophe est sur tous les plans l’adversaire d’une anatomie sociale fixiste. Les sociétés vivent et s’auto-modifient. La société européenne se définit désormais dans l’horizontalité d’échanges, non dans la verticalité hiérarchique. De même pour Auguste Comte la vie sera une double série de relations dynamiques23.
A contrario de la physiologie de Saint-Simon et de l’analyse qu’en fait Jean-Paul Frick, un ouvrage paru il y a quelques années, Les figures de l’organisation, sciences de la vie et sciences sociales au xixe siècle24,fait du fixiste réactionnaire Cuvier et de l’anatomie le vecteur d’un « espace commun entre les sciences sociales naissantes et la biologie » et minore voire ignore les apports de Cabanis, Vicq d’Azyr, Pinel, ou Geoffroy 18Saint-Hilaire. Cette lecture est opposée à celle, progressiste, de Jean-Paul Frick. Est également peu analysé dans cet ouvrage l’apport des fondateurs de la biologie en particulier Lamarck. Et de même est négligé le rôle d’Auguste Comte, dont la philosophie est à l’origine de la société de biologie et qui a inventé le néologisme de sociologie, tout en définissant, à la suite de Saint-Simon, l’espace épistémologique des sciences de l’homme. Si l’on ajoute à cela une référence constante à Spencer et Boudon, l’interprétation de l’auteur semble renvoyer à ce que lui-même dit de Cuvier :
Il importe bien peu ici, en définitive, de savoir si Cuvier adhère à une nouvelle forme de théologie providentialiste en raison de ses convictions religieuses ou pour légitimer consciemment ou inconsciemment l’immutabilité de la société d’Ancien Régime ou plus généralement d’un ordre social hiérarchique fondée sur le christianisme25.
Il faut se souvenir que, dans le contexte de l’époque, ces questions sont l’objet de tensions très fortes entre le clan libéral, matérialiste et progressiste, auquel appartient Saint-Simon, et le camp conservateur et catholique26 (le fixisme de Cuvier est la doctrine officielle de la Restauration).
La théorie générale de l’organisation que Jean-Paul Frick décrit et qu’il appelle « fondamentale » est donc une théorie de la physiologie27 assez éloignée de l’anatomie sociale fixiste de Cuvier. L’importance accordée au concept d’organisation se situe au niveau de la description des phénomènes sociaux particuliers mais aussi au niveau de « la science générale » c’est-à-dire la philosophie. Très éloignée du fixisme, elle permet de penser et dans l’avenir d’étudier le devenir des sociétés dans le cadre d’une conception progressive et progressiste (socialiste) de l’avenir humain. Comme le dit très bien Jean-Paul Frick, « il n’y a pas de nature humaine fixée mais une dynamique coordonnée au 19cours du temps et dont la loi est immanente28. » On voit ici clairement la nature du lien entre biologie et science humaine et sa dimension politique et philosophique.
Organisation et administration
Comme l’indique Jean-Paul Frick, l’organisation sociale est très différente de l’État et n’est dirigée ni par un gouvernement autoritaire ni par le libre choix des citoyens. Anonyme et efficace, ce que Saint-Simon appelle l’administration est la régulation de « l’action générale de la société sur elle-même », elle tient compte des lois objectives régissant l’organisation de cette société. La société industrielle est fondée doublement sur les sciences : sur les applications des sciences exactes pour l’efficacité industrielle, sur la science sociale pour la connaissance de ses propres principes organisationnels. En effet les sociétés à partir de la Révolution française et de la révolution industrielle en Europe ne sont plus unifiées par les dogmes ou la théologie politique, la vie sociale et les mœurs n’ont plus la religion pour grammaire principale. Comme sociétés industrielles, c’est de manière horizontale et non verticale, de manière relative (historiquement datée) et non plus absolue qu’elles se réorganisent lorsque le régime féodal ou monarchique, autoritaire et militaire commence à lentement dépérir.
La société issue de la révolution industrielle et de la Révolution française n’est pas pour Saint-Simon lisible dans le cadre de la théologie chrétienne de l’incarnation contrairement à l’interprétation de Pierre Musso29. Même si certains saint-simoniens ultérieurement, par exemple Enfantin, retrouveront incarnation et symboles dans l’Église saint-simonienne qui s’inspire largement de l’Église catholique. L’importance de la philosophie de Saint-Simon et sa spécificité par rapport à un certain nombre de ses disciples tiennent justement à la mise à l’écart de la métaphore du corps et de l’incarnation du pouvoir pour décrire 20l’organisation sociale. Il y a bien sortie de la religion pour que puisse exister une autre forme de lien social. Le trait fondamental de l’œuvre politique de Saint-Simon, comme le montre fort bien, Jean-Paul Frick est bien l’utopie d’une société socialiste et non la religion industrielle. Tout au contraire elle fait de l’industrie un instrument : celle-ci met sa puissance au service de la « classe la plus pauvre et la plus nombreuse » et ne justifie son expansion qu’ainsi.
Cependant, Saint-Simon reste un libéral :
la rectitude qui fonde la possibilité d’une action organisatrice de l’administration ne présuppose pas cependant la nécessité d’une instance spécifique, capable de dépasser les particularités individuelles et de proclamer l’intérêt général […]. C’est sur la base même des positions individuelles que se réalise la synthèse entre l’intérêt particulier et l’intérêt général30.
D’où l’importance cardinale de la définition de la propriété, de sa distribution ou redistribution selon des modalités favorables à la production industrielle. C’est bien à partir de la définition économique de la propriété et de l’organisation du travail que se trouve redéfinie la moralité des relations sociales31. On comprend donc que c’est à partir de Smith et de Say32, grâce à des principes épistémologiques puisés dans la biologie naissante que Saint-Simon peut proposer à la fois une définition de la vie sociale, une théorie de la connaissance et un projet de réorganisation sociale.
L’administration, dans le vocabulaire de Saint-Simon, a donc la capacité d’articuler la partie et le tout, la spontanéité des activités individuelles et le plan d’ensemble qui les complémentarise et permet d’échapper à l’égoïsme et l’anarchie. L’organisation sociale comme celle du vivant surgit en quelque sorte des profondeurs de la vie de la société. Le socialisme saint-simonien émerge donc d’un « laisser-faire, laisser-passer ». De même la morale sociale, la morale positive, se fonde selon l’heureuse formule de Jean-Paul Frick sur la base d’un « utilitarisme tempéré33. » La morale comme calcul utilitariste des intérêts 21individuels est dépassée mais non niée par les valeurs de solidarité sociale. La prospérité individuelle a ici pour vecteur l’organisation sociale. Le libéralisme reste impuissant s’il n’est pas prolongé par le socialisme républicain.
La morale « […] signifiait l’instauration de relations humaines excluant tout recours à la force et reposant sur le respect spontané des règles de la vie sociale34. » C’est la reconnaissance par l’individu de l’utilité de l’association et du lien social qui importe mais également il s’agit à partir de l’utilité de concevoir la valeur intrinsèque de la fraternité (Le nouveau christianisme). Jean-Paul Frick nous amène au plus près de la définition de la cohésion sociale : celle-ci d’après Saint-Simon tient à l’unité d’organisation et à la cohérence des valeurs. Ce système rend anachronique toute forme de conquête et de domination. Le principe même de son fonctionnement exclut tout rapport de violence, toute domination de l’homme par l’homme35. Mais cette association n’exclut pas « […] la possibilité d’une instance dirigeante, qui prend en main l’organisation de l’ensemble, non pour la contraindre, mais pour lui apporter la clarté sur ses intérêts et ses sentiments36. » Cette instance, c’est l’administration au sens de Saint-Simon, administration qui ne s’impose pas à la société de l’extérieur mais qui correspond à une forme d’organisation ou de réorganisation. L’État et le politique doivent dépérir, il ne s’agit pas de remplacer un groupe au pouvoir par un autre. Reposant sur la capacité, le pouvoir est immanent à la société tout comme le principe d’organisation d’un être vivant émerge de ses actes et de son existence même.
22L’horizon politique de la fondation
de la science de l’homme
La philosophie française des sciences a pour spécificité de lier épistémologie et politique depuis l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert dont on connaît le rôle préparatoire à la Révolution française. À propos de Saint-Simon, qui tient une place éminente dans cette tradition intellectuelle, Jean-Paul Frick note avec pertinence : « Son projet “épistémologique” est lié à un projet politique mais c’est bien ce projet “épistémologique” qui fournit des ressources nécessaires au projet politique37. […] » De quelle nature est ce projet politique ? Et quelle est son importance ? Tout n’a-t-il pas été dit lorsque Engels oppose le socialisme utopique et le véritable socialisme, celui de Marx. Rien n’est moins sûr pour Jean-Paul Frick qui affirme avec vigueur à propos de la politique de Saint-Simon :
matrice des doctrines à venir, son œuvre ne serait plus une utopie par défaut à laquelle des modifications ultérieures permettraient de faire franchir le seuil qui mène à la réalité effective. Elle apparaît davantage comme l’utopie matricielle des temps modernes38.
La science de l’homme nous indique ce qu’est une société ou ce qu’elle doit être. Se tisse alors le lien originel entre la sociologie dans sa définition française du xixe siècle et le républicanisme. L’ordre humain « scelle une alliance avec l’ordre objectif ». L’évolution historique réalise cet ordre. Les choix politiques par conséquent seront guidés par la connaissance de la vie sociale, de ses équilibres, de son organisation, de son évolution. Ils ne peuvent être laissés à la fantaisie d’esprit ignorants ou doctrinaires. L’organisation est ce que Saint-Simon nomme une administration, qui met sciences et industries au service de l’ensemble de la société.
L’utopie n’est plus alors le règlement d’une société parfaite comme chez Bacon ou More, mais la mise en œuvre progressive et progressiste d’un plan d’ensemble nécessaire. Jean-Paul Frick décrit clairement ce lien entre sciences politiques et républicanisme dans son commentaire 23de la philosophie politique d’Auguste Comte, Comte qui poursuivra l’effort de Saint-Simon dans cette mise en relation.
Dans son caractère inconditionnel même, le pouvoir est un « service public ». Il représente la silhouette paradoxale à travers laquelle les hommes s’approprient leur existence au moyen d’une structure qui semble les dessaisir. C’est en ce sens, que l’on est tenté de dire que Hobbes, comme peut être Comte, ont une conception « démocratique » de la vie politique, fondée sur le refus de la démocratie comme forme de gouvernement39.
La société industrielle pour Saint-Simon doit donc se fonder sur la nouvelle science de l’homme qui lui permettra de mettre en œuvre les transformations nécessaires à la mise en place du socialisme républicain tel qu’il l’envisage. Elle constituera également une référence doctrinale qui permettra de remplacer la théologie et les références religieuses par une nouvelle forme de connaissance. Cette forme de société a ses prémisses dans l’histoire. D’après Saint-Simon l’émancipation des Communes, véritable naissance de la société civile au Moyen Âge bien qu’en opposition au monde féodal constitue les premiers linéaments de la future société industrielle. Cette transformation de la société s’assortit de la transformation de la connaissance et inversement celle-ci permet une transformation volontaire et consciente de la société.
L’organisation sociale et socialiste est une forme d’organisation différente des religions qui furent longtemps le mode de liaison du corps politique. Il n’y a plus désormais d’instance autre que le pouvoir de la société sur elle-même : l’éducation scientifique remplace les religions.
Les connaissances scientifiques ne doivent pas être envisagées seulement en elles-mêmes et pour l’apport à la connaissance positive, mais bien dans leur rôle social et pour ainsi dire politique. Considérant l’histoire des sciences en Europe depuis le Moyen Âge, Saint-Simon prête à ce développement une véritable force sociale, une puissance de désorganisation du système ancien […]. Retracer cette évolution de la pensée scientifique, c’est reconstituer un conflit qui opposa la science à la religion et les savants au clergé. Et de même faut-il voir dans ce développement de la science l’un des éléments constitutifs du nouveau système social qui se formait au sein de l’ancienne organisation. Marx verra dans l’interprétation de la fonction sociale des 24sciences, la marque de « la conception socialiste fondamentale » propre à Saint-Simon, conception qui ne cesse de référer une activité commune à l’équilibre et au conflit de la société40.
Le socialisme républicain
Pour Jean-Paul Frick, Saint-Simon pose les bases du socialisme républicain qu’Auguste Comte exposera de manière plus explicite ou systématique dans son grand Système de politique positive et auquel Durkheim donnera une forme définitive. Le lien de cette forme de socialisme avec la science de l’homme et le concept d’organisation est fort.
L’avènement de la République contre la monarchie, signifie la découverte de l’appartenance de chacun au corps social comme membre actif destiné à être reconnu dans cette qualité. L’ordre social et politique est « chose publique », la chose de tous. Il ne trouve pas son origine et sa consistance dans la personne d’un homme ou d’un groupe d’hommes occupant une place privilégiée par rapport aux autres hommes. Il n’est pas suspendu à la volonté d’« agents » excentrés par rapport aux autres hommes et qui seraient eux-mêmes le relais d’une volonté transcendante à l’ordre social. Avec l’idée républicaine le corps social accède à une sorte d’autonomie. Il se referme sur lui-même. Il trouve en lui-même le principe qui lui donne vie. Il vit de sa propre vie et de la vie de tous ceux qui le composent41.
Le républicanisme français du xixe siècle s’appuie sur la connaissance de l’organisation sociale. La question principale n’est pas la nature du gouvernement car le pouvoir ne s’exerce pas sur le corps social de l’extérieur de celui-ci par violence et contrainte. Le pouvoir est donc une administration ou un « service public ». Une fois encore, il faut souligner qu’il ne s’agit pas de changer les possesseurs ou les titulaires du pouvoir mais plutôt de transformer sa nature. Ou plutôt d’aller dans le sens de l’histoire, celui de la transformation technique et économique qui est en cours. Pour une société pacifique qui a pour but la production, le 25pouvoir est une expertise utile et non une autorité dictatoriale, ce pouvoir est dans la vie même de l’organisation et ne doit pas être compris comme extérieur à celle-ci. D’où l’importance des connaissances scientifiques qui justifie cette forme d’expertise et qui joue donc par leur nature même une sorte de rôle social.
Ainsi la science des sociétés est aussi « la science de la liberté » et non seulement la science des régimes soumis aux déterminismes […]. Ainsi d’après Saint-Simon, la sociologie parce qu’elle est l’étude de la société en actes, doit prendre en considération non seulement les habitudes, les pratiques, les régimes, les régularités, mais aussi les aspirations, les sentiments, les évolutions, les effervescences collectives, et étudier les interpénétrations entre les déterminismes sociaux et la liberté humaine42.
L’utopie socialiste s’articule à la physiologie sociale43.
Nous remercions Mme Chantal Frick d ’ avoir autorisé la publication de la thèse de son mari.
Juliette Grange
1 PUF, 2012, édition spéciale sous coffret puis 2013 en collection Quadrige.
2 Paris, Vrin, 1982.
3 « Les détours de la problématique sociologique de Saint-Simon », Revue française de sociologie, 1983, 24-2, p. 183-202 ; « L’homme, l’animal et le Grand Être. Le statut de la sociologie dans le Système de politique positive d’Auguste Comte », Revue de métaphysique et de morale, 1986 (91), no 4, p. 462-485 ; « Condorcet et le problème de l’Histoire », Dix-Huitième Siècle, 1986, no 18, p. 337-358 ; « Philosophie et économie politique chez J.-B. Say. Remarques sur les rapports entre un texte oublié de J.-B. Say et son œuvre », Histoire, économie et société, 1987, no 1, p. 51-66 ; « Le problème du pouvoir chez Auguste Comte et la signification de sa philosophie politique », Revue philosophique de la France et de l’étranger, 1988, 178(3), p. 273-301 ; « L’utopie de Saint-Simon. Éléments d’une réflexion sur l’utopie saint-simonienne et sur la logique des utopies modernes », Revue française de science politique, 1988, 35-3, p. 387-401.
4 Auguste Comte et la république positive, Presses universitaires de Nancy, 1991.
5 Maupertuis dès 1743 élabore un « mutationnisme » qui prépare au transformisme du début du xixe siècle. Diderot dans quelques articles de l’Encyclopédie sépare histoire naturelle et récit biblique.
6 G. Canguilhem, Idéologie et rationalité dans les sciences de la vie, Vrin, 1988, p. 35-36.
7 J.-P. Frick, in « Condorcet et le problème de l’histoire », revue Dix-huitième siècle, no 18, 1986, p. 338.
8 J.-P. Frick, voir ci-dessous, 2e partie, p. 237.
9 Cf. J. Grange, « De la nomenclature à la classification. Sur la nature d’une rupture entre xviiie et xixe siècles », in Nomenclatures au xviiie siècle : la science, « langue bien faite », Ph. Selosse (dir.), Ed. de l’Aristoloche, 2015.
10 P. Ansart, Sociologie de Saint-Simon, PUF, 1970, p. 61.
11 Linné, Fondamenta botanica, Amsterdam 1736, § 157.
12 Linné, ibid., § 132. Il semble cependant que Linné admette des variations (cf. T. Hoquet, Les Fondements de la botanique, Vuibert, 2006).
13 H. Le Guyader, Classification et évolution, Le Pommier / Cité des sciences, 2003, p. 104.
14 J.-P. Frick « L’utopie de Saint-Simon. Éléments d’une réflexion sur l’utopie saint-simonienne et sur la logique des utopies modernes », Revue française de science politique, 1988, 35-3, p. 391.
15 Le Socialisme, PUF, 1971, p. 118.
16 M. Foucault, Les Mots et les choses, Gallimard, 1966, p. 230.
17 F. Jacob, La Logique du vivant, Gallimard, 1969, p. 87.
18 Saint-Simon, Lettres d’un habitant de Genève, in Œuvres complètes, PUF, 2012, I, p. 118.
19 Introduction…, I, 591.
20 Mémoire sur la science de l ’ homme, II, p. 1225.
21 « Le trait fondamental de la pensée Ultra est d’être une pensée biologique, il existe un terme pour désigner ce genre : “organicisme” », R. Rémond, Les Droites en France, Aubier, 1982, p. 54.
22 J. Grange, « Du corps politique à l’organisme social », Revue internationale de philosophie, vol. 52, no 203, 1994, p. 96.
23 J. Grange, La Philosophie d’Auguste Comte. Science, politique, religion, PUF, p. 192 et suivantes.
24 D. Guillo, Les Figures de l’organisation, PUF, 2003.
25 D. Guillo, op. cit., p. 49. On peut s’interroger non sur l’interprétation idéologique de Guillo concernant la naissance de la sociologie, mais sur le silence de la critique à son sujet. La question a été largement étudiée par J. Roger et par C. Grimoult (in Évolutionnisme et fixisme en France, histoire d’un combat (1800-1882), éd. du CNRS, 1998).
26 Saint-Simon est inquiété, ses manuscrits saisis par la police et censurés. Étienne Geoffroy-Saint-Hilaire, favorable au transformisme, doit, comme s’était déjà le cas de Buffon au xviiie siècle, intégrer des passages apologétiques dans ses travaux pour qu’ils soient publiés.
27 J.-P. Frick, ci-dessous, 1re partie, p. 162 et suivantes.
28 Ibid., 2e partie, p. 327.
29 La religion industrielle, Fayard, 2017.
30 Ci-dessous, 3e partie, p. 838.
31 Ibid., 2e partie, p. 374-375
32 Mais sans en rester à la lettre de leur doctrine « on serait tenté de dire que Saint-Simon “digère” la théorie économique de ces auteurs dans sa propre philosophie » écrit J.-P. Frick. « L’utopie de Saint-Simon … », art. cité, p. 397.
33 Ci-dessous, 3e partie, p. 860 et suivantes.
34 Ibid., 3e partie, p. 601, note 157.
35 Ibid., 3e partie, p. 600, 810 notamment.
36 J.-P. Frick. « L’utopie de Saint-Simon … », art. cité, p. 395.
37 Ibid., 1re partie, p. 60.
38 « L’utopie de Saint-Simon », art. cité, p. 388.
39 J.-P. Frick, « Le problème du pouvoir chez Auguste Comte et la signification de sa philosophie politique », Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 178, juillet-septembre 1988, p. 388.
40 P. Ansart, Saint-Simon, PUF, collection philosophie, 1969, p. 57.
41 J.-P. Frick, Auguste Comte et la République positive, Presses universitaires de Nancy, 1990, p. 41-42.
42 G. Gurvitch, Introduction, C.-H. de Saint-Simon.La physiologie sociale, œuvres choisies, PUF, 1965, p. 12.
43 J. Grange, L’Idée de république, chap. xii – Sociologie et socialisme, Agora Pocket, 2018.
- Thème CLIL : 3340 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Histoire économique
- ISBN : 978-2-406-13182-3
- EAN : 9782406131823
- ISSN : 2261-0979
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-13182-3.p.0009
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 21/09/2022
- Langue : Français