Préface Le GSRL à l'EPHE
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : La Sécularisation en question. Religions et laïcités au prisme des sciences sociales
- Auteur : De Franceschi (Sylvio Hermann)
- Pages : 7 à 9
- Collection : Bibliothèque de science politique, n° 3
Article de collectif : 1/50 Suivant
PRÉFACE
Le GSRL à l’EPHE
Créé en 1995 comme unité mixte de recherches de l’EPHE et du CNRS, le GSRL est, avec le Laboratoire d’études sur les monothéismes (LEM, UMR 8584), l’une des deux grandes unités de recherches dont l’EPHE assume la tutelle principale dans le domaine du religieux. Ses recherches sont caractérisées par une pluralité d’approches, historique, philosophique, juridique, politiste, anthropologique et sociologique. Il assure une mission cruciale de représentation et d’animation de la recherche au sein de la section des Sciences religieuses. C’est dire qu’il est pour l’EPHE un laboratoire essentiel. La tradition scientifique qu’il incarne et qu’il lui revient d’entretenir et de poursuivre est un véritable patrimoine scientifique de notre établissement.
À parcourir les travaux par lesquels le GSRL s’illustre aujourd’hui vingt ans après sa fondation, on retrouve une identité – on aurait envie de dire une personnalité – scientifique qui en fait un laboratoire unique en France et dont les grands traits sont déjà présents aux origines. Le GSRL est né en effet de la fusion de deux unités, d’une part, le laboratoire Histoire et Sociologie de la laïcité de l’EPHE, qui était dirigé en 1994 par Jean Baubérot, qui devient en 1995, et jusqu’en 2001, le premier directeur du GSRL et, d’autre part, le Groupe de sociologie des religions du CNRS, dont la fondation remontait à 1954, à l’initiative d’un groupe de chercheurs et de savants particulièrement prestigieux : le premier d’entre eux, le doyen Gabriel Le Bras (1891-1970), directeur d’études (« Droit canonique ») à la section des Sciences religieuses de l’EPHE ; Henri Desroche (1914-1994), un ancien dominicain devenu chercheur en sociologie au CNRS ; Émile Poulat (1920-2014), ancien prêtre-ouvrier, lui aussi entré au CNRS ; Jacques Maître (1925-2013), sociologue, et chercheur au CNRS ; et François-André Isambert, né en 1924, sociologue, également chercheur au CNRS, un proche de Gabriel Le Bras. Si la filiation intellectuelle avec la section des Sciences religieuses de l’EPHE est claire, c’est pourtant du côté du CNRS et de la 8récente vie section de l’EPHE que le Groupe de sociologie des religions a trouvé son ancrage institutionnel.
Les grandes orientations épistémologiques actuelles du GSRL sont tributaires d’un héritage scientifique fortement marqué par l’empreinte du renouveau de la sociologie française au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Lorsque, à la génération des héritiers, les trajectoires individuelles de recherches vont se révéler parfois trop diversifiées pour coexister dans une même unité, le groupe va donner naissance au Centre d’études interdisciplinaires des faits religieux, créé en 1993 à l’EHESS par Danièle Hervieu-Léger, tandis que le Groupe de sociologie des religions, s’alliant au laboratoire Histoire et Sociologie de la laïcité de l’EPHE, a donné naissance à l’actuel GSRL. L’héritage du GSR est donc désormais partagé entre l’EPHE et l’EHESS, et les deux établissements concourent également à l’animation des prestigieuses Archives de sciences sociales des religions, fondées en 1956 par Henri Desroche et Gabriel Le Bras sous le titre d’Archives de sociologie des religions.
Sous l’impulsion décisive de Jean Baubérot, la question de la laïcité est devenue centrale dans les préoccupations scientifiques de la nouvelle unité, dont on célèbre en 2015 le vingtième anniversaire.
Fort d’une quarantaine de membres statutaires, le GSRL est une unité particulièrement importante dans l’écosystème de recherches de l’EPHE. Concentré sur les xixe, xxe et xxie siècles, il se partage chronologiquement l’étude des monothéismes avec le LEM, dont les investigations vont de l’Antiquité à la fin du xviiie siècle, et il couvre des aires géographiques beaucoup plus variées que l’autre laboratoire. Les travaux de l’unité ont une dimension sociologique clairement marquée, qui doit rappeler que l’EPHE entend conserver sa place dans le domaine de la sociologie et plus largement des sciences sociales, notamment au sein de la section des Sciences religieuses, grâce au dispositif exceptionnel de chaires constitué par les directions d’études consacrées à « Histoire et sociologie des protestantismes », « Histoire et sociologie du catholicisme contemporain », « Sociologie des religions dans le monde contemporain » et « Histoire et sociologie des laïcités », qui relèvent toutes du GSRL.
Plus particulièrement, le GSRL a délibérément défini ses préoccupations dans une évidente continuité avec les travaux menés dans le laboratoire Histoire et Sociologie de la laïcité. À la veille de son insertion dans le nouveau GSRL, l’équipe de Jean Baubérot travaillait notamment sur les rapports État-religion(s)-société civile en Europe – l’une des dernières 9publications de l’équipe, parue en 1994 sous la direction de Jean Baubérot, s’intitulait Religions et laïcité dans l’Europe des douze ; en collaboration avec l’Association française de sociologie religieuse et l’Institut d’études des religions et de la laïcité de l’Université libre de Bruxelles, avait été organisé en février 1994 un colloque intitulé « Pluralismes religieux et laïcités dans l’Europe communautaire ». Problématiques qui ont été développées et enrichies au GSRL sous la direction successive de Jean Baubérot, de Jean-Paul Willaime et enfin de Philippe Portier.
Encore aujourd’hui, le GSRL, dans la double filiation du Groupe de sociologie des religions et du laboratoire Histoire et Sociologie de la laïcité centre ses recherches sur deux grands objets clairement identifiés et qui lui donnent son originalité propre parmi les structures de la recherche française en sciences humaines et sociales : d’une part, l’étude de l’évolution contemporaine des attitudes religieuses et convictionnelles des individus, en Europe, certes, mais aussi ailleurs dans le monde, ainsi qu’en témoignent les recherches dynamiques menées au sein du laboratoire sur les terrains américains et asiatiques notamment ; d’autre part, l’évolution aux xixe, xxe et xxie siècles des relations entre Églises, États et sociétés, en quoi le GSRL reste fidèlement attaché à nourrir ses travaux des interrogations matricielles des deux unités dont il a procédé à l’heureuse fusion et témoigne de la durable et incontestable fécondité du programme de recherches originellement défini par Gabriel Le Bras et ses compagnons, puis amplifié et adapté par Jean Baubérot, avant d’être actualisé sous la direction de Jean-Paul Willaime, puis de Philippe Portier.
À vingt ans de distance, on ne peut qu’être frappé par l’ampleur du travail accompli, la masse des résultats accumulés et le dynamisme des publications. On souhaite, à l’occasion de cet anniversaire, que le GSRL poursuive résolument dans la voie qu’il s’est tracée et qu’au moyen d’une structure fédératrice de recherches, il collabore plus étroitement qu’auparavant avec le LEM afin d’assurer à l’EPHE la pleine visibilité qu’elle doit avoir dans le domaine de l’étude du religieux.
Sylvio De Franceschi1
1 Au moment où s’est tenu le colloque « Les vingt ans du GSRL », Sylvio De Franceschi était vice-président de l’École pratique des hautes études, chargé de la recherche.
- Thème CLIL : 3284 -- SCIENCES POLITIQUES -- Histoire des idées politiques
- ISBN : 978-2-406-09735-8
- EAN : 9782406097358
- ISSN : 2557-4868
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09735-8.p.0007
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 26/11/2019
- Langue : Français
- Mots-clés : Sciences religieuses, histoire des religions, histoire de la laïcité, théologie et sciences sociales, recherche