[Introduction de la quatrième partie]
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : La Première Loi du royaume. L’acte de fixation de la majorité des rois de France (1374)
- Pages : 323 à 323
- Collection : Histoire du droit, n° 9
Nous n’avons à présent plus besoin de disséquer l’acte sous toutes ses facettes pour en sonder la structure. Nous pouvons affronter son sens dans une vision unitaire. Cela ne signifie pas qu’il soit inutile à ce stade d’envisager la manière dont il est bâti, ni de s’appuyer sur ses sources. Mais ce sera dans une autre optique, celle du soutien d’une exégèse dans laquelle le problème de leur origine s’efface devant la signification éventuelle à donner à leur recours. Quant à la composition de la Constitutio, il est loisible de l’envisager d’une autre manière que celle que l’on a présentée plus haut, une manière qui fasse ressortir d’autres instruments d’écriture, d’autres techniques rédactoriales, et qui s’adapte mieux, en particulier, à la saisie du mouvement d’ensemble qui relie les différentes parties du texte, au-delà de la grammaire et de la basse continue du cursus rythmique. Cette manière consiste à souligner les techniques, d’apparence très simples mais essentielles dans la rédaction de l’acte médiéval, qui permettaient de progresser dans l’argumentation d’une façon différente de la logique quodlibétique heurtée des disputationes ou des traités scolastiques1. C’est en effet par ampliatio et par variatio, par un ensemble de techniques consistant à développer la même idée en la répétant sous une forme différente, de manière à l’infléchir insensiblement pour opérer la transition entre différentes parties du discours, que les rédacteurs des actes de la chancellerie royale procédaient, et c’est ce mouvement ample qui va nous guider dans l’exploration du sens de la loi2. Pour la faciliter, une dernière fois, le texte et son interprétation seront proposés, bloc par bloc, en frontispice des commentaires. La francisation de 1392 s’étant toutefois révélée une chausse-trappe plutôt qu’une aide, elle sera remplacée par une nouvelle traduction3, proposition nécessaire à ce stade, qui tente de retrouver la logique initiale et le sens de l’original, à défaut de ses harmoniques.
1 La différence de progression rhétorique entre la constitutio et le Songe du Vergier (Le songe du vergier, op. cit., pour la version française et Somnium viridarii, op. cit. pour la version latine) est à cet égard particulièrement éclairante. Le traité scolastique, reprenant la mécanique de la Quaestio (juridique ou théologique…), procède par thèse et antithèse, tandis que l’acte de 1374 se construit plutôt par un mouvement cyclique, mêlant inflexions progressives et reprises d’argumentations déjà esquissées plus haut, sous un angle différent.
2 Sur ces deux techniques et leur application, cf. Grévin, Rhétorique, op. cit., p. 220-229.
3 Cette traduction originale reprend le texte donné supra dans le prologue.