Résumés des contributions
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : L’Histoire du français. État des lieux et perspectives
- Pages : 411 à 416
- Collection : Histoire et évolution du français, n° 2
Résumés des contributions
Thomas M. Rainsford, « Sur la disparition de l’enclise en ancien français. »
L’enclise phonologique des pronoms personnels représente un trait caractéristique du très ancien français qui disparaît pourtant avant la fin du Moyen Âge. Basée sur un corpus électronique étiqueté, notre analyse indique que la règle phonologique d’enclise n’est plus active depuis le xie siècle, et que les formes « enclitiques » du pronom se comportent comme des affixes en ancien français.
Richard Ingham, « L’ancien français dialectal. Une comparaison du marquage du genre grammatical en anglo-normand et en wallon oriental. »
En ancien wallon oriental, le marquage du genre est devenu irrégulier lorsqu’il était signalé par l’opposition phonologique zéro / « e » atone, mais il s’observait intégralement avec les déterminants possessifs, où l’accord en genre se réalisait autrement. En anglo-normand tardif, on constate la même asymétrie. Il s’agissait dans les deux variétés d’un phénomène d’ordre phonologique ayant une incidence sur la grammaire, plutôt que d’une neutralisation s’opérant au niveau de la grammaire elle-même.
Julia Alletsgruber, « Une contribution à l’histoire du français écrit. L’étude des scriptae médiévales de l’Est. »
Les scriptae françaises médiévales sont un domaine de l’histoire du français peu étudié. Cette communication se propose de décrire des éléments des scriptae de deux corpus de chartes conservés dans les Archives Départementales de la Saône-et-Loire et de la Nièvre, et de donner quelques pistes pour des études linguistiques ultérieures. Nous étudierons notamment les traits grapho-phonétiques afin de donner un premier aperçu scriptologique des documents et de déterminer leur degré de régionalité.
Jaroslav Štichauer, « La dérivation suffixale nominale en français préclassique et classique. Quelques pistes de réflexion. »
L’article analyse l’évolution, en français préclassique et classique, de deux patrons dérivationnels, à savoir celui des noms de qualité déadjectivaux (simplesse/simplicité, lasseté/lassitude) et de la nominalisation déverbale en -ment (retardement, assassinement). Pour rendre compte d’un certain nombre de phénomènes morpholexicaux (concurrence suffixale, relatinisation), il propose des outils théoriques tels que la paradigmatisation et la restructuration des relations lexicales.
Magali Seijido, « Les questions syntaxiques chez les remarqueurs du xviie siècle. Quel apport ? »
Cet article propose un inventaire des principales questions syntaxiques traitées dans les recueils de remarques de Vaugelas et de ses principaux successeurs au xviie siècle (Buffet, Ménage, Bouhours, Bérain, Alemand, Andry et Tallemant). Après avoir déterminé la proportion des remarques consacrées à la syntaxe, les centres d’intérêt et les questions récurrentes, à titre d’illustration j’examine leurs observations sur l’anaphore pronominale.
Gilles Siouffi, « Sentiment de la langue et histoire de la langue. Quelques propositions. »
Cet article explore quelques possibilités d’exploitation de la notion de « sentiment de la langue » en histoire de la langue en présentant d’abord un état des lieux de l’usage de l’expression (ainsi que celle, en allemand, de Sprachgefühl), chez quelques linguistes parmi lesquels Ferdinand de Saussure ; en indiquant des domaines où la notion peut être opératoire, depuis les faits les plus particuliers jusqu’au plan de la langue en général ; et en illustrant l’opérativité de la notion en prenant des exemples choisis chez les remarqueurs du xviie siècle.
Joseph Reisdoerfer, « Lexicographie diachronique du gallo-roman et philologie électronique. »
Notre contribution présente deux projets de lexicographie diachronique électronique : (1) une version électronique du FEW qui devrait mieux conserver ce
monument de la philologie romane et améliorer en même temps sa consultabilité ; (2) un nouveau dictionnaire étymologique et historique du franco-roman visant à inscrire la lexicographie diachronique du français et des dialectes d’oïl dans la modernité technologique et scientifique.
Andres Max Kristol, « Dialectologie synchronique et diachronie, disciplines complémentaires. Ce que les études dialectales en synchronie peuvent apporter à la linguistique diachronique. »
Les langues dialectales, étudiées en synchronie, peuvent-elles nous renseigner sur la diachronie de l’espace linguistique auquel elles appartiennent, une « diachronie dans la synchronie », comme une certaine vision romantique du fait dialectal l’a suggéré ? Cette hypothèse est examinée ici sur la base de deux cas concrets : la synchronie et la diachronie du passé simple dans l’espace linguistique d’oïl, et le maintien d’une déclinaison bicasuelle dans certains dialectes francoprovençaux valaisans.
Christiane Marchello-Nizia, « L’importance spécifique de l’“oral représenté” pour la linguistique diachronique. »
L’hypothèse d’une origine orale des changements linguistiques est validée par d’innombrables exemples. Pour les époques anciennes, nous considérons comme source privilégiée les énoncés d’« oral représenté » insérés dans du récit, car l’auteur les marque par l’emploi de balises dédiées (annonce, incise, rappel), et plusieurs analyses confirment la spécificité de leur grammaire. Le réexamen des premières attestations de nombreux changements montre qu’elles se trouvent dans de tels énoncés.
Aude Wirth-Jaillard, « Histoire et histoire du français. Pour une approche interdisciplinaire des sources médiévales non littéraires. »
Les textes médiévaux non littéraires sont encore trop peu exploités par les linguistes travaillant sur l’histoire du français. Partant de ce constat, cet article tente de définir les raisons de cette situation avant de présenter un type de sources de cette nature, les documents comptables. Il expose ensuite l’intérêt de les envisager dans une approche interdisciplinaire, pour se terminer sur une invitation à une interdisciplinarité effective.
Cendrine Pagani-Naudet, « La langue des grammairiens est-elle une langue exemplaire ? »
L’objectif de cet article est de réfléchir à l’articulation entre l’histoire des idées linguistiques et l’histoire de la langue et de proposer une lecture des grammaires qui s’attache à leurs caractéristiques linguistiques et stylistiques. Les grammaires sont en effet des textes qui apportent un témoignage sur la langue, d’autant plus pertinent que certaines d’entre elles prétendaient illustrer la langue française, et offrir à l’usager un modèle à imiter.
Agnès Steuckardt, « Les dictionnaires anciens : De l’informatisation à l’épistémologie. »
Les dictionnaires anciens informatisés donnent un accès nouveau à l’histoire des idées linguistiques : ils permettent de suivre, selon des procédures encore à définir, l’élaboration des catégories et leur évolution. Pour proposer une méthodologie, on prend ici comme exemple la catégorisation de l’emprunt. On pourra partir des mots cibles (les emprunts), ou plutôt, dans une perspective épistémologique, des métatermes (emprunté de etc.), l’une et l’autre démarches étant complémentaires.
Corinne Féron, « N (être) censé / réputé X dans les dictionnaires monolingues (fin du xviie-xxie siècles). »
L’objectif est de montrer qu’une double lecture des dictionnaires – comme textes métalinguistiques et comme corpus d’occurrences –, permise par l’informatisation, contribue, plus que la seule prise en compte des informations lexicographiques fournies sur les unités, à l’étude diachronique. L’article porte sur deux modalisateurs présentés régulièrement comme quasi-synonymes, alors que l’étude des occurrences dans l’ensemble du texte lexicographique permet de repérer des évolutions divergentes.
Valentina Bisconti, « La langue française et son histoire dans les dictionnaires du xixe siècle. Comment évaluer les méthodes du passé ? »
Cet article analyse la description de la langue française dans trois grands dictionnaires du xixe siècle : le Dictionnaire de la langue française de Littré, le Grand Dictionnaire Universel du xixe siècle de Larousse et le Dictionnaire général
de Hatzfeld et Darmesteter. La description du français dans ceux-ci est tributaire de l’orientation historiciste qui marque la linguistique de l’époque. Cet article montre la difficulté à articuler une description fonctionnelle de la langue à l’explication de son histoire. Il se double d’une réflexion sur la tâche qu’il incombe à l’historien d’effectuer dans l’analyse des méthodes anciennes.
Sabine Lehmann, « Cohésion et cohérence discursives en diachronie. Mise au point et perspectives. »
Dans cette étude nous nous intéressons au lien qui s’établit entre la cohésion et la cohérence d’un ensemble textuel. La prise en considération d’une perspective diachronique (du moyen français au français préclassique) permet de déterminer les modifications importantes dans la conception même de la phrase comme palier de traitement, et les relations qui s’établissent entre le texte et l’unité phrastique. Elle contribue à la mise en place d’une autre conception de la cohérence discursive agissant sur des fragments textuels plus vastes et nécessitant la mise en relation d’éléments macro- et microstructurels.
Mairi McLaughlin, « La traduction comme source de changements linguistiques dans l’histoire de la langue française. »
Cet article se situe au croisement de la linguistique et de la traductologie et il a pour objectif d’attirer l’attention sur le rôle joué par la traduction dans l’évolution de la langue. La première partie de l’article offre un bref survol du rôle joué par la traduction dans l’évolution du français (ancien français, moyen français et français contemporain). La deuxième partie propose un modèle théorique de la traduction comme facteur dans le changement linguistique en général.
Claire Badiou-Monferran, « Grammaticalisation vs Pragmaticalisation. Bref retour sur les éléments d’un débat. »
Tandis que certains linguistes affirment que la pragmaticalisation est incluse dans la grammaticalisation, d’autres s’emploient à désolidariser les deux notions. Ces prises de position sont largement tributaires de l’idée, large ou étroite, que l’on se fait de la grammaticalisation. L’objet de cet article est de rappeler ce qui est visé, précisément, par « grammaticalisation au sens étroit » et « grammaticalisation au sens large », puis d’interroger la pertinence de l’approche désolidarisante.
Thomas Verjans, « “Système de possibilités” et changement linguistique. »
Dans cet article nous examinons l’hypothèse proposée par Eugenio Coseriu selon laquelle la langue peut être conçue comme un « système de possibilités ». Coseriu distingue la « norme » d’une langue, ce qui comprend les formes attestées à un moment particulier de son évolution, de son « système de possibilités », capable de générer une multiplicité de formes conformes aux règles constructionnelles de la langue, mais absentes de la norme. Nous considérons les conséquences de cette hypothèse pour l’appréhension du changement linguistique et pour la distinction traditionnelle entre synchronie et diachronie.
Peter Koch, « Phases et charnières. Modéliser l’histoire de la langue (élaboration – standardisation – coiffure – régression). »
Un modèle basé sur les oppositions fondamentales sous-tendant le champ de l’oralité et de l’écriture est appliqué au territoire de la France septentrionale. Ce modèle s’avère apte à interpréter les phases de l’histoire externe de la langue selon des catégories applicables à n’importe quelle communauté linguistique et susceptibles de mettre en évidence des similarités ainsi que des divergences dans le déroulement de l’histoire de langues différentes : élaboration, standardisation, coiffure et régression.
- Thème CLIL : 3152 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Linguistique, Sciences du langage -- Linguistique diachronique (philologie)
- ISBN : 978-2-8124-2986-6
- EAN : 9782812429866
- ISSN : 2264-4229
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-2986-6.p.0411
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 05/08/2014
- Langue : Français