Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Krausisme juridique et politique en Europe
- Pages : 413 à 417
- Collection : Rencontres, n° 525
- Série : Science politique, n° 8
Résumés
Oscar Ferreira, « Introduction »
Le krausisme philosophique se présente comme un spiritualisme rationaliste et humaniste, mais ce sont ses versants politiques et juridiques qui ont eu le plus d’impact. Le premier porta un vaste programme éducatif et progressiste, inséré au sein d’un libéralisme solidaire et d’une démocratie organique ; le second aborda toutes les branches du droit, dont la théorie de l’État. L’article propose un panorama européen, questionnant l’influence et l’héritage de ce courant de pensée jusqu’à nos jours.
Antolín Sánchez Cuervo et Delia Manzanero, « La philosophie du droit de Karl Christian Friedrich Krause et de Heinrich Ahrens »
Cet essai examine la détermination particulière de l’essence du droit et la méthodologie juridique présentes dans les travaux du philosophe allemand Karl Christian Friedrich Krause (1781-1832) et de son disciple Heinrich Ahrens (1808-1874). Pour ce faire, il condense en quelques pages les fondements du concept de droit livrés par Krause lui-même et ses disciples les plus directs.
Olivier Jouanjan, « De la non-réception de Krause et du krausisme en Allemagne »
Le droit naturel de Krause et de son disciple Ahrens a été largement ignoré et méprisé en Allemagne. La langue ésotérique de Krause ne pouvait soutenir la comparaison avec les figures philosophiques de l’idéalisme allemand. Son droit naturel devait être aussitôt démonétisé dans la science juridique par la montée en puissance de l’école historique. Après 1850, le droit naturel d’Ahrens était philosophiquement et juridiquement obsolète. Cela explique pourquoi le krausisme fut toujours déjà dépassé.
414Tristan Pouthier, « Une réception du droit naturel krausiste en France. Édouard Laboulaye »
Laboulaye consacre en 1849 deux leçons au droit naturel de Krause qui représentent un rare cas de réception de celui-ci en France. Cette réception apparaît cependant très limitée dans l’œuvre de Laboulaye. Krause a répondu chez lui à un besoin conjoncturel d’une doctrine complète de droit naturel. Or cette doctrine s’est révélée a posteriori en complet décalage avec son libéralisme postérieur, comme avec les tendances de la pensée juridique française dans la deuxième moitié du xixe siècle.
Maria Clara Calheiros, « Le droit naturel de Vicente Ferrer Neto Paiva et la réception du krausisme au Portugal »
Le krausisme au Portugal marque son début en 1843 avec la publication d’un ouvrage de Vicente Ferrer Neto Paiva. C’est l’amorce du changement qui se produit dans le cadre de la philosophie du droit portugais sous l’influence de Krause, avec des conséquences qui dépassent Ferrer. Ainsi, le krausisme détient en lui-même suffisamment de richesses pour pouvoir être simultanément associé au socialisme académique portugais et aux fondements théoriques du corporatisme défendus par A. Oliveira Salazar.
Jean-Louis Halpérin, « Le droit pénal de Karl Röder »
Röder fut professeur extraordinaire à Heidelberg où il enseigna notamment la philosophie du droit et le droit pénal. Alors qu’il n’avait suivi qu’une leçon de Krause à Göttingen, il fut un des éditeurs des œuvres du philosophe et s’appuya sur ses théories en matière de droit naturel et de droit pénal. Dans ce dernier domaine, il développa des thèses sur l’amendement des criminels en relation avec la réforme des prisons. Ses œuvres contribuèrent à la diffusion du krausisme en Espagne et au Portugal.
Paul Aubert, « Le krausisme et la construction de l’État démocratique en Espagne »
Les krausistes espagnols veulent terminer la Révolution bourgeoise et construire un État de droit, après la chute d’Isabelle II. Ils définissent l’origine et la nature de l’État, la souveraineté et l’unité organique capable de garantir 415l’harmonie sociale. L’échec pratique de la démocratisation les encourage, jusqu’en 1931, à chercher la voie plus lente de la réforme intellectuelle et morale en formant des formateurs, à une époque où être révolutionnaire en Espagne, c’est demander l’application de la loi.
Élodie Richard, « Du droit naturel aux sciences sociales. Le krausisme espagnol et la réforme politique (1875-1912) »
Cet article est consacré à la seconde génération de krausistes espagnols et à ses disciples. Il évoque leur critique du système politique conservateur instauré en 1875, en montrant ce qu’elle doit au droit naturel d’Ahrens et qui la distingue du libéralisme classique. Après 1890, cette philosophie politique s’ouvre aux approches empiriques de l’histoire du droit et de la sociologie et les mobilise pour défendre son projet d’instauration d’une « représentation organique ».
Oscar Ferreira, « Utopies organicistes et régulations corporatistes dans les dissertations doctorales portugaises du second xixe siècle. Les rêveries krausistes des ministres Mártens Ferrão et Costa Lobo »
Convaincu par l’importance de la régulation du social, le krausisme juridique portugais développa un libéralisme harmonique ou social apte à protéger les travailleurs en proposant une association des classes industrielles. Ces projets resteront doctrinaux, exposés dans des thèses universitaires. Cette utopie aux contours corporatistes fut portée par trois krausistes issus de la Faculté de droit de Coimbra : Adrião Forjaz et ses deux disciples, les futurs ministres Mártens Ferrão et Costa Lobo.
Edward Castleton, « La revendication de la représentation politique des intérêts sociaux et l’éclipse intellectuelle du krausisme en Belgique »
L’article examine le rapport entre deux développements synchroniques et diachroniques : l’éclipse intellectuelle du krausisme en Belgique dans les dernières décennies du xixe siècle et la revendication de la représentation politique des intérêts sociaux en Belgique à la même période. Il explore pourquoi paradoxalement le succès de la dissémination des idées politiques krausistes fut accompagné par le rejet du krausisme dans le milieu universitaire et militant de l’extrême gauche intellectuelle bruxelloise.
416Raphaël Cahen, « Le projet européen de Krause »
L’article apporte un éclairage inédit sur le projet d’une confédération européenne de Krause publié en juin et juillet 1814. Utopiste et précurseur, ce projet n’a jamais été traduit de l’allemand. Il appartient néanmoins à l’histoire des projets européens dans le contexte du congrès de Vienne et du premier moment du concert européen des puissances. Grâce aux krausistes Ahrens et Leonhardi et à la revue Die Friedens-wärte, le projet n’est pas tombé dans l’oubli et a connu une certaine postérité.
Wolfgang Forster, « Une politique krausiste ? Heinrich Ahrens (1808-1874) au parlement de Francfort »
En tant que membre de l’Assemblée nationale allemande à Francfort (1848-1849) et de son comité constitutionnel, le philosophe du droit krausiste Heinrich Ahrens (1808-1874) a dû prendre position sur des décisions politiques fondamentales. Cet article tente de délimiter les arguments d’Ahrens sur trois d’entre elles (l’inclusion de l’Autriche dans un futur État allemand, le rôle de son chef d’État et le problème du droit de vote universel) en examinant les documents pertinents.
Antolín Sánchez Cuervo, « La philosophie de l’éducation de Guillaume Tiberghien »
Si les écrits de Tiberghien sur la philosophie de l’éducation sont plutôt rares, ils acquièrent une pertinence singulière dans le contexte ardent des guerres scolaires entre catholiques et libéraux qui se déroulent en Belgique au second xixe siècle. Ils révèlent aussi sa facette la plus engagée de militant de la laïcité et du libéralisme, incarnée par deux projets d’enseignement primaire, en 1858 et 1870, qui, s’ils n’ont jamais abouti, illustrent à merveille la vision krausiste de l’éducation.
Caroula Argyriadis-Kervégan, « La perception du krausisme à travers la revue Die Neue Zeit (Prague, 1870-1875) »
La revue Die Neue Zeit, publiée par H. von Leonhardi, fut un outil de diffusion de la pensée du philosophe Karl Christian Friedrich Krause. Les thèmes abordés sont les relations État-Église, le mouvement pacifiste, l’éventuelle 417création d’un tribunal international, le soutien au mouvement féministe naissant et les questions éducatives. L’étude de ces prises de position permet d’observer les préoccupations de la société pragoise et germanophone durant le dernier tiers du xixe siècle.
Anne-Sophie Chambost, « Proudhon lecteur de Krause ? »
Il faut se résigner au fait que Proudhon n’a pas lu Krause, à l’œuvre duquel les références sont aussi rares qu’allusives. Au début des années 1930, cette omission n’empêche toutefois pas Gurvitch d’établir un lien étroit entre les œuvres de ces deux penseurs, dans une lecture systématique qui trace une généalogie de l’idée de droit social. La présente étude s’attache à établir des points de convergences entre Proudhon et Krause, dans un exercice de lecture fondé sur un vide… de références.
Aurélie Lahaie, « La réception laborieuse de Karl Christian Friedrich Krause par les utopistes français du xixe siècle »
Si un certain repli sur soi se fait sentir parfois de part et d’autre de la frontière franco-allemande, les relations entre ces deux pays n’en sont pas moins multiples au xixe siècle et majoritairement bienveillantes. Au vu de ces relations foisonnantes et de la doctrine qu’il défend, on aurait pu croire que Krause connaîtrait un certain succès en France, au moins chez les utopistes œuvrant à l’époque. Il n’en fut rien malgré les efforts de certains pour renverser la tendance.
Mathieu Petithomme, « Les traces du krausisme politique dans l’Espagne du temps présent. Ciudadanos et le libéralisme “constitutionnaliste” conservateur »
L’article s’intéresse aux traces contemporaines du krausisme politique à travers l’idéologie du parti Ciudadanos et précise les déterminants de la philosophie politique de Krause. Il montre que trois enjeux, l’accent sur le libéralisme et la modernisation par une vision globale de l’éducation, le rôle de l’État de droit dans la constitution de la nation espagnole et l’idée de « régénération » du système politique, sont communs au krausisme et à Ciudadanos.
- Thème CLIL : 3284 -- SCIENCES POLITIQUES -- Histoire des idées politiques
- ISBN : 978-2-406-12072-8
- EAN : 9782406120728
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-12072-8.p.0413
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 06/10/2021
- Langue : Français