Les adolescents et Youtube, des loisirs aux savoirs Quelle figure des youtubeurs dans l’évaluation de l’information en ligne ?
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Études digitales
2019 – 1, n° 7. Youtoubeurs, youtubeuses : inventions subjectives - Auteurs : Philippe (Sandrine), Simonnot (Brigitte)
- Pages : 155 à 181
- Revue : Études digitales
Les adolescents et Youtube,
des loisirs aux savoirs
Quelle figure des youtubeurs
dans l’évaluation de l’information en ligne ?
Les adolescents représentent un public à part en matière de pratiques culturelles1, celles-ci étant marquées par une porosité entre culture et distraction, art, divertissement et communication2. Les adolescents sont aussi particulièrement présents sur Youtube : cette plateforme leur permet de se livrer à leurs activités numériques préférées3 et leur offre une multitude de contenus disponibles à la demande. Si une porosité entre loisirs et savoirs s’observait également sur Youtube, cette plateforme représenterait dès lors une opportunité pour la diffusion de la culture scientifique auprès des jeunes4, mais son modèle questionnerait d’autant plus les enjeux relatifs à l’évaluation de l’information.
L’étude que nous avons entreprise vise à mieux connaître les pratiques des adolescents et plus particulièrement leurs pratiques informationnelles via cette plateforme. Concernant les contenus qu’ils consultent, 156comment font-ils leurs choix ? Nous nous intéressons ici aux mécanismes de reconnaissance qui conduisent les adolescents à faire confiance aux youtubeurs. Après un constat de la diversité et de la popularité des vidéos en ligne, notamment auprès des jeunes, nous revenons sur la notion d’autorité cognitive introduite par Patrick Wilson5 dans le domaine des pratiques informationnelles. Est-elle encore opérante et suffisante pour comprendre la manière dont les adolescents choisissent les contenus qu’ils visionnent sur Youtube ? Cette notion nous fournit un cadre pour analyser les données recueillies lors d’une étude conduite auprès d’adolescents, dont nous explicitons la méthodologie. La réputation et la performance sont citées spontanément par la plupart des adolescents interrogés. Si l’autorité cognitive semble avoir un certain poids dans leurs choix de contenus documentaires ou de vulgarisation scientifique, les résultats laissent penser que la figure jugée familière des youtubeurs et la relation de proximité telle qu’elle est vécue semblent intervenir davantage dans leurs appréciations des contenus liés à leurs loisirs.
Popularité des vidéos en ligne
et médiation des savoirs
La vidéo en ligne est devenue l’un des contenus les plus populaires sur Internet : en 2016, les vidéos en ligne représentaient à elles seules 72 % du trafic total sur Internet6. Selon le classement Alexa, après cinq années consécutives à être classé troisième site le plus visité derrière Google et Facebook, Youtube devient, en mai 2016, le deuxième site le plus visité au niveau mondial mais aussi en France7 : il est non seulement le site de vidéos en ligne le plus consulté de la Toile, mais aussi le second site le plus consulté, tous critères confondus. Ce sont les contenus de divertissement qui y rencontrent le plus de succès : en août 2017, d’après le site 157VidStatsX, le top cent des chaînes françaises les plus consultées et suivies était largement dominé par celles consacrées à l’humour, à la musique ou au jeu vidéo. Cependant, la plateforme héberge également des contenus à vocation éducative ou pédagogique. Elle s’auréole d’ailleurs elle-même d’une image de protection du savoir, des sciences et de l’éducation, au travers de programmes caritatifs ponctuels tels que Laugh Learn & Give8, ou de chaînes d’agrégation de contenus éducatifs générées automatiquement telles que Youtube for Teachers9 ou Youtube Education10.
Parmi la multitude des contenus téléversés chaque jour on décompte des vidéos de vulgarisation scientifique. Celles-ci peuvent être définies comme des vidéos courtes « visant la communication de contenus scientifiques, destinées à une large audience sur internet11 ». Une distinction peut ici être faite entre les vidéos User Generated Contents (UGC), proposées par des amateurs selon le principe originel de Youtube, et les Professionnally Generated Contents (PGC). Ces PGC sont postés par des chaînes de télévision ou des institutions scientifiques et culturelles, qui utilisent Youtube comme un espace supplémentaire où développer leur présence en ligne et leur politique de médiation culturelle. Cette présence sur une plateforme très fréquentée leur permet d’atteindre un nouvel auditoire, mais aussi de proposer des contenus innovants, voire d’entretenir un dialogue avec leur public12.
Dans une étude concernant les facteurs de popularité des vidéos de science sur Youtube, Dustin Welbourne et Will Grant ont montré que si les PGC y étaient les plus nombreux, les vidéos UGC de vulgarisation scientifique étaient plus populaires touchant la vulgarisation scientifique : ces dernières reposent en effet généralement sur un présentateur récurrent auquel les internautes peuvent s’attacher, selon une dynamique qui alimente leur affection et leur fidélité pour son programme13.
158Quelle autorité cognitive des youtubeurs ?
Éléments de méthode
Notre étude interroge la manière dont les adolescents découvrent des contenus ainsi que les facteurs qui orientent leur réception de ces vidéos en ligne. Comment les repèrent-ils et les choisissent-ils le cas échéant ? Pour analyser la manière dont les adolescents s’expriment à ce sujet, nous nous appuyons dans un premier temps sur la notion d’autorité cognitive. Dans le domaine informationnel, Patrick Wilson a introduit la notion d’autorité cognitive (ou épistémique) pour désigner le phénomène de reconnaissance sociale vis-à-vis d’une personne, en raison des connaissances qu’elle possède dans un domaine, ou du moins qui conduisent les autres à attribuer plus de poids aux propositions qu’elle avance dans ce domaine14. Il cherchait ainsi à déterminer ce sur quoi nous nous fondons pour reconnaître une autorité cognitive, notamment lorsque nous disposons de peu de connaissance sur le sujet15. Parmi diverses raisons plausibles, s’inspirant du monde académique, Patrick Wilson citait la reconnaissance par les pairs, la réputation et la performance (par exemple, le fait de guérir une maladie participe à renforcer l’autorité du médecin).
Les pionniers du web se sont inspirés de la notion d’autorité pour en construire les hiérarchies : l’algorithme du PageRank de Google, par exemple, recense le nombre de liens pointant vers un document comme autant de signes de reconnaissance. Sur les réseaux sociaux, c’est désormais le nombre de likes ou de partages qu’une publication va susciter chez les internautes qui mesure sa réputation et contribue ainsi à déterminer son classement16.
Si l’autorité cognitive ne doit pas se substituer entièrement à une évaluation critique des contenus, nous cherchons à savoir dans quelle 159mesure elle affecte les choix des adolescents quant aux vidéos qu’ils consultent sur une plateforme comme Youtube. Pour mieux comprendre ces pratiques adolescentes, nous avons entrepris une enquête par entretiens semi-directifs17 en 2016 et 2017. Les questions encadrant ces entretiens visent à connaître auprès des adolescents interrogés leurs modalités d’accès aux contenus ainsi que leurs producteurs et chaînes préférés. Elles interrogent également leur éventuelle fréquentation de contenus de vulgarisation scientifique ou culturelle sur Youtube, et, le cas échéant, à quelle occasion et pour quel usage ils les visionnent. Enfin, les questions tentent de caractériser leurs stratégies d’évaluation de ces contenus. En évitant de « décider a priori du système de cohérence interne des informations recherchées18 », la méthode de l’entretien semi-directif était adaptée à nos objectifs, puisqu’il s’agit de discerner une diversité, voire une originalité des pratiques, mais également de circonscrire les imaginaires qui les sous-tendent.
Notre échantillon est constitué de trente élèves de l’enseignement secondaire, âgés de 12 à 19 ans : neuf d’entre eux sont scolarisés dans un petit collège rural, de la cinquième à la troisième ; vingt et un sont scolarisés au lycée, de la seconde à la terminale. Le recrutement des lycéens a eu lieu dans deux établissements, un lycée général et technologique de centre-ville et un lycée polyvalent d’une petite ville ; les différentes filières sont représentées au sein de notre échantillon et nous avons tenté d’obtenir une répartition équilibrée entre filles et garçons. Cinq de ces lycéens avaient déjà participé à notre première enquête exploratoire en 2016, ce qui nous a permis de collecter des données sur l’évolution de leurs pratiques en un an. Certains de ces adolescents ont produit des contenus sur Youtube : tous les garçons scolarisés au collège ont ainsi posté des parties de jeu vidéo sur la plateforme, grâce aux outils de capture disponibles gratuitement sur internet ou proposés nativement par certaines consoles de jeux. Au lycée, quelques garçons sont auteurs de contenus : Bli, 16 ans, a imaginé un sketch humoristique sur l’ennui pendant les grandes vacances ; Mattéo, 16 ans, a publié « une cover d’une chanson » ; Antoine, 17 ans, a partagé une improvisation au piano qu’il 160a rapidement supprimée ; Gaëtan, 18 ans, a tourné et monté un clip pour son groupe de musique… Les publications des lycéens reflètent leurs passions et témoignent parfois de compétences techniques allant de l’écriture d’un scénario jusqu’à l’utilisation de logiciels de montage, voire de mixage. En revanche, toutes les filles interrogées ont évoqué leur timidité lorsqu’il est question de la publication de contenus.
Les entretiens avec les collégiens ont eu lieu au centre de documentation et d’information (CDI) de leur établissement. Ceux avec les lycéens se sont déroulés soit au CDI de leur établissement, soit dans des salles de permanence libres et non surveillées. Enfin, nous avons eu l’opportunité d’interroger huit adolescents hors de l’établissement. Menés en deux vagues entre avril 2016 et août 2017, ces entretiens ont tous fait l’objet d’un enregistrement audio avec l’accord des adolescents, avant d’être transcrits dans le respect de leur anonymat.
Des pratiques de Youtube qui évoluent
avec le temps chez les adolescents
La comparaison entre les réponses des collégiens et des lycéens laisse apparaître une construction progressive du goût et des pratiques. Nous centrerons notre analyse ici sur la figure de l’auteur/producteur de vidéos sur Youtube telle que les adolescents la décrivent : comment les ont-ils découverts et comment s’y prennent-ils pour apprécier les contenus ? Les plus jeunes collégiens citent majoritairement des youtubeurs populaires et médiatisés, dont ils consultent les vidéos dans une perspective de divertissement. Les goûts et les centres d’intérêt personnels des adolescents les dirigent ensuite progressivement vers d’autres chaînes plus spécialisées, surtout à partir de la classe de troisième, voire de seconde. Certains lycéens ont même indiqué ne pas, ou ne plus, apprécier les youtubeurs les plus populaires. Si les adolescents interrogés déclarent consulter avant tout des vidéos pour se distraire ou pour leur proximité avec leurs loisirs favoris, nous les avons poussés à s’exprimer sur les contenus de vulgarisation scientifique ou culturelle qu’ils trouvent sur Youtube. Les trois critères de l’autorité cognitive 161identifiés par Patrick Wilson ont été cités par les adolescents : par ordre de fréquence d’apparition, il s’agit de la réputation, de la performance et de la reconnaissance par les pairs.
Modalités de découverte des contenus :
des recommandations de la plateforme
aux recommandations des pairs
Les adolescents évoquent les suggestions automatiques de Youtube comme source de découverte, surtout à leurs débuts sur la plateforme. Lors de leurs premières visites, ils se fient aux suggestions et consultent les contenus des youtubeurs les plus médiatisés, dont ils ont pu entendre parler dans d’autres médias ou qui sont mis en avant par la plateforme.
Émilien et Sophie, 13 ans, ne sont encore abonnés à aucune chaîne sur Youtube : ils s’en remettent donc aux suggestions automatiques qui leur sont adressées en page d’accueil afin d’accéder à de nouveaux contenus. Jonathan, 17 ans, trouve des vidéos pour passer le temps : « en première page, je regarde celles qui m’intéressent ». Jade, 16 ans, a adopté la même stratégie. Tous deux ont tendance à consulter la plateforme sans lancer une recherche spécifique ou sans poursuivre un objectif précis. Ils se reposent simplement sur les propositions formulées en page d’accueil pour se divertir ou retrouver des contenus similaires à ceux qu’ils ont précédemment choisis. Générées automatiquement et décrites comme peu pertinentes par certains adolescents, ces propositions sont cependant susceptibles de donner lieu aux premières affiliations, sous la forme d’un abonnement aux futurs contenus du youtubeur. Mattéo, 16 ans, a découvert son youtubeur préféré alors qu’il « défilait dans mes suggestions et je crois que c’était par hasard ». Alicia, 16 ans, se souvient avoir découvert ses chaînes préférées « quand j’ai commencé sur Youtube, vers 10, 11 ans parce que je regardais des vidéos et tout, je suis tombée sur des recommandations ou d’une vidéo à une autre et une fois j’en ai vu une qui m’intéressait vraiment et pour voir j’étais curieuse j’ai regardé plus, plus puis après je suis tombée sur toutes les vidéos… Et maintenant je suis abonnée ». Détaillant ses youtubeurs 162préférés, Océane, 16 ans, explique elle aussi qu’elle a commencé par consulter les chaînes populaires mises en avant sur la page d’accueil du site : « c’était mes tout premiers pas sur Youtube, j’ai connu MisterV je crois que c’est la première personne que j’ai regardée sur Youtube, et c’était sur Youtube directement en fait parce que lui, il est connu », « EnjoyPhoenix […] c’était Youtube aussi directement, une proposition Youtube ». Elle a ensuite découvert d’autres youtubeurs proches de ses centres d’intérêt, soit grâce à des recherches par mots-clés, soit grâce à d’autres réseaux sociaux. Les jeunes semblent percevoir l’algorithme et les suggestions de la plateforme comme un service positif, destiné à les satisfaire au mieux. Nathan, 12 ans, prête même des intentions humaines et altruistes à l’algorithme de recommandations, en expliquant que « comme Youtube c’est avec Google, ils savent ce que j’aime bien ».
A contrario, parmi les adolescents les plus âgés et expérimentés, certains ont déclaré ne jamais suivre les suggestions automatiques de Youtube, à l’image de Vincent, 19 ans, ou de Paul, 17 ans : « quand il suggère des chaînes que je ne connais pas trop, des vidéos qui ont souvent été dans les Tendances qui m’intéressent pas du tout, j’irai jamais regarder ». Nous avons pu constater que si les chaînes les plus populaires et les plus mises en avant par la plateforme sont également les plus citées par certains adolescents, en particulier les plus jeunes, ceux-ci semblent toutefois éprouver des difficultés à expliquer pourquoi ils les consultent et les apprécient. En revanche, lorsqu’ils choisissent des chaînes plus spécialisées selon leurs centres d’intérêt personnels, ils évoquent des critères qui leur sont propres et qu’ils sont capables d’expliciter.
Lors de nos entretiens, de nombreux jeunes évoquent également leurs chaînes préférées qu’ils auraient découvertes grâce à la recommandation d’un cousin, d’un frère, d’un ami dont ils se sentent proches. Les personnes qu’ils fréquentent dans leur environnement scolaire sont également susceptibles de les influencer : des centres d’intérêt partagés semblent alors garantir la pertinence de ces recommandations. Anthony, 15 ans, raconte les recommandations échangées avec un surveillant « avec qui je m’entendais très bien qui aimait beaucoup Joueur du Grenier aussi, même si je connaissais un peu de nom, c’est grâce à lui que je m’y suis intéressé […] on avait les mêmes centres d’intérêt, du coup on a partagé des choses, par exemple on joue aux mêmes jeux ». Océane, 16 ans, estime que ses « amis ont souvent les mêmes goûts […] si on me 163conseille une chaîne, c’est que pour moi j’ai un intérêt commun avec cette chaîne ». Paul, 17 ans, détaille sa découverte des chaînes auxquelles il est abonné : « LinksTheSun j’en ai entendu parler par mon cousin, Joueur du Grenier j’en ai entendu parler au collège il y a longtemps, TrollDen c’était en cherchant des vidéos sur un jeu puis j’ai continué à regarder. Mamytwink j’en ai entendu parler par un ami ». Antoine, 17 ans, se rappelle avoir connu ses chaînes préférées grâce à son frère, qui « passe beaucoup plus de temps sur internet » que lui. Les lycéens ont ainsi tendance à se recommander entre pairs des contenus de divertissement, mais c’est encore davantage le cas concernant les contenus de révisions scolaires. Si plusieurs chaînes ont été citées, celle de Les Bons Profs est particulièrement plébiscitée par les élèves de troisième et les lycéens qui racontent l’avoir connue parce que « tout le monde en parlait au lycée » (Jade, 16 ans).
Abonnés, vues, likes… Réputation et popularité
La majorité de ces adolescents a déclaré prendre en compte les marqueurs de réputation19 dans leur choix et leur évaluation d’un contenu sur Youtube. Ces marqueurs peuvent y prendre la forme de pouces, vers le haut pour un avis positif ou vers le bas pour un avis négatif. Les adolescents observent également le nombre de vues et d’abonnés ainsi que les commentaires. Océane, 16 ans, se fie plutôt aux commentaires associés à une vidéo : « La plupart du temps si les commentaires sont bons c’est que la vidéo est de qualité et elle est fiable ». Elle observe également « le nombre de likes, enfin de pouces. Si c’est des pouces en bas je sais que la vidéo est pas terrible, si les commentaires sont mauvais, pareil ».
Le nombre de vues ou d’abonnés leur semble également un bon indicateur de la qualité d’une vidéo ou d’une chaîne : plusieurs lycéens ont ainsi déclaré consulter les premiers résultats de leurs requêtes, 164puisque l’algorithme Youtube prend en compte le nombre de vues. Ils estiment que si un contenu a été visionné par un grand nombre de personnes, il doit être de qualité. Bli, 16 ans, prête attention « au nombre d’abonnés quand même, et au nombre de vues. Je vais pas aller regarder une vidéo qui a dix abonnés je trouve ça fait louche un peu ». Gaëlle, 17 ans, trouve qu’une chaîne qui n’a pas beaucoup d’abonnés, « ça a pas l’air très sérieux », d’autant que Youtube a instauré un système d’authentification des comptes de youtubeurs à travers « une petite icône avec une coche ou une étoile ce genre de chose […] il faut un certain nombre d’abonnés et tout, donc généralement ouais c’est des chaînes qui sont plutôt fiables ». Pour Clara, 15 ans, la popularité et la réputation d’un youtubeur engagent sa responsabilité : « c’est des youtubeurs qui sont assez connus et je pense qu’ils se risqueraient pas trop, enfin quand ils sont pas sûrs ils le disent la plupart du temps ». Semble s’opérer ici une forme d’évaluation collective conditionnée à la popularité, évaluation qui procède de l’observation des traces d’attention laissées par d’autres internautes.
Cependant, certains adolescents ont précisément mentionné le nombre de vues ou d’abonnés comme un indicateur sans importance, voire négatif. Ainsi, Enora, 14 ans, qui déclare pourtant par ailleurs se fier à la popularité des youtubeurs, regrette que « certaines vidéos deviennent très courues, du coup c’est plus très intéressant ». Victor, 16 ans, se déclare parfois surpris par les nombres élevés d’abonnés ou de vues enregistrés par certaines chaînes, tout en soulignant que ces chiffres ne « signifient rien » pour lui. Selon Paul, 17 ans, le nombre de vues ou d’abonnés d’une chaîne n’est « pas forcément représentatif du contenu qu’ils font. Certains vont avoir beaucoup d’abonnés ou de vues alors qu’ils font un contenu qui est pas forcément de super qualité, alors que d’autres qui vont faire un contenu de très bonne qualité vont pas forcément avoir beaucoup de vues ou beaucoup d’abonnés ». Enfin, deux adolescents ont évoqué les problèmes liés aux effets de popularité sur Youtube. Antoine, 17 ans, formule à sa façon les phénomènes d’auto-renforcement circulaire de l’attention20 : « lorsqu’on voit une vidéo qui a beaucoup de vues on va se demander pourquoi y’a beaucoup de vues, même si c’est pourri. Et seulement après on va se rendre compte que c’est pourri mais on a déjà cliqué dessus du coup le compteur a déjà augmenté ». Vincent, 16519 ans, recommande d’être « soi-même en recherche de la connaissance que l’on veut apprendre » et de « toujours regarder quelque chose qui nous intéresse, pas forcément écouter ou voir des choses que tout le monde regarde » : selon lui, cette stratégie éviterait de se faire berner ou influencer par un contenu populaire mais de mauvaise qualité, au sujet totalement inconnu et face auquel l’esprit critique ne pourrait donc pas s’exercer. Antoine, 17 ans, reconnaît cependant un aspect positif aux phénomènes de popularité et au classement des résultats par Youtube : « Les vulgarisations scientifiques sont de plus en plus populaires, et plus elles sont populaires, plus un utilisateur qui n’a aucune envie particulière » va en consulter. « Plus ces vidéos vont être connues et plus elles vont s’afficher dans les premières pages de Youtube et plus on va penser à aller les regarder ! ».
Les marqueurs de réputation jouent un rôle non négligeable dans les choix des plus jeunes. S’ils se réfèrent à leurs débuts sur la plateforme à la médiatisation dont font l’objet les youtubeurs les plus connus, ils développent ensuite de nouvelles stratégies d’évaluation. Avec la pratique des réseaux socionumériques, ils ont intégré les pouces, nombre de vues, commentaires comme autant d’indices leur permettant de faire leurs choix. Cependant, certains prennent leurs distances avec ces derniers en développant une approche critique du fonctionnement de ces mécanismes basés principalement sur la popularité. Ceci étant, presque toutes les chaînes citées ont figuré parmi la page Tendances mettant en avant les vidéos les plus populaires de la plateforme. Il est possible de faire l’hypothèse, dans certains cas, d’une réécriture biographique lors des entretiens, les lycéens valorisant leur affiliation à des producteurs de contenus plus spécialisés, découverts et choisis hors de l’influence des phénomènes de popularité.
La performance
Les propos de ces adolescents au sujet de leurs critères de choix et d’évaluation font apparaître la notion de performance sous deux formes : la performance montrée, et la performance dans la qualité de production des vidéos.
La performance montrée a été particulièrement évoquée par les collégiens : elle est selon eux un critère important pour garantir la véracité de l’information et la fiabilité d’un producteur de contenus. Aucun n’a 166évoqué la possibilité d’un trucage ou d’un montage trompeur : l’image ou la vidéo seraient en elles-mêmes une preuve irréfutable. François, 12 ans, estime ainsi qu’il peut faire confiance aux contenus de vulgarisation scientifique des chaînes Trash et Topito, car « par exemple quand il va nous parler d’expériences, il va nous montrer des photos de ses expériences ». Ce qu’a également évoqué Léo, 12 ans : « Trash, ils mettent des images ». En matière de sport, Lucas, 13 ans, cite Tibo InShape qui se rend à des rencontres sportives pour montrer de nouveaux sports à son public. À cette occasion, il « pose des questions aux autres sportifs donc on voit que c’est sûr que c’est vrai ». Quand Émilien, 13 ans, consulte des chaînes de cyclisme, il fait confiance aux producteurs car « ils ont des bons vélos, puis ils savent comment faire, puis ils sont forts quoi. J’ai déjà vu des vidéos d’eux et ils font des championnats tout ça ». Il estime d’ailleurs qu’un youtubeur, « c’est quelqu’un qui fait des vidéos pour apprendre aux autres, aussi pour montrer aux autres ce qu’il fait, ce qu’il sait faire ». Léa, 19 ans, aime découvrir de nouvelles techniques de peinture ou de sculpture sur Youtube. Elle explique que « si on voit la personne faire, si c’est par exemple pour une technique » le contenu sera fiable, « mais si c’est des paroles […] qui nous expliquent pour le bac ou des trucs comme ça, on n’est pas toujours sûr, c’est pas fiable ». Quand Enora, 14 ans, consulte les vidéos de Les Bons Profs pour réviser, elle leur fait confiance « parce que c’est des vrais profs qui font des cours, ça se passe même dans un lycée ! ». Quant à Léonie, 15 ans, elle se fie à des auteurs en particulier pour découvrir la culture japonaise car il s’agit de « vrais profs » qui « montrent leur tête » ; « ça se voit qu’ils ont des connaissances quand même, savoir parler japonais c’est pas donné à tout le monde ». Le youtubeur peut ainsi démontrer son expertise par l’image et la mise en scène de sa performance dans son domaine.
La performance dans la production des vidéos en matière de qualité de l’image, du son ou du montage a également été mentionnée par plusieurs adolescents… Ce critère serait cependant mobilisé une fois l’évaluation du contenu de la vidéo effectuée pour la plupart des adolescents interrogés. Marie, 15 ans, évalue prioritairement les contenus selon l’intérêt qu’elle porte au sujet. Puis, elle « regarde si c’est de bonne qualité, si le son est convenable… Puis le cadrage aussi. Les éclairages, la luminosité ». Océane, 16 ans, observe la performance présentée dans les vidéos de maquillage ou de musculation, « et après le montage […] 167et la qualité de la vidéo, de l’image aussi ». Jonathan, 17 ans, observe « si c’est bien fait, si c’est bien filmé, avec des bonnes interviews ». Gaëtan, 18 ans, commence par évaluer « le fond, tout ce qui va être à l’intérieur de la vidéo quoi. Après la forme, la dynamique du montage, la qualité vidéo, la qualité audio, tout ça… Si on apprécie c’est plus agréable à regarder ». Mais pour Julien, 15 ans, la qualité de la vidéo est essentielle à son évaluation : ce critère le décide à accorder ou non sa confiance au producteur. Il observe ainsi « la réalisation de la vidéo, et son contenu. Si y’a une mauvaise qualité de l’image ou si y’a un mauvais son mon avis de la vidéo sera moins bien. La réalisation, si c’est un truc monté à la va-vite, que c’est vraiment pas soigné, j’aurai moins confiance en ce qui sera dit dans la vidéo ».
Le youtubeur est ainsi jugé crédible lorsqu’il fait état d’une performance relevant de son domaine d’expertise, mais également au regard de la réalisation de ses vidéos, à travers la qualité de l’image, du son, du montage. Le statut de preuve de l’image est plus prépondérant chez les collégiens, les lycéens évoquant quant à eux davantage la qualité de production des vidéos
La proximité avec les youtubeurs
Au-delà de ces trois dimensions du concept d’autorité cognitive forgé par Patrick Wilson, les jeunes expriment d’autres aspects de la relation qu’ils entretiennent avec leurs youtubeurs préférés. Ceux-ci relèvent plutôt de la confiance interpersonnelle et de l’affiliation21 : outre des contenus correspondant à leurs goûts et passions, les adolescents ressentent une forme de proximité et d’authenticité dans leur relation aux youtubeurs qui les pousse à s’affilier à leur chaîne via un abonnement. Cet abonnement symbolise alors leur soutien à leurs youtubeurs préférés tout autant qu’un moyen de surveiller la sortie de prochains contenus. En l’espèce, sont évoqués la ressemblance entre le youtubeur et son public, 168ou encore le sentiment que le youtubeur est un passionné désintéressé dont la transparence garantirait la crédibilité : les qualités attribuées à la personne du youtubeur influencent la perception positive de ses contenus. La perception de la figure du youtubeur vient se confondre avec l’évaluation de sa chaîne et de ses productions.
Homophilie
L’évaluation de la qualité des chaînes passe par la ressemblance des youtubeurs avec les adolescents : cette homophilie peut s’exprimer à travers les critères de l’âge, du genre, des préoccupations ou des centres d’intérêt. Marie, 15 ans, met en avant le genre et l’âge : elle apprécie la youtubeuse « Juste Zoé : c’est une fille, elle a un an de plus que moi. […] Elle correspond plus à ce que je recherche à savoir, elle parle de l’école, du lycée, du coup bah elle peut plus me comprendre ». Elle mentionne également HelloooBeauty : « c’est pareil, sauf qu’elle elle a deux ans de plus que moi ». Bli, 16 ans, estime que « c’est des jeunes de notre âge alors on est plus proches d’eux » et Océane, 16 ans, préfère « les jeunes de 20, 25 ans parce qu’on s’identifie à eux quand c’est des vidéos de loisirs ». Du fait de leur ressemblance avec ces adolescents, les youtubeurs traiteraient donc de sujets qui les intéressent et les concernent ; au-delà, ils seraient également capables de les comprendre. Certains jeunes ont d’ailleurs mentionné leur découverte de nouveaux centres d’intérêt permise par l’évolution de leur chaîne préférée, tels François et Léo, 12 ans, qui ont découvert la chaîne Trash alors qu’elle était encore consacrée aux Pokémon mais qui lui sont restés fidèles lorsqu’elle a abordé des sujets scientifiques. Vincent, 19 ans, consultait la chaîne Mamytwink sur les jeux vidéo, mais l’apprécie davantage depuis que le youtubeur qui l’anime propose des explorations nocturnes de lieux historiques. Une forme d’évolution parallèle entre certains youtubeurs et leur public adolescent semble donc se dessiner : suite à une réorientation de certaines chaînes, les adolescents ont continué à suivre leurs publications et se sont mis à apprécier les nouveaux sujets dont elles traitent autour de la vulgarisation scientifique. En pleine recherche à la fois de modèles auxquels s’identifier et de pairs susceptibles de partager des passions insolites22, les adolescents peuvent trouver sur Youtube 169une multitude de producteurs et de contenus, parmi lesquels certains pourront répondre à ces besoins.
L’authenticité et la passion du youtubeur
comme critères de qualité
Des critères d’authenticité, de transparence ou de probité sont également évoqués, en particulier parmi les lycéens : sans doute cela tient-il à leur meilleure connaissance du fonctionnement et du modèle économique de Youtube, qui les conduit à prendre en compte les motivations des youtubeurs au-delà du simple critère du divertissement souvent relevé parmi les collégiens. Ces adolescents plus expérimentés mentionnent ainsi des critères relatifs à la personne du youtubeur : ceux-ci portent sur les qualités morales qu’ils lui attribuent et qui légitiment la confiance qu’ils peuvent lui accorder. Au contraire, ils ne font que peu référence à des critères relatifs à l’information elle-même. À l’image de l’amateur, qui s’engage non par obligation professionnelle mais par conviction23, le youtubeur qu’ils préfèrent publie par passion : son statut d’amateur, son désintéressement et sa passion qu’il partage avec son public seraient gages d’authenticité et de qualité. Gaëtan, 18 ans, apprécie que « la plupart des personnes ont vraiment envie de faire passer soit un message, soit de partager quelque chose, ça, on le ressent beaucoup et c’est pour ça qu’on préfère d’ailleurs ce genre de média à la télévision. C’est plus une passion que leur métier en fait ». Laurent, 18 ans, affirme qu’il fait confiance à ses youtubeurs préférés « parce qu’on sent que c’est des gens qui font ça par passion », et Vincent, 19 ans, estime que « Mamytwink, quand on sait qu’il habite à [capitale de sa région] et qu’il est vraiment passionné d’Histoire, et qu’il cherche vraiment à aller jusqu’au bout, du coup on sait vraiment que tout ce qu’il apporte… c’est vrai ». Gaëtan, 18 ans, estime qu’un youtubeur peu connu sera davantage digne de confiance, car amateur : « les plus grosses chaînes derrière y a des productions etc. Ça veut dire que l’auteur des vidéos n’est plus forcément libre, y a des 170enjeux commerciaux, ça a été montré à plusieurs reprises que certains étaient limités dans leur création ». Victor, 16 ans, critique les vidéastes populaires et rémunérés qui ne publient plus par plaisir et finissent par tous se ressembler, « ceux qui postent pour être rémunérés je trouve que c’est beaucoup les youtubeurs. J’aime pas trop […] j’ai totalement décroché je trouve qu’on voit tout le temps la même chose c’est tous les mêmes. C’est pas du tout mes centres d’intérêt, ça m’intéresse pas, je les trouve même plus drôles ». Les aspects financiers de la production des youtubeurs ont été évoqués à plusieurs reprises : les lycéens évaluent plus positivement les vidéastes qui font preuve de désintéressement ou de transparence et qui semblent motivés par leur passion. Antoine, 17 ans, cite ainsi une vidéo du youtubeur Poisson Fécond qui explique les sources de revenus sur Youtube en arborant ses propres relevés bancaires ; il pense ainsi que « ce genre de volonté d’être blanc entre guillemets, transparent vis-à-vis du public, c’est quand même quelque chose qui le ramène à essayer de dire le moins de bêtises possible et une information la plus juste possible ». Il cite en contre-exemple le très populaire Norman et ses placements de produits parfois dissimulés. Il préfère les youtubeurs « comme par exemple Joueur du Grenier [qui] pour nous rassurer, prouver leur bonne foi, [vont] avouer les vidéos qui sont sponsorisées et pas le cacher simplement dans la description. Je pense que c’est déjà une preuve d’honnêteté de leur part ». Les stratégies d’exploitation de certains youtubeurs ont été critiquées également par Clara, 15 ans, qui n’accorde aucune confiance « quand le youtubeur il fait que des vidéos un peu putaclic, c’est un peu pour faire le buzz qu’ils font ça. […] genre des miniatures avec des trucs qui te font forcément cliquer ou des titres qui ont rien à voir avec la vidéo ».
La passion, le désintéressement et la transparence du youtubeur influencent la réception de ses contenus en renforçant la confiance qui lui est accordée : évaluation de l’information et évaluation du youtubeur se confondent à plusieurs reprises dans les entretiens. Mattéo, 16 ans, apprécie les vidéos de Dr Nozman pour sa présentation humoristique des sciences. Interrogé sur la fiabilité de ses contenus, l’adolescent explique que « s’il parle pas des sources dans la vidéo, je regarde la description, sinon je fais pas trop attention… Si c’est des sources que je connais des fois, je sais que c’est fiable, sinon des sources que je connais pas je sais pas trop si je dois être sûr ». Il précise surtout qu’« au moins s’il nous 171apprend quelque chose de faux je sais que c’est pas lui que je vais devoir en vouloir, enfin c’est plutôt justement la source, lui nous dit ce qu’il sait de la source pas de ce qu’il sait de tout en général ».
Ces adolescents semblent donc particulièrement observer les bonnes intentions, la passion et le désintéressement des youtubeurs, ou leur transparence quant à leurs gains financiers, autant d’aspects que les plus âgés prennent en compte dans leur évaluation des contenus produits. Le statut d’amateur des youtubeurs est spontanément cité comme gage d’authenticité, donc de qualité, un statut susceptible de renforcer le sentiment de proximité entre le youtubeur et son public24.
Proximité et lien affectif avec les youtubeurs
Si la figure du youtubeur amateur passionné par son domaine et souhaitant partager cette passion via la plateforme oriente la réception et l’évaluation des contenus qu’il produit, elle fait également l’objet d’un attachement affectif. Ainsi, certains adolescents ont l’impression de vivre une relation avec le youtubeur et semblent s’attacher à sa personne plutôt qu’à sa chaîne : lorsqu’elle est interrogée sur ses chaînes préférées, Océane, 16 ans, demande s’il « faut que je détaille les personnes, enfin les chaînes ? ». Gaëtan, 18 ans, déclare que l’on « s’attache à la personne qui fait ça » et Julien, 15 ans, explique qu’« à force de regarder des vidéos on partage du temps avec la personne finalement… Même si elle, elle le voit pas c’est quand même une sorte de relation, c’est comme quelqu’un qui regarderait la TV qui aurait tout le temps le même présentateur on peut s’attacher un peu à la personne ». Pour Océane, 16 ans, « vu que c’est des personnes qui créent ces chaînes, j’ai l’impression que quand elles publient c’est directement en rapport avec nous je sais pas comment expliquer mais… C’est comme si la personne en fait envoyait une vidéo directement à nous, c’est pas comme une 172chaîne qui va diffuser comme à la TV quoi ». Évoquant en 2005 la présence des adolescents sur les forums internet, Dominique Pasquier soulignait qu’ils pouvaient y trouver des personnes avec qui partager leurs centres d’intérêt. Sur Youtube, ils s’attachent aussi à des producteurs amateurs qui leur ressemblent, et qui vont traiter de sujets qui les intéressent spécifiquement. Ils opposent d’ailleurs volontiers le modèle de la plateforme à celui des industries culturelles de masse et en particulier à la télévision : Youtube leur permettrait de personnaliser leur expérience et leurs contenus, par opposition aux programmes diffusés massivement à la télévision. Ils vantent ainsi le service de personnalisation de Youtube sans comprendre qu’il ne s’agit que d’une nouvelle déclinaison des stratégies des industries culturelles25.
Enfin, les adolescents que nous avons interrogés disent laisser peu de commentaires. Quand ils le font ou laissent un « pouce en l’air », c’est surtout pour manifester leur soutien au youtubeur et l’encourager à produire de nouvelles vidéos similaires : c’est le cas d’Enora, 14 ans, d’Océane, 16 ans, de Gaëlle, 17 ans, de Julien, 15 ans, d’Antoine, 17 ans, de Paul, 17 ans.
Des youtubeurs dont les recommandations sont suivies
Les adolescents disent suivre les recommandations des youtubeurs qu’ils apprécient. Les conseils formulés directement par les youtubeurs comme les caméos de vidéastes invités à participer à une vidéo diffusée par une chaîne « amie » les poussent à en découvrir de nouvelles. Cette démarche a particulièrement cours chez les lycéens. Édouard, 16 ans, explique par exemple qu’il a découvert sa youtubeuse préférée, Ginger Force, grâce à un caméo dans une vidéo d’une autre chaîne qu’il « aimait bien, et du coup j’ai décidé de jeter un coup d’œil à sa chaîne et puis j’ai bien aimé ». Julien, 15 ans, raconte qu’il a connu son youtubeur préféré, E-penser, grâce à « un autre youtubeur qui s’appelle Antoine Daniel qui en avait parlé. […] S’il en parlait c’est qu’il y avait forcément quelque chose derrière, parce que parmi toutes les chaînes qu’il aurait pu présenter il a choisi celle-là je me suis dit qu’il y avait une raison ». Julien, 15 ans, précise également : « comme moi j’aimais bien ce qu’il 173faisait, si il trouvait que quelque chose était bien, il y avait des chances pour que moi aussi je trouve que ça soit bien ». Les adolescents interrogés estiment que le contenu recommandé sera de la même qualité que celui produit, donc susceptible de leur plaire. Ils estiment que le youtubeur qu’ils apprécient sera de bon conseil puisqu’ils partagent les mêmes goûts.
Le cas particulier des chaînes utilisées pour les révisions
Les chaînes sollicitées pour faire des devoirs ou des révisions représentent une exception notable à ce phénomène d’affiliation aux youtubeurs : généralement consultées pour la première fois en troisième, à l’occasion du diplôme national du brevet (DNB), elles ont été citées par l’ensemble des lycéens mais ne font pas l’objet d’un abonnement ou d’un attachement affectif.
Marie et Enora, toutes deux en troisième, consultent la chaîne Les Bons Profs depuis le début de leurs révisions pour le DNB. Généralement découverte par bouche-à-oreille entre élèves, cette chaîne a été citée par l’ensemble des jeunes qui révisent sur Youtube. Chloé, 16 ans, ne révise que sur Les Bons Profs, car le contenu est similaire au cours ; Jonathan, 17 ans, regarde des vidéos « documentaires, ou des fois quand j’ai pas tous les cours Les Bons Profs. […] Comme on est dans une filière avec beaucoup de chimie, [je regarde] des trucs que j’ai pas compris en cours ou des trucs intéressants ». Les vidéos sur Youtube viennent ainsi compléter le cours et sont spontanément saisies par ces adolescents comme une nouvelle ressource parascolaire26. Leur consultation prend cependant une forme différente de celle propre aux pratiques personnelles : s’ils consultent des contenus documentaires ou de vulgarisation pour se divertir ou se cultiver et s’ils s’abonnent volontiers aux chaînes alliant humour et découverte, les chaînes dédiées aux révisions ne sont consultées qu’en cas de besoin et ne suscitent pas une affiliation. Dans le cas de Les Bons Profs, un tel phénomène pourrait s’expliquer par le format des contenus : il s’agit en effet de capsules correspondant exactement à des chapitres du programme scolaire, présentées par un panel 174d’enseignants. Cette succession de présentateurs anonymes ne permet pas de s’attacher à une figure récurrente, phénomène déjà remarqué par Dustin Wellbourne et Will Grant au sujet des chaînes de vulgarisation scientifique27. Cette absence d’attachement et d’affiliation a pu être observée pour l’ensemble des contenus consultés dans le cadre d’un besoin scolaire : la consultation est alors ponctuelle, utilitaire et ciblée selon la nécessité du moment. La cohérence avec le cours ou les manuels constituent l’unique critère d’évaluation. Noémie, 17 ans, illustre parfaitement ce phénomène tout en faisant figure d’exception parmi les jeunes interrogés : si elle consulte Youtube, ce n’est que pour ses besoins scolaires et elle ne regarde que « des vidéos qui m’expliquent les cours » ; « c’est en parallèle, pour avoir une vision différente ». Elle n’a aucune chaîne préférée mais se fie particulièrement à Les Bons Profs dont elle a entendu parler au lycée. Son critère d’évaluation principal reste la cohérence avec ses cours et ses manuels : « ils disent la même chose que mes livres, mes AnnaBac, ils disent souvent la même chose donc oui, c’est vrai ». Les critères mis en œuvre pour juger des contenus dédiés aux révisions apparaissent donc assez différents de ceux retenus pour évaluer les pratiques de loisir.
Conclusion
Sur Youtube, les adolescents interrogés dans le cadre de cette enquête fréquentent des chaînes de divertissement, mais regardent également des contenus documentaires et de vulgarisation ainsi que des vidéos pour réviser et travailler les cours. S’ils citent plus souvent les chaînes de divertissement, en particulier les plus jeunes, leurs consultations de contenus de vulgarisation scientifique ou culturelle existent. Les premiers pas sur la plateforme sont guidés par l’algorithme de recommandations : les chaînes sont d’abord découvertes à travers les suggestions en page d’accueil, puis au hasard des requêtes et des recommandations automatiques, avant de donner lieu aux premiers abonnements. Ces recommandations automatiques favorisent les contenus les plus consultés 175par des internautes présentant un profil similaire à celui qui navigue et les suggestions correspondantes sont volontiers suivies, surtout par les plus jeunes. Certains d’entre eux perçoivent les recommandations de l’algorithme de Youtube comme un service positif destiné à les satisfaire au mieux. Les chaînes préférées citées par les adolescents plus expérimentés sont plus diversifiées et semblent correspondre davantage à des passions personnelles. Les adolescents se recommandent également entre pairs des chaînes et des contenus, en fonction de centres d’intérêt partagés. S’opère alors une sélection collective sous deux formes : à travers les recommandations entre pairs et à travers l’algorithme de recommandation de Youtube.
La réputation – ou plus souvent la popularité – entre en jeu via la médiatisation télévisée puis via les compteurs des plateformes web recensant le nombre de vues, d’abonnés ou de likes. Cependant, la performance et la reconnaissance par les pairs tiennent une place de choix parmi les critères d’appréciation de celles et ceux que nous avons interrogés. Au-delà de l’autorité cognitive, plusieurs d’entre eux évoquent la figure des youtubeurs et la proximité ressentie envers eux, vécue par les plus âgés comme une relation empreinte d’une certaine authenticité. La logique de fans et l’abonnement aux chaînes des youtubeurs préférés semblent s’imposer pour nombre d’adolescents comme le modèle de leur fréquentation de la plateforme, en particulier lorsque les contenus sont liés aux loisirs. La figure du youtubeur est porteuse à la fois d’une autorité cognitive et de qualités que les adolescents lui attribuent d’eux-mêmes : ces deux paramètres influencent la réception et l’évaluation de ses contenus. Dans l’imaginaire de ces adolescents, le youtubeur est décrit comme un amateur désintéressé, motivé par le partage et la diffusion de sa passion et de ses connaissances : il perdrait la confiance de ses fans s’il faisait des profits cachés, a fortiori si ces derniers sont réalisés aux dépens de son public. La qualité de réalisation des vidéos tient également une place de choix parmi les critères d’appréciation : semble apparaître ici un paradoxe dans les attentes des adolescents entre le statut d’amateur dont le youtubeur doit faire la démonstration et la qualité technique attendue de ses réalisations28. En réalité, ce paradoxe n’est qu’apparent : 176dans la figure du youtubeur, c’est autant l’autodidaxie que la culture participative qui semblent finalement valorisées par les adolescents.
Outre des contenus de divertissement et de loisirs, ces adolescents consultent également des vidéos pour réviser et travailler. S’ils ont identifié des vidéos sur Youtube comme une ressource parascolaire potentielle, ils ne consultent cependant de tels contenus que ponctuellement et en fonction de besoins ciblés. Ils ne s’abonnent pas aux chaînes correspondantes : seuls comptent alors le contenu et sa concordance avec le cours ou le manuel. La chaîne la plus souvent citée fait d’ailleurs appel à différents intervenants présentés comme des professeurs, plutôt qu’à un animateur récurrent. La figure du youtubeur, porteuse d’une autorité cognitive, semble ainsi importante dans leurs pratiques personnelles et électives, mais effacée dans leurs pratiques liées à leurs activités scolaires.
Sans surprise, les critères d’appréciation des youtubeurs par les adolescents s’affinent avec l’âge et une chronologie des pratiques semble se dessiner, que l’on peut analyser sous l’angle des processus d’affiliation. Alexandre Serres proposait en 2017 de distinguer l’appropriation de l’affiliation : « quand on est “affilié à” un groupe, on est “adopté”, reconnu par ce groupe. Cette dimension sociale et cette intégration d’un modèle de valeurs et de codes sociaux jouent beaucoup moins dans l’appropriation : je peux m’approprier le fonctionnement de tel ou tel outil numérique sans adhérer pour autant à ses valeurs, quand celles-ci existent. Ainsi, nous nous sommes tous approprié Google et ses multiples services ; sommes-nous pour autant “affiliés” aux valeurs, aux normes ou à l’idéologie de la firme américaine29 ? ». Dans le cas des pratiques que les adolescents interrogés développent sur Youtube, il semblerait que les plus jeunes s’affilient d’abord à la plateforme et à ses valeurs euphoriques. Au fil de leur expérience et de leur compréhension du fonctionnement de Youtube, leur affiliation se déplace ensuite de la plateforme vers certains producteurs de contenus. Certains adolescents plus âgés condamnent la dissimulation des profits qui leur paraît incompatible avec la figure du youtubeur : ils attendent transparence et sincérité de la part de leurs youtubeurs préférés, qu’ils déclarent soutenir à travers leur abonnement ou leurs encouragements. Ils en viennent à développer peu à peu une 177conscience des enjeux commerciaux de la plateforme. Plus rares sont ceux qui argumentent contre les mécanismes de popularité et de captation de l’attention qui font le cœur de ses algorithmes.
Sandrine Philippe,
Brigitte Simonnot
Université de Lorraine,
Centre de recherche
sur les médiations
Annexe I
Tableau des enquêtés
Le tableau ci-dessous présente la liste des adolescents ayant participé à ces enquêtes, recrutés au sein de trois établissements :
–Un lycée polyvalent d’une petite ville rurale, dont le profil socio-économique comprend majoritairement des CSP30 défavorisées à moyennes (établissement codé LPO) ;
–Un lycée général et technologique de centre-ville dans une petite préfecture, accueillant des CSP moyennes à favorisées (établissement codé LGT) ;
–Un collège rural, au profil socio-économique hétérogène néanmoins dominé par les CSP défavorisées à moyennes.
L’enquête s’est déroulée en deux vagues : une première enquête exploratoire a eu lieu au lycée polyvalent uniquement, au printemps 2016, à l’aide d’un guide d’entretien général. La seconde vague d’entretiens a eu lieu dans les trois établissements au printemps 2017 et s’est appuyée sur un nouveau guide d’entretien insistant davantage sur les critères de sélection et d’évaluation des vidéos.
Lycéens
Prénom |
Âge |
Classe |
Lycée |
Participation à l’enquête de 2016 |
Julien |
15 ans |
2G |
LPO |
|
Léonie |
15 ans |
2G |
LPO |
X |
Clara |
15 ans |
2G |
LGT |
|
Mattéo |
16 ans |
2G |
LPO |
|
Édouard |
16 ans |
2G |
LPO |
X |
Anthony |
15 ans |
2G |
LGT |
|
179
Alicia |
16 ans |
2G |
LGT |
|
Chloé |
16 ans |
1ES |
LPO |
|
Bli |
16 ans |
1ES |
LPO |
|
Océane |
16 ans |
1ES |
LGT |
|
Jade |
16 ans |
1ES |
LGT |
|
Victor |
16 ans |
1ES |
LGT |
|
Antoine |
17 ans |
1S |
LPO |
X |
Jonathan |
17 ans |
TSTL |
LGT |
|
Paul |
17 ans |
TS |
LGT |
|
Gaëlle |
17 ans |
TS |
LPO |
X |
Noémie |
17 ans |
TS |
LGT |
|
Gaëtan |
18 ans |
TS |
LGT |
|
Laurent |
18 ans |
TTITL |
LGT |
|
Vincent |
19 ans |
TSTI |
LPO |
X |
Léa |
19 ans |
TL |
LGT |
Collégiens
Prénom |
Âge |
Classe |
Nathan |
12 ans |
5o |
Léo |
12 ans |
5o |
François |
12 ans |
5o |
Émilien |
13 ans |
4o |
Adèle |
13 ans |
4o |
Sophie |
13 ans |
4o |
Lucas |
13 ans |
4o |
Enora |
14 ans |
3o |
Marie |
15 ans |
3o |
Annexe II
Guide d’entretien
Chaque entretien, semi-directif, a suivi une dynamique particulière, le guide servant avant tout de support pour n’oublier aucun des aspects que nous avions prévu d’aborder avec ces adolescents.
Préalable : âge, sexe, niveau et filière, interne ou externe, accès à internet à la maison (et à l’internat ou au lycée le soir, le cas échéant)
À quelle fréquence vas-tu au cinéma ?
À quelle fréquence regardes-tu la télévision ?
Utilises-tu des réseaux sociaux ? Lesquels ? À quelle fréquence ?
À quelle fréquence regardes-tu des vidéos sur internet ?
Plutôt quel type de vidéo ?
Que regardes-tu le plus souvent ? Pourquoi ?
Les regardes-tu seul, ou avec un/des amis ? Pourquoi ?
Sur quel(s) site(s) les regardes-tu ? Pourquoi ?
Comment accèdes-tu à ces vidéos : à travers une recherche sur un moteur de recherche, à travers une recherche directement sur le site, sur la suggestion d’un ami, parce que c’est une chaîne à laquelle tu es abonné… ?
Comment choisis-tu les vidéos que tu vas regarder ?
Est-ce que tu es abonnée à des chaînes ? As-tu l’impression de t’abonner à une chaîne ou à une personne ?
Suis-tu les suggestions de vidéos proposées par le site ?
Est-ce que tu as des chaînes préférées ?
Pourquoi les apprécies-tu ?
Est-ce que tu suis ces chaînes ? Comment ? Pourquoi ?
D’après toi, que trouve-t-on sur Youtube ?
Est-ce qu’il t’arrive de regarder des vidéos documentaires ? Des vidéos de vulgarisation scientifique ?
(Si évocation de vidéos « pour les cours » : Est-ce que tu es abonné à ces chaînes ?)
À quoi fais-tu attention dans une vidéo ? Pour estimer que c’est une vidéo de qualité ?
181Quels sont tes critères pour savoir si une vidéo est fiable ?
Comment décides-tu de faire confiance à une vidéo ?
Comment vois-tu qu’une vidéo n’est pas fiable ?
T’est-il arrivé de croiser des erreurs ou des choses fausses ? Comment as-tu réagi ?
As-tu observé des réactions d’autres internautes ?
Qu’est-ce que tu fais quand tu apprécies une vidéo ?
D’après toi, qui sont les gens qui postent sur Youtube ? Pourquoi ces gens postent-ils des vidéos ?
Lorsque tu regardes un contenu sur Youtube, prends-tu en compte qui est l’auteur de la vidéo ? Comment ? Pourquoi ?
Est-ce que tu fais attention au nombre de vues ? Au nombre d’abonnés ?
Est-ce que tu lis les descriptions des vidéos ?
T’arrive-t-il de lire les commentaires de vidéos Youtube ?
De poster des commentaires sur des vidéos Youtube ?
De répondre à des commentaires ?
T’arrive-t-il d’écrire des messages aux auteurs des vidéos ou à d’autres membres ?
As-tu un compte Youtube ?
Une page personnelle Youtube ?
Une chaîne Youtube ?
As-tu déjà réalisé une vidéo que tu as postée sur internet ?
L’as-tu postée sur Youtube ? Pourquoi ?
As-tu choisi une catégorie ?
Ajouté des mots-clés ? Un résumé ?
Comment les as-tu choisis ?
Pourquoi as-tu créé et publié cette vidéo, dans quel objectif, quelles étaient tes attentes/espoirs ?
Des gens ont-ils commenté cette vidéo ?
De qui s’agissait-il, selon toi ?
Ta vidéo a-t-elle été vue ? Quel nombre de vues ?
D’après toi, qui étaient ces personnes ?
Connais-tu le fonctionnement financier de Youtube ? (Sais-tu si Youtube gagne de l’argent, et comment ?)
1 Sylvie Octobre, Deux pouces et des neurones : les cultures juvéniles de l’ère médiatique à l’ère numérique, Ministère de la culture et de la communication, Paris, 2014 ; Dominique Pasquier, Cultures lycéennes : La tyrannie de la majorité, Autrement, Paris, 2005.
2 Karine Aillerie, Pratiques informationnelles informelles des adolescents (14-18 ans) sur le Web, thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication, Université Paris 13, 2011.
3 Élodie Kredens, Barbara Fontar, Fréquence écoles, Les jeunes et internet : de quoi avons-nous peur ? synthèse de l’étude réalisée par Élodie Kredens et Barbara Fontar auprès de mille enfants et adolescents, 2010. http://www.generationcyb.net/IMG/pdf/Synthese_Frequence_Ecoles.pdf – Sophie Jehel, Observatoire 2013/2014 des pratiques numériques des jeunes, Cemea Basse Normandie, Région Basse-Normandie, Académie de Caen, 2014. http://enfants-medias.cemea.asso.fr/IMG/pdf/observatoire_basse_normandie_2013-2014_v_28juin_2014.pdf
4 Andrew J. Flanagin et Miriam J. Metzger, « Digital Media and Youth : Unparalleled Opportunity and Unprecedented Responsibility », Digital Media, Youth, and Credibility, The MIT Press, Cambridge, 2008.
5 Patrick Wilson, Second-hand Knowledge. An inquiry into cognitive authority, Greenwod Press, Westport, 1983.
6 Cisco, Cisco Visual Networking Index : Forecast and Methodology, 2016-2021, 2017. https://www.cisco.com/c/en/us/solutions/collateral/service-provider/visual-networking-index-vni/complete-white-paper-c11-481360.html
7 Alexa, youtube.com Traffic Statistics, 2016. https://www.alexa.com/siteinfo/youtube.com.
8 Kevin Cahill, Laugh, learn & give at the School of Youtube, Youtube Official Blog, 2014. https://youtube.googleblog.com/2014/09/laugh-learn-give-at-school-of-youtube.html.
9 Youtube, About Youtube – Teachers, (s. d.). https://www.youtube.com/user/teachers/about.
10 Youtube, About Youtube EDU, (s. d.). https://www.youtube.com/channel/UC3yA8nDwraeOfnYfBWun83g/about.
11 Jesús Muñoz Morcillo, Klemens Czurda et Caroline Y. Robertson von Trotha, « Typologies of the popular science web video », JCOM 15 (04), A02, 2016.
12 María Carmen Erviti et Erik Stengler, « Online science videos : an exploratory study with major professional content providers in the United Kingdom », JCOM 15 (06), A06, 2016.
13 Dustin J. Welbourne et Will J. Grant, 2015, « Science communication on Youtube : Factors that affect channel and video popularity », Public Understanding of Science, vol. 25, no 6, 2015, p. 706-718.
14 Patrick Wilson, op. cit.
15 Patrick Wilson, « Bibliographic Instruction and Cognitive Authority », Library Trends, vol. 39, no 3, 1991, p. 259-270.
16 Dominique Cardon, « Du lien au like sur internet : deux mesures de la réputation », Communications, vol. 93, no 2, 2013, p. 173-186. https://www.cairn.info/revue-communications-2013-2-page-173.htm
17 Alain Blanchet, Anne Gotman et François de Singly, L’entretien : l’enquête et ses méthodes, Armand Colin, Paris, 2007 ; Romy Sauvayre, Les méthodes de l’entretien en sciences sociales, Dunod, Paris, 2013.
18 Alain Blanchet, Anne Gotman et François de Singly, op. cit.
19 Camille Alloing, « Vers une approche instrumentale de l’identité numérique : les attributs identitaires comme structuration de l’environnement informationnel ? » in Jean-Paul Pinte (dir.), Enseignement, préservation et diffusion des identités numériques, Hermès Lavoisier, Paris, 2014, p. 38-69.
20 Yves Citton, Pour une écologie de l’attention, Paris, Le Seuil, 2014.
21 Franc Morandi, « Introduction. Affiliation(s) et numérique : approche anthropologique », in Vincent Liquète et Karel Soumagnac, (dir.), Les affiliations par et avec le numérique, Hermann, Paris, 2017, p. 5-19.
22 Dominique Pasquier, op. cit.
23 Patrice Flichy, Le sacre de l’amateur. Sociologie des passions ordinaires à l’ère du numérique, Le Seuil, Paris, 2010.
24 Pauline Adenot, « Les pro-am de la vulgarisation scientifique : de la co-construction de l’ethos de l’expert en régime numérique », Itinéraires, vol. 3, 2016. http://itineraires.revues.org/3013 ; Dustin J. Welbourne, Will J. Grant, « Science communication on Youtube : Factors that affect channel and video popularity », Public Understanding of Science, vol. 25, no 6, 2015, p. 706-718.
25 Agnès Gayraud et Guillaume Heuguet, « De l’industrie musicale à la rhétorique du “service”. Youtube : une description critique », Communication & langages, vol. 2, no 184, 2015, p. 101-119.
26 À ce sujet, Laurent Petit remarquait lors d’une table-ronde Canopé (Apprendre aujourd’hui à l’heure des nouveaux medias : l’exemple de Youtube, Épinal, février 2019) que ces chaînes occupent à leur façon le marché des ressources parascolaires, jusqu’alors saisi par les parents ; sur Youtube, ces nouvelles ressources se trouvent recherchées et saisies par les adolescents eux-mêmes.
27 Dustin J. Welbourne et Will J. Grant, op. cit.
28 Cette hypothèse a été formulée par Angèle Stalder suite à la présentation d’une première version de ce texte lors du colloque « Youtubeurs, Youtubeuses » organisé par Prim à Tours les 9 et 10 novembre 2017, et nous tenons à l’en remercier.
29 Alexandre Serres, « Affiliation intellectuelle et culture numérique : la question du modèle », in Vincent Liquète et Karel Soumagnac (dir.), Les affiliations par et avec le numérique, Hermann, Paris, 2017, p. 175-188.
30 CSP : Catégories socio-professionnelles des responsables légaux ; moyennes établies grâce aux données statistiques gracieusement fournies par les chefs d’établissement.
- Thème CLIL : 3157 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Sciences de l'information et de la communication
- ISBN : 978-2-406-10419-3
- EAN : 9782406104193
- ISSN : 2497-1650
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-10419-3.p.0155
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 01/04/2020
- Périodicité : Semestrielle
- Langue : Français
- Mots-clés : Youtube, culture, distraction, adolescents, information