Une vision « managériale » des rapports de l’entreprise et de la société La responsabilité sociale stratégique de Porter et Kramer
- Publication type: Journal article
- Journal: Entreprise & Société
2018 – 1, n° 3. varia - Authors: Le Bas (Christian), Mercuri Chapuis (Sylvaine)
- Pages: 97 to 118
- Journal: Business & Society
Une vision « managÉriale »
des rapports de l’entreprise
et de la sociÉtÉ
La responsabilité sociale stratégique
de Porter et Kramer
Christian Le Bas
ESDES – The Business School
of UCLy
Sylvaine Mercuri Chapuis
ESDES – The Business School
of UCLy
Introduction
La Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE), défini comme un comportement qui va au-delà du respect des lois et réglementations, qui construit des avancées volontaires dans les domaines économiques, sociaux/sociétaux et environnementaux1, est une thématique centrale 98renouvelant l’approche des relations entre l’entreprise et la société. Elle a révolutionné la conception traditionnelle de l’entreprise et interroge davantage la manière de contrôler les activités et les obligations vis-à-vis des parties prenantes. Certaines réussites ont déjà été soulignées et elles ont démontré que le modèle de la gouvernance élargie permettait largement de soutenir la pérennité des entreprises et d’innover, tout en respectant les intérêts des parties prenantes. Dans cette perspective, il nous semble que le travail de Porter et Kramer sur la Responsabilité Sociale Stratégique (RSS) (Porter et Kramer, 2006) est d’une importance capitale pour l’analyse des pratiques actuelles de RSE puisqu’elle qu’elle permet de bien situer la réflexion en termes de management et d’innovation.
L’idée fondatrice de ce papier est que cette notion de RSS marque une vraie rupture dans la conceptualisation de la RSE. L’illustration de cette idée impose un petit détour relativement à l’histoire de ce concept. Gond et Igalens (2016) ont mis en exergue l’existence de plusieurs âges de la RSE. Au commencement la RSE est avant tout une pratique des affaires (et principalement américaine). Elle concernait une idéologie portée par certains individus qui prônaient des valeurs plutôt sociales pour soutenir la pérennité économique de l’entreprise. Ses prémices académiques apparaissent quant à elles dès les années 30 et 40 avec les écrits de Barnard (1938), Clark (1939) et Kreps et Murphy (1940) ou encore l’enquête de Fortune2 datant de 1946 sur les responsabilités sociales des hommes d’affaires. Il faudra attendre le livre de Bowen (1953) pour que le concept soit sérieusement repris dans le monde académique et qu’il soit au centre des débats entre chercheurs et société civile. Une posture intégrant une idéologie un peu plus ancienne est aussi proposée : elle s’appuie sur une tradition de philanthropie, d’éthique des affaires et de paternalisme (Mercier, 2004) voire de fondement religieux (Gond, 2012).
Même si après le travail de Bowen s’en suivirent des contestations du comportement de RSE (on pense aux remarques de Friedman bien connues) la RSE n’avait jamais été considérée comme un facteur « for profit » mais plutôt anti profit car coûteuse ou, au mieux, à côté de la logique du profit. Les arguments de Friedman sont assez destructeurs en ce qu’il souligne qu’une firme qui recherche la maximisation de ses 99profits développe par-là même (nécessairement) un projet socialement responsable car, d’une part, elle satisfait pleinement les consommateurs, et, d’autre part, étant viable, elle sécurise un certain volume d’emploi (donc agit favorablement envers les travailleurs). On peut avancer qu’il s’agit là d’une vision minimaliste de la RSE (Capron et Quairel, 2015 ; Gond et Igalens, 2016). La révolution quasi copernicienne dont les travaux de Porter constituent le levier tient au fait qu’il remet la RSE au cœur des activités des firmes (le business) également porteuse de profit (voir de plus de profit). Elle n’est plus « à côté » de l’activité d’affaires des firmes comme activité coûteuse. Elle contourne la difficulté que voyait Friedman à maintenir le comportement de maximisation dans le contexte de RSE. L’analyse porterienne a un autre effet : elle décuple le marché de la connaissance dans le conseil en RSE3.
Les revues professionnelles traitant des comportements de firmes font état de possibles confusions entre les formes de RSE ou entre la RSS et l’approche de la Shared value qui en constitue un prolongement. Dix ans après la publication du papier de Porter et Kramer dans Harvard Business Review il y a donc de bonnes raisons pour relire, interpréter et évaluer les développements ultérieurs du concept de RSS de Porter et Kramer (2006). C’est aussi réexaminer une vieille question : celle des rapports de l’entreprise à la société.
Ce papier dont le format est principalement conceptuel est structuré en deux sections. La première souligne l’évolution du concept de RSE, elle s’intéresse particulièrement à la notion de RSS chez Porter et Kramer (2006) puis elle rappelle l’intérêt de l’analyse économique pour définir les types de RSE. La seconde section se concentre sur la dimension innovante de la RSS en indiquant ce qu’impliquent réellement les questions sociales et la mondialisation des activités et en étayant le débat autour de la Shared value.
100I. Porter et Kramer (2006) :
analyser des relations entreprise/sociÉtÉ
plutôt que des tensions
I.1. Les types de RSE avant Porter et Kramer (2006)
Afin de couvrir la plupart des définitions et de souligner l’évolution du concept de RSE, Gond et Mullenbach-Servayre (2004) (cité par Mercuri Chapuis, 2014) retracent six définitions de la RSE (Tableau 1).
Approches |
La RSE va au-delà d’une simple responsabilité économique, contractuelle ou légale : « […] les entreprises ont une obligation envers les acteurs sociétaux au-delà des prescriptions légales ou contractuelles » (Gond, 2012, p. 11). |
La RSE consiste à maximiser le profit pour les actionnaires : les actionnaires prévalent et l’entreprise s’engage à satisfaire leurs attentes économiques. |
La RSE consiste à répondre aux attentes de la société de façon volontaire : importance des responsabilités économiques comme question fondamentale pour les managers. Grâce à une stabilité en termes économiques et légaux, les entreprises sont censées être capables de développer des initiatives philanthropiques et éthiques. |
La RSE se compose d’un ensemble de principes se déclinant au niveau institutionnel, organisationnel et managérial : les interrogations se positionnent en termes de processus. |
La performance sociétale de l’entreprise (PSE) comme intégration des multiples approches de la RSE (principes, processus, etc.) : ici sont visés d’autres types de performance que la traditionnelle performance économique. |
La PSE comme capacité à satisfaire les stakeholders (considération centrale pour les managers). |
Tab. 1 – Définitions de la RSE.
Source : Adapté de Gond et Mullenbach-Servayre (2004, p. 97).
101Ces définitions diverses amènent des chercheurs comme Gendron (2000) à considérer la RSE selon trois courants, non pas opposés mais qui se confortent mutuellement (Capron et Quairel, 2002). On relève ainsi le courant business ethics ou moraliste-éthique qui repose sur le devoir moral de la firme à être socialement responsable, le courant business and society ou contractuel sociétal qui entend une interrelation entre la firme son environnement et que en conséquence la RSE est le produit d’un ajustement mutuel lié par un contrat social, et le courant social issue management ou utilitaire stratégique fournissant des outils à la firme pour améliorer ses performances en tenant compte d’un environnement plutôt sociopolitique que seulement économique.
Ainsi, mises à part les très anciennes visions de RSE qui renvoient à des dimensions altruistes (Baron, 2001), qui n’ont aucun rapport avec la stratégie de l’entreprise, ni apparemment de liens avec les performances des organisations, une autre vison, moins ancienne, conçoit la RSE comme un « accompagnement social » (social support). Pour les premières, c’est le modèle de la « firme charitable » qui n’attend aucun gain de sa conduite socialement responsable. On parle aussi de RSE philanthropique. Ce schéma de RSE est tout simplement coûteux, la firme ne prétend à aucun avantage. Ce modèle est celui de nombreuses entreprises américaines. Pour les plus modernes, l’entreprise prend à son compte des revendications sociales et sociétales mais exprime également un engagement en faveur de l’environnement. La relation avec les performances de l’entreprise n’est pas inexistante. Les firmes qui mettent en œuvre ce modèle de RSE (« legitimity/commitment model ») pour Gössling (2011) sont plus profitables que les autres à cause d’un ensemble de facteurs : meilleure réputation, gains de légitimité, gains de flexibilité sur les marchés (« license to operate »). Tous ces facteurs jouent un rôle important pour accroître les performances économiques. La RSE fournit une image à l’entreprise qui la rend plus attractive. Par ailleurs le personnel mieux considéré peut s’impliquer plus. Cela tire les performances vers le haut (Gössling, 2011). Remarquons ici que cette performance plus haute est attendue sans changement (autrement que très mineurs) de ses technologies et de son « business model ». Pratiquement toutes choses étant considérées égales par ailleurs. Ce n’est plus le cas dans le cadre du modèle de la RSS. Dans cette approche, précisément celle de Porter et Kramer (2006), la RSE est fortement associée à l’innovation 102technologique, aux (nouvelles) opportunités d’affaires, au couple produit/marché. En conséquence une RSE de ce type est productrice de performances. En définitive au niveau stratégique, la RSE n’est pas un coût, elle génère des opportunités.
I.2. La notion de RSS chez Porter et Kramer (2006)
À relire le papier de Havard Business Review on voit parfaitement que le modèle porterien est assis sur une analyse des relations entre l’entreprise et la société. Même si elle comporte des critiques comme par exemple la possibilité de confusion des objectifs ou la non-légitimité de certaines revendications, Porter et Kramer (2006) approfondissent les travaux de leurs prédécesseurs sur les parties prenantes comme Freeman (1984), Wood (1991) ou Clarkson (1995) pour comprendre et expliquer les pratiques et les motivations des acteurs. Ils préfèrent ainsi souligner que les deux sont en interdépendance : la compétitivité des firmes dépend fortement de conditions de leur environnement, lequel comprend un système de lois respecté, l’absence de corruption et l’existence d’un fonctionnement transparent de l’administration. De façon symétrique la bonne santé de la société dépend d’entreprises qui peuvent créer des emplois, de la richesse de façon durable et soutenable, des innovations. Cette perspective partenariale implique en quelques sortes que chaque acteur agissant pour son compte affecte positivement ou négativement les intérêts des autres acteurs (les parties prenantes). Instrumentale, elle entend que les entreprises pourront mener leurs actions compte tenu de quatre axes : l’axe moral pour lequel les activités des entreprises perdurent grâce aux ressources de leur environnement, l’axe de préservation et de durabilité qui entend la considération du capital actuel et futur des entreprises, l’axe d’approbation qui consiste pour les managers à anticiper les changements tout en influençant les pouvoirs publics et la société civile pour recevoir une licence à opérer et l’axe de réputation permettant d’asseoir leur légitimité, de consolider leur capital et de capter les meilleures ressources (Paone et Forterre, 2012).
Selon l’approche de Porter et Kramer (2006) et comme le résume Fouda (2014, p. 23), « […] la RSE est utilisée comme un levier de performance, de profitabilité et de rentabilité des investissements ». Deux choses motivent alors les entreprises à développer ces considérations : « […] le respect de la réglementation quand elle existe, et la recherche des 103avantages concurrentiels à travers la différenciation qualitative des produits et l’amélioration de la réputation et de l’image auprès du public ». C’est un levier permettant des gains d’apprentissage organisationnel (Zadek, 2004) car une intégration stratégique plus que défensive, permet à la firme d’améliorer à long terme sa valeur économique et de profiter des avantages du « premier-entrant » en développant des processus innovants intégrant la problématique RSE.
De manière à cerner les enjeux prioritaires, Porter et Kramer (2006) proposent une typologie des questions sociales en 3 catégories :
–Celles qui ne sont pas significativement affectées par l’action de l’entreprise, et qui n’affecte pas matériellement sa survie (generic social impacts),
–Celles qui affectent les opérations courantes de l’entreprise, sa chaîne de valeur (« le cours ordinaire des affaires »),
–Celles qui affectent les déterminants (drivers) de la compétitivité des entreprises dans les territoires où elle opère (« les dimensions sociales du contexte concurrentiel »).
Deux types de RSE sont définis. La RSE défensive comprend deux aspects. L’entreprise doit être une bonne citoyenne et pouvoir atténuer les effets nocifs existants ou anticipés liés à ses activités. Elle concerne donc le premier terrain des questions sociales, et une partie des seconds (les opérations courantes de l’entreprise). Porter et Kramer (2006) soulignent bien les deux aspects a priori différents de la RSE défensive au sens de bien réagir même si en l’occurrence l’entreprise ne prend pas l’initiative. Les deux aspects ont pourtant des objets différents. Être une bonne citoyenne est considéré comme une condition nécessaire (« sine qua non ») de la RSE. Comme son degré zéro. Mais il faut encore que l’entreprise le fasse bien, en quelque sorte sans vouloir s’en débarrasser. Les auteurs précisent, en une formule lapidaire, qu’il ne s’agit pas (seulement) de sortir son carnet de chèques. Ce type d’actions accroît la valeur de l’entreprise, son goodwill. La seconde partie de cette RSE défensive est plus complexe. Elle comprend les actions menées pour éviter ou atténuer ce qui peut endommager ou détériorer les activités au sein de la chaîne de valeur. Porter et Kramer (2006) remarquent que le Global Reporting Initiative a répertorié 141 questions ayant potentiellement rapport avec des actions de RSE. Le vrai souci pour l’entreprise 104est de pouvoir anticiper ces nuisances. En clair de pouvoir déterminer les risques avant que les pressions externes affectent l’entreprise de manière à prendre des actions anticipatrices.
Mais c’est à travers la RSS que l’entreprise aura l’impact le plus significatif et pourra produire les retombées en termes de profits les plus importantes. Dans la mesure où il s’agit de stratégie, il s’agit de choisir la position de l’entreprise, unique, qui permet de produire de façon différente des concurrents, avec des prix plus bas et des services meilleurs qui répondent à des besoins des consommateurs. Mais, ici, au lieu d’appliquer de tels principes à n’importe quelle activité économique, on l’applique aux relations que l’entreprise noue avec la société. À cette occasion les auteurs avancent qu’il s’agit là d’investissements dans l’environnement social qui renforcent la compétitivité, qui ouvrent un champ de valeur partagée (Shared value4) pour l’entreprise. Dans la perspective qui est dessinée, la RSE la plus stratégique se présente lorsqu’une entreprise ajoute une dimension sociale à une proposition de valeur. De cette façon l’impact social est contenu dans la stratégie globale. La question est alors de bien choisir les questions sociales sur lesquelles l’entreprise va se concentrer. Là encore une dimension pertinente de cette question est de bien mesurer la distance que l’entreprise va pouvoir prendre (et maintenir) avec les concurrents. Résumons : la RSS vise rien de moins qu’à transformer des problèmes sociaux en opportunités d’affaires, à solutionner des questions sociales tout en accroissant la rentabilité de la firme (Crane et al., 2014).
Une conséquence plus analytique est qu’après avoir présenté trois types de questions sociales pour l’entreprise, Porter et Kramer (2006) auraient pu associer à chacune un type de RSE bien définie (différente des autres). Au lieu de cela le modèle qui est proposé vise à couper dans la seconde catégorie chacune (les questions sociales qui affectent les opérations courantes de l’entreprise). La RSE défensive prend toutes les questions sociales génériques, mais occupe la moitié du terrain de celles qui affectent la chaîne de valeur. Par ailleurs la RSS prend toutes les questions sociales qui ont une dimension concurrentielle, mais aussi l’autre partie de celles qui affectent les opérations de la chaîne de valeur, celles qui peuvent renforcer la stratégie de l’entreprise. Il aurait été plus 105simple, il nous semble, de relier à chacun des trois différents champs des questions sociales une seule pratique de RSE. Cette typologie pourrait donner trois types de RSE : une RSE éthique (ou altruiste) qui ne prendrait en charge que les questions sociales de l’entreprise citoyenne, une RSE défensive qui viserait à protéger les activités au sein de la chaîne de valeur, une RSS qui définirait les questions sociales dorénavant incluses dans les choix stratégiques des entreprises. La RSE éthique ne serait pas uniquement celle qui sort le carnet de chèques. Elle aborderait de front des questions somme toute essentielle comme l’optimisation fiscale, ou la stricte observation des lois sociales (le degré zéro de la RSE). Cette amélioration est d’ailleurs soutenue par des auteurs comme Lacoste et Pardo (2016) qui encouragent des pratiques conjointes qui prennent place entre des formes de RSE défensive et stratégique. Ils n’ont en effet pas de doutes sur une éventuelle RSE « éco-systémique5 ».
I.3. Ce que dit l’analyse Économique
des comportements de responsabilitÉ sociale
L’analyse économique a dépeint les ressorts ainsi que les déterminants des trois types de RSE (philanthropique, défensive, stratégique). Elles correspondent à des formes de comportement responsable différent : « […] le comportement éthique de l’entreprise se manifeste dans les choix stratégiques qu’elle fait » (Séguin et Durif, 2007, p. 84).
La RSE philanthropique est bien rendu par l’analyse du comportement pro-social des managers qui peuvent sacrifier une partie des profits aux bénéfices d’œuvres sociales (« en sortant le carnet de chèques » pour reprendre les termes de Porter). L’existence d’un comportement pro social des agents économiques renvoie à l’idée qu’ils peuvent renoncer à un peu de leurs avantages matériels pour le bénéfice d’autrui. Pour Benabou et Tirole (2010) cela est réalisé soit pour des motivations intrinsèques (le vrai altruisme en quelque sorte) soit pour des motifs extrinsèques (ou le désir de paraître) pour reprendre la terminologie mise au point par Benabou et Tirole (2010). Autrement dit « […] de se construire une image sociale et personnelle » (Tirole, 2016, p. 255) On peut trouver ici 106également les questions d’estime de soi et de prestige de soi. La RSE défensive correspond assez bien au comportement que mettent en place des firmes désirant élever leur niveau de responsabilité de manière à contourner les menaces de nouvelles réglementations (en matière sociale ou environnementale) toujours coûteuses à suivre. Elle peut être une réponse aux insuffisances du financement public de bien publics. On parle alors de financement privé de bien public (« privately providing public goods » pour Crifo et Forget, 2015). Ce type de RSE est pensé par la théorie de la contestabilité comme un moyen de répondre aux revendications sociales, et de discipliner. La contestation pouvant venir des consommateurs comme des compétiteurs. Comme telle la RSE tend à protéger la firme de la contestabilité sociale et lui assure un avantage sur le long terme (Hommel et Godard, 2001). C’est ici que la question de la réputation de l’entreprise prend, il nous semble, tout son sens. Il s’agit là d’un important déterminant du comportement de RSE6. La RSS implique au contraire des actions plus offensives quand la firme décide de peser sur ses compétiteurs. Une première approche renvoie au comportement de différenciation. La firme qui conçoit des produits éthiques ou des produits environnementaux peut espérer construire et maintenir à son profit des niches de marché (Reinhardt et Stavins, 2010). Les labels (verts, responsables, sociaux, durables) et les certifications jouent ici un grand rôle en faveur d’une meilleure information des consommateurs. Laissant de côté la stratégie de niches, et intéressons-nous au processus de concurrence sur le marché des biens. Si l’on admet que le comportement de RSE est coûteux et plus coûteux que les comportements non responsables, plus la compétition est sévère, moins les firmes seraient tentées par une approche responsable. On peut alors avancer que plus l’intensité de la concurrence est élevée moins le degré d’engagement responsable est fort7. Le niveau de leur financement (privé) de biens publics resterait faible. Mais d’autres recherches empiriques ne semblent pas confirmer en tout point cela (voir Crifo et Forget, 2015). La question du comportement d’innovation et de l’hypothèse de Porter sera traitée dans le paragraphe suivant.
107II. La RSS pour innover
II.1. Une première discussion de l’approche de la RSS :
ce qu’impliquent rÉellement les questions sociales
et la mondialisation des activitÉs
La littérature a souligné la puissance du concept, sa nouveauté en termes d’implications pour les conduites des entreprises, mais également une réelle fragilité en ce que certaines limites (insuffisances) apparaissent. Par exemple on a pu noter une insuffisante analyse des implications du concept en termes de comportement d’innovation technologiques (section suivante). D’autres on fait remarquer que l’analyse des questions sociales (la question de la société) reste encore trop fruste et ne prend pas en compte certaines avancées de la recherche. Par ailleurs l’application du modèle de RSS aux grandes firmes globalisées disposant de chaînes de valeur sur plusieurs pays pose des problèmes spécifiques. Revenons plus longuement sur ces deux points.
Les questions sociales sont de fait au cœur de la problématique de la RSS. Les postures peuvent cependant fortement varier d’une entreprise à l’autre (Martinet et Payaud, 2008). Des exemples de questions sociales sont fournis dans le papier de Porter et Kramer (2006) et leur typologie est claire mais le concept n’est pas produit. Il faudra attendre de nouvelles recherches sur le « social business8 » développé principalement par Yunus et al. (2010) pour raffiner les modèles d’affaires (Business models) combinant stratégie et solutions apportées aux questions sociales. La thèse de Prahalad (2005, 2009) considérant le bas de la pyramide sociale (BOP) c’est-à-dire les catégories sociales les plus pauvres, comme levier de marché et d’activités profitables renvoie à la même idée. Elle est d’ailleurs mobilisée par des auteurs comme Martinet et Payaud (2008, 2013) qui proposent quatre types de stratégies pour répondre aux enjeux de la RSE (cosmétique, défensive, intégrée et BOP)9 et indiquent, au regard du cas 108Nestlé10 qu’ils exposent, que les entreprises déploient simultanément plusieurs stratégies. Ce qui est ici enjeu ce sont les marchés des pays émergents disposant d’une importante population pauvre mais pouvant être solvable. Pour les firmes multinationales c’est une opportunité de profit de pouvoir répondre aux attentes spécifiques de ce type de marchés à condition de travailler avec les ONG et les gouvernements locaux de manière à créer des modèles d’affaires sur-mesure. Les débats sur ce sujet ont montré que les agents dans le BOP doivent être considérés non pas simplement comme des producteurs ou consommateurs potentiels mais comme des co-créateurs d’entreprises et de marchés. Ce qui génère des profits mutuellement avantageux pour les entreprises et les communautés.
Alors que le modèle de RSS s’adresse prioritairement aux grandes entreprises, les questions relatives au fait que celles-ci sont très souvent un ensemble de firmes impliquées dans une Chaîne de Valeur Globale (CVG), multinationale en un mot, sont sous estimées (si ce n’est ignorées). La RSS implique de fait de pouvoir créer des avantages concurrentiels en répondant aux demandes de la société. Ce qui est plus facile à faire pour une entreprise totalement verticalement intégrée. En revanche pour une firme multinationale qui doit gérer une chaîne de valeur globale une RSS est difficilement suivie par un réseau de multiples acteurs implantés dans plusieurs pays, chacune menant des politiques dans des environnements juridiques et sociaux différents. Les contradictions et les conflits d’objectifs et de répartition entre les acteurs et parties prenantes rendent difficiles une régulation de la Chaîne de Valeur (CV) par de la RSE. Mettre en œuvre des politiques de RSE au niveau de CV mondialisées a plusieurs implications (Acquier et al., 2015) :
a.cela génère des coûts de transaction pour les membres existants et futurs de la CV,
b.cela produit des coûts de coopération entre les membres de la CV et les parties prenantes secondaires. De plus le fait que les investissements et les profits ne soient pas toujours distribués de 109façon proportionnelle parmi les membres de la CV tend à créer un terreau alimentant des menaces organisationnelles et des conflits.
Ces remarques ne constituent pas un corpus en défaveur de la RSS, elles tendent à identifier au sein des CV mondialisées les phénomènes et les mécanismes qui s’opposent à l’émergence de la RSS. Sachant l’importance des firmes multinationales dans le capitalisme contemporain ces limitations prennent beaucoup de sens.
II.2. L’innovation est au cœur du dispositif de RSS,
elle en constitue l’enjeu essentiel, ce que valident
des Études empiriques
S’agissant de l’innovation technologique Porter et Kramer (2006) avancent deux propositions : la RSE est source d’innovations, les innovations mises en œuvre bénéficient à l’entreprise et à la société (idée à la base de la Shared value11).
L’existence de relations entre l’innovation technologique et les pratiques de RSE semblent attester par de récentes études empiriques. Par exemple des travaux économétriques menés sur un échantillon de firmes du Luxembourg, pays pour lequel on possède des données provenant d’une enquête sur les comportements de RSE effectuée en 2008, en correspondance avec des données sur les pratiques d’innovation (enquête dite CIS 2006), mettent en évidence l’existence d’une relation statistiquement significative entre le fait d’être une entreprise innovante et le fait d’adopter une démarche RSE (Le Bas et al., 2010). Une firme innovante a ainsi une propension plus forte à mettre en œuvre une action relevant d’un comportement de RSE (comme les démarches « qualité », les pratiques sociales ou sociétales visant le mieux-être des salariés, les actions environnementales de réduction des déchets). On souligne aussi que la firme innovante a une propension plus forte à mettre œuvre plusieurs dimensions de la RSE (sociales, sociétales, environnementales) en même temps. Grâce à l’enquête européenne sur l’innovation de 2008 (dite CIS 2008) et toujours sur un échantillon de firmes luxembourgeoises on montre que lorsque les firmes développent une approche environnementale de la RSE, elles ont une probabilité plus grande de mettre en œuvre des innovations environnementales. De plus cela constitue un facteur qui 110accroît le nombre de bénéfices reconnus pour l’environnement issus de ces innovations. Autrement dit l’impact positif sur l’environnement est plus fort lorsque la firme a un comportement de RSE (Poussing et Le Bas, 2013). Des études de cas menées par la Norwegian School of Management fournissent des conclusions tout à fait identiques (Midttun, 2009) tout comme ceux de Berger-Douce (2011), Berard et al. (2013) ou Bocquet et Mothe (2013) à propos des PME : la RSE est « un catalyseur d’innovation porteur de création de valeur partagée » (Berger-Douce, 2014, p. 14).
Une analyse empirique parmi les plus rigoureuses a été conduite par Bocquet et al. (2013) qui explorent les relations entre les types de RSE et les types d’innovations technologiques dans une perspective stratégique corroborant les propos de Husted et Allen (2007, p. 597) : « la création de valeur est nécessairement reliée à l’innovation ». Les auteurs identifient deux types de RSE au sens de Porter (stratégique versus défensive) distinguant le premier comme un levier proactif et l’autre comme une réponse aux pressions des parties prenantes. Ils étudient pour chaque type de RSE les innovations adoptées par les firmes (produit et/ou procédé). Il est montré (toujours sur un échantillon de firmes du Luxembourg) que les firmes ayant des profils de RSS sont plus susceptibles d’innover dans les produits et les procédés. En revanche, celles qui développent des pratiques défensives de RSE tendent à créer des barrières à l’innovation. L’alignement entre stratégie et pratiques de RSE sont pour ainsi dire une voie pour soutenir l’innovation responsable (Ingham, 2011) puisque ce n’est plus seulement le champ que couvre l’innovation qui est pris en compte mais bien la façon dont l’innovation est menée et qui correspond à un processus transparent, interactif par lequel les acteurs sociaux et les innovateurs s’ouvrent aux échanges mutuels (Berger-Douce, 2014, p. 15).
L’innovation technologique constitue un des effets positifs de l’engagement des firmes dans des pratiques de RSE selon la Commission Européenne. En effet, les compétences des firmes sont très liées au capital humain investi dans les activités technologiques. Une image positive et une réputation de responsabilité permettent aux firmes d’attirer des employés de grande qualité s’engageant fortement pour l’organisation et recherchant à accroître leur inventive productivité (Gössling, 2011). La firme responsable constitue un partenaire digne de confiance disposant d’une « license to operate » lui permettant de recevoir une plus grande acceptabilité sociale pour mener ses actions. Mettre plus de confiance 111dans les relations avec les autres parties prenantes industrielles présente beaucoup d’avantages dans les opérations d’innovation ouverte, de partenariats ou d’accords technologiques, de passation de licences de brevets.
II.3. Un prolongement porterien de la RSS :
l’approche de la Shared value
C’est dans le prolongement de l’idée de RSS que la notion de Shared value, plus récente, est élaborée par les deux mêmes auteurs (Porter et Kramer, 2011). Cette approche vise rien de moins qu’à réinventer le capitalisme et déclencher une vague de croissance et d’innovation. L’entreprise, ses clients, ses fournisseurs et d’autres parties prenantes telles que les états ou la société civile par exemple, sont au cœur d’un réseau qui, en interagissant, développent des idées nouvelles (technologiques mais aussi sur des manières diverses de gérer les affaires). L’échange et le dialogue permettent de développer l’empathie vis-à-vis d’autres parties prenantes, pour que chacun trouve sa place et ne se sente pas ignoré. Elle est ainsi définie : « […] la création de valeur économique suivant un chemin qui crée aussi de la valeur pour la société en considérant ses besoins et ses enjeux » (« creating economic value in a way that also creates value for society by addressing its needs and challenges12 »). Les besoins sociaux que la pratique de la Shared value se propose de satisfaire sont très conséquents (pratiquement infinis). Les deux auteurs affirment que cette approche ne doit pas être confondue avec la responsabilité sociale ou même l’exigence de développement durable13. Elle doit même s’y substituer en guidant les investissements des entreprises.
Il est vrai que dans leur papier de la Harvard Business Review (Porter et Kramer, 2011) ne construisent pas explicitement la liaison entre la RSS et la Shared value. Notre hypothèse est que si cette nouvelle approche dite de Shared value ne peut être confondue avec les deux formes anciennes de RSE (philanthropique et défensive14), elle analyse 112des pratiques qui relèvent de la démarche de RSS. On peut affirmer qu’au cœur de l’approche de la Shared value il y a la RSS. Il se pourrait même que le terme de Shared value soit un autre nom pour ce type de RSE15. La Shared value est intégrée au calcul économique stratégique, c’est-à-dire relève d’une analyse coût/avantage pour décider des actions à entreprendre. En traitant les questions sociales de manière à les placer au cœur des activités de l’entreprise, la Shared value tend à créer de la valeur pour l’entreprise et la société constituée par un ensemble de parties prenantes avec des besoins et des enjeux divergents16. Cet argument prolonge celui de Daudigeos et Valiorgue (2010, p. 78) qui indiquent que la réalisation du business case, influencé par le World Business Council for Sustainable Developement17,
[…] repose sur un acte véritable de générosité des parties prenantes et leur capacité d’empathie car elles acceptent de valoriser la prise en charge des effets externes. L’engagement des entreprises en matière de responsabilité sociale provient de la volonté de certaines parties prenantes de valoriser économiquement la prise en charge des effets externes soit parce qu’elles sont bénéficiaires de l’internalisation de effets externes, soit parce qu’elles sont prêtes à payer pour le bien-être d’autrui, (ibid.).
Il y a toutefois par rapport à Porter et Kramer (2006), et donc avec la première version de la définition de la RSS, une plus importante présentation et de plus amples discussions des phénomènes de répartition. Par rapport à l’idée du papier de 2006, dans lequel l’analyse ne va pas plus loin que le win-win pour décrire les avantages pour l’entreprise et la société des actions de RSS, le papier de Porter et Kramer (2011) avance qu’il y a trois moyens pour accroître la valeur sociétale : « […] by reconceiving products and markets, redefining productivity in the value chain, and building supportive industry clusters at the company’s 113locations. Each of these is part of the virtuous circle of Shared value ; improving value in one area gives rise to opportunities in the others ». Le papier de 2011 innove considérablement en reprenant moins comme métaphore et plus comme modèle les économies réalisées, c’est-à-dire les gains communs, qui émergent au sein des clusters industriels (groupes de firmes interconnectées, géographiquement proches, en relation avec des institutions, liées par des complémentarités et des éléments communs [Porter, 1998, p. 199]). Le principe d’efficacité (productivité) des clusters tient aux spillovers et aux différentes externalités qui naissent en son sein. Le secteur public peut être fortement impliqué (universités, recherche, formation du capital humain…). Les effets d’entrainement et les synergies de toutes sortes participent également à des gains économiques qui retombent sur les unités économiques du cluster18. On peut faire ici référence à la cumulative causation à la Myrdal-Kaldor. La grande différence d’avec le cluster de type marshallien (district) est que les firmes ici sont complémentaires et agissent au sein d’industries différentes.
Conclusion
L’analyse historique du concept de RSE combinée à une analyse des travaux successifs de 2006 et 2011 de Porter et Kramer permet de développer une vision managériale des rapports de l’entreprise et de la société. En s’intéressant à la RSS, elle est l’occasion de renouveler l’approche classique de la stratégie qui a déjà connu un regain d’intérêt avec les travaux de Mintzberg (1994) qui a introduit la notion de changement et d’anticipation dans les activités managériales. Selon cette approche stratégique, l’environnement, qualifié d’incertain et de dynamique, est constitué de parties prenantes aux besoins et enjeux convergents. Il oblige l’entreprise à agir et à prendre des décisions à visées économique, sociale et environnementale. Pour comprendre les synergies existantes, l’approche systémique19, 114qui entend que l’entreprise est non pas une machine rationnelle mais un organisme vivant, est ainsi largement mobilisée. L’approche de la Shared value, plus large, permet pour sa part de mieux explorer les opportunités qui s’offrent à l’entreprise et de considérer au cœur de ses pratiques la collaboration avec les parties prenantes. L’innovation technologique est d’ailleurs un enjeu essentiel de la RSS. Certains paradoxes apparaissent malgré tout, car la création de valeur partagée et ses externalités sont valables pour un nombre déterminé de parties prenantes mais pas pour l’ensemble d’entre elles. Il est en effet souvent conseillé aux entreprises qui développent des démarches de RSE (philanthropique, défensive ou stratégique) de hiérarchiser leurs parties prenantes et de répondre différemment à leurs injonctions. Pour ne prendre que le seul exemple de la matrice pouvoir/intérêt de Johnson et al. (2014), quatre catégories de parties prenantes sont distinguées : les acteurs clés, les acteurs à garder satisfaits, les acteurs à garder informés et les acteurs pour qui est requis un effort stratégique minimal. On comprend par-là que c’est non pas la démarche pour créer de la valeur partagée qui doit être définie en premier lieu mais bien la signification de ce qu’est véritablement la valeur partagée. Le débat est ainsi ouvert sur cette question.
115Bibliographie
Acquier A., Valiorgue B. et Daudigeos T. (2015), « Sharing the Shared Value : A Transaction Cost Perspective on Strategic CSR Policies in Global Value Chains », Journal of Business Ethics, online.
Barnard C. I. (1938), The functions of the executive, Cambridge, Harvard University Press.
Benabou R. et Tirole J. (2010), « Individual and corporate social responsibility », Economica, vol. 77, no 305, p. 1-19.
Berard C., Szostak B. et Abdesselam R. (2013), « The relationship between corporate social responsibility and innovation activities in SMEs : an empirical study of French firms », Conference RENT, Lithuania, Novembre.
Berger-Douce S. (2011), « Le développement durable, un levier d’innovation pour les PME ? », Revue Française de Gestion, vol. 2011/6, no 215, p. 147-166.
Berger-Douce S. (2014), « Capacité dynamique d’innovation responsable et performance globale : Étude longitudinale dans une PME industrielle », Revue Interdisciplinaire Management, Homme & Entreprise, vol. 2014/3, no 12, p. 10-28.
Bocquet R., Le Bas C., Mothe C. et Poussing N. (2013), « Are firms with different CSR profiles equally innovative ? An empirical analysis with survey data », European Management Journal, vol. 31, no 6, p. 642-654.
Bocquet R. et Mothe C. (2013), « Profil des entreprises en matière de RSE et innovation technologique », Management & Avenir, vol. 2013/8, no 66, p. 132-151.
Bowen H. R. (1953), Social responsibilities of the businessman, New York, Harper & Row.
Capron M. et Quairel F. (2002), « Les dynamiques relationnelles entre les firmes et les parties prenantes », Cahier de recherche CREFIGE/ERGO.
Capron M. et Quairel F. (2015), L’entreprise dans la société. Une question politique, Paris, La Découverte, collection : « Grands Repères-Manuel ».
Clark J. M. (1939), Social control of business, New-York, McGraw-Hill.
Clarkson M. B. E. (1995), « A stakeholder framework for analysing and evaluating Corporate Social Performance », Academy of Management Review, vol. 20, no 1, p. 92-117.
Crane A., Palazzo G., Spence L. J. et Matten D. (2014), « Contesting the value of “creating shared value” », California Management Review, vol. 56, no 2, p. 130-153.
Crifo P. et Forget V. (2015), « The Economics of Corporate Social 116Responsibility : A Firm Level Perspective Survey », Journal of Economic Surveys, vol. 29, no 1, p. 112-130.
Daudigeos T. et Valiorgue B. (2010), « Les limites du traitement marchand de la Responsabilité sociale de l’entreprise », Revue Française de Socio-Économie, vol. 2010/2, no 6, p. 65-86.
Fouda J. B. (2014), « Le choix d’une stratégie RSE », Revue française de gestion, vol. 2014/7, no 244, p. 11-32.
Freeman R. E. (1984), Strategic management : a stakeholder approach, Boston, Pitman series in business and public policy.
Gendron C. (2000), « Le questionnement éthique et social de l’entreprise dans la littérature managériale », Cahier du CRISES, no 0004, Collection : « Working Papers ».
Gond J.-P. et Igalens I. (2016), La responsabilité sociale des entreprises, Paris, PUF, Collection : « Que sais-je ? ».
Gond J.-P. et Mullenbach-Servayre A. (2004), « Les fondements théoriques de la responsabilité sociétale de l’entreprise », Revue des Sciences de Gestion, vol. 205, p. 93-116.
Gond J.-P. (2012), « Advanced studies in Corporate social responsibility », Workshop on Governance, Responsible Management and Global Performance, International research seminar, IAE Lyon, Université Jean Moulin Lyon 3, 4 janvier.
Gössling T. (2011), Corporate Social Responsibility and Business Performance. Theories and Evidence about Organizational Responsibility, The Netherlands, Tilburg University.
Hommel T. et Godard O. (2001), « Contestation sociale et stratégies de développement industriel. Application du modèle de la Gestion Contestable à la production industrielle d’OGM », Working paper, École Polytechnique 15.
Husted B. W. et Allen D. B. (2007), « Corporate Social Strategy in Multinational Enterprises : Antecedents and Value Creation », Journal of Business Ethics, vol. 2007/74, no 4, p. 345-361.
Johnson G., Scholes K., Whittington R. et Frery F. (2014), Stratégique, 10e édition, Paris, Pearson Éducation.
Kreps T. J. et Murphy K. R. (1940), Measurement of the social performance of business, Washington, U.S. Government Printing Office, collection : « Investigation of concentration of economic power », Monograph no 7.
Lacoste S. et Pardo, C. (2016), « Les pratiques conjointes de responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) au sein d’un écosystème d’affaires. Une étude de cas », Management & Avenir, vol. 2016/3, no 85, p. 35-55.
Le Bas C., Poussing N. et Haned N. (2010), « Innovation, leadership technologique et comportements de responsabilité sociale. Une exploration sur données d’entreprises », Économies et Sociétés, no 12, Série W, p. 1363-1386.
117Maon F., Swaen V. et Lindgreen A. (2008), « Mainstreaming the corporate social responsability agenda : A change model grounded in theory and practice », Working Paper 08/22, IAG – Louvain School of Management, Université catholique de Louvain, Louvain-La-Neuve, Belgium, available at http://www.uclouvain.be/cps/ucl/doc/iag/documents/WP_22_Maon_Swaen_Lindgreen.pdf
Martinet A. C. et Payaud M. A. (2008), « Formes de RSE et entreprises sociales : une hybridation des stratégies », Revue Française de Gestion, vol. 34, no 180, p. 199-214.
Mercier S. (2004), L’éthique dans les entreprises, Paris, La Découverte, collection : « Repères ».
Mercuri Chapuis S. (2014), « Instrumentalisation de la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) par les middle managers : le cas de MEDIAPOST », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Université Jean Moulin (Lyon 3), novembre.
Midttun A. (2009), « Serving Societal and Individual Need. Research Report 2/2009 », BI Norwegian School of Management, Department of Innovation, Oslo.
Mintzberg H. (1994), Grandeur et décadence de la planification stratégique, Paris, Dunod, collection : « Stratégies et Management ».
Paone V. et Forterre D. (2012), « La Responsabilité Sociale (et environnementale) de l’Entreprise ou RSEE : Repenser le socle théorique. Analyse et arbitrage par le degré d’exposition globale », La Revue des Sciences de Gestion, vol. 2012/5, no 257, p. 49-58.
Porter M. E. et Kramer M. R. (2006), « Strategy and society : The Link Between Competitive Advantage and Corporate Social Responsibility », Harvard Business Review, vol. 84, no 12, p. 78-93.
Porter M. E. (1998), On competition, Boston, Harvard Business Press.
Porter M. E. et Kramer M. R. (2011), « The big idea. Creating value. How to reinvent capitalism – and unleash a wave of innovation and growth », Harvard Business Review, vol. 82, no 1-2, p. 62-77.
Poussing N. et Le Bas C. (2013), « Firm voluntary measures for environmental changes, eco-innovations and CSR : Empirical analysis based on data surveys », Économie Appliquée, vol. 66, no 4, p. 141-165.
Prahalad C. K. (2009), The fortune at the bottom of the pyramid, revised and updated 5th anniversary. Eradicating poverty through profits, New Jersey, FT Press.
Quairel-Lanoizelee F. (2016), « Are competition and corporate social responsibility compatible ? The myth of sustainable competitive advantage », Society and Business Review, vol. 11, no 2, p. 130-154.
118Reinhardt F. L. et Stavins R. N. (2010), « Corporate social responsibility, business strategy, and the environment », Oxford Review of Economic Policy, vol. 26, no 2, p. 164-181.
Tirole J. (2016), Économie du bien commun, Paris, PUF.
Wood D. J. (1991), « Corporate Social Performance Revisited », Academy of Management Review, vol. 16, no 4, p. 691-718.
Yunus M., Moingeon B. et Lehmann-Ortega L. (2010), « Building social business models : lessons from the Grameen experience », Long Range Planning, vol. 43, no 2, p. 308-325.
Zadek S. (2004), « The Path to Corporate Responsibility », Harvard Business Review, vol. 82, no 12, p. 125-132.
1 Il y a différentes définitions de la RSE. Bien que celle donnée est plutôt consensuelle, d’autres mettent l’accent que le rapport de l’entreprise à ses parties prenantes. Par exemple, Maon et al. (2008) : « […] CSR is a stakeholder-oriented concept that extends beyond the boundaries of the organization, driven from an ethical understanding of the responsibility of the organization for the impact of its business activities, seeking in return the willingness of society to accept the legitimacy of the business ».
2 Magazine consacré à l’économie le plus ancien en Amérique du Nord. Il est reconnu particulièrement pour son classement annuel des sociétés.
3 C’est en effet tellement plus facile de montrer que l’on ouvre de nouvelles espérances de profit en ayant un comportement responsable que de suggérer d’en minimiser les coûts.
4 Sans doute ce terme est explicitement présenté pour la première fois dans le papier de 2006 avant d’être traité au fond dans l’article de Porter et Kramer (2011).
5 Dans leur article, les auteurs décrivent le cas Nestor. L’intégration professionnelle, qui relève au départ d’une pratique de RSE défensive, porte les racines d’un projet social qui facilite l’apprentissage des acteurs et qui peut être utilisée dans les relations commerciales pour faciliter certains projets (RSS).
6 Encore que l’on pourrait y voir des aspects stratégiques également.
7 La relation entre concurrence et RSE est remarquablement située par Quairel-Lanoizelée (2016).
8 Ou l’entrepreneuriat social.
9 Les auteurs entendent que la réintroduction de la logique socialement responsable enrichit et complexifie le modèle de l’organisation. Quatre postures stratégiques sont envisagées : association ponctuelle aux parties prenantes, pas de volonté de développer un projet dans la durée (cosmétique), actions qui ne sont pas en lien direct avec leur cœur de métier, lien direct entre les actions menées et les compétences spécifiques (intégrée), actions entreprises pour redessiner, dans les pays très pauvres, le système économique et le viabiliser (BOP).
10 Au Nigéria, Nestlé participe par exemple à des réunions avec MDUnionForum pour les droits du travail (cosmétique) et forme au même moment en Afrique centrale des sous-traitants à l’entretien des outils de production (intégrée).
11 Voir ci-après.
12 Pour Porter et Kramer (2011) : « Society’s needs are huge—health, better housing, improved nutrition, help for the aging, greater financial security, less environmental damage. Arguably, they are the greatest unmet needs in the global economy. »
13 Ils notent : « Shared value is not social responsibility, philanthropy, or even sustainability, but a new way to achieve economic success. It is not on the margin of what companies do but at the center ».
14 C’est à dire l’entreprise citoyenne, la défense de l’environnement, les questions de réputation de l’entreprise.
15 Par exemple les deux auteurs avancent que « Addressing societal harms and constraints does not necessarily raise costs for firms, because they can innovate through using new technologies, operating methods, and management approaches and as a result, increase their productivity and expand their markets », ce qui est proche de leur définition de la RSS de 2006.
16 « An ongoing exploration of societal needs will lead companies to discover new opportunities for differentiation and repositioning in traditional markets, and to recognize the potential of new markets they previously overlooked » (Porter et Kramer, 2011, p. 8).
17 Le World Business Council for Sustainable Development a pour objectif d’accompagner les firmes de manière à ce qu’elles trouvent un équilibre entre recherche de profit et durabilité.
18 « No company is self-contained. The success of every company is affected by the supporting companies and infrastructure around it. Productivity and innovation are strongly influenced by “clusters” or geographic concentrations of firms, related businesses, suppliers, service providers, and logistical infrastructure » (Porter et Kramer, 2011, p. 72).
19 Von Bertalanffy (1973).
- CLIL theme: 3312 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Économie publique, économie du travail et inégalités
- ISBN: 978-2-406-08427-3
- EAN: 9782406084273
- ISSN: 2554-9626
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-08427-3.p.0097
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 08-22-2018
- Periodicity: Biannual
- Language: French
- Keyword: Corporate Social Responsibility, Strategic CSR (RSS), types of CSR, responsible behaviour, technological innovation, Shared value