Production cooperatives Agglomeration and wider governance versus degeneration?
- Publication type: Journal article
- Journal: Entreprise & Société
2017 – 2, n° 2. varia - Authors: Maroudas (Leonidas), Rizopoulos (Yorgos)
- Pages: 103 to 126
- Journal: Business & Society
Coopératives de production
Agglomération et gouvernance élargie
versus dégénérescence ?
Leonidas Maroudas
Université de Patras, Grèce1
Yorgos Rizopoulos2
LADYSS CNRS,
Université Paris Diderot, France
Introduction
Des tensions internes (bureaucratisation et apathie des membres) et externes (adaptation à un environnement hostile) peuvent être à l’origine de l’abandon progressif des principes démocratiques qui doivent régir le fonctionnement d’une coopérative. Ce processus, qualifié de dégénérescence, aurait selon Meister (1974) un caractère déterministe.
Plusieurs travaux récents sur la dégénérescence (Nilsson, 2001 ; Bataille-Chedotel, Huntzinger, 2004 ; Ole Borgen, 2004) mobilisent une approche individualiste d’inspiration néo-institutionnaliste pour étudier ce phénomène, en considérant la coopérative comme un regroupement de propriétaires des facteurs de production qui concluent entre eux des 104contrats. Leur motivation serait la maximisation de leur utilité et, en raison d’un opportunisme inhérent, ils pencheraient vers un comportement de passager clandestin. À partir de ces hypothèses, les dirigeants sont supposés vouloir asseoir leur pouvoir aux dépens des autres membres qui, occupés prioritairement de leur propre intérêt individuel, tombent progressivement dans un état d’apathie démocratique.
Nous mettons en question les hypothèses de ce référentiel théorique qui vient en appui de la thèse sur la dégénérescence, mais nous estimons que le problème de la préservation des processus démocratiques est réel. L’atténuation du rapport salarial au sein d’une coopérative, liée à la double qualité de salarié/sociétaire de ses membres, constitue un cadre favorable à une large participation dans la prise des décisions mais n’implique pas la disparition des contradictions organisationnelles, ni de la contrainte du marché. En raison de ces tensions, il serait illusoire de penser que le contrôle démocratique des membres s’impose naturellement et sans heurts. Or, ce problème est souvent éludé en mobilisant des arguments relatifs aux avantages que présentent les processus démocratiques quant aux incitations et à la cohérence du groupe (Rothschild, Whitt, 1986 ; Cheney, 2005). Il s’agit là d’une position de principe qui, malgré son importance, ne peut pas apporter des réponses aux contradictions et divergences qui ne vont pas manquer de se manifester, notamment si la coopérative grandi en taille ou doit affronter une évolution défavorable de son environnement économique menaçant sa survie. Il est donc pertinent d’explorer les conditions qui favorisent la consolidation d’un fonctionnement démocratique dont les modalités seraient compatibles avec les considérations d’efficacité organisationnelle et une activité économique performante3.
Nous avons eu l’occasion ailleurs (Maroudas, Rizopoulos, 2014) de se pencher sur les processus intra-organisationnels et de souligner le rôle de l’idéologie, de l’identification et de la confiance comme des éléments structurants de la lutte contre la dégénérescence au sein des coopératives de production. Ces éléments doivent se refléter au niveau des principes organisationnels (structure relativement plate, incitations pour une participation active des membres dans les processus de prise de décision), des règles et pratiques permettant un contrôle effectif des dirigeants 105(diffusion de l’information, révocation des représentants, formation et élévation des qualifications), et d’une faible différenciation salariale.
Un autre aspect apparaît comme essentiel, celui des relations inter-organisationnelles. En effet, l’insertion de la coopérative dans un ensemble plus vaste de partenariats donne la possibilité de former des microenvironnements favorables à la réalisation de ses objectifs. Une mise en réseau peut constituer ainsi un facteur de diminution des tensions qui pèsent sur son activité. Cette conséquence positive d’une agglomération d’entreprises est déjà analysée dans le cas des districts industriels et des systèmes productifs locaux. Si, de surcroît, plusieurs organisations qui coordonnent leurs opérations partagent le même projet politique et se réfèrent aux mêmes valeurs coopératives, l’atténuation des pressions externes et la création d’externalités positives peuvent également contribuer, sous certaines conditions, à la préservation de leurs principes de fonctionnement démocratique. Cette idée constitue le point de départ de notre contribution.
Les effets bénéfiques des réseaux de coopératives sur leur survie et leurs performances sont largement étudiés (Dow, 2003 ; Novkovic, 2007 ; Menzani, Zamagni, 2010 ; Jones, Kalmi, 2012 ; Sacchetti, Tortia, 2016). Or, la coordination au sein de ces réseaux implique des formes de gouvernance dont l’analyse reste embryonnaire. C’est l’objet du présent article où, après avoir identifié les conditions préalables à la mise en place d’une gouvernance élargie impliquant plusieurs parties prenantes, nous proposons un schéma susceptible de renforcer la responsabilité collective et le contrôle mutuel au sein du réseau4. Notre travail est focalisé aux coopératives de production (SCOP) qui constituent des entreprises dont les salariés sont les sociétaires majoritaires5.
106Le texte est organisé en trois sections, divisées en sous-sections. La première section est consacrée à la présentation critique de la thèse sur la dégénérescence selon laquelle les coopératives ne réussissent pas à préserver leurs principes démocratiques en raison des contraintes externes et internes. Dans la deuxième section, après avoir discuté l’hypothèse largement répandue d’une maximisation du revenu individuel des coopérateurs comme étant leur motivation principale, sont abordés les avantages d’une agglomération au sein de réseaux coopératifs ayant des valeurs et principes de fonctionnement partagés. Enfin, dans la dernière section, un schéma simplifié de gouvernance élargie assurant le contrôle mutuel et la responsabilité collective des membres du réseau est proposé.
I. De la dégénérescence à la régénération
I.1. La dégénérescence comme processus déterministe
La prise de décisions concernant le processus productif par les salariés/sociétaires, en d’autres termes la mise en place de la démocratie économique dans l’entreprise, confère aux coopératives de production la dimension d’une alternative qui émerge au sein même du mode de production capitaliste. Ceci est source de fortes contradictions qui peuvent fragiliser ces organisations et/ou dénaturer leurs caractéristiques. En raison des pressions à la fois internes et externes, les coopératives de production risquent de ne pas préserver longtemps leur caractère démocratique et sont sujettes à une tendance vers la dégénérescence.
On trouve déjà les germes de cette thèse dans le cadre de la tradition marxiste. Chez Marx, l’appréciation positive des coopératives6 comme manifestation de certaines potentialités du mode de production socialiste (Jossa, 2005) coexiste avec l’idée que leur fonctionnement 107reflète les rapports de production capitalistes. Il est toutefois intéressant de noter que cette tension est liée au caractère « circonscrit dans un cercle étroit » de leur activité7. C’est la contrainte de survie dans un environnement hostile qui les oblige à chercher le profit, à l’image des entreprises classiques. Des coopératives isolées ne sont pas en mesure de provoquer un changement radical des rapports de production et, par conséquent, elles sont condamnées à dévier de leurs principes alternatifs ou de disparaitre. Dans cette même lignée, Dallemagne (1981, p. 179) se réfère aux coopératives comme « une forme limite du capitalisme, où les travailleurs sont collectivement propriétaires des moyens de production ; ce qui leur confère l’autorité propre au capitaliste, sans pour autant leur permettre de décider selon d’autres critères que le taux de profit ». En raison de l’objectif du profit qui s’impose, de la nature duale de salarié/sociétaire des membres et de la concurrence des monopoles, la nature des coopératives serait fragile et évolutive.
Tout au long du vingtième siècle, la thèse de la dégénérescence sera alimentée par des travaux d’origines diverses qui ont comme point commun le processus d’autonomisation d’une élite dirigeante et son emprise sur l’organisation. Michel (1910) formule sa proposition de « loi d’airain de l’oligarchie » en étudiant les tendances bureaucratiques qui se développent dans les partis socialistes et les syndicats. Selon lui, l’augmentation de la taille et de la complexité au sein des organisations politiques implique une exigence de stabilité aux plus hauts niveaux de leur structure. La répartition inégale des capacités de direction parmi les membres provoque une concentration des responsabilités dans les mains de quelques « leaders professionnels » qui bénéficient ainsi d’un fort pouvoir discrétionnaire. On peut rapprocher cette idée, aux travaux sur la grande entreprise capitaliste par actions qui font ressortir la séparation entre propriété du capital et contrôle favorisant le renforcement du pouvoir managérial (Berle, Means, 1932 ; Burnham, 1941 ; Marris, 1964). Les cadres dirigeants, grâce à leurs compétences professionnelles et leur savoir technique, sont en mesure de privilégier la recherche de 108leurs propres intérêts. Ils exercent un contrôle effectif sur l’entreprise en faisant passer en second plan les priorités des actionnaires.
Meister (1974) considère que la « loi d’airain » s’applique dans le cas des coopératives même si elles ont, en règle générale, moins de membres qu’un syndicat et leur mode de fonctionnement diffère. La transformation d’une minorité en élite dominante va de pair avec l’affaiblissement progressif des processus démocratiques et l’abandon par les membres des droits de contrôle que leur confère la qualité de sociétaire. Il soutient l’idée d’un processus de dégénérescence progressif mais inéluctable qui se déroule en quatre phases durant lesquelles les objectifs économiques se renforcent constamment au dépens des objectifs sociaux. Après une première période d’intensité créative caractérisée par l’enthousiasme et l’implication des membres, la survie économique impose l’adoption des méthodes de gestion plus traditionnelles et un changement des principes organisationnels (phase de stabilisation économique). Pendant la troisième phase, les idéaux de départ sont abandonnés afin de s’adapter à l’environnement économique, institutionnel et culturel. La prédominance des formes de « démocratie déléguée » aboutit, au cours de la quatrième phase, au contrôle absolu des « administrateurs » (experts et spécialistes) sur l’organisation et à un modèle managérial de gouvernance. La consolidation du pouvoir des dirigeants et la mutation bureaucratique de la coopérative vont de pair avec un degré croissant d’apathie de la part de ses membres dont les objectifs de départ changent. Les valeurs et les croyances qui ont motivé sa création s’affaiblissent et sont remplacées par des motivations d’ordre économique.
Le concept de dégénérescence rend ainsi compte du changement de la nature d’une coopérative, de la déperdition de ses caractéristiques spécifiques et de sa mutation vers une organisation hiérarchique. Des travaux ultérieurs (Cornforth et al, 1988), identifient trois formes de dégénérescence : la dégénérescence formelle avec la transformation de la coopérative en entreprise capitaliste, la dégénérescence des objectifs qui signifie la prépondérance de la recherche du profit sur les valeurs coopératives et, enfin, la dégénérescence organisationnelle dans le sens où le pouvoir et le contrôle sont exercés par une minorité de cadres dirigeants. Il y a certes un lien entre ces trois formes qui représentent plutôt des phases d’évolution différentes : les contraintes économiques contraignent et affaiblissent progressivement les processus démocratiques 109(dégénérescence des objectifs) en renforçant le rôle des managers (dégénérescence organisationnelle), ce qui peut amener à l’évolution de la nature de la coopérative (dégénérescence formelle), voire à sa disparition. Cependant, contrairement à Meister, ces auteurs ne considèrent pas la dégénérescence comme inévitable et explorent les possibilités qui peuvent conduire à l’institutionnalisation de la démocratie dans une coopérative.
Il est à souligner que le processus de dépérissement démocratique est directement lié aux contradictions avec l’environnement qui se répercutent inévitablement à l’intérieur de l’organisation. Varman et Chakrabarti (2004) mettent en évidence cette relation qui permet d’appréhender la démocratie organisationnelle comme une réalité évolutive. De façon symétrique, on peut en déduire qu’une meilleure maitrise des pressions externes crée un contexte plus favorable à la préservation de la démocratie économique et permet de consolider le projet politique d’origine.
I.2. La démocratie régénérée ?
Des facteurs comme l’existence d’un environnement hostile, la concurrence avec des entreprises capitalistes, l’augmentation du nombre des membres, la lourdeur des processus démocratiques, l’émergence des fonctions spécialisées, et les asymétries d’information dont bénéficient les cadres dirigeants ont un impact négatif sur la démocratie économique. Toutefois, les procédures organisationnelles, les formes de gouvernance, les méthodes de management ou l’organisation du travail ne sont pas totalement déterminés par ces facteurs. Batstone (1983) conteste le modèle du cycle de vie développé par Meister à partir des données empiriques sur des coopératives françaises existant de longue date. Il constate, au contraire, une résurgence de la démocratie au cours de la troisième phase qui permettrait de freiner le processus de dégénérescence. Plusieurs autres auteurs défendent cette même idée selon laquelle le processus de dégénérescence n’est pas inévitable et donnent en exemple un nombre significatif de coopératives qui a réussi d’assurer une certaine efficacité organisationnelle sans abandonner principes et valeurs (Rothschild, Whitt, 1979 ; Cornforth, et al, 1988 ; Estrin, Jones, 1992 ; Stryjan, 1994).
Il n’en reste pas moins que l’affichage des principes démocratiques constitue un élément certes nécessaire mais insuffisant pour éviter la dégénérescence et assurer la participation active des membres aux 110processus organisationnels (Demoustier, 1981 ; Cornforth, 1995 ; Stryjan, 1994). En effet, la complexité et l’incertitude de l’environnement interne (divergence des représentations, priorités variées des membres, conflits, etc.) et externe (concurrence, cadre institutionnel défavorable, etc.) posent un problème fondamental quant aux modalités permettant de construire une cohérence collective, contrecarrer les comportements d’apathie et stabiliser la coopérative comme organisation démocratique.
Une partie des chercheurs en économie sociale propose des solutions inspirées de la théorie de l’agence et des travaux sur le gouvernement d’entreprise (voir Cornforth, 2004 et Spear, 2004). Les cadres dirigeants de la coopérative sont considérés comme des agents qui privilégient leurs intérêts plutôt que les intérêts du collectif de travail (Malo, Vézina, 2004), en s’appuyant sur les asymétries d’information et l’impossibilité de contrôle de la part des membres, notamment dans les coopératives d’une grande taille (Cuevas, Fischer, 2006). Dans le cadre de ces approches, et afin de contrecarrer la tendance vers la dégénérescence, il faudrait mettre en place des arrangements institutionnels et organisationnels censés atténuer le risque d’aléa moral et le pouvoir discrétionnaire des dirigeants. Il s’agit notamment de systèmes incitatifs, mais d’autres propositions sont aussi formulées comme la création d’un marché de cadres dirigeants sensibilisés aux valeurs de l’économie sociale (Chaves, Sajardo-Moreno, 2004)8, parallèlement à des politiques adéquates de formation des membres.
Le problème majeur de ces propositions est celui d’une approche qui reste strictement individualiste et qui ne tient pas compte ni des processus d’identification au sein du collectif des coopérateurs, ni des possibilités de coordination inter-organisationnelle. Il s’agit là d’un héritage des travaux académiques sur les formes alternatives d’organisation économique qui s’inscrivent dans le cadre général de « l’économie néoclassique du socialisme » (Tomlinson, 1986). Ceci nous amène à revisiter de façon critique le cadre théorique qui sous-tend ces propositions et qui trouve ses racines dans les débats sur l’efficacité de la firme autogestionnaire.
111II. Les réseaux de coopératives
II.1. Des coopérateurs individualistes
à l’agglomération de coopératives
La littérature académique sur les formes d’entreprise alternatives (autogestionnaires et, par extension, coopératives) reste marquée par une hypothèse d’inspiration néoclassique selon laquelle la maximisation des leurs revenus individuels constitue la motivation essentielle des membres et l’objectif de l’organisation coopérative. Dans le modèle développé initialement par Ward (1958), l’égoïsme des membres trahit les valeurs de la coopération et induit un comportement malthusien et inefficace du point de vue économique exprimé par une courbe d’offre à pente négative. Face à une augmentation du prix, les coopérateurs vont réagir en diminuant la production afin de ne pas recruter de nouveaux travailleurs dont la productivité marginale serait plus faible que ceux qui étaient déjà en poste, avec comme conséquence la diminution de la part de la valeur ajoutée revenant à chaque travailleur (effet Ward-Vanek). Par ailleurs, puisque la totalité des profits est distribuée sous forme de salaires et de primes, soit leur réinvestissement est par hypothèse exclu, soit il provoquera des conflits entre les membres qui n’ont ni les mêmes représentations, ni les mêmes préférences quant à l’horizon temporel de leur travail dans l’entreprise, soit la volonté d’augmenter leurs gains en relation avec cet investissement – dans l’hypothèse où celui-ci est finalement réalisé – va les amener à ne pas recruter ou à recruter des salariés non membres et plutôt précaires, en se transformant en une sorte d’association de petits employeurs. Le dilemme peut se résumer à un choix entre sous-investissement (qui sera une cause de déclin économique) et dégénérescence en raison de la division des travailleurs en plusieurs catégories9.
Des travaux ultérieurs ont développé des versions amendées du modèle de Ward qui tentent d’introduire plus de réalisme quant aux 112motivations des membres et de lever le paradoxe de la courbe d’offre à pente négative afin de défendre l’efficacité économique de l’entreprise autogestionnaire (Domar, 1966 ; Vanek, 1970 ; Meade, 1972). Tout en restant enfermés dans un cadre d’analyse postulant des comportements strictement égoïstes ayant comme l’objectif la maximisation des revenus des membres, certains auteurs (Drèze, 1976) font la distinction entre l’équilibre à court-terme et l’équilibre à long-terme de l’entreprise autogestionnaire essayant de prouver ainsi une efficacité comparable à celle de l’entreprise capitaliste. D’autres travaux proposent des fonctions objectif alternatives : maximisation du surplus (Horvat, 1972), maximisation du niveau de l’emploi sous une contrainte de profit par travailleur en raison d’une « implication communautaire » supérieure à celle de l’entreprise capitaliste (Kahana, Nitzan, 1989) ou maximisation de l’utilité qu’impliquerait des décisions collectives pour gérer le temps de travail individuel (McCain, 1973 ; Berman, 1977). Malgré leurs différences, ces contributions s’appuient sur un socle commun : le travail est un facteur de production et l’entreprise constitue la simple somme des membres qui maximisent leurs fonctions d’utilité individuelles. Comme il a été montré à la section précédente, cette prémisse marque encore aujourd’hui l’idée qu’on se fait du collectif des coopérateurs.
On peut facilement argumenter que les motivations des coopérateurs sont beaucoup plus complexes et comportent, au-delà d’une rémunération satisfaisante de leur travail, des préoccupations telles la préservation de leur emploi, une production socialement utile, la consolidation des procédures démocratiques ou, encore, la diminution des inégalités sur le plan des salaires. L’identification au collectif, la loyauté et le partage d’une idéologie sont également des éléments structurants des comportements dont les approches économiques conventionnelles ne tiennent pas compte. Or, la critique des hypothèses héroïques des modèles d’inspiration néoclassique ne permet pas de passer sous silence les risques de comportements égoïstes au sein d’un collectif de coopérateurs, des objectifs divergents et des conflits, d’une apathie démocratique, d’un écart croissant entre valeurs et mode de gouvernance et d’une autonomisation de l’équipe dirigeante.
Compte tenu de la relation entre pressions externes et processus démocratiques (Varman, Chakrabarti, 2004), il est raisonnable de penser 113qu’une coopérative isolée aura plus de mal à survivre en respectant ses principes, alors que des liens avec d’autres coopératives contribuent à la stabilisation relative de son environnement et à une meilleure maitrise de l’incertitude, en créant de la sorte des conditions plus favorables au maintien de l’esprit collectif et participatif. La moindre pression externe via la coordination inter-organisationnelle permet d’alléger la contrainte économique et de laisser plus de marges pour pérenniser le projet démocratique.
II.2. Réseaux de coopératives et externalités positives
Les externalités positives et les effets de diffusion résultant des réseaux de coopératives sont largement étudiés. La collaboration avec d’autres organisations qui partagent les mêmes préceptes n’est pas simplement une option parmi d’autres. Elle découle des propriétés de la configuration organisationnelle que représentent les coopératives, animées par des préoccupations de solidarité et d’entraide. L’existence d’une méso-confiance (Zucker, 1986), liée à l’identification aux valeurs coopératives, favorise la construction d’une micro-confiance. Cette dernière émerge grâce à l’expérience des interactions au niveau inter-organisationnel et rend la perspective de projets communs souhaitable et réaliste (Halary, 2006 ; Smith, 2003a ; Novkovic, Holm, 2012), sous condition de bien identifier les complémentarités existantes ou à construire.
Plusieurs travaux mettent en évidence ces effets d’agglomération qui sont à l’origine d’avantages, y compris par rapport aux entreprises capitalistes concurrentes. Ceci est particulièrement marquant dans des secteurs ou territoires caractérisés par des fortes traditions et une culture coopérative, et par l’existence d’expériences réussies et d’acteurs – fournisseurs, clients, mais aussi travailleurs – habitués à de telles organisations productives alternatives (Dow, 2003 ; Novkovic, 2007). Ainsi, les coopératives de fabrication de contre-plaqué regroupées sur la côte nord-ouest des États-Unis pendant les années 1942-1957 représentaient 20-25 % de la production du secteur (Berman, 1967 ; Pencavel, 2001). Par ailleurs, les coopératives dans le pays Basque espagnol sont à l’origine de 8 % de la valeur ajoutée industrielle et celles de la région d’Emilia-Romana en Italie assurent 13 % de l’activité économique locale (Smith, 2003b ; Arando et al, 2012 ; Pérotin, 2013).
114Participer à un réseau sur la base de valeurs coopératives partagées fourni plusieurs atouts d’ordre économique, institutionnel et culturel (Menzani, Zamagni, 2010 ; Jones, Kalmi, 2012 ; Sacchetti, Tortia, 2016) : une meilleure maitrise des interdépendances qui structurent la vie d’une coopérative, un pouvoir de négociation plus fort, un accès plus facile aux ressources et leur utilisation plus efficace. Sur le plan économique, une mise en réseau peut rendre effective une diminution des coûts grâce à des économies d’échelle et une mutualisation de services (assurances, comptabilité, soutien juridique, etc.). En même temps, un changement d’échelle peut faciliter l’accès aux financements qui pose habituellement problème en raison de l’absence d’expérience et sans doute de la méfiance des établissements financiers face à des organisations économiques caractérisées par une structure particulière des droits de propriété. Par ailleurs, un réseau collaboratif favorise l’émergence de champs organisationnels caractérisés par un vivier de compétences et de qualifications empeigné des valeurs coopératives, et constitue un catalyseur des apprentissages collectifs par observation des bonnes pratiques, ou par échange d’expérience concernant à la fois les procédures organisationnelles et les contraintes économiques. Enfin, sur le plan institutionnel, des coopératives en réseau peuvent faire valoir leur inscription dans des dynamiques territoriales et obtenir une meilleure audibilité auprès des pouvoirs publics, du soutien pour leur R&D et une influence sur l’évolution du cadre institutionnel.
Un réseau de coopératives peut donc atténuer la pression environnementale, assurant des meilleures conditions pour la viabilité économique et le projet démocratique de ses membres. En même temps, il soulève des questions importantes quant aux modalités de leur coordination. Or, l’analyse de la gouvernance des réseaux de coopératives reste embryonnaire. Cette question soit n’est pas traitée explicitement, soit reste cantonnée à l’étude des formes de gouvernance d’ensembles hiérarchisés, comme celui de Mondragon Cooperative Corporation (Arando et al, 2012 ; Heras-Saizarbitoria, 2014 ; Sacchetti, Tortia, 2016).
115III. Coordination et gouvernance élargie
III.1. Coordination et contrôle
Dans la situation où l’activité d’une coopérative fait partie d’un ensemble plus vaste de relations réticulaires et d’un projet qui va au-delà de ses propres frontières (Levi, 2001 ; Cornforth, 2002), il s’agit d’explorer les formes de gouvernance impliquant une participation active des parties prenantes externes (les autres membres du réseau) dans le processus de prise de décisions. Une question majeure concerne donc la délimitation des droits de contrôle que chaque coopérative accepte d’abandonner afin de rendre la coordination effective.
De tels compromis seront obtenus plus facilement si les membres du réseau ne sont pas très nombreux et s’ils sont convaincus de l’intérêt de la coordination mais, y compris dans ce cas, le principe « un membre, une voix » ne peut plus être appliqué de façon stricte. D’autres critères, telle l’importance des effectifs de chaque coopérative, seront imposés. Même si les droits de vote ne soient pas attribués sur une base strictement proportionnelle, il est probable que les coopératives de taille plus importante puissent dominer le processus de prise de décision au niveau du réseau et exercer de facto un contrôle effectif sur les autres membres. Une telle situation serait une déviance par rapport aux principes d’autonomie et de solidarité des collectifs de travail et marquerait une tendance vers la dégénérescence au niveau du réseau.
L’expérience de Mondragon est un cas typique. Malgré une certaine efficacité combinée à une stratégie d’internationalisation des activités (Errasti et al, 2003 ; Basterretxea, Martínez, 2012), les relations à l’intérieur de ce réseau interrogent fortement sa capacité à atteindre ses objectifs économiques tout en respectant les principes coopératifs. En effet, plusieurs études soulignent le rôle clé des managers dans la prise de décision, la forte différenciation des salaires et le nombre croissant d’employés précaires (Cheney, 2005 ; Azkarraga et al, 2012). L’écart entre les principes et la réalité organisationnelle reflète une transition progressive vers une forme de gouvernance hiérarchique classique, sans même que ce processus provoque des tensions internes en raison de l’état 116d’apathie des membres qui acceptent l’abandon de leurs droits et des mécanismes démocratiques (Heras-Saizarbitoria, 2014).
L’observation des expériences de gouvernance de certains réseaux de coopératives impliquant plusieurs parties prenantes, notamment au Québec, fait ressortir certaines conditions nécessaires pour éviter un tel écueil. On peut évoquer notamment une mobilisation large des acteurs concernés par l’activité des coopératives ou une forte insertion locale, de sorte que le principe d’une responsabilité collective soit légitimé et accepté. En outre, il est indispensable que les collectifs de coopérateurs aient des intérêts communs clairement identifiés (protection d’une ressource partagée, synergies productives, investissement joint, accès au financement, etc.). En particulier, les parties prenantes externes doivent fournir des ressources qui contribuent de manière significative à l’activité de chaque coopérative particulière, facilitant ainsi son fonctionnement. Logiquement, la gestion des vecteurs d’intérêt commun sera l’objet principal des instances de coordination. Enfin, il est essentiel d’obtenir une relation équilibrée entre contrôle interne et contrôle externe au niveau de chaque coopérative. Cela signifie la mise en œuvre des procédures qui assurent une influence effective des parties prenantes externes tout en préservant l’autonomie et le principe d’auto-organisation des différents collectifs de travail.
Un schéma simplifié de gouvernance élargie respectant ces conditions et laissant ouvertes plusieurs possibilités de partage de pouvoir au sein du réseau est présenté dans la dernière sous-section.
III.2. Gouvernance élargie dans un réseau de coopératives
Considérons un réseau composé de quelques coopératives relativement autonomes dont l’activité présente des synergies. Par commodité, supposons qu’elles soient exemptes de conflits internes et que leurs relations soient relativement équilibrées sans des asymétries importantes du point de vue de leur pouvoir économique. Comme il a été dit ci-dessus, une gouvernance impliquant la participation des parties prenantes externes dans le processus de prise de décision de chaque coopérative, doit s’appuyer sur des vecteurs d’intérêt commun dont la gestion sera l’objet principal de l’organe de coordination.
On peut concevoir le schéma suivant, inspiré de certaines expériences de gouvernance multipartite impliquant plusieurs catégories de 117sociétaires10. Une entité financière transversale (à savoir, un fonds de participation) dont le capital est contrôlé par les membres investit dans les coopératives concernées, tenant un pourcentage de leur capital social, prenant part à leurs assemblées générales et étant représenté dans leur conseil d’administration. Ce fonds devient ainsi l’expression des intérêts communs et renforce les synergies productives et l’interdépendance des membres. Il constitue un des fondements du comportement collaboratif en facilitant la consolidation de leur activité (dans ce cas, par l’intermédiaire du financement). En même temps, il contribue à la construction d’une identité à laquelle adhèrent les membres, et constitue le support de leur engagement mutuel et de leur responsabilité collective.
Nous ne supposons pas a priori une relation hiérarchique entre l’organe de coordination chargé de la gestion du fonds et les coopératives du réseau. Chaque organisation (y compris le fonds) définit ses objectifs qui, néanmoins, sont organiquement liés et négociés avec les autres organisations, en tenant compte de leurs propres objectifs et en étant soumis à leurs influences.
Sur le plan de la configuration qui rend effectif le contrôle mutuel, plusieurs formes de partage de pouvoir sont envisageables. Une première option serait l’entrée minoritaire du fonds dans le capital des coopératives du réseau. Les représentants à l’organe de coordination négocient la stratégie du fonds, qui aurait avant tout un rôle de soutien et de conseil, alors que la participation dans les organes de décision de chaque coopérative donne la possibilité d’influencer les différents collectifs. Une deuxième option serait que les sociétaires extérieurs (le fonds et, éventuellement, 118d’autres parties prenantes) soient majoritaires dans le capital des coopératives du réseau. Dans ce cas, les salariés/sociétaires détiennent un pourcentage non-majoritaire du capital de leur propre coopérative (une minorité de blocage peut être envisagée), mais sont collectivement majoritaires dans le capital de toutes les autres coopératives du réseau, par l’intermédiaire du fonds. Un tel arrangement représenterait une innovation organisationnelle et institutionnelle11 permettant à l’instance de coordination d’intervenir de façon décisive dans le processus de prise de décision des membres, tout en tenant compte de leurs priorités.
L’expérience des coopératives pratiquant une gouvernance élargie montre qu’il existe différentes façons de pondérer les droits de vote comme, par exemple, appliquer le principe « un membre, une voix » pour chaque groupe de parties prenantes, ou distribuer des voix proportionnellement au pourcentage du capital détenu (Stone, Ostrower, 2007 ; Lund, 2010). Le model des Sociétés Coopératives d’Intérêt Collectif (SCIC) dont le statut juridique garanti l’équilibre des pouvoirs entre catégories multiples de sociétaires pourrait servir de référence. Dans une SCIC, selon le cadre légal français, le vote des associés en assemblée générale peut être décompté par collèges de vote (trois au minimum), et aucun collège de vote ne peut disposer de la majorité à lui seul (entre 10 % et 50 % par collège de vote).
Indépendamment de l’arrangement institutionnel adopté, le schéma proposé présente trois avantages principaux : a) Il favorise la responsabilité collective au sein du réseau et l’atténuation des comportements « égoïstes » de chaque collectif, en s’appuyant sur la protection des intérêts communs et en créant les conditions préalables à l’efficacité opérationnelle via un contrôle mutuel effectif ; b) La socialisation du capital fournit une base pour la mise en commun, au moins partiellement, des bénéfices et des coûts. Ceci allège les contraintes de chaque coopérative particulière tout en constituant une garantie de responsabilité au niveau local, mais aussi global (au sein des organes transversaux de coordination) ; c) d’autres parties prenantes (ex. les représentants des communautés liées à un territoire ou à une ressource commune) peuvent y être intégrés, ouvrant ainsi la voie pour la prise en compte plus globale des externalités générées par l’activité du réseau de coopératives.
119Conclusion et discussion
Pour une coopérative isolée dans un environnement hostile, les efforts consistant à assurer un minimum d’efficacité économique comme condition de sa viabilité imposent des contraintes fortes qui peuvent saper son fonctionnement démocratique et provoquer progressivement l’abandon des objectifs politiques et sociaux de départ.
La formation de réseaux de coopératives ayant des liens stables et la coordination de leurs activités, combinées à leur insertion dans des champs organisationnels (territoires, secteurs…) caractérisés par une culture et des traditions collaboratives d’entreprenariat collectif et d’innovation sociale, rendent possible le dépassement de l’isolement et l’émergence d’externalités positives. Ceci contribue à l’amélioration de leur pouvoir de négociation, à un accès plus facile aux financements, à une mutualisation des risques et à une meilleure exploitation des opportunités.
Dans un tel contexte, la mise en place d’une gouvernance élargie constitue une forme de socialisation de l’activité qui crée des conditions plus favorables à la préservation de leur projet de démocratie économique. Cependant, son intérêt ne doit pas dissimuler des difficultés importantes. Notamment, les avantages du contrôle mutuel et de la responsabilité collective doivent être mis en balance avec le risque de tensions entre les objectifs de chaque coopérative et les contraintes de coordination pour défendre les intérêts communs. Par ailleurs, la primauté accordée à l’ensemble constitué par les coopératives du réseau par rapport aux parties (chaque coopérative particulière), présuppose une véritable adhésion des membres au projet commun.
Le schéma simplifié présenté ici laisse ouvertes plusieurs options quant au partage des pouvoirs. Dans la perspective d’une véritable intégration des coopératives qui composent le réseau, une innovation organisationnelle et institutionnelle est proposée qui assure le contrôle mutuel tout en privilégiant la promotion des intérêts partagés. En perdant en partie ses prérogatives au sein de sa propre coopérative, chaque collectif se trouve en mesure d’influencer de manière effective l’ensemble du réseau. Or, le transfert d’une partie des droits de contrôle de chaque collectif à une instance de coordination constitue un défi. D’abord, on 120peut se demander si ce transfert ne remet pas en cause la nature même de la coopérative en tant qu’entreprise contrôlée par ses salariés. En tout cas, il implique de repenser les principes qui régissent habituellement le fonctionnement d’une coopérative et notamment le contrôle interne exercé par ses membres, en leur double qualité de salarié/sociétaire. Par ailleurs, tenir compte des intérêts des parties prenantes externes revient à limiter le rôle des membres de la coopérative, ce qui peut devenir source de fortes tensions. Il est évident qu’une telle option constitue l’objet d’un choix politique fondamental de la part des coopérateurs.
En outre, la nature des échanges au sein du réseau est loin d’être un facteur négligeable, surtout si une coopérative peut objectivement avoir une influence trop importante sur les objectifs des autres (en raison, par exemple, d’une position de donneur d’ordre). En définitive, des relations déséquilibrées entre les coopératives du réseau peuvent déstabiliser le projet coopératif.
Il est également légitime de se demander si le schéma proposé et les options de gouvernance qu’il implique constituent en définitive des réponses pertinentes au problème de la dégénérescence. Il est possible que le transfert d’une partie des droits de contrôle aux instances représentatives de l’ensemble des membres du réseau et la délégation de la prise de décisions à des élus puisse se transformer à un déclencheur de bureaucratisation favorisant l’apathie démocratique. Une idéologie partagée, des règles appropriées, ainsi que les mécanismes organisationnels qui matérialisent ces règles, agissent en tant que contrepoids à ces tendances au sein d’une coopérative (Hernandez, 2006 ; Maroudas, Rizopoulos, 2014). Au cas de gouvernance élargie d’une agglomération de coopératives, des telles conditions sont nécessaires non seulement au niveau de chaque organisation particulière mais aussi à celui du réseau.
Par conséquent, il devient nécessaire d’approfondir les modalités de gouvernance élargie quant à leur mise en œuvre opérationnelle. Le traitement de cette question dépasse le cadre du présent article et nécessite un travail de terrain considérable, d’autant plus que les spécificités de chaque ensemble de coopératives impliqueront fort probablement des procédures organisationnelles différenciées. Toutefois, il est possible d’identifier dès maintenant les buts et l’objet de ces procédures. Il s’agit notamment des règles assurant le contrôle exercé par les collectifs sur leurs représentants, de la délimitation des sphères d’autorité et des droits 121de veto, des conditions d’application des décisions des organes de coordination au sein des différents collectifs, du degré d’autonomie de chaque collectif pour l’organisation du travail et du processus de production, des dispositifs d’éveil démocratique, des restrictions à l’emploi des non-membres salariés ou, encore, des modalités de répartition des excédents (et des pertes) générés par les investissements financés en commun. C’est dans cette direction que nos recherches s’orientent désormais.
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1 lmarouda@upatras.gr
2 yorgos.rizopoulos@univ-paris-diderot.fr
3 Les critères de cette performance ne sont pas identiques à ceux d’une entreprise capitaliste, mais doivent assurer la survie et le développement de la coopérative.
4 Il se pose également la question des règles et dispositifs organisationnels qui doivent accompagner la mise en place d’une gouvernance élargie, afin de contrecarrer au quotidien la tendance vers la dégénérescence au niveau du réseau et de chaque coopérative particulière. Ce point ne sera pas développé ici.
5 Parallèlement aux SCOP traditionnelles, des nouvelles formes de coopératives de production ont été instituées au cours des dernières années : les sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) au sociétariat multiple dont la gouvernance est élargie intégrant des partenaires extérieurs, et les coopératives d’activité et d’emploi (CAE) qui regroupent des entrepreneurs qui souhaitent développer leur propre activité tout en évoluant dans un cadre collectif et en bénéficiant d’un statut de salarié(e). Les coopératives de consommation et les coopératives agricoles destinées à assurer l’utilisation en commun d’outils de production, la commercialisation des produits ou l’approvisionnement en intrants de leurs membres qui ne sont pas des salariés/sociétaires ne font pas partie du champ retenu.
6 « Les coopératives ouvrières représentent, à l’intérieur de l’ancien système, la première brèche faite dans celui-ci, bien qu’elles reproduisent nécessairement, et partout, dans leur organisation réelle, tous les défauts du système existant. Toutefois, dans les coopératives, l’antagonisme entre le capital et le travail se trouve surmonté, même si c’est encore sous une forme imparfaite : en tant qu’association, les travailleurs sont leur propre capitaliste, c’est-à-dire qu’ils utilisent les moyens de production à la mise en valeur de leur propre travail. » (Marx, tome III du Capital, p. 1178).
7 Cette idée est exprimée de façon explicite dans l’Adresse Inaugurale de 1864, (Marx, Œuvres, t1, p. 467) : « Pour excellente qu’elle soit dans ses principes, et si utile qu’elle apparaisse dans la pratique, la coopérative des travailleurs, si elle reste circonscrite dans un cercle étroit…, alors cette coopération ne sera jamais capable d’arrêter les monopoles qui croissent en progression géométrique ; elle ne sera pas capable de libérer les masses, ni même d’alléger de façon perceptible le fardeau de leur misère. »
8 Si de tels dispositifs peuvent avoir un impact non négligeable, ils présupposent un développement important du mouvement coopératif.
9 Un tel raisonnement, qui amène Vanek (1973) à privilégier les financements externes, n’a jamais été prouvé empiriquement, ni dans la version yougoslave de l’autogestion, ni dans les coopératives qui interviennent dans une économie capitaliste (Maroudas, 1989 ; Zafiris, 1982).
10 Par exemple, Boisaco situé dans la municipalité de Sacré-Cœur (Québec) dont les emplois dépendent largement de l’exploitation forestière. Suite à trois faillites de l’entreprise locale de sciage et de rabotage, la communauté a collaboré avec la caisse de crédit provinciale et le gouvernement afin d’acheter l’usine pour 1,2 millions de dollars et créer Boisaco, en 1985. La coopérative contrôle tous les actifs dans le secteur, soit une usine de sciage et de rabotage, un camp forestier et un centre administratif. Son capital social est initialement partagé entre trois entités : une coopérative de 60 bucherons (Cofor), une coopérative de 142 travailleurs dans l’usine de transformation (Unisaco), et Investra, un groupe d’investisseurs fondé suite à une souscription populaire qui a permis de recueillir un montant de 300 000 CAD, entièrement investi dans Boisaco. Investra est composé de petits actionnaires de la région (commerçants, mairie, communauté des affaires, et d’autres travailleurs). Aucune famille ne peut détenir plus de 5 % des actions. Le conseil d’administration se compose de 3 représentants de Cofar, 3 représentants d’Unisaco, 3 représentants d’Investra, et 1 représentant de Desjardins Capital Risque qui est entré dans le capital en décembre 2008.
11 En France, les salariés-sociétaires d’une SCOP doivent actuellement détenir au moins 51 % du capital et 65 % des droits de vote.
- CLIL theme: 3312 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Économie publique, économie du travail et inégalités
- ISBN: 978-2-406-07390-1
- EAN: 9782406073901
- ISSN: 2554-9626
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-07390-1.p.0103
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 12-22-2017
- Periodicity: Biannual
- Language: French
- Keyword: Degeneration thesis, producer cooperatives, network of cooperatives, expanded governance, networks