C’est lui qui, le premier après Cendrars, avait repris le chemin du Morro azul. De son pèlerinage il avait rapporté de la Tour Eiffel sidérale une photo si merveilleusement illisible qu’elle ne cesse de faire rêver. Grand lecteur du Lotissement du ciel, il avait rejoint très tôt les amis du poète qui sont nombreux à se souvenir de sa présence assidue et chaleureuse. Adrien Roig, né en 1924, nous a quittés le 19 mai, dans sa quatre-vingt-dix-septième année.
Adrien Roig était considéré, sur un plan international, comme un des plus éminents spécialistes des études lusitaniennes. Longtemps professeur à l’université Paul-Valéry de Montpellier, il y dirigeait le Centre de recherche en littérature de langue portugaise et Quadrant, sa revue annuelle, qu’il avait fondée en 1986. Traducteur, éditeur, essayiste dans les deux langues, il avait notamment consacré de multiples travaux à Inès de Castro, la reine morte. Mais c’est sous le signe du Brésil qu’il s’est passionné pour Blaise Cendrars. Dès 1979 et durant une vingtaine d’années, il s’est attaché à approfondir la connaissance de l’Utopialand du poète. Il était du premier colloque qui, à Nanterre en 1981, a célébré Blaise Cendrars 20 ans après. Et, par la suite, il est resté fidèle aux rencontres de l’AIBC et aux journées du CEBC, intervenant avec une belle autorité à Grenoble, à Monpazier, au Tremblay-sur-Mauldre, à Conflans-Sainte-Honorine et naturellement à São Paulo, en 1997. Avec Jeanne, sa femme, il était du grand voyage en car – une vraie bourlingue – qui a permis aux participants du colloque de découvrir sur le vif le Morro azul, puis de sillonner le Minas Gerais à la recherche de l’Aleijadinho et des merveilles baroques, Congonhas, Ouro Preto, Tiradentes…
De sa fréquentation assidue et intime du Brésil de Cendrars, témoignent près d’une vingtaine de contributions données en revues, de Caravelle à Feuille de routes, en passant par la Revue de littérature comparée, Quadrant, Continent Cendrars, la série Cendrars chez Minard, ainsi que dans les actes 20de colloques. S’y joignent deux recueils Blaise Cendrars, o Aleijadinho e o modernismo brasileiro (Rio de Janeiro, 1984) et Blaise Cendrars et le Brésil (Fondation Calouste Gulbenkian, 1988). Ces dernières années, après la mort de sa femme, il s’était peu à peu et discrètement retiré. À Marie Roig Miranda, sa fille, les amis de Cendrars font part de leur grande tristesse mais aussi de leur conviction qu’entre la France et le Brésil, Adrien Roig aura été un grand et précieux passeur du poète.
