Titres et commencements
- Publication type: Journal article
- Journal: Bulletin de la Société internationale des amis de Montaigne
2017 – 1, n° 65. varia - Author: Legros (Alain)
- Pages: 133 to 149
- Journal: Bulletin for the International Society of Friends of Montaigne
Titres et commencements
L’intitulé de ma communication, « Titres et commencements », doit sans doute quelque chose à celui d’un film que j’avais aimé, mais dont il ne me reste plus en mémoire que le souvenir têtu d’une affiche et le nom (« Cris et chuchotements »).
De façon plus consciente, je souhaite reprendre ici un travail que j’avais esquissé lorsque Montaigne était au programme de l’agrégation de philosophie, en 2006, dans un article intitulé « Genèse d’un philosophe1 ». Ma thèse était la suivante : l’ordre des chapitres des Essais est celui dans lequel le premier jet rédactionnel de chacun d’eux a été pourvu d’un titre, d’une façon analogue à celle qui nous fait, sur nos ordinateurs, nommer un dossier ou un fichier avant même d’avoir réuni toutes les pièces appelées à s’y loger. Seule exception, au Livre I, l’insertion tardive du chapitre « De l’institution des enfants », qui allonge à la demande celui « Du pédantisme », a obligé l’auteur à réunir en un seul les chapitres « De la coutume » et « De ne changer aisément une loi reçue » sous un titre syntaxiquement bancal, afin de conserver le principe d’un nombre impair de chapitres où un texte de La Boétie pût continuer à occuper la place numériquement centrale.
La raison principale d’un tel dispositif a priori chronologique – mais d’une chronologie que les additions successives allaient brouiller, et cela bien avant les interventions autographes sur l’Exemplaire de Bordeaux (EB) –, l’auteur lui-même nous la révèle au dernier chapitre de ses Essais de 1580 : « Je veux représenter le progrès de mes humeurs, et qu’on voie chaque pièce en sa naissance. Je prendrais plaisir […] à reconnaître le train de mes mutations2. » Il dit de même, huit ans plus tard : « De 134toutes choses les naissances sont faibles et tendres. Pourtant faut-il avoir les yeux ouverts aux commencements3. »
Être attentif aux commencements4, c’est ce que je souhaite faire ici en me limitant au « troisième al(l)ongeail5 », sans oublier toutefois qu’en huit ans le dessein primitif peut avoir été modifié, car l’expérimentateur qui continue d’écrire pour s’essayer est aussi désormais l’auteur d’un livre, livre unique et « toujours un » qu’il aime à voir grandir et s’étoffer, mais qu’il aime d’abord, par intermittence, à retrouver et relire, pour ainsi dire fichier par fichier, titre par titre, d’un regard en somme analogue à celui qui le fait, quoique assez tard, écrire un commentaire global à la fin des ouvrages qu’il a lus : « j’ai pris en coutume depuis quelque temps, d’ajouter au bout de chaque livre […] le temps auquel j’ai achevé de le lire, et le jugement que j’en ai retiré en gros : afin que cela me représente au moins l’air et idée générale que j’avais conçus de l’auteur en le lisant6. » C’est d’abord pour lui-même, pour mieux se connaître en ses permanences et ses variations, que Montaigne laisse des traces de ce qu’il fut. Ainsi en est-il, selon moi, des titres de chapitre de ses Essais, dont les mots mêmes se retrouvent dans le corps du texte, indiquant par là ce qu’a pu être l’entrée en écriture de chaque chapitre, le lieu où il a pris naissance et en quelle circonstance, voire son tout premier incipit.
Le plan de mon exposé sera des plus simples : d’abord l’analyse des titres, puis la recherche des commencements. L’appariement ou le groupement de certains chapitres en première partie et l’impasse faite sur d’autres dans la seconde me permettront, je pense, de respecter l’horaire en m’en tenant à l’essentiel, réservant la totalité du propos et des notes plus fournies pour la version écrite.
135Analyse des titres
Au seuil de cette première partie, je souhaite placer deux citations empruntées à « De la vanité ». La première permet de comprendre pourquoi le Livre III ne contient que 13 chapitres, tous longs à l’exception du septième, quand les deux premiers en réunissaient respectivement 57 et 37 : « Parce que la coupure si fréquente des chapitres, de quoi j’usais au commencement, m’a semblé rompre l’attention avant qu’elle soit née : et la dissoudre, dédaignant s’y coucher pour si peu, et se recueillir : je me suis mis à les faire plus longs, qui requièrent de la proposition et du loisir assigné7. » Plus ajustée à notre propos, la seconde prolonge, à sa manière et comme souvent, l’avis liminaire au lecteur : « Les noms de mes chapitres n’en embrassent pas toujours la matière : souvent ils la dénotent seulement, par quelque marque8 ». À la suite de ce constat, l’auteur cite ensuite, parmi d’autres exemples d’œuvres anciennes, deux comédies de Térence ayant pour titre le nom d’un personnage éphémère, tel l’Eunuque, ou même seulement mentionné, telle l’Andrie ou Andrienne, qui est pour ainsi dire la Cantatrice chauve du théâtre latin. La comparaison des tables des matières de 1580, 1582 et 1588 pour les Livre I et II montre qu’à une coquille près aucun titre n’a été modifié d’une édition à l’autre. Si chacun d’eux est pour ainsi dire ne varietur, c’est qu’il sert de témoin, de repère ou de balise à l’auteur relecteur de lui-même, soucieux de fixer la « fantaisie », idée ou image fortuite qui avait donné le branle à chacun de ses galops d’essai.
Chapitre 1, « De l’utile et de l’honnête », et Chapitre 2, « Du repentir ». Sur le mode latin du De senectute ou du De amicitia, la préposition, réitérée dans le premier titre, annonce ce dont il va être question dans chacun de ces deux chapitres. 74 des 107 chapitres qui constituent les Essais sont intitulés de la sorte. La proportion atteint presque 100 % dans le Livre III où 12 des 13 chapitres se conforment à ce patron. Le plus souvent la question est ouverte et le titre ne préjuge pas de la réponse donnée par l’auteur à la délibération qu’il engage, mais nous verrons qu’il y a quelques exceptions.
136Si j’apparie ces deux premiers titres, c’est en raison de leurs probables modèles grecs, l’adjectif substantivé et l’infinitif substantivé, avec emploi de l’article défini. De même que le grec associe jusqu’à les confondre en une même expression to kalon, le beau, et to agathon, le bon, Montaigne place côte à côte « l’utile » et « l’honnête », mais pour les distinguer soigneusement. Les deux catégories dont ce chapitre se propose d’étudier la relation sont à la frontière de l’éthique et du politique. Elles ont été l’une et l’autre, comme on sait, élaborées par une longue tradition philosophique, depuis Cicéron9 jusqu’à Bodin en passant par Machiavel. Les questions implicitement contenues dans ce titre sont au moins au nombre de deux : l’utile et l’honnête sont-ils toujours compatibles ? quand ils ne le sont pas, lequel des deux doit-on choisir ? Je n’entre pas ici dans ce débat, qui n’est d’ailleurs pas que philosophique pour un contemporain des guerres de religion. Je me contenterai seulement de constater la permanence du titre originel du chapitre i dans toutes les éditions posthumes assumées par Marie de Gournay jusqu’en 1635. Après cette date, il arrive que l’éditeur substitue aux adjectifs deux noms abstraits, « De l’utilité et de l’honnêteté », qui tirent le titre vers la conceptualisation. Tel est le cas de l’édition rouennaise de Jean Berthelin en 1641 ou, en 1652, de l’édition parisienne d’Edme Cousterot dont Rousseau a annoté brièvement un exemplaire en sa possession.
Chez Montaigne, la catégorie morphologique de « repentir » oscille, quant à elle, entre verbe et nom. L’absence de pronominal réfléchi incline à voir ici un nom, mais la correction apportée par l’auteur lui-même sur EB, au fo 355, tend plutôt à le considérer comme verbe : « Et le repentir ne touche pas proprement les choses qui ne sont pas en notre force, oui bien le regreter10. » On lisait « regret » en 1588 et ce mot partiellement biffé sur EB réapparaîtra en 1595. L’hésitation s’autorise au reste de l’usage fréquent que Montaigne fait de l’infinitif substantivé, préférant par exemple « le philosopher » inchoatif à « la philosophie » constituée, « le penser » actif et tâtonnant à « la pensée » plus ou moins arrêtée. Trois titres des Essais empruntaient déjà ce tour : « Du parler prompt ou tardif » (I, 10), « Du dormir » (I, 44) et « Du démentir » (II, 18).
137Chapitre 4, « De la diversion » et Chapitre 12, « De la Physionomie ». Si toutefois on préfère voir dans « repentir » un nom, on pourra l’associer avec deux autres chapitres qui paraissent avoir surtout pour but de définir deux notions d’usage peu commun, l’une à partir du latin, di-vertere, détourner l’attention, faire diversion, l’autre à partir du grec, physio-gnomonia, c’est-à-dire la connaissance qu’on peut avoir du caractère d’une personne en observant les traits de son visage. En d’autres termes, le dessein est moins de dire des choses nouvelles, originales ou communes sur ces « arguments » que de définir, à l’aide d’exemples concrets, les mots inscrits dans le titre à la façon d’une entrée de dictionnaire, comme pour « Des destriers » ou pour « Des cannibales ». La question implicite du titre n’est pas « Quel est le sujet abordé ? », mais – ou d’abord – « Quel est le sens de ce mot ? ». Et Montaigne répond dans les trois cas : ce qu’on appelle « repentir » n’en est pas un ; voici ce que j’appelle « diversion » ; voilà ce qu’on peut dire de la « physionomie » sans en faire un « traité », comme le signale lui-même l’auteur, qui se montre souvent attentif à nommer ce qu’il fait, par exemple quand il précise que III, 5 est un « commentaire », II, 12 une « apologie », II, 32 une « defense », II, 34 une simple « observation », I, 40 une « considération », tel chapitre un « article », et l’ensemble des Essais un « registre » ou un « rôle », autrement dit un rotulus, un rouleau où lister ses « fantaisies » successives.
On pourrait joindre à cet ensemble les titres des chapitres 9 et 13, « De la vanité » et « De l’expérience », mais les notions sont cette fois bien connues, au-delà même du monde des théologiens, des moralistes et des médecins. Si la comparaison avec un dictionnaire reste valable, l’entrée annonce un libre développement d’idées propres à enrichir un débat philosophique issu, entre autres, de la Bible et d’Aristote, les enseignements limités d’une expérience bien conduite de soi et du monde suffisant à surnager tant bien que mal dans un océan de vanités auxquelles les sciences et la raison n’échappent pas ou si peu.
Chapitre 5, « Sur des vers de Virgile ». Usant par exception de la préposition « Sur », autre façon de traduire le De latin, ce titre se signale aussi par la présence d’un nom propre, celui d’un auteur dont le chapitre va présenter un libre commentaire, global ou partiel : ici Virgile, ailleurs Cicéron, César, Sénèque, Plutarque ou Sebond. On pense par exemple à « D’un mot de Caesar » (I, 53), ou bien, sur le même modèle, à « Considération sur Cicéron » (I, 40). Sans trop anticiper sur la recherche 138des commencements, on peut remarquer la place que prend et garde ici Virgile, alors même que le chapitre montrera, dans le cas précis de la description des amours de Vénus, une certaine préférence pour Lucrèce, jugé plus opportun. Lu ou relu le premier, le poète mantouan impose sa marque à un chapitre qui va mener l’auteur plus loin qu’il ne pensait, en confiant au lecteur, à la faveur de son émotion poétique, plusieurs détails intimes de son anatomie et de sa sexualité.
Qu’on me permette ici de suggérer aux éditeurs des Essais une note qui permettrait de signaler une phrase importante que l’auteur a écrite, puis biffée au bas du fo 390 d’EB. Elle renvoie explicitement à la page liminaire « Au Lecteur » où il disait sa tentation de se peindre, tel un cannibale, « tout entier et tout nu » : « Ma préface, avait-il d’abord écrit de sa main, montre que je n’espérais pas tant oser11. » Une addition manuscrite à « De la vanité » confirme cette impression : « La faveur publique m’a donné un peu plus de hardiesse que je n’espérais12 ». Riches de cette réception, les Essais de 1588, même là où le texte est inchangé, ne sont plus tout à fait les mêmes que les Essais de 1580 et de 1582.
Chapitre 3, « De trois commerces ». Analogue, par l’usage du chiffre « trois », à « De trois bonnes femmes » (II, 35), ce titre a de surcroît l’opportunité de se trouver bien à sa place, au Livre III, Chapitre 3. Tout d’ailleurs est bien à sa place dans ce chapitre, qui dit le plaisir varié que l’auteur trouve dans trois sortes de compagnies : celle des « honnêtes et habiles hommes », celle des « belles et honnêtes femmes », et enfin celle des livres. Dans les trois cas, il use du mot « commerce », un vocable qu’on trouve une soixantaine de fois dans les Essais. L’explicit limite toutefois la portée de ces évocations en précisant qu’il n’est question ici que de sa vie privée, et qu’il peut trouver aussi dans sa vie publique d’autres sujets de satisfaction. Par un souci manifeste d’hygiène mentale, Montaigne ne manque pas de dire comment des goûts comme ceux dont il fait ici état peuvent devenir des addictions si l’on s’y adonne sans modération13.
Chapitre 7, « De l’incommodité de la grandeur », Chapitre 8, « De l’art de conférer », et Chapitre 10, « De ménager sa volonté ». La plupart 139du temps, le titre présente l’« argument » du chapitre d’une manière pour ainsi dire neutre. Dans trois cas cependant, l’auteur se montre assertif : « De l’incommodité de la grandeur », autrement dit « La grandeur est incommode » (c’est un constat) ; « De ménager sa volonté », qu’on peut entendre comme un conseil, et même comme une prescription : « Il faut ménager sa volonté ». Quant au titre du chapitre 8, il dit explicitement que la « conférence » est un art et que par conséquent les plaisirs de la fréquentation et de la conversation des « honnêtes et habiles hommes » dont il a déjà été question ne sont pas à la portée de tous. Le scepticisme dont on crédite souvent Montaigne fait bon ménage avec l’assertion. On relève en effet dans les Essais précédents et sous d’autres formes pas moins de 21 titres assertifs, dont 15 dans le Livre I. Chapitres 6, « Des coches », et Chapitre 11, « Des boiteux ». J’ai gardé pour la fin de mon analyse ces deux titres qu’une certaine doxa critique considère bien souvent comme des titres-écrans destinés à déjouer une éventuelle et peu vigilante censure : ils auraient été placés après coup pour donner une apparence anodine à des propos subversifs sur la conquête et la colonisation du Nouveau Monde d’une part, sur la chasse aux sorciers et sorcières en Europe d’autre part. Il s’agit plus simplement, je pense, de deux portes étroites et basses d’entrée en écriture ou, pour le dire avec des mots de spéléologue, de deux boyaux donnant accès à des salles volumineuses. En usant de la métaphore appropriée dont use Montaigne, on pourrait aussi dire qu’il s’agit de « mouches ». Tel est l’objet de cette seconde partie.
À la recherche des commencements
Si l’analyse des titres ou, comme le dit Montaigne, des « noms » de chapitre repose sur des données textuelles manifestes, la recherche des commencements est plus aléatoire, qui prétend dire d’où, de quelle circonstance sourd en quelque sorte le chapitre, et même déceler ce qui a pu être l’incipit d’un premier jet rédactionnel qui aurait laissé son empreinte en un lieu du texte où se retrouvent les mots du titre, puisque telle est et reste ma thèse. Comme précédemment, je souhaite 140placer au seuil de cette seconde partie une citation, tirée cette fois de « Sur des vers de Virgile », là où l’auteur parle de l’élection, ou plutôt de l’accueil de ses « arguments » ou sujets fortuitement rencontrés : « à écrire, j’accepte plus envis [moins volontiers] les arguments battus, de peur que je les traite aux dépens d’autrui. Tout argument m’est également fertile. Je les prends sur une mouche […] Que je commence par celle qu’il me plaira, car les matières se tiennent toutes enchaînées les unes aux autres14. » Il s’agit bien de commencement, de naissance, pour ainsi dire de déclic. Il me faut maintenant chercher dans le corps du texte quelle mouche a piqué Montaigne, avec cette conviction qu’elle n’a pu s’envoler sans laisser, au début, au milieu ou à la fin du chapitre ainsi élancé, quelque trace de sa stimulante venue.
Au Chapitre 1, une fois passé un court prologue qui vaut pour l’ensemble des Essais, les deux adjectifs substantivés du titre sont présents dès la première page du texte, à l’occasion d’un bref commentaire de Montaigne sur tel passage des Annales (II, 88) où Tacite rapporte la magnifique réponse du pourtant détestable Tibère à celui qui lui proposait d’empoisonner Arminius, son principal ennemi, ce qu’il refusa. Montaigne acquiesce à cette décision en distinguant bien les deux qualités : « Il quitta l’utile pour l’honnête15. » Jamais auparavant il n’avait usé de ces notions pour juger d’une action. Le chapitre met en œuvre à sa façon cet art logique du distinguo que Montaigne dit cultiver particulièrement. Si l’on trouve déjà ces mots au Livre II, c’est dans une addition d’EB au chapitre « De l’affection des pères aux enfants », donc après 1588 : « Qui bien fait, exerce une action belle et honnête : qui reçoit, l’exerce utile seulement. Or l’utile est de beaucoup moins aimable que l’honnête. L’honnête est stable et permanent, fournissant à celui qui l’a fait, une gratification constante. L’utile se perd et échappe facilement, et n’en est la mémoire ni si fraîche ni si douce16. »
Au Chapitre 2, il faut attendre trois pages pour qu’apparaisse, en relation avec le titre mais sous une forme conjuguée à la première personne, la phrase que je pense inaugurale : « Excusons ici, ce que je dis souvent, que je me repens rarement17 ». Rarement, et non pas jamais comme on le dit parfois… La distinction qui suit entre repentir et 141regretter ou regret naît de cette volonté de s’expliquer pour s’excuser, pour se mettre hors de cause en dissipant un malentendu. Sans doute a-t-on accusé Montaigne de froideur, d’insensibilité, ou bien, plus religieusement, d’une absence de repentance ou de contrition sans laquelle il n’est pas, pour un catholique rigoriste, d’absolution, sauf à se contenter de l’attrition, autrement dit du simple regret, ce à quoi l’Église consent malgré tout, mais non Montaigne, semble-t-il. La mouche qui a lancé ce chapitre est d’espèce agressive. Il n’est pas rare que l’auteur soit ainsi sur la défensive et que ce qu’il couche sur le papier prenne la suite d’une conversation ou objection à caractère privé, peut-être même domestique : « Quant de fois, étant marri de quelque action que la civilité et la raison me prohibaient de reprendre à découvert, m’en suis-je ici dégorgé, non sans dessein de publique instruction […] Zon dessus l’œil, zon sur le groin, Zon sur le dos du Sagouin18. »
Le point de départ du Chapitre iii est triple, comme il convient à un tressage à trois brins. Le premier n’apparaît qu’après un long et sans doute tardif prologue : « Les hommes, de la société et familiarité desquels je suis en quête, sont ceux qu’on appelle honnêtes et habiles hommes […] La fin de ce commerce, c’est simplement la privauté, fréquentation et conférence : L’exercice des âmes, sans autre fruit19. » Le deuxième se montre à son heure : « C’est aussi pour moi, un doux commerce, que celui des belles et honnêtes femmes20. » Le troisième de même : « Ces deux commerces sont fortuits, et dépendants d’autrui. […] Celui des livres, qui est le troisième, est bien plus sûr et plus à nous21. » Un, deux, trois commerces : le compte y est. Rarement un chapitre des Essais n’est structuré avec une telle netteté. Hommes, femmes et livres assurent ce qu’il faut bien appeler un confort, et c’est ce sentiment qui les convoque ensemble dans ce chapitre où l’auteur se plaît à décrire sa chère « librairie » de forme ronde. Ce n’est pas un hasard. Là est sans doute le lieu où il écrit, le « giron » (c’est son mot) d’où procède ce sentiment de bien-être dont le chapitre témoigne.
Le mot « diversion » que le Chapitre 4 entreprend de décrire se rencontre déjà au Livre II, mais dans une addition manuscrite d’EB, au verso du fo 163, donc après 1588 : « Je me sauve de telles trahisons 142en mon propre giron, non par une inquiète et tumultuaire curiosité, mais par diversion plutôt, et résolution22. » L’entrée est narrative : « J’ai autrefois été employé à consoler une dame vraiment affligée. » Suit le récit de cet entretien, et de la manière dont Montaigne procéda, par déplacements successifs de l’attention vers des sujets voisins : « je lui dérobai imperceptiblement cette pensée douloureuse : et la tins en bonne contenance et du tout rapaisée autant que j’y fus. J’usai de diversion23. » La dame ne fut pas guérie, seulement soulagée, ce qui n’est déjà pas si mal au jugement du médecin de l’âme.
Le lecteur du chapitre 5 doit attendre quelques pages pour trouver les huit vers de Virgile dont on lui a annoncé le commentaire. Il découvrira plus loin leur pendant, en l’espèce huit vers de Lucrèce que Montaigne commente à leur tour avec délectation, et même prédilection. Sur son exemplaire du De rerum natura, en page 5, il a marqué ces vers d’une accolade, et inscrit dans la marge cette manchette : « Amours de mars & Venus24 ». Dans le cabinet adjacent à sa « librairie », il avait fait peindre sur un mur ces amours adultères parmi d’autres scènes dédiées à la déesse dont l’image hante tout le chapitre. La vue de cette scène suggestive a pu faire jaillir le « flux de caquet » auquel l’auteur reconnaît, à terme, s’être laissé entraîner à la faveur d’un « commentaire25 ». Grand est le pouvoir de Vénus, cette « si douce sainte26 »…
« Des coches » il n’est question, dans le chapitre 6, qu’au début, mais après quelques pages de prologue, ainsi qu’à l’extrême fin. Au début, pour cette confidence négligemment raccordée au propos : « Or je ne puis souffrir longtemps (et les souffrais plus difficilement en jeunesse) ni coche, ni litière, ni bateau. Et hais toute autre voiture que de cheval, et en la ville, et aux champs27 ». Puis pour dire la tentation d’écrire un livre d’histoire sur les coches de guerre, ancêtres de nos chars d’assaut, tentation analogue à celles, qu’on trouve ailleurs, d’un livre sur les récits de mort ou sur la comparaison des armes : « Si j’en avais la mémoire 143suffisamment informée, je ne plaindrais mon temps à dire ici l’infinie variété que les histoires nous présentent de l’usage des coches au service de la guerre28. » À la fin, après avoir fait retour au thème abandonné (mais toujours présent dans le titre), pour raconter comment le dernier « roi du Pérou » a été brutalement « avalé par terre » en dépit de la farouche résistance de ceux qui le portaient sur sa « chaise d’or ». Tout autant qu’un texte, une gravure bien connue a pu inspirer à la fois ce récit terminal, le chapitre et son titre. « Retombons à nos coches29 sonne comme une invitation à se reculer, à rentrer dans le rang, à revenir au titre contractuel dont on s’était depuis bien longtemps éloigné. Le pronominal indique qu’elle s’adresse à la fois à l’auteur et à son lecteur, emportés tous deux dans la chute de l’Inca.
L’Inca est un bon exemple de « L’incommodité de la grandeur », court et central chapitre 7 qui semble allonger le précédent et qui a pu naître de la même source iconique. C’est du moins ce que suggère une correction effectuée sur EB au fo 402 dans la dernière phrase du chapitre 6 où « avala par terre » a été substitué à « porta par terre », comme pour mieux faire le lien avec ce qui est dit plus bas, au début du chapitre 7, à propos de la grandeur : « En général, elle a cet évident avantage, qu’elle se ravale quand il lui plaît, et qu’à peu près, elle a le choix, de l’une et l’autre condition. Car on ne tombe pas de toute hauteur, il en est plus, desquelles on peut descendre, sans tomber30 ».
Le chapitre 8 était, comme on sait, très apprécié de Pascal. La phrase de lancement pourrait avoir été la suivante : « Le plus fructueux et naturel exercice de notre esprit, c’est à mon gré la conférence31. » Puis une première addition a laissé pour ainsi dire sa trace dans le renvoi explicite au « titre », et ce mot vient tout droit du latin titulus, cette pancarte qui, dans les bibliothèques médiévales, assignait aux livres une place d’après des catégories préétablies : « Pouvons-nous pas mêler au titre de la conférence et communication, les devis pointus et coupés que l’allégresse et la privauté introduit entre les amis, gaussants et gaudissants plaisamment et vivement les uns les autres ? Exercice auquel ma gaieté naturelle me rend assez propre32. » Pas de bonne « conférence » 144sans franche, amicale et bruyante gaieté. Nous parlions de Pascal, mais Rabelais n’est pas loin.
Grâce à l’anaphorique, comme dans l’incipit de « De trois bonnes femmes » (II, 35), on entre directement et sans apprêt dans le propos « De la vanité », chapitre 9 : « Il n’en est à l’aventure aucune plus expresse, que d’en écrire si vainement33. » La phrase suivante, où le « vain » fait place au « divin », la « vanité » à la « divinité », révèle peut-être ce qui a été le déclic de ce long discours de 54 vaines pages qui se clôt, comme on sait, par la copie intégrale d’une bulle dont le nom résonne aux oreilles du lecteur des Adages d’Érasme : « Homo Bulla » (l’homme est une bulle, un ballon gonflé d’air). Mais ici, la référence est biblique : « Ce que la divinité nous en a si divinement exprimé, devrait être soigneusement et continuellement médité par les gens d’entendement34. » « Tout est vanité », proclame en effet l’Ecclésiaste, et cette fameuse sentence, Montaigne l’avait en ligne de mire lorsqu’il s’asseyait à sa table, dans la deuxième travée de sa « librairie », où il l’avait fait peindre sur la solive qui surplombait les étagères de sa bibliothèque, mais en ajoutant une préposition, comme pour lui donner plus d’extension et de poids et embrasser l’ensemble des livres ainsi exposés : « Per omnia vanitas35 ». « Mais quoi, nous sommes partout vent », diront en écho les Essais. Ou plutôt « par tout vent », en trois mots, comme l’écrit Montaigne au verso du fo 500, ce qui est sans doute la meilleure traduction de la sentence peinte, dont elle reprend exactement les trois termes tout en faisant assonner « vent » et « vanitas ». Mais, poursuit Montaigne, « le vent encore plus sagement que nous s’aime à bruire36. » Le discours « De la vanité » tourne ainsi à l’éloge paradoxal.
Montaigne le père savait « ménager », autrement dit bien gérer sa maison, mais non sa volonté. Son souvenir (un souvenir à double fond) inspire, par réaction, le chapitre 10 sur lequel nous ne nous attarderons pas : « Messieurs de Bordeaux m’élurent maire de leur ville […] 145Et parce que la connaissance de feu mon père les avait seule incités à cela, et l’honneur de sa mémoire : je leur ajoutai bien clairement, que je serais très marri que chose quelconque fît autant d’impression en ma volonté, comme avaient fait autrefois en la sienne, leurs affaires, et leur ville, pendant qu’il l’avait en gouvernement, en ce lieu même auquel ils m’avaient appelé37. » Souvent surgit ainsi, dans les Essais, au détour d’une phrase la figure de ce père bien aimé, mais pour s’en démarquer : « Mon père […] rechercha avec grand soin et dépense l’accointance des hommes doctes, les recevant chez lui comme personnes saintes […] Moi je les aime bien, mais je ne les adore pas38 » ; « Mon père haïssait toute sorte de sauces, je les aime toutes39. »
Le mot « boiteux » ou plutôt « boiteuse », au féminin, ne se rencontre qu’à la fin du chapitre 11, dans ce qui apparaît à première vue comme une sorte de rallonge ou de pièce rapportée, fort mal jointe et, qui plus est, avec une désinvolture affichée, plus encore que dans « Retombons à nos coches » : « À propos, ou hors de propos, il n’importe. On dit en Italie en commun proverbe, que celui-là ne connaît pas Venus en sa parfaite douceur, qui n’a couché avec la boiteuse40. » À cet adage fait aussitôt écho la réplique, en grec, de la reine des Amazones au Scythe qui, dit joliment Montaigne, « la conviait à l’amour » : « arista cholos oiphei, le boiteux le fait le mieux41 », traduction discrète d’un autre adage, tiré d’Érasme, pour dire la supériorité sexuelle des boiteux par rapport aux autres hommes, ce dont l’Amazone parle par expérience. Le pluriel du titre englobe l’un et l’autre, féminin et masculin, mais c’est surtout d’une « boiteuse » que l’auteur va ensuite entretenir son lecteur, en évoquant une expérience personnelle qui lui a fait augmenter, par l’imagination, le plaisir qu’il pensait avoir eu avec l’une d’entre elles : « par la seule autorité de l’usage ancien, et public de ce mot : je me suis autrefois fait accroire, avoir reçu plus de plaisir d’une femme, de ce qu’elle n’était pas droite42. » Les quatre occurrences du mot, les seules du livre III, n’apparaissent que dans ces quelques lignes qui, selon toute vraisemblance, constituaient le premier jet rédactionnel de ce chapitre, 146l’adage tirant derrière lui l’adhésion crédule et immédiate à ce qui se dit, sans distance critique. Le titre a gardé la trace de ce départ, qui accroche au souvenir de deux ou trois proverbes celui d’une expérience personnelle. Un constat plus philosophique a été cependant associé à ces réminiscences : « Je rêvassais présentement, comme je fais souvent, sur ce, combien l’humaine raison est un instrument libre et vague43. » La boiterie n’est pas seulement physique, elle affecte l’esprit humain dans toutes ses productions, celles des sorciers et sorcières comme celles de leurs juges, celles aussi de Montaigne qui s’enhardit à juger ici des uns et des autres, et ne sait s’il fait bien.
« De la physionomie », chapitre 12. Ce vocable savant se rencontre dès 1580, dans « De la cruauté » : « Socrates avouait à ceux qui reconnaissaient en sa physionomie quelque inclination au vice, que c’était à la vérité sa propension naturelle, mais qu’il avait corrigée par discipline44. » Ainsi la figure du sage athénien, dont le présent chapitre offre un éloge appuyé, est-elle intimement liée à ce concept, ou plutôt à cette méthode d’observation, à cette façon de lire un caractère sur les traits d’un visage. Celui de Socrate, comme celui des Silènes, était laid. Celui de La Boétie aussi, à sa manière. Un vrai scandale pour Montaigne qui rêve, tel un Grec, d’une parfaite correspondance entre beauté et bonté. La nature est parfois injuste, déclarait déjà l’auteur de « Sur des vers de Virgile », via les Priapées, à propos des dimensions de son pénis. En revanche, son propre visage a attiré la confiance en deux circonstances périlleuses dont il fait le récit détaillé et dont le souvenir, par contraste avec le visage présumé de Socrate, a pu servir d’amorce à III, 12. « Il y a des physionomies favorables », dit-il vers la fin du chapitre45. Parmi elles, assurément, la sienne, si on en juge par les effets qu’elle a produits sur ses agresseurs. L’autre emploi du vocable considéré montre un peu 147plus haut que l’auteur a détourné au profit de l’essai ce qui aurait pu être la matière d’un traité : « Sans peine et sans suffisance, ayant mille volumes de livres, autour de moi, en ce lieu où j’écris, j’emprunterai présentement s’il me plaît, d’une douzaine de tels ravaudeurs, gens que je ne feuillette guère, de quoi émailler le traité de la physionomie46. » Vade retro, tractatus ! Les singuliers Essais sont sans doute nés de cette résistance à la tentation du livre savant.
Qu’on me permette ici une nouvelle fois de compléter d’une note l’édition de référence : l’éloge d’apparence paradoxale que Montaigne fait de la « naïveté » et de l’« enfance » de Socrate, et qui s’adresse aussi aux paysans de son voisinage, embrasse aussi les Jésuates, ces religieux qu’on appelait « frères ignorantins » et dont il avait visité par trois fois les couvents en Italie, à Venise, à Vérone et à Rome : « J’ai pris plaisir de voir en quelque lieu, des hommes par dévotion, faire vœu d’ignorance, comme de chasteté, de pauvreté, de pénitence […] Et est richement accomplir le vœu de pauvreté d’y joindre encore celle de l’esprit47. »
« De l’expérience » enfin, chapitre 13. Bien ajusté à ce riche chapitre où il est question de santé, de médecine et d’art de vivre, le titre pourrait embrasser les Essais tout entiers. Le mot clef, ici, ne se fait pas attendre, sous l’égide d’Aristote qu’il nous faut deviner : « Il n’est désir plus naturel que le désir de connaissance. Nous essayons tous les moyens qui nous y peuvent mener. Quand la raison nous faut, nous y employons l’expérience48. » Il est probable que le départ de ce chapitre est à chercher du côté de l’expérience personnelle que Montaigne a acquise des maladies et de la vieillesse : « quant a la santé corporelle, personne ne peut fournir d’expérience plus utile que moi, qui la présente pure, nullement corrompue et altérée par art, et par opination. L’expérience est proprement sur son fumier au sujet de la médecine, où la raison lui quitte toute la place49. » On lit un peu plus loin : « L’expérience m’a 148encore appris ceci, que nous nous perdons d’impatience. Les maux ont leur vie, et leurs bornes50. » Et encore, sur EB : « comme quelque nouveau symptôme survient à mon mal, je l’écris. D’où il advient que, asteure, étant quasi passé par toute sorte d’exemples, si quelque étonnement me menace, feuilletant ces petits brevets décousus, comme des feuilles Sibyllines, je ne faux plus de trouver où me consoler de quelque pronostic favorable en mon expérience passée51. » C’est peut-être la considération de ces « brevets » thérapeutiques, que les contemporains attachaient à leur cou52, qui a lancé l’ultime chapitre des Essais. Ces feuilles volantes sur lesquelles Montaigne notait les péripéties et aléas de sa santé n’avaient pas vocation à lui survivre, mais il est possible d’avoir quelque idée de leur contenu en lisant son Journal de voyage, en particulier aux pages où il parle de son expérience des eaux thermales, dont il dit finalement, en expert, qu’elles sont en gros inefficaces. On peut à toute extrémité se confier aux soins de la médecine, mais pour la vie courante, les petits et les gros bobos, le mieux est encore d’être à soi-même son propre médecin, son propre « empiricos » ou expérimentateur, à l’enseigne de Sextus, le pyrrhonien dont le gentilhomme avait fait reproduire les « voix » ou mantras au plafond de sa bibliothèque.
Il n’est pas facile d’attraper des mouches. Je ne sais si j’ai pu saisir toutes celles que j’ai traquées dans le texte des 13 chapitres du Livre III en m’aidant de leurs titres. Elles sont multiples et variées, en grosseur comme en apparence. Certaines sont des textes lus ou entendus, savants, poétiques ou populaires, d’autres sont des images de rencontre ou des mots peu communs, des souvenirs personnels, des conversations familières, des éléments décoratifs du lieu même où Montaigne écrit.
Une fois le branle donné, le texte va son train, par des voies parfois accidentées, mais sans jamais vraiment perdre de vue son point de départ : « C’est l’indiligent lecteur qui perd mon sujet : non pas moi : il s’en trouvera toujours en un coin quelque mot qui ne laisse pas d’être bastant, quoi qu’il soit serré53. » Le titre a fixé ce moment inaugural et, dans une certaine mesure, on peut à partir de lui conjecturer ce qui fut le premier jet rédactionnel d’un chapitre sur lequel l’auteur peut 149avoir travaillé durant vingt ans, car les Essais sont, selon son mot, un « registre de durée ». Comme les Mémoires d’Outre-Tombe…
Est-ce là pur artifice rhétorique ? Pour ma part, je ne le crois pas et je pense, comme l’auteur, qu’on fait parfois « [s]a finesse trop fine54 ». Il me semble que soupçonner chez lui une nonchalance affectée serait en contradiction avec le projet philosophique et moral qu’il s’est donné, à la suite des grands Anciens, de tester ses opinions et de veiller sur sa santé, bref de se découvrir peu à peu lui-même, stable et instable à la fois, comme tout homme « ondoyant et divers » (autrement dit contradictoire), toujours plus ou moins « de passage », par l’entremise d’une écriture d’essai qui se rêvait déjà cinématographique et qui eût apprécié les ressources de l’imagerie médicale et les explorations des sciences cognitives, sans pour autant méconnaître celles d’une psychananlyse pas encore obsolète.
Mon attention aux commencements part de cette conviction. Comme elle n’a rien, du moins je pense, d’une obsession, tout au plus d’une inclination, elle ne me fait pas oublier pour autant que ce qui compte aussi et surtout, pour les lecteurs et interprètes de Montaigne, ce sont les développements postérieurs, jusque dans l’édition posthume, dont ces commencements ont ouvert, plus ou moins grandes, les vannes.
Alain Legros
CESR
Université François-Rabelais de Tours
1 A. Legros, « Genèse d’un philosophe », Bulletin de la Société des Amis de Montaigne, 41-42, 2006, p. 49-77.
2 Montaigne, Essais, éds. Emmanuel Naya, Delphine-Reguig-Naya et Alexandre Tarrête, Paris, Gallimard, coll. « Folio classique », 2009, II, 37, p. 620.
3 III, 10, 340.
4 Dans le sillage de Daniel Ménager, « Montaigne et la question du commencement », Bulletin de la Société des Amis de Montaigne, 29-30, 2003, p. 11-21.
5 III, 9, 260.
6 II, 10, 134-135.
7 III, 9, 306 (EB).
8 III, 9, 304-305.
9 Alléguant Cicéron, Montaigne écrira plus tard cette addition d’EB (II, 12, 261), où le verbe « divertir » à un sens dépréciatif, donc inverse de celui qu’a ici le mot « diversion » : « Cicero reprend aucuns de ses amis d’avoir accoutumé de mettre à l’astrologie, au droit, à la dialectique, et à la géométrie, plus de temps, que ne méritaient ces arts : et que cela les divertissait des devoirs de la vie, plus utiles et honnêtes. »
10 Cf. III, 2, 47.
11 A. Legros, « ‘Ma préface montre que je n’espérais pas tant oser’, avait écrit Montaigne », Bulletin de la Société des Amis de Montaigne, 60-61, 2014-2015, p. 83-91.
12 III, 9, 262.
13 Voir A. Legros, « Amis, femmes et livres : trois compagnies pour Montaigne (III, 3), dans Lectures du troisième Livre des Essais de Montaigne, dir. P. Desan, Paris, Champion Classiques, 2016, p. 115-144.
14 III, 5, 136-137.
15 III, 1, 13.
16 II, 8, 87.
17 III, 2, 36.
18 II, 18, 486 (EB).
19 III, 3, 63.
20 III, 3, 64.
21 III, 3, 68.
22 II, 8, 100.
23 III, 4, 72-73.
24 Voir le fac-similé intégral de cet exemplaire et la transcription des annotations autographes sur le site des Bibliothèques virtuelles humanistes (BVH, Université François-Rabelais, Tours), projet ANR « Montaigne à l’œuvre » (menu « Documents »).
25 III, 5, 165 : « Pour finir ce notable commentaire, qui m’est eschappé d’un flux de caquet : flux impetueux par fois et nuisible […] »
26 III, 7, 197 : « Venus fut blessée […], une si douce sainte, et si délicate ».
27 III, 6, 170.
28 III, 6, 171 (EB).
29 III, 6, 192.
30 III, 7, 193.
31 III, 8, 202-203.
32 III, 8, 226-227.
33 III, 9, 235. La phrase s’applique à l’évidence au chapitre à venir, mais on pourrait aussi y voir une allusion à Cornelius Agrippa, auteur du De incertitudine et vanitate omnium scientiarum et artium (1530 ; traduction française 1582).
34 Ibid.
35 Voir A. Legros, Essais sur poutres. Peintures et inscriptions chez Montaigne, Paris, Klincksieck, 2000, p. 365-366. Deux sentences peintes au plafond de la « librairie » ont servi d’incipit à deux chapitres des Essais : « Que le goût des biens et des maux dépend en bonne partie de l’opinion que nous en avons » (I, 14) et « De l’incertitude de notre jugement » (I, 47).
36 III, 13, 468.
37 III, 10, 318-319.
38 II, 12, 160-161.
39 III, 13, 461.
40 III, 11, 359.
41 Ibid.
42 III, 11, 360.
43 III, 11, 348. L’adverbe « présentement » est un indice précieux pour l’examen qui nous occupe ici. Cf. I, 21, 250 : « tout ce caprice m’est tombé présentement en main, sur le conte que me faisait un domestique apothiquaire de feu mon père. » ; I, 26, 313 : « s’il m’advient, comme il fait souvent, de rencontrer de fortune dans les bons auteurs ces mêmes lieux, que j’ai entrepris de traiter, comme je viens de faire chez Plutarque tout présentement, son discours de la force de l’imagination » ; I, 54, 540 : « Nous venons présentement de nous jouer chez moi, à qui pourrait trouver plus de choses qui se tiennent par les deux bouts extrêmes » ; I, 56, 548 : « J’avais présentement en la pensée, d’où nous venait cette erreur, de recourir à Dieu en tous nos desseins et entreprises ».
44 II, 11, 149.
45 III, 12, 394.
46 III, 12, 390.
47 III, 12, 366. Voir A. Legros : « Jésuites ou Jésuates ? Montaigne entre science et ignorance », Montaigne Studies, vol. 15, p. 131-146. Il conviendrait de même de signaler l’allusion aux Feuillants dans cette addition d’EB à III, 3, 70-71 : « Je n’ai rien jugé de si rude en l’austérité de vie, que nos religieux affectent, que ce que je vois en quelqu’une de leurs compagnies. Avoir pour règle une perpétuelle société de lieu : et assistance nombreuse, entre eux, en quelque action que ce soit. Et trouve aucunement plus supportable d’être toujours seul, que ne le pouvoir jamais être. »
48 III, 13, 402.
49 III, 13, 424.
50 III, 13, 438-439.
51 III, 13, 445.
52 Je remercie Marie-Luce Demonet pour cette information.
53 III, 9, 305 (EB).
54 III, 1, 21-22 : « Ceux qui disent communément contre ma profession, que ce que j’appelle franchise, simplesse, et naïveté, en mes mœurs : c’est art et finesse : Et plutôt prudence, que bonté. Industrie, que nature : Bon sens, que bonheur [bon heur] : me font plus d’honneur qu’ils ne m’en ôtent. Mais certes ils font ma finesse trop fine ».
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- ISBN: 978-2-406-06907-2
- EAN: 9782406069072
- ISSN: 2261-897X
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-06907-2.p.0133
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 03-02-2017
- Periodicity: Biannual
- Language: French