Début du dixième livre [Partie I]
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : Un commentaire médiéval aux Métamorphoses. Le Vaticanus Latinus 1479, Livres VI à X
- Pages : 622 à 695
- Collection : Textes littéraires du Moyen Âge, n° 67
- Série : Ovidiana textes, n° 3
Incipit decimus liber
|f. 130v|
[1] Hic incipit decimus liber huius voluminis, in principio cuius continentur nupcie Orphei et Euridices, mors Euridices, descenssio Orphei apud Inferos, impetracio coniugis, amissio illius eo quod retro despexit, ascensio Orphei in Rodopen montem, numeratio arborum que secute fuerunt illum pro cantu suo, mutatio Ciparisi in cupressum, cantus Orphei usque ad finem libri. In quo continetur raptus Ganimedis, mutatio Iacinti in florem, Cerastarum in tauros et vacas, Propetides in lapides vel publices meretrices, statua Pigmalionis in feminam, amor Mirre illicitus, mutatio ipsius in arborem, de qua natus est Adonis, quem adamavit Venus. Item continetur mutatio Ypomene et Athalante in leones propter stuprum, mutatio sociarum Persephones in mentas olentes, mors Adonis, mutatio illius in florem qui dicitur papaver, et in hoc terminabitur liber iste.
[2]Integumenta istius libri sunt haec. Primo De Orpheo et Euridice. Pratum delicie, coniunx caro, vipera virus, / vir ratio, Stix est terra, loquela lira. [3]De ratione mutationis Ciparisi et aliorum quorundam in hoc libro et cantu contentorum : Morphosis Ovidii conformi nomine facta / consimilique statu proprietate pari. / Sic tibi Iacintus flos est Ciparisus et arbor, / taurus crudelis, bos meretricis amor. [4]De Mirra. Rem Mirram mirare novam, Mirram per amorem, / in mirram verti quam dat avarus amor. [5]De Ypomene et Athalanta dicitur sic : Ex auro poma tria sunt genitalia, fervens / com leo luxuriet, fertur utrique leo. / Nobilitas, species, sapientia sunt tria poma / aurea, que triplici pectora dote trahunt. [6]De Adoni. Flos breviter durans iuvenilis dicitur etas / que cito discedens ut levis umbra fugit.
1 ascensio] agens ms. Cerastarum] Cerastararum ms. leones] lioneus ms. papaver] paver ms. | 2 et Euridiceom. Ghisalberti | 3 De ratione mutationis]de mutationeGhisalberti contentorum ex contentorium ms. taurus crudelis, bos meretricis amor. De MirraGhisalberti] sic ms. | 4 avarus] amarus Ghisalberti | 5 luxuriet] luxuries Ghisalberti utrique] uterque Ghisalberti Nobilitas Ghisalberti] stoliditas ms. pectora Ghisalberti] pectore ms.
623Début du dixième livre
|f. 130v|
[1] Ici commence le dixième livre de cet ouvrage, au début duquel sont racontées les noces d’Orphée et Eurydice, la mort d’Eurydice, la descente d’Orphée aux Enfers, sa demande de reprendre son épouse, sa perte de celle-ci à cause de son regard vers l’arrière, la montée d’Orphée sur le mont Rhodope, l’énumération des arbres qui le suivirent à cause de son chant, la métamorphose de Cyparissus en cyprès, le chant d’Orphée jusqu’à la fin du livre. Dans ce chant sont racontés l’enlèvement de Ganymède, la métamorphose de Hyacinthe en fleur, des Cérastes en taureaux et en vaches, les Propétides en pierres et en femmes publiques, la statue de Pygmalion en femme, l’amour interdit de Myrrha, sa métamorphose en arbre d’où naquit Adonis, qu’aima Vénus. Sont contenues aussi la métamorphose d’Hippomène et Atalante en lions à cause de leur débauche, celle des compagnes de Perséphone en esprits odorants, la mort d’Adonis, sa métamorphose en une fleur du nom de pavot, et c’est sur cela que se terminera ce livre.
[2] Les Integumenta de ce livre sont les suivants. D’abord De Orpheo et Euridice (« Orphée et Eurydice »). Le pré signifie les délices, l’épouse la chair, la vipère le poison, l’homme la raison, le Styx est la terre, la lyre la parole. [3]De ratione mutationis Ciparisi et aliorum quorundam (« La raison de la métamorphose de Cyparissus et de certains autres ») mentionnés dans ce livre et dans le chant. La métamorphose chez Ovide se fait par la conformité du nom, par la ressemblance du statut, par l’égalité des propriétés. Ainsi Hyacinthe est pour toi une fleur et Cyparissus un arbre, l’homme cruel un taureau, l’amour d’une courtisane une vache. [4]De Mirra (« Myrrha »). Admire ce fait inouï, Myrrha par amour est changée en myrrhe, que donne un amour avare. [5]De Ypomene et Athalanta (« Hippomène et Atalante ») est expliqué ainsi. Les trois pommes d’or sont les parties génitales, comme le lion ardent est plein de fougue, l’un et l’autre sont, dit-on, un lion. La noblesse, la beauté, la sagesse sont les trois pommes d’or qui attirent les cœurs par leurs triples mérites. [6]De Adoni (« Adonis »). La fleur éphémère est, dit-on, l’âge de la jeunesse, qui s’éloigne vite et fuit comme une ombre légère.
624[7] Orpheus in decimo capit Euridicem ; colubrino dente perit, rapitur ad loca tartarea. Orpheus descendit, huic redditur. Hanc retro perdit, in Rodopem montem concitat ille liram, sectantur pecudes cantus et robora multa, in cantu cuius plurima versa canit. Cupressus pro cantu ciparissus habetur, Troianus capitur, flos fit pro morte Iacintus. Ceraste tauri, lapides grex Propetidarum, Pigmalion statuam suscipit, inde suam. Patrem Mirra cupit, fit et arbor, natus Adonis est ex mutata, quem cupit ipsa Venus, occidit et fit flos. Sunt Ypomenes Athalanta, pro male concubitus, Palladis arte lei.
X 1-2
Partem istam continuabitis predicte sic dicentes : ‘Ita mutatus fuit Yphis de femina in virum, et, com Hysmeneus venisset ad nuptias Yphidis et Hyantes et ille celebrate essent, Inde, idest postea, Hismeneus, velatus amictu croceo, disgreditur per aera immensum et tendit ad orasCiconum’.
1-2*
1 Inde : postea ; immensum : altum ; croceo : purpureo ; velatus : tectus ; amictu : veste. 2 disgreditur : discedit ; Ciconum : populorum illorum ; Hymeneus : cantus nupciarum ; oras : regiones.
X 3-4
Principium nupciarum Orphei
3-7*
3 tendit : vadit ; Orphea : Orphei ; necquicquam : invanum. 4 Affuit : venit ; ille : Hismeus ; quidem : certe ; nec : non ; solempnia verba : leta attulit. 5 letos vultus : attulit ; attulit : apportavit. 6 fax : tirsus ; quoque : certe ; tenuit : Hysmeus ; lacrimoso : tristi ; stridula : crepitanti, quia ex aspersione alicuius humoris stridet ignis. 7 usque : assiduo ; -que : et ; motibus : revolutionibus.
X 8
Exitus, quia finis fuit peior principio, quia, com gaudio primo coniuncti, in fine disgressi fuerunt com nimio dolore.
625[7] Dans le dixième livre Orphée épouse Eurydice ; elle meurt piquée par un serpent, est enlevée dans le Tartare. Orphée y descend, elle lui est rendue. Il la perd en se retournant, joue de la lyre sur le mont Rhodope, les bêtes et de nombreux arbres suivent ses chants, dans lesquels il conte de nombreuses métamorphoses. Le cyprès dans son chant est nommé Cyparissus, est pris pour un Troyen, Hyacinthe après sa mort devient une fleur. Les Cérastes deviennent des taureaux, la troupe des Propétides est pétrifiée, Pygmalion donne naissance à une statue, qui devient sa femme. Myrrha désire son père, et devient un arbre, Adonis naît de Myrrha après sa métamorphose, Vénus en personne l’aime, il meurt et devient une fleur. Hippomène et Atalante, à cause de la souillure de leur union, sont des lions par l’art de Pallas.
X 1-2
Vous continuerez la partie des récits mentionnés précédemment, en disant ceci : « Ainsi Iphis fut changée de femme en homme et, comme Hyménée avait assisté aux noces d’Iphis et Ianthé et qu’elles avaient été célébrées », Inde (« de là »), c’est-à-dire ensuite, Hyménée, velatus amictu croceo, disgreditur per aera immensum et tendit ad oras Ciconum (« couvert de son manteau couleur de safran, s’éloigne à travers l’immensité des airs et se dirige vers la contrée des Ciconiens »).
X 3-4
Début du récit des noces d ’ Orphée
6 stridula (« sifflante ») : crépitante, parce que l’aspersion de quelque liquide fait siffler le feu.
X 8
Exitus (« L’issue »), parce que la fin fut pire que le commencement : en effet, unis d’abord dans la joie, ils furent séparés finalement dans la plus grande douleur.
6268-9*
8 Exitus : suus ; auspicio : omine ; gravior : tristior ; nam : quia. 9 dum : quando ; nova : Erudice ; comitata : consequta.
X 10
Mors Euridices
10-12*
10 occidit : mortua fuit ; dente recepto : et hoc dico. 11 Quam : Euridicem ; Rodopeius : Orpheus. 12 ne : ut ; umbras : infernales.
X 13
Descensus Orphei ad Inferos
[1] Magna fuit audacia quod Orpheus descendit ad Inferna amore coniugis sue, ut temptaret si ipsam posset reducere. [2]Tenaria : Tenaris est vallis per quam fit descensus apud Inferos, et interpretatur vicium, unde Tenaris : tenens ritum, eo quod ritu sunt homines viciosi.
13-17*
13 Stiga : inferna ; Tenaria : a Tenare valle. 14 -queleves : et parvos ; -quefuncta : et usa. 15 Persephonen : Proserpinam ; adiit : petit ; inamena : non delectabilia. 16 dominum : Plutonem ; pulsis[…]nervis : et hoc dico ; nervis : cordis. 17 ait : Orpheus ; numina : dei.
X 17
[1] Fabula talis est : com Orpheus Erudicem desponsasset, quadam die illa ibat per ortum suum, nuda pedes, et quidam coluber hanc momordit, unde non potuit sanari et mortua est. [2] Orpheus, sciens apud Inferos, huc descendit, et mediante cantu suo illam rehabere impetravit tali condicione, quod retro non aspiceret nisi prius exisset valles, et, com fere esset foris, cupidus videndi illam, retro aspexit et iterum perdidit. [3] Tunc, ascendens in montem, ibi optime viellavit et sequte sunt eum fere et arbores, et, com ibi cantaret, ad ultimum posuit mulieres in dedecus, ut per cantum suum de fabulis continetur.
12* ne]necms. | 13.1 si ipsam] se ipsam ms. | 13.2 descensus] decenssus ms. | 17.2 sciens] siens ms. aspiceret] aspicit et ms.
627X 10
Mort d ’ Eurydice
X 13
Descente d ’ Orphée aux Enfers
[1] Orphée fut très audacieux de descendre aux Enfers par amour pour son épouse, pour tenter de la ramener. [2]Tenaria (« du Ténare ») : Ténare est une vallée par laquelle on descend aux Enfers ; on l’interprète comme le vice, d’où Ténare : « observant la coutume », parce que les hommes sont vicieux par habitude.
X 17
[1] La fable est la suivante : comme Orphée avait épousé Eurydice, celle-ci marchait un jour pieds nus dans son jardin et un serpent la mordit ; elle ne put être soignée et mourut. [2] Orphée, la sachant aux Enfers, y descendit et, grâce à son chant, obtint de ramener son épouse, à condition de ne pas regarder en arrière avant d’être d’abord ressorti dans la vallée ; alors qu’il était presque à l’extérieur, impatient de la voir, il regarda derrière lui et la perdit à nouveau. [3] Alors, montant sur une colline, il se mit à jouer là de la vielle de si belle manière que les bêtes sauvages et les arbres le suivirent ; comme il chantait là, il finit par mépriser les femmes, comme cela est contenu dans ses récits chantés des fables.
628[4] Congregate sunt tunc mulieres Meniades, et illum occiderunt et membra illius dissipaverunt. [5] Usque ad finem libri protenditur cantus suus de fabulis quas cantavit ; tractabimus sigillatim.
X 18
Cantus Orphei apud Inferos
[ 1] Decidimus : nos decidimus, quicquid, idest in quantum, creamurmortale. [2] Nam quantum mortales sumus, decidimus, idest tendimus ad terram, vel, quando mortalia facimus, in Infernum decidimus.
18-21*
18 quem : mundum ; quicquid : in quantum ; creamur : nos. 19 si licet : licitum est ; ambagibus : nugis ; oris : loqutionis, quasi dicat : ‘Si permittatis me verum dicere, non descendi’. 20 loqui : me ; Sinitis : de(sinitis) ; hic : in inferno ; opaca : obscura. 21 Tartara : inferna ; uti : ut ; villosa : turpia.
X 22-26
[ 1] Medusei dicit, quia Cerberus est capillatus serpentibus ad modum Medusei capitis, de quo superius habetur in quinto (V 180-249). [2] Causa vie : respondet ad hoc quod sibi posset obici : ‘Quid queris ?’. [3] Responsio : ‘Causa vie mee est coniunx ;posse pati volui mortem eius et ut a me sepeliretur, sed non potui, quia amor me fecit impatientem’. [4] Temptasse, quasi dicat : ‘Multociens temptavi, ut separationem eius possem substinere’. [5] Hic deus, quasi dicat : ‘Amor, idest Cupido, regnat apud nos, qui cogit me ad hoc’.
22-27*
22 torva : crudelia ; vincirem : ligarem. 23 vie : mee ; coniunx : mea sponsa ; quam : coniugem ; calcata : suppeditata. 24 vipera : serpens ; crescentes : iuvenes ; abstulit : removit. 25 pati : talia ; nec : et non ; negabo :‘ut paterer vel mortis causam vincerem’. 26 Amor : deus amoris ; deus : Cupido ; notus : cognitus ; ora : regione. 27 an : utrum ; hic : deus amoris in Inferno ; auguror : vaticinor.
18 Decidimus]decimusms. decidimus] decimus ms. mortaleexin morte mortalems. | 18* quantum] quantu ms. | 19* permittatis] permutatis ms. | 22-26.3 impatientem] in patientem ms. | 22* vincirem]vinceremms. | 27* vaticinor] vaticona ms.
629[4] Alors les femmes de Méonie se rassemblèrent, le tuèrent et dispersèrent ses membres. [5] Jusqu’à la fin du livre se poursuit le récit des fables qu’il chanta ; nous les traiterons l’une après l’autre.
X 18
Chant d ’ Orphée aux Enfers
[ 1]Decidimus (« nous tombons ») : nous tombons, Quicquid (« quoi que (nous soyons) ») c’est-à-dire autant que (nous sommes), creamur mortale (« nous (qui) sommes des créatures mortelles »). [2] En effet, dans la mesure où nous sommes mortels, nous tombons, c’est-à-dire nous tendons vers la terre ou, quand nous commettons des péchés mortels, nous tombons en enfer.
19 oris (« d’une bouche ») : d’un discours, en d’autres termes : « Si vous me permettez de dire la vérité, je ne suis pas descendu… ».
X 22-26
[1] Il dit Medusei (« de Méduse ») parce que Cerbère est coiffé de serpents comme l’est la tête de Méduse, dont il est question plus haut au cinquième livre. [2]Causa vie (« La raison de mon voyage ») : il répond à l’objection qu’on pourrait lui faire : « Que cherches-tu ? ». [3] Réponse : « Causa vie mee est conjunx (« La raison de mon voyage est mon épouse ») ; posse pati volui (« j’ai voulu pouvoir supporter ») sa mort et souffrir de l’ensevelir, mais je n’ai pas pu, parce que l’amour m’a rendu impatient. » [4]temptasse (« avoir tenté »), autrement dit : « J’ai tenté bien des fois de pouvoir supporter d’être séparé d’elle » [5]Hic deus (« ce dieu »), en d’autres termes : « Amour, c’est-à-dire Cupidon, règne sur nous, lui qui m’a forcé à cela. »
25 negabo (« je (ne) nierai (pas) ») : « que je supporterais ou surpasserais la cause de sa mort ».
630X 28
Famaque : respicit ad illud quod superius tangitur de raptu Proserpine a Plutone.
28-29*
28 -que : quia ; rapine : quando Pluto et Proserpina coniuncti fuerunt. 29 quoque : similiter ; -que : et ; loca : infernalia.
X 30-31
[ 1] Per Chaos oro, per ingens Chaos, idest per hanc confusionem, quia apud Inferos omnia sunt confusa, quia ibi ullus ordo sed sempiternus horror inhabitans. [2] Oro per silentia, idest per nullum instrumentum corporeum loquendi. Vasti regni, quia totus orbis non sufficit ne sentiat turbam adesse. [3]Retexite, vel ‘retexere’ : hoc dicit propter tres sorores que fabulose dicuntur texere vitam mundanam, scilicet Cloto, que producit de non esse ad esse, Lachesis conservat esse in esse, Atropos mutat esse in non esse, unde versus : « Per trinas metas fatorum ducitur etas. / Principium vite moderatur Cloto perite ; / ad Lachesim res se vertunt quas ducit ad esse. / Atropos immitis ad opus trahit omnia Ditis ».
30* Chaos : confusionem ; ingens : magnam ; vastique : magni ; regni : Inferni.
X 31
Ecce petitio Orphei apud Inferos, ut Eridices regressum ab Inferis impetraret.
31-40*
31 Euridices : mulieris mee ; properata :‘Quia nimium cito est ut illam tam iuvenem habeatis’, vel littera est ; retexite fata : retexere in mondo. 32 Omnia : mundana ; paulumque : aliquantulum ; morati : detenti. 33 serius : tarde ; an cicius : vel ‘cito’ ; ymam : profundam. 34 tendimus : naturaliter inclinamur. 35 generis : nostri ; longissima : respicit ad hoc quod non habet finem ; regna : Tartara. 36 quoque : certe ; iustos : senes ; peregerit : vivendo preterierit. 37 iuris : iurisdictionis ; usum : tempus utendi. 38 Quod : sed ; negant veniam : quod non habeam ; certum : certa res est.
30-31.2 sentiat] sentit ms. | 30-31.3 tres] quattuor ms. conservat esse ex conservat esse esse ms. immitis] in meritis ms. opus] se ms. Ditis] dicis ms. 31* mee] me ms.
631X 28
Famaque (« Et le récit ») : il revient à ce qui est traité plus haut à propos du rapt de Proserpine par Pluton.
28 Rapine (« du rapt ») : quand Pluton et Proserpine furent unis.
X 30-31
[1]Per Chaos oro, per ingens Chaos (« Par le Chaos, par l’immense Chaos »), c’est-à-dire par cette confusion, parce que dans les Enfers tout est confus, parce qu’il n’y a là aucun ordre, seule l’horreur éternelle y réside. [2]Oro per silentia (« Je prie par les choses silentieuses »), c’est-à-dire par l’absence de tout moyen physique de parler. Vasti regni (« de ce vaste royaume ») parce que le monde entier ne suffit pas à l’empêcher de sentir la foule qui habite là. [3]Retexite vel retexere (« détissez ou découvrez ») : il dit cela à cause des trois sœurs qui, d’après les fables, tissent la vie des hommes sur terre : Cloto, qui fait être ce qui n’est pas, Lachésis, qui préserve l’être en vie, Atropos, qui change l’être en non être, d’où ces vers : « L’âge avance à travers les trois bornes des destins. / Cloto dirige habilement le début de la vie ; les choses se tournent vers Lachésis qui les conduit à exister ; / la cruelle Atropos tire tout au profit de Dis ».
X 31
Voici la demande d’Orphée aux Enfers : obtenir qu’Eurydice revienne des Enfers.
31 properata (« hâtifs ») : « Parce qu’il est trop tôt pour que vous l’ayez, alors qu’elle est si jeune. » ou c’est le sens littéral. 35 longissima (« très longs ») : il fait référence à ce qui n’a pas de fin.
63239 nolle : non velle ; redire : in patriam ; leto : morte ; gaudere :‘o infernales’ ; duorum : mei et coniugis mee. 40 Talia : supradicta ; dicentem : propter, Orphea ; nervos : cordas ; verba : sua ; moventem : canendo.
|f. 131r|
X 41
[1] Dum ita loqueretur Orpheus cantando, omnes anime infernales inceperunt flere. [2]Exangues dicit, quia spiritus carnem et ossa non habet sicut mondus. [3]Nec Tantalus : pene cessaverunt omnia tormenta Inferni Orpheo cantante. [4] Tantalus fuit quidam qui deos invitavit et carnes humanas illis apposuit, unde talem penam patitur, quod est in undis claris usque ad labia nec bibere potest, et sitis valde, et habet pomum ad labia superiora nec potest comedere, et esurit valde, unde quidam Tantalus in Stigiis nec aqua fruitur neque pomo ; sic et in diviciis aret avarus homo.
41* exangues : sine sanguine ; flebant : plorabant ; nec : et non ; Tantalus : proprium ; undam : aquam.
X 42
Stupuitque Ysionis : Ysion fuit quidam qui interpellavit deas de stupro ; in Inferno talem penam patitur, quod affigitur in rota que semper ‹rotat›, unde quidam : « Quisquis mercatur vel vendit vel licitatur / nota vel innota volvitur illa rota ».
42* captavit : cupivit ; refluam : vel ‘refugam’ ; stupuit : stetit ; Ysyonis : proprium ; orbis : rota.
X 43
Nec volucres : Ticius fuit quidam qui com Latona voluit concombere violenter, unde talem patitur penam, quod membratim laceratur et aves eum comedunt vultures, et iterum reficitur, et sic semper in morte vivit, unde versus : « Nascitur ut pereat Ticius, sed finis egenus. / Sic redit et remeat insaciata Venus ».
41.4 pomo] pomum ms. | 41* plorabant] plorabam ms. Tantalus]cantalusms. | 42 de stupro] de stupro # ms. semper ‹rotat›] semper # ms. | 42* refluam]reflus (?) ms. | 43 Nascitur […] Venus] versus add. m.s. eadem manus redit] finis ms.
633|f. 131r|
X 41
[1] Tandis qu’Orphée prononçait ce discours en chantant, toutes les âmes infernales commencèrent à pleurer. [2] Il dit exangues (« exsangues ») parce que les esprits n’ont pas comme (les êtres de) ce monde de la chair et des os. [3]Nec Tantalus (« Et Tantale ne… ») : presque tous les tourments de l’Enfer cessèrent pendant qu’Orphée chantait. [4] Tantale était un homme qui invita les dieux à manger et leur offrit de la chair humaine, c’est pourquoi il souffre ce châtiment, de ne pas pouvoir boire les eaux claires qui arrivent jusqu’à ses lèvres alors qu’il a grand soif, et d’avoir des fruits au-dessus de ses lèvres sans pouvoir les manger, alors qu’il a grand faim, d’où un certain Tantale qui, de l’autre côté du Styx, ne profite ni de l’eau ni des fruits ; ainsi l’homme avare brûle (de faim et de soif) au milieu de ses richesses.
X 42
Stupuit Ysionis (« (la roue) d’Ixion se figea ») : Ixion était un homme qui invita les déesses à la débauche : il souffre en Enfer ce châtiment, d’être attaché sur une roue qui tourne continûment, d’où les vers : « Quiconque achète, vend, ou surenchérit, est tourné sur cette roue en connaissance de cause ou sans le savoir ».
X 43
Nec volucres (« Et les oiseaux ne… ») : Ticius était un homme qui voulut violer Léto, c’est pourquoi il souffre ce châtiment, d’être déchiré membre par membre, et les vautours le dévorent, puis il est reconstitué, et ainsi est toujours vivant en étant mort, d’où les vers : « Ticius naît pour périr, mais est privé de fin. / Ainsi Vénus revient et revient encore sans obtenir satisfaction. »
634[ 1] Urnisque vacarunt : Iste Belides fuerunt filie Danay, nepotes Beli, et maritos suos interfecerunt et cognatos et patrueles, preter Permnestram, que pepercit Licio. [2] Ideo talem penam patiuntur, quod volunt apud Inferos implere aqua dolium sine fondo : « Belides in mondo vas implentes sine fondo / significant hominem lucro non ponere finem ».
43* volucres : aves ; gecur : Ticii ; urnisque : vasis ; vacarunt : caruerunt.
X 44-53
[ 1] Sysiphus fuit quidam latro qui pretereuntes faciebat curvare et pedes suos basiare, et sic eos interficiebat, unde talem penam patitur apud Inferos, quod lapidem maximum portat in summitate montis, et inde sinit eam labi et iterum retro portat illam nec cessat, unde quidam : « Sysiphus it pronus lapidemque ferendo gravatur. / Ambit honoris honus cupidus, sic precipitatur ». [2] Carpitur : actor facit topocraphiam, quia describit locum per quem Orpheus rediit ab Inferno com uxore.
44-53*
44 Belides : mulieres ; -que : et ; Sysiphe :‘o’. 45 lacrimis : fletibus ; victarum : pietate ; carmine : dulci cantu ; est : dicit. 46 Eumenidum : Furiarum infernalium ; regia coniunx : Proserpina, sponsa regis Inferni. 47 sustinet : potest vel vult negare ; oranti : Orpheo ; qui regit : nec Pluto ; ymanegare : quod petit yma profunda. 48 Euridicemque : proprium sed ; illa : Euridice ; recentes : noviter regressas. 49 incessit : advenit ; vulnere : plaga serpentis. 50 Hanc : Euridicem ; simul : pariter ; legem : pactum ; Rodopeius : a Rodope monte ; accipit : in quo viellavit. 51 ne : ecce lex et pactum ; donec : quoadusque ; Avernas : infernales. 52 exierit : vel ‘ruit’ ; aut irrita : vel ‘sciat’. 53 Carpitur : carpendo preteritur ; aclivis : tortilis ; trames : limes.
X 54-59
Regressus Orphei ab Inferis com coniuge
54 caligine dempsus : niger ; opaca : obscura. 55 Nec : non ; procul : longe ; affuerant : deffecerant ; margine : cacumine. 56 hic : Orpheus ;
43.1 Licio ex Liceo ms. | 43.2 implere] imple ms. hominem ex homines ms.| 43.2 Belides […] finem] versus add. m.d. eadem manus | 44-53.1 sinit] sunt (?) ms. | 44* mulieres] muliere ms. | 48* recentesexrecentemms. | 51* quoadusque] qua adusque ms.
635[1]Urnisque vacarunt (« furent libérées de leurs urnes ») : ces Bélides étaient les filles de Danaös et les petites filles de Bélos ; elles tuèrent leurs maris, leurs parents et cousins germains, excepté Hypermestre, qui épargna Licius. [2] C’est pourquoi elles souffrent ce châtiment aux Enfers, de tenter de remplir d’eau un tonneau sans fond : « Les Bélides qui remplissent dans le monde un récipient sans fond / signifient l’homme qui ne met pas de limite à son amour du gain. »
X 44-53
[1]Sysiphus (« Sysiphe ») était un brigand qui obligeait les passants à se courber pour embrasser ses pieds, puis il les tuait : aussi souffre-t-il dans les Enfers de ce châtiment, de porter une énorme pierre au sommet d’une montagne, et ensuite de la laisser tomber et de recommencer à la porter en sens inverse, et ce sans fin, d’où quelqu’un a écrit : « Sysiphe avance courbé, ployant sous le poids de la pierre. / Le cupide brigue le poids des honneurs, c’est ainsi qu’il tombe. » [2]Carpitur (« est parcouru ») : l’auteur dresse ici une topographie, puisqu’il décrit le lieu que parcourt Orphée revenant des Enfers avec son épouse.
X 53-59
Orphée revient des Enfers avec son épouse
636defficeret : Euridices ; metuens : timens ; avidus : cupidus. 57 flexit : retro ; oculos : suos ; protinus : tancito ; illa : Euridice ; relapsa est : in Inferno. 58 -que : et ; prendi : ab Orpheo ; prendere : illum. 59 labentes : mobiles ; infelix : illa ; arripit : capit.
X 60-62
[1] Moralitas talis est : Orpheus, idest quidam sapientissimus et musicus vel predicator, unde dictus est quasi ‘oris phonos’, idest ore sonans, qui pro sapientia sua dictus est filius Appolinis, idest sapientie, et pro musica et sonoritate filius Calliopes, que dicta est Calliope, idest Calophone, idest bona sonoritas. [2] Iste Euridicem duxit, que interpretatur profunda diiudicatio ; sapiens profunde diiudicationi adheret et de rebus subtilissime diudicat. [3] Uxor vero, idest diiudicatio, a serpente venenata, idest fallatia huius seculi decepta, quia bona huius seculi sunt falsa et transitoria et caduca, ad Inferos descendit, idest ad vicia declinat ; quam maritus sequitur ad Inferos, com ad vicia non tantum cogitatione sed etiam opere divertit. [4] Sed ibi cantando, idest inter vicia de virtutibus disputando, supra uxorem suam, idest diiudicationem, protraxit, sed iterum ad vicia relaxatam amisit, quam, com vellet iterum secom abstrahere, opera viciosa prohibendo, a ianitore infernali arcetur, considerato non quod infelicissimus esset ad vicia introitus, sed in montem ascendens, idest ad virtutes, ad quas est ascensus, sicut ad vicia descensus cantu suo, idest predicatione sua, feras, idest errantes homines abstraxit. [5] Bruta animalia, idest errantes corrigens, arbores virtuosos confirmans, mulieres villipendit, idest amorem vanum. [6] Mulieres eum occiderunt : luxuriosi et incontinentes, predicationem suam villipendentes, dicta sua ad errorem et vanitatem converterunt. [7] Caput a serpente captus fuit, quia sapientes dicta sua intellexerunt, et de tanta sapientia stupuerunt. Hoc est de Orpheo completum.
60-62*
60 moriens : in Inferno ; coniuge : Orpheo ; quicquam : aliquid. 61 suo : sponso ; quid : dicit actor ; amatam : certe nichil. 62 supremum : ultimum ; vale : salutem ; ille : Orpheus.
637X 60-62
[1] La moralité est la suivante : Orphée, c’est-à-dire un homme très sage, musicien ou prédicateur – d’où son nom qui est l’équivalent de « oris phonos » (« sons de la bouche »), c’est-à-dire émettant des sons avec sa bouche –, qui est appelé pour sa sagesse fils d’Apollon, c’est-à-dire de la sagesse, et pour la musicalité et les sonorités fils de Calliope, elle-même appelée Calliope, c’est-à-dire Calophone (« beau son »), c’est-à-dire belle sonorité, [2] ramena Eurydice, qu’on interprète en profondeur comme « dijudicatio » (« jugement qui tranche ») ; le sage est attaché au jugement qui tranche en profondeur et rend sur les choses de très subtils jugements. [3] Mais sa femme, c’est-à-dire le jugement qui tranche, empoisonnée par un serpent, c’est-à-dire trompée par la fausseté de ce monde, parce que les biens de ce monde sont faux, passagers et caducs, descend aux Enfers, c’est-à-dire tombe dans le vice ; son mari la suit aux Enfers, c’est-à-dire se détourne vers le vice non seulement en pensée mais aussi en action. [4] Mais là, par son chant, c’est-à-dire en disputant des vertus au milieu des vices, il tire sa femme, c’est-à-dire le jugement qui tranche, vers le haut, mais il la perd à nouveau parce qu’elle s’abandonne encore au vice : alors qu’il voudrait l’entraîner avec lui une nouvelle fois, en l’empêchant de commettre des actes vicieux, elle est retenue par le portier des Enfers ; sans prendre en considération que l’entrée vers les vices était un très grand malheur, mais montant sur une montagne, c’est-à-dire vers les vertus, vers lesquelles l’accès est une montée, comme celui vers les vices est une descente, il attira par son chant, c’est-à-dire par sa prédication, les bêtes sauvages, c’est-à-dire les hommes égarés. [5] Corrigeant les bêtes brutes, c’est-à-dire les hommes égarés, encourageant les arbres – les vertueux –, il méprisa les femmes, c’est-à-dire l’amour vain. [6] Les femmes le tuèrent : ceux qui étaient pleins de luxure et sans mesure, méprisant sa prédication, détournèrent ses paroles et les vidèrent de leur sens véritable. [7] Sa tête fut emportée par un serpent, parce que les sages comprirent ses paroles, et furent stupéfaits de tant de sagesse. C’est la leçon complète sur l’histoire d’Orphée.
638X 63
Secunda mors Euridices
63* revocata : iterum posita ; eodem : loco Inferni.
X 64
Non aliter : actor facit comparationem de Orpheo stupente pro morte coniugis sue ad rusticum non nominatum dicens quod, quemadmodum armiger Herculis, rusticus non nominatus, stupuit, viso Cerbero, quem Hercules ab Inferno abstraxit, qui ita stupuit quod in lapidem mutatus fuit, sic Orpheus, et potest esse Lichas vel Butides.
64* gemina : duplici ; nece : morte ; coniugis : sponse ; Orpheus : proprium.
X 65-66
[ 1] De Cerbero : Hercules fuit quidam sapiens qui Cerberum abstraxit, idest qui terram triplices partes habere docuit, et de natura naturarum tractavit. [2] Unde fuit quidam philosophus qui substantiam eius admirans, stupuit, et, ut dicont, e scopulo desperans se precipitavit, et sic fingitur mutari in lapidem.
65-67*
65 tria : ille stupuit ; medio portante : collo ; cathenas : adamanteas. 66 canis : Cerberi ; quem : rusticom non nominatum ; pavor : timor. 67 quam natura : quia mutatus fuit in lapidem, et hoc dico.
X 68
[ 1] Quique in se : et Orpheus non aliter stupuit quam Elenos, qui traxit in se crimen uxoris sue, affirmando nullam esse de pulcritudine sua. [2] Nam ipse Elenos, videns Leteam uxorem suam mutari a Iunone ideo quod eius consilio se pulcritudine Iunoni preposuerat, ille mutatus fuit in lapidem, et illa Lethea in paludem vel lapidem.
68* quique : et ita stupuit Orpheus, sicut Olenos qui accepit crimen uxoris sue super se.
64 Herculis ex Hercuclis ms. | 65-66.2 substantiam] substitem (?) ms. | 68* sicut] sicut sicut ms.
639X 63
Eurydice meurt pour la seconde fois
X 64
Non aliter (« pas autrement ») : l’auteur compare Orphée frappé de stupeur par la mort de son épouse à un paysan qu’il ne nomme pas en disant que, comme l’écuyer d’Hercule, un paysan qui n’est pas nommé, fut frappé de stupeur à la vue de Cerbère, qu’Hercule avait traîné hors des Enfers, et fut tellement frappé de stupeur qu’il se pétrifia, de même Orphée, et peut-être Lichas ou Butidès.
X 65-66
[1]De Cerbero (« sur Cerbère ») : Hercule était un sage qui arracha Cerbère (aux Enfers), c’est-à-dire qui enseigna que la terre comprenait trois parties, et traita de la nature des natures. [2] C’est pourquoi il y eut un philosophe qui, admirant le contenu de son enseignement, en fut stupéfait et, dit-on, désespéré au point de se jeter du haut d’un rocher, c’est pourquoi l’on imagina qu’il s’était pétrifié.
67 quam natura (« que sa nature ») : parce qu’il fut pétrifié, c’est ce que je comprends.
X 68
[1]Quique in se (« et qui sur lui ») : Orphée ne fut pas moins stupéfait qu’Olénos, qui attira sur lui la faute de sa femme, en affirmant qu’il n’y avait aucune femme de sa beauté. [2] En effet, quant cet Olénos vit sa femme Léthéa changée par Junon parce que sur son conseil elle s’était vantée d’être plus belle que Junon, il fut changé en pierre, et Léthéa en marais ou en pierre.
68 quique (« et celui qui ») : Orphée fut aussi stupéfait qu’Olénos qui prit sur lui la faute de son épouse.
640X 69
Tuque, o confisa. Construe sic : non aliter stupuit Orpheus : ‘O Lethea, infelix, confisa tue figure, qua − supple − tu stupuisti quando mutata fuisti com marito in lapidem’.
X 69-70
Olenos et Lethea, quia deos despiciebant, idest divinam sapientiam villipendebant, et ad ultimum mutati sunt in lapides, quia induratum fuit cor eorum inter vicia, et, in desperatione cadentes, se in scopulis affixerunt, idest in durum sensum et perversum.
69-77*
69 Olenos : proprium ; nocens : pro coniuge ; confisa : fuisti. 71 lapides : existentes ; quos : lapides ; Yde : silva. 72 Orantem : Orpheum ; transire : in Infernum. 73 portitor : Cerberus ; arguerat : vetuit ; ille : Orpheus. 74 scallidus : obscurus ; rippa : Inferni ; Cereris : esce ; sedit : quid comedit ? Responsio. 75 cura : sua ; animi : mentis ; alimenta : nutrimenta. 76 Herebi : Inferni ; altam : summam. 77 Rodopem : montem ; -que : et ; aquilonibus : ventis ; Hemum : montem.
X 78-80
Facit actor cronographiam, idest temporis descriptionem, dicens quod sol erat in Piscibus, in illo scilicet signo, quasi dicat : ‘Iam tres anni erant elapsi, quod Orpheus uxorem suam amiserat et quod descendit ad Inferos et regressus fuit’.
78-80*
78 equoreis : marinis ; Piscibus : signis talibus. 79 Titan : sol ; -que : et ; refugerat : victaverat ; Orpheus : proprium. 80 femineam : mulierum ; seu quod : vel ‘ideo’ ; cesserat : acciderat ; illi : Orpheo.
X 81
[1] Allegoria sensusque spiritualis talis est : Orpheus, oris phonos, idest Christus, a cuius ore omnia bona procedunt, filius sapientie, quia Pater est sapientia Filii, accepit Euridicem, idest bonam radicem, quo ad nos consideravit fragilitatem carnis nostre apud Inferos descendentem,
641X 69
Tuque, o confisa (« Et toi, qui te fiais… »). Construire ainsi : Orphée ne fut pas moins stupéfait, O Lethea, infelix, confisa tue figure (« (que) toi, Léthéa, malheureuse qui te fiais à ta beauté »), par laquelle (suppléer) tu fus stupéfaite quand tu fus comme ton mari changée en pierre.
X 69-70
Olenos et Lethea (« Olénos et Léthéa »), parce qu’ils méprisaient les dieux, c’est-à-dire la sagesse divine, furent finalement changés en pierre, parce que leur cœur s’endurcit dans les vices, et que, tombant dans le désespoir, ils se figèrent en rochers, c’est-à-dire dans des sentiments cruels et pervers.
X 78-80
L’auteur établit ici une chronologie, c’est-à-dire une description du temps, en disant que le soleil était dans le Poisson, c’est-à-dire dans ce signe du zodiaque, pour ainsi dire : « Trois années s’étaient déjà écoulées depuis qu’Orphée avait perdu sa femme, était descendu aux Enfers et en était revenu. »
X 81
[1] L’allégorie et le sens spirituel sont les suivants : Orphée, le son de la bouche, c’est-à-dire le Christ, de la bouche duquel procèdent tous les biens, fils de la sagesse, parce que le Père est la sagesse du Fils, épousa Eurydice, c’est-à-dire la bonne souche, par laquelle il considéra la fragilité de notre chair, et descendit pour nous aux Enfers :
642unde serpentis morsu, idest consilio, descendit apud inferos. [2] Christus vero sequtus est eam : primo carnem humanam |f. 131v| sumendo, et citharizando, predicando populis baptismum et remissionem contra vicia, statuit ut Euridicem iterum haberet, quia captivam duxit, captivitatem animarum et servitutis corpora liberando conditione, quia Christus semel mortuus et resurgens ex mortuis iam non moritur, unde respiciens Deus retro, in futurum statuit quod, qui peccaret, dampnaretur, unde multi recidunt non Creatori obediendo, unde resedit in Rodopem montem, quia Christus, ascendens in altum, fere et arbores secute sunt illum, quia captivam et humanitatem secom ad supera traxit citharizando, idest predicando. [3] Mulieres, idest peccatores muliebriter viventes, illum occiderunt, quia perverse loquentur peccatores de Christo. [4] Serpens, coluber, caput eius voluit devorare, quia Iudea perverse exponit Scripturam et a Phebo, idest a sapientibus, mutantur in lapides, quia corda eorum dira et lapidea ad modum lapidis iudicantur.
81-83*
81 Sive : vel ; fidem : ideo quod ; Multas : mulieres ; ardor : volumptas. 82 iungere : per cohitum ; vati : Orpheo ; multe : mulieres ; repulse : ab illo. 83 etiam : certe ; Trachum : Tracensium ; actor : primo.
X 84
In teneros, unde quidam de talibus dixit, unde versus : « Hostes nature, deus, ictu fulminis ure / qui maris in crure germen fundunt geniture » ; « Tartara tristia luce carentia vos habitetis, qui puerilia queritis ylia que maculetis » ; « Hii pereant et eant ad Tartara non redituri / qui pueros teneros pro coniuge sunt habituri », quia a septem annis usque ad sexdecim illis abutebantur.
84-85*
84 in teneros : primus sodomita ; transferre : illo mutare ; mares : masculinos. 85 etatis : sue ; breve : principium ; carpere : rumpere ; flores : etates.
81.2 citharizando] athari(zan)do ms. animarum] animas ms. servitutis] secundum quid ms. | 81.3 loquentur] loquetur ms. | 84 Hostes […] abutebantur] versus add. m.d. eadem manus
643par la morsure du serpent, c’est-à-dire par son conseil, elle était descendue aux Enfers. [2] Mais le Christ la suivit : il revêtit d’abord la chair humaine |f. 131v] et, jouant de la cithare (prêchant au peuple le baptême et la rémission des péchés), il décida d’épouser une deuxième fois Eurydice, parce qu’il ramena celle qui était captive, en la libérant de la captivité de son âme et de la servitude de son corps, sous condition, parce que le Christ, mort une seule fois et ressuscité des morts, ne meurt plus : aussi Dieu, regardant en arrière, décida que, à l’avenir, quiconque pècherait serait damné ; c’est pourquoi beaucoup rechutent en désobéissant au Créateur, qui s’en va vivre sur le mont Rhodope parce que le Christ, montant aux cieux, est suivi par les bêtes sauvages et par les arbres, c’est-à-dire qu’il entraîne avec lui dans les cieux l’humanité captive en jouant de la cithare, c’est-à-dire en prêchant. [3] Les femmes, c’est-à-dire les pécheurs qui vivent comme des femmes, le tuèrent, parce que les pécheurs parlent du Christ de façon perverse. [4] Un serpent, une couleuvre, voulut dévorer sa tête, parce que la Judée explique l’Écriture de manière erronée, et ils furent changés en pierres par Phébus, c’est-à-dire par les sages, parce que leurs cœurs durs et semblables à des pierres furent jugés avec la dureté de la pierre.
X 84
In teneros (« sur de tendres… ») : quelqu’un parla de cela, dans les vers : « Dieu, brûle en les frappant de la foudre les ennemis de la nature / qui précipitent dans le sein de la mer la semence de leur progéniture. » « Vous aurez le triste Tartare privé de lumière, vous qui cherchez la substance des enfants pour la flétrir. » « Qu’ils périssent et gagnent le Tartare sans espoir de retour / ceux qui auront comme femmes de tendres enfants », parce qu’ils abusaient des enfants qui avaient entre sept et seize ans.
644X 86
Collis erat : describit locum in quo Orpheus cantavit quando consequte fuerunt arbores ille.
86* erat : quidam ; planissima : latissima.
X 87
Graminis herbe. Quidam sic exponunt : gramen est herba que provenit a grano, herba vero que provenit a radice, vel gramen sit speciale, herba generale, vel gramen est herba ex resecatione proveniens, et dicitur gaim gallice.
87-89*
87 area : planicies ; quam : aream ; graminis :grein gallice. 88 umbra : tunc ; loco : illo ; deerat : defficiebat ; postquam : quando. 89 genitus : Orpheus, filius deorum.
X 90
Numeratio arborum que sequte fuerunt Orphea
Chaonis : Chaonia est regio in qua Iupiter dabat responsa in quercubus ; quercus venit hic, que habundat in Chaonia.
90* loco : illo ; affuit arbor : deffecit quercus.
X 91
Nec nemus Helyadum. Helyos dicitur sol, inde Helyades filie solis, que post regnum patris in populos arbores mutate fuerunt.
91* nec : et non ; nemus : deffuit ; Helyadum : nimpharum ; frondibus : deffuit ; esculus :meslier gallice.
X 92
Molles dicit, quia arbor est mollis et vana, et de cortice fiunt corde, et dicitur tilia a telo, quia ex hac fiunt tela.
Innuba laurus dicit, propter Danem que nulli nupsit, sed mutata fuit in laurum.
92* tilie :tegl gallice ; molles : deffuerunt ; innuba : non nupta.
90 habundat] hundat ms. | 91 nemus]ventusms.
645X 86
Collis erat (« Il y avait une colline ») : il décrit le lieu dans lequel Orphée chanta quand ces arbres le suivirent.
X 87
Graminis herbe (« des pousses de gazon »). Certains donnent cette explication : le gazon est une herbe qui provient d’une graine, mais l’herbe qui provient d’une racine, soit le gazon, serait spéciale ; l’herbe générale, ou le gazon, est une herbe qui pousse après la taille ; elle est appelée gain en français.
X 90
Enumération des arbres qui suivirent Orphée
Chaonis (« de Chaonie ») : la Chaonie est une région où Jupiter donnait des réponses dans les chênes ; le chêne, qui abonde en Chaonie, suivit Orphée.
X 91
Nec nemus Helyadum (« ni le bois des Héliades »). Le soleil est appelé Hélios, d’où le nom d’Héliades pour les filles du soleil, qui furent changées en peupliers après le règne de leur père.
X 92
Il dit molles (« mous »), parce que cet arbre est mou et vide ; on fait des cordes de son écorce, et son nom de tilleul vient de telum (« lance ») parce qu’on en fait des lances.
Il dit innuba laurus (« le laurier virginal »), à cause de Daphné qui ne s’unit à aucun homme, mais fut changée en laurier.
646X 93
Corili fragiles dicit, quia ex corili radicibus fiunt ciphi, qui sunt fragiles.
93* corili :coudres ; fragiles : debiles ; fraxinus :fresne ; utilis : quia inde fuerunt ; hasta : haste.
X 94
Ylex : species est quercus, et dicitur ab alo-lis, quia antiquitus vivebant ex glandibus.
94* enodis : sine nodo ; abies :aubier ; -que : et ; ylex :cochesne.
X 95
Platanus : illa arbor affuit ; genialis, a Genio, deo nature, quia sub illa arbore solebant facere convivia et ita placare Genium, deum nature.
Acerque : impar dicit, quia diversos colores arbor illa habet.
95* platanus :platanier ; genilis : nobilis ; acer :erable ; impar : inequalis.
X 96
Annicole dicit, quia loca humida diligunt salices, et dicuntur a saliendo, quia cito crescunt et a terra.
96* amnicole : cultores aquarum ; aquatica : crescit iuxta aquam ; lothos :peechier.
X 97
Humiles dicit propter graciles ramos quos portat mirica, genest gallice.
97* perpetuo : sine fine ; buxum :bois ; humiles : flexibiles ; mirice :genet.
X 98
Bicolor dicit quia ex una parte sunt folia alba et ex altera nigra, et lignum similiter, et aliter dicitur secundum quosdam maressant.
98* bicolor : duplici coloris ; mirtus : arbor ; baccis : fructibus ; ficus :figuier.
93 Corili]corilisms. | 95 Acerque]acerquiams. | 96* aquatica]equaticams. | 98 maressant] maret sanc ms.
647X 93
Il dit corili fragiles (« les coudriers fragiles »), parce que des racines de coudrier on fait des baguettes qui sont fragiles.
X 94
Ylex (« yeuse ») : c’est une espèce de chêne, dont le nom vient de alo-lis (« nourrir »), parce qu’autrefois on se nourrissait de glands.
X 95
Platanus (« platane ») : cet arbre manquait ; genialis (« de fête »), de Génius, dieu de la nature, parce que sous cet arbre on faisait des festins pour apaiser Génius, dieu de la nature.
Acerque (« érable ») : il dit impar (« différent ») parce que cet arbre est de différentes couleurs.
X 96
Il dit annicole (« qui croissent près des rivières ») parce que les saules aiment les lieux humides ; ils tirent leur nom de saliendo (« bondissant ») parce qu’ils sortent de terre et poussent très vite.
X 97
Il dit humiles (« humbles ») à cause des branches grêles du tamaris, en français le genêt.
X 98
Il dit bicolor (« bicolore ») parce que les feuilles sont blanches d’un côté et noires de l’autre, comme le bois ; selon certains il est autrement nommé marrissant en français.
648X 99-100
Flexipedes, quia sunt tortiles in crescendo. Ulmi : antiquitus solebant ponere et levare vineas in ulmis.
99-101*
99 flexipedes : tortiles ; edere : o ; venistis : ad cantum ; una : pariter. 100 pampinee : vinearum ; vittes : foliose ; amicte : tecte. 101 ornique : alie quercus ; picei : ubi pix crescit ; rubenti : rubeo.
X 102
Arbutus : genus est arboris cuius fructus dicuntur arbuta. Palma est arbor de cuius ‹foliis› coronabantur antiquitus victores, et dicitur a palma, quia in palmis suis palmas defferebant.
102-103*
102 arbutus :arbree ; lente : flexibilis ; premia : scilicet ; palme : arbor. 103 succinta : evincta ; comas : venit ; pinus :pin.
X 104
[ 1] Athis fuit amicus Cibeles, quia amavit Sagaretidam nimpham, unde mutatus fuit in pinum arborem. [2] Nota quod Cibele est terra, et dicitur etiam cubile, quia in ipso omnes res sunt firmiter. [3] Dilexit Athim, qui interpretatur florens vel flos ; terra autem dicitur flores amare eo quod in illa nutriuntur. Iste flos aliam adamavit, quia flores in fructus renovantur et post in arbores.
104-105*
104 Matri : Cibele ; siquidem : certe ; Cibeleius : amicus Cibeles ; Athis : proprium. 105 exuit : (ex)sivit ; hominem : vultum hominis.
X 106
Cupressus est arbor que, ex quo scinditur, nonquam revirescit, sicut homo mortuus nomquam reviviscit, et dicitur quasi ‘cinere pressus’.
100* foliose] folioso ms. | 102 cuius ‹foliis›] cuius ms. victores ex nictores ms. | 103* evincta] emutilata ms. | 104.2 ipso ex ipsa ms. | 104.3 flos ex f flos ms.
649X 99-100
Flexipedes (« aux pieds flexibles »), parce qu’ils s’enroulent en poussant ; ulmi (« les ormes ») : autrefois on plaçait et faisait croître les vignes sur les ormes.
X 102
Arbutus (« arbousier ») : c’est une espèce d’arbre dont les fruits sont appelés arbouses. Palma (« le palmier ») est un arbre dont on couronnait autrefois les vainqueurs ; il tire son nom de palma (« la paume ») parce qu’ils portaient des palmes dans leurs paumes.
X 104
[1]Athis (« Attis ») était l’ami de Cybèle ; mais, parce qu’il aima la nymphe Sagaritis, il fut chanté en pin. [2] Noter que Cybèle est la terre, et qu’on l’appelle aussi cubile (« couche ») parce que toute chose est fermement contenue en elle. [3] Elle aima Attis, qui s’interprète comme « fleurissant » ou comme « fleur » ; on dit que la terre aime les fleurs parce qu’elles sont nourries en elle. Cette fleur en aima une autre, parce que les fleurs se renouvellent en devenant les fruits puis les arbres.
X 106
Cupressus (« le cyprès ») est un arbre qui, une fois fendu, ne reverdit jamais, comme un homme mort ne revit jamais : son nom est l’équivalent de « cinere pressus » (« écrasé par la cendre »).
650106-108*
106 Affuit : venit ; turbe : arborum ; cupressus : cupressus. 107 nunc arbor : existens ; dilectus : amatus ; illo : scilicet Phebo. 108 qui : deus ; nervis : cordis ; nervis : cordis ; temperat : quia Phebus est citharista et sagitator.
X 109
Namque describit causam mutationis Ciparissi, et hoc propter cervum quem occidit nescienter, ut in littera declaratur.
109* Namque : quia ; sacer : sacratus ; Crethea : Crethensia.
X 110-113
Descriptio cervi
Ecce descriptio cervi quem occidit Ciparissus.
110-113*
110 ingens : magnus. 111 ipse : cervus ; prebebat : dabat. 112 Cornua : sua. 113 tereti : rotunda ; gemmata : nobilia.
X 114
Bulla dicitur lunellula rotunda et concava que est in frontibus equorum, vel bulla est inflatio proveniens ex aqua, et est signum pluvie venture.
114-116*
114 bulla :estele ; parvis : pendebat ; loris : cathenis. 115 vincta : ligata ; nitebant : splendebant. 116 geminis : duabus ; tempora : sua ; bacce : lapides preciosi.
X 117
Naturali dicit, quia naturaliter sunt cervi pavidi et timentes.
117-119*
117 Isque : cervus ; vacuus : et hoc dico ; pavore : timore. 118 deposito : remoto ; celebrare : intrare ; mulcenda : tangenda. 119 quamlibet : post quamvis ; prebere : dare.
115* vincta]victams.
651108 temperat (« maîtrise ») : parce que Phébus est un joueur de lyre et un archer.
X 109
En effet il décrit la cause de la métamorphose de Cyparissus : ce fut à cause d’un cerf qu’il tua sans le savoir, comme le texte le raconte.
X 110-113
Description du cerf
Voici la description du cerf que tua Cyparissus.
X 114
Bulla (« une bulle ») est, dit-on, une petite lune ronde et concave qui se trouve sur le front des chevaux, ou la bulla (« bulle ») est un gonflement des eaux, c’est le signe qu’il va pleuvoir.
X 117
Il dit naturali (« naturelle »), parce que les cerfs sont par nature peureux et craintifs.
652X 120-121
Quamvis multi illum amarent, ante omnes adamabat illum Ciparissus.
120-121*
120 alios : homines ; Cee :‘o’. 121 Ciparisse :‘o’ ; proprium.
X 122-125
De Ciparisso
Ecce quomodo diligebat Ciparissus cervum.
122-125*
122 liquidi : clari. 123 modo : aliquando ; texebas : intricabas ; flores : causa nobilitationis sue. 124 nunc : aliquando ; eques : equitando ; in tergo : cervi. 125 purpureis : nobilibus ; ora : cervi ; capistris :chevestres gallice.
X 126
Describit actor tempus in quo Caparissus occidit cervum, et dicit quod erat circa horam meredionalem.
126* Estus : calor ; mediusque dies : erat ; vapore : calore.
X 127
Cancri ] Cancer est animal retrogradum quod ore lambit, com cauda pungit.
127-129*
127 concava : cavata ; lictorei : marini ; fervebant : calebant. 128 ut : postquam. 129 ducebat : sumebat.
X 130-131
Mors cervi domestici
Quando vidit Ciparissus cervum morientem, mors sibi placuit, eo quod imprudenter vulnerasset sine causa.
130-131*
130 Hunc : cervum ; puer : Ciparissus ; imprudens : hoc faciendo ; iaculo : telo. 131 fixit : percussit ; ut : postquam ; sevo : crudeli ; vulnere : plagua.
123* intricabas] intrincabas ms.
653X 120-121
Bien des gens l’aimaient, mais Cyparissus l’aimait plus que tous.
X 122-125
Cyparissus
Voici comment Cyparissus aimait le cerf.
X 126
L’auteur décrit le moment où Cyparissus tua le cerf, en disant que c’était aux alentours de midi.
X 127
Cancri (« du Crabe »)] Le Crabe est un animal qui marche à reculons parce qu’il lèche par la bouche, mais pique avec la queue.
X 130-131
Mort du cerf apprivoisé
Quand Cyparissus vit que le cerf était mort, il voulut mourir, parce qu’il l’avait imprudemment blessé sans raison.
654X 132
[ 1] Que non solacia, quasi dicat : ‘Puer ille incessanter flebat, sed consolabatur eum Phebus admonens quod do |f. 132r| leret leviterpro materia : ‘Non ita − dicens − debes flere acriter, quia cervus non est tanti precii’, et cervus erat materia quare flebat.’[2]Lugeat (135), ut omni tempore lugeat, vel ut semper fit inter lugentes.
132-135*
132 statuit : placuit ; Que non solatia : quasi dicat ‘multa solatia’ ; Phebus : dixit illi. 133 ut : quod. 134 ammonuit : sepe ; ille : Ciparissus ; munus : donum ; supremum : ultimum. 135 hoc : tale ; ut : scilicet ; lugeat : ploret.
X 136
Mutatio Ciparissi in pinum
Iamque : ostendit actor quomodo Ciparissus mutatus fuit, dicens quod tantum flevit quod humor corporis sui et totus sanguis deffecit.
136-137*
136 immensos : magnos ; egesto : iactato ; sanguine : adnichilato. 137 verti : mutari ; membra : sua ; colorem : sanguinem.
X 138
Capilli eius mutati in frondes fuerunt et celum ceperunt aspicere quia exaltati.
138-141*
138 modo : nuper ; nivei : candidi ; fronte : sua. 139 horrida : aspera ; cesaries : cepit frondes ; sumpto : capto. 140 sidereum : stelliferum ; spectare : cernere. 141 Phebus : deus ; lugebere : plorabere ; nobis : a.
X 142
Ista arbor apponitur rogis mortuorum, et de ea solent fieri mete et tumuli, quia arbor illa est imputrescibilis et dicitur cupressus ; ideo dicit aderis dolentibus.
142* lugebis : plorabis ; aderis : presens ; inquit : dixit.
137* sua] suo ms.
655X 132
[1]Que non solacia (« Quelles paroles consolantes ne … »), en d’autres termes : « L’enfant pleurait sans cesse, mais était consolé par Phébus qui lui conseillait de souffrir leviter pro materia (« de façon modérée, proportionnée à la cause ») : “Tu ne dois pas, disait-il, pleurer violemment, parce qu’un cerf n’est pas d’un tel prix”, car le cerf était la cause de ses pleurs. » [2]Lugeat (« pleurer »), de pleurer éternellement, ou de faire toujours partie de ceux qui pleurent.
X 136
Métamorphose de Cyparissus en pin
Iamque (« Et déjà ») : l’auteur montre comment Cyparissus fut métamorphosé, en disant qu’il pleura tellement que toute l’humeur et tout le sang quittèrent son corps.
X 138
Ses capilli (« cheveux ») furent changés en feuillages et se tournèrent vers le ciel comme s’ils étaient soulevés.
X142
Cet arbre est placé auprès des tombeaux des morts, et on en fait des bornes et des tertres, parce que c’est un arbre imputrescible, qu’on appelle le cyprès ; c’est pourquoi il dit aderis dolentibus (« tu t’associeras à ceux qui souffrent »).
656X 143
Tale nemus, ut superius enumeravimus. Inque ferarum, quasi dicat : fere et volucres ibi convenerant dulcedine cantus, et sedebat medius. Concordare (147) : nam vox una erat et varie cantus com modulatione.
143-146*
143 nemus : supradictum ; vates : Orpheus ; atraxerat : ad se. 144 turba : agmine ; volucrum : avium. 145 Ut : postquam ; temptavit : utrum sonarent ; pollice : suo. 146 Sensit : percepit ; varios : diversos.
X 147
Quod carmen sequitur sub hac forma : A Iove.
147* modos : modulationes.
X 148
Incipit cantus Orphei
A Iove. Primo facit Orpheus invocationem suam ad Calliopem, musam matrem suam, dicens sic : ‘O Musa, incipe carmina mea a Iove, quia maximus est’, unde versus : « A Iove principio moveat mea carmina Clio. / Imperat imperio cuncta subesse suo ».
148-149*
148 Musa :‘o Calliope’ ; cedunt : interpositio est. 149 carmina : cantilenas ; move : incipe ; est : a me.
X 150-154
[ 1] Plectro graviore : idest gravioribus versibus et graviori materia. [2]Gigantes, idest bella Gigantum ; Fulmina, quibus fulminati sunt Gigantes. [3]Flegraeis est quedam civitas ubi fuit Gigantomachia, et in Valle Flegreya fulminati sunt. [4]Libidine, sicut de Mirra que adamavit illicite patrem suum.
150-154*
150 dicta : laudata ; graviore : forciore. 151 sparsa : missa ; Flegreis : a loco ; fulmina : cecini. 152 Nunc : in presenti ; leviore : minore.
148 A Iove […] subesse suo] versus add. m.s. eadem manus Imperat] ipsius ms. cuncta] conta ms. | 150-154.3 est] et ms. Gigantomachia] Gigomantia ms.
657X 143
Tale nemus (« Une telle forêt ») : comme nous l’avons énuméré plus haut. Inque ferarum (« et dans (une assemblée) de bêtes sauvages »), autrement dit : les bêtes et les oiseaux s’étaient rassemblés là à cause de la douceur de son chant, et il était assis au milieu d’eux. Concordare (« s’accordaient ») : car la voix était unique alors que les chants étaient modulés de façons variées.
X 147
Lequel chant suit sous cette forme : A Jove (« par Jupiter »).
X 148
Début du chant d ’ Orphée
A Iove (« Par Jupiter ») : Orphée commence par invoquer la muse Calliope, sa mère, en ces termes : « Ô Muse, commence mon chant à partir de Jupiter, parce qu’il est très grand », d’où les vers : « Que Clio fasse débuter mon chant par Jupiter. / Il commande à tous d’être sous son commandement. »
X 150-154
[1]Plectro graviore (« d’un plectre plus lourd ») : c’est-à-dire dans des vers plus graves, avec une matière plus sérieuse. [2]Gigantes (« les Géants »), c’est-à-dire la guerre des Géants ; Fulmina (« les foudres »), parce que les Géants furent foudroyés. [3]Flegraeis (« de Phlégra »), une cité où se déroula la Gigantomachie : c’est dans la vallée de Phlégra qu’ils furent foudroyés. [4]Libidine (« par la débauche ») : à savoir Myrrha qui aima son père de façon illicite.
658153 dilectos : amatos ; superis : a ; inconcessis : non datis. 154 ignibus : amoribus ; libidine : ‘luxuria’ vel.
X 155
De Iove et Ganimede
[ 1] Rex superum : modo incipit Orpheus cantilenam suam a Iove, utpote a digniori, qui in aquilam se mutavit ut raperet Ganimedem. [2] Quadam die, dum Iupiter teneret convivium suum, domina Hebe erat piscerna que, dum pocula ministraret, fecit non bene, et hac causa expulsa fuit de servicio, et Iupiter mutavit se in aquilam et Ganimedem rapuit, qui factus est piscerna. [3] De Iove rege cretensse totum est veritas, sed quod in aquilam se mutavit nichil est nisi quod in nave rapuit, in qua erat aquila picturata. [4] De illo qui propter cervum mutatus fuit in cupressum, nichil aliud est nisi quod in locis solitariis inquisitione naturarum studebat, et ideo fama eius est indelebilis, sicut cupressus imputrescibilis.
155* Rex : Iupiter ; superum : (super)orum ; Frigii : Troiani ; Ganimedis : proprium.
X 156-157
Quam melius vellet habere aliam formam quam suam !
156-158*
156 inventum : in mondo ; quod : aliquid. 157 quam : in specie qua erat ; alite : ave ; verti : mutari. 158 dignatur : voluit ; que : in illa.
X 159-161
[ 1] Mendacibus dicit, quod non erat vere aquila. Yliadon : Ganimedem filium Yli, quia iste Ylus fuit pater eius et rex Troianorum. [2]Invita, quia Ebe, filia Iunonis, illud officium obtinuit.
159-161*
159 Nec mora : non fuit ; mendacibus : falsis ; percusso […] aere : et hoc dico. 160 Yliadem : Ganimedem ; quoque : protinus ; miscet : parat. 161 invita : non volente.
155.2 non bene] bene bene ms. | 159* mendacibus]medacibusms.
659X 155
Jupiter et Ganymède
[1]Rex superum (« Le roi des dieux du ciel ») : maintenant Orphée commence son chant à partir de Jupiter, comme du plus honorable, qui se changea en aigle pour enlever Ganymède. [2] Un jour, comme Jupiter tenait son festin, dame Hébé lui servait d’échanson ; mais, en servant les coupes, elle s’en sortit mal, et pour cette raison fut chassée du service. Jupiter se changea alors en aigle pour enlever Ganymède, dont il fit son échanson. [3] À propos de Jupiter roi de Crète tout est vrai, mais dire qu’il se changea en aigle revient à dire qu’il enleva le jeune homme sur un navire sur lequel était peint un aigle. [4] À propos de celui qui pour le cerf fut chanté en cyprès, cela revient à dire qu’il étudiait dans les lieux solitaires, à la recherche des vérités de la nature, c’est pourquoi sa renommée est indestructible, de même que le cyprès est imputrescible.
X 156-157
Combien il aurait préféré avoir une autre forme que la sienne !
X 159-161
[1] Il dit mendacibus (« menteuses ») parce qu’il n’était pas un aigle véritable. Yliadon (« d’Ilius ») : Ganymède fils d’Ilius, cet Ilius était son père et roi des Troyens. [2]Invita (« malgré elle »), parce qu’Hébé, fille de Junon, avait occupé cette charge.
660X 162
De Amiclide, idest Iacintho
[ 1] Te quoque : ita rapuit Iupiter Ganimedem ; nunc incipit cantare Orpheus de Phebo, dicens quod similiter per amorem rapuisset Iacintum nisi mortuus esset. [2] De Iacinto fabula continetur : quomodo Phebus inscienter eum occidit, sicut Ciparissus cervum, in littera continetur. [3]Amiclis est civitas, unde Iacintus extitit oriundus.
162-163*
162 quoque : similiter ; Amiclide : Iacinte. 163 fata : dispositio fatorum ; dedissent : concessissent.
X 164-165
Quociens ver intrat et hyems recedit. Piscis et Aries sunt signa proxima in celo ; quando enim sol intrat in arietem, ver incipit.
164-166*
164 Quam : quantum potest. 165 hyemen : tempus ; Piscique Aries : signa sunt. 166 cespite flores : quia mutatus fuit in glaiol.
X 167-168
[ 1] Te meusante : loquitur Orpheus, qui filius erat Phebi et Calliopes. Et orbe. Construe : Delphi, populi illi qui habitant in Parnaso, quia Parnasus est in medio orbe. [2] Comprobatum est per Iovem, qui duas aquilas misit, unam ab oriente et aliam ab occidente, que fesse simul venerunt in Parnassum. Delphi positi in medio orbe caruerunt preside, ides Phebus, dum vacaret amori Iacinti.
167-168*
167 Te meus :‘o Iacinte’ ; omnes : iuvenes ; genitor : Phebus ; orbis : firmamenti. 168 preside : Phebo ; Delphi : populi.
X 169
Immunitam, idest valde munitam, quamdiu fuit ibi Phebus, et hoc dicit quia Paris inde rapuit Helenam, quam, si bene munita esset, non rapuisset, et inde dicit immunitam, idest non munitam.
661X 162
Le fils d ’ Amyclas, c ’ est-à-dire Hyacinthe
[1]Te quoque (« toi aussi ») : ainsi Jupiter enleva Ganymède ; maintenant Orphée commence à chanter sur Phébus, en disant que de la même façon il aurait enlevé Hyacinthe par amour si celui-ci n’était pas mort. [2] Contenu de la fable de Hyacinthe : le texte raconte comment Phébus le tua par mégarde, comme Cyparissus le cerf. [3]Amiclis (« Amycles ») est une cité, d’où Hyacinthe était originaire.
X 164-165
Quociens (« Chaque fois que ») le printemps arrive et que l’hiver s’en va. Piscis et Aries sunt (« Les Poissons et le Bélier sont ») des signes très proches dans le ciel ; quand le soleil entre en Bélier, c’est le début du printemps.
166 cespite flores (« fleurs en bourgeon ») : parce qu’il fut changé en glaieul.
X 167-168
[1]Te meus ante (« mon (père) t’(a chéri) plus… ») : c’est Orphée qui parle, et il était le fils de Phébus et de Calliope. Et orbe (« et (le centre) de la terre ») : construire Delphi (« Delphes ») – nation qui occupe le Parnasse, parce que le Parnasse est au centre du monde. [2] Cela fut confirmé par Jupiter, qui envoya deux aigles, l’un depuis l’Orient et l’autre depuis l’Occident, qui, fatigués en même temps, s’arrêtèrent sur le Parnasse – Delphi positi in medio orbe caruerunt preside (« Delphes, placée au centre du monde, fut privée de son protecteur »), à savoir Phébus, quand il se consacrait à son amour pour Hyacinthe.
X 169
Immunitam (« sans remparts »), c’est-à-dire solidement fortifiée, aussi longtemps que Phébus y séjourna – il dit cela parce que Pâris enleva Hélène de cette cité : si elle avait été bien fortifiée, il ne l’aurait pas enlevée, c’est pourquoi il dit immunitam (« sans remparts »), c’est-à-dire sans fortifications.
662169-171*
169 dum : quando ; deus : Phebus ; Eurotam : civitas ; immunitam : valde. 170 Parthemque : civitas ; Cithare : sue ; sagite : sue. 171 immemor : quia deus erat ; ferre : portare ; recusat : respuit.
X 172-174
Amor Iacinti et Phebi
[1] Hoc faciebat totum gracia Iacinti qui erat venator. Alit, quia nil assuetudine maius. [2]Iamque : facit actor cronographiam quando Phebus inscienter occidit Iacintum, et dicit quod hoc fuit circa meridiem.
172-179*
172 tenuisse : respuit ; per iuga : summitate ; iniqui : asperi. 173 comes : socius ; flammas : amores. 174 Titan : sol ; venientis : noctis ; acte : preterite. 175 -que : et ; pari : equali ; utrinque : undique. 176 levant : Phebus et Iacintus. 177 splendescunt : unguntur ; ineunt : petunt ; disci :palet gallice. 178 libratum : missum. 179 misit : iecit ; deiecit : percussit ; nubes : yperbole est excessio veritatis.
X 180-181
Discus est quoddam genus ludi, scilicet lapis rotundus vel plumbum rotundum ad modum scutelle.
180-181*
180 decidit : discus ; solidam : firmam. 181 pondus : dicit ponderosus ; exibuit : monstravit ; viribus : quia fortis ; artem : et subtilis erat Phebus.
|f. 132v|
X 182-183
Ita miserat Phebus discum, et artificiose iecerat, et, com sic fecisset, protinus Iacintus.
182-183*
182 imprudens : stultus ; artis : loci ; lusus : vel ‘lesus’. 183 tollere : capere ; Tenarides : Iacintus ; orbem : discum ; at : sed.
663X 172-174
Amour d ’ Hyacinthe et de Phébus
[1] Il faisait tout cela en faveur d’Hyacinthe qui était chasseur. Alit (« il nourrit »), parce que rien n’est plus fort que l’habitude. [2]Iamque (« Et déjà ») : l’auteur établit la chronologie du moment où Phébus tua Hyacinthe par mégarde : il dit que c’était aux alentours de midi.
X 180-181
Le disque est une sorte de jeu, c’est une pierre ronde ou un rond de plomb qui ressemble à une soucoupe.
|f. 132v|
X 182-183
Ainsi Phébus avait envoyé le disque, et l’avait jeté avec art. Comme il avait fait cela, aussitôt Iacintus (« Hyacinthe ») …
664X 184
Dura, quasi dicat : ‘Ex repercussione telluris desiliit in frontem Iacinti’. Ut dicunt quidam, Iacintus orbem illum extulit et iecit, sed iactus disci excidit prope illum et a repercussione terre illum percussit, et sic fuit cassatus casu mortis.
184* repercusso : a disco ; subiecit : sursum iecit.
X 185
Expalluit, quasi dicat : ‘Dum Phebus vidisset Iacintum percussum, expalluit pre timore, Iacintus pre dolore’.
185-186*
185 in : contra ; Iacinte :‘o’ ; eque : equaliter. 186 puer : Iacintus ; deus : Phebus ; collapsos : vulneratos ; excipit : capit ; artus : membra.
X 187-188
Quia medicus erat, unde in principio : « sed herbarum subiecta potentia nobis » (I 522).
187-189*
187 modo : aliquando ; modo : aliquando ; siccat : tergendo. 188 nunc : aliquando ; animam : vitam ; admotis : additis. 189 nec : et non ; prosunt : valent ; artes : medendi ; erat : ecce quare.
X 190
Mors Iacinti
Ut si quis : facit actor comparationem de Iacinto moriente ad flores fractos eo quod pallatim marcescunt, sicut pallatim adnichilatus fuit.
190* ut : fit ; quis : homo ; violas : flores ; -que : vel.
X 191
[1] Moralitas talis est : Iacintus interpretatur ydiota vel fatuus ; hunc adamavit Phebus, quia sapientes amant et cupiunt imprudentes, non ut eos sequantur, sed ut eos ad viam reducant. [2] Iste Phebus, scilicet sapiens, voluit ludere, et hoc dico, quia primo sermonibus divinis alliciendi sunt fatui, ut a peccato convertantur, sed discus, operatio et loqutio sapientis
184* repercusso]repecussoms. | 185* contra] conta ms. | 189* valent ex vallent ms. | 191.1 sequantur] sequatur ms.
665X 184
Dura (« dure »), autrement dit : « Rebondissant sur la terre il jaillit sur le front d’Hyacinthe. » Selon certains, Hyacinthe souleva ce disque et le jeta, mais le disque jeté tomba près de lui et, rebondissant sur la terre, le frappa, et il fut tué par ce coup mortel.
X 185
Expalluit (« il pâlit »), autrement dit : « Quand il vit que Hyacinthe avait reçu ce coup, Phébus pâlit de peur, et Hyacinthe pâlit de douleur. »
X 187-188
Parce qu’il était médecin, d’où en principe : « mais nous maîtrisons la vertu des herbes ».
X 190
Mort d ’ Hyacinthe
Ut siquis (« de même, si quelqu’un… ») : l’auteur compare la mort d’Hyacinthe à des fleurs brisées parce qu’elles se flétrissent peu à peu, comme il fut peu à peu anéanti.
X 191
[1] La moralité est la suivante : Hyacinthe s’interprète comme un ignorant ou un fou ; Phébus l’aima, parce que les sages aiment et désirent les imprudents, non pour les imiter, mais pour les ramener sur la bonne voie. [2] Phébus donc, à savoir le sage, voulut jouer – à mon avis parce que les fous doivent d’abord être séduits par les paroles divines pour se détourner du péché ; mais le disque, l’œuvre et le discours du sage,
666in terram duram decidit, quia vix radicati in stulticia et peccato audiunt prudentes, unde in malicia victi et mortui. [3] Phebus dolet, quia dolent iusti de morte malorum, et floribus caducis comparantur, et sic in illud mutari propter sua insipientiam iudicantur.
191-195*
191 -que : vel ; infringat : rumpat partim ; summis : celsis ; lignis : troncos. 192 marcida : illa existencia ; demiccant : inclinant ; caput : suum. 193 nec : et non ; -que : sed ; cacumine : inclinato. 194 sic : taliter ; moriens : Iacintus ; vultus : suos ; deffecta vigore : defficiens vel privata. 195 -que recombit : et iniacet.
X 196
Iuventa prima : ‘Nondum pervenisti ad iuventutem’.
X 196-197
Lamentatio Phebi pro morte Iacinti
Ecce lamentatio Phebi de morte Iacinti. Ebalie : Ebalia pars est Lichonie de qua erat Iacintus natus, in valle Tenari, et sic dicitur : ‘Tenarides, mea crimina, quia ego sum causa mortis, sed tamen, qualis est mea culpa, nisi si (200) pro nisi ludere’, quasi dicat : ‘Ludus potest vocari culpa et amor ; similiter potest dici culpa’.
196-204*
196 Laberis : mortuus es ; Ebalide :‘o Iacinte’ ; prima […] iuventa : et hoc dico ; fraudante : decipiente ; iuventa : tempus iuventutis. 198 dolor : meus ; -que : et ; mea : scilicet ; leto : morti. 199 inscribenda : reputanda ; funeris : mortis ; actor : dator. 200 Nisi si : pro nisi. 201 amasse : amavisse te. 202 Atque : et ; pro : vellem ; vitam : meam ; liceret : licitum esset. 203 Quod : sed ; sociali : amicabili. 204 eris : tu ; -que : et ; ore : sono.
X 205
[1] Hic tractatur quomodo Phebus vaticinavit de morte Aiacis, qui mortuus fuit in expedicione Troie eo quod arma Achillis nichil optinuit contra Ulixem. [2] Eodem scripto (206) dicit, quia flos in quo mutatus erit Aiax habebit scripto Ay ; ordine isto converso, habebimus Ya.
667tomba sur la terre dure, parce que ceux qui sont enracinés dans la sottise et dans le péché ont du mal à écouter les prudents, aussi sont-ils vaincus et meurent-ils dans la méchanceté. [3] Phébus éprouve de la douleur, parce que les justes souffrent de la mort des méchants, qu’on compare à des fleurs qui tombent, et qui sont ainsi condamnés par jugement à devenir ces fleurs à cause de leur sottise.
X 196
Iuventa prima (« dans ta prime jeunesse ») : tu n’es pas encore parvenu à la jeunesse.
X 196-197
Plaintes de Phébus pour la mort d ’ Hyacinthe
Voici la plainte de Phébus sur la mort d’Hyacinthe. Ebalie (« de Tarente ») : Tarente est une région de Laconie où était né Hyacinthe, dans la vallée du Ténare ; aussi est-il dit : « Fils du Ténare, » mea crimina (« mon crime ») parce que je suis cause de ta mort ; pourtant quelle est ma faute, nisi si (« sauf si ») pour « sauf le jeu », autrement dit : « Le jeu peut être appelé faute, ainsi que l’amour : on peut de la même façon les appeler fautes. »
X 205
[1] Ici est traitée la prophétie de Phébus sur la mort d’Ajax, qui mourut pendant l’expédition contre Troie parce qu’il ne put rien faire pour obtenir les armes d’Achille face à Ulysse. [2] Il dit par le même nom scripto (« écrit ») parce que la fleur en laquelle Ajax sera métamorphosé portera l’inscription Ay : en inversant l’ordre des lettres, nous aurons Ya.
668205* lira : mea ; pulsa : sonata ; manu : mea ; carmina nostra : cantus nostri.
X 206
Scripto, quia ‘scriptum floris in quo mutatus es, o Iacinte, est scriptum doloris, scilicet Yacinte, interiectio dolentis’.
206-209*
206 flosque : tu et ; imitabere : sequerere. 207 illud : unum ; quo : tempore ; fortissimus : miles ; Aiax : proprium. 208 addat : mutet ; hunc : talem ; folioque : in scripto et ; eodem : tali. 209 Talia : supradicta ; vero : certe ; memorantur : dicontur ; Apollinis : Phebi ; ore : vaticinative.
X 210-213
Mutatio Iacinti in florem
210-217*
210 cruor : sanguis ; fusus : e(fusus) ; humi : terre. 211 cruor : sanguis ; nitentior : nobilior ; ostro : purpura. 212 flos : quidam ; oritur : nascitur ; -que : et ; capit : talem qualem ; lilia : habent. 213 purpureus : croceus ; argenteus : color ; esset in illis : Quasi diceret ‘Flos iste est, quasi consimilis liliis nisi in colore’, et dicit generaliter de omnibus liliis. 214 Nec satis hoc : quod sic mutatus ; is : talis iste ; actor : dator. 215 ipse : Phebus ; foliis : floris. 216 funestaque : mortalis et. 217 (218 T) celebrandaque : colenda ; priorum : antiquorum.
X 218-219
Quia Phebus instituit festa Iacinti. Ceraste (223) : apud Amatonta fuerunt quidam qui homines sacrificabant, et etiam Propetides (221), luxuriossissime mulieres.
218-219*
218 (217 T) Spartem : civitas ; Iacintum : proprium ; -que : et. 219 prelata : dicta ; Iacincia : festa Iacinti ; pompa : congregatione.
206 est ex etiam ms.|217* b add. m.s. alia manus | 218 Ceraste]Cerastesms. | 218* a add. m.s. alia manus
669X 206
Scripto (« écrit »), parce que « c’est ce qu’écrit la fleur que tu es devenu, Hyacinthe » : c’est l’écrit de la douleur, d’Hyacinthe, le cri de celui qui souffre.
X 210-213
Métamorphose d ’ Hyacinthe en fleur
213 esset in illis (« serait dans les lys »), en d’autres termes : « Cette fleur est presque semblable aux lys sauf pour la couleur », et il parle de manière générale, pour l’ensemble des lys.
X 218-219
Parce que Phébus institua des festivités pour Hyacinthe. Cerastes (« les Cérastes ») : il y avait à Amathonte des hommes qui faisaient des sacrifices humains, comme c’est aussi le cas des Propetides (« Propétides »), des femmes de la plus grande débauche.
670X 220-221
[1] Dictum est superius quomodo Iacintus mutatus fuit. At si : dico quod non pudet Spartem civitatem genuisse Iacinton, quia venustus erat. [2]At si forte. Construe sic : At si interroges forte Amatonta, gentes illius civitatis vel civitatem fecondam metallis,an, idest utrum, velit melius genuisse Propetides, illos populos, atque − pro vel − illos quibus frons erat condam aspera cornu − pro cornu gemino −, unde, qua de causa, Ceraste illi populi traxere nomen. [3]Annuit illa civitas eque, ex equalitate, quasi dicat : ‘Tantum amat Amatonta genuisse Propetides quam Cerastas’.
220-221*
220 roges : interroges ; fecondam : fertilem ; Amatonta : civitas ; metallis : peccunie. 221 an : utrum ; Propetides : melius Accus grecus ; eque : equaliter.
X 222-223
De Cerastis
222-223*
222 atque : vel ; gemino : duplici ; cornu : pro. 223 unde : qua causa ; etiam : certe ; Ceraste : a ceros, quod est cornu.
X 224
[ 1] Ante fores : ecce qua causa Ceraste mutati fuerunt in boves, quia Iovi hospites suos sacrificabant, quare Venus, irata, mutavit illos in boves. [2]Iovis Hospitis : Iupiter dicitur deus hospitalitatis postquam Liciam subvertit ; ara lugubris sceleris propter scelus.
224-225*
224 horum : Cerastarum ; stabat : erat ; Hospitis : alienigene. 225 lugubris : flebilis ; quam : aram ; quis : aliquis.
X 226
Advena dicit, quia bene indigene sciebant homines ibi esse mactatos nec vituli nec boves ibi sacrificabatur sed hospites.
671X 220-221
[1] On a raconté ci-dessus la métamorphose d’Hyacinthe. At si (« Mais si ») : je dis que la cité de Sparte ne rougit pas d’avoir donné naissance à Hyacinthe, qui était plein de grâce. [2]At si forte (« Mais si par hasard »). Construire ainsi : At si interroges forte Amatonta (« Mais si par hasard on interroge Amathonte »), les gens de cette cité ou cette cité elle-même, fecondammetallis (« féconde en métaux »), an (« pour savoir si »), c’est-à-dire pour distinguer si vellit melius genuisse Propetides (« elle aurait préféré donner naissance aux Propétides »), cette engeance, atque (« ainsi qu’à »), pour « ou à » ceux quibus frons erat condam aspera cornu (« dont le front était autrefois renforcé d’une corne »), pour cornu gemino (« une double corne »), unde (« d’où »), pour cette raison, cette engeance ceraste traxere nomen (« reçut le nom de Cérastes »), [3] cette cité annuit (« approuve ») eque (« de manière égale »), à égalité, autrement dit : « Amathonte aime autant avoir donné naissance aux Propétides qu’aux Cérastes. »
X 222-223
Les Cérastes
X 224
[ 1] Ante fores (« Devant les portes ») : voici pourquoi les Cérastes furent métamorphosés en bœufs, c’est parce qu’ils sacrifiaient leurs hôtes à Jupiter : aussi Vénus, irritée, les transforma en bœufs. [2]Iovis hospitis (« de Jupiter Hospitalier ») : Jupiter porte le nom de dieu hospitalier depuis qu’il a anéanti la Lycie ; l’autel sinistre sceleris (« du crime »), à cause des crimes.
X 226
Il dit advena (« étranger »), parce que les indigènes savaient bien que c’étaient des hommes qui avaient été immolés à cet endroit, et qu’on n’y sacrifiait ni des veaux ni des bœufs, mais les hôtes.
672226-229*
226 advena : alienus ; mactatos : occisos ; illic : in ara. 227 Amatusiasque : a loco et. 228 hospes : in veritate ; cesus : occisus ; Sacris : sacrificiis ; nephandis : pessimis. 229 Offitiaca : ab Offite rege ; parabat : volebat.
|f. 133r|
X 230
Sed quid, quasi dicat : ‘Meum regnum non debet in hoc puniri, sed populus qui hoc facit’, et dedit eis Venus ut putarent se servare cornua, nec habebant.
230-231*
230 deserere : linquere ; Venus : dea ; loca : mea peccavere. 231 peccavere : certe nichil ; quod : quale ; crimen : certe nullum ; illis : locis et civitatibus.
X 232
Mutatio Cerastarum in tauros
[1] Ecce causa quare Amatonta nollet eas genuisse. Dum Venus dubitaret, respexit cornua que ferebant, et sic recordata est taurorum, et in tauros hos mutavit. [2]Posse relinqui (236) : per hoc notat ipsas habere cornua, quia eis relicte fuerunt ; ergo habebant. [3] Non possent relinqui nisi haberent, ut, si quis mutaret anglicom, cauda posset ei relinqui, quia iam habet caudam, quod non posset fieri francigene vel alii.
232* potius : melius ; penam : quam loca mea ; impia : prava ; pendat : sustineat.
X 233
[1] Quod isti dicuntur mutari in tauros nichil aliud est nisi quod erant homines homicide et crudeles, bestialiter, non Deum cognoscentes, viventes, quod hospites occidebant, pretereuntes spoliabant. [2] Quod Venus mutavit, quia per Venerem et luxuriam suam hoc faciebant, et in rei veritate Ceraste sunt quidam populi habentes strumam in fronte, a qua struma dicti sunt cornuti illi.
230* mea] me ms. | 232.1 Amatonta] Amantus ms.
673|f. 133r|
X 230
Sed quid (« Mais de quoi »), autrement dit : « Ce n’est pas mon royaume qui doit être puni pour cela, mais le peuple qui agit ainsi. », et Vénus leur fit croire qu’ils conservaient des cornes, alors qu’ils n’en avaient plus.
X 232
Métamorphose des Cérastes en taureaux
[1] Voici pourquoi Amathonte voudrait ne pas leur avoir donné naissance. Comme Vénus hésitait, elle remarqua qu’ils portaient des cornes : elle pensa alors à des taureaux, et les transforma en taureaux. [2]Posse reliqui (« qu’elle peut les leur laisser ») : il note ainsi qu’ils avaient des cornes, parce qu’elles leur furent laissées : donc ils en avaient. [3] Elles n’auraient pu leur être laissées s’ils n’en avaient pas, de même que, si on métamorphosait un Anglais, on pourrait lui laisser une queue, parce qu’il en a déjà une, ce qui ne pourrait arriver à un Français ou à d’autres peuples.
X 233
[1] Dire qu’ils furent changés en taureaux revient à dire qu’ils étaient des hommes criminels et cruels, qui vivaient comme des bêtes, dans l’ignorance de Dieu, et tuaient leurs hôtes, après avoir spolié les voyageurs. [2] Vénus mit un terme à cela parce qu’ils agissaient ainsi sous l’emprise de Vénus et de leur luxure : en vérité les Cérastes sont des gens qui ont des écrouelles sur le front, ce sont ces écrouelles qui font dire qu’ils sont cornus.
674233-237*
233 nece : pendat ; quid : per aliud. 234 Idque : medium ; verse : mutate ; figure : certe nichil. 235 quo : modo vel qua forma ; eos : Cerastas ; cornua : que habebant. 236 flexit : vertit ; hec : cornua ; illis : Cerasti ; relinqui : ab illa. 237 grandiaque : magna et ; torvos : crudeles ; transformat : mutat ; iuvencos : tauros.
X 238-240
De Propetidibus
[ 1] Sunt tamen. Ecce causa quare fecit Venus Propetides publicas meretrices : pro qua ira numinis, idest pro cuius numinis ira feruntur vulgasse, primo suo corpora vulgo exposuisse sic aperte ut meretrices ab omnibus dicerentur. [2] Post hoc mutate fuerunt in lapides.
238-240*
238 obscene : prave ; Venerem : deam ; Prepetides : mulieres. 239 sua : causa ; numinis : deitatis ; ira : pro. 240 forma : sua, vel (for)me ; vulgasse : communiter tradidisse.
X 241-242
Mutatio Propetidum in lapides
[1] Moralitas hec est : Propetides, idest puelle et mulieres in iuventute intelliguntur, negant primo Veneri famulari, dicunt se nullo modo Veneri servire. [2] Tamen, quia vicium Veneris inest naturaliter mulieribus dum ad etatem venerint, gustant de fructu Veneris, et tunc, illi soli adherentes, fiunt que prius erant caste publice meretrices. [3] Quod sanguis oris indurescit, quia pudorem retromittunt, et firmiter ut lapides elevate per vicos pergunt ut coram vendant, et sic dicuntur in lapides transmutari.
241-242*
241 ut : postquam ; cessit : re(cessit) ; -que : et postquam ; oris : sui. 242 silicem : lapidem ; discrimine : divisione ; verse : mutate.
X 243-246
De Pigmalione
675X 238-240
Les Propétides
[1]Sunt tamen (« Il y a cependant »). Voici pourquoi Vénus fit des Propétides des femmes publiques : pro qua ira numinis (« par cette colère de la déesse »), c’est-à-dire par la colère de cette déesse, feruntur vulgasse (« elles prostituèrent (leurs corps), dit-on »), elles furent les premières à offrir publiquement leurs corps de manière si évidente qu’elles furent communément appelées femmes publiques. [2] Après cela elles furent changées en pierres.
X 241-242
Pétrification des Propétides
[1] La moralité est la suivante : les Propétides, c’est-à-dire, comprend-on, de jeunes filles et de jeunes femmes, refusent d’abord de se soumettre à Vénus, en disant qu’elles ne sont nullement à son service. [2] Cependant, parce que le vice de Vénus habite naturellement les femmes quand elles avancent en âge, elles goûtent au fruit de Vénus ; alors elles ne jurent plus que par lui et celles qui étaient chastes au début devient des femmes publiques. [2] (Il dit) que sanguis oris (« le sang de leur visage ») se figea, parce qu’elles abandonnèrent toute pudeur, et que, fermes comme des pierres dressées le long des chemins, elles continuent à se vendre publiquement, et ainsi on dit qu’elles furent changées en pierres.
X 243-246
Pygmalion
676243-246*
243 Quas : Propetides ; Pigmalion : proprium ; per crimen : in peccato. 244 offensus : tristis ; viciis : suis ; que : vicia ; plurima : magna. 245 feminee : feminarum ; natura : quia naturaliter sunt prave ; celebs : castus. 246 diu : longe ; consorte : socia.
X 247-249
De ymagine eburnea
[ 1] Interea. Pigmalion, offensus pro moribus Propetidum, celebs statuit vivere, qui, com quandam ymaginem ex ebore fecisset, eius specie captus, auxilio Veneris loco mulieris usus est ea. [2] Formam dedit illi ebori qua nulla forma nasci potest, quia aliqua femina non habebat tam pulchram formam virginis illi datam ; representat istam esse virginem.
247-256*
247 Interea : commutarentur ; niveum : album ; mira : mirabili ; arte : ingenio. 248 sculpsit : scidit ; qua : forma. 249 operis : ymaginis. 250 facies : ymaginis ; quam : virginem vel ymaginem ; credas : si esses. 251 obstet : noceat ; reverentia : rei veritas ; posse : credas. 252 adeo : in tantum ; arte sua : opere et subtilitate ; haurit : capit. 253 pectore : suo ; Pigmaleon : proprium ; simulati : ficti ; ignes : amores. 254 operi : suo ; tentantes : utrum verum esset corpus ; an : utrum. 255 ebur : erat vere ; ebur : illud ; fatetur : dicit ; non vult dicere quod sit eburneum. 256 oscula : basia ; dat : ymagini ; reddit : ab illa ; loquitur : secom ; tenet : illam.
X 257
De credulitate Pigmalionis com ymagine
Insidere, idest inclinare, in carne molli intrare.
257* infigere : vel ‘insidere’.
X 258
Livor est nigredo proveniens in carne ex impressione vel percussione, et dicitur blesmisture gallice.
677X 247-249
La statue d ’ ivoire
[1]Interea (« Pendant ce temps »), Pygmalion, choqué par les mœurs des Propétides, décida de rester célibataire. Mais, ayant fabriqué une statue d’ivoire, il fut captivé par sa beauté, et avec l’aide de Vénus usa d’elle comme d’une femme. [2] Il donna à cet ivoire qua nulla forma nasci potest (« une forme qu’aucune femme ne peut avoir à la naissance »), parce qu’aucune femme n’avait une aussi belle forme de vierge que celle qu’il lui donna. Il donne ici la représentation d’une vierge.
255 fatetur (« il avoue ») : il dit ; il ne veut pas dire qu’il s’agit d’ivoire.
X 257
Illusions de Pygmalion à l ’ égard de sa statue
Insidere (« poser sur »), c’est-à-dire incliner, entrer dans la chair tendre.
X 258
La lividité est la noirceur qui marque la chair après une pression ou un coup, on l’appelle blesmissure en français.
678258-264*
258 metuit : timet ; ne : quod non ; livor : blesmisture. 259 modo : aliquando ; blandicias : dulcia verba ; adhibet : dicit ; modo : aliquando. 260 fert : dat ; conchas : scilicet coquigles ; teretes : rotondos ; lapillos : fert, lapides. 261 parvas : fert ; flores : fert. 262 liliaque : fert et ; pictasque : fert etiam ; lapsas : cadentes. 263 quoque : similiter ; artus : membra ymaginis. 264 digitis : suis ; monilia : anulos ; collo : suo.
X 265
Bache sunt ille cathene com anulis que ab auribus dependent, et hoc solet esse ritu paganorum.
265* aure : pendent ; redimicula : ornamenta ; pectore : a, suo.
X 266
Minus quam si esset ornata supradictis ornamentis.
266* Cuncta : omnia ; formosa : pulchra.
X 267
Sindonide : in Sindonia habundat purpura que tingitur quodam pisce qui crescit in conchis.
267-269*
267 Collocat : ponit ; hanc : ymaginem ; stratis : letis ; Sidonide : purpure ; pictis : pisces ; vel ‘cinctis’. 268 -que : et ; thori : lecti ; colla : sua. 269 tanquam : quasi ; sensura : perceptura.
X 270
Describit actor tempus et diem in quo mutata fuit ymago Pigmalionis in mulierem, et dicit quod fuit in illa die qua Veneri sacrificabant.
270* Festa : festiva ; Cipro : in illa insula in qua precipue Venus a populo colebatur.
X 271
aurum ] Ornamentis aureis tegebant quando sacrificabantur.
271-273*
271 blandis : candidis ; cornibus : suis. 272 conciderant : ceciderant ; icte : percusse ; nivea : candida ; cervice : teste. 273 -que : et ; fumabant : ibi ; munere : sacrificio ; functus : usus ; aras : altaria Pigmalion.
679X 265
Bache (« perles ») : il s’agit de ces chaînes avec des anneaux qui pendent des oreilles, c’est une habitude païenne.
X 266
Minus (« moins ») que si elle était ornée des parures énoncées ci-dessus.
X 267
Sindonide (« de Sidon ») : à Sidon abonde la teinture pourpre produite à partir d’un poisson qui grandit dans des coquilles.
X 270
L’auteur décrit le jour et l’heure où la statue de Pygmalion fut métamorphosée en femme : il dit que c’était un jour de sacrifices à Vénus.
270 Cipro (« à Chypre ») : dans cette île où Vénus était principalement honorée par le peuple.
X 271
aurum (« l’or »)] On couvrait (les animaux) d’ornements en or quand on les sacrifiait.
680X 274-276
Oratio Pigmalionis
|f. 133v|
Non dixit eburnea virgo, sed illa que similis est ebori, quia ibi ponitur eburnea virgo ad placitum.
274-276*
274 constitit : stetit ; si : quia ; dii : ‘o’ ; cuncta : licita et iusta. 275 coniunx : sponsa ; opto : volo.
X 277-278
Com supradicta diceret Pigmalion, Venus erat presens et petitiones illius benigniter exaudivit.
277-278*
277 sensit : percepit ; ut : quia ; aderat : presens ; Venus : dea. 278 illa : Pigmalionis ; et : scilicet ; amici : amicabilis ; muneris : doni.
X 279
Quasi diceret : ‘Ter candela accensa est propter eius sanctitatem et ter flamma evanuit, vel ignis tribus vicibus super illum de celo descendit’.
279-282*
279 ter : tribus ; accensa : vicibus ; apicem : altitudinem. 280 Ut : postquam ; simulacra : ymaginem. 281 thoro : lecto ; tempore : ab illo. 282 Admovet : addit ; manibus : suis ; pectora : illius ; tentat : sepe tenet.
X 283-284
Mutatio ymaginis eburnee in mulierem
[ 1] Subsedit, idest inclinavit, et refugit impressionem digitorum Pigmalionis, quia iam erat carnea ymago et non eburnea. [2] Humetia : Humetus est mons ubi maxime habitant apes et mellificant.
283-284*
283 tentatum : sepe tentum ; ebur : ymago eboris ; posito rigore : deposito, et hoc dico. 284 subsedit : inclinavit ; digitis : suis ; Humetia : a monte.
279 descendit] descendi ms. | 279* altitudinem] altitudine ms.
681X 274-276
Prière de Pygmalion
|f. 133v|
Non dixit (« Il ne dit pas ») « vierge en ivoire », mais (il dit) qu’elle était semblable à de l’ivoire, parce qu’une vierge d’ivoire est placée là pour l’agrément.
X 277-278
Comme Pygmalion prononçait les prières mentionnées plus haut, Vénus était présente et entendit avec bienveillance ses demandes.
X 279
En d’autres termes : « Trois fois le cierge s’alluma grâce à sa pureté, et trois fois la flamme disparut ; ou le feu par trois fois descendit du ciel sur lui. »
X 283-284
Métamorphose en femme de la statue d ’ ivoire
[1]Subsedit (« Il fléchit »), c’est-à-dire il s’incline, et recule sous la pression des doigts de Pygmalion, parce que la statue était déjà de chair et non plus d’ivoire. [2]Humetia (« de l’Hymette ») : l’Hymette est un mont sur lequel vivent de très nombreuses abeilles qui fabriquent du miel.
682X 285-286
Tractata, idest assidua attractione, fit utilis, et ad quamlibet formam apta.
285-286*
285 multasque : in plures et ; tracta : tractata. 286 flectitur : mutatur ; facies : formas ; utilis : ad diversas formas capiendas.
X 287
Et dubio vel medio, idest mediocriter vel dubitabiliter gaudebat adhuc, quia nesciebat utrum esset vere carnea vel adhuc eburnea.
287* Dum : quamdiu ; et dubio : quod medio ; fallique : decipi ; veretur : dubitat.
X 288-289
[1] Hec est moralitas. Pygmalion fecit ymaginem eburneam, quia puellam pulcherrimam ex Indis partibus enutrivit. [2] Com omnes alias mulieres in odio haberet et ad ultimum illam adamavit, quia satisfacit hominem qui eam nutrit, et illam desponsavit et in veritate Pasum genuit. Hoc est verum. [3] Aliter sic : Pigmalion iuvenis religiosus dicitur, qui propter vicia mulierum ab earum consorciis se declinat ; ymaginem eburneam nutrit quia conscientiam puram et candidam. [4] Tamen in fine mutatur in mulierem, quia aliquando aliqui religiosi, resipiscentes, mulieribus adherent, a quibus generatur insule nomen Paphon, quia Paphon dicitur a Phase, quod est transitus, quia de mondo ad religionem transeunt, et iterum et econverso.
288-289*
288 rursus : iterum ; rursus : iterum ; vota : iterum ; retractat : tangit. 289 Corpus : in veritate ; tentate : sepe tente ; pollice : Pigmalion.
X 290
Regratiatio Pigmalionis Veneri
285* multasqueexmultaquems. | 285-286 Tractata]tractams. | 287 vere ex vera ms. | 288-289.2 eam] eum ms. | 288-289.4 ad] at ms. econverso ex converso ms. | 290tit. Regratiatio] regraciatior ms.
683X 285-286
Tractata (« façonnée »), c’est-à-dire par de longues caresses, fit utilis (« elle devient utile ») et apte à prendre la forme voulue.
286 utilis (« utile ») : pour prendre diverses formes.
X 287
Et dubio (« et dans l’hésitation ») ou medio (« moyennement »), c’est-à-dire il se réjouissait encore moyennement ou en hésitant, parce qu’il ne savait pas si elle était vraiment de chair ou si elle était encore en ivoire.
X 288-289
[1] Voici la moralité. Pygmalion fabriqua une statue d’ivoire, parce qu’il éleva une très belle jeune fille originaire des régions de l’Inde. [2] Alors qu’il avait pris en haine toutes les autres femmes, il aima finalement celle-ci, parce qu’elle satisfait l’homme qui la nourrit, et il l’épousa et engendra en vérité Pasus. C’est la vérité. [3] Autre interprétation : Pygmalion est le nom d’un jeune homme pieux, qui, à cause des vices des femmes, s’éloigne de leur fréquentation ; il nourrit une statue d’ivoire parce qu’il cultiva une conscience pure et sans tache. [4] Cependant finalement elle fut changée en femme, parce que parfois certains hommes pieux, retrouvant le goût des femmes, s’y attachent. Elles donnent naissance à une île du nom de Paphos, parce que Paphos tire son nom du Phase, qui signifie le passage, parce qu’elles passent du monde à la religion, et de nouveau vice versa.
X 290
Pygmalion rend grâce à Vénus
684Tum vero Paphius, idest Pigmalion : preoccupatio actoris, quia Pigmalion ex ymagine vivificata genuit Paphium, a quo dicta est insula Paphos, unde et Paphii dicuntur homines illius terre.
290-294*
290 vero : certe ; Paphius : Pigmalion ; concipit : in corde. 291 verba : precamina ; quibus : verbis ; agit : reddit ; -que : et ; tandem : ad ultimum. 292 oscula : basia. 293 erubuit : puduit ; timidumque : pudibundum ; lumina : solis ; lumen : oculos. 294 attollens : levans ; celo : aere ; amantem : suum Pigmaliona.
X 295-297
Incipit de Mirra
Caute intrat actor fabulam, sed adhuc sunt verba Orphei qui promiserat se dicturum amores inconcessos mulierum et iuvenum, unde supra dicitur : « puerosque canamus / dilectos superis, inconcessisque puellas / ignibus » (152-154), et cetera.
295-299*
295 quod : coniugium ; dea : Venus ; iamque : quia habuit rem com illa ; coactis : coniunctis. 296 noviens : novem vicibus ; orbem : rotunditatem. 297 illa : ymago ; Paphon : proprium ; genuit : peperit ; quo : Papho. 298 Editus : nutritus ; hac : insula ; ille : homo ; prole : progenie. 299 felices : beatos scilicet ; Cinaras : proprium ; haberi : numerari.
X 300
[ 1] Dira canam. Incipit Orpheus cantare de amore Mirre com patre suo, sed primo invittat mulieres ut fugiant a facie cantilene sue. [2] Fabula talis est : in Paphon natus fuit Cinaras, qui filiam Mirram habuit, que, ‹com› ad etatem pervenisset, patrem adamavit. [3] Que, com diu ad amorem suum repugnaret, tandem ad ultimum voluit se suspendere, sed nutrix vetula illam percepit, et sic ad ultimum cognovit quod patrem amabat, et tunc, mediante illa, pater carnaliter illam copulavit sibi, et, com ad ultimum cognovisset quod filia erat, voluit occidere, et illa fugit et miseratione deorum mutata fuit in arborem que mirra dicitur.
290 preoccupatio] preoccupato ms. | 290* Pigmalion] pima ms. | 295-297 inconcessisque] incessisque ms. | 296* noviens]noviesms. | 300.2 ‹com› ad etatem] ad etatem ms.
685Tum vero Paphius (« Alors le héros de Paphos »), c’est-à-dire Pygmalion : l’auteur fait une prolepse, parce que Pygmalion, de la statue qui avait pris vie, engendra Paphos, qui donna son nom à l’île de Paphos, et les habitants de cette terre sont appelés Paphiens.
X 295-297
Début de l ’ histoire de Myrrha
L’auteur arrive habilement vers cette fable, mais ce sont encore les paroles d’Orphée qui avait promis qu’il dirait les amours défendues des femmes et des jeunes gens, ainsi qu’on le lit plus haut : « nous chanterons les enfants aimés par les dieux, et les flammes défendues des jeunes filles » etc.
295 iamque (« et déjà ») : parce qu’il s’unit à elle charnellement.
X 300
[1]Dira canam (« je vais chanter des choses affreuses »). Orphée commence à chanter l’amour de Myrrha pour son père, mais auparavant il invite les femmes à fuir loin de son chant. [2] La fable est la suivante : à Paphos naquit Cynaras, qui eut comme fille Myrrha ; lorsqu’elle prit de l’âge, elle aima son père. [3] Après avoir longtemps combattu son amour, elle voulut finalement se pendre. Mais sa vieille nourrice la surprit, et sut finalement qu’elle aimait son père. Alors, par son intervention, le père s’unit charnellement à sa fille. S’apercevant finalement que c’était sa fille, il voulut la tuer. Elle s’enfuit, et fut grâce à la pitié des dieux transformée en un arbre qu’on appelle la myrrhe.
686300* Dira : turpia ; procul : longe ; nate : ‘o’ ; este : estote ; parentes : matres.
X 301
Mulcebunt, ita quod velitis audire ; multa placent quibus non debet fides adhiberi.
301-303*
301 Aut : vel ; mulcebunt : lenient ; carmina : cantilene. 302 desit : deficiat ; parte : in qua cano ; fides : vestra ; credite : esse ; factum : verum, quia turpe. 303 credetis : forte ; quoque : similiter ; penam : quia pugnita fuit.
X 304
Si tamen amissum, quasi dicat : ‘Si natura patitur hoc posse fieri, gratulor, non quod apud nos nec apud regionem nostram evenerit istud scelus’. Sic potest com precedenti versu legi vel com illo : facti quoque credite penam (303).
304-307*
304 amissum : peccatum ; natura : mulierum ; videri : quia contra naturam adamavit patrem. 305 Hymariis : a loco ; ut : vel ‘et’ ; orbi : patrie. 306 terre : regioni ; abest : deficit. 307 que : regiones ; tantum : tam magnum ; nephas : impietatem ; sit : licet ; amomo : genere specierum.
X 308-309
Costum – Pacaia tellus ferat costum suum – suum dicit, quia apud illos invenitur et non alibi.
308-309*
308 cinnama : species ; costumque : ferat species ; suum : ferat ; sudataque : sudando emissa. 309 ferat : portet ; alios : ab istis.
687X 301
Mulcebunt (« séduiront »), au point que vous voulez les entendre : on est charmé par bien des choses auxquelles on ne devrait pas accorder foi.
X 304
Si tamen admissum (« si cependant (…) admis »), autrement dit : « Si la nature souffre que cela puisse arriver, je me félicite que ce forfait n’ait pas eu lieu chez nous ni dans notre région. » Ainsi on peut lire ces mots avec le vers qui précède ou avec ceci : facti quoque credite penam (« croyez aussi au châtiment du forfait »).
304 videri (« qu’on voie ») : parce qu’elle aima son père contre la nature.
X 308-309
Il dit costum suum (« son costus ») – Pacaia tellus ferat costum suum (« que la terre de Panchaïe produise son costus ») –, parce qu’on le trouve chez eux et non ailleurs.
688X 310
Dum ferat Panchaia mirram, idest similiter com aliis speciebus supradictis ; tanti, quasi dicat : ‘Pocius volumus mirra et aliis speciebus carere quam habere vel habuisse noviter mirram com ceteris supradictis, que pro tam fedo crimine mutata est.
310* ferat : portet ; et : similiter ; tanti : precii ; arbor : illa.
X 311
Ipse negat. Possetaliquis dicere : ‘Quare ita, Mirra, amas ?’ Et ita respondere : ‘Cupido cogit me, ut ita amem’. Solvit actor ; contra ipse negat.
311-312*
311 Cupido : deus amoris. 312 Mirra : ‘o’ ; faces : tedas ; crimine : peccato ; vendicat : removet vel excusat.
X 313-314
Amor Mirre com patre
Nota.
313-314*
313 stipite : tirso ; Stigio : infernali ; afflavit : inflammavit ; echidnis : mortalibus. 314 una : scilicet Aletho ; parentem : patrem.
X 315
Maius scelus, quasi dicat : ‘Amare ita illicite patrem est maius scelus quod habere illum in odio’.
315-316*
315 hic : illicitus ; leti : electi vel gaudentes. 316 proceres : barones.
X 317-318
Quasi diceret : ‘In omnibus temptantibus non est quem velles capere, imo solum patrem’.
311 amas ex amato ms. | 313* Stigio] Tetigio exTegtigioms. | 317-318 temptantibus] tempetentibus ms.
689X 310
Dum ferat Panchaia (« tandis que la Panchaïe produit ») la myrrhe, c’est-à-dire de la même façon que les autres espèces citées plus haut, tanti (« aussi cher »), autrement dit : « Nous préférons manquer de myrrhe et des autres espèces plutôt que d’avoir ou d’avoir eu récemment la myrrhe avec les autres plantes citées plus haut, elle qui fut métamorphosée pour un crime si honteux. »
X 311
Ipse negat (« Lui-même nie »). On pourrait dire : « Pourquoi éprouves-tu un tel amour, Myrrha ? » et elle pourrait répondre : « Cupidon me contraint à l’éprouver ». L’auteur résout le problème en disant au contraire : « Lui-même nie… ».
X 313-314
Amour de Myrrha pour son père
À noter.
X 315
Maius scelus (« un crime plus grand »), autrement dit : « Aimer ainsi son père de façon interdite est un crime plus grand que de le haïr ».
X 317-318
En d’autres termes : « Parmi tous ceux qui te recherchent il n’en est pas un que tu voudrais épouser, sauf seulement ton père. »
690317-319*
317 adest : venit ; omnibus : petentibus ; unum : solum. 318 Mirra : ‘o’ ; virum : maritum ; unus : aliquis. 319 quidem : certe ; sentit : percipit ; fedoque : pravo et.
X 320
Et secum. Mirra, senciens amorem suum illicitum, et contra iuris leges redarguens se, et castigans se tali amore, ait secum, idest intra se : ‘Quo’, idest ad quod facinus, ‘feror mente’.
320-321*
320 et : ait ; quo : amore ; mente : in. 321 Dii : ‘o’ ; precor : vos ; pietas : ‘o’ ; -que : et ; iura : ‘o’ ; parentum : patrum.
|f. 134r|
X 322-323
Repugnatio Mirre ne patrem illicite amaret
Si tamen, quia dixerat : ‘Sceleri resistite nostro’ ; redarguens se de eo quod dixerat, dicit : ‘Si hoc est scelus’.
322-324*
322 prohibete : removete a me ; scelerique : pravitati mee. 323 tamen : ita dico ; dampnare : castigare. 324 hanc : talem ; coeunt : iunguntur.
X 325-326
‘In patre cur pecco ? Nec peccat sic equus equo : / ipsa creatur equo, coniunx equa iure fit equo’.
325-326*
325 cetera : ab homine ; delicto : peccato ; iuvence : vace. 326 patrem : taurum ; tergo : suo ; filia : equa.
X 327
Quasi dicat : ‘Equus, bos, caper, aves coeunt sine peccato. O, quam felices sunt isti’.
320 se2] te ms. quod] quem ms. mente]mentemms. | 322* mee] me ms. | 325-326 In patre […] fit equo] unde versus add. m.d. eadem manus
691X 320
Et secum (« et à elle-même »). Myrrha, comprenant que son amour est défendu, et s’opposant à elle-même les règles du droit, se châtiant d’un tel amour, dit secum (« à elle-même »), c’est-à-dire intérieurement : « Quo (« où »), c’est-à-dire à quel forfait, feror mente (« suis-je emportée par ma passion ») ? »
|f. 134 r|
X 322-323
Myrrha résiste à l ’ amour défendu pour son père
Si tamen (« si toutefois »), autrement dit : « Opposez-vous à mon crime », mais, argumentant elle-même contre ce qu’elle venait de dire, elle ajouta « si toutefois c’est un crime ».
X 325-326
« Pourquoi est-ce un péché quand il s’agit de mon père ? Le cheval ne commet pas de péché en aimant ainsi un cheval : / la jument naît elle-même d’un cheval, et devient à bon droit la compagne de ce cheval. »
X 327
En d’autres termes : « Le cheval, le bœuf, le bouc, les oiseaux s’unissent sans péché. Ô comme ils sont heureux ! »
692327-328*
327 quas : pecudes ; pecudes : capras. 328 concepta : generata ; illo : semine.
X 329-331
Humana cura, idest homines curiosi, instituerunt leges malignas eo quod quiscomque non potest facere velle suum.
329-333*
329 felices : illi ; ista : supradicta ; malignas : pravas. 330 quod : illud ; remittit : concedit. 331 invida : invidiosa ; negant : fieri ; Gentes : aliquas ; feruntur : dicuntur. 332 quibus : gentibus ; et : etiam ; nato : suo ; genitrix : mater iungitur ; nata : filia ; parenti : patri. 333 iungitur : per cohitum ; pietas : illorum ; geminato : scilicet.
X 334
‘Quia non solum ex affectu meo et libidine, sed ex diversitate loci, quia in partibus supradictis essem, non modo vulnerarer, quod secundum mores patrie operarer’.
334* Me : dico ; miseram : esse ; quod : ideo ; contigit : mihi ; illuc : in illis gentibus.
X 335
Modo se corrigit ab prava cogitatione vel forte secom loqutione. Dignus (336) : ‘Quamvis non esset pater, deberem amare’ ; et pater est : ‘Ego forcius amabo, quia dignus et pater est’.
335-338*
335 fortuna : per dispositionem ; Quid : quare ; ista : mala. 336 Spes :‘o’ ; interdicte : prave ; discedite : a me. 337 -que : etiam ; pater : meus. 338 essem : ego ; concombere : per stuprum.
X 339-340
De Mirra
‘Com meus es, meus es, pater ens ; ut amasius ergo / tu, quoniam meus es, non meus esse potes’.
693X 329-331
Humana cura (« Les inquiétudes des hommes »), c’est-à-dire les hommes inquiets, ont institué des lois méchantes puisque personne ne peut faire ce qu’il veut.
X 334
« Parce que, en me comportant conformément aux mœurs de ma patrie, je souffrirais non seulement de mes sentiments et de mon désir, mais aussi de savoir que la situation diffère selon les lieux, parce que je pourrais être dans les régions mentionnées ci-dessus. »
X 335
Maintenant elle se réprimande pour ses pensées dépravées ou peut-être pour ce monologue. Dignus (« digne ») : « Même s’il n’était pas mon père, je devrais l’aimer », et pater est (« mais il est mon père ») : « Je l’aimerai encore plus, parce qu’il en est digne et parce qu’il est mon père. »
X 339-340
Myrrha
« Alors que tu es mien, tu es mien parce que tu es mon père ; donc comme amant, parce que tu es mien, tu ne peux pas être mien. »
339 essem (« je serais ») : pour obtenir de coucher avec lui.
694339-341*
339 meus : pater ; meus : letatio ; -que : quia. 340 proximitas : generosa ; aliena : non filia ; essem : ad petendum concubitum. 341 Ire : pergere ; libet : placet ; procul : longe ; -que : libet ; fines : regiones.
X 342-344
ardor ] ‘ Pravus et valde illicitus, ut concombam com meo patre, et spectem, et tangam’.
342-344*
342 dum : quoadusque ; scelus : hoc ; tunc : nunc ; ardor : amor. 343 presens : ego ; spectem : videam ; Cynaram : patrem meum ; tangam : illum ; loquar : secom. 344 admoveam : addam ; conceditur : aliud ; ultra : ‘quod vellem, scilicet cohitum luxuriosum’.
X 345
Ultra, quia dixerat : ‘Tangam, loquar, basiam, nil plus ceditur’. Modo se corrigit : ‘Ha, quid possum sperare aliud a supradictis ? Nomquid volo meretricari ?’, et loquitur in secunda persona ad se, quasi ad aliam, eo quod demonstret mentis sue alienationem.
345-348*
345 Ultra : plus ; aliquid : cohitum ; impia : prava. 346 quod : nonquid ; confundas : adnichilas ; nomina : parentum ; sentis : precipis. 347 -ne : nonquid ; matris : tue ; adultera : meretris. 348 soror : eris ; nati : tui ; genitrix : mater.
X 349
Infernales sorores dicuntur crinari serpentibus, ut demonstretur terribilitas et crudelitas et pena earum.
349-352*
349 Nec : nonquid ; metues : timebis ; sacro : execrabili ; crinitas : capillatas. 350 quas : sorores ; facibus : ignibus. 351 noxia : peccantia ; tu :‘o Mirra’. 352 nephas : peccatum ; animo : tuo ; neve : non.
339* letatio] letio ms. | 349 pena] penas ms.
695X 342-344
ardor (« l’ardeur »)] « C’est un acte dépravé et tout à fait défendu, de coucher avec mon père, de le regarder, de le toucher ».
344 ultra (« davantage ») : ce que je voudrais, à savoir une union charnelle.
X 345
Ultra (« davantage »), parce qu’elle avait dit : « Le toucher, lui parler, l’embrasser, il n’est rien permis de plus. » Maintenant elle se corrige : « Hélas, que puis-je espérer d’autre que cela ? Est-ce que je veux me conduire comme une prostituée ? », et elle se parle à la deuxième personne, comme si elle parlait à une autre, parce qu’elle cherche à démontrer sa folie à son propre esprit.
X 349
Les sœurs infernales sont, dit-on, coiffées de serpents, pour représenter leur aspect terrible et cruel, et leurs tourments.
- Thème CLIL : 3438 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques -- Moyen Age
- ISBN : 978-2-406-12885-4
- EAN : 9782406128854
- ISSN : 2261-0804
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-12885-4.p.0622
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 13/07/2022
- Langue : Français