Comptes rendus
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Revue Verlaine
2023, n° 21. varia - Auteurs : Degott (Bertrand), Dupas (Solenn)
- Pages : 223 à 231
- Revue : Revue Verlaine
Guy Goffette, Verlaine, Paris, Buchet/Chastel, Libella, coll. « Les Auteurs de ma vie », 2021, 186 p.
D’un livre à l’autre, le poète Guy Goffette brûle de saisir et d’exprimer son attachement à Verlaine, ce qui lui paraît nouer entre elles leurs vies autant que leurs poésies. « Je fus longtemps moi aussi exposé à l’errance, écrit-il dans Partance et autres lieux (2000), jusqu’à ce qu’un poète, mort il y a un siècle et des poussières, Verlaine, ce fils prodigue de l’Ardenne et de la pluie, me ramène au pays des loups gris, des sapins bleus et du tabac. » Alors, comme toutes ces choses qu’on aimerait dire avoisinent l’indicible, les livres se suivent et ne sont chaque fois ni tout à fait le même ni tout à fait un autre1. « Ce qu’il aura fallu de temps pour que je me convertisse à Verlaine, renchérit-il dans L’Autre Verlaine, combien d’errances, d’errements, de ciels perdus, de pluies, de larmes avant que le vieil Ardennais d’exil me rende à ma terre d’enfance avec le fil du cœur et le sens de ma route, je n’en reviens toujours pas. » Le réenracinement grâce à Verlaine devient conversion à et par Verlaine, mais toujours comme on relate une rencontre d’autant plus essentielle qu’elle est tardive : de celles qui donnent envie de poser ses valises et d’entrer. « Verlaine est entré dans ma vie comme la foudre dans une maison fermée, écrit-il ici. J’avais plus de quarante déjà et je me dis souvent que c’est une chance d’entrer dans une œuvre pareille à cet âge-là » (p. 10 et 11). Les modalités de l’échange sont ainsi clairement définies : entrer dans une œuvre poétique, d’autant qu’on est soi-même poète, revient à laisser entrer ce poète dans sa vie. « Les auteurs de ma vie » ne sont-ils pas, non seulement les écrivains qui jalonnent ma vie, mais ceux aussi qui contribuent à la constituer, tous ceux qui la construisent, qui l’orientent et la meublent ? Au début de l’aventure en quelque sorte (au plus près de sa rencontre avec Verlaine2), Goffette avait écrit un Verlaine 224d’ardoise et de pluie pour la collection « L’un et l’autre », laquelle collection ambitionnait d’offrir « des récits subjectifs, à mille lieues de la biographie traditionnelle ». Après ce Verlaine d’ardoise et de pluie, biographie romancée du poète, après L’Autre Verlaine, suite de récits où l’autobiographique se mêle au biographique, le présent titre Verlaine augurerait-il d’un renoncement à la subjectivité ? Ne nous y trompons pas, cette sobriété est imposée par la collection où voisinent rééditions composites (Schopenhauer par Thomas Mann, Virgile par Jean Giono) et œuvres originales récentes (La Fontaine par Jacques Réda, Dostoïevski par Julia Kristeva). En tout état de cause, ce qui est écrit n’étant plus à écrire, Goffette peut ici en réinvestir la matière avec la distance des ans ; et c’est ce qu’il fait fort bien dans une première partie de l’ouvrage intitulée « Comme un coquelicot dans le brouillard ». « Verlaine : c’est fragile et allumé comme un coquelicot dans le brouillard » : cette citation de Claudel figurait déjà en épigraphe de Verlaine d’ardoise et de pluie, mais qu’elle paraisse à ce point séduisante – faite d’une comparaison familière coulée en deux décasyllabes – suffit-il à en assurer la pertinence ? En « Ouverture » (9-16), Goffette rapporte le souvenir d’un écolier qui, en deuil de sa mère, lui avait récité avec beaucoup de conviction « – Ah ! Seigneur, qu’ai-je ? Hélas ! me voici tout en larmes » ; et lui de résumer alors l’homme et l’œuvre à ce vers de Sagesse et à cet instant d’émotion. Pour lui, Verlaine, c’est le « pauvre Verlaine » (10), « le chemineau Verlaine » (11), « un enfant qui ne savait pas grandir » (15), « le premier poète de son temps à avoir mis absolument son “cœur à nu” » (id.), vision réductrice qui le porte à affirmer que « la vulgarité le dégoûtait plus que tout » (id.), et ce contre une bonne partie de l’œuvre, même si chacun est en droit d’estimer qu’elle n’est pas la meilleure. Tout aussi discutable, et témoignant vraisemblablement de mauvais souvenirs scolaires : « Avec Verlaine, il n’y a guère moyen d’échapper à la biographie. Sauf à se perdre dans l’étude et l’analyse de textes. Tâche souvent desséchante, surtout dans le cas d’un poète aussi souple, limpide et musical que lui. » (id.) Ne pourrait-on porter au crédit de la critique récente qu’elle n’élude pas la biographie de Verlaine et, surtout, qu’elle dissuade de figer ce poète dans des stéréotypes tels que « souple, limpide et musical » ? Mais sans doute s’agissait-il aussi pour l’auteur d’annoncer une deuxième sous-partie proprement biographique, « Opéra » (17-65), où il entraîne son lecteur, suivant dix-sept stations, depuis la naissance du poète jusqu’à 225sa mort. À mi-parcours, arguant de l’écho bien connu que « Mort ! » rend à « La Mort », il donne à ce « fait troublant » une portée prophétique : « Surgi au beau milieu d’une série de biblio-sonnets, qu’il interrompt et laisse inachevée, ce poème encadrera, avec la pièce dédiée à Hugo, une vie et une œuvre entièrement vouées à la rêverie et à la sensation » (26), quitte à occulter à la fois le contenu de ces pièces, la rouerie et toutes les stratégies de reconstruction qui sous-tendent l’œuvre. Tel serait en quelques traits le Verlaine que se figure Goffette : sa sélection de poèmes est à l’avenant. En quoi ce Verlaine se distingue des deux précédents, c’est qu’au lieu d’entretisser la parole du poète à la sienne, Goffette propose ici, en accord avec les exigences de la collection, un choix anthologique. C’est l’occasion d’une seconde partie intitulée « Poésies choisies » (67-180). Notre intention n’est pas de contester ces choix, dont éditeur et lecteurs attendent qu’ils confirment l’image du poète qu’a laissée la première partie de l’ouvrage, ce cheminement « souple, limpide et musical », parmi les ardoises et la pluie, dans un pays d’enfance et de brouillard d’où l’on rapporte des coquelicots. Pour autant, il n’est pas impossible d’interroger les partis pris qu’ils affichent. Suivant l’ordre chronologique, les poèmes sont pour l’essentiel extraits de quatorze des recueils principaux (de Poëmes saturniens à Invectives). Deux sections s’y trouvent néanmoins ajoutées. Deux « Poèmes de jeunesse », au tout début, censés montrer que « sous les maladresses, la voix limpide et musicale du poète se fait jour » (69). Deux « Vieilles “Bonnes Chansons” », tout à la fin, qui, outre qu’elles furent en effet publiées très tard (dans les Confessions de 1895), confirment la propension de Goffette au bucolisme : aussi lui fallait-il en écarter les deux quintils « Tu parles d’avoir un enfant / Et n’as qu’à moitié la recette, etc. » (OPC, 157). « Élégiaque, écrit-il de La Bonne Chanson, cette poésie, boudée par la critique, est simple, spontanée et d’une sincérité ingénue » (89). L’éloge n’était pas moindre dans la partie biographique : « La Bonne Chanson coule de source, fraîche et limpide, pareille à la voix d’un enfant qui demande un baiser » (34). Sur les vingt et un poèmes du recueil, il en conserve huit, autant que sur les vingt-deux de Fêtes galantes. De ce dernier recueil, en revanche, il ne garde pas plus « Le Faune » que – et c’est tant pis pour Rivette ! – « L’Amour par terre », de crainte peut-être qu’ils n’en accusent trop fort la dissonance et ou qu’ils n’annoncent trop vite « La Dernière Fête galante » (laquelle ne figure pas davantage parmi 226les extraits de Jadis et Naguère). De Dédicaces, Goffette ne retient que quatre sonnets, dont les deux « À Arthur Rimbaud ». Si l’on sait que le premier des deux, publié dans Le Chat noir deux ans avant la mort du dédicataire, n’est pas dans l’édition de 1890, peut-on sans rire présenter ce recueil comme « un touchant mémorial de l’amitié » ? Il est vrai que Verlaine, dans la réédition de 1894, « joue d’une grande variété de tons et de thèmes », mais est-ce uniquement pour « célébrer ses amis » (159) ? Est-il enfin besoin de préciser que l’anthologiste n’a rien retenu, ni des poèmes de l’Album zutique ni du reliquat de Cellulairement, occultant ainsi plus généralement la dimension politique de l’œuvre et ce qu’elle peut contenir de subversif dans sa dimension parodique (voire auto-parodique). Il ne nous dit pas grand-chose non plus du versificateur, ce qui reste tout de même l’une des spécificités de Verlaine. Les textes n’en sont pas moins reproduits et typographiés correctement : à l’exception d’« À Clymène » (84-85) toutefois, dont la polymétrie est pourtant moins complexe que celle de « Chanson d’automne » ou de « Colombine » mais qui souffre d’être ici entièrement justifié à gauche. D’un livre à l’autre, le lecteur vétilleux a pu se demander si Goffette accentue ou non l’e de « Pauvre Lelian », mais il finit tout de même par conclure que la forme exacte, uniquement dans L’Autre Verlaine, n’était due qu’à une relecture attentive. Il ne s’agit là, bien sûr, que de quelques bémols, altérations indissociables du « mode mineur », qui n’enlèvent rien à cet ouvrage : Goffette y montre assez sa connaissance de l’œuvre et de la biographie – mais s’y renouvelle aussi suffisamment – pour en justifier l’incandescente nécessité.
Bertrand Degott
227*
* *
Verlaine, Poèmes saturniens, Fêtes galantes, Romances sans paroles,notes, questionnaires et dossier par Véronique Brémond-Bortoli, Paris, Hachette, coll. « Bibliolycée », 2022, 208 p.
La collection « Bibliolycée » éditée par Hachette propose aux jeunes lecteurs des « clés pour comprendre l[es] œuvre[s] », en vue notamment de les aider à préparer les épreuves de français du baccalauréat. C’est dans cette perspective que le présent volume publie trois des premiers recueils de Verlaine, Poèmes saturniens3, Fêtes galantes et Romances sans paroles. Après une très brève introduction, il donne à lire chacun des ensembles de poèmes, accompagnés de quelques notes offrant des éclairages lexicaux et référentiels4. Six questionnaires fournissent en outre des pistes d’explication linéaire. Un dossier d’une trentaine de pages aborde ensuite la biographie de l’auteur, la structure des recueils et leur contexte de publication, avant d’évoquer les principales thématiques de l’œuvre et d’esquisser quelques prolongements artistiques et culturels. Enfin, une rubrique « spécial Bac » inclut un groupement de textes autour d’un parcours intitulé « poésie et sensation5 » ainsi que des sujets d’écrit6.
À travers ces apports, Véronique Brémond-Bortoli se propose de questionner la manière dont ces recueils contribuent au renouvellement de l’expression lyrique. Le recours à l’ironie, les jeux de masques, les 228procédés d’amuïssement voire d’effacement du « je », l’émergence d’une « petite manière » « en sourdine » au cœur de paysages-états d’âme « évanescents ou funèbres » (p. 9) sont notamment soulignés, de même que les échos à la chanson, ou encore l’art de la dissonance et de « l’exprès trop simple » (p. 185). Si ces axes s’avèrent dans l’ensemble pertinents, on regrettera cependant que les commentaires reconduisent un certain nombre de stéréotypes et d’analyses discutables.
« Le poète, lit-on par exemple dans le dossier à propos de la fameuse musicalité verlainienne, préfère employer les consonnes douces : on trouve peu d’occlusives dans ses vers, mais beaucoup de liquides (l, r) ou de fricatives (sifflantes, chuintantes…) qui produisent une harmonie beaucoup plus fluide » (p. 188). Ces remarques fondées sur la lecture de quelques pièces en particulier ne résistent guère à une approche élargie de l’œuvre, dans sa diversité. Sans surprise d’ailleurs, les six poèmes retenus pour mettre en œuvre des exercices d’étude linéaire7 font partie des textes les plus souvent convoqués dans les anthologies, parce qu’ils illustrent des versants familiers de la poétique verlainienne orientés vers l’évanescence, le vague et la sensation. Ce choix confirme une difficulté tenace à embrasser l’hétérogénéité et, dans une certaine mesure, la complexité de l’œuvre.
Certaines analyses métriques proposées dans cette édition posent également question. Véronique Brémond-Bortoli illustre certes à bon escient quelques manifestations de l’« un peu déjà libre versification » (« Critique des Poèmes saturniens ») revendiquée par Verlaine, en notant par exemple l’inversion de l’ordre des quatrains et des tercets dans « Résignation », la « rime orpheline » de l’ariette III et les rimes isosexuelles de l’ariette IV. En revanche, parler d’une « dislocation du vers » dans « Charleroi » (p. 191) ou de « vers » « brisés » dans l’ensemble de la section « Paysages belges » (p. 170) ne semble pas aller de soi. Bien qu’elles aient été largement discutées par les métriciens et les spécialistes de Verlaine8, les caractéristiques prétendument intrinsèques de l’impair occupent de plus une large place dans ces commentaires. 229L’hendécasyllabe, dans « l’Ariette IV », soulignerait « la confusion des sentiments » grâce à son « instabilité glissante » (p. 187). Plus largement, les analyses invoquent l’« absence de symétrie » des vers impairs, censée créer « une impression [de] flou » et de vague, mais aussi de « légèreté », « [de] déséquilibre, [de] doux-amer […] » (p. 120).
De nombreux éléments de contextualisation littéraire manquent d’autre part de précision dans le volume. Les Parnassiens, est-il noté en fin d’ouvrage, cultivent « la forme pure, “l’Art pour l’Art” (comme le prône Théophile Gautier) », « [s]ans message philosophique ou politique » (p. 176). Le « Prologue » des Poèmes saturniens est dès lors résumé à une « Inspiration parnassienne », et l’« Épilogue » à un « Credo parnassien : culte du Beau, rejet de l’Inspiration pour le Travail et la Volonté » (p. 168). Si Véronique Brémond-Bortoli ajoute qu’il est parfois difficile de cerner dans ces pièces « la limite entre fidélité et pastiche », « le goût de l’archaïsme », « ou de l’orientalisme », « fris[ant] quelquefois la parodie » (p. 181), elle présente dans l’ensemble les premiers recueils comme un parcours permettant à Verlaine de « se libérer de l’influence […] du Parnasse, pour inventer un nouveau lyrisme » (p. 8). Il serait utile de préciser que pour le poète, cette mouvance relève d’abord d’une nébuleuse constituée de personnalités créatrices diverses. C’est à ce titre qu’il participe au Parnasse, tout en manifestant une certaine distance à l’égard de ses représentants les plus doctrinaires9.
Pour illustrer l’importance de l’héritage baudelairien, évoqué de façon très rapide dans l’ouvrage, quelques exemples d’échos intertextuels aux Fleurs du Mal auraient été bienvenus. On pourrait également signaler que l’art de la répétition, particulièrement à l’œuvre dans la section « Paysages tristes » des Poèmes saturniens,doit beaucoup à l’intérêt que le jeune Verlaine porte à la poétique de son aîné. À ce propos, signalons 230que l’expression « jérémiades lamartiniennes » est attribuée à Baudelaire dans le dossier final (p. 176), alors qu’elle est employée par Verlaine dans son étude sur « Charles Baudelaire » (L’Art, 186510).
Si les références aux Vilains Bonshommes et au Cercle zutique sont tout à fait opportunes dans les repères mis à disposition des lecteurs (p. 177), les apports consacrés au Symbolisme seraient quant à eux à vérifier. À plusieurs reprises, la commentatrice sous-entend en effet que ce courant est contemporain de la publication des trois recueils ici présentés. Il ne se mettra cependant en place qu’au milieu des années 188011, soit une douzaine d’années après la parution des Romances sans paroles. Selon Véronique Brémond-Bortoli, les recherches que Verlaine conduit sur « la sensation et l’impression, sur l’autonomie du mot poétique, dégagé des codes explicites du langage, sur la syntaxe, les formes métriques et la musicalité rejoignent celles des poètes symbolistes comme Rimbaud et Mallarmé qui l’ont considéré comme leur chef de file » (p. 181). Non seulement ces deux poètes ne peuvent être assimilés à des Symbolistes revendiqués, mais suggérer que Rimbaud et Mallarmé auraient pu considérer Verlaine comme leur « chef de file » dans le cadre de cette école s’avère franchement problématique.
L’ouvrage ne prétend pas s’attarder sur les enjeux socio-politiques de l’œuvre. La censure en vigueur sous le Second Empire (p. 175) et les « sympathies » du poète pour la Commune sont rapidement évoquées (p. 172), mais ces éléments de contexte ne sont pas pris en compte dans l’analyse des poèmes. Les audaces morales que ces recueils recèlent sont en revanche davantage soulignées par Véronique Brémond-Bortoli. La rubrique dédiée aux « Thèmes principaux » de l’œuvre n’élude pas la place que Verlaine accorde à l’expression du désir, dans « le dévoilement de l’interdit […] ou dans le sous-entendu » (p. 189). Sur ce plan, certains éléments auraient néanmoins pu être précisés. Difficile par exemple de s’en tenir à une définition du « faune » comme divinité « champêtre » « protect[rice] des troupeaux » (p. 111), sans préciser que cette figure évoque également « l’espièglerie libidineuse, la lubricité12 ». À propos des suggestions homosexuelles mises en lumière dans l’ariette IV, il serait 231en outre intéressant d’évoquer Les Amies,cette plaquette de six sonnets en rimes entièrement féminines que Verlaine publie clandestinement fin décembre 1867, chez l’éditeur belge Poulet-Malassis.
Dans cette édition conçue pour un lectorat lycéen, la représentation du poète et de son œuvre reste finalement assez largement empreinte de stéréotypes. Les repères biographiques qui concluent l’ouvrage présentent ainsi la trajectoire personnelle et la création de Verlaine sous le signe d’une inéluctable « dégrad[ation] » (p. 173). L’image d’un poète marqué par l’âge sous-tend d’ailleurs en creux l’ensemble du volume. De façon significative, des portraits de Verlaine réalisés à la fin de sa vie sont en effet privilégiés pour illustrer les textes de Poèmes saturniens, Fêtes galantes et Romances sans paroles. « Nevermore » (II) est accompagné d’une illustration de Cazals intitulée « Paul Verlaine dans un paysage hivernal », réalisée entre 1886 et 1898 (p. 63). De même, la photographie du poète par Otto (p. 6), dont la date n’est pas mentionnée en légende, a été réalisée en 1893, soit près de vingt ans après la publication des Romances sans paroles. Afin d’actualiser cette iconographie, il aurait été intéressant de reproduire par exemple l’un des portraits du poète récemment retrouvés, qui le montrent âgé d’une vingtaine d’années13.
Pour conclure, quelques ressources bibliographiques actualisées auraient été bienvenues dans les dernières pages de l’ouvrage, même si celui-ci ne se présente pas comme une édition critique dotée d’ambitions scientifiques. En fin de volume, un site est signalé par Véronique Brémond-Bortoli (http://paul-verlaine.net), mais ce dernier est désormais inaccessible. Tout en mesurant les contraintes qu’implique la prise en compte des besoins du public lycéen, on pourra regretter en définitive que cette édition n’exploite pas davantage les apports des travaux de recherche engagés depuis plusieurs décennies autour de ces recueils de Verlaine, au moment d’inviter les jeunes lecteurs à les découvrir.
Solenn Dupas
1 Voir, du même auteur, Verlaine d’ardoise et de pluie (Paris, Gallimard, coll « L’un et l’autre », 1995) et L’Autre Verlaine (Paris, Gallimard, 2008).
2 Dans son récit éponyme « L’Autre Verlaine », Goffette situe sa rencontre avec Verlaine (à Trois-Rivières, au Québec et dans l’édition de la Pléiade) en 1991, soit quatre ans avant son Verlaine d’ardoise et de pluie.
3 La graphie Poëmes saturniens n’est pas retenue dans l’ouvrage.
4 Certaines de ces notations auraient pu être précisées, ponctuellement. La référence aux « fils de Raghû », dans le « Prologue » des Poèmes saturniens, est par exemple expliquée par l’intérêt que Verlaine portait aux « grandes œuvres de la mythologie hindoue, comme le Ramayana ou le Mahabharata » (p. 13). Il conviendrait d’ajouter que loin de relever d’un engouement personnel, cette prédilection était partagée par un certain nombre de contemporains, dont Louis-Xavier de Ricard et Leconte de Lisle, entre autres.
5 Ce groupement de textes inclut des poèmes de Baudelaire (« Correspondances »), Laforgue (« Complainte d’un autre dimanche »), Rimbaud (« Aube ») et Apollinaire (« Nuit rhénane »).
6 Dont un sujet de dissertation invitant à discuter l’analyse de Jean-Michel Maulpoix, selon laquelle la poésie de Verlaine traduit « les infinies ou indéfinies nuances de la vie intérieure, plutôt que des idées ou des sentiments » (La poésie malgré tout,Paris, Mercure de France, 1996).
7 Les poèmes accompagnés d’un questionnaire d’étude linéaire sont les suivants : « Mon rêve familier » et « Chanson d’automne » (Poèmes saturniens) ; « Clair de lune » et « En sourdine »(Fêtes galantes), l’ariette III « Il pleure dans mon cœur… » et « Charleroi » (Romances sans paroles).
8 Sur ce point, voir en particulier Benoît de Cornulier, « Mètre “impair”, métrique “insaisissable” ? Sur les derniers vers de Rimbaud », dans Marc Dominicy (dir.), Le souci des apparences, Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 1989, p. 75-91 et Steve Murphy, Poëmes saturniens,Paris, Honoré Champion, 2008,p. 365-368.
9 Comme le rappelle Steve Murphy, « le Parnasse était bien davantage à ses débuts une nébuleuse qu’une école. Cette conclusion, banale certes, a l’avantage de mettre en relief le caractère inopérant de beaucoup de représentations du Parnasse qui sélectionnent une image où Verlaine, notamment, se trouve immédiatement exclu, comme s’il était d’emblée entré en contradiction avec les principes du mouvement. Car il faudrait d’abord saisir le manque de principes consensuels, ou pour mieux dire la surabondance de principes hétérogènes et inégalement partagés, du Parnasse de 1866-1870. Ce qui permet de comprendre comment Verlaine se situe à l’intérieur de cette nébuleuse » (Marges du premier Verlaine,Paris, Honoré Champion, 2003, p. 88-89.)
10 La datation de « L’Amour au théâtre italien » serait d’autre part à corriger : la période de création de cette toile de Watteau est 1715-1717, et non 1515-1517 (p. 124).
11 On pourrait faire la même remarque pour le courant de la Décadence évoqué dans l’introduction, à propos d’une période allant de 1866 à 1874 (p. 10).
12 Trésor de la Langue Française informatisé. L’acception érotique du terme « coquillages » pourrait aussi être signalée dans le poème des Fêtes galantes dédié à ce trouble objet. (Alfred Delvau, Dictionnaire érotique moderne,Paris, 10/18, 1997 [1864], p. 161 : « Coquille : la nature de la femme ».)
13 Voir Bernard Bousmanne, Elena Savini, « Sur les clichés dévoilés à Lécluse. Paul et Élisa en images », RV16,2018, p. 17-38.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-16573-6
- EAN : 9782406165736
- ISSN : 2426-8860
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-16573-6.p.0223
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 20/03/2024
- Périodicité : Annuelle
- Langue : Français