Le contexte archéologique et historique de la mission de l’apôtre Paul à Philippes
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Revue d’Histoire et de Philosophie Religieuses
2019 – 2, 99e année, n° 2. varia - Auteur : Brélaz (Cédric)
- Pages : 255 à 291
- Revue : Revue d'Histoire et de Philosophie religieuses
Le contexte archéologique
et historique de la mission
de l’apôtre Paul À Philippes1
Cédric Brélaz
Université de Fribourg – Institut
du monde antique et byzantin
À Pierre Ducrey pour son 80 e anniversaire
De toutes les villes qui furent visitées par Paul lors de ses missions apostoliques en Asie Mineure et en Grèce, Philippes est, avec Éphèse, Corinthe et naturellement Athènes, celle qui nous est le mieux connue. Le site archéologique de Philippes est maintenant exploré systématiquement depuis plus d’une centaine d’années, les premières fouilles ayant débuté peu avant la Première guerre mondiale à l’initiative de l’École française d’Athènes et le centre monumental de la ville antique ayant pu être dégagé dès l’entre-deux-guerres2. Depuis les années 1950, la Société archéologique d’Athènes, les services archéologiques grecs et l’Université de Thessalonique se sont efforcés, parallèlement aux travaux de l’École française d’Athènes, de poursuivre la fouille et l’étude du site. Les efforts conjugués de ces institutions se sont vus couronnés en 2016 par l’inscription du site archéologique de Philippes au Patrimoine mondial par l’unesco, reconnaissant ainsi l’importance du site et, en particulier, le rôle déterminant qu’il joua dans l’essor 256du christianisme en Grèce et, plus généralement, sur le continent européen, aussi bien durant la génération apostolique qu’au cours de la période protobyzantine (ive-vie siècle).
Au cours de ces explorations archéologiques, des centaines d’inscriptions grecques et latines (épitaphes, dédicaces architecturales et votives, inscriptions honorifiques) furent découvertes, la plupart datant des trois premiers siècles de notre ère, autrement dit de l’époque où Philippes était une colonie romaine3. Or, ce riche matériel nous renseigne directement sur les institutions politiques, la société et les cultes de la ville antique tout au long des premières décennies d’existence de la communauté chrétienne fondée par Paul. Philippes est, de ce fait, avec Corinthe (dont les origines et le faciès social et culturel sont néanmoins profondément différents), la colonie romaine établie dans une province hellénophone de l’Empire pour laquelle la documentation archéologique et épigraphique est la plus abondante. Le contraste est saisissant avec Antioche de Pisidie notamment, une autre colonie romaine d’Orient – située en Anatolie centrale – qui reçut, elle aussi, la visite de l’apôtre, dont le site n’a été qu’imparfaitement fouillé et dont la documentation épigraphique, dispersée dans la bibliographie, n’a pas encore été réunie. La situation paraît donc extrêmement favorable à Philippes pour se pencher sur le contexte archéologique et historique de la mission paulinienne.
L’attention accordée aux realia et aux contextes locaux de l’action et de la prédication de Paul constitue une dynamique importante au sein de la recherche néotestamentaire contemporaine, en particulier de tradition protestante. C’est ainsi que de nombreuses études ont été consacrées depuis une vingtaine d’années à l’une ou l’autre séquence des Actes des Apôtres ou aux Épîtres pauliniennes, en se départissant d’une perspective exclusivement exégétique et en intégrant les données issues de la recherche historique et archéologique4. Cette évolution de la recherche – qui entend croiser les approches exégétique et narratologique, d’un côté, historique et archéologique, de l’autre, et qui promeut un dialogue entre des 257disciplines qui se sont pendant trop longtemps ignorées – est très réjouissante et profitable pour l’étude du christianisme primitif. Dans le cas de Corinthe, par exemple, plusieurs volumes, coordonnés par Steven Friesen et Daniel Schowalter, réunissant exégètes, archéologues et historiens ont permis de reconstituer finement les conditions matérielles, politiques, sociales, économiques, culturelles et religieuses de la ville au milieu du ier siècle ap. J.-C. et, par conséquent, de mieux saisir l’environnement dans lequel le culte chrétien a pu commencer à s’implanter5. La série The First Urban Churches, éditée par James Harrison et L. L. Welborn, dont quatre volumes ont maintenant paru (le dernier en date ayant été consacré justement à Philippes), se propose, de même, de dresser le portrait de chacune des principales villes où Paul a prêché, en tenant compte de la documentation archéologique et épigraphique ainsi que des orientations de la recherche historique actuelle6.
L’objectif de cette étude est, dans la lignée de ces travaux, de remettre la mission de Paul à Philippes – ou plutôt les missions, même si seule la première fait l’objet d’une narration détaillée dans Actes 16 – dans son contexte historique local, en envisageant l’action de l’apôtre au sein de la colonie romaine dans ses aspects à la fois matériels, politiques, sociaux, culturels et religieux. Pour ce faire, je confronterai la littérature néotestamentaire et le dernier état des sources archéologiques et épigraphiques à notre disposition. Il ne s’agira bien évidemment pas de vérifier le récit des Actes par les sources matérielles, une telle démarche étant méthodologiquement vaine, et il convient, en l’occurrence, d’être attentif à la dimension narratologique de l’œuvre, en distinguant ce qui peut relever d’une reconstruction de la part de l’auteur du récit, conformément à ses intentions apologétiques, et ce qui peut être admis comme une description factuelle des événements. Le but de cette lecture croisée des sources néotestamentaires et archéologiques est de reconstituer le milieu dans lequel les missions de Paul à Philippes ont pris place et la première communauté chrétienne a émergé. Cette approche avait déjà été celle des premiers archéologues et historiens de l’École française d’Athènes qui se sont intéressés dans l’entre-deux-guerres à la colonie romaine de Philippes, Paul Collart, membre suisse de 258l’École et professeur aux universités de Genève et de Lausanne, et Paul Lemerle, futur professeur d’histoire byzantine au Collège de France7. L’accroissement considérable de la documentation et le renouvellement de l’historiographie qui sont intervenus depuis ce moment invitent à reprendre ici la question.
Une brève histoire du site de Philippes :
de l’établissement thasien en terre thrace
à la colonie romaine d’Orient8
Le site de Philippes se situe à environ 150 km à l’Est de Thessalonique, dans une région qui, au sein de l’État grec actuel, correspond à la Macédoine orientale, mais qui, dans l’Antiquité, faisait partie de l’aire de peuplement thrace. Au cours de l’époque archaïque, les Grecs de l’île voisine de Thasos (provenant eux-mêmes originellement de Paros dans les Cyclades) établirent des comptoirs sur le continent, non seulement sur les côtes faisant directement face à leur île, mais également à l’intérieur des terres, plus à l’Ouest dans la vallée du fleuve Strymon ainsi que dans les environs du massif du Pangée, qui recelait des filons d’or et d’argent et commença à attiser également les convoitises des Athéniens à partir de la seconde moitié du vie siècle av. J.-C. En 360 av. J.-C., un établissement fut fondé sur le site de la future Philippes par des Thasiens menés par un exilé athénien du nom de Kallistratos. Cet établissement portait le nom de Krénidès, ce qui signifie « Les Petites sources » en grec, en référence certainement à l’une des caractéristiques naturelles du site qui avait été choisi. Celui-ci se trouvait à la lisière d’une large plaine (appelée aujourd’hui plaine de Drama, du nom de la principale ville située au nord du site archéologique) dominée par le massif du Pangée, culminant à 1956 m, à l’endroit où pouvait être contourné le marécage qui occupait toute sa portion méridionale et au pied d’une éminence qui appartenait aux contreforts de la chaîne de montagnes bordant 259la plaine en question à l’Est et qui fut utilisée comme acropole. Les habitants de cet établissement frappèrent des monnaies sur lesquelles ils s’identifiaient eux-mêmes comme « Les Thasiens du continent ».
Fig. 1 – Carte de la région de Philippes ; les pointillés délimitent
l’espace approximatif couvert par le territoire de la colonie de Philippes
(fonds de carte : G. Tirologos, ISTA [EA 4011],
Université de Franche-Comté).
L’existence de cette colonie thasienne fut de très courte durée. En 356 av. J.-C., dans un mouvement d’expansion de son royaume vers l’Est, qui le conduisit à annexer la Chalcidique et à prendre la colonie athénienne d’Amphipolis située à l’embouchure du Strymon, le roi Philippe ii de Macédoine, père du futur Alexandre le Grand, conscient des richesses du Pangée, conquit l’ensemble de la région. Krénidès fut alors rebaptisée Philippes (au pluriel, comme le toponyme précédent) du nom de son conquérant et sur le site fut fondée une cité en bonne et due forme, à la mode grecque. C’est de cette époque que datent plusieurs des vestiges monumentaux qui sont encore visibles aujourd’hui : l’implantation générale du site et son étagement en terrasses sur les pentes de l’acropole, les orientations 260du cadastre pourvu d’une trame orthogonale, le tracé du rempart et la construction du théâtre profitant de la déclivité du terrain sont tous des témoignages des travaux d’urbanisme effectués lors de la fondation de la ville par les Macédoniens. Depuis ce moment, Philippes vécut comme une cité grecque alliée au royaume de Macédoine, sans être formellement intégrée à celui-ci, du moins au cours des premières décennies de son existence.
À l’époque hellénistique avancée, Philippes était une ville d’importance secondaire en Grèce du Nord : elle n’avait pas la grandeur et l’aura de Thessalonique et les Romains, en 168 av. J.-C., lui avaient préféré Amphipolis en Macédoine orientale comme chef-lieu d’un des districts qu’ils avaient substitués au royaume antigonide après son abolition. C’est un événement fortuit qui permit à Philippes de connaître un renouveau. La ville de Philippes fut indirectement impliquée dans les guerres civiles romaines : c’est sous les murs de la ville, à mi-chemin entre l’Italie et l’Asie Mineure, que fut livrée en octobre 42 av. J.-C. la bataille décisive entre l’armée des républicains et assassins de César Brutus et Cassius, qui s’étaient retranchés en Orient, et celle des héritiers du dictateur, Antoine et Octave. Une fois la victoire remportée, Antoine, qui avait commandé l’armée césarienne, décida de profiter du vaste territoire environnant pour y installer les vétérans de la bataille, ses propres vétérans aussi bien que des soldats des légions vaincues, et y fonder une colonie romaine qui fut appelée la « Colonie victorieuse des Philippiens » en commémoration de son succès. Tout en contribuant à résoudre la crise agraire provoquée par la démobilisation massive de soldats auxquels il s’agissait d’attribuer des terres afin de les fixer, Antoine se ménageait, ce faisant, des clientèles en un endroit dont l’importance stratégique – Philippes étant située sur la principale voie de communication terrestre, la via Egnatia, qui reliait l’Italie, par-delà l’Adriatique et à travers la Macédoine, à l’Orient – ne lui avait pas échappé. Une dizaine d’année plus tard, après qu’Antoine fut à son tour défait par Octave lors de la bataille navale d’Actium en 31 av. J.-C., un nouveau contingent de colons, cette fois des civils italiens chassés de la péninsule pour avoir soutenu son rival, furent envoyés à Philippes par le futur Auguste. La colonie fut alors rebaptisée du nom d’Octave-Auguste et devint la « Colonie Julia Augusta des Philippiens ».
La création de la colonie romaine par Antoine eut pour conséquence immédiate l’abolition de la cité grecque préexistante 261et la dissolution de ses institutions politiques. Juridiquement, la colonie était considérée comme une partie de l’État romain au sein de la province de Macédoine : seuls les citoyens romains – dans ce cas, les colons militaires et civils qui y avaient été établis – jouissaient des droits civiques dans la nouvelle communauté politique ; la colonie fut dotée d’une charte émise par les autorités centrales romaines et d’institutions calquées sur le modèle de Rome ; enfin, le latin, au lieu du grec, devint la langue officielle de l’entité politique ainsi constituée. La population locale, faite de Grecs et de Thraces, dont les meilleures terres furent saisies au profit des colons romains, fut autorisée à demeurer sur le territoire de la colonie, mais reléguée au rang inférieur de résidents (incolae). C’est donc une communauté politiquement dominée par une élite de citoyens romains d’origine italienne, mais culturellement mixte (romaine, grecque et thrace), que l’apôtre Paul aborda lors de son premier voyage missionnaire en Macédoine en 49.
L’environnement matériel
de la mission de Paul à Philippes
Philippes n’était pas le but premier du voyage de l’apôtre. Lorsque, dans le récit des Actes (16,9-10), un « homme macédonien » apparaît en songe à Paul alors que celui-ci se trouve encore en Troade, c’est pour l’inviter à quitter l’Asie Mineure et à passer pour la première fois en Macédoine afin d’exporter l’Évangile sur le continent européen. Le trajet que suit Paul pour ce faire est conforme à ce que l’on sait des voies de communication entre le Nord-Ouest de l’Asie Mineure et la Macédoine à l’époque. Paul embarque à Alexandrie de Troade (elle aussi une colonie romaine d’ailleurs) pour effectuer la traversée, en contournant les îles de Samothrace et de Thasos, et arriver à Néapolis (aujourd’hui Kavala), ancienne colonie thasienne qui servait désormais de port à la colonie romaine de Philippes. Cela permettait, depuis la Troade, d’éviter un long détour pour rejoindre la via Egnatia à Byzance et surtout d’économiser le voyage par voie de terre à travers la Thrace. Après avoir débarqué à Néapolis, Paul emprunte, comme il se doit, la via Egnatia qui, en l’absence de route côtière, contournait le massif du Pangée par le Nord en 262coupant à travers la plaine où se trouvait Philippes (Actes 16,11-12). Son séjour à Philippes ne fut donc conçu par Paul que comme une halte sur son chemin qui devait le mener jusqu’à des villes où étaient établies des communautés juives avérées, à Thessalonique, à Béroia (Bérée), puis en Grèce méridionale à Athènes et à Corinthe, ce qui ne semble pas avoir été pas le cas à Philippes (voir infra). Malgré l’impression qui se dégage de la longueur de la séquence philippienne dans les Actes (16,12-40) – laquelle s’explique par la réunion d’épisodes marquants tels que la conversion de Lydia, l’exorcisme de la devineresse, l’arrestation et l’emprisonnement de Paul et Silas, leur libération miraculeuse –, la première visite de Paul dans la colonie ne dura que « quelques jours » (Actes 16,12). À en croire le récit des Actes (17,1), après son départ de Philippes, Paul ne fait que traverser la cité voisine d’Amphipolis, qui était pourtant une ville importante de Macédoine orientale, son objectif étant certainement alors de rejoindre au plus vite Thessalonique. D’un point de vue géographique, la mission de Paul s’inscrit dans un réseau de contacts à l’échelle d’une grande région s’étendant de l’Asie Mineure occidentale à Thessalonique par les Détroits et le Nord de la mer Égée. Cet espace correspond à la région dans laquelle la colonie de Philippes elle-même était intégrée économiquement : la majorité des villes avec lesquelles la colonie de Philippes et ses habitants étaient en relation sont comprises dans cette zone9. La position géographique avantageuse de Philippes et les circuits d’échanges dont elle était partie prenante expliquent le rôle de relais que la communauté paulinienne locale a pu jouer, du vivant de l’apôtre certes, mais encore au iie siècle, entre les premiers groupes chrétiens d’Asie Mineure et de Grèce10.
Lorsque Paul se rendit à Philippes pour la première fois, cela faisait plus de 90 ans que la cité grecque avait été transformée en colonie romaine. Toutes les traces matérielles n’en avaient pas été effacées cependant et il n’y eut pas, de la part des colons romains, de destructions systématiques des monuments antérieurs, comme on le voit avec le rempart et surtout le théâtre, qui fut conservé, quoiqu’avec des modifications. Les premiers remaniements du centre monumental de la ville sont postérieurs de plusieurs décennies à la fondation coloniale et remontent à l’époque augustéenne. Le premier plan d’envergure de restructuration urbanistique de 263Philippes ne date toutefois que de l’époque claudienne et est donc contemporain de la visite de Paul11. Un tel décalage, qui est ordinaire pour les colonies romaines d’Orient, est dû au fait que les premières générations de colons ne disposaient vraisemblablement pas des ressources suffisantes pour entreprendre des travaux de grande ampleur. Le centre monumental Philippes fut doté à ce moment des espaces et des bâtiments caractéristiques de la romanité, en particulier d’un forum (l’ἀγορά dont il est question en Actes 16,1912) se déclinant en deux terrasses, une plate-forme, adossée à l’acropole et servant de Capitolium à la colonie, sur laquelle se dressaient très probablement les temples dédiés aux dieux tutélaires de l’État romain, et une place basse, dévolue aux rassemblements politiques et aux activités publiques. Autour de cette place s’agençaient toute une série d’édifices publics, dont la curie abritant l’ordre des décurions (le sénat local), un espace consacré au culte impérial (où sera érigé un temple dédié au même culte lors du réaménagement de la place au milieu du iie siècle) et des boutiques. Il n’est pas certain, en revanche, que le forum ait abrité dès cette époque une basilique judiciaire, si bien que l’on ne peut être certain de l’endroit où auraient pu se trouver les principaux magistrats de la colonie au moment où Paul et Silas sont traînés devant eux, selon le récit des Actes13. La recherche récente s’est parfois évertuée à dresser la liste des inscriptions qui auraient pu être vues par Paul dans le centre monumental de la ville ou dans ses nécropoles lors de sa venue à Philippes. Une telle démarche peut paraître à certains égards anecdotique14. Notre connaissance de l’archéologie philippienne nous permet néanmoins de reconstituer dans ses grandes lignes le paysage monumental et épigraphique du centre de la ville de Philippes à l’époque julio-claudienne15. Pour ce faire, il convient, dans tous les cas, d’accorder la plus grande attention à la datation que l’on 264peut assigner aux différents bâtiments du forum et en particulier aux inscriptions qui y furent découvertes, car le forum n’est pas nécessairement le lieu originel d’exposition de celles-ci, qui y furent parfois remployées comme matériau de construction lors de phases ultérieures d’aménagement de la place publique.
Fig. 2 – Plan du site de Philippes (dessin et restitution : S. Provost,
Université de Lorraine / École française d’Athènes ; étude topographique : L. Fadin, École française d’Athènes).
Quant à la topographie de la geste de Paul à Philippes, le seul point fixe, comme je viens de le relever, est la « place publique » (ἀγορά), correspondant au forum, où l’apôtre est traîné devant les magistrats après l’épisode de l’exorcisme de la prophétesse (Actes 16,19). Rien ne peut être dit, en revanche, du lieu où se trouvaient la maison de Lydia (Actes 16,15 ; 16,40) ou celle du geôlier qui est baptisé par Paul (Actes 16,34). La prison où Paul et Silas sont détenus ne doit en aucun cas être située sur la terrasse haute du forum, à l’emplacement du Capitolium, même si une tradition mésobyzantine poussa à aménager sur la plate-forme une chapelle sur le lieu présumé de la prison de l’apôtre, dans un endroit qui avait en réalité servi de citerne16. La réinterprétation qui fut donnée depuis l’époque protobyzantine de la topographie philippienne liée à la visite de Paul, dessinant un parcours processionnel permettant aux pèlerins de relier les principales basiliques commémorant la geste paulinienne sur la base du récit des Actes, doit, en l’espèce, nous inviter à la prudence17. Le premier réflexe de Paul, au moment d’aborder Philippes, est, comme dans les autres villes qu’il a déjà visitées dans la péninsule anatolienne, de se mettre à la recherche de la communauté juive locale (Actes 16,13). En l’occurrence, il n’y avait manifestement pas de synagogue établie à Philippes, contrairement à la plupart des villes qu’il visita, aussi bien en Grèce qu’en Asie Mineure. La seule chose que l’apôtre peut trouver est un « lieu de prière » (προσευχή), qui se trouve, de surcroît, au-delà du rempart (ἔξωτῆςπύλης). Le fait que les fidèles se réunissent en dehors de la ville n’implique pas – malgré l’incompatibilité qui existait entre les pratiques juives et les mœurs romaines, aux dires des maîtres de la devineresse (Actes 16,21) – que le culte juif ait été interdit dans le centre urbain de la colonie. C’était plutôt le signe que la communauté juive locale était très ténue, composée notamment de païens judaïsants, à l’instar de Lydia, qui est qualifiée de « craignant-Dieu » (Actes 16,14)18. Du reste, Paul ne semble avoir connu son existence que par ouï-dire et il n’est pas même certain du lieu où elle se réunissait (οὗἐνομίζομενπροσευχὴνεἶναι). Il ne s’agissait certainement pas d’un bâtiment permanent, mais plus probablement d’un endroit à l’air libre, situé près d’une rivière, selon 266les Actes. La recherche archéologique et biblique s’est efforcée de localiser la porte et la rivière dont il est question dans le récit des Actes19, mais, si une rivière longe effectivement aujourd’hui le site archéologique de Philippes à l’Ouest en passant à l’emplacement d’une des nécropoles de la ville antique (là où un imposant baptistère, consacré à sainte Lydia, fut érigé par l’église orthodoxe dans les années 1970), l’hydrographie de la plaine de Drama fut considérablement perturbée par les travaux de drainage et les remaniements parcellaires effectués dans l’entre-deux-guerres à la suite de l’échange des populations prévu par le Traité de Lausanne en 1923, si bien que toute tentative visant à identifier précisément l’endroit en question demeure aléatoire20. Je me bornerai ici à souligner que, sur le plan narratologique, le procédé utilisé par l’auteur des Actes – en décrivant le passage de Paul de l’extérieur de la ville, où il prêche la première fois aux femmes entourant Lydia, jusqu’au centre politique de la colonie, où il est emmené sur le forum devant les autorités locales – visait une réintégration symbolique de la foi chrétienne, de la périphérie au cœur de la colonie. Par ce biais est suggéré de façon programmatique que le message chrétien avait d’emblée acquis dans la colonie, grâce aux effets de la prédication de l’apôtre, une centralité ou, du moins, une visibilité et une publicité que, dans les faits, la communauté chrétienne locale ne réussit néanmoins à acquérir qu’au début du ive siècle, lorsque le premier lieu de culte chrétien d’envergure fut érigé dans le centre monumental de Philippes21.
Les réalités administratives
et institutionnelles dans le récit d’Actes 16
À la lecture de l’épisode philippien du récit des Actes, on est frappé par le degré de précision des informations transmises par l’auteur sur le statut administratif de Philippes et sur ses institutions politiques en tant que colonie romaine. Se pose donc légitimement la question des raisons de l’attention accordée par l’auteur des 267Actes à ces éléments et de leur fonction dans l’économie du récit. Il faut cependant noter, en préambule, que cela n’est pas propre à la séquence consacrée à Philippes et qu’à vrai dire, l’ensemble des Actes comporte de nombreuses références aux réalités administratives de l’Empire romain22.
Dès la première mention de Philippes dans le récit (Actes 16,12), celle-ci est caractérisée comme étant une communauté appartenant à la province de Macédoine et possédant le statut de colonie. Un grave problème de critique textuelle à cet endroit a provoqué, et continue de provoquer, de nombreuses interprétations divergentes dans la recherche néotestamentaire. À mon sens, il convient d’adopter la conjecture ἥτιςἐστὶνπρώτηςμερίδοςτῆςΜακεδονίαςπόλις (« une ville du premier district de Macédoine ») au lieu de la leçon la plus fréquente dans la tradition manuscrite ἥτιςἐστὶνπρώτητῆςμερίδοςΜακεδονίαςπόλις (« la première ville du district de Macédoine »), du moment qu’elle restitue un sens plus pertinent au passage23. Il se trouve que Philippes faisait, en effet, partie de la plus orientale et de la première (dans l’ordre de numérotation) des quatre régions qui furent créées par les autorités romaines en Macédoine lors de la dissolution du royaume antigonide en 168 av. J.-C.24. Quoique ce découpage ait encore été utilisé à des fins administratives au ier siècle ap. J.-C25., l’auteur des Actes pourrait avoir trouvé cette information chez Polybe26 et avoir été intéressé, en renvoyant à la situation de Philippes au sein de la province de Macédoine, à préciser le cadre géographique du premier voyage missionnaire de Paul en dehors de la péninsule anatolienne. Ce souci pouvait d’autant plus se justifier que l’importance de la colonie, malgré son statut, était circonscrite à l’échelon régional et que sa réputation n’était pas universelle dans l’Orient romain. Il convient de relever, toutefois, que Philippes est la seule colonie romaine d’Orient visitée par l’apôtre à être explicitement qualifiée comme telle dans le récit 268des Actes, de surcroît par le biais d’une translittération du terme technique latin (κολωνία)27. Les autres colonies y sont simplement décrites comme des « villes », tout comme Philippes du reste dans Actes 16,12 et dans la suite de l’épisode (Actes 16,20), le terme grec πόλις devant se comprendre ici au sens générique de « communauté locale » sans préjuger de son statut politique particulier28.
L’intérêt de l’auteur des Actes pour les réalités institutionnelles de l’Empire est confirmé par la description de la scène où Paul et Silas sont présentés devant les magistrats de la colonie par les maîtres de la devineresse qui s’estimaient lésés du fait de leur prédication. Les équivalents grecs corrects des titres latins, d’ordinaire utilisés dans les colonies romaines d’Orient, servent ainsi à désigner les deux principaux magistrats de la colonie ou duumvirs (στρατηγοί) ainsi que leurs appariteurs ou licteurs (ῥαβδοῦχοι)29. Au contraire, lorsqu’il est question, au début du passage, d’ἄρχοντες en Actes 16,19, ce terme volontairement plus général renvoie, non pas à des magistrats en particulier comme les duumvirs, mais aux autorités de la colonie dans leur ensemble. On remarque que le même souci d’exactitude pousse l’auteur des Actes à employer le titre officiel des principaux magistrats de la cité de Thessalonique et à les qualifier justement de politarques (Actes 17,6). Une telle précision soulève la question des sources de l’auteur. Une partie de la recherche néotestamentaire a voulu y voir une preuve de l’origine macédonienne de celui-ci30, mais on constate que l’auteur était aussi au fait des réalités institutionnelles locales à Éphèse, par exemple, où le titre de « secrétaire » (γραμματεύς) est correctement utilisé pour désigner le principal magistrat éphésien tentant de mettre fin à l’émeute des orfèvres (Actes 19,35), et, de manière générale, dans la province de Judée où est mise en scène la très longue séquence parajudiciaire consacrée à l’arrestation de Paul à Jérusalem, puis à sa comparution devant deux gouverneurs successifs (Actes 21,31 – 26,32). On peut éventuellement invoquer une éducation juridique dont aurait bénéficié l’auteur pour rendre compte de cela, ainsi que, vraisemblablement, le fait que celui-ci aurait disposé, pour rédiger son récit, de témoignages ou de 269premières versions écrites provenant de sources locales, produites par les différents groupes chrétiens eux-mêmes31.
Par ailleurs, la description de la manière dont Paul et Silas sont emmenés devant les duumvirs philippiens et des mesures sommaires qui sont prises à leur encontre par ces derniers (bastonnade, puis emprisonnement) est en tout point conforme à ce que l’on sait, grâce à des sources indépendantes, des réalités du maintien de l’ordre au jour le jour dans les communautés locales de l’Empire romain32. Il ne s’agit pas, en l’occurrence, d’une comparution de l’apôtre devant la juridiction des duumvirs à la suite d’une accusation formelle. C’est par la force que les maîtres de la prophétesse s’emparent de Paul et Silas et qu’ils les traînent sur le forum où se trouvent les duumvirs pour se plaindre devant eux de ce que leur prédication perturbe l’ordre public du fait des principes qu’ils professent et qui, selon eux, seraient interdits aux citoyens romains (Actes 16,19-21)33. En dehors de tout procès, comme Paul le relève lui-même (Actes 16,37 : ἀκατακρίτους), les duumvirs prennent une décision d’urgence afin de calmer la foule qui s’en prend à eux et ordonnent, certainement à leurs appariteurs, de les battre de verges (Actes 16,22-24). L’emprisonnement de Paul et Silas n’est pas une peine, mais a simplement pour but, de la part des duumvirs, de tenir momentanément à l’écart ceux qu’ils perçoivent comme des fauteurs de troubles. Pour preuve, les duumvirs, avant même qu’ils apprennent que Paul jouissait de la citoyenneté romaine, ordonnent le lendemain qu’on les relâche, après leur nuit passée en prison. L’ensemble de l’épisode, qui se déroule de façon infrajudiciaire, est symptomatique des mesures policières qui pouvaient être prises par les magistrats locaux dans l’Empire romain pour assurer l’ordre public et de la justice expéditive qu’ils pouvaient appliquer34.
L’attention accordée par l’auteur des Actes à la vraisemblance des détails ne saurait toutefois prouver l’authenticité de tous les événements relatés. Il convient de tenir compte de la structure de l’ensemble du récit, non limité à l’épisode philippien, ainsi que des intentions de l’auteur : il s’agissait pour ce dernier de démontrer 270l’innocence de l’apôtre, aussi bien face à la Loi juive que face aux lois romaines. De ce point de vue, la scène de l’emprisonnement de Paul à Philippes annonce la séquence de l’arrestation de l’apôtre en Judée où celui-ci proteste, de la même manière et avec les mêmes termes (Actes 22,25 : ἀκατάκριτος), contre le traitement arbitraire dont il est victime et où il fait également valoir sa qualité de citoyen romain, cette fois pour en appeler à l’empereur35. L’épisode philippien est, avec la scène de l’arrestation de Paul à Jérusalem, le seul endroit de tout le récit des Actes où il est question de la possession par l’apôtre de la citoyenneté romaine36. Il vaut la peine, dans ce contexte, de s’interroger à nouveau sur les raisons de la qualification de Philippes en tant que κολωνία en Actes 16,12, au tout début de l’épisode philippien. Il se peut que cette précision ait servi, par anticipation, à rendre la scène de l’arrestation de Paul encore plus dramatique et scandaleuse, étant entendu que les responsables du traitement infligé à l’apôtre étaient nécessairement eux-mêmes citoyens romains en tant que magistrats d’une colonie romaine et qu’à ce titre, ils n’étaient pas censés ignorer que les privilèges dont jouissait un individu doté de la citoyenneté romaine devaient le mettre à l’abri de ce genre de vexations. Un tel procédé paraîtrait cohérent avec l’intention apologétique de l’auteur des Actes, lequel a structuré son récit de manière à le faire culminer avec l’appel de Paul au tribunal de l’empereur, en disculpant l’apôtre et en mettant en évidence, au contraire, les manquements à la procédure pénale dus aux représentants des autorités romaines eux-mêmes dans les provinces. On ne peut toutefois exclure que le mot κολωνία ait été plutôt une interpolation, ajoutée a posteriori afin d’accentuer l’effet recherché, d’autant que ce terme figure en apposition à πόλις, comme s’il s’agissait de doubler ce mot en le commentant et en explicitant le statut juridique de Philippes37.
271Le public de la prédication
de Paul à Philippes
Le principal apport des sources épigraphiques qui ont été mises au jour sur le site archéologique de Philippes et sur le territoire dépendant de la ville antique est qu’elles nous permettent de raisonner sur la composition de la société de la colonie romaine. Les inscriptions, bien évidemment, ne sauraient livrer une photographie absolument fidèle et parfaitement représentative de la société philippienne, d’autant que la plupart d’entre elles sont difficilement datables avec exactitude. Les centaines d’épitaphes, de dédicaces votives et d’inscriptions honorifiques que l’on peut assigner à l’époque de la colonie, entre sa fondation et le milieu du iiie siècle ap. J.-C., nous autorisent, cependant, à reconstituer les principales catégories de la population locale et à déterminer l’origine ethnique, l’identité culturelle et le milieu social des habitants de Philippes au moment où Paul se rendit en Macédoine.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de le relever ci-dessus, Philippes n’abritait apparemment pas de communauté juive étoffée au début du ier siècle ap. J.-C. Celle-ci prit néanmoins certainement de l’ampleur avec le temps, car une épitaphe du milieu du iiie siècle mentionne une synagogue, à savoir une assemblée structurée et institutionnalisée, qui faisait défaut à l’époque apostolique à en croire le récit des Actes38. La première femme judaïsante à avoir cru à la prédication de Paul, Lydia, est présentée comme une marchande de pourpre originaire de la cité de Thyatire, en Asie Mineure occidentale (Actes 16,14). La très mince prosopographie de la communauté paulinienne de Philippes que l’on peut dresser d’après les Actes et l’Épître aux Philippiens comporte essentiellement des noms grecs et suggère que celle-ci était composée d’individus issus, comme Lydia, de milieux commerçants hellénophones, voire d’affranchis39. Cette observation est corroborée par ce que j’ai dit plus haut de l’intégration de la colonie dans un circuit d’échanges 272allant du Nord-Ouest de l’Asie Mineure à Thessalonique par la Thrace égéenne : plusieurs inscriptions découvertes à Philippes font connaître des personnes originaires d’Asie Mineure qui étaient actives à Philippes et qui y séjournaient en tant que résidents étrangers et qui, au regard du droit romain, étaient considérées comme des incolae pérégrins.
La plus grande partie de la population de la colonie, toutefois, était composée de pérégrins non pas grecs (que leur famille soit originaire de Macédoine et même de la cité grecque de Philippes avant sa transformation en colonie ou qu’ils proviennent d’Asie Mineure comme Lydia), mais d’ascendance thrace. Les Thraces formaient la population indigène de la région avant l’installation de colons thasiens au cours de l’époque archaïque, puis la conquête macédonienne au milieu du ive siècle av. J.-C. Comme le montrent les sources épigraphiques, les Thraces, qui sont reconnaissables dans notre documentation par leur onomastique caractéristique, étaient prédominants sur le territoire rural de la colonie, où ils avaient pu continuer de résider. Ils formaient, sur le territoire colonial, des communautés villageoises appelées vici en latin et jouissaient localement d’une autonomie administrative, bénéficiant ainsi d’un traitement privilégié – sans parallèle parmi les colonies romaines d’Orient – qui s’explique peut-être par leur attitude lors de la bataille de Philippes en 42 av. J.-C. : les Thraces pourraient avoir été récompensés de leur ralliement à Antoine et Octave par l’obtention d’un statut spécial au sein de la colonie romaine40. Outre l’anthroponymie, le conservatisme culturel de la population thrace de Philippes s’exprime également par la pratique de cultes à des divinités pan-thraces ou épichoriques, mais aussi probablement de la langue thrace, même si cette dernière, qui ne s’écrivait pas, n’a laissé aucun vestige dans les sources épigraphiques. Le fait que la population thrace de la colonie, au contraire des Grecs (et, de façon plus générale, des incolae des autres colonies romaines d’Orient implantées en terre hellénophone), ait été encline à recourir à la langue importée de fraîche date par les colons italiens, à savoir le latin, pour ériger des épitaphes ou des dédicaces votives est la preuve indirecte que la Macédoine orientale n’était pas entièrement hellénisée à l’époque impériale romaine, malgré la forte influence de 273la culture et de la langue grecques dans la région depuis la période archaïque41. Or, les Thraces (du moins des individus portant une anthroponymie thrace) n’apparaissent pas dans la prosopographie chrétienne de Philippes, ni au cours de la génération apostolique, ni plus tard entre le ive et le vie siècle, à une époque où une riche documentation épigraphique nous fait connaître des dizaines de noms de membres de l’église philippienne. Paul, d’après le récit des Actes (16,12), ne serait resté que quelques jours à Philippes durant sa première mission. L’apôtre dut résider en ville, d’où il ressortit à plusieurs reprises pour se rendre au « lieu de prière » qui était située dans les faubourgs. Paul privilégia pour sa prédication la petite communauté juive ou judaïsante ainsi que les résidents hellénophones de Philippes et il n’eut certainement pas l’occasion d’entrer en contact avec la population thrace de la colonie, même si celle-ci n’était pas entièrement absente du centre urbain et même si plusieurs villages thraces se trouvaient dans la plaine à courte distance de la ville. Lors de son départ précipité de Philippes, enjoint qu’il fut par les magistrats de quitter la ville, Paul se contenta de traverser le territoire de la colonie au plus vite, en reprenant sa route le long de la via Egnatia jusqu’à Amphipolis en direction de Thessalonique (Actes 16,38–17,1). Le contraste est grand avec ce qui s’était produit dans la colonie de Lystra en Anatolie, où Paul et Barnabé entrèrent en interaction avec la population indigène et où la foule les acclama en langue lycaonienne (Actes 14,14-18).
Les colons d’origine italienne, citoyens romains, qui étaient pourtant sans doute majoritaires dans la ville de Philippes, furent probablement eux aussi exclus, pour la plupart d’entre eux, de la prédication paulinienne. Ce fut du moins le cas des élites civiques avec lesquelles le seul contact qu’eut Paul fut, à en croire le récit des Actes, conflictuel, comme d’ordinaire lors des missions de l’apôtre. Cela pose, du reste, la question pratique des conditions de la communication orale entre Paul et les duumvirs. Car si l’apôtre possédait la citoyenneté romaine, rien n’indique, en revanche, qu’il ait su le latin42. Quant aux magistrats locaux, la maîtrise du grec n’était pas un prérequis pour eux, dans la mesure où le latin était à cette époque à Philippes la seule langue utilisée pour les besoins officiels. Rien n’empêche cependant qu’ils aient su le grec à titre personnel (ou, pour le moins, leurs appariteurs et le geôlier) 274et les échanges purent se dérouler en grec, comme ce sera le cas avec le tribun romain à Jérusalem (Actes 21,33-40). Le fait que la prédication de l’apôtre semble avoir excepté les deux principaux groupes ethniques et sociaux de la colonie, numériquement parlant (les colons romains et les résidents thraces), conduit à nuancer l’ampleur et la portée de l’action de Paul et à relativiser la centralité de la mission apostolique pour Philippes telle qu’elle est suggérée dans le récit des Actes. La confrontation de l’épisode philippien des Actes avec ce que l’on sait de la société de la colonie romaine confirme que l’activité apostolique de Paul était un phénomène essentiellement urbain et qu’elle s’adressait avant tout, dans les nombreuses colonies que celui-ci visita également, aux milieux hellénophones commerçants.
La place de la communauté paulinienne
dans le paysage religieux de la colonie
Environ 150 inscriptions permettent de reconstituer l’aspect de la vie religieuse et les pratiques cultuelles en vigueur dans la colonie de Philippes entre le ier siècle et le iiie siècle ap. J.-C.43. Les dédicaces votives révèlent une très grande diversité d’associations cultuelles et de confréries ainsi qu’une importante variété de divinités honorées, dans lesquelles on reconnaît une triple influence – reflétant les origines ethniques des principales composantes de la société philippienne à l’époque impériale –, thrace, grecque et romaine. Dans un tel environnement, multiculturel, les phénomènes de syncrétisme n’étaient pas rares et il est parfois malaisé de démêler laquelle de ces influences était prédominante. Ainsi les dédicaces gravées en latin et offertes à Diane sur les rochers de l’acropole de Philippes étaient-elles adressées à une déesse assimilée à la divinité chasseresse thrace Bendis, mais présentant, dans les reliefs qui accompagnaient les inscriptions, plusieurs caractéristiques iconographiques de l’Artémis grecque44. Par ailleurs, on note qu’à terme, 275pratiquement toutes les combinaisons furent possibles dans la colonie entre l’origine de la divinité vénérée, l’identité ethnico-culturelle du dédicant et la langue employée pour la dédicace (grec ou latin)45. On note par exemple, d’un côté, des dédicaces qui furent offertes à Jupiter en latin par des pérégrins thraces dans les campagnes de la colonie et, de l’autre, des reliefs représentant le Héros cavalier, une divinité thrace aux attributs chthoniens, gravés sur les sarcophages de membres de l’élite civique d’ascendance italienne ensevelis dans les nécropoles urbaines. De façon symptomatique, c’est la version épichorique de cette même divinité thrace hellénisée, pourvue d’une épiclèse locale pour l’occasion, le Héros Aulonitès – lequel était vénéré dans un sanctuaire d’aura régionale situé sur le territoire philippien, au pied du massif du Pangée – qui fut représentée sur les dernières monnaies à être frappées par la colonie au milieu du iiie siècle ap. J.-C.46. Sans aller jusqu’à parler d’hybridation ou de créolisation pour qualifier les interactions culturelles à l’œuvre dans la colonie de Philippes, du moins peut-on souligner que la sphère religieuse fut certainement le champ où la mixité des trois éléments de la société philippienne s’est le plus nettement exprimée et où elle est le plus visible dans nos sources.
Parmi les différents cultes attestés à Philippes à l’époque impériale, on relève notamment des cultes dits « orientaux » – comme ceux de la Grande Mère, des dieux égyptiens et en particulier d’Isis – à propos desquels on a parfois établi des rapprochements avec le message chrétien du fait de leur caractère initiatique ou de la nature eschatologique ou sotériologique de leur discours. C’est particulièrement le cas du culte de Dionysos qui était répandu en Macédoine orientale, notamment en raison de l’importance que jouait la Thrace dans la geste mythologique de ce dieu et de l’assimilation qui était faite entre les rites dionysiaques et la mystique orphique dont on situait aussi l’origine en Thrace. Un sanctuaire, fréquenté notamment par des Thraces, était ainsi consacré à Dionysos depuis l’époque hellénistique dans l’agglomération antique correspondant à la ville moderne de Drama, au Nord de la plaine de Philippes47. De même, le bâtiment de scène du théâtre de Philippes, construit à l’époque impériale, était décoré de reliefs représentant un cortège bacchique de Ménades en furie et contenant des références à des 276événements mythologiques étant censés s’être déroulés dans la région du Pangée48. Enfin, une épigramme funéraire du iiie siècle ap. J.-C. provenant des environs de Philippes, en exprimant les conceptions dionysiaques et orphiques sur la mort, décrit le salut offert à l’initié qui pourra « revivre à l’identique, ressuscité (reparatus), dans les Champs-Élysées49 ». La documentation à notre disposition ne nous permet pas d’étudier les interactions qui pourraient éventuellement avoir existé entre la communauté fondée par Paul et les fidèles des thiases dionysiaques ou des groupes orphiques dans la colonie. Mais le message de salut professé par les chrétiens pouvait avoir une résonance auprès de ces derniers du fait des analogies formelles entre leurs théologies respectives.
La recherche néotestamentaire a beaucoup insisté ces dernières années sur les ressemblances entre les communautés pauliniennes (ou « Christ-groups », comme les appelle volontiers la recherche anglophone pour ne pas préjuger de la conscience que ces communautés pouvaient avoir de leur identité en tant que « chrétiens50 ») et les associations professionnelles et cultuelles païennes. De nombreuses études se sont ainsi attachées à établir des parallèles entre ces groupements et à souligner les similitudes qui sont perceptibles dans quantité de domaines : mode d’adhésion et structuration du groupe, organisation et hiérarchie internes, liens sociaux, gestion des moyens financiers, conception privée du culte, etc.51. De ce point de vue, le groupe chrétien à Philippes, depuis sa fondation par Paul jusqu’au iiie siècle, pourrait être considéré, au même titre que les associations cultuelles païennes attestées dans la colonie, comme l’une des multiples expressions de la religiosité de la population philippienne. Deux spécificités me semblent pourtant devoir être notées concernant la communauté créée par l’apôtre Paul. D’abord, à la différence des autres confréries qui s’accommodaient du pluralisme religieux dans la colonie (à l’exception peut-être de certains mouvements philosophico-religieux), le groupe chrétien – et cela est affirmé avec netteté par Paul dans sa lettre à l’église locale – se distinguait par l’exclusivité de sa vénération, dont un dieu unique et particulier était l’objet. Ensuite, au contraire des autres associations cultuelles, les membres du groupe paulinien n’ont manifestement 277pas cherché à s’auto-représenter dans le paysage monumental de la colonie, par exemple en faisant graver des inscriptions célébrant leur communauté, comme l’a fait, notamment, à Philippes le collège de Silvain dont les listes de membres furent affichées sur les rochers de l’acropole aménagés en sanctuaire (voir infra). Cela n’est, du reste, pas propre à Philippes, l’apparition de symboles chrétiens ou de références aux églises locales dans l’épigraphie constituant un phénomène beaucoup plus tardif52. À Philippes, l’inscription résolument chrétienne la plus ancienne est la dédicace de la « basilique de Paul », la première église cathédrale de la ville, construite dans le centre monumental dans les années 330-340 par l’évêque Porphyrios53. L’épigraphie chrétienne n’émergea à Philippes qu’à partir du moment où, à la suite de l’adoption de la nouvelle foi par Constantin, la communauté acquit soudainement une notoriété à laquelle l’invitait la politique religieuse impériale54. Indépendamment de l’exclusivité que je rappelais tout à l’heure à propos du message chrétien, lequel devait encourager les communautés pauliniennes à se démarquer des associations païennes et à ne pas chercher à rivaliser avec elles en utilisant les mêmes formes d’expression, l’absence d’inscriptions relatives au groupe chrétien à Philippes avant le début du ive siècle est certainement aussi le signe, plus concrètement, de la taille modeste de celui-ci et de la place très secondaire qui était la sienne dans la colonie durant les deux premiers siècles au moins de son existence.
Le profil social des membres de la première communauté chrétienne de Philippes trouve néanmoins certaines correspondances dans les collèges de Silvain, dans la ville même de Philippes, et d’Apollon, à Drama, dont les listes de membres furent gravées sur pierre, comme je viens de le mentionner pour le premier55. On trouve, en effet, dans ces confréries des pérégrins (grecs et thraces), des affranchis, des esclaves publics appartenant à la colonie et privés dépendant de particuliers, ainsi que des citoyens romains de condition modeste. Même si, au contraire de ces associations, la communauté paulinienne ne paraît pas avoir inclus prioritairement de résidents thraces ou de colons romains, comme j’ai eu l’occasion de le mentionner plus haut, le milieu social dans lequel étaient recrutés les membres des collèges de Silvain et d’Apollon était 278sensiblement voisin de celui dont provenaient les premiers fidèles de Paul et était, dans tous les cas, clairement inférieur à celui de l’élite civique dont étaient issus, par exemple, les magistrats coloniaux comme les duumvirs auxquels l’apôtre fut confronté56. Une différence notable touche, en revanche, la place qui était faite aux femmes, entièrement absentes des listes de membres des collèges mentionnés. Sous l’effet de la dynamique insufflée par les études de genre, la recherche néotestamentaire, s’est, à ce propos, penchée depuis les années 1980 sur une particularité du paysage religieux de la colonie, qui fut révélée par la publication, en 1975, par Paul Collart et Pierre Ducrey, des reliefs votifs gravés à même le rocher sur les pentes de l’acropole de Philippes : ce sont les dizaines de représentations de figures féminines que l’on y trouve, tantôt sous la forme de la déesse Diane-Artémis-Bendis, comme je l’ai déjà signalé plus haut, tantôt sous la forme d’orantes, entourées d’attributs renvoyant à la sphère domestique féminine (cosmétique, tissage) ou portant un enfant57. Tandis que Diane-Artémis-Bendis faisait assurément l’objet de dédicaces de la part de mâles, identifiés comme tels par les quelques inscriptions votives accompagnant les reliefs58, la récurrence des figures d’orantes a pu suggérer que les pentes de l’acropole abritaient également un culte qui était, lui, spécifiquement féminin. Une partie de la recherche s’est ainsi évertuée à établir un parallèle avec la place – au demeurant tout à fait remarquable au regard des usages en vigueur dans les confréries païennes – qu’occupèrent les femmes dans les premières communautés chrétiennes59, et en particulier à Philippes où plusieurs d’entre elles purent exercer des responsabilités au sein de l’église locale60. Il faut concéder, toutefois, que l’interprétation de ces reliefs d’orantes, tous anépigraphes, est délicate et il serait hasardeux d’y voir nécessairement une expression de la conscience féminine qui aurait été plus vive à Philippes qu’ailleurs et qui aurait trouvé une consécration au travers du culte chrétien.
279D’éventuelles allusions
à la situation locale dans l’Épître aux Philippiens
Plusieurs passages de l’Épître aux Philippiens ont parfois été interprétés dans la recherche exégétique comme des références au contexte local propre à la colonie. Je les passerai ici brièvement en revue61 :
a) Dans Phil 3,17-21, Paul exhorte les Philippiens à suivre son exemple, en se détournant de ceux qu’il qualifie d’« ennemis de la croix du Christ ». Aux « biens terrestres » auxquels ces personnes se voueraient, Paul oppose la « communauté dans les cieux » (τὸπολίτευμαἐνοὐρανοῖς) à laquelle doivent aspirer ceux qui considèrent le Christ comme le sauveur. Peter Pilhofer a proposé de voir dans cette célébration de la cité céleste une critique indirecte de la communauté politique locale que formait la colonie de Philippes62. Cette interprétation ne me paraît pas emporter l’adhésion. Dans le contexte immédiat de l’Épître sont visées les factions chrétiennes rivales de Paul et non les autorités politiques de la colonie. L’expression ici employée suggère que la finalité de l’existence des vrais fidèles du Christ résidait dans l’accession au royaume des cieux. Le terme πολίτευμα, dans la langue grecque hellénistique, désigne une communauté politique structurée à la manière d’une cité. Il est notamment utilisé pour décrire des associations cultuelles et corporations professionnelles, des communautés ethniques jouissant de leurs propres lois (comme la communauté juive à l’intérieur de la cité d’Alexandrie) ou des colonies militaires s’administrant elles-mêmes63. Le recours à ce lexique politique, de même que le terme ἐκκλησία qu’emploie Paul pour qualifier les groupes qu’il a fondés dans diverses cités, illustre son ambition de former des communautés concurrençant les institutions séculières des cités64. Cette aspiration est néanmoins exprimée ici de manière idéale et il n’est pas nécessaire 280d’y avoir ici une condamnation détournée des institutions de la colonie de Philippes.
b) Dans Phil 3,4-6, Paul fait référence à son origine ethnique et religieuse, énumérant ce qui avait fait son identité et sa fierté en tant qu’« Hébreu », « issu de la nation d’Israël, de la tribu de Benjamin », avant qu’il renonce à ces titres de gloire pour rejoindre le Christ. Dans ce cas aussi, Peter Pilhofer a voulu voir une réprobation déguisée des institutions de la colonie de Philippes, en particulier de l’attachement excessif et vain des notables civiques à leur origine romaine65. S’il est vrai que les magistrats philippiens affichaient d’ordinaire, dans leur formule onomastique, leur appartenance au peuple romain par la mention de la tribu civique dans laquelle étaient versés les citoyens romains de Philippes, en l’occurrence la tribu Voltinia, de même qu’ils précisaient le lieu où ils avaient exercé leurs charges par la mention explicite de Philippes, cette pratique n’était en rien particulière à la colonie et tout citoyen romain, étant par définition inscrit dans une tribu romaine, déclinait de cette façon son état civil. Pas plus que dans le passage précédemment commenté, Paul ne s’en prend ici aux autorités civiles de la colonie de Philippes, mais, par son propre exemple, l’apôtre cherche à dénoncer ceux qui, parmi les Juifs, se faisaient, par leur intransigeance et aveuglement, les persécuteurs de l’église66.
c) Dans la séquence de l’Épître qui est souvent appelée l’« Hymne au Christ » (Phil 2,5-11), Paul décrit, de façon paradoxale, la surenchère du Christ dans sa démonstration d’humilité et d’abaissement afin de proclamer la toute-puissance de Dieu67. Joseph Hellerman a interprété l’ensemble de ce passage comme une critique implicite de l’attrait des magistrats philippiens pour les honneurs civiques, l’énumération des souffrances que le Christ se serait infligé lui-même servant en quelque sorte de contre-exemple au cursus honorum des notables coloniaux68. On fera toutefois remarquer que la recherche des honneurs n’était aucunement particulière aux notables de la colonie et que ce 281comportement était, au contraire, constitutif des mentalités aristocratiques dans le monde gréco-romain depuis l’époque hellénistique avancée69. Un ordre prédéterminé des charges publiques, formant pour ainsi dire une carrière civique, existait tout aussi bien dans les autres colonies romaines d’Orient visitées par Paul, de même que dans certaines cités grecques, comme à Éphèse70. Par ailleurs, pas plus que dans les extraits précédemment analysés, Paul ne s’adresse dans ce passage aux colons romains de Philippes, mais bien à ses adversaires au sein de l’église locale naissante qu’il accuse de prétendre à une vaine gloire et de troubler l’unité de la communauté par leur arrogance71. C’est à ces individus que Paul entend opposer la modestie du Christ qu’il érige en modèle.
Ces quelques remarques me poussent à réaffirmer ce qui peut apparaître comme une évidence : l’Épître aux Philippiens ne fut pas destinée par Paul à l’ensemble de la communauté politique que formait la colonie romaine, mais uniquement aux membres du groupe chrétien, comme le montre explicitement l’adresse de la lettre (Phil 1,1-2). Dans celle-ci, l’apôtre s’efforce de montrer les erreurs des autres prédicateurs et des groupes chrétiens rivaux qui n’étaient pas d’obédience paulinienne : cette idée sous-tend l’ensemble de l’Épître. À aucun moment, Paul ne vise les colons en tant que ressortissants d’une entité politique dépendant de l’État romain ou les autorités politiques locales, malgré le rude traitement que celles-ci lui avaient réservé, au mépris de la procédure pénale. Comme je l’ai relevé plus haut, les colons romains ne formaient, du reste, pas le public que l’apôtre cherchait à atteindre prioritairement dans ses prédications à Philippes. Les exemples que j’ai succinctement discutés ici illustrent les risques de surinterprétation que l’on encourt à vouloir trouver nécessairement des allusions aux contextes locaux non chrétiens dans le corpus des lettres pauliniennes72.
282Conclusion : pour une approche intégrée
de l’histoire du christianisme primitif
Les notions de « paléochristianisme » ou de « Early Christianity », employées aussi bien par la recherche néotestamentaire que par la recherche historique, sont révélatrices des particularismes de traditions académiques qui, pendant longtemps, ont connu des évolutions parallèles. Alors que, pour les exégètes, ces notions renvoient à la génération apostolique et au contexte du ier siècle, révélés par les Actes et les Épîtres pauliniennes, archéologues et historiens entendent, en général, par ces termes, pour le cas de Philippes, la période comprise entre le ive siècle et le vie siècle. De fait, les sources archéologiques et épigraphiques n’apportent aucune donnée positive sur l’existence et l’organisation du groupe créé par Paul au cours des ier, iie et iiie siècles. Le premier vestige archéologique que l’on puisse assurément rattacher à la communauté chrétienne locale est la « basilique de Paul », datant de la première moitié du ive siècle et expressément identifiée comme telle par la dédicace figurant sur la mosaïque servant de pavement à l’édifice, lequel fut construit directement à l’Est du forum et est l’une des plus anciennes églises de la péninsule balkanique. Les seuls témoignages sur la communauté paulinienne au cours des ier-iiie siècles proviennent, quant à eux, de la littérature néotestamentaire et chrétienne contemporaine, notamment d’auteurs tels qu’Ignace d’Antioche, Polycarpe de Smyrne et Tertullien.
Les sources archéologiques et épigraphiques que l’on peut assigner aux trois premiers siècles d’existence de la colonie romaine permettent, en revanche, de reconstituer le milieu dans lequel se sont inscrits la mission de Paul et le développement de la communauté qu’il y a fondée, et ce pour une multitude d’aspects (matériels, politiques, institutionnels, sociaux, économiques, culturels, linguistiques, religieux). Une telle démarche, qui peut être pareillement suivie là où la documentation archéologique autorise à mener l’enquête (en particulier à Corinthe et à Éphèse), permet de mieux comprendre les spécificités locales de l’action de Paul dans chacune des villes qu’il a visitées, les éléments qui ont conditionné son interaction avec la population locale, ainsi que les facteurs qui ont pu favoriser ou, au contraire, retarder l’émergence du premier 283groupe chrétien. À l’inverse, la recherche historique a tout à gagner à considérer la littérature néotestamentaire comme une source de première importance pour notre connaissance des communautés locales dans la moitié orientale de l’Empire romain au milieu du ier siècle, tant les références aux contextes locaux et aux réalités administratives y sont nombreuses. Quoiqu’il faille naturellement être attentif à la dimension littéraire et proprement narratologique des Actes et à l’intention apologétique de son auteur, le récit peut venir illustrer une quantité de facettes de la vie quotidienne dans les provinces hellénophones de l’Empire romain et prendre ainsi, dans certains cas, une valeur documentaire au même titre, par exemple, qu’un roman comme Les Métamorphoses d’Apulée73. Seule la conjonction des efforts de l’exégèse néotestamentaire et de la recherche archéologique et historique est susceptible aujourd’hui de restituer une image qui soit la moins imparfaite et partielle possible du christianisme des premiers siècles.
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1 Une première version de cet article fut présentée lors d’une journée d’études de l’École doctorale de théologie et sciences religieuses de l’Université de Strasbourg à l’invitation de Daniel Gerber et de Christian Grappe, que je remercie ici de leur accueil.
2 Sève, 2014 ; Ducrey, 2014.
3 On trouvera un catalogue des inscriptions de Philippes dans Pilhofer, 2009. Un corpus systématique, le Corpus des inscriptions grecques et latines de Philippes (CIPh), incluant de nombreux inédits, est en cours de constitution. Le premier volume paru, CIPh II.1, consacré aux inscriptions relatives à la vie publique de la colonie romaine, a été publié en 2014.
4 Pour ce qui concerne Philippes, voir par exemple Bormann, 1995 ; Pilhofer, 1995 ; White, 1995 ; Bakirtzis, 1998 ; Oakes, 2000 ; Nasrallah, 2012 ; Baslez, 2013 ; Marchal, 2015 ; Ebel, 2016 ; Harrison, 2018a.
5 Schowalter – Friesen, 2005 ; Friesen et al. 2010 ; Friesen et al. 2014. Les mêmes auteurs ont coordonné, dans une veine similaire, un volume sur Philippes : Friesen et al., à paraître. Pour Corinthe, voir aussi Gerber, 2013.
6 Harrison – Welborn, 2015 ; Harrison – Welborn, 2016 ; Harrison – Welborn, 2018a ; Harrison – Welborn, 2018b. Voir aussi Walton et al., 2017.
7 Collart, 1937, p. 104, 190, 263, 271-272, 283, 322-323, 456-471, 493 ; Lemerle, 1945, p. 7-60.
8 On trouvera un état de la question de nos connaissances actuelles sur l’histoire et l’archéologie du site de Philippes dans l’ouvrage collectif réuni par Fournier, 2016.
9 Brélaz, 2018b.
10 Standhartinger, à paraître.
11 Sève – Weber, 2012a.
12 L’ἀγορά, ou forum, de Philippes est également mentionnée dans une inscription grecque du iiie siècle ap. J.-C. pour situer l’emplacement où se trouvait le lieu de réunion d’une confrérie religieuse (Pilhofer, 2009, no 133, l. 14-16). Il ne faudrait pas voir dans ce terme le marché aux victuailles, car celui-ci est, dans le cas de la colonie de Corinthe, explicitement qualifié de μάκελλον dans 1 Co 10,25.
13 Sève – Weber, 2012b.
14 Pilhofer, 1995, p. 118-121, avec les réserves apportées par Brélaz, 2018d, p. 158-159. Voir aussi Verhoef, 2013, qui contient plusieurs erreurs factuelles pour ce qui est de l’archéologie de Philippes.
15 Brélaz, 2014 ; Brélaz, 2018d, p. 155-159.
16 Pelekanidou, 1980.
17 On accueillera avec circonspection les interprétations livrées par Mentzos, 2005 et Mentzos, 2013. Sur cette question, voir Brélaz, 2018c.
18 Baslez, 2019.
19 Collart, 1937, p. 456-460 ; Pilhofer, 1995, p. 165-174.
20 Lespez, 2008 ; Brélaz, 2017, p. 131-132.
21 Brélaz, 2017.
22 Brélaz, 2019.
23 Lemerle, 1945, p. 20-23 ; Pilhofer, 1995, p. 159-165. Même si l’on admet que les Philippiens éprouvaient de la fierté pour leur ville, ils ne pouvaient prétendre que celle-ci était « la première » de la province, comme le suggère Ascough, 1998 à l’appui de la leçon la plus commune.
24 Loukopoulou, 1987.
25 Hatzopoulos, 1996, p. 231-260, 352-359.
26 Les informations rapportées par Tite-Live 45, 29, 5-9 concernant la réorganisation administrative de la Macédoine par les Romains reposent sur un passage perdu de Polybe. Le terme μέρη pour désigner les régions ou districts nouvellement créés se trouve chez Diodore de Sicile 31, 8, 8 et Strabon 7, frag. 47.
27 Baslez, 2015.
28 Actes 13,44 ; 13, 50 (Antioche de Pisidie) ; 14,4 (Iconium) ; 14,6 ; 14,13 ; 14,20 (Lystra) ; 18,10 (Corinthe).
29 Actes 16,20 ; 16,22 ; 16,35-38.
30 Pilhofer, 1995, p. 153-159.
31 Weiss, 2013.
32 Brélaz, 2005, p. 56-64, 271-275.
33 Il s’agit probablement d’une allusion à la circoncision, aux rituels alimentaires, à la croyance exclusive en un dieu unique et au régime d’exception dont bénéficiaient les Juifs pour ce qui était des obligations militaires et fiscales. Voir Pilhofer, 1995, p. 189-193.
34 Schellenberg, 2018.
35 Omerzu, 2002 ; Standhartinger, 2017.
36 Adams, 2008 ; Weber, 2012.
37 Brélaz, 2019.
38 Pilhofer, 2009, no 387a.
39 Ascough, 2003, p. 122-128. Même le surnom d’origine latine Κλήμηνς (Phil 4,3) pourrait avoir été porté comme nom unique par un pérégrin, ce qui est chose courante dans l’Orient romain. Le gardien de prison (Ac 16,23-36 : δεσμοφύλαξ), devrait, quant à lui, avoir fait partie du personnel public de la colonie, qui était recruté parmi les citoyens romains de condition modeste, mais comptait également des affranchis et des esclaves, qui pouvaient être affectés à la surveillance des prisons : voir Brélaz, 2018a, p. 209-214.
40 Brélaz – Tirologos, 2016.
41 Brélaz, 2015.
42 Porter, 2008.
43 Le tome CIPh II.2, en cours de constitution, sera consacré aux inscriptions relatives à la vie religieuse de la colonie. Voir, pour l’heure, un premier panorama par Rizakis, 2017.
44 Collart – Ducrey 1975, p. 201-227.
45 Brélaz, 2018d, p. 173-179 ; Brélaz, à paraître.
46 CIPh II.1, p. 52-55 ; Amandry, 2015 ; Boteva, 2018.
47 CIPh II.1, p. 42-44.
48 Korzun, 2017.
49 Pilhofer, 2009, no 439 avec les corrections de lecture et le commentaire de Dominicy, 2016.
50 Schellenberg, 2019.
51 Kloppenborg – Wilson 1996 ; Ascough, 2003 ; Harland, 2003 ; Ogereau, 2014.
52 Destephen, 2016.
53 Pilhofer, 2009, no 329.
54 Brélaz, 2018c.
55 Pilhofer, 2009, nos 163-166 ; L’Année Épigraphique 2006, no 1339.
56 Weiss, 2016 ; Ogereau, 2018.
57 Collart – Ducrey 1975, p. 228-237 ; Karadedos – Koukouli-Chrysanthaki 2008.
58 Pilhofer, 2009, nos 167-168, 170-171, 173-174, 181, 183 ; Deoudi, 2015.
59 Portefaix, 1988 ; Abrahamsen, 1995 ; Marchal, 2006 ; Lamoreaux, 2013.
60 Phil 4,2 ; Pilhofer, 2009, nos 77, 115.
61 Voir aussi Brélaz, 2018a, p. 231-244.
62 Pilhofer, 1995, p. 127-134.
63 Kayser, 2013 ; Förster – Sänger, 2014.
64 Ebel, 2015 ; Walton, 2017. Pour le terme ἐκκλησία, voir Miller, 2015 ; Park, 2015.
65 Pilhofer, 1995, p. 122-127.
66 Harrison, 2018b.
67 Standhartinger, 2013.
68 Hellerman, 2005.
69 Bartels, 2008.
70 Kirbihler, 2012.
71 Phil 1,15-17 ; 1,27-28 ; 2,1-4 ; 3,2 ; 3,18-19.
72 De telles références existent néanmoins, comme le montre, par exemple, Flexsenhar, à paraître, à propos de la mention d’un πραιτώριον dans Phil 1,13 dans laquelle il convient de voir un bâtiment vraisemblablement dépendant de l’administration provinciale romaine.
73 Millar, 1981.
- Thème CLIL : 4046 -- RELIGION -- Christianisme -- Théologie
- ISBN : 978-2-406-09414-2
- EAN : 9782406094142
- ISSN : 2269-479X
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09414-2.p.0053
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 24/06/2019
- Périodicité : Trimestrielle
- Langue : Français
- Mots-clés : Paul, Philippes, Macédoine, colonie romaine, Empire romain, archéologie, épigraphie