Les vertus de la vérité
- Type de publication : Article de revue
- Revue : Revue d’Histoire et de Philosophie Religieuses
2019 – 1, 99e année, n° 1. Qu’est-ce que la vérité ? Hommage à André Birmelé - Auteur : Lehmkühler (Karsten)
- Pages : 129 à 146
- Revue : Revue d'Histoire et de Philosophie religieuses
Les vertus de la vérité
Karsten Lehmkühler
Université de Strasbourg – Faculté de Théologie Protestante (EA 4378)
À côté de la question sceptique de Pilate, « Qu’est-ce que la vérité ? » (Jn 18,38), l’évangile de Jean nous présente cette autre parole sur la vérité, plus existentielle, dans la bouche du Christ : « La vérité vous rendra libres » (Jn 8,31). De même, dans les épîtres de Jean, on trouve à plusieurs reprises l’affirmation selon laquelle on peut « marcher dans la vérité1 ». Il semble donc que la vérité ne soit pas seulement une notion théorique, une question de correspondance entre un énoncé et un état de fait, mais qu’elle soit avant tout un mode de vie, une manière d’être qui s’avère libératrice : on peut vivre dans la vérité. Mais que signifie « vivre dans la vérité » ? Comment y parvenir ? Peut-on choisir la vérité comme modus vivendi ?
Parler d’une « manière de vivre », c’est parler des vertus, comprises comme des dispositions, des habitus qui nous permettent, dans une situation donnée, d’agir d’une certaine manière, donc, par exemple, d’agir de façon véridique. Nous essayerons, dans la suite de cette étude, de répondre aux questions que l’on vient de formuler, cela dans le cadre d’une éthique de la vertu2, en faisant ressortir quatre vertus essentielles pour mener une vie dans la vérité : l’exactitude, la sincérité, le courage et la prudence. Pour l’étude des deux premières, nous nous inspirerons du remarquable ouvrage Vérité et véracité du philosophe britannique Bernard 130Williams3. Avant de présenter ces quatre vertus l’une après l’autre, il convient de préciser davantage ce à quoi renvoie la notion de la vérité en tant que modus vivendi.
Avant l’apparition de la foi chrétienne, Aristote avait déjà traité la question de la véracité, en l’insérant dans une réflexion sur les caractéristiques et les habitudes des êtres humains, ou, en d’autres termes, en l’intégrant dans un discours sur les vertus. Dans cette perspective, il dit, à propos de l’homme « porté à la vérité » (ἀληθευτικός), qu’il tient le juste milieu entre la vantardise (ἀλαζονεία) et l’ironie ou la réticence (εἰρωνεία). Cette conception de la vertu comme juste milieu se marie à celle qui y voit une disposition stable située au fondement des paroles et des actes de la personne. Aristote pose la définition suivante :
Il semble donc que le vantard soit celui qui prétend volontiers à des titres de gloire qu’il n’a pas ou à des plus grands titres que les siens. Celui qui se dénigre, lui, semble bien, à l’inverse, nier ceux qu’il a ou les diminuer. Quant à celui qui tient le milieu, c’est quelqu’un qui reste en quelque sorte lui-même, porté à la vérité tant dans l’existence que dans son discours, reconnaissant les avantages qui sont les siens sans les majorer ni les diminuer. (Éthique à Nicomaque 1127a4.)
La vie véridique s’incarne ici dans une correspondance entre les qualités d’une personne et sa manière d’en témoigner. Aristote souligne particulièrement que cette véracité concerne tout un style de vie, et que « l’intéressé tient à dire la vérité et à laisser voir son existence sous son vrai jour parce que tel est son état ». Cette sincérité est devenue, pour lui, une sorte de seconde nature :
[C]elui qui aime la vérité, jusqu’à dire vrai dans les circonstances où cela n’a pas d’importance, dira aussi la vérité dans les circonstances où cela compte. À plus forte raison, car si le mensonge est alors une vilenie, il l’évitera d’autant plus qu’il l’évitait déjà en lui-même. (Éthique à Nicomaque 1127b5.)
Pour la foi chrétienne également, la vérité ne se réduit pas à la rectitude des énoncés (bien que celle-ci soit très importante, pour les énoncés de foi par exemple), mais elle concerne la vie humaine tout entière : l’homme peut, comme nous l’avons mentionné, « marcher dans la vérité ». En dernière instance, la vérité est comprise 131comme une réalité personnelle, le Christ (cf. Jn 14,6), et « marcher dans la vérité » est donc une vie dans une relation vivante au Christ. L’être humain est décrit comme un être qui, de par sa nature, est orienté vers cette vérité. Augustin, par exemple, nous a laissé non seulement deux ouvrages sur le mensonge6, mais aussi, dans ses célèbres Confessions, des réflexions sur le lien entre la vérité et la condition humaine ; l’homme, dit-il, est un être qui cherche la vérité et qui ne peut devenir heureux sans elle :
La vérité, ils l’aiment telle qu’elle est, puisqu’ils ne veulent pas se tromper, et quand ils aiment de vivre heureux, chose identique à la joie qui a sa source dans la vérité, c’est la vérité encore qu’ils aiment… (Confessions X, 23, 337.)
Si l’homme est destiné à une vie enracinée dans la vérité, celle-ci doit s’incarner dans son mode de vie, dans ses habitudes et dans tout ce qui le caractérise. Pour comprendre la notion de la vérité et celle d’une vie dans la vérité, il semble donc prometteur, dans le cadre de la théologie chrétienne aussi, de s’intéresser aux vertus qui pourraient incarner, dans une vie humaine, la quête de la vérité, ainsi qu’une vie véridique. Cet éclairage porté sur le concept de la « vérité » par celui des « vertus de la vérité » est important : il permet de réfléchir non seulement sur un concept abstrait, mais encore sur des caractéristiques et des actions concrètes, et d’expliquer pourquoi elles peuvent avoir une valeur fondamentale pour l’être humain et pour les sociétés humaines.
Le célèbre philosophe Bernard Williams définit les « vertus de la vérité » comme des qualités d’individus humains « qui se manifestent dans le désir de connaître la vérité, dans sa découverte, dans la communication qu’ils en font à autrui8 ». Williams définit deux vertus cardinales de la vérité, et il les applique, de façon exemplaire, au cas de la recherche universitaire. Il y a en effet
deux vertus cardinales de la vérité, […] l’exactitude et la sincérité : on fait de son mieux pour acquérir des certitudes et ce qu’on communique correspond à ce dont on est certain. L’autorité des universitaires doit 132s’enraciner dans leur véracité, qui prend les deux formes suivantes : ils s’appliquent et ils ne mentent pas9.
Examinons de plus près chacune des deux vertus mentionnées par le philosophe britannique, avant d’y ajouter des réflexions sur le courage et sur la prudence.
L’exactitude :
s’appliquer sans se leurrer soi-même
Dans tous les domaines de la vie humaine, la quête de la vérité demande avant tout un certain engagement, un zèle, une disposition à se donner de la peine et à endosser le labeur de trouver la vérité. Pensons au travail d’un juge qui cherche à connaître la vérité à propos d’un crime pour pouvoir prononcer un jugement droit ; pensons au scientifique qui ne cesse de vérifier, voire de falsifier une théorie pour savoir si elle correspond ou non aux faits ; pensons au théologien engagé dans les dialogues œcuméniques, qui étudie scrupuleusement les textes des différentes confessions pour savoir si les interprétations que l’on en donne habituellement s’avèrent justes ou s’il faut les corriger : la quête de la vérité a un coût, et c’est la vertu de l’exactitude qui nous fait endosser ce coût. D’une certaine manière, la vertu de l’exactitude nous aide ainsi à dépasser l’inertie, en suscitant en nous l’élan et la passion de chercher la vérité. Il en va de même pour la quête de la vérité dans les relations personnelles : il est facile de se forger une opinion superflue sur les motifs d’autrui, il est bien plus laborieux d’essayer de le comprendre, de l’écouter, de connaître sa situation particulière qui l’a poussé à agir d’une certaine manière.
L’exactitude est aussi d’une importance capitale dans la quête d’une réponse véridique sur le plan de l’éthique : la pertinence d’une réponse éthique face à une question concrète dépend de la connaissance exacte de la situation des personnes en cause. Il est facile d’émettre un jugement général à propos d’une question d’éthique appliquée, que ce soit, par exemple, la gestation pour autrui ou encore le suicide assisté, mais il est beaucoup plus 133laborieux de s’intéresser à la diversité des situations concrètes dans lesquelles une telle question peut apparaître, en prenant en compte aussi les données médicales, psychologiques et sociales. La notion d’exactitude est ici proche de celle de « conformité aux faits », chère à Dietrich Bonhoeffer qui en fait une des conditions d’une vie responsable. « (C)haque chose, dit-il, obéit à une loi ontologique [Wesensgesetz] qui lui est inhérente. […] Pour être conforme à la réalité, l’action responsable doit découvrir et observer ces lois10. » La personne responsable a donc comme tâche d’étudier le fonctionnement et les principes inhérents d’une réalité donnée, dans le but de les comprendre et de forger ainsi une réponse éthique qui ne passe pas à côté de cette réalité mais qui y corresponde.
De façon inattendue, la réflexion sur l’exactitude implique aussi celle sur le rapport à soi. Selon Bernard Williams, l’exactitude nous aide à nous défendre « contre le désir et contre l’un des effets du désir qui est de se leurrer soi-même11 ». Le but de la vertu d’exactitude est donc aussi une sorte de lutte menée contre soi-même, en évitant au maximum des perceptions du monde et des affirmations qui ne relèvent pas de l’observation, mais d’un désir, peut-être inconscient, que le monde corresponde à nos souhaits et rêves. Se cache donc ici une déontologie qui concerne, certes, tout être humain, mais aussi tout particulièrement les représentants de la recherche scientifique (y compris la recherche en théologie). L’exactitude nous protège contre nous-mêmes, dans la mesure où la quête zélée de la vérité pose des limites à notre désir de trouver la réponse qui nous plairait : « La recherche de la vérité devient, dans ces conditions, un bien intrinsèque12. »
Dans cette même veine, on ajoutera que la vertu d’exactitude protège contre le risque de se leurrer par l’usage d’une terminologie imprécise. La théologie n’est pas exempte de ce risque. Prenons l’exemple du théologien qui, lorsqu’on lui pose la question de savoir s’il y a vraiment des miracles, répond positivement, affirmant que chaque grain qui germe et qui devient une plante en est une preuve. Tandis que l’auteur de la question visait le miracle comme interruption des lois naturelles, le théologien qualifie de miracles des processus qui, précisément, sont régis par ces lois. La vertu 134d’exactitude nous fait refuser de tels faux-fuyants reposant sur des concepts flous ; elle nous aide à chercher, avec passion et patience, la plus grande clarté terminologique.
La sincérité : ne pas tromper
Si la vertu d’exactitude nous aide à trouver la vérité, la vertu de la sincérité assure sa transmission à autrui : elle est donc « une disposition à s’assurer que ce qu’on exprime correspond à ce qu’on pense vraiment13 ». Si le vis-à-vis peut compter sur la véracité de la transmission, la confiance peut s’installer parmi les humains. La sincérité est une vertu qui incarne une certaine fiabilité de la personne ; de cette manière, sincérité et confiance vont de pair. Cette observation correspond d’ailleurs à une spécificité de la langue hébraïque et aussi, par conséquent, de la pensée hébraïque : emeth, la vérité, dérive de la racine aman qui exprime l’idée de stabilité et de fidélité. Pour la pensée vétérotestamentaire, les notions de fidélité, de fiabilité et de vérité sont ainsi inséparablement liées.
La sincérité est le contraire de la « duplicité ». Dans son ouvrage sur le mensonge chez Augustin14, le théologien Paul J. Griffiths explique que cette notion de duplicité se trouve au cœur de la définition augustinienne du mensonge. À en croire l’évêque d’Hippone, le mensonge n’est pas d’abord un énoncé qui ne correspond pas à un état de fait. La personne qui affirme quelque chose qui ne correspond pas à un état de fait en étant convaincue que cette affirmation est juste ne ment pas, mais elle se trompe. Le contenu de l’affirmation est faux, mais sa transmission peut être véridique. Le mensonge est plutôt cette duplicité marquant l’écart entre une opinion intérieure et une affirmation contraire énoncée face à l’autre. Emmanuel Kant reprend cette définition augustinienne, stipulant que le mensonge est le fait d’« avoir une chose de cachée dans le cœur, et une autre de prête sur la langue » (« aliud lingua promptum, aliud pectore inclusum gerere15 »).
135À juste titre, Williams stipule qu’il s’agit ici d’une formule qui « s’applique plus largement qu’au seul mensonge16 » : une telle duplicité ne concerne pas uniquement les phrases exprimées, mais aussi les pensées que l’on espère susciter chez l’interlocuteur. Il y a en effet des phrases qui sont « vraies » sur le plan formel et logique, mais qui essaient néanmoins de tromper le vis-à-vis. Williams donne l’exemple très parlant d’une personne qui ouvre une lettre adressée à son ami. Quand l’ami arrive, elle lui dit, peut-être avec indignation : « Quelqu’un a ouvert ton courrier17 ». La phrase est « vraie » sur le plan logique, mais il ne s’agit pas d’une affirmation sincère. Ce problème, connu aussi sous le terme technique des « implicatures » de nos affirmations, montre bien que la vertu de sincérité, comprise comme une disposition à prononcer un discours véridique, évite toute forme de duplicité et vise la transmission de ce que nous pensons vraiment. Elle implique l’intention, de la part de celui qui parle, de ne pas tromper son vis-à-vis en jouant sur les non-dits implicites dans l’assertion. Car, « quand on s’appuie sur ce que quelqu’un a dit, on s’appuie inévitablement sur plus qu’il n’en a dit18 ».
En définitive, il est important de comprendre que la transmission sincère de la pensée se fonde sur un amour intrinsèque de la vérité : la vertu de la sincérité s’enracine dans le désir d’être une personne véridique. Elle s’apparente ainsi à l’estime de soi, voire à l’honneur : personne n’aime passer pour un menteur, ni dans le jugement des autres, ni devant sa propre conscience. C’est pourquoi l’éthicien Traugott Koch affirme, dans une réflexion sur le commandement interdisant le faux témoignage, que le discours véridique nécessite un attachement personnel à la vérité :
Dire la vérité et énoncer ce qui est réel, dans une relation de confiance réciproque, comprend cette condition que celui qui parle veuille en lui-même être sincère, c’est-à-dire qu’il place profondément son intérêt dans la vérité de ce qu’il veut dire et dans la vérité de la communion avec l’autre. La vérité […] a son lieu dans la véracité et donc dans le plus profond d’un être humain : dans son intérêt personnel. Sans […] ce “vouloir être vrai”, la vérité n’émerge pas parmi les hommes19.
136L’attachement personnel à la vérité implique aussi le souci d’être sincère avec soi-même et d’éviter de se mentir. André Comte-Sponville le précise bien, en parlant de la vertu de bonne foi : « La bonne foi est une sincérité à la fois transitive et réflexive. Elle règle […] nos rapports à autrui aussi bien qu’à nous-même20. » Le phénomène paradoxal du mensonge à soi-même – être à la fois le menteur et la personne trompée – est bien connu et discuté en philosophie. Emmanuel Kant en parle dans sa doctrine de la vertu21, et Jean-Paul Sartre en traite dans un chapitre de son ouvrage L’être et le néant, intitulé « La mauvaise foi22. » Sartre y affirme que l’on « peut vivre dans la mauvaise foi23 », comprise ici comme mensonge fait à soi-même24, et il explique :
On se met de mauvaise foi comme on s’endort et on est de mauvaise foi comme on rêve. Une fois ce mode d’être réalisé, il est aussi difficile d’en sortir que de se réveiller : c’est que la mauvaise foi est un type d’être dans le monde, comme la veille ou le rêve, qui tend par lui-même à se perpétuer25.
Pour le philosophe existentialiste, une personne ne peut d’ailleurs « se réveiller » et quitter ce modus vivendi qu’en passant par une conversion radicale, un éveil radical à l’authenticité26.
Dans la théologie chrétienne, le problème de la sincérité vis-à-vis de soi-même est étroitement lié à la sincérité devant Dieu : c’est coram Deo que l’homme se reconnaît vraiment et peut commencer une vie véridique. Le fait de savoir qu’il « est connu » (comme Paul 137le formule en 1 Co 13,12), constitue un savoir consolateur qui donne à l’homme la liberté et la franchise nécessaires pour faire face à son existence propre. C’est sur ce fondement d’une connaissance et d’une acceptation divine sans réserve que peut s’installer, chez l’homme, une sincérité vis-à-vis de lui-même. L’auto-connaissance restera toujours partielle, de même que la sincérité vis-à-vis de soi-même : personne ne peut prétendre être totalement sincère dans son rapport à soi. Face à ce constat, la spécificité de l’approche chrétienne et, plus généralement, de toute approche religieuse de la sincérité à l’égard de soi-même consiste en ceci : tout en cherchant à entrer dans un rapport véridique avec lui-même, le croyant se fondera ultimement sur le fait qu’il est connu et aimé par Dieu. C’est pourquoi le psalmiste prie (Ps 139,23) : « Dieu ! scrute-moi et connais mon cœur », est c’est également pourquoi Dietrich Bonhoeffer s’exclame, dans un poème touchant, rédigé en prison : « Qui suis-je ? Dérision que ce monologue. Qui que je sois, tu me connais, je suis tien, ô Dieu27 ! »
Le courage : oser parler vrai
Dans tous les domaines de la vie humaine, il y a des situations où la transmission de la vérité nécessite du courage et où la vérité a un prix. Un des exemples les plus dramatiques est sans doute la situation d’un dissident sous une dictature, et Vaclav Havel nous en a laissé un témoignage émouvant, dans son essai Le pouvoir des sans-pouvoirs28 qui expose la possibilité et les risques d’un « vivre dans la vérité » dans un tel contexte. Mais le courage de la vérité est également nécessaire dans des situations moins dangereuses, dans la vie quotidienne et professionnelle en général, vis-à-vis d’un ami, d’un collègue, d’un supérieur. Il en va de même pour la recherche scientifique, et peut-être particulièrement dans le domaine des sciences humaines (y compris la théologie), où, par exemple, l’exposition d’une connaissance, d’une théorie, d’une position qui s’impose au chercheur mais qui ne s’inscrit pas dans le paradigme dominant peut demander du courage. Dans de telles situations, les 138vertus d’exactitude et de sincérité ne peuvent générer des actes concrets qu’à l’aide d’une autre vertu de la vérité : le courage.
Ce courage de la vérité est connu, en philosophie comme en théologie, sous le terme grec de parrhesia. Le dernier cours de Michel Foucault, donné au Collège de France en 1984, quelques semaines avant sa mort, en parle abondamment29. La théologie chrétienne s’est toujours intéressée à ce concept parce qu’il apparaît, sous forme de substantif ou de verbe, quarante fois dans le Nouveau Testament30 et y joue un rôle important dans la compréhension du message chrétien. Selon Heinrich Schlier, ancien professeur du Nouveau Testament à l’Université de Bonn, le terme parrhesia « vient de la sphère politique » et désigne « une caractéristique essentielle de la démocratie grecque31 ». Le citoyen de la polis a le droit de « tout dire » (parrhesia étant un dérivé de πᾶν, tout, et ῥῆσις, discours). On pourrait donc, dans un premier temps, traduire parrhesia par « liberté de parole ». Cette liberté implique le droit, mais aussi le courage de tout dire. Le terme peut donc désigner également la franchise qui, notamment entre des amis, permet une véracité des paroles, même lorsque l’on est amené à critiquer ou à réprimander le vis-à-vis. Mais face à des autorités aussi, face à un roi, par exemple, certaines personnes peuvent être autorisées à parler en toute franchise, avec une parrhesia qui ne doit pas craindre la colère ou le jugement.
Dans le Nouveau Testament, la parrhesia désigne, tout d’abord, la liberté et le courage du croyant face à Dieu : dans la foi, il est permis de tout dire, et la relation entre l’homme est Dieu est marquée par ce courage qui s’enracine dans la confiance. Ainsi, l’auteur de l’épître aux Éphésiens affirme que les chrétiens ont, par la foi en Christ, « la liberté (parrhesia) de [s’]approcher [de Dieu] en toute confiance » (Ep 3,1232).
La parrhesia concerne aussi les relations humaines et, dans le contexte néotestamentaire, avant tout la prédication chrétienne, qui se fait dans une grande « assurance » et de façon courageuse, même face aux menaces des autorités publiques. Ainsi, l’auteur des Actes des apôtres raconte que, lorsque Paul et Jean parlaient du Christ devant le Sanhédrin, les autorités juives « constataient l’assurance 139(parrhesia) de Pierre et de Jean et, se rendant compte qu’il s’agissait d’hommes sans instruction et de gens quelconques, ils en étaient étonnés » (Ac 4,13). Cette parrhesia est liée au don de l’Esprit, comme on peut le lire quelques versets plus loin (Ac 4,31) : « […] ils furent tous remplis du Saint Esprit et disaient avec assurance (parrhesia) la parole de Dieu ». On ne s’étonne pas, compte tenu de telles affirmations, que Martin Luther traduise le terme parrhesia parfois par le mot allemand Freimut – un courage libre ou libéré.
Dans son essai sur Le courage de la vérité, Foucault s’inspire, entre autres, de ces textes néotestamentaires. En comparant la parrhesia des philosophes cyniques et celle des chrétiens, Foucault constate que le christianisme pense « l’idée d’un accès à l’autre monde comme accès à la vérité », et que cette vérité transcendante « fonde la vérité de cette vie vraie que l’on mène dans ce monde-ci33 ». Foucault semble voir, dans cette interaction, le croisement entre un au-delà conçu comme un monde autre et une existence terrestre, hic et nunc, dans laquelle le chrétien ose exprimer des paroles vraies. La parrhesia chrétienne est tout d’abord une « modalité du rapport à Dieu, modalité pleine et positive » : c’est « quelque chose comme l’ouverture de cœur, la transparence de l’âme qui s’offre au regard de Dieu34 ». Le philosophe précise que la parrhesia devant Dieu reste un « dire vrai », mais « ce n’est même plus un “dire” : c’est l’ouverture de l’âme qui se manifeste dans sa vérité à Dieu et porte cette vérité jusqu’à Lui35 ». Cette parrhesia coram Deo donne ensuite naissance à l’attitude courageuse dans la vie ici-bas ; elle se manifeste dans le courage de la prédication. Et Foucault d’attirer l’attention aussi sur le temps des martyrs et de constater : « Le martyr, c’est le parrèsiaste par excellence36. » Dans le cadre de l’éthique théologique, on ne peut que confirmer cette relation entre parrhesia coram Deo et parrhesia coram hominibus : c’est la relation confiante et véridique à Dieu qui permet d’avoir le courage de la vérité auprès des hommes.
140La prudence :
pondérer les biens en cause
Il n’est pas possible de parler des « vertus de la vérité » sans mentionner la question importante et difficile de la forme concrète que l’on donne à la transmission d’une vérité, notamment lorsqu’il s’agit d’une vérité difficilement supportable, par exemple, dans le cadre de l’éthique médicale, l’annonce d’une maladie grave. Que signifie, dans de tels cas, « dire la vérité dans l’amour » (Ep 4,15) ?
Une deuxième question, voisine, s’ajoute : peut-il y avoir des situations dans lesquelles il faut contourner la vérité, voire y renoncer en usant d’un mensonge ? On ne peut pas s’empêcher de songer d’emblée à la position rigide d’Emmanuel Kant, stipulant que, dans aucun cas, le mensonge ne serait préférable à la vérité37. Cette position se trouve en effet déjà chez Augustin38. Kant argumente en se fondant sur la nature-même du langage, talent précieux des humains : il représente la capacité unique en son genre de transmettre ce que nous pensons. Le mensonge serait donc une négation de cette capacité humaine elle-même et, en définitive, une négation de notre humanité. Que pourrait-on dire concernant cette position radicale, dans le cadre d’une réflexion sur les vertus de la vérité ?
Si notre réflexion se limitait aux vertus de sincérité et de courage, on pourrait en effet défendre un comportement qui consiste à dire la vérité, toujours et dans toute situation, de façon brute et sans égard aucun à la situation concrète des interlocuteurs – une sorte d’excès de véracité et de franchise qui, à vrai dire, détournerait le sens salutaire d’une vie menée en vérité. Mais, comme nous l’avons constaté, rien que la vertu d’exactitude implique, dans le cadre du débat éthique tout au moins, une prise en compte méticuleuse de la situation concrète dans laquelle un problème éthique s’inscrit. Mais comment évaluer le poids de cette situation concrète ? Comment pondérer, le cas échéant, le courage de la vérité et le souci pour les personnes dont le destin dépendra de nos paroles ?
141Face à de telles questions, c’est la vertu de la prudence (φρόνησις, ou prudentia en latin), si chère à la philosophie grecque, qu’il faut nommer ici en dernier lieu, en parlant plus spécifiquement d’une prudence dans la transmission de la vérité. La prudence est, dans ce contexte, la vertu qui, en même temps pondère et tient ensemble deux biens : la quête d’une vie véridique et la responsabilité, pour soi-même et pour les autres, dans une situation concrète. Elle permet ainsi de prendre la bonne décision dans une situation concrète et singulière – comme Aristote l’a déjà décrit39, en précisant qu’il s’agit d’une capacité qui dépend de l’expérience et qui se développe donc avec l’âge.
Dans le contexte de la quête d’une vie véridique, la vertu de prudence nous protège contre une attitude qui se résumerait dans la phrase : Fiat veritas, pereat mundus, « Que la vérité s’installe, même si le monde s’écroule. » Elle nous aide à éviter ce que Dietrich Bonhoeffer a pu appeler une « vérité cynique », voire une « vérité satanique » : dans son célèbre essai « Que signifie “dire la vérité”40 ? », il souligne en effet que la question de la vérité ne peut pas être déconnectée du contexte des relations au sein desquelles nos paroles sont prononcées. La façon de « dire la vérité » dépend des situations, et plus particulièrement des relations dans lesquelles nous vivons et qui exigent de nous des paroles de vérité. Un acte langagier est à la fois porteur d’un contenu et expression d’une relation spécifique au sein de laquelle cet acte a lieu. Ainsi, il y a toujours une vérité de contenu et une vérité relationnelle entre le locuteur et son destinataire. Si la réflexion éthique ne porte que sur l’exigence de transmettre des contenus vrais, sans aucun intérêt pour la situation concrète, elle débouche nécessairement sur une vérité cynique. Celle-ci est certes une proposition vraie, mais une vérité qui fait abstraction de la vulnérabilité des humains, de la situation concrète et des relations qui sont ici en cause. « Le cynique qui prétend “dire la vérité” de la même manière partout, en tout temps et à chaque homme, n’affiche qu’un simulacre de vérité41. »
Bonhoeffer donne l’exemple d’un professeur qui demande à un élève, devant la classe, « s’il est vrai que son père rentre souvent 142ivre à la maison. C’est vrai, mais l’enfant le conteste42. » L’enfant se voit ici contraint de choisir entre la vérité du contenu (il est vrai que son père est alcoolique) et la vérité relationnelle : instinctivement, il sait qu’il faut protéger sa famille, et que la relation entre le professeur et les élèves ne permet pas, notamment devant la classe, le dévoilement d’une vérité intime et personnelle. Vouloir ici exiger une prépondérance absolue de la vérité propositionnelle, c’est devenir un cynique qui,
[en] se donnant le prestige d’un fanatique de la vérité qui ne veut avoir d’égards pour les faiblesses humaines, […] détruit la vérité vivante entre les hommes. Il porte atteinte à la pudeur, profane le mystère, viole la confiance, trahit la communauté dans laquelle il vit, et sourit avec suffisance des ruines qu’il a causées et de la faiblesse humaine “incapable de supporter la vérité”43.
Selon Bonhoeffer, une vie dans la vérité implique donc, de façon nécessaire, une sensibilité pour le mode concret de la transmission de la vérité, et même, dans certains cas extrêmes, un renoncement à la vérité propositionnelle. Sur le plan théologique, son plaidoyer pour une vérité « située » s’adosse à la christologie : dans l’incarnation, Dieu a assumé et honoré l’existence concrète des humains. À la lumière de cette kénose divine, l’éthique chrétienne ne peut plus jamais faire abstraction de la concrétude des situations qui exigent une décision.
Qui dit Dieu n’a pas le droit de rayer simplement le monde donné dans lequel il vit ; car il ne parlerait pas alors de Dieu qui, en Jésus-Christ, est entré dans ce monde, mais d’une quelconque idole métaphysique44.
La prudence est particulièrement nécessaire dans des situations où celui qui souhaite dire la vérité porte des responsabilités pour d’autres personnes. Vaclav Havel en donne un autre exemple touchant, à propos de la dissidence dans le système totalitaire communiste. Il décrit la situation d’un gérant d’un magasin de légumes45 qui, dans le but de vivre dans la vérité, ne souhaite plus afficher, dans son magasin, la banderole : « Prolétaires de tous pays, unissez-vous ! » Mais le gérant sait que cette « tentative de “vie dans la vérité” » sera bientôt sanctionnée :
143Les représailles suivront rapidement : on le privera de sa place de gérant, il sera déplacé chez les manutentionnaires ; son salaire baissera ; l’espoir de passer ses vacances en Bulgarie s’évaporera ; ses enfants verront la poursuite de leurs études compromise. Ses supérieurs le chicaneront et ses collègues s’étonneront46.
Il se peut donc que le marchand hésite, même s’il est prêt à lutter pour la vérité. Il se peut qu’il soupèse les arguments pour et contre un tel refus d’obéissance, sachant notamment que d’autres personnes dépendent de lui, et sachant aussi qu’il faut éventuellement réserver ses forces et sa liberté pour des moments plus importants de résistance.
Dans de telles situations, personne ne peut donner de règles générales ; c’est dans la situation elle-même que la personne est amenée à mesurer, avec prudence, le poids des différents biens en cause. Mais il est important d’ajouter ceci : dans de telles réflexions sur la prudence, le but du « dire vrai » n’est jamais perdu de vue : la personne prudente ne cesse pas d’être, en même temps, la personne sincère, et sa visée restera toujours la vie véridique, même s’il faut peut-être, dans un cas extrême, renoncer à la vérité propositionnelle. De cette manière, la prudence n’a de sens que sur le fondement de la sincérité et de l’exactitude, et toutes les trois ont besoin du courage pour que, dans une vie entière comme dans le kairos particulier, nous puissions « vivre dans la vérité ».
Conclusion
La quête d’une vie dans la vérité fait partie des caractéristiques fondamentales d’une existence chrétienne. Cette vie dans la vérité se manifestera dans des traits de caractère et dans les paroles et les actes qui en découlent. La réflexion sur les « vertus de la vérité » essaie de jeter quelque lumière sur cette manifestation concrète de la vérité dans la vie chrétienne. Elle montre en effet que ces vertus libèrent : l’exactitude libère de l’inertie et de l’illusion, la sincérité libère de la duplicité et de la mauvaise foi, le courage libère de la peur des conséquences du dire vrai, la prudence libère de la vérité cynique et ouvre le regard pour la vie responsable.
144La théologie protestante ne devrait pas se refuser à une telle intégration de la notion de vertu dans la compréhension théologique de l’homme gracié : c’est dans le cadre de la doctrine de la sanctification, si chère à Calvin, ou de celle de la justification effective, soutenue par la théologie luthérienne, que la réflexion sur les vertus devrait se déployer. Dans ce cadre, les vertus sont comprises comme un don, une grâce (pourquoi pas, avec Calvin, comme une « deuxième grâce » après celle de la justification) : la grâce de pouvoir évoluer dans la manifestation concrète de la vérité dans une vie humaine ; la grâce de la formation d’un caractère, marqué par des traits qui témoignent d’une vérité qui libère.
Certes, les vertus s’exercent, et les vertus de la vérité ne font pas exception : cette interaction entre le charisme divin et l’accueil actif de l’homme marque l’existence chrétienne. Il faut retenir, dans le cadre d’une éthique protestante aussi, qu’un caractère se forme tout au long de la vie, et que cette formation demande qu’on s’y adonne avec application. De cette manière, les vertus de la vérité s’intégreront dans une biographie et témoigneront, à leur façon, du fait que la vérité rend libre.
Bibliographie
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Augustin, « Contra mendacium – Contre le mensonge », Œuvres de saint Augustin. Première série : Opuscules. II. Problèmes moraux. Traduction, introduction et notes de Gustave Combès, 2e éd., Paris, Desclée de Brouwer, coll. « Bibliothèque Augustinienne » 2, 1948, p. 345-453 (1re éd., 1937).
Augustin, Confessions, traduction par Louis de Mondadon, Paris, Éditions du Seuil – Éditions Pierre Horay, coll. « Points. Sagesses », 1982.
Augustin, Le Mensonge, traduction par Gustave Combès, préface de Jean-Marie Salamito, Paris, Éditions de l’Herne, coll. « Carnets de l’Herne », 2010.
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Computer-Konkordanz zum Novum Testamentum Graece von Nestle-Aland, 26. Auflage und zum Greek New Testament, 3rd edition, éd. Institut für neutestamentliche Textforschung et Rechenzentrum der Universität Münster, Berlin – New York, Walter de Gruyter, 1980.
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1 2 Jn 4 ; 3 Jn 3-4.
2 Cet essai s’inscrit donc dans le mouvement de redécouverte des vertus dans l’éthique théologique, cf. notamment Hauerwas, 1994 ; Dumas, 1989. Pour ce qui concerne les vertus de la vérité, cf. aussi Jeanmart, 2012.
3 Williams, 2006.
4 Aristote, 2004, p. 214.
5 Aristote, 2004, p. 215 sq.
6 Il s’agit du De mendacio et du Contra mendacium (Augustin, 1948a et 1948b ; Augustin, 2010). – Pour la pensée d’Augustin sur le mensonge, cf. notamment Griffiths, 2010.
7 Augustin, 1982, p. 274.
8 Williams, 2006, p. 20.
9 Ibid., p. 25.
10 Bonhoeffer, 1997, p. 192 sq.
11 Williams, 2006, p. 153.
12 Ibid., p. 172. – Dans ce contexte, Williams renvoie d’ailleurs à l’article célèbre de Max Weber, « Le métier et la vocation de savant », texte qui traite de la déontologie du chercheur et qui reste tout à fait d’actualité (Weber, 1969).
13 Williams, 2006, p. 120.
14 Griffiths, 2010.
15 Cité et traduit chez Williams, 2006, p. 133. Cf. Kant, 1968, p. 103 (Doctrine de la vertu, § 9).
16 Williams, 2006, p. 133.
17 Cf. ibid., p. 121.
18 Ibid., p. 125.
19 Koch, 1995, p. 15 (nous traduisons).
20 Comte-Sponville, 1995, p. 257.
21 Kant, 1968, p. 104 (Doctrine de la vertu, § 9) : « Il est facile de prouver la réalité de beaucoup de mensonges intérieurs dont les hommes se rendent coupables. » Et Kant de citer des exemples tirés de la religion, comme celui-ci (ibid.) : « Par exemple, il se ment à lui-même lorsqu’il feint de croire à un futur juge du monde, tandis qu’il ne découvre point cette croyance en lui-même, mais se persuade qu’il ne saurait lui être nuisible, mais tout au contraire avantageux de la professer en se plaçant par la pensée devant celui qui sonde les cœurs, afin d’obtenir en tout cas sa faveur. »
22 Sartre, 1943, p. 85-111.
23 Ibid., p. 88. – Le prophète Ésaïe déjà dénonçait ceux qui affirment : « […] nous nous sommes fait du mensonge un refuge et dans la duplicité nous avons notre abri » (Es 28,15).
24 Plus particulièrement, la mauvaise foi est ici « un certain art de former des concepts contradictoires » (ibid., p. 95), dans le but de se voiler la condition humaine, oscillant entre facticité et transcendance.
25 Ibid., p. 109.
26 Sartre mentionne cette conversion brièvement dans une note de bas de page (ibid., p. 484) ; il en parlera plus amplement dans ses Cahiers pour une morale (Sartre, 1983).
27 Bonhoeffer, 2006, p. 415.
28 Havel, 1989.
29 Foucault, 2009.
30 Cf. Computer-Konkordanz, 1980, col. 1471 sq.
31 Schlier, 1954, p. 869 (nous traduisons).
32 Des affirmations proches se trouvent en He 4,16 et 10,19.
33 Foucault, 2009, p. 293.
34 Ibid., p. 297.
35 Ibid., p. 298.
36 Ibid., p. 302.
37 Notamment dans ses Fondements d’une métaphysique des mœurs (Kant, 1963, p. 25 sq.) et dans le petit écrit Sur un prétendu droit de mentir par humanité (Kant, 1967).
38 Cf. Augustin, 2010 (De mendacio), notamment le chapitre 13, avec l’affirmation, tirée de Sagesse 1,11, que le mensonge « tue l’âme ».
39 Cf. le sixième livre de l’Éthique à Nicomaque, notamment 1140a1 et b1 (Aristote, 2004, p. 289-344, en particulier p. 302-308).
40 Ce texte est publié, en traduction française, dans l’Éthique de Bonhoeffer (Bonhoeffer, 1997, p. 308-316).
41 Ibid., p. 310.
42 Ibid., p. 312.
43 Ibid., p. 310.
44 Ibid., p. 309.
45 Havel, 1989, p. 72, 86.
46 Ibid., p. 86.
- Thème CLIL : 4046 -- RELIGION -- Christianisme -- Théologie
- ISBN : 978-2-406-09199-8
- EAN : 9782406091998
- ISSN : 2269-479X
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-406-09199-8.p.0129
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 24/04/2019
- Périodicité : Trimestrielle
- Langue : Français
- Mots-clés : Vérité, vertu, exactitude, sincérité, courage, prudence, sanctification, liberté