Résumés
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Métaphore, savoirs et arts au début des temps modernes
- Pages : 347 à 354
- Collection : Rencontres, n° 257
- Série : Colloques, congrès et conférences sur la Renaissance européenne, n° 89
Résumés/Abstracts
Nathalie Dauvois, « Le commentaire de Jason Denores à l’art poétique d’Horace. Une théorie de la mimesis métaphorique »
Dans le Commentaire des v. 46-48 de l’Art poétique d’Horace de Jason Denores, on peut trouver un véritable petit traité sur la métaphore. L’humaniste cherche à réconcilier non seulement Horace, Cicéron et Aristote mais aussi la Rhétorique et la Poétique de ce dernier, dans le but de faire de la métaphore, la figure par excellence de la mimesis. Il peut le faire grâce à un réseau de comparaisons empruntées au champ théâtral.
In the commentary for verses 46-48 of the Art poétique by Horace de Jason Denores, there is a little treatise on metaphor. The humanist seeks to reconcile not only Horace, Cicero, and Aristotle, but also the Rhétorique and the Poétique of the latter with the aim of making metaphor into the figure par excellence of mimesis. He can do this thanks to a network of comparisons borrowed from the theatrical field.
Nadia Cernogora, « Apories du discours théorique. Les exemples de métaphores dans La Rhétorique françoise d’A. Fouquelin et L’Académie de l’Art poétique de P. de Deimier »
Les traités de poétique et de rhétorique de la Renaissance ne peuvent faire l’économie d’exemples concrets pour définir et illustrer ce qu’est la métaphore. Or, il s’avère que le statut de ces exemples et leur analyse critique sont révélateurs d’enjeux esthétiques et poétiques plus larges, touchant tout aussi bien aux « normes du bien dire » qu’aux droits concédés au genius singulier des poètes.
Renaissance treatises of poetics and rhetoric cannot avoid using concrete examples to define and illustrate what a metaphor is. It so happens that the status of these examples and their critical analysis reveal something of wider aesthetic and poetic issues, affecting the norms of good speaking as well as the rights conceded to the singular genius of poets.
348Marine Molins, « Le rôle joué par la métaphore dans la traduction au xvie siècle »
Par la subjectivité qu’elle implique, la métaphore a été au centre des débats qui ont divisé les traducteurs de la Renaissance. Comment « transférer » d’une langue en une autre des phénomènes qui dépassent la simple fabrication d’images mais s’entourent d’effets diffus propres à chaque langue ? Il s’en est suivi chez les traducteurs la nécessité de faire des choix. Les meilleurs traducteurs furent ceux qui surent trouver des équivalents métaphoriques aussi poétiquesque les textes sources.
Because of the subjectivity it implies, metaphor was at the centre of the debates which divided translators in the Renaissance. How to transfer phenomena from one language to another, particularly when these phenomena go beyond the simple fabrication of images and surround themselves with diffuse effects proper to each language? Translators thus need to make choices. The best translators were those who knew how to find metaphorical equivalents as poetic as those of the source texts.
Xavier Bonnier, « Métaphores scientifiques et savoirs du désir chez Maurice Scève »
Un aspect déroutant du style de Scève dans sa Delie réside dans l’usage qu’il fait de termes techniques relevant de champs du savoir spécialisés. Ces mots doivent souvent être entendus comme métaphores des émotions de l’Amant, mais leur signification précise dans le contexte immédiat laisse le lecteur perplexe. Il vaut dès lors la peine de voir si le doute persiste après un examen serré de chaque poème concerné et quel bénéfice esthétique recherche le poète en utilisant ces étranges formules.
A disconcerting aspect of Scève’s style in his Delie is to be found in the use he makes of technical terms connected to specialised fields of knowledge. These words are often understood as metaphors for the lover’s emotions, but their precise signification in the immediate context leaves the reader perplexed. It is worth seeing if this doubt persists after a close examination of each poem concerned, and what aesthetic advantage the poet is looking for by using these strange formulas.
Daniel Ménager, « Les métaphores de l’équitation chez Ronsard »
Très tôt, Ronsard a appris l’art de conduire doucement le cheval. Il a aussi rêvé de l’ivresse du galop dans une campagne ouverte. L’art oratoire lui-même, 349il l’a pensé en termes d’équitation. Le cheval ronsardien sait également s’élever dans les airs. Parler à l’oreille du cheval : tel est aussi le rêve du politique. De rêve en rêve, le poète cultive aussi la figure du centaure Chiron, tout à la fois homme et cheval. Mythe personnel qui réconcilie la raison et l’instinct.
Ronsard learnt the art of horse-riding very early. He dreamt of the intoxication that comes with galloping in the open countryside. He even thought of the oratory arts in terms of horse-riding. The Ronsardian horse can also rise upwards. Horse whispering: the political dream. Between dreams, the poet also cultivates the figure of Chiron the centaur, both man and horse. A personal myth which reconciles reason and instinct.
Anne-Pascale Pouey-Mounou, « La métaphore vide et le voleur de mots. La remotivation métaphorique des adages chez Rabelais (Tiers Livre) »
Peut-on parler d’une propédeutique de la métaphore rabelaisienne ? L’article envisage, à propos de la satire antimonastique, la dénonciation simultanée du littéralisme et de l’allégorisme ; puis, autour de la figure d’Épistémon, la façon dont l’exploitation des Adages se double d’une relativisation de leur sagesse supposée ; et enfin la mise en œuvre narrative de réseaux métaphoriques exploratoires à large échelle, propres à faire avancer l’intrigue, en particulier dans le Tiers Livre.
Can we talk about a propaedeutic of Rabelaisian metaphor? The article examines the simultaneous denunciation of literalism and allegorism in relation to anti-monastic satire; the way in which the exploitation of the Adages doubles up as a relativising of their supposed wisdom, in relation to the figure of Épistémon; and, finally, the large-scale narrative prosification of exploratory metaphorical networks able to advance the plot, particularly in the Tiers Livre.
Nicolas Le Cadet, « La métaphore dans les Adages d’Érasme »
La métaphore apparaît à Érasme comme la figure qui, plus qu’aucune autre, donne à une expression la saveur d’un adage. À l’instar d’Aristote, il la conçoit comme un vecteur de sens et un instrument de connaissance. D’une part, la métaphore se montre en mesure de recomposer la réalité en rapprochant deux termes éloignés. D’autre part, elle transpose dans le présent les langues et les disciplines de l’Antiquité, éclairant ainsi d’un jour nouveau la sagesse chrétienne.
350For Erasmus, a metaphor is a figure which, more so than any other, gives an expression the flavour of a proverb. Following Aristotle’s example, he conceives of it as a vector of meaning and an instrument of knowledge. On the one hand, metaphor is able to recompose reality by bringing two different terms together. On the other hand, it transposes the languages and disciplines of Antiquity into the present, illuminating Christian wisdom with a new light.
Céline Bohnert, « Quelques réflexions sur l’usage de la métaphore dans les Mythologiæ de Natale Conti et leurs traductions françaises »
Les métaphores utilisées par Conti sont un outil pour interpréter et moderniser les mythes. Elles sont moins figures de style qu’outils intellectuels qui permettent de lier différents éléments. À plus grande échelle, les chapitres des Mythologiæ déployant toutes les significations possibles des noms des dieux anciens sont construits comme un champ métaphorique. Enfin l’utilisation de métaphores communes dans les Mythologiæ révèle l’appréhension du monde comme création divine.
The metaphors used by Conti are a tool for the interpretation and modernisation of myths. They are less figures of style than intellectual tools which enable connections to be made between different elements. The chapters of the Mythologiæ, deploying all possible significations of the names of ancient Gods, and constructed like a metaphorical field, are the most extreme example of this. Lastly, the use of common metaphors in the Mythologiæ reveals the way the world is understood as a divine creation.
Bruno Méniel, « La métaphore de l’anatomie chez les écrivains protestants du xvie siècle. De la physiologie à la psychologie ? »
La nouvelle anatomie qui apparaît à la Renaissance est porteuse d’une éthique et d’un imaginaire, qui inciteraient à faire d’elle un modèle pour une science des passions à élaborer. La métaphore anatomique repose sur l’idée qu’une représentation des opérations mentales est possible. Lorsque les écrivains protestants l’emploient, ils glissent du registre de la physiologie à celui de la psychologie, de l’éthique, voire de la théologie morale.
The new anatomy which appeared in the Renaissance contained an ethics and an imaginary which would encourage it to be turned into a model for a science of the passions to elaborate. Anatomical metaphors are based on the idea that a representation of mental operations is possible. When Protestant writers employ it, they slip from the register of physiology into that of psychology, ethics, and even moral theology.
351Caroline Trotot, « Splendeur de la métaphore et connaissance chez Cardan »
Le trope comme la splendeur sont pour Cardan des modes de connaissance. Le savant reprend le modèle néo-platonicien de l’illumination mais il l’infléchit pour explorer les zones obscures de la vie humaine. Figures du dédoublement subtil, les métaphores font de l’expérience un discours et apparaissent comme des figures de savoir produites par un artisan qui les propose au lecteur herméneute. Dans la diffraction de leur prisme, la variété naturelle prend la figure d’une représentation ordonnée.
Tropes, like splendour, are modes of knowledge for Cardan. The scholar takes up the neo-Platonic model of illumination but adapts it so as to explore the dark areas of human life. As figures of subtle doubling, metaphors turn experience into a discourse and appear like figures of knowledge produced by an artisan who offers them to the hermeneute reader. In the diffractions of their prism, natural variety takes the figure of ordered representation.
Olivier Guerrier, « Montaigne, le “paradigme cynegetique” et le “paradigme indiciaire” »
Nous nous efforçons dans cet article d’appliquer aux Essais le « paradigme cynégétique » et le « paradigme indiciaire » de Carlo Ginzburg. Ayant analysé le vocabulaire de la chasse dans plusieurs livres fançais de la Renaissance, vocabulaire considéré, notamment par Montaigne, comme nouveau, plein d’énergie et « naturel », nous essayons de voir dans les termes plus que des métaphores : un paradigme herméneutique, qui permet de comprendre la « chasse de connaissance » de Montaigne.
This article seeks to apply Carlo Ginzburg’s “cynegetic paradigm” and ‘indexical paradigm’ to the Essais. Having analysed hunting vocabulary in several French books of the Renaissance – vocabulary considered, notably by Montaigne, as new, full of energy, and natural −, we try to see in terms that are more than metaphorical; a hermeneutic paradigm which allows us to understand Montaigne’s “hunt for knowledge”.
Hélène Bah-Ostrowiecki, « Métaphore et métaphysique chez Pascal »
Dans les écrits de Pascal, la métaphore se présente à la fois comme un obstacle et comme une condition inévitable pour la formulation d’un discours vrai. Cette situation reflète la nature composée de l’homme, dans laquelle 352corps et esprit sont indissociables. En l’absence de tout point de référence fixe, la créature humaine est vouée au transfert. Loin de toute stabilité métaphysique, sa condition peut alors globalement être décrite comme métaphorique.
In the writings of Pascal, metaphor is both an obstacle and an inevitable condition of the formulation of true discourse. This situation reflects the composite nature of the human, in which mind and body are inseparable. In the absence of any fixed reference point, the human creature is condemned to a process of transferral. Far removed from any metaphysical stability, its condition can, as a whole, be described as metaphorical.
Isabelle Garnier, « Vray soleil spirituel et vive foy. Métaphores didactiques et sotériologiques de Lefèvre d’Étaples à Marguerite de Navarre »
La Bible est la matrice première du discours évangélique qui se construit de manière concertée dans le réseau de novateurs qu’anime Marguerite de Navarre. L’article examine comment l’innutrition biblique favorise le réemploi des métaphores tirées de l’Écriture pour accompagner le geste des Évangéliques ; il met ensuite en évidence les procédés structurant les métaphores canoniques ; il dévoile enfin le parcours interprétatif des jeux métaphoriques auxquels ouvre l’expression clé vive foy.
The Bible is the primary matrix for the evangelical discourse jointly constructed by the network of innovators led by Marguerite de Navarre. The article examines the way in which biblical innutrition privileges the reuse of metaphors drawn from Scripture to accompany the gesture of the Evangelicals. It also demonstrates the processes structuring canonical metaphors; finally, it unveils the interpretative process of the metaphorical games set in motion by the key expression vive foy.
Michael Soubbotnik, « Métaphore et puritanisme. Le cas de John Cotton, ministre de l’Église de Boston, Massachusetts, de 1633 à 1652 »
L’usage de la métaphore chez Cotton ne sépare pas « l’image matérielle » de la figure de son sens. Dans ses exégèses de métaphores bibliques, Cotton se garde de jeter la « balle » du véhicule sensible pour ne considérer que la teneur imaginaire ou intelligible mais maintient l’un et l’autre et, amplifiant le premier dans le processus d’exposition de la seconde, permet au « sens spirituel » de se montrer dans une expérience qui ne pouvait que séduire la sensibilité antinomiste de Nouvelle Angleterre.
353The use of metaphor in the work of Cotton does not separate the material image of the figure from its meaning. In his exegeses of biblical metaphors, Cotton is careful not to throw the ball of the perceptible vehicle, nor only consider the imaginary or intelligible tenor. Instead, he maintains both and, amplifying the first in the process of displaying the second, allows the spiritual meaning to reveal itself in a way which would appeal to the antinomian sensibility of New England.
Adeline Desbois-Ientile, « Métaphores et savoir dans l’œuvre de Jean Lemaire de Belges »
Lemaire exprime sa méfiance à l’égard des figures de rhétorique : ornements du discours, les métaphores enfreignent la vérité littérale et n’apparaissent pas comme des figures du savoir. Inaptes à exprimer la vérité, elles ne se réduisent pas à une fonction ornementale : dans les discours épidictiques, les métaphores peuvent avoir une fonction heuristique, révélant des connaissances sur l’objet du discours. Mais c’est dans les discours délibératifs que leur emploi est le plus intéressant.
Lemaire expresses his distrust of rhetorical figures; discursive decorations, metaphors transgress literal truth and do not appear to be figures of knowledge. Unsuited to the expression of truth, they cannot be reduced to an ornamental function; in epideictic discourse, metaphors can have a heuristic function, revealing knowledge about the object of discourse. But it is in deliberative discourses that their use is more interesting.
Bernard Teyssandier, « L’éducation de Louis XIII et ses représentations : l’image équestre. Variations métaphoriques et modifications référentielles »
L’article se propose d’apprécier l’usage de l’image équestre dans le cadre de l’institution de Louis XIII. L’importance accordée aux académies équestres dès la fin du xvie siècle explique en partie l’émergence d’un double modèle. Celui du monarque prudent d’abord ; celui du cocher magnanime ensuite. Le premier modèle témoigne de la primauté donnée à l’action et à l’existence, le second promeut la contemplation et s’attache à représenter l’essence monarchique dans sa dimension de sacralité.
This article sets out to understand the use of equestrian imagery in the context of the education of Louis XIII. The importance accorded to equestrian academies from the end of the sixteenth century explains itself in part by the emergence of a dual model: 354firstly, that of the prudent monarch and, then, that of the magnanimous coachman. The first model testifies to the primacy given to action and existence, the second promises contemplation, and focuses on the representation of the monarchic essence in its sacred dimension.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-8124-6026-5
- EAN : 9782812460265
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-6026-5.p.0347
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 08/01/2016
- Langue : Français