Résumés des contributions
- Type de publication : Article de collectif
- Collectif : Les Rituels épistolaires (xvie-xviiie siècle)
- Pages : 407 à 412
- Collection : Rencontres, n° 586
- Série : Le Siècle classique, n° 20
Résumés des contributions
Cécile Lignereux, « Introduction. Pour une nouvelle approche de la textualité épistolaire »
Dans les textes épistolaires, ce qui relève du conventionnel, du régulier, du normé ou du codifié n’a guère retenu l’attention. Il s’agit donc de reconsidérer le fonctionnement rhétorique des protocoles discursifs préétablis. Cela implique d’une part, de connaître les formes et les enjeux de la ritualisation dans la tradition épistolographique et d’autre part, d’étudier la mise en pratique des rituels dans les correspondances, entre standardisation et variation.
Maria Cristina Panzera, « Pour les bases humanistes de la civilité épistolaire. Trois nouveaux témoins de la fortune de Francesco Negro et de son modus epistolandi »
Publié à Venise en 1488, l’Opusculum scribendi epistolas de Francesco Negro est sans doute l’un des manuels les plus répandus et imités dans les différentes langues vernaculaires tout au long de la Renaissance. Cet article signale trois nouveaux cas de reprise et de traduction clandestines du manuel de Negro : les Lettere d’Antonio Minturno (1549), le Secretario breve du père Ercolani (1577) et le Formolario de Francesco Scaridino (1569).
Viviane Mellinghoff-Bourgerie, « Théorie et pratique de la civilité épistolaire. Du Secrettaire de Gabriel Chappuys aux Secrétaires de Puget de La Serre »
L’article étudie l’évolution de la civilité épistolaireentre Renaissance et Grand Siècle, sur la base d’une analyse comparée des Secrétaires de Chappuys et de Puget de La Serre(1588-1644). En tant que traduction camouflée du Del Secretario de Sansovino, Le Secrettaire de Chappuys renvoie à une civilité tributaire de Castiglione et de Guazzo. C’est de celle-là que Puget de La Serre tend à se séparer, au profit d’un style épistolaire dépouillé d’artifice.
408Sybille Grosse, « Le discours normatif dans les Secrétaires du xviie siècle »
Dans les manuels épistolographiques du xviie siècle, la régulation normative revêt des formes extrêmement variées, qu’il s’agisse du dosage entre description et prescription, de la proportion des réflexions explicitant les normes, du choix des catégories évaluatives, de l’équilibre entre la partie normative et le volet de lettres-modèles, des niveaux de la lettre considérés ou encore de la prépondérance de certains des cinq degrés du discours normatif.
Christine Bénévent, « Le De Conscribendis epistolis d’Érasme, un De Civilitate morum puerilium avant la lettre ? »
L’organisation du De Conscribendis Epistolis incite à le lire comme un traité entendant instaurer des pratiques langagières civiles. Cependant, Érasme laisse agir dans son texte des forces de désordre qui laissent coexister deux conceptions de la lettre, l’une soumise à la rhétorique, l’autre fondée sur la familiarité et la liberté. On comprend mieux cette concurrence si l’on tient compte de la visée pédagogique de ce manuel.
Claude La Charité, « L’art de l’adresse à autrui dans les traités épistolaires humanistes. Du bon usage de l’épithète d’Érasme à Juste Lipse »
L’emploi de l’épithète à l’adresse du destinataire a constitué un enjeu de première importance dans la mise en place d’une nouvelle civilité épistolaire au seuil de la Renaissance. Cette étude présente la réflexion que proposent Érasme, Juan Luis Vivès et Juste Lipse à propos de l’emploi des épithètes dans la lettre, avant d’étudier la pratique de Rabelais dans ses épîtres dédicatoires à la lumière de leur théorie.
Luc Vaillancourt, « Tensions, confusions et mutations dans l’épistolographie française du xvie siècle »
L’épistolographie française du xvie siècle semble soumise à des tensions contraires, en porte-à-faux entre les prescriptions des traités et l’assouplissement du style qui s’opère dans la pratique, perpétuant la confusion des genres, des styles et des modèles. Mais une mutation de l’espèce « lettre familière » intervient à la Renaissance, qui lui permet d’accéder au statut de genre littéraire, voire de registre rhétorique à part entière, autorisant désormais une expression plus « naturelle ».
409Claudie Martin-Ulrich, « Conventions et bienséances dans la lettre de consolation. L’exemple de Gérard Vossius »
La lettre de consolation semble relever de l’intime et du singulier alors qu’elle repose aussi sur des conventions qui, pour communes et admises qu’elles soient, n’en sont pas pour autant triviales et nécessitent un véritable apprentissage. Après avoir rappelé les liens qui unissent l’écriture épistolaire au thème de la consolation, l’article étudie les trois axes de réflexion qui structurent le descriptif que Gérard Vossius consacre à la consolation dans sa Rhétoriqueabrégée (1621).
Francis Goyet, « Rhétorique et épistolaire. Deux analyses pour une même lettre »
L’article examine deux analyses rhétoriques détaillées, et sensiblement différentes, de la Familiares II, 6 de Cicéron : l’une de 1591 par Melchior Junius, l’autre de 1712 par Joseph de Jouvancy. Lue indépendamment, chaque analyse paraît confirmer l’idée convenue selon laquelle la rhétorique serait un ensemble de préceptes impératifs. La confrontation des deux analyses permet de dépasser ce sentiment : chaque fois, le rhétoricien s’inscrit dans un débat avec ses pairs et prédécesseurs.
Lionel Piettre, « Deux “lettres pleines d’expostulation”, extraites des Mémoires des frères Du Bellay et analysées par Melchior Junius »
Les Mémoires de Guillaume et Martin Du Bellay rapportent un incident diplomatique, « l’affaire Merveille ». Ils citent le texte de deux lettres de François Ier adressées à Charles-Quint et au duc de Milan. Le rhétoricien Melchior Junius a proposé, en 1595, une analyse de ces deux lettres, qui est ici éditée dans son texte latin d’origine et traduite en français. La présentation de ces lettres et de cette analyse s’intéresse à la notion d’expostulatio.
Ellen Delvallée, « Les épîtres de requête de Clément Marot »
Les épîtres de requête de Clément Marot reflètent les évolutions de l’épistolographie au début du xvie siècle. Le poète, formé aux artes dictaminis, compose ainsi ses épîtres en respectant rigoureusement la dispositio et les lieux attendus de la lettre de demande. Toutefois, il témoigne d’une grande attention au decorum, lorsqu’il joue avec les lieux de la petitio pour les adapter à la situation, au destinataire, voire à l’image de poète qu’il veut donner.
410Pauline Dorio, « L’excuse dans les épîtres en vers de la première moitié du xvie siècle »
Les recueils de poésie vernaculaire de la première moitié du xvie siècle mettent en scène des situations épistolaires récurrentes, notamment le refus, par le poète, d’accepter l’invitation lancée par un pair ou un ami. Ce désistement devant être formulé de manière à ne pas froisser le destinataire, les épîtres d’excuse reposent sur un dispositif compensatoire visant à contrebalancer la déception de l’interlocuteur par la disposition précautionneuse des parties de la lettre.
Aurore Schoenecker, « “Pour servir d’exemple à ceux qui désirent apprendre à bien écrire missives”. Les lettres du Trésor d’Amadis de Gaule »
La compilation des lettres d’Amadis en « trésor », destiné à servir de manuel de civilité et d’ouvrage didactique, interroge sur le rôle que purent jouer celles-ci dans l’élaboration des pratiques épistolaires. Saisissant cette piste du livre éducatif, qui invite à un travail sur le fonctionnement interne de l’anthologie, l’article propose de lire le Trésor d’Amadis comme un recueil d’exemples épistolaires.
Stéphane Macé, « Les lettres insérées dans L’Astrée. Ingéniosité romanesque et topique rhétorique »
Après un parcours des différentes modalités d’apparition des lettres insérées dans L’Astrée et de leur utilisation typiquement romanesque, l’article étudie les courts textes épistolaires du roman selon une perspective rhétorique. Le défi consiste à identifier, dans le corps même des lettres et billets, ou dans leur contexte immédiat, des « marqueurs » techniques autorisant une classification proche des modèles de discours que peuvent décrire les traités d’art oratoire ou d’épistolographie.
Christine Noille, « Les genres du discours à l’épreuve des lettres de fiction. Le cas de la première portugaise »
Partant des trois problèmes poétiques que pose l’analyse des genres de discours en les mettant à l’épreuve des lettres de fiction (que sont les genres du discours ? que signifie mettre des genres discursifs à l’épreuve d’un texte ? et que signifie les mettre à l’épreuve de la fiction ?), l’article propose une étude de cas fondée sur l’analyse séquentielle de l’incipit des Lettres portugaises.
411Nathalie Freidel, « Raillerie et économie dans les lettres de Mme de Sévigné, une solution de crise ? »
C’est au moyen de la raillerie, abondamment commentée par les théoriciens, que Mme de Sévigné choisit d’aborder la ruine économique de la maison Grignan, dont l’année 1689 semble avoir été le révélateur. La mise en série des lettres de cette année noire permet de mesurer le profit que tire l’épistolière des différentes déclinaisons de la posture railleuse, en misant sur sa nature collaborative et en jouant sur ses ambiguïtés, jusqu’à s’aventurer sur les terres défendues de la satire.
Bénédicte Peslier-Peralez, « L’accusation et ses détours intertextuels dans les lettres féminines du xviiie siècle »
Sans être théorisé dans les manuels épistolographiques, le recours à l’application, figure qui consiste à adapter un texte à une situation n’ayant pas de rapport direct avec lui, est relativement fréquent dans les correspondances féminines du xviiie siècle. L’étude porte notamment sur les lettres d’accusation, incluant le genre judiciaire (la lettre de reproche) mais aussi, dans une moindre mesure, le genre épidictique (la lettre de blâme).
Sophie Rollin, « Les remerciements de Vincent Voiture »
Les lettres de Vincent Voiture étaient regardées par ses contemporains comme des modèles exemplaires du style galant et délicat. En examinant les lettres dans lesquelles il formule des remerciements, on constate que s’il souscrit aux grands principes proposés par les auteurs des secrétaires publiés au cours du xviie siècle, c’est surtout par sa manière de déroger à ces grands principes, voire de les tourner en dérision, qu’il séduit ses lecteurs.
Cécile Tardy, « L’échange de louanges dans les Entretiens de M. de Voiture et de M. Costar. Convenance et connivence »
La louange constitue un rite épistolaire qu’identifient les traités des xvie et xviie siècles. L’usage de ce rituel laudatif informe Les Entretiens de M. de Voiture et de M. Costar. Cherchant à nourrir leur amitié mutuelle, les deux épistoliers imbriquent étroitement louanges et témoignages d’affection. C’est ainsi qu’ils développent des séquences laudatives qui leur sont propres et qui participent à l’élaboration d’un échange spirituel, placé sous le signe de la connivence.
412Camille Esmein-Sarrazin, « Plaintes et reproches dans la correspondance entre Mme de Lafayette et Ménage »
Dans le corpus des 180 lettres et billets de Mme de Lafayette à Ménage, les motifs de la plainte et du reproche, dûment définis par les manuels épistolographiques, sont le lieu d’un questionnement sur l’amitié. Au-delà des passages obligés et des lieux communs d’une correspondance amicale, c’est bien une conception du lien amical et de la civilité épistolaire qui s’élabore ici, que définissent les notions de fidélité, de confiance et de références partagées.
Marianne Charrier-Vozel, « Les lettres du premier jour de l’an. Des manuels épistolaires à la correspondance de Mme du Deffand »
Dans un temps ritualisé, la lettre de vœux, envisagée comme modèle, est révélatrice des interactions épistolaires et des représentations sociales à l’œuvre dans la société de l’Ancien Régime. Tout en se pliant à la routine épistolaire, Mme du Deffand détourne néanmoins les lieux communs pour donner l’illusion d’un lien unique avec chacun de ses correspondants.
Michel Termolle, « Les souscriptions de Jean-Jacques Rousseau »
Rousseau estimait que dans les lettres, les souscriptions dictées étaient bel et bien vouées à de vaines et pompeuses apparences et foncièrement promises à la stérilité. De cette analyse des formulations finales de civilités de Jean-Jacques Rousseau, il apparait qu’après 1767, l’homme de la nature et de la vérité a préféré formuler ses souscriptions hors des convenances.
- Thème CLIL : 4027 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes littéraires générales et thématiques
- ISBN : 978-2-406-14798-5
- EAN : 9782406147985
- ISSN : 2261-1851
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-14798-5.p.0407
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 15/11/2023
- Langue : Français