[Présentation]
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : La Double Maîtresse
- Pages : 43 à 43
- Collection : Bibliothèque du xixe siècle, n° 94
Je ne sais trop, pour dire vrai, d ’ où j ’ ai été conduit à écrire ce singulier roman ni par où il m ’ est venu à l ’ esprit. Ce qui est certain, c ’ est qu ’ il y trouva presque à mon insu de quoi m ’ imposer son autorité et me contraindre à faire droit à ses exigences.
Malgré tout, je n ’ aurais pas dû, peut-être, lui accorder le crédit qu ’ il réclamait ni lui permettre de prendre corps en un livre qui, s ’ il contenta ma fantaisie, ne laisse pas d ’ embarrasser quelque peu mon jugement ; mais cette hétéroclite figure de M. de Galandot m ’ est, si souvent et avec tant d ’ insistance, apparue à la pensée que j ’ ai ressenti le besoin de me l ’ expliquer à moi-même. Je lui ai inventé une vie pour l ’ écarter de la mienne et j ’ ai pris ensuite le parti de le faire connaître aux autres pour mieux parvenir à l ’ oublier.
Le voici donc représenté aussi exactement que possible avec les événements que j ’ ai imaginés autour de lui dans le sens de son caractère. C ’ est un pauvre homme que M. de Galandot. J ’ ai eu soin de lui composer une histoire qui lui convînt. Si le lecteur ne voit point là ce que j ’ y ai voulu montrer, il me pardonnera mon erreur et je lui passerai son désaveu sans lui en vouloir davantage qu ’ il ne m ’ en voudra sans doute d ’ avoir proposé à son plaisir un personnage qui a souvent fait le mien.
D ’ ailleurs, je n ’ ai guère cherché autre chose qu ’ à faire défiler sur les verres de ma lanterne quelques ombres à la française et, si j ’ avais voulu mettre au frontispice le portrait de mon héros, croyez que c ’ eût été à la manière de ces petites figures de jadis qu ’ on appelait des silhouettes et qui découpent à plat sur le papier blanc leurs profils à l ’ encre noire.
R.