Préface À la croisée de la chronique historique et du récit littéraire, ou de l’interdisciplinarité médiévale
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : L’Écriture de l’histoire dans les chroniques françaises (xiie-xve siècle)
- Auteurs : Galderisi (Claudio), Bozoky (Édina)
- Pages : 11 à 19
- Collection : Histoire culturelle, n° 1
préface
À la croisée de la chronique historique
et du récit littéraire, ou de l’interdisciplinarité médiévale
Vues de près, les lettres médiévales semblent échapper à toute tentative de taxinomie littéraire, et cela pour des raisons souvent opposées. Quelques-unes peuvent nous faire penser à cet ornithorynque dont Umberto Eco a voulu faire un symbole de l’aveuglement cognitif et de l’échec taxinomique1, ou à ce chameau dont le Stagirite cherche dans les Seconds analytiques2 à identifier et à définir les caractéristiques sans parvenir à lui trouver une place convaincante parmi les ruminants. C’est le cas d’Aucassin et Nicolette, de l’Apollonius de Tyr, du fabliau Trubert ou plus tard du Voir Dit. D’autres semblent définir elles-mêmes les critères de leur généricité formelle : la poésie lyrique, les formes narratives brèves aussi, tout en s’y soustrayant presque systématiquement. Mais lorsqu’on les observe d’un peu plus loin, on s’aperçoit que dans la plupart des cas c’est l’émergence du roman, et plus particulièrement de la narration en prose, qui provoque une reconfiguration de l’horizon vernaculaire français et par là même une spécialisation de ce vers qui avait dominé toutes les formes de la littérature au xiie siècle, et qui se retrouve progressivement confiné dans l’espace du lyrisme, jusqu’à s’y identifier pleinement. D’autre part, l’assimilation de la prose à la narration longue et au récit tend à brouiller encore plus les pistes entre story et history, à confondre les confins entre fiction et vérité, entre vraisemblance et réalité, et à rendre apparemment impossible la distinction entre roman et chronique, entre histoire et littérature.
Ainsi posée, la définition des genres et de leurs frontières peut paraître une vexata quæstio, celle-là même qui fait dire à Antoine Compagnon que « le genre ne fait pas partie des questions fondamentales3 ». On se souvient d’autre part que Hans Robert Jauss, l’un des pères de l’esthétique de la réception, avait déjà souligné la différence fondamentale qui existe à analyser la forme d’un genre historiquement défini comme tel par les traités de poétiques et les genres dits « primitifs4 », c’est-à-dire le récit mythique, le conte, la chanson populaire.
Faut-il pour autant renoncer à poser la question du genre et se contenter de repérer ce qui distingue et différencie un texte d’un autre, ou une matière littéraire, pour reprendre une formulation chère aux clercs médiévaux, d’une matière historique, sous prétexte que l’impureté des genres rend impossible tout effort de définition et que toute classification herméneutique relève de l’anachronisme esthétique ?
Le livre de Pierre Courroux ne nous offre pas seulement une série de lectures nouvelles et pénétrantes de quelques-unes parmi les chroniques vernaculaires médiévales les plus importantes ; mais aussi et surtout une réponse positive et convaincante à cette question.
Issu d’une brillante thèse de doctorat, appuyé sur une véritable assise interdisciplinaire, satisfaisant à la fois l’exigence documentaire des sectateurs de Clio et la sensibilité esthétique des littéraires, sans pour autant jamais céder complètement aux points de vue des uns et des autres, cet ouvrage apporte un éclairage inédit sur les interrelations complexes entre histoire, chronique et fiction.
Même si l’auteur choisit d’emblée le patronage de cinq guides médiévaux – Benoît de Sainte-Maure, Philippe Mousket, Jean d’Outremeuse, Jean Froissart, Enguerrand de Monstrelet, c’est-à-dire un pour chacune de cinq grandes périodes de la chronique médiévale – et de quelques philologues et historiens contemporains, parmi lesquels il convient de signaler le rôle fondamental que joue Bernard Guenée, ce qui frappe à la lecture de ces pages est la liberté de ton et d’esprit qui éclaire d’une lumière nouvelle des questions qui ont souvent donné lieu à des débats apparemment sans issue.
Cette maturité et cette liberté sont d’abord le résultat d’une conscience méthodologique. Chez Pierre Courroux, l’histoire et la philologie sont l’une au service de l’autre. Cette conscience du fait que l’arbitraire des confins médiévaux entre histoire et fiction a pu se transformer avec le temps en un seuil disciplinaire qui sépare aujourd’hui ces deux côtés de la lettre, témoigne chez lui d’une volonté de dépasser des frontières qui lui paraissent aujourd’hui dangereusement imperméables.
Identifier la généalogie et la prégnance de ces mêmes frontières esthétiques et épistémiques au Moyen Âge devient alors le meilleur antidote contre la sectorisation disciplinaire et par là même contre l’anachronisme herméneutique.
La grande question à laquelle essaye de répondre ici Pierre Courroux est : « y a-t-il des historiens médiévaux » et si oui, comme les distingue-t-on de tous ces romanciers qui écrivent des estoires et qui se réclament de la vérité historique au moins autant, sinon plus, que les chroniqueurs de cette époque ? Une deuxième question, tout aussi centrale, est le corollaire logique de la première et concerne la littérarité de ces narrations historiques : la valence esthétique de plusieurs parmi les chroniques médiévales étudiées ici par Pierre Courroux, à commencer par celles de Froissart, constitue-t-elle la preuve d’une intention littéraire qui sublime et ainsi dépasse l’histoire ou est-elle le symptôme d’un manque de rigueur et de fiabilité de ces œuvres à prétention historique ? En d’autres mots, la dimension littéraire de ces chroniqueurs délégitime-t-elle leur travail d’historien ?
Les réponses de Pierre Courroux à ces deux questions, et aux multiples interrogations qu’elles subsument, permettent de poser autrement le problème et de proposer une solution pour définir à la fois les critères de l’historicité et de la littérarité de ces sources. Rien ne saurait le résumer mieux que ce qu’en dit l’auteur dans la conclusion de son ouvrage :
L’invention de détails vrais, la manipulation et l’invention de marqueurs historiques sont le fait d’une recherche du vraisemblable, qui guide le travail d’écriture des historiens. La connaissance exacte du passé et la vérité absolue sont en effet réservées à Dieu, et l’historien est réduit à reconstruire grâce à son imagination un récit approchant le plus possible la vérité passée. La vérité humaine qu’atteignent les chroniqueurs se construit autour de la notion de fiabilité des sources, de la fidélité et de la vraisemblance portée par le style historique. […] Les historiens vernaculaires… sont prêts à modifier les faits pour se rapprocher toujours plus d’une vérité plus générale qui est celle du
sens de l’histoire. Cela ne signifie pas un abandon de la vérité factuelle, mais seulement que celle-ci n’est pas une fin en soi. Les chroniqueurs font donc sciemment appel à la fiction, mais pas au mensonge…, pour que leur récit de l’histoire s’approche de la vérité par une plus grande vraisemblance et une plus grande cohérence. Le paradoxe n’est qu’apparent, car la fiction n’est pas opposée à l’histoire ni au récit de la réalité. (p. 513)
Or ces mots posent entre autres la question du roman, c’est-à-dire d’une des catégories esthétiques les plus difficiles à identifier pour les médiévistes, mais aussi pour les médiévaux. Comment classer en effet des œuvres comme le Roman de Troie ou le Brut ? C’est indiscutablement grâce à des collections de littérature médiévale que nous pouvons les lire aujourd’hui, et c’est dans les manuels d’histoire littéraire médiévale qu’elles trouvent une place que les historiens leur nient souvent dans leurs précis d’histoire médiévale – ce qui vaut, mutatits mutandis, aussi pour Froissart. Il semble raisonnable aujourd’hui d’affirmer que ni Benoît de Sainte-Maure ni Wace ne se pensaient comme des auteurs de fictions, des « romanciers » dirions-nous, et cela indépendamment de la matière, antique ou de Bretagne, qui nourrissait leurs estoires. Mais peut-être est-ce attribuer à la notion de « romancier » une charge esthétique anachronique.
Peut-on en effet se contenter de réduire le roman à ce qu’il a été en gros entre 1150 et 1210 ? Le roman n’est pas seulement ce que les médiévaux du xiie siècle pensaient qu’il était ; il est aussi ce que les modernes – et souvent ces modernes sont d’autres médiévaux – en font, y compris en l’inscrivant dans une histoire littéraire continue. Le Roman de Troie apparaît aux lecteurs d’aujourd’hui comme l’une des métamorphoses du texte qui fonde la littérature occidentale. L’anachronisme fait aussi partie de l’histoire, et la bonne distance n’est pas seulement celle du lecteur qui a entendu ou lu cette œuvre vers 1170 : l’horizon de réception d’une œuvre littéraire ne se limite pas à des contemporains, difficiles par ailleurs à identifier et à localiser au Moyen Âge, et qui, la plupart du temps, n’ont qu’un accès médié, oral, au texte. Sans arriver jusqu’à l’époque moderne, il suffit de regarder la réception de la plupart des récits arthuriens quelques décennies seulement après leur composition. Que l’on pense entre autres à Dante lisant ces textes comme des œuvres de littérature, de pures balivernes (nugæ). L’explication que Benoît de Sainte-Maure propose dans son prologue du Roman de Troie des mensonges
chères aux poètes, et à Homère en particulier, inscrit son œuvre dans le sillage et dans la postérité de l’Iliade au moment même où le clerc médiéval entend ou croit s’en détacher.
Si la démarche intellectuelle de Benoît de Sainte-Maure est à bien des égards celle d’un historien, ou dans tous les cas d’un clerc voulant faire œuvre de vérité historique, le texte qu’il compose échappe partiellement à cette intention de son auteur. Certes à cette époque la prose n’existe pas encore et le vers ne constitue pas une discriminante qui permettrait de distinguer un chroniqueur d’un romancier – et ceci d’autant moins que nombre de chroniques continuent d’être écrites en vers aux xiiie et xive siècles. Et cependant il est aussi vrai que le talent du poète, et surtout l’attention que Benoît de Sainte-Maure consacre à sa versification, justement pour que les lecteurs illettrés « se puissent deduire el romanz5 », constituent aussi le témoignage d’une intention artistique. Cette intention artistique, au sens propre littéraire, est une condition de la vérité mais aussi un gage du salut, car toutes ces œuvres ont aussi comme horizon et but la vérité suprême, qui seule appartient à Dieu, car, comme le rappelait Daniel Poirion, « le regard du souverain juge est présupposé dans tous les témoignages apportés sur les actions de l’homme6 ». C’est aussi pour cette raison que les auteurs se plaisent à exalter dans les prologues de leurs récits leur “service” de l’histoire, leur métier d’artisans du passé. Benoît de Sainte-Maure, qui a une conscience aiguë de ce métier, rappelle ainsi à ses lecteurs qu’il a « […] o sa main les moz escrit, / Einsi taillez e si curez / E si asis e si posez / Que plus ne meinz n’i a mester7. »
Le qualificatif d’historien risque alors de comporter une part d’anachronisme, car la catégorie épistémique, et sans doute esthétique, n’existe pas encore au xiie siècle. Le terme de « translateur », c’est-à-dire de celui qui met en langue romane, en roman, est peut-être plus approprié, et sans doute plus conforme à la réalité du xiie siècle, du moins pour le Roman de Troie. D’autre part, on sait bien que la relation de la littérature à l’histoire est aussi influencée par des structures plus profondes, par des schémas de pensée d’origine indo-européenne, en particulier
dans ces narrations épiques que Pierre Courroux a exclues, à juste titre me semble-t-il, de son corpus, mais qui n’en constituent pas moins de modèles esthétiques et surtout rhétoriques pour les écrivains de l’époque. Et cependant l’auteur a eu raison d’opérer ici ce choix, car les trouvères des chansons de geste magnifient surtout les actions ou les traits de caractère des protagonistes de leurs histoires et ne reproduisent qu’une réalité nécessairement déformée, l’idéalisation étant un trait substantiel de l’épopée. Dans ces récits, le statut du référent historique n’est pas tout à fait de l’ordre de la mimésis, de la réalité, mais du mythe.
Un des prix de l’analyse que nous offre ici Pierre Courroux est aussi dans quelques-uns de nombreux tableaux et graphiques qui enrichissent l’ouvrage, et qui démontrent par exemple de manière claire que l’émergence de la prose contribue de manière évidente à l’essor de la narration historique longue, cinq fois plus importante au xve siècle qu’elle ne l’était au xiie. Les textes qui n’ont pas été retenus dans le corpus étudié par Pierre Courroux – les chansons de geste, entre autres – n’auraient fait dans ce cas-là que corriger à la marge des résultats, qui seraient d’ailleurs même plus importants si l’on prenait en compte le nombre de feuillets que ces récits historiques occupent à la fin du Moyen Âge par rapport au siècle de Chrétien de Troyes. Une autre série de graphiques éclaire une fois de plus le rôle que le foyer anglo-normand a joué à la fois dans la production des œuvres historiques aux xiie et xiiie siècles et dans la translatio studii vernaculaire, car, si comme le rappelle Pierre Courroux, « traduire est déjà un acte de création », traduire c’est aussi au Moyen Âge prouver la véridicité d’une lettre, sa dimension à la fois de vérité et de réalité : d’art et d’histoire.
Dans ce livre d’une rare richesse, Pierre Courroux propose le premier tableau synthétique et la première chronologie relative de ces textes que les médiévaux ont pu lire à la fois comme des témoignages historiques et comme des œuvres de fiction. Au total, plus de trois cent cinquante titres sont recensés, classés et analysés selon une approche à la fois analytique et synthétique. L’auteur embrasse ainsi une masse de textes très large et très variée, qui lui permet de cerner le seuil de l’historicité médiévale et le rapport à la subjectivité littéraire de nombre de ces auteurs.
Mais ce qui constitue à mes yeux un des acquis majeurs du livre de Pierre Courroux est d’avoir réussi à définir avec une grande netteté la
principale différence entre l’historien médiéval et l’historien moderne. Car sa relecture des chroniques médiévales est inspirée et orientée par une conscience aiguë, qui est aussi une déontologie, d’une différence majeure entre l’historien moderne et son ancêtre médiéval. L’historien, mais le terme pourrait être ici remplacé par « chercheur », soumet aujourd’hui son travail à d’autres “clercs”, qui le valident ou le critiquent préalablement, mais aussi a posteriori. Par ailleurs, l’accès à son travail est immédiat et fondamentalement universel. Cette facilité d’accès fait que le travail individuel, pourtant mis en exergue par une subjectivité bien plus affichée et revendiquée qu’au Moyen Âge, forme en réalité une œuvre collective : celle d’une communauté qui se confronte et cherche ainsi à confondre les erreurs, à créer à travers une dialectique permanente une connaissance partagée. Cette œuvre collective constitue la spécificité de l’histoire moderne par rapport à celle des autres époques (et non seulement du Moyen Âge). Dans ce sens, l’historien d’autrefois, notamment du Moyen Âge, a laissé la place à la communauté des historiens, que les « nous » et les « on » de nos formulations rhétoriques symbolisent parfaitement. Or comme l’explique de manière lumineuse Pierre Courroux,
Les chroniqueurs de langue française, au contraire des historiens modernes, ne voient aucun paradoxe dans l’affirmation du côté littéraire du travail de l’historien. La mise en récit est pour eux une compréhension suffisante des événements, et les opérations fictionnelles peuvent sans souci servir à soutenir la vérité. À leurs yeux, une chronique est une œuvre littéraire donnant un récit vrai du passé. Ce n’est ni l’usage de la fiction, ni les méthodes, ni la forme qui distinguent l’histoire des autres genres médiévaux : c’est son rapport à la réalité, soutenu par l’usage d’une certaine mimétique, et par un pacte de confiance passé avec le lecteur, qui établit clairement l’équivalence entre la vérité du récit et celle du monde empirique. L’intention est donc la différence la plus fondamentale entre histoire et roman. (p. 514)
Même si l’on pourrait facilement objecter que l’un des grands mérites de la médiévistique moderne est d’avoir offert aux lettres françaises des écrivains dont les qualités littéraires rivalisent avec la profondeur de leurs recherches (on pense entre autres à Marc Bloch, Georges Duby, Jacques Le Goff), le constat de Pierre Courroux nous aide à mieux comprendre le sens et la portée de la mission que les clercs médiévaux s’étaient attribués sous la tutelle de Dieu. Pour eux, l’« histoire est alors
le dossier d’un procès évidemment soumis au jugement des hommes, mais avec l’arrière-pensée qu’il y aura, en appel, un Jugement dernier8 ».
De quelques-uns de ces procès, avec leurs procédés et leurs impasses, le présent ouvrage nous livre une histoire sans arrière-pensées et avec la rigueur que nous exigeons des historiens contemporains. En même temps, Pierre Courroux construit de nouvelles passerelles entre l’histoire et la littérature médiévale et ses exégètes modernes, en marquant une étape importante dans la compréhension des rapports entre vérité, réalité et fiction au Moyen Âge.
Claudio Galderisi
CESCM – Université de Poitiers –
CNRS
Issu de lectures abondantes et de réflexions originales, le présent livre n’est pas seulement une nouvelle synthèse historiographique. Certes, l’auteur fait le point sur l’œuvre de cinq historiens médiévaux, articulant son approche autour de trois axes : la question de la vérité, en particulier confrontée à la fiction ; le rapport des auteurs médiévaux à la tradition, à leurs sources, et le lien entre histoire et roman. Mais ce travail est aussi une leçon de méthode : il montre comment procède l’historien d’aujourd’hui ; il dévoile la démarche d’un jeune chercheur exemplaire.
L’objectif principal de Pierre Courroux est de comprendre comment on concevait l’histoire au Moyen Âge et quels étaient les rouages de la construction du récit historique. Au-delà de situer chaque œuvre dans son contexte de production, il cherche à saisir la particularité des cinq corpus qu’il a choisis en raison de leur représentativité. En effet, chaque auteur, chaque œuvre génère une problématique spécifique, ouvrant sur tout un ensemble d’œuvres apparentées. Le dossier de Benoît de Sainte-Maure pose la question sur les marqueurs des genres littéraires ;
celui de Philippe Mousket le rapport entre poésie, prose et vérité ; puis c’est l’analyse sur la place de l’imagination chez Jean d’Outremeuse, sur la question des « œuvres frontières » – entre histoire et roman – chez Froissart, ou encore sur l’usage du document chez Enguerrand de Monstrelet.
C’est après l’examen attentif de chaque corpus que Pierre Courroux arrive à formuler des interprétations d’une portée générale, voire des réflexions conceptuelles sur l’historiographie médiévale. Entre autres, il soulève la question de l’authenticité au regard de la recherche de la vérité, la part de l’invention dans la construction du récit, ou encore les moyens utilisés pour rendre le récit vraisemblable (mimésis). Dans sa synthèse finale, il tente de dégager les traits communs des historiens médiévaux, qui, tout en aspirant à raconter la « vérité », veulent donner avant tout une cohérence narrative à leur matière. Fondé sur la lecture plurielle des œuvres, marqué par la sensibilité littéraire ainsi que la culture philosophique de l’auteur, ce livre constitue une contribution fructueuse à la compréhension non seulement de l’écriture historique, mais plus largement de la littérature médiévale.
Edina Bozoky
CESCM – Université de Poitiers
1 U. Eco, Kant et l’ornithorynque, trad. Julien Gayrard, Paris, Grasset, 1999, surtout p. 61-102.
2 Voir Seconds analytiques, éd. J. Tricot, Paris, J. Vrin, 1947, 98a, ii. xiii-xv ; Les parties des Animaux (éd. P. Louis, Paris, Les Belles Lettres, 1990, 642b – 644a, p. 10-16, et l’article d’Umberto Eco, « Cornes, sabots, chaussures : trois types d’abduction », in The Sign of Three, éd. U. Eco et T. A. Sebeok, Bloomington, Indiana U. P., 1983, p. 228-255.
3 A. Compagnon, Le Démon de la théorie. Littérature et sens commun, Paris, Éditions du Seuil, 1998, p. 167.
4 « Littérature médiévale et théorie des genres », Poétique, 1, 1970, p. 79-98, ici p. 79 ; repris in Théorie des genres, éd. G. Genette et alii, Paris, Éditions du Seuil, 1986, p. 37.
5 Benoît de Sainte-Maure, Le Roman de Troie, éd. et trad. E. Baumgartner et F. Vielliard, Paris, Le Livre de Poche, « Lettres Gothiques », p. 42, v. 39.
6 D. Poirion, « Conclusion », dans La Chronique et l’histoire au Moyen Âge¸ Textes réunis par D. Poirion, Paris, PUPS, 1986, p. 150.
7 Benoît de Sainte-Maure, Le Roman de Troie, éd. citée, p. 46, v. 134-137.
8 D. Poirion, op. cit., p. 150.
- Thème CLIL : 3378 -- HISTOIRE -- Histoire générale et thématique
- ISBN : 978-2-8124-3661-1
- EAN : 9782812436611
- ISSN : 2430-8250
- DOI : 10.15122/isbn.978-2-8124-3661-1.p.0011
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 30/05/2016
- Langue : Français