Over time…
- Publication type: Journal article
- Journal: L'Amitié guérinienne Revue annuelle des Amis des Guérin
2023, n° 202. varia - Pages: 79 to 80
- Journal: Friends of Guérin
AU FIL DU TEMPS…
Une des participantes de notre Journée guérinienne nous rappelle que Camus séjourna à Cordes-sur-Ciel durant l’été 1957. Les Carnets portent trace d’un passage au Cayla :
6 août. Visite du Cayla : lieu solitaire et silencieux autour duquel le monde vient mourir. Je comprends mieux ce que je lis ensuite dans le journal d’Eugénie de Guérin : « Volontiers je ferais vœu de clôture au Cayla. Nul lieu au monde ne me plaît comme le chez moi. » Et encore : « Où serai-je ? Où serons-nous quand les arbres seront redevenus grands ? D’autres iront se promener sous leurs ombres et verront passer comme nous des vents qui les abattront1 ? »
Jacques Felix nous a envoyé son ouvrage, diffusé hors-commerce, Une nouvelle amitié épistolaire 1868-1870. Il a patiemment transcrit cent-cinquante lettres échangées entre Albin Goudareau, lettré d’Avignon et fervent guérinien, et Guillaume-Stanislas Trebutien, l’éditeur des œuvres d’Eugénie et de Maurice de Guérin.
Arrière-arrière-petit neveu d’Albin Goudareau et passionné par l’histoire de sa famille, Jacques Felix a découvert cette correspondance dans la bibliothèque du Cayla. Les lettres, qu’il a annotées avec soin, évoquent des familiers des Guérin (Mme de La Blanchardière, François du Breil de Marzan, Paul Quemper, Léon d’Aurevilly…) ou des personnalités littéraires du temps comme Marie Jenna ou les félibres avignonnais (Roumanille, Aubanel, Mistral…). Elles nous font aussi participer à l’histoire des démêlés entre Trebutien et Melchior Mazuc de Guérin, le mari de Caroline de Guérin, la fille d’Érembert. La crise fut violente pour résoudre une question à la fois simple et complexe : qui possède les droits d’auteur sur les lettres envoyées par Eugénie de Guérin à divers correspondants, lettres que Trebutien a pris le soin de réunir et qu’il désire publier ? Caroline ne semble pas avoir eu droit à la parole et Marie de Guérin tenta de temporiser et de réconcilier les deux adversaires. On parvint à un compromis qui ne satisfit personne.
80Nous espérons un article de Jacques Felix dans le prochain numéro de notre revue.
L’association Les Amis des Guérin a publié, en janvier dernier, les lettres échangées entre Eugénie et Maurice de Guérin : Lettres croisées, édition d’Émile Barthés et de Marie-Catherine Huet-Brichard.
Épigraphe et premières lignes de la préface :
« On dit que nous nous ressemblons, mais nos étoiles ne se ressemblent pas. »
Eugénie de Guérin, lettre à son frère Maurice, 29 septembre 1825
L’un avec l’autre. Leurs deux noms accolés sur la couverture d’un même livre ; leurs deux voix se répondant l’une à l’autre sans aucun parasite ; leurs deux existences enfermées dans le cadre étroit de leurs échanges épistolaires. L’entreprise est-elle légitime ou est-ce gauchir la perspective ?
1 Albert Camus, Carnets III, Mars 1951-Décembre 1959, Gallimard, NRF, 1989, p. 206.