Homily Andillac, July 18th, 2021
- Publication type: Journal article
- Journal: L'Amitié guérinienne Revue annuelle des Amis des Guérin
2021, n° 200. varia - Author: Ferret (Jean-Claude)
- Pages: 13 to 15
- Journal: Friends of Guérin
HOMÉLIE
Andillac, 18 juillet 2021
(Jr 23, 1-6 ; Ps 22 (23), 1-2ab, 2c-3, 4, 5, 6 ;
Ep 2, 13-18 ; Mc 6, 30-34)
Où sont les vrais et bons pasteurs ? Telle semble la question posée par la première lecture ou par l’Évangile. Cette question ne date pas du xxe siècle, elle traverse le temps, car il est déjà question de l’indignité des pasteurs dans la bouche de Jérémie et il est encore question du manque de pasteurs dans l’Évangile de Marc. Tous deux nous font comprendre qu’il n’y a qu’un seul pasteur : Dieu lui-même, manifesté en son Fils, Dieu qui visite son peuple.
Jérémie fustige des pasteurs indignes : « Quel malheur pour vous, pasteurs ! Vous laissez périr et vous dispersez les brebis de mon pâturage – oracle du Seigneur ! C’est pourquoi, ainsi parle le Seigneur, le Dieu d’Israël, contre les pasteurs qui conduisent mon peuple : Vous avez dispersé mes brebis, vous les avez chassées, et vous ne vous êtes pas occupés d’elles. Eh bien ! Je vais m’occuper de vous, à cause de la malice de vos actes – oracle du Seigneur. » Comment ne pas trouver là l’annonce de Jésus qui compare le berger et le mercenaire dans le dixième chapitre de l’Évangile de Jean (Jn 10, 1-18 ; 26-30) ?
Jésus invite les disciples à se reposer après leur mission. Pendant ce temps, vu l’affluence des foules, il poursuit le travail : « Il fut saisi de compassion envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les enseigner longuement. »
Ces deux passages bibliques nous invitent à réfléchir à ce qu’est la charge de pasteur. En l’actualisant aujourd’hui, nous pouvons penser à un chef de communauté, un Père Abbé pour un monastère, un curé pour une paroisse, un évêque pour un diocèse. Cette charge comprend le gouvernement (la conduite dont parle Jérémie), l’enseignement dont Jésus s’acquitte parce qu’il en perçoit le besoin dans cette foule comparable à un troupeau de brebis sans berger, et la sanctification, à travers la célébration des sacrements, la prière, les bénédictions. Cela semble concerner 14des hommes qui vivent une consécration particulière, en l’occurrence, l’ordination. Cela ne fait pas d’eux des surhommes, mais simplement des hommes baptisés qui ont reçu une mission particulière avec aussi des obligations particulières liées à cet état.
Au temps de saint Vincent de Paul, le mot « prêtre » était devenu un terme d’injure. Après l’épreuve de la Révolution et le renouveau progressif du clergé, au temps de Maurice et Eugénie de Guérin, le prêtre devient le conseiller, le confesseur, le confident de l’un ou de l’autre, nous en avons des exemples en tête, plus ou moins célèbres. Aujourd’hui, il n’est pas toujours facile de se positionner comme prêtre dans le monde : le prêtre est soit dénigré soit survalorisé, notamment en France, à cause du faible nombre de vocations diocésaines.
Nous pouvons lire dans la belle page de la lettre aux Éphésiens le sens de la mission des prêtres, découlant de celle du seul Prêtre et du seul Pasteur : Jésus lui-même. Mais ce qui vaut pour les prêtres vaut pour tout baptisé.
« Vous êtes devenus proches par le sang du Christ. » : par le don de sa vie, dans le pain et le vin eucharistiques, par sa mort sur la croix, par sa résurrection, une fois pour toutes, Jésus assure notre salut.
« Des deux, le Juif et le païen, il a fait une seule réalité ; par sa chair crucifiée, il a détruit ce qui les séparait, le mur de la haine. » La mort et la résurrection de Jésus assurent notre réconciliation définitive.
« Ainsi, à partir des deux, le Juif et le païen, il a voulu créer en lui un seul Homme nouveau en faisant la paix, et réconcilier avec Dieu les uns et les autres en un seul corps par le moyen de la croix ; en sa personne, il a tué la haine. » Nous sommes invités à sortir en mission auprès de nos semblables, nous devons partager, annoncer au monde la Bonne Nouvelle du Salut. La croix est le signe de notre lien entre nous (aspect horizontal) et de notre lien à Dieu (aspect vertical). Qu’est-ce qui fait de nous un homme nouveau ? Le Baptême. La lettre aux Éphésiens lance un appel : faire connaître la nouvelle de notre réconciliation à tous. Et peut-être aussi, quelquefois, fidèles et pasteurs ont-ils à le vivre concrètement !
Le psaume 22, bien connu, nous donne d’autre part une belle vision de la mission du Pasteur en la personne du Seigneur lui-même. Cette image de Dieu pasteur de son peuple se retrouve dans quelques textes importants de la Bible dont le psaume 22 en est sans doute l’exemple le plus connu.
15Ce psaume, si souvent chanté, en toute circonstance, du baptême aux funérailles, de la confirmation à l’ordination et aussi certains dimanches comme en cette année, nous rappelle une vérité élémentaire : le Seigneur est avec nous.
Si l’on veut en faire une lecture « sacramentelle », on peut facilement retrouver les sacrements de l’initiation au gré des strophes, à travers quelques expressions : « il me mène vers les eaux tranquilles et me fait revivre », « tu répands le parfum sur ma tête », « tu prépares la table pour moi ». Ces expressions renvoient aux rites de ces trois sacrements primordiaux.
La joie fait dire alors « ma coupe est débordante ».
Découlant de cette réalité, d’autres termes décrivent la vie chrétienne : « il me conduit par le juste chemin pour l’honneur de son nom » ; « Si je traverse les ravins de la mort je ne crains aucun mal, car tu es avec moi : ton bâton me guide et me rassure ». Ici, nous trouvons le chrétien dans le monde, qui cherche un chemin et qui parfois peut se trouver confronté à la mort tant corporelle que spirituelle ! Pourquoi ne pas considérer le bâton du Seigneur qui guide et qui rassure comme notre propre conscience, guidée par l’Esprit ?
Les première et dernière strophes nous rappellent cette réalité de la grâce que nous avons en partage et de manière suffisante : « Le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien », « Grâce et bonheur m’accompagnent tous les jours de ma vie ». Il s’agit pour nous de réaliser le don qui nous est fait : s’en rendre compte, avec notre intelligence, et le mettre en œuvre avec notre volonté, le tout soutenu par le don que Dieu nous fait. Les autres expressions de ces deux strophes renvoient à un autre temps, à l’avenir : « Sur des prés d’herbe fraîche il me fait reposer » (allusion au paradis ?), « j’habiterai la maison du Seigneur pour la durée de mes jours » (depuis le baptême jusqu’à la mort, mais aussi, au-delà de la mort, dans l’éternité). Reste le « devant mes ennemis » devant qui la table est préparée : n’est-ce pas le signe du pardon, une invitation à la réconciliation qui fait « revivre » ?
Laissons-nous conduire par le Seigneur, ne craignons pas !
AMEN
Jean-Claude Ferret
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- ISBN: 978-2-406-12554-9
- EAN: 9782406125549
- ISSN: 2554-8980
- DOI: 10.48611/isbn.978-2-406-12554-9.p.0013
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 12-01-2021
- Periodicity: Annual
- Language: French