Principes d’établissement du texte
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : Histoires tragiques extraictes des œuvres italiennes de Bandel
- Pages : 131 à 134
- Collection : Textes de la Renaissance, n° 253
- Série : Devis, récits brefs et commentaires, n° 2
Principes d’établissement
du texte
La bonne méthode exige de prendre en compte toutes les éditions sur lesquelles l’auteur a pu exercer un contrôle, de la premièrede 1559 à la dernière qui ait pu paraître avant sa mort en 1566. Or la biographie ne fournit aucune indication sur le rôle éditorial de Boaistuau dans ses dernières années. Sa seule intervention patente est l’édition destinée à Élisabeth Ire, qui constitue toutefois une exception sans suite dans l’histoire de l’œuvre. A quelques détails près qui permettent d’éclaircir des doutes1, on ne peut que constater la permanence du texte, jusqu’à la persistance de doutes ou d’erreurs manifestes2.
Tout porte à croire que, dans une carrière aussi brève que prolifique3, Boaistuau s’est aussitôt consacré aux Histoires prodigieuses, dont la première édition paraît en juin 1560, et à son Histoire des persecutions de l’Eglise chrestienne et catholique publiée posthume en 1572, abandonnant ses Histoires tragiques aux imprimeurs de la même manière qu’au seuil du livre il laisse son collaborateur Belleforest poursuivre seul la collection4. Il est également occupé par son voyage en Angleterre, qu’il faut sans doute placer entre novembre 1559 et juin 1560, pour lequel il prépare, outre l’édition royale, une édition d’apparat des Histoires prodigieuses et une autre de L’Histoire de Chelidonius Tigurinus, réintitulée Institution du 132royaume chrestien. Autant de bons motifs pour que celui qui se plaint par ailleurs d’être malade dès 15565, ne se soucie guère du devenir de ses Histoires tragiques. Il est à noter que cette attitude est assez constante de sa part, ses œuvres ne faisant pas l’objet de rééditions autorisées comprenant des remaniements significatifs.
Le succès du livre – quoique minoré de nos jours par le rang très secondaire qu’il se voit accorder dans l’histoire de la littérature – n’en est pas moins patent : en seulement sept ans, on dénombre, en comptant les trois contrefaçons, dix éditions distinctes, la plupart partagées et dont on peut identifier au total quarante-quatre exemplaires : les Histoires tragiques ont ainsi été prises en main par de bons libraires de la place, qui ne font pas les choses au hasard et qui en poursuivent la production selon un rythme biennal assez régulier jusque bien après la disparition de Boaistuau. Cette enquête a permis de faire émerger l’édition de 1566 et un certain nombre d’exemplaires de diverses éditions ; d’autres ont retrouvé leur juste place : c’est à la deuxième édition Robinot (B1) qu’il faut rattacher celle de Prévost (B2), qui lui est identique au signe près et l’édition royale (C) est conforme aux toutes premières (A). La comparaison des exemplaires permet ensuite d’affirmer que l’ensemble des éditions de 1563 et 1564 (G, H et [I]) a été réalisé à partir de la première édition de Sertenas-Robinot (A) alors que les autres éditions autorisées (E et J) se conforment à l’édition Robinot-Prevost (B) et que les contrefaçons de 1560 et 1561 ([D] et [F]) ne sont que des tirages antidatés de l’édition de 1563 (G). Par conséquent, il apparaît qu’en 1561 l’idée de réunir les deux œuvres et l’invention du titre collectif appartiennent aux libraires autorisés. Cette initiative est nettement d’origine commerciale : l’un des deux exemplaires connus de la deuxième édition de Gilles Robinot est relié, en foliotation discontinue, avec la Continuation de 1559 et l’un des deux exemplaires subsistants de l’édition de Benoist Prévost l’est avec une édition Sertenas de 1560 de la Continuation. Et les prémices de ce volume double sont peut-être à voir dans le fait que le 17 janvier 1558 Vincent Sertenas a obtenu simultanément privilège pour les Histoires tragiques133et pour la Continuation. On assiste ainsi en direct à la naissance d’une collection, avec l’apparition, en 1566 de l’appellation « tome premier ».
L’ensemble de ces faits amène à conclure que c’est la deuxième édition de Gilles Robinot (B1) et Benoist Prévost (B2) qui s’impose comme texte de base, à la fois pour son autorité et pour sa qualité, tant en ce qui concerne la graphie et la ponctuation que la mise en page6. Symptomatique à cet égard le fait que c’est elle que Sertenas suit en 1561 pour sa deuxième édition (E), et non sa propre édition initiale ; ce choix, comme on l’a vu, restera cependant sans suite.
Passées aux mains des libraires, les Histoires tragiques connaissent donc trois contrefaçons qui s’inscrivent dans leur histoire éditoriale ; leurs variantes ont été retenues, des crochets signalant cependant leur moindre degré d’autorité – encore cette différence n’est-elle pas si grande que dans d’autres cas, puisque le recueil est précisément devenu un pur produit de librairie.
Le texte de base est intégralement retranscrit. Sa qualité linguistique et typographique n’impose que des modifications mineures, pour le confort du lecteur :
–graphie
∙résolution de l’esperluette (&) et de la ligature eszett (ß)
∙dissimilation de « i »/« j » et « u »/« v »
–signes diacritiques
∙résolution des tildes
∙élimination des trémas distinguant « u » et « v »
∙modernisation de l’usage des accents distinguant « a » et « à » ainsi que « ou » et « où »
∙accentuation des finales en –a (« jà », « desjà », « voilà »)
∙accentuation des finales en –è(s) (« après », « très » s’il est dissocié du mot qui suit, « dès ») et en –é(e)(s)
–ponctuation
Un système tripartite de ponctuation cohérent et régulier donne au texte sa physionomie et son rythme : point final bornant les 134phrases, deux points subdivisant les phrases complexes, virgules entourant les membres de phrase et précédant les subordonnées.
Les modifications se limitent à l’ajout des guillemets ouvrant et fermant les discours rapportés ainsi que du tiret long marquant le changement d’interlocuteur, sans autre modification de la ponctuation qui précède ou qui suit.
Les rares corrections qu’exigent des erreurs de composition sont signalées en note.
1 Voir fo 90 vo, p. 288, note 45 et fo 107 vo, p. 313, note 96.
2 Voir fo 10, p. 170, note 88 ; fo 17, p. 179, note 152 ; fo 50, p. 232, note 151 ; fo 56, p. 241, note 214 ; fo 110 vo, p. 316, note 118 ; fo 116 vo, p. 324, note 160 ; fo 119, p. 327, note 181 ; fo 119 vo, p. 328, note 189 ; fo 159 vo, p. 383, note 348.
3 Né en 1517 et mort probablement en 1566, il publie toutes ses œuvres en cinq ans, si l’on excepte l’Histoire des persecutions posthume : en 1556 L’Histoire de Chelidonius Tigurinus, en 1558 Le Theatre du monde et le Bref discours de l’excellence et dignité de l’homme, en 1559 les Histoires tragiques, en 1560 les Histoires prodigieuses, auxquels on ajoutera son édition contestée des Histoires des amans fortunez.
4 Dès l’« Advertissement au lecteur », il conclut son éloge de Belleforest en annonçant la Continuation : « […] j’espere, qu’il te fera voir le second Tome bien tost en lumiere, traduict de sa main » (fo 4, p. 151).
5 « […] l’accident de certaine maladie (qui ma presque tousjours afligé depuis toutes mes conceptions et entreprinses » [la parenthèse fermante devrait être placée après « depuis »], Chelidonius Tigurinus, Paris, Vincent Sertenas et Jean Longis, 1556, épître dédicatoire à François de Clèves, fo ã ii vo.
6 Hormis la page de titre, les deux éditions sont identiques au signe près. Richard A. Carr relève également la supériorité du texte de Robinot (éd. citée, p. lxxxii-lxiii) par rapport aux autres éditions de 1559.
- Thème CLIL : 3439 -- LITTÉRATURE GÉNÉRALE -- Oeuvres classiques -- Moderne (<1799)
- ISBN : 978-2-406-16430-2
- EAN : 9782406164302
- ISSN : 2105-2360
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-16430-2.p.0131
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 15/05/2024
- Langue : Français