[Introduction à la deuxième partie]
- Publication type: Book chapter
- Book: Figures de la Bible dans les Cinq Livres de François Rabelais
- Pages: 203 to 203
- Collection: Rabelais' Worlds, n° 7
Pantagruel n’est donc pas un « Nouveau Testament épique », une réécriture des Évangiles qui épouserait le cadre de l’épopée pour mieux saper les valeurs impérialistes et anti-chrétiennes de cette dernière. La fiction rabelaisienne ne se réduit pas en effet à un simple voile pseudo-épique, au style familier et obscène […] les sources narratives, dramatiques et poétiques y interfèrent sans cesse avec le texte sacré […] il n’y a pas chez Rabelais un seul intertexte en mesure de prendre le pas sur les autres et d’orienter la lecture dans un sens univoque. Et les aspects messianiques et politiques du livre […] côtoient en réalité une multitude d’autres enjeux, de nature théologique, juridique, linguistique, dramatique ou encore générique.
C’est ainsi que Nicolas Le Cadet conclut son article « “ce sont beaux textes d’evangile en francoys”. La Bible dans Pantagruel (ch. xxx)1 », et nous rappelle à quel point la Bible n’est qu’un intertexte parmi d’autres et à quel point il serait réducteur d’exagérer sa place dans le texte et l’univers mental de Rabelais. Néanmoins, si l’ensemble des Cinq Livres ne constitue nullement un « Nouveau Testament épique », l’architecture et la dynamique globales des Chroniques empruntent largement à celles des deux Testaments, ne serait-ce que parce qu’elles calquent certains de leurs schémas archétypaux. Mais là encore, il semble impossible d’affirmer que Rabelais reproduit « l’architecture » biblique. Il s’agirait plutôt de retrouver dans ses livres « des » architectures possibles, « des » parcours dérivés des « Sacres bibles », à la fois riches et complexes, mais qui ont leur propre cohérence au regard des textes religieux.
1 Nicolas Le Cadet, « “ce sont beaux textes d’evangile en francoys”. La Bible dans Pantagruel (ch. xxx) », dans F. Poulet et A. Vintenon (dir.), La Réforme et la Fable (xvie-xviie siècles), Genève, Droz, 2018.