Résumés et présentation des auteurs
- Publication type: Journal article
- Journal: European Drama and Performance Studies
2017, Hors-série. Déjouer l’injouable : la scène contemporaine à l’épreuve de l’impossible - Pages: 215 to 221
- Journal: European Drama and Performance Studies
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Résumés et présentations
des auteurs
Séverine Ruset et Alice Folco, « Introduction. Déjouer l’injouable : un combat (aussi) socio-politique ? »
Séverine Ruset est maître de conférences en arts du spectacle (université Grenoble Alpes, UMR Litt&Arts). Ses recherches portent sur le théâtre contemporain européen, notamment britannique (elle prépare un livre sur l’espace et le temps dans les dramaturgies anglaises) et sur l’organisation du travail artistique dans le spectacle vivant.
Alice Folco est maître de conférences en arts du spectacle à l’université Grenoble Alpes, UMR Litt&Arts. Elle a soutenu une thèse de doctorat intitulée « Dramaturgie de Mallarmé », à l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3. Elle a publié La Mise en scène théâtrale (Paris, 2015). Ses travaux portent sur les proses de Stéphane Mallarmé consacrées au théâtre, sur la notion d’injouable et sur la mise en scène à la fin du xixe siècle.
L’introduction propose une synthèse des réflexions menées entre 2013 et 2017 sur la question de l’attraction paradoxale qu’exerce aujourd’hui dans les arts de la scène européens ce qu’il paraît impossible de représenter dans le cadre d’un spectacle vivant. Elle met l’accent sur la dimension socio-politique que recouvre la confrontation à l’impossible, dès lors que le positionnement des artistes est envisagé à la lumière des conditions de production, de diffusion et de réception qui prévalent en Europe.
The introduction offers an overview of studies done between 2013 and 2017 on the question of the paradoxical attraction exerted today in European performing arts by what appears to be impossible to represent within the confines of a live performance. It emphasizes the sociopolitical dimension involved in the confrontation with the impossible once the positioning of artists is considered in light of the prevailing conditions of production, distribution, and reception in Europe.
216Karen Quigley, « Offering resistance. Unstageable stage directions in Sarah Kane’s Cleansed »
Karen Quigley est maître de conférences en théâtre à l’université de York, Royaume-Uni. Elle prépare actuellement un livre consacré à l’injouabilité dans l’histoire du théâtre moderne européen. Elle mène également des recherches sur l’enseignement des pratiques in situ dans les universités britanniques et irlandaises, ainsi que sur les pratiques performatives irlandaises.
Consacré à Purifiés (1998) de Sarah Kane et à ses deux mises en scène majeures au Royaume-Uni (Royal Court 1998, National Theatre 2016), l’article interroge les résistances entre texte et scène dans le théâtre britannique contemporain à travers une réflexion sur les didascalies les plus difficiles de la pièce (présentées comme impossibles, selon une approche naturaliste, à la fois par Kane et par son premier metteur en scène). Il examine comment cette résistance stimule la créativité au sein des productions.
Using Sarah Kane’s third play, Cleansed (1998) and two of its key UK productions (Royal Court 1998, National Theatre 2016) as a case study, this article investigates the resistance between text and performance in contemporary British theatre via a discussion of the play’s most challenging stage directions (considered impossible to work with naturalistically by both Kane and the director of the premiere) and argues that this resistance can spark various instances of creativity in production.
Julie Valero, « De l’injouabilité du texte à la médiatisation de la scène. L’expérience müllérienne de J. Jourdheuil et J.-F. Peyret (1987) »
Julie Valero est enseignante-chercheure en arts de la scène à l’université Grenoble Alpes. Elle s’intéresse à l’usage et à l’expérimentation des techniques et nouvelles technologies dans le théâtre contemporain, tant d’un point de vue scénique que dramaturgique. Elle travaille en tant que dramaturge auprès de J.-F. Peyret, M. Desbazeille et A. Defoort.
L’article s’intéresse aux choix dramaturgiques et scéniques effectués par le duo Jean Jourdheuil – Jean-François Peyret en 1987 à l’occasion de leur création de Paysage sous surveillance d’Heiner Müller. Pointant d’emblée la nature problématique du texte, ils en proposent une lecture dramaturgique radicale qui trouve son aboutissement dans la mise en œuvre d’un dispositif médiatique sophistiqué et original.
217This article looks at the dramaturgical and staging choices made by the duo Jean Jourdheuil and Jean-François Peyret in 1987 on the occasion of their production of Paysage sous surveillance by Heiner Müller. Immediately drawing attention to the problematic nature of the text, they offer a radical dramaturgical reading of it that culminates in the implementation of a sophisticated and original media device.
Aude Astier, « La scène à l’épreuve de l’infini. Expérimentations de Luca Ronconi à partir d’Infinities de John David Barrow »
Aude Astier est maître de conférences en études théâtrales. Ses recherches portent sur le théâtre européen contemporain, les lieux de représentation et les politiques culturelles. Elle a écrit une thèse intitulée : Observatoire, conservatoire, laboratoire, l’institution théâtrale publique en France et en Italie à l’heure du néo-libéralisme et du postmodernisme et est membre du comité de rédaction de la revue Agôn.
Dans son œuvre, Luca Ronconi privilégie l’expérimentation de nouvelles manières de penser l’art théâtral. En 2002, avec Infinities de John D. Barrow, il fait dialoguer théâtre et science et éprouve les limites des codes théâtraux et scientifiques. À travers cette mise en scène, il cherche à faire évoluer la représentation du monde, en déjouant mais aussi en créant de l’injouable et en allant vers un spectacle qui serait infini dans le temps, l’espace ainsi que dans la réception du spectateur.
In his work, Luca Ronconi favors experimenting with new ways of thinking about the art of theater. In 2002, with John D. Barrow’s Infinities, he brings theater and science into dialogue with one another and tests the limits of theatrical and scientific codes. Through this staging process, he seeks to change how the world is represented, overcoming but also creating the unperformable and seeking to make a show that would be infinite in time, in space, as well as infinite in how the audience receives it.
Eugénie Pastor, « Jean Lambert-wild, ou la scène au-delà du visuel »
Eugénie Pastor est docteure de l’université Royal Holloway et enseigne le théâtre expérimental et multimédia à London South Bank University. Ses recherches portent sur l’intime, le mouvement et l’haptique, dans une perspective ethnographique et phénoménologique. Elle poursuit également une carrière artistique, en solo et au sein de la compagnie britannique Little Bulb Theatre.
L’article examine la façon dont Jean Lambert-wild et ses collaborateurs déjouent les impossibles physiques de la scène et développent une théâtralité qui 218dépasse le visuel. Par une utilisation particulière de procédés technologiques, ce théâtre remet en question la séparation entre scène et salle et développe une forme de « toucher » alternatif, étendue à la voix, qui s’attache à construire une communauté de spectateurs : une façon d’être ensemble.
This article examines how Jean Lambert-wild and his collaborators are overcoming physical staging impossibilities and are developing a form of theater that goes beyond the visual. Using technological procedures, this theater calls into question the separation of the stage and the audience and develops a form of alternative “touching” (that includes the voice), which aims to create a community of spectators: a way of being together.
Julie Valero, « La scène, espace de tous les possibles ? Entretien avec Aurélien Bory et Joris Mathieu »
Dans cet entretien animé par Julie Valero en 2013, Aurélien Bory (Compagnie 111) et Joris Mathieu (compagnie Haut et Court, devenu depuis directeur du Théâtre Nouvelle Génération – Centre Dramatique National de Lyon), évoquent la manière dont leurs spectacles viennent remettre en question les limites physiques qui sont a priori celles du plateau et des acteurs, et reviennent sur leurs définitions singulières de la théâtralité.
In this discussion led by Julie Valero in 2013, Aurélien Bory (Compagnie 111) and Joris Mathieu (the Haut et Court company, who has since become director of the Théâtre Nouvelle Génération – Centre Dramatique National de Lyon), discuss the way that their shows call into question the physical limitations that are a priori entailed in using a stage and actors and reflect on their unique definitions of theatricality.
Pascale Caemerbeke, « Effacement d’un texte injouable. Faces de Maguy Marin »
Pascale Caemerbeke est comédienne, auteure de théâtre et plasticienne. Elle a soutenu une thèse en anthropologie : « La Chair du théâtre. Les normes corporelles de l’acteur de théâtre, 1970-2012 » (2013, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3). En 2014, elle travaille sur le projet ECHO (Écrire l’histoire de l’oral) comme assistante de recherche, puis en contrat post-doctoral en 2015.
L’article interroge la manière dont Faces de Maguy Marin, inspiré par la lecture de Propaganda d’Edward Bernays (1928), et créé avec la troupe du Ballet de l’opéra de Lyon en septembre 2011, questionne la notion d’injouable, alors que cette dernière ne va pas de soi en danse. En composant une suite d’images 219arrêtées qui surgissent entre les noirs et entrent en résonance avec la bande son, Maguy Marin fait émerger le texte de Bernays comme une onde de choc qui réveille la conscience.
This article investigates how Maguy Marin’s Faces, which was inspired by reading Edward Bernays’ Propaganda (1928) and produced with the ballet troupe from the Opéra de Lyon in September 2011, questions the notion of the unperformable (the latter is not self-evident in dance). Creating a sequence of still images that appear out of the darkness and resonate with the soundtrack, Maguy Marin brings Bernays’ text to life like a shockwave that wakes up the audience.
Marion Chénetier-Alev, « La fabrique du disparaître. Rwanda 94 (le Groupov) et Kamp (Hotel Modern) »
Marion Chénetier-Alev est maître de conférences en arts du spectacle à l’université de Tours. Spécialiste du théâtre contemporain, ses recherches portent également sur le théâtre de marionnettes, l’histoire de la critique et la théorie du jeu de l’acteur. Elle a publié L’Oralité dans le théâtre contemporain (Sarrebruck, 2010), Le Théâtre des fous d’E. G. Craig (Montpellier, 2012), Le Texte critique (Tours, 2013).
Le théâtre contemporain se confronte ouvertement aux catastrophes qui jalonnent notre histoire. Guerres, génocides, migrants, etc., forment alors une matière paradoxale au regard du théâtre, étant pris dans une double impossibilité représentative, formelle et verbale. Comment donner forme à ces expériences pour les partager ? En examinant le travail du Groupov (Rwanda 94) et d’Hotel Modern (Kamp), l’article analyse quelques enjeux du traitement scénique de l’inhumain.
Contemporary theater openly tackles the catastrophes that punctuate our history. Wars, genocides, migrants, etc. are paradoxical material from a theatrical perspective since they entail a twofold representational, formal, and verbal impossibility. How does one give a shape to these experiences so that they can be shared? Examining the work of Groupov (Rwanda 94) and Hotel Modern (Kamp) this article analyzes several of the challenges of putting the inhuman on stage.
Florence Baillet, « Le devenir du théâtre critique dans Le Système de Falk Richter »
Florence Baillet est professeur en études germaniques à l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 et spécialiste de théâtre. Elle est l’auteur de Le Regard interrogé, 220Lulu ou la chair du théâtre (Paris, 2013) et a dirigé Einar Schleef, par-delà le théâtre. Mise en scène, écriture, peinture, photographie (Rennes, 2016).
Dans le cycle Le Système (2003-2004) de l’auteur dramatique et metteur en scène allemand Falk Richter, l’injouable ne relèverait pas tant de difficultés liées à la démesure du projet (comme ce fut le cas, au début du xxe siècle, pour Les Derniers Jours de l’humanité de Karl Kraus), mais plutôt du risque d’obsolescence d’un théâtre critique qui serait désormais lui-même pris dans le « système ». La contribution examine comment Le Système parviendrait malgré tout à déjouer le « système ».
In the cycle entitled Le Système (2003–2004) by the German dramatist and director Falk Richter, the unperformable is not so much behind the difficulties caused by the excessiveness of the project (as was the case, at the beginning of the twentieth century, with Karl Kraus’ Last Days of Mankind), but rather behind the risk that a critical theater would become obsolete–as it may become ensnared in the “system.” This contribution examines how Le Système may manage, despite everything, to overcome the constraints imposed by the “system.”
Anyssa Kapelusz, « Du jouable et de l’injouable. Pendiente de Voto de Roger Bernat »
Anyssa Kapelusz est maîtresse de conférences en études théâtrales à l’université d’Aix-Marseille. Ses recherches actuelles portent sur les processus de création et les esthétiques du théâtre immédiatement contemporain, qu’elle aborde par l’étude de dispositifs scéniques intermédiaux et interartistiques et des mutations de pratiques spectatrices qu’ils induisent.
Création construite selon un protocole participatif, Pendiente de voto offre au public d’expérimenter les mécanismes qui fondent l’exercice démocratique et d’en éprouver l’efficacité autant que les limites. Il s’agira d’analyser la façon dont ce dispositif « jouable » déplace et met en jeu le principe de représentation – politique et scénique – ainsi que le schème théâtral, au risque de sa désagrégation.
A work created using a participatory protocol, Pendiente de voto lets the audience experiment with the mechanisms underlying the practice of democracy and experience its effectiveness as well as its limits. This article analyzes how this “performable” apparatus shifts and brings into play the political and theatrical principle of representation along with the framework of theater at the risk of disintegrating it.
221Gretchen Schiller, « The impossible-possible of being still »
Gretchen Schiller est chorégraphe et professeure d’arts de la scène à l’université Grenoble Alpes, où elle dirige la Maison de la création. Son travail artistique est diffusé à l’international (Shifting Ground [1999], trajets [2000], trajetsV7 [2007], Falling into place [2012]). Son travail de recherche chorégraphique porte sur la mémoire du corps, la kinesthésie et l’implication épistémique du corps-vécu.
« L’impossible possibilité d’être immobile » problématise la manière dont Yoann Bourgeois (issu du cirque), Catherine Schaub-Abkarian (du théâtre) et Ruth Gibson (de la vidéo danse) jouent l’immobilité sur une scène. L’article met en valeur les perceptions kinesthésiques du corps-vécu des artistes et de leurs méthodes. Il est basé sur des entretiens avec les artistes, ainsi que sur une analyse choréologique de la pensée kinesthésique habitée par l’immobilité.
“The impossible-possible of being still” problematizes the way that Yoann Bourgeois (with a circus background), Catherine Schaub-Abkarian (theater background) and Ruth Gibson (dance video background) present stillness onstage. This article highlights kinesthetic perceptions of the lived body of artists and their methods. It is based on interviews with artists as well as on a choreological analysis of kinesthetic thought that is preoccupied with stillness.
Séverine Ruset, « “An absurd if not impossible transaction”. Entretien avec Tim Etchells (Forced Entertainment) »
Dans cet entretien, Tim Etchells, artiste et auteur britannique, directeur artistique de Forced Entertainment, revient sur la manière dont le collectif joue depuis 32 ans avec ce qu’il désigne comme « l’impossibilité ou l’absurdité de l’entreprise théâtrale », éprouvant pour se faire ses propres limites, ainsi que celles de la forme théâtrale.
In this interview, Tim Etchells, artist and writer based in the UK, leader of the world-renowned performance collective Forced Entertainment, highlights how the latter have been playing for thirty-two years with what he regards as “the impossibility or absurdity of theatre as a venture”, thus stretching both their own possibilities and those of the theatrical form.
- CLIL theme: 4028 -- SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES, LETTRES -- Lettres et Sciences du langage -- Lettres -- Etudes de littérature comparée
- ISBN: 978-2-406-06922-5
- EAN: 9782406069225
- ISSN: 2045-8541
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-06922-5.p.0215
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 06-23-2017
- Periodicity: Biannual
- Language: French