![Économie. Passé, présent, avenir - Introduction à la deuxième section](https://classiques-garnier.com/images/Vignette/BblMS01b.png)
Introduction à la deuxième section
- Publication type: Book chapter
- Book: Économie. Passé, présent, avenir
- Pages: 753 to 755
- Collection: Library of Economics, n° 45
- Series: 1, n° 23
Introduction
à la deuxième section
Dans la section précédente, le regard porté sur le passé a eu pour objet d’analyser le très long processus qui, à partir de la préhistoire, a conduit à l’avènement de l’économique moderne en s’en tenant aux changements qui, dans le déroulement axé du temps, en ont été les principales étapes. La dernière d’entre elles a été localisée en Europe occidentale. Il s’est agi d’une transition de la « société traditionnelle » à la « Nation moderne », transition dont la phase de recomposition débute avec ce qu’on appelle couramment la Renaissance1. Dans cette seconde section, le regard porte sur les changements qui ont eu lieu ailleurs que dans les quelques pays ou régions dans lesquelles cette transition s’est engagée et a abouti, c’est-à-dire dans ce qu’on peut appeler faute de mieux le « reste du monde » et, comme ces changements ne diffèrent significativement de ceux qui s’observent dans les pays dans lesquels cette transition s’engage, on s’en tient à ceux qui ont eu lieu à partir de cette époque de bifurcation. La diffusion de l’économique dans ce « reste du monde » date de ce moment particulier parce qu’il s’agit aussi de celui où commence la première colonisation de certaines parties de celui-ci par les principales puissances européennes (le Portugal, l’Espagne, la Grande-Bretagne et la France). La période en revue coure jusqu’à la fin du xxe siècle, moment où débute la mondialisation économique.
Globalement, le panorama des formes de vie des humains sur terre change profondément au cours de cette période particulière de l’histoire humaine. Au départ (xve siècle), il comprend avant tout un grand nombre de sociétés traditionnelles relevant d’une diversité de modèles. Certaines sont des empires qui contiennent des peuples ou ethnies dont la vie en 754communauté a été en partie maintenue. S’y ajoutent quelques régions continentales ainsi que des iles dans lesquelles la forme de vie relève encore principalement du genre « communauté ». Jusqu’à ce moment, les processus de développement de ces sociétés traditionnelles n’ont pas été très différents les uns des autres, notamment en ce qui concerne les transformations des techniques mobilisées à la ville comme à la campagne (le développement est alors entendu au sens général défini dans le premier chapitre de la seconde partie). La population paysanne y est très largement majoritaire et les conditions de vie des petits paysans sont somme toute assez semblables, notamment entre l’Europe, l’Inde et la Chine. Près de quatre siècles plus tard, autour de 1870, le panorama en question n’est plus du tout le même. Deux groupes se différencient alors nettement. Le premier comprend un petit nombre de sociétés qui ont connu un développement rapide et qui relèvent du modèle de la « Nation moderne ». Ce sont d’abord celles qui se sont constituées en Europe occidentale sur la base de royaumes existants ou à la suite de processus d’unification. S’y ajoutent de nouvelles Nations qui, issues du processus de colonisation du monde par les puissances royales européennes, ont acquis leur indépendance vis-à-vis de ces dernières et dans lesquelles ce processus s’est traduit par l’extermination, ou le cantonnement dans des réserves, des populations autochtones (EUA, Canada, Australie). Le second groupe est loin d’avoir l’homogénéité du premier puisqu’il comprend à la fois (i) des sociétés qui ont échappé à la colonisation sans pour autant entamer un processus marqué de modernisation (exemples : la Chine, le Japon), (ii) des pays qui, soumis un temps à la colonisation, ont acquis leur indépendance au début du xixe siècle (principalement en Amérique latine) et dont les structures sociales, issues de ce passé colonial et marquées par le poids prépondérant des descendants des autochtones dans la population, y déterminent des formes de vie spécifiques faisant obstacle à un développement rapide selon le modèle de la Nation moderne et (iii) des pays ou régions qui font partie des empires coloniaux, pour l’essentiel en Asie et en Afrique.
Le panorama qui s’offre à nos yeux presque un siècle plus tard est encore différent. Trois évènements ont conduit à le modifier : la révolution russe de 1917, les accords de Yalta à la fin de le seconde guerre mondiale, qui conduisent à la constitution d’un bloc socialiste-soviétique en « guerre froide » avec le bloc occidental, et l’accession à l’indépendance 755de la plupart des pays encore colonisés, processus quasiment acquis au début des années soixante. Tous les pays, ou presque, sont formellement des nations faisant partie de l’ONU. Mais ils sont très différents les uns des autres. Un sens précis du terme « développement » s’impose alors : les pays « développés » sont ceux qui se sont industrialisés et dont la modernisation est achevée tandis que les pays « en développement » sont ceux qui tentent de s’industrialiser et de se moderniser. Pour le dire dans les termes de la grille d’analyse mobilisée dans cet ouvrage, ces nations sont engagées dans un processus qui a pour finalité de les conformer au modèle de la « Nation moderne » et donc d’y édifier un ordre économique. Ainsi, la décolonisation qui intervient après la seconde guerre mondiale ouvre l’èredes pays en développement. Au moment où prend fin la période prise en compte (fin du xxe siècle), certaines de ces nations y sont parvenues (exemples : la Chine, la Corée du sud), d’autres sont moins avancées (exemples : l’Indonésie, le Maroc) et d’autres encore beaucoup moins (exemples : le Nigeria, la République démocratique du Congo, le Laos).
Si la diffusion à l’échelle mondiale de l’économique est toujours politiquement territorialisée, le constat observationnel qui s’impose est que ses modalités ont été diverses dans l’espace et le temps. Il ne peut être question d’en faire une analyse fouillée. On s’en tient à traiter de celle qui est impulsée par la colonisation, puis de celle qui se réalise dans un pays « en développement » une fois l’indépendance acquise, c’est-à-dire dans un contexte dont la principale caractéristique institutionnelle est la domination du monde de production industriel.
1 Cette expression s’impose à juste titre parce que le processus de modernisation qu’est cette transition consiste pour une part à faire renaitre des aspects de la cité antique qui, comme cela a été dit lors de la construction de notre fresque historique, la font voir à certains égards comme une forme primitive de « société moderne ».
- CLIL theme: 3340 -- SCIENCES ÉCONOMIQUES -- Histoire économique
- ISBN: 978-2-406-12899-1
- EAN: 9782406128991
- ISSN: 2261-0979
- DOI: 10.48611/isbn.978-2-406-12899-1.p.0753
- Publisher: Classiques Garnier
- Online publication: 06-30-2022
- Language: French