Annexe I San Cristobal de las Casas, au Sud du Mexique, une économie tertiaire en développement
- Type de publication : Chapitre d’ouvrage
- Ouvrage : De paysans à techniciens. Sociohistoire d’une qualification scolaire et sociale au Mexique
- Pages : 301 à 303
- Collection : Histoire des techniques, n° 31
Annexe I
San Cristobal de las Casas, au Sud du Mexique,
une économie tertiaire en développement
San Cristobal de las Casas désigne à la fois la ville et le département (municipio) dont elle est la capitale. Elle se situe au sud du Mexique, dans la zone montagneuse de l’état du Chiapas à 2 200 m d’altitude et compte 215 874 habitants (INEGI 2022b), parmi lesquels 40 % revendiquent l’appartenance à l’une de 7 ethnies indiennes qui y cohabitent. San Cristobal de las Casas est situé à environ 100 kilomètres de la ville de Tuxtla Gutiérrez, capitale de la région.
L’une des régions les plus défavorisées du Mexique, le Chiapas a l’un des plus bas produits intérieurs bruts (PIB) du pays : le PIB moyen de la population s’élève à 3 302 dollars américains per capita par an, tandis que la moyenne de l’ensemble de la population mexicaine est de 7 500 dollars américains per capita par an. En 2020, près de 80 % des habitants de cet État vivent en condition de pauvreté, dont 30 % en pauvreté extrême. Les conditions de pauvreté les plus extrêmes se concentrent particulièrement chez les Indiens, tandis que la concentration de la richesse se fait entre métis et étrangers. Même si la ville de San Cristobal de las Casas observe, elle aussi, un fort taux de pauvreté, elle profite du développement du secteur du tourisme, grâce notamment à la présence des communauté indiennes d’origine maya et des sites archéologiques remarquables. Les habitants de la ville disposent d’un PIB annuel moyen de 5 073 dollars américains, supérieur à la moyenne de l’État. Cependant, ce développement ne bénéficie pas à la majorité de la population, à cause de la forte concentration de la richesse dans une poignée de familles de la ville.
Pôle urbain où sont concentrés les services sociaux et administratifs d’une population très dispersée, la ville de San Cristobal de las Casas accueille de fortes migrations rurales. La population de cette ville a été multipliée par trois entre 1980 et l’an 2000, à cause du renforcement du 302phénomène de l’exode rural vers les villes qui s’observe dans toutes les régions mexicaines, mais aussi en raison des nombreux conflits politiques et religieux qui divisent la population de la région depuis des décennies.
Depuis l’époque de la Colonie espagnole, la ville de San Cristobal de las Casas a été la métropole d’une population très hétérogène où convergent les habitants de près de 100 localités rurales, tant pour des raisons administratives, économiques ou commerciales que pour des raisons éducatives, culturelles ou religieuses. Outre les habitants métis majoritaires, au sein de la ville cohabitent différentes ethnies d’origine maya et une partie de la population d’origine étrangère d’environ 20 nationalités différentes. L’architecture coloniale, les traditions de la ville ainsi que les différents sites et villages mayas qui l’entourent font de San Cristobal de las Casas une destination touristique prisée tant par les Mexicains que par les étrangers. De ce fait, l’une des principales sources de revenus est le tourisme.
L’histoire coloniale de la ville, marquée par les fortes discriminations envers les Indiens, oriente encore aujourd’hui les pratiques d’embauche vers la préférence d’un personnel peu ou pas qualifié car moins coûteux. Avec l’un des taux de population juvénile les plus élevés du Mexique, 30 % de la population ayant entre 15 et 29 ans, les jeunes constituent une partie de la force de travail non négligeable. Peu ou pas diplômés, la plupart des jeunes issus des milieux défavorisés tentent une première insertion professionnelle avant l’âge de 18 ans. Leur taux de scolarisation est l’un des plus bas au Mexique.
La ville de San Cristobal de las Casas se caractérise par le développement d’une économie tertiaire, fondée sur le tourisme, les services à la population, le commerce local et un système de transports vers les nombreuses communes montagneuses du Chiapas (Van den Berghe 1994). Une agriculture de subsistance persiste dans la périphérie de la ville, où les paysans cultivent principalement du maïs, base de l’alimentation locale. La part des terres agricoles et d’exploitation forestière a nettement diminué depuis les années 1980, à cause de la construction des nouveaux lotissements, les uns en situation régulière, les autres non, afin de faire face à l’arrivée des Indiens expulsés de leur village pour des raisons politiques ou religieuses.
La population économiquement active (PEA), soit la part de la population qui est occupée ou qui cherche du travail dans le secteur 303formel de l’économie est de 40 %, dont 63,3 % d’hommes et 36,7 % de femmes. Près de 80 % des salariés gagnent le salaire minimum, l’un des plus bas parmi les pays de l’OCDE. Seulement 35,5 % des travailleurs gagnent davantage. Malgré l’abondance de ressources naturelles, l’activité industrielle y est rare. La faible production forestière de la ville est assurée par quelques petits producteurs qui vendent essentiellement du bois brut, c’est-à-dire sans transformation industrielle sophistiquée (Administración municipal 2013). L’implantation de grands groupes commerciaux, tels que Coca-Cola ou Chedraui, a contribué à dynamiser l’économie locale, mais n’a pas amélioré les conditions de vie de la population, car le salaire y est généralement le minimum. Plus de 66 % de la population économiquement active vit en condition de pauvreté malgré le fait d’être salariée (CONAPO 2020). Environ 44 % des habitants ne disposent pas de services médicaux.
Le tourisme fait vivre une grande partie de la population, bien que les conditions de travail ne garantissent pas non plus une mobilité sociale ascendante des familles défavorisées. Que ce soit directement ou indirectement, le tourisme constitue la source principale de revenus de la population. Le travail dans le secteur « formel » se concentre en hôtels, restaurants, commerces, agences de voyages et commerces divers ainsi qu’au sein de la municipalité, principal employeur de la ville dans le secteur formel. En effet, le secteur de services publics, c’est-à-dire les hôpitaux, les services administratifs fédéraux, régionaux ou municipaux, les institutions éducatives, les espaces culturels, les travaux publics, etc., est une source d’emplois non négligeable. La municipalité à elle seule emploie 1 239 individus, dont 67 % sont des hommes. Un peu moins de la moitié de ces employés n’ont qu’un niveau scolaire de primaire, 15 % de collège, 15 % de bachelier ou de technicien. Seulement 20 % des employés municipaux ont fait des études supérieures (Administración municipal, ibid., p. 88). Le travail dans le secteur « informel » de l’économie, principalement les activités liées à la production et vente artisanale gérées par des femmes, fait vivre près de 30 % des familles.
- Thème CLIL : 3378 -- HISTOIRE -- Histoire générale et thématique
- ISBN : 978-2-406-16033-5
- EAN : 9782406160335
- ISSN : 2264-458X
- DOI : 10.48611/isbn.978-2-406-16033-5.p.0301
- Éditeur : Classiques Garnier
- Mise en ligne : 03/04/2024
- Langue : Français